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Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Bannie11Bienvenue sur le Forum catholique
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Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par lysiane Dim 3 Jan - 22:13

C'est un long texte , il est tard 22:07 mais je prendrai le temps de le lire demain et avec plaisir c'est tellement passionnant ce que dit Maria. Elle décrit même des lieux qu'elle ne connait pas et qui ne sont pas écrit dans la bible et  qui existent pourtant et vérifier par les archéologues et les historiens , ou aurait' elle trouvait tout cela , elle ne se levait plus et ne lisait que sa bible ."" L'évangile tel qu'il m'a était révéler "" mais je te crois cher Maria 🙏🙏➕➕🧡🧡


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Le nom de l'éternel est une  tour forte, le juste s'y réfugie et se trouve en sureté

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 4 Jan - 18:29

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

485. L’arrivée avec les apôtres à Béthanie

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 180.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 485.

Le samedi 31 août 1946.

Mercredi 12 septembre 29
Béthanie


485.1 Toutes les nuances de vert se présentent à la vue dans la campagne qui entoure Béthanie, dès que l’on a franchi le sommet de la colline et que l’on pose le pied sur son versant sud, qui descend par une route en zigzag vers la petite ville. Le vert argenté des oliviers, le vert cru des pommiers, parsemé ici et là par les premières feuilles jaunes, le vert rare et plus jaunâtre des vignes, le vert foncé et compact des chênes et des caroubiers, mêlés au marron des champs déjà labourés et qui attendent la semence, et au vert tendre des prés où pousse une herbe nouvelle et des jardins fertiles, forment une sorte de tapis multicolore aux yeux de celui qui domine Béthanie et ses alentours. Et plus en bas, se détachant sur tout ce vert, les pinceaux des palmiers dattiers, toujours élégants, qui rappellent l’Orient.

La petite ville d’Ensémès, groupée au milieu de la verdure et illuminée par le soleil qui va bientôt se coucher, est bien vite franchie ainsi que la source abondante qui se trouve un peu au nord de l’endroit où commence Béthanie, puis voilà les premières maisons…

La route a été longue, fatigante, mais, malgré leur épuisement, la seule proximité de la maison amie de Béthanie semble rendre des forces aux pélerins.

La petite ville est paisible, presque vide. Beaucoup d’habitants doivent être déjà à Jérusalem pour la fête. Aussi Jésus passe-t-il inaperçu jusque dans le voisinage de la maison de Lazare. C’est seulement lorsqu’il arrive près du jardin en friche de la maison, où il y avait tant d’échassiers, qu’il rencontre deux hommes. Ils le reconnaissent, le saluent, puis lui demandent :

« Tu vas chez Lazare, Maître ? Tu fais bien. Il est si malade… Nous en revenons après lui avoir apporté le lait de nos ânesses, la seule nourriture que son estomac digère encore avec un peu de jus de fruits et de miel. Ses sœurs ne cessent de pleurer, épuisées par les veilles et la douleur… Et lui ne fait que te désirer. Je crois qu’il serait déjà mort, si le désir de te revoir ne l’avait aidé à vivre jusqu’ici.

– J’y vais de ce pas. Que Dieu soit avec vous.

– Et… tu vas le guérir ? demandent-ils avec curiosité.

– La volonté de Dieu se manifestera sur lui, et avec elle la puissance du Seigneur » répond Jésus, laissant les deux hommes perplexes.

Il se hâte vers le portail du jardin. 485.2 Un serviteur l’aperçoit et court lui ouvrir, mais sans aucun cri de joie. Sitôt le portail ouvert, il s’agenouille pour vénérer Jésus, et dit tristement :

« Tu tombes bien, Seigneur ! Puisse ta venue être un signe de joie pour cette maison éplorée. Lazare, mon maître…

– Je le sais. Résignez-vous tous à la volonté du Seigneur. Il récompensera le sacrifice de votre volonté à la sienne. Va appeler Marthe et Marie. Je les attends dans le jardin. »

Le serviteur s’éloigne en courant et Jésus le suit lentement après avoir dit à ses apôtres :

« Je vais auprès de Lazare. Reposez-vous, vous en avez bien besoin… »

Les deux sœurs se présentent sur le seuil, et elles ont du mal à reconnaître le Seigneur tant leurs yeux sont fatigués par les veilles et les larmes, et le soleil qui les éblouit augmente leur difficulté à le voir. Pendant ce temps, d’autres serviteurs sortent par une porte secondaire à la rencontre des apôtres pour les emmener avec eux.

« Marthe ! Marie ! C’est moi. Vous ne me reconnaissez pas ?

– Oh ! le Maître ! » s’écrient les deux sœurs.

Elles s’élancent vers lui et se jettent à ses pieds, étouffant difficilement leurs sanglots. Baisers et larmes tombent sur les pieds de Jésus, comme autrefois dans la maison de Simon le pharisien.

Mais, cette fois, Jésus ne reste pas raide pour recevoir la pluie de larmes de Marthe et de Marie. Maintenant, il se penche et touche leurs têtes, les caresse et les bénit par ce geste, puis les force à se lever :

« Venez. Allons sous la tonnelle des jasmins. Pouvez-vous quitter Lazare ? »

Plus par signes que par paroles, tout éplorées, elles disent que oui. Et ils vont sous le pavillon ombragé où, sous le feuillage fourni et sombre, quelque tenace étoile de jasmin blanchit et embaume.

485.3 « Parlez donc….

– Oh ! Maître ! Tu arrives dans une maison bien triste ! Nous sommes accablées de douleur. Quand le serviteur nous a dit : “ II y a quelqu’un qui vous demande ”, nous n’avons pas pensé à toi. Quand nous t’avons vu, nous ne t’avons pas reconnu. Mais tu vois ? Nos yeux sont brûlés par les larmes. Lazare se meurt !… »

Et leurs sanglots reprennent, interrompant les paroles des deux sœurs, qui ont parlé alternativement.

« Et je suis venu…

– Pour le guérir ? Oh ! mon Seigneur ! dit Marie, rayonnante d’espoir à travers ses larmes.

– Je l’avais bien dit ! Si le Maître vient… dit Marthe en joignant les mains en un geste de joie.

– Ah ! Marthe ! Marthe ! Que sais-tu des opérations et des décrets de Dieu ?

– Hélas, Maître ! Tu ne vas pas le guérir ?! s’écrient-elles ensemble en retombant dans leur peine.

– Je vous dis : ayez une foi sans bornes dans le Seigneur. Gardez-la en dépit de toute insinuation et de tout événement, et vous verrez de grandes choses quand votre cœur n’aura plus de raison de les espérer. Que dit Lazare ?

– Il fait écho à tes paroles. Il nous dit : “ Ne doutez pas de la bonté et de la puissance de Dieu. Quoi qu’il arrive, il interviendra pour votre bien et le mien, et pour le bien d’un grand nombre, de tous ceux qui, comme moi et comme vous, sauront rester fidèles au Seigneur. ” Et quand il est en mesure de le faire, il nous explique les Ecritures ; il ne lit plus qu’elles désormais, et il nous parle de toi ; il dit qu’il meurt à une époque heureuse, parce que l’ère de la paix et du pardon est commencée. Mais tu l’entendras… car il tient aussi d’autres propos qui nous font pleurer, même plus que pour notre frère… dit Marthe.

– Viens, Seigneur. Chaque minute qui passe est dérobée à l’espoir de Lazare. Il comptait les heures… Il disait : “ Et pourtant, pour la fête, il sera à Jérusalem et il viendra… ” Nous, nous qui savons beaucoup de choses que nous ne racontons pas à Lazare pour ne pas lui faire de peine, nous avions moins d’espoir, car nous pensions que tu éviterais de venir pour échapper à ceux qui te cherchent… C’était ce que pensait Marthe. Moi pas, car… si j’étais à ta place, je défierais mes ennemis. Je ne suis pas de celles qui ont peur des hommes, moi ! Et maintenant, je n’ai même plus peur de Dieu. Je sais combien il est bon pour les âmes repenties… » dit Marie avec un regard plein d’amour.

— Tu n’as peur de rien, Marie ? demande Jésus.

– Du péché… et de moi-même… J’ai toujours peur de retomber dans le mal. Je pense que Satan doit me haïr beaucoup.

– Tu as raison. Tu es une des âmes que Satan hait le plus, mais tu es aussi l’une des plus aimées de Dieu. Souviens-toi de cela.

– Oh ! je m’en souviens ! Ce souvenir fait ma force ! Je me rappelle ce que tu as dit dans la maison de Simon : “ II lui est beaucoup pardonné, parce qu’elle a beaucoup aimé ”, et à moi : “ Tes péchés te sont pardonnés. Ta foi t’a sauvée. Va en paix. ” Tu as dit : “ tes péchés ”. Non pas plusieurs, tous. Et alors je pense que tu m’as aimée, mon Dieu, sans mesure. Or, si ma pauvre foi d’alors, telle qu’elle pouvait surgir dans une âme appesantie par les fautes, a tant obtenu de toi, ma foi de maintenant ne pourra-t-elle pas me défendre du mal ?

– Oui, Marie. Sois vigilante et surveille-toi, toi-même. C’est humilité et prudence. Mais aie foi dans le Seigneur : il est avec toi. »

485.4 Ils entrent dans la maison. Marthe va trouver son frère. Marie voudrait servir Jésus, mais il veut d’abord aller voir Lazare. Ils pénètrent dans la pièce à demi obscure, où se consomme le sacrifice.

« Maître !

– Mon ami ! »

Les bras squelettiques de Lazare se lèvent, ceux de Jésus se penchent pour étreindre longuement le corps de son ami affaibli. Puis Jésus recouche le malade sur les oreillers et le contemple avec pitié. Mais Lazare sourit : il est heureux. Dans son visage ravagé, ne resplendissent vivants que ses yeux enfoncés, mais rendus lumineux par la joie de voir Jésus à ses côtés.

« Tu vois ? Je suis venu, et pour rester beaucoup avec toi.

– Ah ! tu ne le peux, Seigneur. On ne me dit pas tout, mais j’en sais assez pour te dire que cela t’est impossible. A la peine qu’ils te causent, ils ajoutent la mienne, ma part, en ne me laissant pas expirer dans tes bras. Mais, moi qui t’aime, je ne puis par égoïsme te retenir près de moi, en danger. Pour toi… j’ai déjà pourvu… Tu dois changer d’endroit sans cesse. Toutes mes maisons te sont ouvertes. Les gardiens ont reçu des ordres, de même que les intendants de mes champs. Mais ne va pas séjourner à Gethsémani, l’endroit est très surveillé. Je parle de la maison. Car dans les oliviers, surtout ceux du haut, tu peux y aller et par plusieurs chemins, sans qu’ils s’en doutent. Tu sais que Marziam est déjà ici ? Il a été interrogé par certains alors qu’il était au pressoir avec Marc. Ils voulaient apprendre où tu étais, si tu venais. L’enfant a très bien répondu : “ Il est juif, donc il viendra. Par où, je ne sais pas, puisque je l’ai quitté au lac Mérom. ” Ainsi, il les a empêchés de te dire pécheur et il n’a pas menti.

– Je te remercie, Lazare. Je t’écouterai, mais nous nous verrons souvent tout de même. »

Il le contemple encore.

« Tu me regardes, Maître ? Tu vois à quoi je suis réduit ? Comme un arbre qui se dépouille de ses feuilles à l’automne, je me dépouille d’heure en heure de ma chair, de mes forces et d’heures de vie. Mais je dis la vérité quand j’affirme que, si je regrette de ne pas vivre assez pour voir ton triomphe, je suis néanmoins heureux de m’en aller pour ne pas voir, impuissant comme je le suis pour la freiner, la haine qui grandit autour de toi.

– Tu n’es pas impuissant ; tu ne l’es jamais. Tu pourvois aux besoins de ton Ami, avant même qu’il n’arrive. J’ai deux maisons de paix, et je pourrais dire, également chères : celle de Nazareth, et celle-ci. Si là-bas se trouve ma Mère — l’amour céleste, pour ainsi dire aussi grand que le Ciel pour le Fils de Dieu —, ici j’ai l’amour des hommes pour le Fils de l’homme [2], l’amour amical, plein de foi et de vénération… Merci, mes amis!

– Ta Mère ne viendra jamais ?

– Au début du printemps.

– Ah ! dans ce cas, je ne la verrai plus…

– Si, tu la verras, c’est moi qui te le dis. Tu dois me croire.

– Je crois à tout, Seigneur, même à ce que les faits démentent.

– Où se trouve Marziam ?

– A Jérusalem avec les disciples, mais il rentre ici ce soir, d’ici peu, désormais. Et tes apôtres, ils ne sont pas avec toi ?

– Ils sont à côté avec Maximin, qui les restaure de leur fatigue et de leur épuisement.

– Vous avez beaucoup marché ?

– Beaucoup, sans arrêt. Je te raconterai… Pour l’instant, repose-toi. Je te bénis. »

Et Jésus le bénit et se retire.

485.5 Les apôtres sont maintenant avec Marziam et presque tous les bergers, qui les informent de l’insistance des pharisiens à obtenir des renseignements sur Jésus. Ils disent que cela a éveillé leurs soupçons, de sorte que leurs disciples ont pensé à monter la garde sur toutes les routes qui conduisent à l’intérieur de Jérusalem pour avertir le Maître.

« En effet, rapporte Isaac, nous sommes disséminés sur toutes les routes à quelques stades des Portes, et à tour de rôle nous passons une nuit ici. C’est notre tour.

– Maître, dit en riant Judas, ils racontent qu’à la porte de Jaffa il y avait la moitié du Sanhédrin : ils se disputaient, car certains rappelaient mes paroles d’Engannim [1] ; d’autres juraient avoir appris que tu avais été à Dotaïn ; d’autres, enfin, disaient t’avoir vu près d’Ephraïm, et cela les rendait furieux de ne pas savoir où tu étais passé… »

Et il rit du bon tour qu’il a joué aux ennemis de Jésus.

« Demain, ils me verront.

– Non, demain, c’est nous qui y allons. C’est déjà convenu : tous en groupe, et en nous mettant bien en vue.

– Je ne veux pas. Tu mentirais.

– Je te jure que je ne mentirai pas. S’ils ne me disent rien, je ne leur dis rien. S’ils nous demandent si tu es avec nous, je répliquerai : “ Ne voyez-vous pas qu’il n’est pas là ? ”, et s’ils veulent savoir où tu te trouves, je répondrai : “ Cherchez-le vous-mêmes. Comment voulez-vous que je sache où est le Maître, à ce moment précis ? ” En effet, je ne pourrais certes pas savoir si tu es à la maison, ici, ou dans les vergers, ou bien je ne sais où.

– Judas, Judas, je t’ai dit…

– Et moi, je te dis que tu as raison. Mais ce ne sera pas toujours de ma part simplicité de colombe, mais prudence de serpent. Toi, tu es la colombe, moi le serpent. Et ensemble nous formerons cette perfection que tu as enseignée. »

Il prend le ton qu’a Jésus quand il instruit, et imite le Maître à la perfection :

« Je vous envoie comme des brebis parmi les loups. Soyez donc prudents comme les serpents et simples comme les colombes… Ne vous souciez pas de ce que vous devez répondre, car les mots vous seront mis sur les lèvres, et ce n’est pas vous qui parlez, mais l’Esprit en vous… Quand on vous persécutera dans une ville, fuyez dans une autre jusqu’à ce qu’arrive le Règne du Fils de l’homme… ” Je rappelle tes paroles et c’est le moment de les appliquer.

– Je ne les ai pas formulées ainsi, et pas celles-là seulement, objecte Jésus.

– Pour le moment, il ne faut se rappeler que celles-là, et les formuler ainsi. Je sais ce que tu veux dire. Mais si la foi en toi ne s’est pas bien établie — et c’est une pierre dans ton Royaume — il ne faut pas se livrer aux ennemis. Ensuite… nous dirons et ferons le reste… »

L’expression de Judas est si brillante d’intelligence et d’espièglerie, que, sauf Jésus qui soupire, il conquiert tout le monde. C’est vraiment le séducteur auquel rien ne manque pour triompher des hommes.

Jésus, préoccupé, réfléchit… Mais il se rend, en remarquant que la prévoyance de Judas n’est pas entièrement mauvaise. Judas expose triomphalement tout son plan.

« Nous irons donc demain et après-demain jusqu’au lendemain du sabbat, et nous resterons dans une cabane de branchages dans la vallée du Cédron, en parfaits juifs. Eux se lasseront de t’attendre… et alors tu viendras. En attendant, tu resteras ici, tranquille, à te reposer. Tu es épuisé, mon Maître, et nous ne le voulons pas. Une fois les portes closes, l’un de nous viendra te relater ce qu’ils font. Ah ! comme ce sera beau de les voir déçus ! »

Tous sont d’accord, et Jésus n’oppose pas de résistance. Ce sont peut-être son extrême fatigue, ou le désir de réconforter Lazare, de lui apporter tout le soutien possible avant la lutte finale, qui le décident à céder. Peut-être aussi le réel besoin de se garder libre tant que ne sont pas accomplies toutes les œuvres nécessaires pour qu’Israël ne doute pas de sa Nature avant de le juger comme coupable… Il dit, ce qui est sûr :

« Qu’il en soit ainsi. Mais ne cherchez pas querelle, et évitez les mensonges. Taisez-vous plutôt que de mentir. Allons maintenant, car Marthe nous appelle. Viens, Marziam. Je te trouve meilleure mine… »

Et il s’éloigne en parlant, un bras autour des épaules du tout jeune disciple.




[1] Cf. 7.176 / EMV 481  : Judas brouille les pistes des pharisiens lancés à la poursuite de Jésus.
[2] Discours pour l'envoi en mission des apôtres, au mois de juillet de l'année précédente ? Cf. 4.128 / EMV 265 




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-180.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/l-arrivee-avec-les-apotres-a-bethanie.html
[/quote]
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 7 Jan - 21:50

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

486. Au Temple pour la fête des Tentes. Discours sur la nature du Royaume.

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 181.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 486.

Le mardi 3 septembre 1946.

Du dimanche 16 septembre au mardi 18 septembre 29
Jérusalem


      486.1 Jésus entre dans le Temple, en compagnie de ses apôtres et de très nombreux disciples que je connais au moins de vue. Tout derrière, mais déjà unis au groupe, comme s’ils voulaient montrer qu’ils désirent être considérés comme des disciples du Maître, je vois des visages nouveaux, tous inconnus, hormis ce finaud de Grec venu d’Antioche [1]. Il discute avec les autres, peut-être des païens comme lui, et alors que Jésus et les disciples se dirigent vers la Cour des Juifs, lui, et ceux qui parlent avec lui, s’arrêtent dans la Cour des Païens.

      Naturellement, l’entrée de Jésus dans le Temple bondé ne passe pas inaperçue. Un nouveau murmure s’élève comme d’un essaim qu’on a dérangé, et couvre les voix des docteurs qui donnent leurs leçons sous le Portique des Païens. Les enseignements sont suspendus comme par enchantement, et les élèves des scribes courent dans tous les sens porter la nouvelle de l’arrivée de Jésus de sorte que, quand il pénètre dans la seconde enceinte où se trouve l’Atrium des Juifs, plusieurs pharisiens, scribes et prêtres se sont déjà groupés à l’affût. Mais tant qu’il prie, ils ne lui disent rien et ne s’approchent même pas de lui. Ils se contentent de le surveiller…

      Puis Jésus revient au Portique des Païens, et ils en font autant. La troupe des malintentionnés augmente comme celle des curieux et des bien intentionnés. Et des murmures à mi-voix courent. De temps à autre, une remarque est faite à haute voix : “ Vous voyez bien qu’il est venu ? C’est un juste : il ne pouvait manquer la fête. ” Ou bien : “ Qu’est-il venu faire ? Dévoyer encore plus le peuple? ” Ou encore : “ Vous êtes contents, maintenant ? Vous voyez à présent où il est ? Vous l’avez tant demandé ! ”

      Voix isolées et aussitôt éteintes, étouffées dans la gorge par les regards explicites des disciples ou des partisans qui, par leur amour même, menacent les ennemis haineux. Voix ironiques, fielleuses, qui lancent une giclée de venin et se calment par crainte du peuple. Puis vient le silence de cette foule, après une manifestation significative en faveur du Maître, car elle redoute les représailles des puissants. La peur réciproque règne…

      Le seul à ne rien craindre, c’est Jésus. Il marche paisiblement, avec majesté, vers le lieu où il veut aller, un peu absorbé, et pourtant prêt à sortir de sa concentration pour caresser un enfant qu’une mère lui présente, ou pour sourire à un vieillard qui le salue en le bénissant.

      486.2 Dans le Portique des Païens se trouve Gamaliel, debout au milieu d’un groupe d’élèves. Les bras croisés, dans son splendide vêtement très ample et d’une blancheur éclatante — il paraît d’ailleurs d’autant plus blanc qu’il se détache sur le rouge foncé de l’épais tapis étendu sur le sol à cet endroit —, il semble réfléchir, la tête un peu inclinée, et ne pas s’intéresser à ce qui se passe. Parmi ses disciples, au contraire, c’est l’agitation que provoque la plus grande curiosité. Un élève, petit de taille, va jusqu’à monter sur un haut tabouret pour mieux voir.

      Mais quand Jésus arrive à la hauteur de Gamaliel, le rabbi lève la tête et ses yeux profonds, sous son front de penseur, se fixent un instant sur le visage paisible de Jésus. C’est un regard scrutateur, angoissant et angoissé. Jésus le sent et se retourne. Il le regarde lui aussi. Ce sont deux éclairs : des yeux très noirs et des yeux de saphir s’entrecroisent, le regard de Jésus, ouvert, doux, qui se laisse scruter, et celui de Gamaliel impénétrable, qui essaie de connaître et de décrypter le mystère de la vérité — pour lui, ce Rabbi galiléen est un mystère — mais est pharisaïquement jaloux de sa pensée, de sorte qu’il se ferme à toute recherche qui ne soit pas de Dieu. Tout cela se passe en un instant. Puis Jésus poursuit son chemin, et le rabbi Gamaliel baisse de nouveau la tête, sourd à toutes les questions franches, impatientes, de certains de ceux qui l’entourent, ou sournoises et haineuses des autres : “ C’est lui, maître ? Qu’en dis-tu ? ”, “ Bien ! Quel est ton jugement ? Qui est-il ? ”

      Jésus se dirige vers la place qu’il s’est choisie. Oh ! Il n’y a pas de tapis sous ses pieds ! Il n’est même pas sous le portique. Il est simplement adossé à une colonne, debout sur la marche la plus haute, au fond du portique. C’est la moins bonne place. Tout autour, les apôtres, les disciples, des partisans, des curieux. Plus loin, des pharisiens, des scribes, des prêtres, des rabbis. Gamaliel ne quitte pas sa place.

      486.3 Jésus se met à prêcher pour la centième fois la venue et la préparation du Royaume de Dieu. Et je pourrais dire qu’il répète avec plus de puissance les mêmes idées exposées, presque à la même place, vingt ans auparavant [2]. Il parle de la prophétie de Daniel [3], du Précurseur prédit par les prophètes, il rappelle l’étoile des Mages, le massacre des Innocents. Et, après ces préambules destinés à montrer les signes de la venue du Christ sur la terre, il cite, pour confirmer sa venue, les signes actuels qui accompagnent le Christ enseignant, comme plus tôt les autres accompagnaient la venue du Christ incarné : il rappelle la contradiction qui l’accompagne, la mort du Précurseur, et les miracles qui se produisent continuellement, confirmant que Dieu est avec son Christ. Il n’attaque jamais ses adversaires, il semble ne pas même les voir. Il parle pour confirmer dans la foi ses disciples, pour éclairer sur la vérité ceux qui sont dans la nuit, sans qu’il y ait faute de leur part…

      Une voix désagréable part de l’extrémité de la foule :

      « Comment Dieu peut-il être dans tes miracles s’ils se produisent un jour défendu ? Pas plus tard qu’hier [4], tu as guéri un lépreux sur la route de Bethphagé. »

      Jésus regarde l’interrupteur sans répondre. Il continue à parler de la libération de la puissance qui domine les hommes, et de l’instauration du Royaume du Christ, éternel, invincible, glorieux, parfait.

      « Et c’est pour quand ? » demande en ricanant un scribe, avant d’ajouter : « Nous savons bien que tu veux te faire roi, mais un roi tel que toi ferait la ruine d’Israël. Où sont tes pouvoirs de roi ? Où sont tes troupes, tous tes trésors, tes alliances ? Tu n’es qu’un fou ! »

      Beaucoup de ses semblables approuvent avec un rire méprisant. Un pharisien dit :

      486.4 « N’agissez pas ainsi, sinon nous ne saurons pas ce qu’il entend par royaume, quelles lois aura ce royaume, comment il se présentera. Eh quoi ! Est-ce donc en un seul jour que l’ancien royaume d’Israël devint parfait comme au temps de David et de Salomon ? Ne vous rappelez-vous pas combien d’incertitudes et de périodes obscures il y eut avant la splendeur royale du roi parfait ? Pour avoir le premier roi, il fallut d’abord former l’homme de Dieu qui devait l’oindre, et par conséquent enlever sa stérilité à Anne d’Elqana [5] et lui inspirer d’offrir le fruit de son sein. Méditez le cantique d’Anne. C’est une instruction pour notre dureté et notre aveuglement : “ Personne n’est saint comme le Seigneur… Ne multipliez pas par arrogance les paroles hautaines… C’est Yahvé qui fait mourir et vivre… Il relève le pauvre… Il rend sûrs les pas de ses saints, et les impies se tairont car ce n’est pas par sa propre force que l’homme triomphe, mais par celle qui lui vient de Dieu. ” [6] Rappelez-vous ! “ Yahvé jugera les confins de la terre, il donnera l’empire à son roi et il exaltera la puissance de son Christ. ” [7] Le Christ des prophéties ne devait-il pas être de la race de David ? Dans ce cas, toutes les préparations, à partir de la naissance de Samuel, ne sont-elles pas des préalables au règne du Christ ? Toi, Maître, ne descends-tu pas de David, né à Bethléem? demande-t-il enfin, directement à Jésus.

      – Tu l’as dit, répond brièvement Jésus.

      – Alors satisfais nos intelligences. Tu vois que le silence n’est pas une bonne méthode, puisqu’il fomente les brumes du doute dans les cœurs.

      – Non pas du doute, mais de l’orgueil, ce qui est plus grave encore.

      – Comment ? Douter de toi est moins grave que d’être orgueilleux ?

      – Oui : l’orgueil est la luxure de l’intelligence et c’est le péché le plus grand, car c’est le péché même de Lucifer. Dieu pardonne bien des fautes et sa lumière resplendit avec amour pour éclairer les ignorances et dissiper les doutes. Mais il ne pardonne pas à l’orgueil qui se moque de lui, en se prétendant plus grand que lui.

      – Qui, parmi nous, dit que Dieu est plus petit que nous ? Nous ne blasphémons pas… s’écrient plusieurs.

      – Vous ne l’affirmez pas par votre bouche, mais par vos actes. Vous voulez dire à Dieu : “ Il n’est pas possible que le Christ soit un Galiléen, un homme du peuple. Il n’est pas possible que ce soit lui. ” Or qu’est-ce qui est impossible à Dieu ? »

      La voix de Jésus est un tonnerre. Si, au début, son aspect était plutôt humble quand il était appuyé comme un mendiant à sa colonne, il se redresse maintenant, s’écarte du pilastre, relève majestueusement la tête et son regard darde la foule. Il se tient encore sur la marche, mais c’est comme s’il était en haut d’un trône, tant est royale son attitude.

      Les gens reculent, comme effrayés, et personne ne répond à la dernière question.

      486.5 Puis un rabbi, petit, ridé, à l’aspect maussade comme l’est certainement son âme, demande, en faisant précéder sa question d’un rire faux et éraillé :

      « Il faut être à deux pour céder à la luxure. Avec qui l’intelligence y cède-t-elle, puisqu’elle n’a pas de corps ? Comment donc peut-elle pécher par luxure ? A qui, si elle est incorporelle, s’unit-elle pour pécher ? »

      Et il s’esclaffe, en laissant traîner ses mots et son rire.

      « A qui ? A Satan. L’intelligence de l’orgueilleux commet la fornication avec Satan contre Dieu et contre l’amour.

      – Et Lucifer, avec qui a-t-il forniqué pour devenir Satan, si Satan n’existait pas encore ?

      – Avec lui-même, avec sa propre pensée intelligente et désordonnée. Qu’est-ce que la luxure, scribe ?

      – Mais… je te l’ai dit ! Qui ignore ce qu’est la luxure ? Nous en avons tous fait l’expérience…

      – Tu n’es pas un rabbi sage, puisque tu ne connais pas la nature véritable de ce péché universel, triple fruit du Mal. Comme le Père, le Fils et l’Esprit Saint sont la triple forme de l’Amour. La luxure, c’est le désordre, scribe : un désordre guidé par une intelligence libre et consciente, qui sait que son désir est mauvais, mais veut le satisfaire quand même. La luxure est désordre et violence contre les lois naturelles, contre la justice et l’amour envers Dieu, envers nous-mêmes, envers nos frères. Toute luxure : celle de la chair comme celle qui vise les richesses et les pouvoirs de la terre, comme celle des hommes qui voudraient empêcher le Christ d’accomplir sa mission, parce qu’ils intriguent avec une ambition démesurée qui redoute en tremblant que je la frappe. »

      Un grand murmure parcourt la foule. Gamaliel, resté seul sur son tapis, relève la tête et jette un regard aigu sur Jésus.

      486.6 Le pharisien de tout à l’heure revient à la charge :

      « Mais quand donc viendra le Règne de Dieu ? Tu n’as pas répondu…

      – Quand le Christ sera sur le trône qu’Israël lui prépare, plus haut que tout trône, plus haut que ce Temple lui-même.

      – Mais où est-on en train de le préparer ? Il n’y a aucun apparat… Se peut-il que Rome laisse Israël se relever ? Les aigles sont-elles donc devenues aveugles pour ne pas voir ce qui se trame ?

      – Le Royaume de Dieu ne vient pas avec apparat. Seul l’œil de Dieu le voit se former, parce qu’il lit à l’intérieur des hommes. Aussi, n’allez pas chercher où se trouve ce Royaume, où il se prépare. Et ne croyez pas ceux qui vous disent : “ On conjure en Batanée, on conjure dans les cavernes du désert d’Engaddi, on conjure sur les rives de la mer. ” [8] Le Royaume de Dieu est en vous, dans votre âme qui accueille la Loi venue des Cieux comme la loi de la vraie Patrie, la loi dont la pratique rend citoyen du Royaume. C’est pour cela qu’avant moi, Jean est venu préparer les chemins des cœurs par lesquels devait pénétrer en eux ma Doctrine. C’est par la pénitence que se sont préparés les chemins, c’est par l’amour que le Royaume se dressera et que tombera l’esclavage du péché qui interdit aux hommes le Royaume des Cieux.

      – Vraiment, cet homme est grand ! Et vous dites que c’est un artisan ? » dit tout haut quelqu’un qui écoutait attentivement.

      Et d’autres, juifs d’après leurs vêtements, et peut-être incités par les ennemis de Jésus, se regardent, interdits, et se tournent vers les provocateurs :

      « Mais que nous avez-vous insinué ? Qui peut dire que cet homme soulève le peuple ? »

      Et d’autres encore :

      « Nous nous demandons ceci : s’il est vrai qu’aucun de vous ne l’a instruit, d’où tient-il une telle sagesse ? Où l’a-t-il apprise, s’il n’a jamais étudié avec un maître ? » et, s’adressant à Jésus : « Dis-nous donc où tu as trouvé cette doctrine que tu enseignes ? »

      486.7 Jésus lève un visage inspiré et répond :

      « En vérité, en vérité je vous dis que cette doctrine n’est pas la mienne, mais qu’elle vient de Celui qui m’a envoyé parmi vous. En vérité, en vérité je vous dis qu’aucun maître ne me l’a enseignée, et que je ne l’ai trouvée dans aucun livre vivant, ni dans aucun rouleau ou monument de pierre. En vérité, en vérité je vous dis que je me suis préparé à cette heure en écoutant le Vivant parler à mon âme. Maintenant, l’heure est venue pour moi de donner au peuple de Dieu la Parole venue des Cieux. C’est ce que je fais, et jusqu’à mon dernier soupir ; et lorsque je l’aurai exhalé, les pierres qui m’entendront et qui ne s’amolliront pas, éprouveront une crainte de Dieu plus forte que celle qu’éprouva Moïse sur le Sinaï. Et dans la crainte, avec une voix véridique, bénissant ou maudissant, les paroles de ma doctrine repoussée se graveront sur les pierres, et ne s’effaceront plus. Le signe restera, lumière pour ceux qui l’accueilleront — au moins à ce moment-là — avec amour, mais ténèbres absolues pour ceux qui ne comprendront pas, même alors, que c’est la volonté de Dieu qui m’a envoyé pour fonder son Royaume.

      Au commencement de la Création, il fut dit : “ Que la lumière soit. ” Et la lumière fut dans le chaos. Au commencement de ma vie, il a été dit : “ Que la paix pour les hommes de bonne volonté soit. ” La bonne volonté, c’est celle qui fait la volonté de Dieu et ne la combat pas. Or, l’homme qui fait la volonté de Dieu et ne la combat pas, sent qu’il ne peut s’opposer à moi : il pressent en effet que ma doctrine vient de Dieu et non pas de moi-même. Est-ce que je cherche ma propre gloire ? Est-ce que je prétends être l’Auteur de la Loi de grâce et de l’ère du pardon ? Non. Je ne prends pas la gloire qui n’est pas la mienne, mais je glorifie la gloire de Dieu, Auteur de tout ce qui est bon. Or ma gloire, c’est de faire ce que le Père veut, car cela lui rend gloire. Celui qui parle en sa propre faveur pour qu’on le loue, cherche une gloire personnelle. Mais celui qui peut, même sans la chercher, obtenir la gloire des hommes pour ce qu’il fait ou dit, et qui la repousse en disant : “ Elle n’est pas mienne, créée par moi, mais elle procède de celle du Père, comme moi, je procède de lui ”, celui-là est dans la vérité ; en lui il n’est pas d’injustice, car il donne à chacun ce qui est à lui sans rien garder de ce qui ne lui appartient pas. Je suis parce que le Père m’a voulu. »

      486.8 Jésus fait une pause. Du regard, il passe la foule en revue, fouille les consciences, les lit, les pèse. Puis il reprend la parole :

      « Vous gardez le silence. La moitié d’entre vous est dans l’admiration, les autres se demandent comment me faire taire. De qui sont les dix commandements ? D’où viennent-ils ? Qui vous les a donnés ?

      – Moïse ! crie la foule.

      – Non : le Très-Haut. Moïse, son serviteur, vous les a apportés, mais ils sont de Dieu. Vous, qui avez les formules mais n’avez pas la foi, vous dites dans votre cœur : “ Dieu, nous ne l’avons pas vu, pas plus que les Hébreux au pied du Sinaï. ” Rien ne vous a suffi pour croire que Dieu était présent, pas même les éclairs qui incendiaient la montagne pendant que Dieu lançait la foudre et le tonnerre en présence de Moïse. Même les éclairs et les tremblements de terre ne vous servent pas pour croire que Dieu est sur vous pour écrire l’Alliance éternelle de salut et de condamnation. Vous verrez bientôt une épiphanie [9] nouvelle, terrible, dans ces murs. Les cachettes sacrées sortiront des ténèbres car le Règne de la Lumière aura commencé, et le Saint des Saints sera élevé à la face du monde au lieu de rester caché sous le triple rideau. Et vous ne croirez pas encore. Que vous faudra-t-il donc pour vous faire croire ? Que les foudres de la Justice marquent votre chair ? Mais alors la Justice sera apaisée, et ce sont les foudres de l’amour qui descendront. Et pourtant, même, elles ne graveront pas la vérité sur vos cœurs, sur tous vos cœurs, et ne susciteront pas le repentir, et enfin l’amour… »

      Gamaliel a maintenant le visage tendu, ses yeux regardent fixement le visage de Jésus…

      « Vous savez que Moïse était un homme parmi les hommes. Les chroniqueurs de son temps vous l’ont décrit. Et pourtant, sachant qui il était, de Qui et comment il a reçu la Loi, l’observez-vous donc ? Non. Aucun de vous ne l’observe. »

      Un cri de protestation s’élève de la foule.

      Jésus impose le silence :

      « Vous prétendez que ce n’est pas vrai ? Que vous l’observez ? Dans ce cas, pourquoi chercher à me mettre à mort ? Est-ce que le cinquième commandement ne défend pas de tuer un homme ? Vous ne reconnaissez pas en moi le Christ ? Mais vous ne pouvez nier que je suis un homme. Pourquoi cherchez-vous à me tuer ?

      – Mais tu es fou ! Tu es un possédé ! Un démon parle en toi, il te fait délirer et proférer des mensonges ! Aucun de nous ne pense à te mettre à mort ! Qui veut te tuer ? crient justement ceux qui veulent le faire.

      – Qui ? Vous ! Et vous cherchez de bons prétextes. Vous me reprochez des fautes qui ne sont pas vraies. Vous me critiquez — ce n’est d’ailleurs pas la première fois — pour avoir guéri un homme pendant le sabbat. Or Moïse ne dit-il pas d’avoir pitié même de l’âne et du bœuf qui est tombé, car ils représentent un bien pour ton frère ? Et moi, je ne devrais pas avoir pitié du corps malade d’un frère pour qui la santé retrouvée est un bien matériel et un moyen spirituel pour bénir Dieu et l’aimer en raison de sa bonté ? Et la circoncision que Moïse vous a donnée, après l’avoir lui-même reçue des patriarches, ne la pratiquez-vous pas même pendant le sabbat ? Si la circoncision d’un homme pendant le sabbat n’est pas une violation de la Loi mosaïque du sabbat, parce qu’elle sert à faire d’un garçon un fils de la Loi, pourquoi vous indignez-vous que j’aie guéri pendant le sabbat un homme tout entier, corps et âme, et que j’en aie fait un fils de Dieu ? Ne jugez pas selon l’apparence et la lettre, mais portez un jugement droit et avec votre âme, car les formules, les apparences sont lettre morte, des tableaux peints, mais non pas la vie vraie, alors que l’esprit des paroles et des apparences est vie réelle et source d’éternité. Mais vous ne comprenez pas ces vérités parce que vous ne voulez pas les comprendre. 486.9 Partons. »

      Et il tourne le dos à tout le monde pour se diriger vers la sortie, suivi et entouré de ses apôtres et disciples qui le regardent, attristés pour lui et pleins de dédain pour ses ennemis.

      Lui, pâle, leur dit avec un sourire :

      « Ne vous affligez pas. Vous êtes mes amis, et vous faites bien, car mon temps est compté. Bientôt viendra un temps où vous désirerez voir un seul de ces jours du Fils de l’homme. Mais vous ne le pourrez plus. Alors il sera réconfortant de vous dire : “ Nous l’avons aimé et lui sommes restés fidèles tant qu’il a demeuré parmi nous. ” Pour se moquer de vous et vous faire paraître fous, on vous dira : “ Le Christ est revenu. Il est ici ! Il est là ! ” Ne les croyez pas. N’y allez pas, ne vous mettez pas à suivre ces faux railleurs. Le Fils de l’homme, une fois parti, ne reviendra plus avant son Jour. Alors sa manifestation sera semblable à l’éclair qui resplendit et passe d’un point du ciel à l’autre, si rapidement que l’œil a du mal à le suivre. Vous, et pas vous seuls, mais aucun homme ne pourrait me suivre dans ma manifestation finale pour rassembler tous ceux qui ont existé, existent et existeront. Mais avant que cela n’arrive, il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, souffre tout, toute la douleur de l’Humanité et qu’en outre, il soit renié par cette génération.

      – Mais alors, mon Seigneur, tu subiras la souffrance de tout le mal dont sera capable de te frapper cette génération, souligne le berger Mathias.

      – Non. J’ai dit : “ Toute la douleur de l’Humanité. ” Les hommes existaient avant cette génération, et ils existeront à travers les générations, après celle-ci. Et toujours, ils pécheront. Et le Fils de l’homme goûtera dans son esprit toute l’amertume des péchés passés, présents et futurs, jusqu’au dernier, avant d’être le Rédempteur. En outre, sa gloire souffrira encore en son esprit d’amour en voyant l’humanité piétiner son amour. Vous ne pouvez pas comprendre pour le moment… Allons maintenant dans cette maison. Elle m’est amie. »

      Il frappe à une porte, qui s’ouvre pour le laisser entrer sans que le portier montre de l’étonnement devant le nombre des personnes qui entrent à la suite de Jésus.




[1] Le riche marchand qui apporte le lettre d'Antioche (Cf. EMV 461).

[2] Cf. Le jeune Jésus en discussion avec les Docteurs du Temple EMV 41.4.

[3] Prophétie de Daniel sur les "soixante-dix semaines" qui mesurait le temps avant la venue du Messie (Daniel 9,2 et suivants).

[4] C'était un jour de sabbat.

[5] La mère du prophète Samuel.

[6] 1 Samuel 2, 6-10.

[7] 1 Samuel 2, 10.

[8] Région de la Tétrarchie de Philippe. Voir la Carte.

[9] Épiphanie : ici au sens étymologique du grec Phainô, paraître.
  




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-181.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/controverses-a-la-fete-des-tentes.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 8 Jan - 22:28

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

487. Au Temple pour la fête des Tentes. Discours sur la nature du Royaume.

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 182.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 487.

Le mercredi 4 septembre 1946.

Du dimanche 16 septembre au mardi 18 septembre 29
Jérusalem


       487.1 Le Temple est encore plus bondé que la veille. Et dans la foule qui l’emplit et s’agite dans la première cour, je vois beaucoup de païens, beaucoup plus qu’hier. Ils sont tous dans une attente anxieuse, tant les juifs que les païens. Et ils discutent, les païens avec les païens, les Hébreux avec les Hébreux, en groupes disséminés çà et là, sans perdre de vue les portes.

      Les docteurs, sous les portiques, se fatiguent à élever la voix pour attirer le public et faire étalage d’éloquence. Mais ils s’adressent à des élèves peu nombreux, car les gens sont distraits.

      Gamaliel est là, à sa place. Mais il ne parle pas. Il va et vient sur son somptueux tapis, les bras croisés, la tête penchée, méditant, et son long vêtement, son manteau encore plus long qu’il a ouvert et qui pend, retenu aux épaules par deux agrafes d’argent, lui font par derrière une traîne qu’il repousse du pied quand il revient sur ses pas. Craintifs et respectueux de la méditation de leur maître, ses plus fidèles disciples, adossés au mur, le regardent en silence.

      Des pharisiens, des prêtres, font semblant d’avoir beaucoup à faire, et ils vont et viennent… Les gens, qui comprennent leurs véritables intentions, se les montrent du doigt, et des commentaires partent comme autant de fusées allumées pour cibler leur hypocrisie. Mais ils font mine de ne pas entendre. Ils sont peu nombreux par rapport à ceux qui ne haïssent pas Jésus et qui, en revanche, les détestent, eux. Aussi trouvent-ils prudent de ne pas réagir.

      487.2 « Le voilà ! Le voilà ! Il arrive par la Porte Dorée, aujourd’hui !

      – Courons !

      – Moi, je reste ici. C’est ici qu’il viendra parler. Je garde ma place.

      – Moi aussi. Et tant mieux : ceux qui partent nous font place, à nous qui restons.

      – Mais le laisseront-ils parler ?

      – S’ils l’ont laissé entrer !

      – Oui, mais c’est autre chose. Comme fils de la Loi, ils ne peuvent l’en empêcher, mais en tant que rabbi, ils peuvent le chasser, s’ils le veulent. »

      Un païen intervient :

      « Que de différences ! S’ils le laissent venir pour parler à Dieu, pourquoi ne devraient-ils pas le laisser parler à des hommes ?

      – C’est vrai » dit un autre païen. « Nous, parce que nous sommes impurs, vous ne nous laissez pas aller là-bas, mais ici, oui, dans l’espoir que nous devenions circoncis…

      – Tais-toi, Quintus. C’est pour cela qu’ils le laissent nous parler, dans l’espoir qu’il va nous tailler comme si nous étions des arbres. Au contraire, nous venons prendre ses idées comme des greffes pour les sauvageons que nous sommes.

      – Tu as raison. C’est le seul qui ne nous dédaigne pas !

      – Ah ça ! Quand nous allons faire des achats avec une bourse pleine, les autres aussi ne nous dédaignent pas.

      – Regarde ! Nous, les païens, nous sommes restés maîtres de la place. Nous entendrons bien ! Et nous verrons mieux ! Cela m’amuse de voir la tête de ses ennemis. Par Jupiter ! Un combat de tronches…

      – Tais-toi ! Et qu’on ne t’entende pas invoquer Jupiter. C’est défendu ici.

      – Oh ! entre Jupiter et Yahvé, il n’y a que peu de différence. Et entre dieux, on ne s’en offense pas… Je suis venu avec un vrai désir de l’entendre, pas pour me moquer. On en parle tant, partout, de ce Nazaréen ! Je me suis dit : la saison est bonne, et je vais l’écouter. Il y en a qui vont plus loin pour entendre les oracles…

      – D’où viens-tu ?

      – De Pergé.

      – Et toi ?

      – De Tarse.

      – Je suis presque juif. Mon père était un helléniste d’Iconium. Mais il a épousé une Romaine à Antioche de Cilicie, et il est mort avant ma naissance. Mais la semence est hébraïque.

      – Il tarde à venir… L’auraient-ils pris ?

      – Ne crains rien. Les cris de la foule nous le diraient. Ces Hébreux poussent toujours des cris d’orfraie…

      – Ah ! le voilà, justement. Va-t-il vraiment venir ici ?

      – Tu ne vois pas qu’ils ont occupé exprès tous les endroits, sauf ce coin ? Entends-tu toutes ces grenouilles qui coassent pour faire croire qu’elles sont les maîtresses ?

      – Celui-là se tait, cependant. Est-il vrai que c’est le plus grand docteur d’Israël ?

      – Oui, mais… quel ponte ! Je l’ai écouté un jour et, pour digérer sa science, j’ai dû boire plusieurs coupes de falerne [1] de Titus à Bézéta. »

      Ils s’esclaffent.

      487.3 Jésus s’approche lentement. Il passe devant Gamaliel, qui ne lève même pas la tête, et se rend à sa place de la veille.

      La foule, où se mêlent désormais juifs, prosélytes et païens, comprend qu’il va prendre la parole. On entend :

      « Voilà qu’il parle en public, et ils ne lui disent rien !

      – Peut-être que les princes et les chefs ont reconnu en lui le Christ. Hier, Gamaliel, après le départ du Galiléen, a parlé longuement avec des Anciens.

      – Est-ce possible ? Comment ont-ils fait pour le reconnaître subitement, alors qu’il y a peu de temps, ils le considéraient comme méritant la mort ?

      – Peut-être que Gamaliel possédait des preuves…

      – Et quelles preuves ? Quelles preuves voulez-vous qu’il ait en faveur de cet homme ? réplique quelqu’un.

      – Tais-toi, espèce de chacal. Tu n’es que le dernier des copistes. Qui t’a interrogé ? »

      Ils se moquent de lui, si bien qu’il s’en va.

      Mais d’autres surviennent, qui n’appartiennent pas au Temple, mais sont certainement des juifs incrédules :

      « Les preuves, nous les avons, nous. Nous savons d’où il est, lui. Or quand le Christ viendra, personne ne saura d’où il vient. Nous n’en connaîtrons pas l’origine. Mais lui ! C’est le fils d’un menuisier de Nazareth, et tout son village peut apporter ici son témoignage contre nous, si nous mentons… »

      A ce moment la voix d’un païen s’élève :

      « Maître, parle-nous un peu, aujourd’hui. On a dit que tu affirmes que tous les hommes sont venus d’un seul Dieu, le tien, au point que tu les appelles fils du Père. Des poètes stoïciens de chez nous ont eu cette même idée. Ils ont dit : “ Nous sommes de la race de Dieu. ” Tes compatriotes nous disent plus impurs que des bêtes. Comment concilies-tu ces deux tendances ? »

      La question est posée conformément aux coutumes des débats philosophiques, du moins à ce que je crois. Jésus s’apprête à répondre, lorsque la discussion entre les juifs incrédules et ceux qui croient s’anime, et qu’une voix perçante répète :

      « Lui, c’est un homme ordinaire. Le Christ ne sera pas comme cela. Tout sera exceptionnel en lui : forme, nature, origine… »

      487.4 Jésus se tourne dans cette direction et dit d’une voix forte :

      « Vous me connaissez donc et vous savez d’où je viens ? En êtes-vous bien sûrs ? Et même ce peu que vous savez ne vous dit rien ? Il ne vous confirme pas les prophéties ? Mais vous ne connaissez pas tout de moi. En vérité, en vérité je vous dis que je ne suis pas venu de moi-même, et d’où vous croyez que je suis venu. C’est la Vérité elle-même, que vous ne connaissez pas, qui m’a envoyé. »

      Un cri d’indignation s’élève du côté des adversaires.

      « La Vérité elle-même. Mais vous ne connaissez pas ses œuvres, vous ne connaissez pas ses chemins, les chemins par lesquels je suis venu. La haine ne peut connaître les voies et les œuvres de l’Amour. Les ténèbres ne peuvent supporter la vue de la Lumière. Mais moi, je connais Celui qui m’a envoyé parce que je suis sien, je fais partie de lui, et je suis un Tout avec lui. Et il m’a envoyé, pour que j’accomplisse ce que veut sa Pensée. »

      Un tumulte se produit. Les ennemis se précipitent pour mettre la main sur lui, s’emparer de lui, le frapper. Les apôtres, les disciples, le peuple, les païens, les prosélytes réagissent pour le défendre. D’autres assaillants accourent à l’aide des premiers et y parviendraient peut-être, mais Gamaliel, qui jusqu’à ce moment paraissait étranger à tout, quitte son tapis et vient vers Jésus, poussé sous le portique par ses défenseurs.

      Il crie :

      « Laissez-le tranquille. Je veux entendre ce qu’il dit. »

      La voix de Gamaliel agit avec plus de force que le détachement de légionnaires qui accourent de l’Antonia pour apaiser les troubles. Le tumulte retombe comme un tourbillon qui se brise, et les cris s’apaisent pour devenir simple bourdonnement. Les légionnaires, par prudence, restent près de l’enceinte extérieure, mais ils sont désormais inutiles.

      « Parle » ordonne Gamaliel à Jésus. « Réponds à ceux qui t’accusent. »

      Le ton est impérieux, mais pas méprisant.

      487.5 Jésus s’avance vers la cour. Tranquillement, il reprend la parole. Gamaliel reste là où il est, et ses disciples s’affairent à lui apporter son tapis et son siège pour qu’il soit plus à l’aise ; mais il reste debout, les bras croisés, la tête penchée, les yeux clos, tout concentré pour mieux écouter.

      « Vous m’avez accusé sans raison, comme si j’avais blasphémé au lieu de dire la vérité. Or, si je parle, ce n’est pas pour me défendre, mais pour vous donner la lumière, afin que vous puissiez connaître la vérité. Et ce n’est pas pour moi-même, mais pour vous rappeler les paroles auxquelles vous croyez et sur lesquelles vous jurez. Elles témoignent de moi. Vous, je le sais, vous ne voyez en moi qu’un homme qui vous ressemble, qui vous est même inférieur. Et il vous paraît impossible qu’un homme puisse être le Messie. Vous pensez qu’il devrait au moins être un ange, et d’une origine tellement mystérieuse qu’il ne pourrait être roi qu’en raison de l’autorité que le mystère de son origine lui donne. Mais où donc, dans les livres qui renferment l’histoire de notre peuple — et ce seront des livres éternels autant que le monde, car c’est à eux que les docteurs de tous les pays et de tous les temps s’adresseront pour fortifier leur science et leurs recherches sur le passé à l’aide des lumières de la vérité —, où donc est-il écrit que Dieu a parlé à l’un de ses anges pour lui dire : “ Tu seras dorénavant pour moi un Fils, parce que je t’ai engendré ? ” [2] »

      Je vois que Gamaliel se fait donner une petite table et des parchemins et qu’il s’assied pour écrire…

      487.6 « Les anges, créatures spirituelles, serviteurs du Très-Haut et ses messagers, ont été créés par lui, tout comme l’homme, les animaux et tout ce qui fut créé. Mais ils n’ont pas été engendrés par lui. Car Dieu engendre uniquement un autre lui-même : le Parfait ne peut engendrer qu’un Parfait, un autre être semblable à lui, pour ne pas avilir sa perfection par la génération d’une créature qui lui soit inférieure.

      Si donc Dieu ne peut engendrer les anges, ni les élever à la dignité de fils, quel peut être le Fils auquel il dit : “ Tu es mon Fils. Aujourd’hui je t’ai engendré ? ” Et de quelle nature est ce Fils, s’il dit à ses anges à son propos : “ Que tous les anges de Dieu l’adorent ” [3] ? Et comment est ce Fils, pour mériter de s’entendre dire par le Père, par la grâce de qui les hommes peuvent le nommer avec un cœur qui s’anéantit dans l’adoration : “ Siège à ma droite, jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis l’escabeau de tes pieds ” [4] ? Ce Fils ne peut être que Dieu comme le Père, dont il partage les attributs et la puissance, et avec qui il jouit de la Charité qui les ravit dans les ineffables et inconnaissables amours de la Perfection pour elle-même.

      Mais, si Dieu n’a pas jugé convenable d’élever un ange au rang de Fils, aurait-il pu dire d’un simple homme ce qu’il a dit de Celui qui ici vous parle, lorsqu’il se trouvait au gué de Béthabara après trois ans [5] ? Plusieurs d’entre vous qui me combattez, étiez alors présents. Vous l’avez entendu, et vous avez tremblé. Car la voix de Dieu ne peut se confondre avec nulle autre, et sans une grâce spéciale de sa part, elle terrasse celui qui l’entend et ébranle son cœur.

      Qui est donc l’Homme qui vous parle ? Serait-il né de la semence et de la volonté d’un homme comme vous tous ? Et le Très-Haut pourrait-il avoir placé son Esprit pour habiter une chair, privée de la grâce comme l’est celle des hommes nés d’une volonté charnelle ? Pourrait-il, pour payer la grande Faute, se satisfaire du sacrifice d’un homme ? Réfléchissez : s’il n’a pas choisi un ange pour être Messie et Rédempteur, pourrait-il choisir un homme ? Et le Rédempteur pouvait-il être seulement Fils du Père sans assumer la nature humaine, mais avec des moyens et des pouvoirs qui surpassent les raisonnements humains ? Et le Premier-né de Dieu pouvait-il avoir des parents, s’il est le Premier-né éternel ?

      Votre pensée orgueilleuse n’est-elle pas bouleversée devant ces interrogations qui s’élèvent toujours plus près des royaumes de la Vérité, et qui ne trouvent une réponse que dans un cœur humble et plein de foi ?

      Qui doit être le Christ ? Un ange ? Plus qu’un ange. Un homme ? Plus qu’un homme. Un Dieu ? Oui, un Dieu, mais avec une chair qui lui soit unie, pour pouvoir accomplir l’expiation de la chair coupable. Toute chose doit être rachetée par la matière avec laquelle elle a péché. Dieu aurait pu par conséquent envoyer un ange pour expier les fautes des anges déchus, pour Lucifer et pour ses disciples angéliques. Car, vous le savez, Lucifer aussi a péché. Mais Dieu n’envoie pas un esprit angélique pour racheter les anges des Ténèbres. Ils n’ont pas adoré le Fils de Dieu, et Dieu ne pardonne pas le péché contre son Verbe engendré par son Amour. Pourtant, Dieu aime les hommes et il envoie l’Homme, l’unique parfait, pour racheter l’homme et faire la paix avec Dieu. Et il est juste que seul un Homme-Dieu puisse accomplir la rédemption de l’homme et apaiser Dieu.

      487.7 Le Père et le Fils se sont aimés et compris. Le Père a dit : “ Je veux. ” Et le Fils a répondu : “ Je veux. ” Puis le Fils a dit : “ Donne-moi. ” Et le Père a répondu : “ Prends ”, et le Verbe eut une chair dont la formation est mystérieuse, et cette chair s’appela Jésus-Christ, le Messie, celui qui doit racheter les hommes, les amener au Royaume, vaincre le démon, briser les esclavages.

      Vaincre le démon ! Un ange ne pouvait pas, ne peut pas accomplir ce que le Fils de l’homme peut accomplir. C’est pourquoi Dieu appelle pour cette grande œuvre non pas les anges, mais l’Homme. Voici l’Homme dont vous ignorez ou falsifiez l’origine, ou bien ne savez pas quoi en penser. Voici l’Homme, l’Homme que Dieu accepte, l’Homme qui représente tous ses frères. Il est comme vous quant à la ressemblance, mais différent de vous et supérieur quant à la provenance : ce n’est pas un homme, mais Dieu qui l’a engendré et consacré pour son ministère, et il se tient devant l’autel divin afin d’être Prêtre et Victime pour les péchés du monde, Pontife éternel et suprême, souverain Prêtre selon l’ordre de Melchisédech.

      Ne tremblez pas ! Je ne tends pas les mains vers la tiare pontificale. Un autre diadème m’attend. Ne tremblez pas ! Je ne vous enlèverai pas le rational. Un autre est déjà prêt pour moi. Mais redoutez seulement que le sacrifice de l’Homme et la miséricorde du Christ ne vous servent pas. Je vous ai tant aimés, je vous aime tant, que j’ai obtenu du Père de m’anéantir moi-même. Je vous ai tant aimés, je vous aime tant, que j’ai demandé de consumer en moi toute la douleur du monde pour vous obtenir le salut éternel.

      487.8 Pourquoi refusez-vous de me croire ? Ne pouvez-vous croire encore ?

      N’est-il pas dit du Christ : “ Tu es Prêtre pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech ” [6] ? Mais quand le sacerdoce a-t-il commencé ? Au temps d’Abraham ? Non, et vous le savez. Le roi de justice et de paix qui apparaît pour m’annoncer, par une figure prophétique, à l’aurore de notre peuple, ne vous révèle-t-il pas qu’il y a un sacerdoce plus parfait, qui vient directement de Dieu, de même que Melchisédech dont personne n’a jamais pu donner l’origine, que l’on appelle “ le prêtre ” et qui demeurera prêtre éternellement ? Ne croyez-vous plus aux paroles inspirées ? Et si vous y croyez, comment donc, vous les docteurs, ne savez-vous pas fournir une explication acceptable aux paroles qui disent, à mon sujet : “ Tu es prêtre pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech ” ?

      Il y a donc un autre sacerdoce, antérieur à celui d’Aaron. Et de ce sacerdoce, il est dit “ tu es ”, non pas “ tu as été ” ou “ tu seras ”. Tu es prêtre pour l’éternité. Cette phrase annonce que le Prêtre éternel ne sera pas de la souche connue d’Aaron, ni d’aucune souche sacerdotale, mais d’une provenance nouvelle, aussi mystérieuse que celle de Melchisédech. Il appartient à cette provenance. Et si la puissance de Dieu l’envoie, c’est le signe qu’il veut rénover le sacerdoce et le rite pour qu’il devienne utile à l’humanité.

      Connaissez-vous mon origine ? Non. Connaissez-vous mes œuvres ? Non. Voyez-vous leurs fruits ? Non. Vous ne savez rien de moi. Vous voyez donc qu’en cela aussi, je suis le “ Christ ”, dont l’origine, la nature et la mission doivent rester inconnues jusqu’au moment où il plaira à Dieu de les révéler aux hommes. Bienheureux ceux qui sauront, qui savent croire avant que la Révélation terrible de Dieu ne les écrase de son poids contre le sol et ne les y cloue, ne les brise, sous la fulgurante et puissante vérité tonnée par les Cieux, criée par la terre : “ Il était, lui, le Christ de Dieu. ”

      Vous dites : “ Il vient de Nazareth. Son père, c’était Joseph. Sa Mère, c’est Marie. ” Non, je n’ai pas de père qui m’ait engendré comme homme. Je n’ai pas de mère qui m’ait engendré comme Dieu. Et pourtant j’ai une chair et je l’ai assumée par l’opération mystérieuse de l’Esprit, et je suis venu parmi vous en passant par un tabernacle saint. Et je vous sauverai, après m’être formé moi-même par la volonté de Dieu, je vous sauverai, en faisant sortir ma véritable personne du tabernacle de mon corps pour consommer le grand sacrifice d’un Dieu qui s’immole pour le salut de l’homme.

      487.9 Père, mon Père ! Je te l’ai dit au commencement des jours : “ Me voici pour faire ta volonté. ” [7] Je te l’ai dit à l’heure de grâce avant de te quitter pour me revêtir de chair afin de pouvoir souffrir : “ Me voici pour faire ta volonté. ” Je te le redis pour sanctifier ceux pour qui je suis venu : “ Me voici pour faire ta volonté. ” Et je te le dirai encore, toujours, jusqu’à ce que ta volonté soit accomplie… »

      Jésus, qui a levé les bras vers le ciel pour prier, les abaisse maintenant, les croise sur sa poitrine et incline la tête, ferme les yeux et s’abîme en une prière secrète.

      Les gens chuchotent. La plupart (et je suis du nombre) n’ont pas compris. Nous sommes trop ignorants. Mais nous avons l’intuition qu’il a exprimé de grands mystères, et nous nous taisons, pleins d’admiration.

      Les malveillants, qui n’ont pas compris ou n’ont pas voulu comprendre, raillent :

      «Il délire ! »

      Mais ils n’osent en dire davantage, et ils s’écartent ou se dirigent vers les portes en secouant la tête. Je suppose que cette prudence est due aux lances et aux dagues romaines qui luisent au soleil au bout du mur.

      487.10 Gamaliel se fraie un passage parmi ceux qui sont restés. Il arrive près de Jésus, qui est encore plongé dans sa prière, loin de la foule et de cet endroit, et il l’appelle :

      « Rabbi Jésus !

      – Que veux-tu, rabbi Gamaliel ? demande Jésus en levant la tête, les yeux encore absorbés dans une vision intérieure.

      – Une explication de toi.

      – Parle.

      – Retirez-vous tous ! » ordonne Gamaliel, sur un tel ton que les apôtres, les disciples, les partisans, les curieux et même ses propres disciples s’écartent en vitesse.

      Ils restent seuls, l’un en face de l’autre, et ils se regardent, Jésus toujours plein d’une suave douceur, l’autre autoritaire sans le vouloir, et l’air involontairement orgueilleux. C’est une expression qui lui est certainement venue d’années d’obséquiosité exagérée.

      « Maître… on m’a rapporté certaines de tes paroles prononcées lors d’un banquet… que j’ai désapprouvé parce qu’il manquait de sincérité [8]. Moi, je combats ou je ne combats pas, mais c’est toujours ouvertement… J’ai médité sur ces mots. Je les ai confrontés aux paroles qui me restent en mémoire… Et je t’ai attendu, ici, pour t’interroger à ce sujet… Mais auparavant, j’ai voulu t’écouter parler… Eux n’ont pas compris. Moi, j’espère pouvoir comprendre. J’ai écrit tes paroles pendant que tu les disais. Pour les méditer, non pas pour te nuire. Me crois-tu ?

      – Je te crois. Et veuille le Très-Haut les faire flamboyer à ton esprit.

      – Qu’il en soit ainsi. Ecoute : les pierres qui doivent frémir, sont peut-être celles de nos cœurs ?

      – Non, rabbi. Celles-ci (et en un geste circulaire, il indique les murailles du Temple). Pourquoi me poses-tu cette question ?

      – Parce que mon cœur a frémi quand m’ont été rapportées tes paroles au banquet et tes réponses aux tentateurs. Je croyais que ce frémissement était le signe…

      – Non, rabbi. C’est trop peu que le frémissement de ton cœur et celui de quelques autres pour être le signe qui ne laisse pas de doutes… même si toi, grâce à un rare jugement d’humble connaissance de toi-même, tu qualifies ton cœur de pierre. Oh ! Rabbi Gamaliel, ne peux-tu vraiment pas faire de ton cœur de pierre un lumineux autel pour accueillir Dieu ? Ce n’est pas dans mon intérêt, rabbi, mais pour que ta justice soit complète… »

      Jésus regarde avec douceur l’ancien maître qui triture sa barbe et passe ses doigts sous son couvre-chef en serrant son front et en murmurant. Puis Gamaliel baisse la tête pour avouer :

      « Je ne puis… C’est trop tôt… Mais j’espère… Ce signe, est-ce que tu le donneras toujours ?

      – Je le donnerai.

      – Adieu, rabbi Jésus.

      – Que le Seigneur vienne à toi, rabbi Gamaliel. »

      Ils se séparent. Jésus fait signe à ses disciples, et avec eux sort du Temple.

      487.11 Scribes, pharisiens, prêtres, disciples de rabbis se précipitent comme autant de vautours autour de Gamaliel, qui est en train de passer dans sa large ceinture les feuilles qu’il a écrites.

      « Eh bien ? Qu’en penses-tu ? C’est un fou ? Tu as bien fait d’écrire ces divagations. Elles nous serviront. As-tu décidé ? Es-tu convaincu ? Hier… aujourd’hui… Tu en as entendu plus qu’il n’en faut pour te convaincre. »

      C’est un vrai tumulte ! Gamaliel, lui, rajuste sa ceinture en silence, referme l’encrier qu’il y a suspendu, rend à son disciple la petite table sur laquelle il s’est appuyé pour écrire sur les parchemins.

      « Tu ne réponds rien ? Depuis hier, tu ne parles pas… lui dit, pour le décider, un de ses collègues.

      – J’écoute. Pas vous, mais lui. Et je cherche à reconnaître, dans les mots de maintenant, la parole qui m’a été adressée un jour, à ce même endroit.

      – Et tu y parviens, peut-être ? lancent plusieurs en riant.

      – C’est comme le tonnerre, dont le son est différent selon que l’on est plus proche ou plus loin. Mais c’est toujours le bruit de l’orage.

      – Un bruit qui ne permet pas de conclure, alors, plaisante quelqu’un.

      – Ne ris pas, Lévi. Dans le tonnerre peut se trouver aussi la voix de Dieu et nous pouvons être assez bornés pour croire que c’est le bruit de nuages qui se déchirent… Ne ris pas non plus toi, Elchias, ni toi, Simon, de peur que le tonnerre ne vienne à se changer en foudre et ne vous réduise en cendres…

      – Alors… toi… tu dis plus ou moins que le Galiléen est cet enfant qu’avec Hillel vous croyiez prophète, et que cet enfant et cet homme, c’est le Messie… demandent des railleurs, bien qu’en sourdine, car Gamaliel se fait respecter.

      – Je n’affirme rien. Je dis seulement que le bruit du tonnerre est toujours le bruit du tonnerre.

      – Plus proche ou plus lointain ?

      – Hélas ! Les paroles sont plus fortes, comme c’est nécessaire à mon âge. Mais les vingt années écoulées ont rendu mon intelligence vingt fois plus fermée sur le trésor qu’elle possède. Et le son pénètre plus faiblement… »

      Pensif, Gamaliel laisse retomber son menton sur sa poitrine.

      « Ha ! Ha ! Ha ! Tu vieillis et tu perds la tête, Gamaliel ! Tu prends des fantômes pour des réalités. Ha ! Ha ! Ha ! »

      Et tous se mettent à rire.

      Gamaliel hausse dédaigneusement les épaules. Puis relève son manteau qui pendait de ses épaules, s’en enveloppe à plusieurs tours tant il est ample, et tourne le dos à tout le monde sans répliquer, dans un silence plein de mépris.





[1] Le Falerne est un vin de Campanie réputé dès l'antiquité. Bézeta est un quartier au nord de Jérusalem

[2] Psaume 2,7

[3] Psaume 29(28),1

[4] Psaume 110(109),1

[5] Au Baptême de Jésus les cieux s'ouvrirent et on vit l'Esprit de Dieu sous forme d'une colombe, se poser sur la tête de Jésus pendant qu'une voix disait : "Celui-ci est mon fils bien-aimé qui a toute ma faveur"

[6] Psaume 110(109),4

[7] Psaume 40(39),8

[8] Banquet offert par Elchias le pharisien à la Pentecôte. C'est à ce banquet que Jésus profère les malédictions contre les pharisiens Cf. 6.103 / EMV 414 



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-182.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/controverses-a-la-fete-des-tentes.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 9 Jan - 20:05

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

488. Au Temple pour la fête des Tentes. Départ pour Nobé.

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 183.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 488.

Le jeudi 5 septembre 1946.

Du dimanche 16 septembre au mardi 18 septembre 29
Jérusalem


       488.1 Sans se préoccuper le moins du monde des mauvais sentiments d’autrui, Jésus revient au Temple pour la troisième journée. Cependant, il ne doit pas avoir couché à Jérusalem, car ses sandales sont pleines de poussière. Peut-être a-t-il passé la nuit sur les collines qui entourent Jérusalem. Ses frères Jacques et Jude ont dû rester avec lui, ainsi que Joseph (le berger) et Salomon. Il rencontre les autres apôtres et disciples près du mur oriental du Temple.

      « Ils sont venus, tu sais ? Aussi bien chez nous que chez les disciples les plus connus. Heureusement que tu n’étais pas là !

      – Il nous faudra toujours faire comme ça.

      – Bon, mais nous en parlerons plus tard. Allons.

      – Une grande foule nous a précédés, qui exaltait tes miracles. Ils sont nombreux à être convaincus et à croire en toi ! Tes frères avaient raison sur ce point, dit l’apôtre Jean.

      – Ils sont allés te chercher jusque chez Annalia, tu sais ?

      – Et au palais de Jeanne. Mais ils n’ont trouvé que Kouza… et d’une humeur ! Il les a chassés comme des chiens en disant qu’il ne voulait pas d’espions chez lui, et qu’il en avait par-dessus la tête d’eux. C’est ce que nous a rapporté Jonathas, qui s’y trouve avec son maître, dit Daniel (le berger).

      – Tu sais ? Les scribes voulaient disperser ceux qui t’attendaient, en les persuadant que tu n’es pas le Christ. Mais eux ont répliqué : “ Ce n’est pas le Christ ? Et qui voulez-vous qu’il soit ? Un autre homme pourra-t-il jamais faire les miracles qu’il accomplit ? Est-ce que ceux qui se prétendaient le Christ en ont fait ? Non, non. Des centaines d’imposteurs — peut-être même soudoyés par vous — prétendant être le Christ pourront bien se lever, aucun ne fera jamais plus de miracles que lui. ” Et comme les scribes et les pharisiens soutenaient que tu les accomplis parce que tu es un Belzébuth, eux ont répliqué : “ Dans ce cas, vous devriez en faire de fracassants, car il est certain que vous êtes des Belzébuth, si on vous compare au Saint » raconte Pierre en riant.

      Tous se mettent à rire en commentant la réplique de la foule et l’indignation des scribes et des pharisiens, qui étaient partis scandalisés.

      488.2 A peine entrés dans le Temple, ils sont entourés par une foule encore plus nombreuse que les jours précédents.

      « Paix à toi, Seigneur ! Paix ! Paix ! crient les juifs.

      – Salut, Maître ! disent les païens en guise de salutation.

      – Que la paix et la lumière viennent à vous, répond Jésus à tous.

      – Nous avions peur qu’ils ne t’aient pris ou que tu ne viennes pas par prudence et par dégoût. Nous nous serions alors dispersés pour te chercher partout » disent plusieurs.

      Jésus esquisse un pâle sourire :

      « Alors vous ne voulez pas me perdre ?

      – Et si nous te perdons, Maître, qui nous donnera les instructions et les grâces que tu nous prodigues ?

      – Mes instructions resteront en vous et vous les comprendrez encore mieux après mon départ… Et le fait que je ne sois plus parmi les hommes n’empêchera pas les grâces de descendre sur ceux qui prieront avec foi.

      – Oh ! Maître ! Tu veux vraiment t’en aller ? Dis-nous où tu vas et nous te suivrons. Nous avons tant besoin de toi !

      – Le Maître parle ainsi pour voir si nous l’aimons. Mais où voulez-vous qu’aille le Rabbi d’Israël sinon ici, en Israël ?

      – En vérité, je vous dis que je suis encore avec vous pour peu de temps, et je vais vers ceux à qui le Père m’a envoyé. Ensuite, vous me chercherez et vous ne me trouverez pas. Et là où je suis, vous ne pourrez venir. 488.3 Mais maintenant, laissez-moi aller. Aujourd’hui, je ne vais pas parler ici à l’intérieur. Il y a des pauvres qui m’attendent ailleurs et qui ne peuvent venir parce qu’ils sont très malades. Après la prière, je me rendrai chez eux. »

      Et avec l’aide de ses disciples, il se fraye un chemin vers la Cour des Juifs. Ceux qui restent se regardent les uns les autres.

      « Où donc va-t-il aller ?

      – Chez son ami Lazare, certainement. Il est très malade.

      – Je demandais où il ira, pas aujourd’hui, mais quand il nous quittera pour toujours. N’avez-vous pas entendu qu’il a dit que nous ne pourrons le trouver ?

      – Peut-être ira-t-il rassembler Israël en évangélisant ceux d’entre nous qui sont dispersés dans les nations. La Diaspora espère comme nous dans le Messie.

      – Ou bien il ira instruire les païens pour les attirer à son Royaume.

      – Non, ce ne doit pas être cela. Nous pourrions toujours le trouver même s’il était dans la lointaine Asie, ou au centre de l’Afrique, ou à Rome, en Gaule, en Ibérie, en Thrace [1] ou dans le pays des Sarmates [2]. S’il dit que nous ne le trouverons pas, même en le cherchant, cela sous-entend qu’il ne sera dans aucun de ces lieux.

      – Mais oui ! Que peut bien signifier sa phrase : “ Vous me chercherez et vous ne me trouverez pas. Et là où je suis, vous ne pourrez venir ” ? “ Je suis… ” et non pas : “ Je serai… ” Où est-il donc ? N’est-il pas ici parmi nous ?

      – Moi, je te le dis, Jude, il a l’apparence d’un homme, mais c’est un esprit !

      – Mais non ! Parmi les disciples, il y en a qui l’ont vu nouveau-né. Mieux : ils ont vu sa Mère enceinte de lui, quelques heures avant sa naissance.

      – Mais est-ce que c’est vraiment ce bébé, maintenant devenu homme ? Qui nous assure que ce n’est pas quelqu’un d’autre ?

      – Eh ! non. Il pourrait être un autre et les bergers pourraient se tromper. Mais sa Mère ! Ses frères ! Tout un village !

      – Les bergers ont-ils reconnu sa Mère ?

      – Bien sûr que oui…

      – Alors… pourquoi donc dit-il : “ Où je suis, vous ne pourrez venir ? ” Pour nous, c’est le futur : vous ne pourrez. Pour lui cela reste le présent : je suis. Il n’a donc pas d’avenir, cet Homme ?

      – Je ne sais que répondre. C’est comme ça.

      – Moi, je vous le dis : c’est un fou !

      – C’est toi qui dois l’être, espion du Sanhédrin !

      – Moi, un espion ? Je suis un juif qui l’admire. Et n’avez-vous pas dit qu’il se rend chez Lazare ?

      – Nous n’avons rien dit, vieux mouchard. Nous ne savons rien. Et si nous le savions, nous le garderions pour nous. Rapporte à ceux qui t’envoient qu’ils doivent le chercher eux-mêmes. Espion ! Cafard ! Vendu !… »

      L’homme se rend compte que cela tourne mal, et il s’éclipse.

      « Mais nous restons ici ! Si nous étions sortis, nous l’aurions vu. Cours d’un côté ! Cours de l’autre !… Faites-nous savoir quel chemin il a pris. Avertissez-le : il ne doit pas se rendre chez Lazare. »

      Ceux qui ont de bonnes jambes partent en vitesse… Et ils reviennent…

      « Il n’est plus là… Il s’est mêlé à la foule, et personne ne sait rien… »

      La foule, déçue, se sépare lentement…

      488.4 … Mais Jésus est bien plus près qu’ils ne le pensent. Sorti par quelque porte, il a fait le tour de l’Antonia et il a quitté la Cité par la Porte du Troupeau pour descendre dans la vallée du Cédron, qui a très peu d’eau au milieu de son lit. Il le franchit en sautant sur les pierres qui émergent de l’eau et se dirige vers le mont des Oliviers. A cet endroit, ils sont touffus et encore mélangés aux maquis qui rendent sombre, je dirais même funèbre, cette partie de Jérusalem, resserrée entre les murailles grises du Temple qui domine de ce côté de toute sa hauteur et le Mont des Oliviers de l’autre côté. Plus au sud, la vallée s’éclaircit et s’élargit, mais ici elle est vraiment étroite, un coup d’ongle d’une griffe gigantesque qui a creusé un sillon profond entre le mont Moriah et le mont des Oliviers.

      Jésus ne va pas vers Gethsémani, mais tout à l’opposé, en direction du nord, en marchant toujours sur la colline, qui s’élargit ensuite en une vallée sauvage où, plus proche d’un autre cirque de petites hauteurs, elles aussi sauvages et pierreuses, court le torrent qui dessine une courbe au nord de la ville. Aux oliviers succèdent les arbustes stériles, épineux, tordus, ébouriffés, mêlés à des ronces qui jettent leurs tentacules de tous côtés. C’est un lieu très triste, solitaire. Il a quelque chose d’infernal, d’apocalyptique. Il s’y trouve quelques tombeaux et rien de plus, pas même des lépreux. Qu’elle est étrange, cette solitude qui contraste avec la foule de la ville, si proche et si pleine de monde et de bruits ! Ici, à part le gargouillement de l’eau sur les pierres et le bruissement du vent dans les arbres qui ont poussé entre les pierres, on n’entend rien. Il manque même la note joyeuse des oiseaux, si nombreux dans les oliviers de Gethsémani et de l’oliveraie. Le vent plutôt fort qui vient du nord-est et soulève des petits tourbillons de poussière, repousse la rumeur de la ville, et le silence, le silence d’un lieu de mort, règne ici, oppressant, presque effrayant.

      488.5 « Mais on peut vraiment s’y rendre par là ? demande Pierre à Isaac.

      – Oui, oui. On peut aussi passer par d’autres routes, en sortant par la Porte d’Hérode, et de préférence par celle de Damas. Mais il est bon que vous connaissiez les sentiers moins connus. Nous avons fait le tour de tous les environs pour les connaître et vous les montrer. Vous pourrez aller ainsi où bon vous semblera dans les environs, sans prendre les chemins habituels.

      – Et… peut-on se fier aux habitants de Nobé ? demande encore Pierre.

      – Comme à ceux de ta propre maison. Thomas, l’hiver dernier, Nicodème toujours, le prêtre Jean son disciple, et d’autres ont fait de ce petit village un endroit qui lui appartient.

      – Et toi, tu as fait plus que tous, dit Benjamin (le berger).

      – Oh, moi… Tout le monde s’y est mis, si moi j’ai agi. Mais crois-moi, Maître, tu as des endroits sûrs tout autour de la ville …

      – Rama aussi… précise Thomas, qui tient à sa ville. Mon père et mon beau-frère ont pensé à toi avec Nicodème.

      – Alors Emmaüs aussi » ajoute un homme qui ne m’est pas inconnu, mais dont je ne sais dire au juste qui il est.

      D’ailleurs, j’ai trouvé plus d’un Emmaüs en Judée, sans parler de cette localité près de Tarichée.

      « C’est loin pour aller et venir comme je fais maintenant. Mais je ne manquerai pas d’y revenir quelquefois [3].

      – Chez moi aussi, dit Salomon.

      – Certainement, au moins une fois pour saluer le vieil homme.

      – Il y a aussi Béther.

      – Et Bet-çur.

      – Je n’irai pas chez les femmes disciples, mais quand ce sera nécessaire, je les ferai venir.

      – J’ai un ami sincère près d’En-Rogel [4]. Sa maison t’est ouverte et personne de ceux qui te haïssent ne pensera que tu es si près d’eux, dit Etienne.

      – Le jardinier des Jardins du roi peut te donner l’hospitalité. C’est un intime de Manahen, qui lui a obtenu cette place… et puis… tu l’as guéri un jour…

      – Moi ? Je ne le connais pas…

      – Il était, à la Pâque, parmi les pauvres que tu as guéris chez Kouza. La lame d’une faux souillée de fumier lui avait fait pourrir la jambe, et son premier maître l’avait renvoyé pour cette raison. Il mendiait pour ses enfants et tu l’as guéri. Manahen, profitant d’un bon moment d’Hérode Antipas pour lui obtenir ce poste, l’a placé aux jardins. Maintenant cet homme fait tout ce que Manahen lui dit. Et pour toi ensuite… dit Mathias (le berger).

      488.6 – Je n’ai jamais vu Manahen avec vous… » intervient Jésus en fixant longuement Mathias, qui change de couleur et se trouble. « Viens devant avec moi. »

      Le disciple le suit.

      « Parle !

      – Seigneur… Manahen s’est trompé… [5] et il souffre beaucoup, tout comme Timon et quelques autres encore. Ils n’ont pas de paix car tu…

      – Ils ne vont pas croire que j’éprouve de la haine pour eux…

      – Non, mais… ils ont peur de tes paroles et de ton visage.

      – Quelle erreur ! C’est justement parce qu’ils se sont trompés qu’ils doivent venir au Remède. Sais-tu où ils se trouvent ?

      – Oui, Maître.

      – Alors va les trouver et dis-leur que je les attends à Nobé. »

      Mathias s’éloigne sans perdre de temps.

      Le sentier de la montagne s’élève, donnant de Jérusalem une vue complète quand on la voit du nord… Jésus et ses disciples lui tournent le dos en allant précisément dans la direction opposée à la ville.





[1] Région à cheval entre le sud de la Bulgarie, le nord de la Grèce et la Turquie.

[2] Peuple d'origine iranienne établit à cette époque dans la Russie méridionale

[3] Il ne s'agit donc pas d'Emmaüs de la montagne, proche de Jérusalem et village des pèlerins. Les autres villages recensés sont : Emmaüs de la plaine et Emmaüs de Tibériade

[4] Quartier de Jérusalem, au sud du Temple.

[5] Lors de la tentative de couronnement de Jésus.




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-182.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/controverses-a-la-fete-des-tentes.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Dim 10 Jan - 19:41

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

489. A Nobé. Parabole du roi incompris de ses sujets. Miracle accompli sur le vent.

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 184.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 489.

Le vendredi 6 septembre 1946.

Mardi 18 septembre 29
Nobé


      489.1 C’est un bourg groupé, assez bien tenu. Les habitants sont restés à l’intérieur des maisons, car il y a beaucoup de vent. Mais quand les disciples viennent prévenir que Jésus est là, voilà que toutes les femmes, les enfants et les vieillards que l’âge a retenus chez eux, s’attroupent autour de Jésus, qui s’est arrêté sur la petite place principale. Le village, étant sur une hauteur, a de l’air et de la lumière même quand le temps est couvert et, de là, l’œil découvre Jérusalem au sud, et Rama au nord (je dis Rama car ce nom est écrit sur une borne avec l’indication des milles).

      Les gens sont tendus. Etre devenus ceux qui offrent l’hospitalité au Seigneur, est pour eux si nouveau, si émouvant… Un vieillard, un vrai patriarche, le dit au nom de tous, et les femmes acquiescent de la tête. Habitués à être écrasés sous l’orgueil des prêtres et des pharisiens, ils sont timides…

      Mais Jésus les met tout de suite à l’aise en prenant dans ses bras une fillette qui fait ses premiers pas, en faisant une caresse au vieillard, et en disant :

      « Vous ne m’aviez pas encore vu ?

      – De loin… Passer sur la route… Certains hommes t’ont aperçu au Temple. Mais pour nous, qui sommes si proches de la ville, c’est encore plus difficile d’obtenir ce qu’ont les autres en venant de loin, dit le vieillard.

      – C’est toujours comme ça, père. Ce qui semble faciliter les choses, les complique au contraire, parce que tous s’appuient sur la pensée que c’est tout simple. Mais nous allons maintenant faire connaissance. 489.2 Rentre chez toi, père. L’automne fait souffler ses vents, et ils ne sont pas favorables aux patriarches.

      – Je suis hélas resté seul. Le jour n’a plus aucune valeur pour moi…

      – Sa fille s’est mariée loin d’ici, et sa femme est morte aux Encénies, explique une femme.

      – Jean, tu ne dois pas parler ainsi, aujourd’hui que tu as le Rabbi avec toi. Tu l’as tant désiré ! lui dit une vieille femme.

      – C’est vrai. Mais… tu es le Messie, n’est-ce pas ?

      – Oui, père.

      – Alors que puis-je désirer de plus, maintenant que je l’ai vu et que s’est accomplie la promesse faite à Abraham ? Un jour où j’étais au Temple — ma Lia se purifiait de son unique enfantement, et j’étais auprès d’elle, et avant nous, une femme avait accompli le rite, une femme qui était à peine plus âgée qu’une enfant — … un vieillard chanta en embrassant le Bébé de cette toute jeune Mère : “ Maintenant Seigneur, laisse ton serviteur s’en aller en paix puisque mes yeux ont vu le Sauveur. ” [1] Ce Nouveau-né, c’était toi. Ah ! pour moi, quel bonheur ! Alors j’ai prié le Seigneur en disant : “ Fais que moi aussi, je puisse mourir après l’avoir connu. ” Maintenant, je te connais. Tu es ici. La main de mon Seigneur est posée sur ma tête. Sa voix m’a parlé. L’Eternel m’a exaucé. Et que dirai-je, sinon les paroles du vieux Siméon, qui était instruit et juste ? Je les répète : “ Seigneur, laisse ton serviteur s’en aller en paix, puisque mes yeux ont connu ton Christ ! ”

      – Tu ne veux pas attendre de voir son Règne ? demande une femme.

      – Non, Marie. Les fêtes ne sont pas pour les vieillards. Et moi, je ne crois pas ce que disent la plupart des gens. Je me rappelle les paroles de Siméon… Il a annoncé une épée dans le cœur de cette jeune Femme, car le Sauveur ne sera pas aimé de tout le monde… Il a dit que la ruine ou la résurrection viendraient pour beaucoup par lui… et il y a Isaïe… et il y a David… Non, je préfère mourir et attendre de là-bas sa grâce et son Règne…

      – Père, tu y vois plus clair que les jeunes. Mon Royaume est celui des Cieux. Mais pour toi, ma venue n’est pas ruine, car tu sais croire en moi. 489.3 Allons chez toi. Je reste avec toi. »

      Conduit par le vieillard, il se rend alors à une maisonnette blanche dans une petite rue au milieu des jardins, qui se sont dépouillés de leurs feuilles arrachées par le vent, et il y entre avec Pierre, les deux fils d’Alphée, et Jean.

      Les autres se répartissent dans les autres maisons… pour revenir un moment après s’entasser dans la maisonnette, le jardin, la terrasse sur le toit, jusqu’à monter sur le muret en pierres sèches qui sépare de la route un côté du jardin, sur un noyer puissant et sur un pommier robuste, sans se soucier du vent qui ne fait que forcir et soulève de la poussière.

      Ils veulent écouter Jésus. Après un instant d’hésitation, celui-ci commence à parler en se tenant sur le seuil de la cuisine, de façon que sa voix se fasse entendre à l’intérieur comme à l’extérieur de la maison.

      489.4 « Un roi puissant, dont le royaume était très vaste, voulut aller un jour visiter ses sujets. Il habitait dans un palais majestueux d’où, par ses serviteurs et ses messagers, il envoyait ses ordres et faisait parvenir ses bienfaits à ses sujets, qui connaissaient donc son existence, l’amour qu’il avait pour eux, ses projets ; mais, ne l’ayant jamais vu personnellement, ils ignoraient sa voix et son langage. En un mot, ils savaient qu’il était leur seigneur, mais rien de plus. Et, comme cela se produit souvent, de ce fait beaucoup de ses lois et de ses instructions étaient déformées, soit par mauvaise volonté, soit par incapacité à les comprendre, de sorte que cela portait tort aux intérêts des sujets tout comme aux désirs du roi, qui voulait les rendre heureux. Il était obligé de les punir parfois et il en souffrait plus qu’eux ; du reste, ces punitions n’amenaient pas d’amélioration. Il se dit alors : “ J’irai moi-même auprès d’eux, je leur parlerai directement. Je me ferai connaître. Ils m’aimeront, me suivront mieux et deviendront heureux. ” Et il quitta sa somptueuse demeure pour venir parmi son peuple.

      Sa venue occasionna un immense étonnement. Le peuple s’émut, s’agita, les uns avec joie, d’autres avec terreur, certains avec colère, d’autres encore avec défiance, ou même avec haine. Patient, sans jamais se lasser, le roi se mit à approcher aussi bien ceux qui l’aimaient, que ceux qui le craignaient ou le haïssaient. Il entreprit d’expliquer sa loi, d’écouter ses sujets, de leur procurer ses bienfaits, de les réconforter. Et plusieurs finirent par l’aimer, par ne plus le fuir parce qu’il était trop grand ; quelques-uns, peu nombreux, cessèrent même de s’en méfier et de le haïr. C’étaient les meilleurs. Mais beaucoup restèrent tels qu’ils étaient, sans faire preuve de bonne volonté. Le roi, qui était fort sage, supporta aussi cela, en se réfugiant dans l’amour des meilleurs pour être récompensé de ses fatigues.

      Qu’arriva-t-il néanmoins ? Même parmi les meilleurs, beaucoup ne pensaient pas comme lui. Il venait de si loin ! Son langage était si nouveau ! Ses volontés étaient si différentes de celles de ses sujets ! Et il ne fut pas compris par tous… Bien pis, certains le firent souffrir, et avec la souffrance lui firent subir des dommages, ou du moins risquèrent de les lui faire subir, pour l’avoir mal compris. Et quand ils se rendirent compte qu’ils lui avaient causé peine et tort, ils furent désolés, fuirent sa présence et ne vinrent plus vers lui, par crainte de ses reproches.

      Mais le roi avait lu dans leur cœur et chaque jour il les appelait par son amour. Il priait l’Eternel de lui accorder de les retrouver pour leur dire : “ Pourquoi me craignez-vous ? C’est vrai, votre incompréhension m’a peiné, mais j’ai vu qu’elle était sans malice, que c’était simplement le fruit de votre incapacité à comprendre mon langage si différent du vôtre. Ce qui m’afflige, c’est votre crainte. Elle me prouve que non seulement vous ne m’avez pas perçu comme roi, mais pas même comme ami. Pourquoi ne venez-vous pas ? Mais revenez donc ! Ce que la joie de m’aimer ne vous avait pas permis de comprendre, vous a été rendu clair par la douleur de m’avoir fait souffrir. Oh ! venez, venez, mes amis ! N’augmentez pas votre ignorance en restant loin de moi, vos doutes en vous cachant, vos amertumes en vous interdisant mon amour. Vous voyez ? Nous souffrons autant vous que moi d’être séparés. Moi, plus encore que vous. Venez donc, faites-moi cette joie. ”

      C’est ce que voulait dire le roi. Ce furent ses paroles. De même, Dieu s’adresse aux pécheurs et c’est ainsi que le Sauveur relève ceux qui peuvent s’être trompés.

     Voilà comment le Roi d’Israël parle à ses sujets, le vrai Roi d’Israël, celui qui veut conduire ses sujets du petit royaume de la terre au grand Royaume des Cieux. On ne peut y entrer si l’on ne suit pas le Roi, si l’on n’apprend pas à comprendre ses paroles et sa pensée. Mais comment comprendre si, à la première erreur, on fuit le Maître ?

      Que personne ne se laisse abattre s’il a péché et s’est repenti, s’il s’est trompé et reconnaît son erreur. Qu’il vienne à la Source qui efface les erreurs et qui procure lumière et sagesse, qu’il se désaltère auprès d’elle, car elle brûle de se donner et elle est venue du Ciel pour se livrer aux hommes. »

      489.5 Jésus se tait. Seul le vent fait entendre ses hurlements de plus en plus forts. En haut de la colline où se trouve Nobé, les rafales s’acharnent tellement que les arbres font entendre des craquements effrayants.

      Les habitants sont obligés de rentrer chez eux. Mais quand ils se sont éloignés et que Jésus revient à la maison et ferme la porte, Mathias, suivi de Manahen et de Timon, sort de derrière le muret et entre dans le petit jardin pour frapper à la porte close.

      Jésus en personne vient ouvrir.

      « Maître, les voilà !…» dit Mathias en montrant les deux hommes qui, honteux, sont restés au bord du jardin et n’osent pas lever la tête pour regarder Jésus.

      « Manahen ! Timon ! Mes amis ! » dit Jésus en sortant dans le jardin et en refermant la porte, pour indiquer à ceux de l’intérieur de ne pas sortir par curiosité.

      Et il s’avance vers eux, les bras tendus, déjà ouverts pour les étreindre.

      Touchés par l’amour qui tremble dans la voix du Maître, les deux hommes lèvent la tête, voient son visage et ses yeux tout pleins d’amour, et leur peur tombe, ils courent en avant et disent avec un cri rendu rauque par leurs larmes : “ Maître ! ”, puis ils se jettent à ses pieds pour étreindre ses chevilles, en baisant ses pieds nus qu’ils baignent de leurs larmes.

      « Mes amis ! Pas là ! Ici, sur mon cœur ! Je vous ai tant attendus ! Et j’ai si bien compris ! Allons !… »

      Et il cherche à les relever.

      « Pardon ! Ah ! ne nous refuse pas ton pardon, Maître. Nous avons tant souffert !

      – Je le sais. Mais si vous étiez venus plus tôt, c’est aussi plus tôt que je vous aurais dit : “ Je vous aime. ”

      – Tu nous aimes Maître ? Comme avant ? s’étonne Timon, en levant un visage interrogateur.

      – Plus qu’avant, car maintenant vous êtes guéris de toute humanité dans votre amour pour moi.

      – C’est vrai ! Oh ! mon Maître ! »

      Manahen bondit sur ses pieds et ne résiste plus. Il se jette sur la poitrine de Jésus, et Timon l’imite…

      « Vous voyez comme on est bien ici ? N’y est-on pas mieux que dans un pauvre palais royal ? Où m’avoir davantage, et plus puissant, doux, riche de trésors sans fin, qu’en me possédant comme Sauveur, Rédempteur, Roi spirituel, Ami affectueux ?

      – C’est vrai ! C’est vrai ! Oh ! ils nous avaient bien séduits ! Et il nous semblait qu’ils t’honoraient et que leurs idées étaient justes ! [2]

      – N’y pensez plus. C’est fini, cela appartient au passé. Laissez le temps, qui s’écoule aussi rapidement que le tourbillon qui nous frappe, l’emmener au loin, le disperser pour toujours… 489.6Mais entrons dans la maison. Il n’est pas possible de rester ici… »

      C’est en effet une vraie tornade qui arrive du nord sur le village. Des branches tombent, des tuiles volent, des murets de terrasse peu résistants s’écroulent avec fracas. Le noyer et le pommier se tordent comme s’ils voulaient s’arracher du sol.

      Ils entrent dans la maison, et les quatre apôtres regardent avec étonnement le visage, encore baigné de larmes, des deux disciples, contrastant avec leur sourire. Mais ils ne font aucune remarque.

      « Quelque malheur se prépare, soupire le vieux Jean.

      – Oui. Ceux qui sont dans les cabanes, je ne sais pas comment ils vont faire… » dit Pierre.

      Les rafales sont si fortes que les petites flammes d’une lampe à trois becs, allumée pour éclairer la pièce fermée, vacillent bien que les portes soient barrées.

      Au fracas du vent qui croît toujours plus et frappe la maison avec de la terre et des débris, au point qu’il semble tomber une grêle fine, se mêlent des cris de femmes de plus en plus proches. Ce sont des épouses épouvantées, des mères angoissées :

      « Nos maris ! Nos fils ! Ils sont sur les chemins. Nous avons peur. Un mur de la maison abandonnée s’est écroulé… Seigneur ! Jésus ! Pitié ! »

      489.7 Jésus se lève, ouvre non sans mal la porte que la bourrasque repousse de toute sa force. Des femmes, courbées pour résister au vent — c’est une vraie tornade sous un ciel menaçant — gémissent en tendant les bras.

      « Entrez. N’ayez pas peur ! » dit Jésus.

      Et il regarde le ciel et les arbres sur le point d’être déracinés.

      « Rentre, Jésus ! Tu vois comme les branches s’abattent et les tuiles tombent ? Il n’est pas prudent de rester dehors, crie Jude.

      – Pauvres oliviers ! C’est de la grêle. Là où elle tombe, la récolte est perdue » observe Pierre sentencieusement.

      Au lieu de rentrer, Jésus sort tout à fait dans le tourbillon qui tord son vêtement et soulève ses cheveux. Il ouvre les bras, prie, ordonne : “ Assez ! Je le veux ! ”, puis il rentre.

      Le vent pousse un dernier mugissement, puis il tombe tout d’un coup. Le silence qui se fait après pareil fracas est impressionnant. Il l’est tellement que des maisons se montrent des visages stupéfaits. Les signes de la tempête demeurent : feuilles, branches arrachées, lambeaux de rideaux. Mais tout est tranquille. Le firmament répond à la terre, qui n’est plus bouleversée, par un éclaircissement des nuages qui, de noirs, deviennent clairs, se dispersent sans faire de dégâts, mais en laissant tomber une pluie fine qui achève de purifier l’air souillé par tant de poussière.

      « Que s’est-il donc passé ?

      – C’est fini ?

      – La fin semblait venue, et maintenant il fait beau ! »

      Des voix s’interrogent d’une maison à l’autre.

      Les femmes qui étaient accourues près de Jésus se hâtent de sortir :

      « Le Seigneur ! Le Seigneur est avec nous ! Il a fait un miracle ! Il a arrêté le vent ! Il a brisé les nuages ! Hosanna ! Hosanna ! Louange au Fils de David ! Paix ! Bénédiction ! Le Christ est avec nous ! Il est avec nous, le Béni ! Le Saint ! Le Saint ! Le Saint ! Le Messie est avec nous ! Alléluia ! »

      Tout le village déverse ses habitants, les vrais et ceux qui s’y trouvent occasionnellement, c’est-à-dire les apôtres et les disciples qui accourent tous vers la maisonnette où se trouve Jésus. Chacun veut l’embrasser, le toucher, l’exalter.

      « Louez le Très-Haut. C’est lui le Maître des vents et de l’eau. S’il a écouté son Fils, cela a été pour récompenser la foi et l’amour que vous lui avez témoignés. »

      Il voudrait bien les congédier, mais qui pourrait calmer un village en fête, excité par un miracle évident ? Surtout si c’est un village rempli de femmes ! Les efforts de Jésus sont vains. Il sourit avec patience, tandis que le vieillard qui l’héberge baise sa main gauche qu’il arrose de ses larmes.

      489.8 Voici les premiers hommes, essoufflés, apeurés, qui reviennent de Jérusalem. Ils redoutent je ne sais quel malheur, mais voient le peuple en fête.

      « Qu’y a-t-il ? Que s’est-il passé ? Mais vous n’avez pas eu la tempête ? De la montagne, on voyait la ville disparaître sous des nuages de poussière. Nous croyions qu’elle était écroulée. Or ici, tout est normal !

      – Le Seigneur ! Le Seigneur ! Il est venu à temps pour nous sauver de la ruine. Seule est tombée la maison maudite, quelques tuiles et quelques branches. Et vous ? Qu’est-il arrivé à Jérusalem ? »

      Les questions et les réponses s’entrecroisent, mais les hommes se fraient un passage pour aller vénérer le Sauveur. Ensuite seulement, ils racontent la frayeur des citadens à cause de la tempête menaçante : tous s’enfuyaient des cabanes [3] dans les maisons, les propriétaires des oliviers pleuraient déjà leur récolte… quand, soudain, le vent s’était calmé et le ciel s’était éclairci en laissant tomber un peu de pluie… et toute la ville était dans la stupéfaction.

      L’imagination travaille vite dans certains cas : les témoins rapportent que pendant la fuite des gens, plusieurs, qui étaient allés au Temple les jours précédents, voyaient les rafales balayer le mont Moriah [4] au point de renverser les comptoirs des changeurs et de saccager la maison du Pontife. Ils en déduisaient que c’était un châtiment de Dieu pour les insultes faites à son Messie. Et patati et patata… Plus il arrivait de monde, plus les témoignages allaient bon train. Par moments, ils devenaient plus apocalyptiques que ne le seraient les récits du Vendredi Saint… [5]
   



[1] Le vieillard Siméon. Cf. 1.53

[2] Voir la tentative de couronnement de Jésus fomentée par ses partisans puissants  (7.156)

[3] C'est la fête des Tentes pendant laquelle on vit dans des cabanes de branchages

[4] Mont sur lequel le Temple est construit. Le Saint des Saints est à son sommet.

[5] Matthieu 27,50-53 – Marc 15,37-38 - Luc 23,44-46




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-184.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/parabole-du-roi-incompris-de-ses-sujets.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 11 Jan - 20:21

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

490. Jésus au champs des Galiléens avec ses cousins apôtres. Doutes sur Judas et conversion de Zacharie, le lévite

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 185.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 490.

Le 10 septembre 1946.

Mardi 18 septembre 29
Nobé


          490.1 « Jude et Jacques, venez avec moi. »

      Les deux fils d’Alphée ne se le font pas dire deux fois. Ils se lèvent immédiatement pour sortir avec Jésus d’une maisonnette d’un faubourg au sud de Jérusalem où ils sont accueillis aujourd’hui.

      « Où allons-nous, Jésus ? demande Jacques.

      – Saluer les Galiléens sur le mont des Oliviers. »

      Ils marchent quelque temps vers Jérusalem puis, rasant de petites collines où des maisons s’élèvent dans la campagne — certainement des maisons de maîtres —, ils coupent la route qui va à Béthanie et à Jéricho, la plus au sud qui va finir entre Tophet et Siloan, passent derrière une autre colline qui est déjà un contrefort du mont des Oliviers, coupent l’autre route qui mène directement du mont des Oliviers à Béthanie, et par une petite voie secondaire à travers les oliviers, ils montent au champ des Galiléens. Les tentes y sont très rares, et il reste, en souvenir de la foule, des branchages désormais flétris, jetés par terre, des reliquats de foyers rudimentaires qui ont brûlé l’herbe, des cendres, des tisons, tout un bric-à-brac comme il en subsiste toujours là où il y a eu un campement.

      La saison froide et précocement pluvieuse a hâté le départ des pèlerins. Des caravanes de femmes et d’enfants sont actuellement en partance. Les hommes, surtout ceux qui sont valides, sont restés pour terminer la fête.

      490.2 Les Galiléens qui croient dans le Seigneur ont été avertis peut-être par quelques disciples, car je les vois tous, et de tous les villages qui me sont le mieux connus. Nazareth est représentée par deux disciples, Alphée — celui a qui Jésus a pardonné après la mort de sa mère [1] —, et un autre. Je ne vois pourtant ni Joseph ni Simon, les fils d’Alphée. En revanche, d’autres ne manquent pas, parmi lesquels le chef de la synagogue, qui paraît visiblement embarrassé de saluer respectueusement Jésus après lui avoir tellement fait obstacle. Néanmoins, il se tire d’affaire en disant que les parents de Jésus sont logés chez “ cet ami que tu connais ” à cause des enfants qui souffraient du vent de la nuit. Cana est représentée par l’époux de Suzanne, son père et quelques autres, et de même Naïm par son ressuscité et d’autres encore. De nombreux habitants de Bethléem de Galilée ou des villes de la rive occidentale du lac sont ici…

      « Paix à vous ! Paix à vous ! » dit Jésus pour les saluer en passant au milieu d’eux, tout en caressant les enfants encore présents, ses petits amis des villages de Galilée, et en écoutant Jaïre lui dire combien il regrette de n’avoir pas été là la dernière fois.

      Jésus s’informe pour savoir si la veuve d’Aphéqa s’est établie à Capharnaüm et si elle a accepté l’orphelin de Giscala.

      « Je ne sais pas, Maître, peut-être étais-je déjà parti… dit Jaïre.

      – Oui, oui, il est venu une femme qui donne beaucoup de miel et de caresses aux enfants, et elle nous fait des fouaces. Les enfants qui venaient vers toi vont toujours manger chez elle. Et, le dernier jour, elle nous a fait voir un tout petit garçon. Elle a acheté deux chèvres pour le lait et elle nous a dit que c’est un enfant du Ciel et du Seigneur. Elle n’est pas venue à la fête comme elle le voulait, car elle ne pouvait pas amener avec elle un bébé aussi petit. Et elle nous a demandé, à nous, de te dire qu’elle l’aimera avec justice et qu’elle te bénit. »

      Les gamins de Capharnaüm gazouillent autour de Jésus, tout fiers de savoir, eux, ce que le chef de la synagogue ignore, et d’avoir, eux, servi d’ambassadeurs auprès du bon Maître, qui les écoute avec l’attention qu’il aurait pour des adultes, et qui répond :

      « Et vous lui direz que, moi aussi, je la bénis et qu’elle doit aimer les enfants pour moi. Quant à vous, aimez-la bien, n’abusez pas de sa bonté, ne l’aimez pas seulement pour le miel et les fouaces, mais parce qu’elle est bonne : bonne au point d’avoir compris que celui qui aime un innocent en mon nom me rend heureux. Et imitez-la tous, les petits et grands, en vous rappelant toujours que celui qui accueille un enfant en mon nom a sa place marquée dans le Ciel [2]. Car la miséricorde est toujours récompensée, même pour une seule coupe d’eau donnée en mon nom, [3] mais la miséricorde dont on fait preuve envers les petits, en les sauvant non seulement de la faim, de la soif, du froid, mais aussi de la corruption du monde, est infiniment récompensée… 490.3 Je suis venu pour vous bénir avant votre départ. Vous porterez ma bénédiction à vos femmes, à vos maisons…

      – Mais tu ne reviens pas chez nous, Maître ?

      – Si, je reviendrai… Mais pas maintenant. Après la Pâque… [4]

      – Ah ! si tu tardes tant, tu vas sûrement oublier ta promesse…

      – Ne craignez rien. Le soleil pourra cesser de briller avant que Jésus oublie ceux qui espèrent en lui.

      – Le temps va nous paraître bien long…

      – Et triste !

      – Si nous sommes malades…

      – Si nous avons des peines…

      – Si la mort descend dans nos maisons…

      – Qui nous aidera ? disent plusieurs de différents endroits.

      – Dieu. Il est avec vous, si vous restez en moi par votre volonté [5].

      – Et nous ? Nous croyons en toi depuis peu : nous l’avouons. Nous n’aurons pas de réconfort, alors ? Et pourtant, maintenant, depuis que nous t’avons vu faire des miracles et entendu parler dans le Temple, nous croyons vraiment en toi…

      – C’est pour moi une grande joie, car voir mes concitoyens sur le chemin du Salut est mon désir le plus ardent.

      – Tu nous aimes tant ? Mais pendant si longtemps nous t’avons offensé et nous nous sommes moqués de toi !

      – C’est le passé. Il n’existe plus. Soyez fidèles, à l’avenir, et en vérité je vous dis que sur la terre comme au Ciel, votre passé est effacé.

      – Tu restes avec nous ? Nous partagerons le pain comme tant de fois à Nazareth, quand nous étions tous pareils et que, le sabbat, nous nous reposions dans les oliviers, ou bien quand tu étais seulement Jésus, et que tu venais avec nous et comme nous à Jérusalem pour les fêtes… »

      Il y a un regret et une nostalgie du passé dans la voix des Nazaréens qui croient maintenant.

      « Je voulais aller voir Joseph et Simon. Mais je m’y rendrai plus tard. Vous êtes tous pour moi des frères en Dieu, et pour moi l’esprit et la foi ont plus de valeur que la chair et le sang, car ces derniers périssent alors que les autres sont immortels. »

      490.4 Et pendant que certains se hâtent de préparer le feu pour rôtir les viandes, d’y mettre des branches d’olives pour apprêter le repas, les plus âgés et les plus élevés socialement, de tous les endroits de la Galilée, se pressent en cercle autour de Jésus pour lui demander pourquoi, le matin et celui du jour précédent, il n’était pas au Temple et s’il s’y rendrait le lendemain, dernier jour de la fête.

      « J’étais autre part… Mais demain, j’y serai certainement.

      – Et tu parleras ?

      – Si je le peux… »

      Alphée, fils de Sarah, baisse la voix, et en regardant autour de lui, il dit tout bas au Maître :

      « Tes frères sont partis pour t’assurer de l’aide dans la ville… Un tel sait beaucoup de choses car, par les femmes, il est parent d’un homme du Temple… Joseph se préoccupe de toi, tu sais ? Au fond… il est bon.

      – Je le sais. Et il sera toujours meilleur quand il sera spirituellement bon. »

      De la ville arrivent d’autres Galiléens. Leur nombre augmente autour de Jésus, au grand déplaisir des enfants, qui se voient repoussés par les adultes et n’arrivent plus à s’approcher de Jésus, jusqu’à ce qu’il remarque leur foule innocente et boudeuse. Il sourit :

      « Laissez mes petits enfants venir à moi. » [6]

      A peine le cercle s’est-il rompu que, tout réjouis, ils s’élancent telle une volée d’oiseaux vers Jésus, qui les caresse tout en continuant de parler avec les adultes. Sa longue main encore brunie par le soleil de l’été passe et repasse sur les petites têtes brunes et châtaines avec, perdues parmi elles, quelques petites têtes blondes. Les enfants se serrent le plus possible contre lui, les petits visages cachés dans les vêtements, sous le manteau, accrochés à ses genoux, à ses côtés, avides de ses caresses, heureux de les obtenir.

      490.5 Ils mangent en cercle, après que Jésus a béni et distribué la nourriture, dans une paisible et amicale union des cœurs.

      Les autres, ceux qui ne suivent pas Jésus, regardent de loin, moqueurs et incrédules, mais personne ne se soucie d’eux…

      Le repas est fini. Jésus se lève le premier et appelle Jaïre, Alphée, Daniel de Naïm, Elie de Chorazeïn, Samuel (un ex-estropié de je ne sais où), puis un certain Urie, et encore l’un des nombreux Jean, l’un des nombreux Simon, un Lévi, un Isaac, Abel de Bethléem et d’autres, un par village en somme. Aidé par ses cousins, il fait autant de parts égales de deux bourses bien pleines et en donne une à chacun des appelés afin qu’il s’en serve pour les pauvres de son village. Il ne lui reste pas la moindre pièce.

      Puis il bénit l’assemblée et fait ses adieux. Il voudrait bien prendre congé pour se diriger vers Gethsémani et entrer dans la ville par la Porte des Brebis, mais presque tous le suivent, surtout les enfants qui ne lâchent pas son vêtement et les pans de son manteau, et le gênent certainement. Mais il les laisse faire…

      490.6 Et cet enfant de Magdala, Benjamin — celui qui avait dit un jour clairement à Judas ce qu’il pensait de lui — tire son vêtement jusqu’à ce que Jésus se penche pour l’écouter en particulier.

      « Il n’est plus avec toi, ce méchant ?

      – Quel méchant ? Avec moi, il n’y en a pas… répond Jésus avec un sourire.

      – Si, il y en a un ! Cet homme grand et noir qui riait… tu sais, celui à qui j’ai dit qu’il était beau du dehors, mais laid à l’intérieur… lui, il est mauvais.

      – Il parle de Judas, souffle Jude qui se tient derrière Jésus et qui l’entend.

      – Je sais » lui répond Jésus en se retournant.

      Puis il dit à l’enfant :

      « Bien sûr qu’il est avec moi, cet homme. C’est l’un de mes apôtres. Mais maintenant, il est très bon… Pourquoi hoches-tu la tête ? On ne doit pas penser du mal de son prochain, spécialement de ceux qu’on ne connaît pas. »

      L’enfant baisse la tête et se tait.

      « Tu ne me réponds pas ?

      – Tu ne veux pas que je dise des mensonges… et je t’ai promis de ne pas en dire, et je l’ai fait. Mais si maintenant je dois croire qu’il est bon, je dis une chose qui n’est pas vraie, car je pense qu’il est mauvais. Je peux garder ma bouche fermée pour te faire plaisir, mais je ne peux pas tenir ma tête fermée pour ne pas penser. »

      La sortie est si impétueuse et si logique dans sa simplicité encore enfantine, que tous ceux qui l’entendent se mettent à rire. Tous, sauf Jésus qui soupire et répond :

      « Eh bien, tu dois faire une chose : prier pour qu’il devienne bon, si vraiment il te semble mauvais. Tu dois être son ange gardien. Le feras-tu? S’il devient meilleur, j’en aurai plus de joie ; donc en priant pour lui, tu pries pour que je sois heureux.

      – Je vais le faire, mais s’il est mauvais et ne devient pas bon avec toi, ma prière ne servira à rien. »

      Jésus coupe la discussion en s’arrêtant et en se penchant pour embrasser les enfants. Puis il ordonne à tous de s’en retourner…

      490.7 Quand Jésus et ses deux cousins restent seuls, Jude, après un moment de réflexion en silence, conclut :

      « Il a raison ! Il a entièrement raison ! Je suis du même avis que lui.

      – Mais de qui parles-tu ? lui demande son frère Jacques qui marchait en avant, l’air un peu absorbé, sur un sentier étroit où il ne peut passer qu’une personne à la fois.

      – De Benjamin, et de ce qu’il a dit. Et… mais toi tu ne veux pas l’entendre et je t’assure moi aussi que Judas est… Non, ce n’est pas un véritable apôtre… Il n’est pas sincère, il ne t’aime pas, il ne…

      – Jude ! Jude ! Pourquoi me fais-tu souffrir ?

      – Mon Frère, c’est parce que je t’aime. Et j’ai peur de Judas, plus que d’un serpent…

      – Tu es injuste. Sans lui, peut-être, j’aurais été déjà pris.

      – Jésus a raison. Judas a fait beaucoup. Il s’est attiré des haines et des railleries sans ménagement, mais il a travaillé et il travaille pour Jésus, dit Jacques.

      – Il m’est impossible de penser que tu es un naïf, ou un menteur… Alors je me demande bien pourquoi, toi, tu soutiens Judas. Je ne parle pas par jalousie, ni par haine. Je dis cela parce que je sens en moi qu’il est malfaisant, qu’il manque de sincérité… Tout ce que je puis admettre, par amour pour toi, c’est qu’il soit fou. Un pauvre fou, qui aujourd’hui délire dans un sens, demain dans un autre. Mais bon, non, il ne l’est pas. Méfie-toi, Jésus ! Méfie-toi… Aucun de nous n’est parfait, mais regarde-nous bien : nos yeux sont limpides. Observe-nous bien : notre conduite ne change pas. Cela ne te surprend pas que les pharisiens ne lui fassent pas payer ses railleries, que ceux du Temple ne réagissent pas à ses paroles ? Cela ne t’étonne pas qu’il ait toujours des amis justement parmi ceux qu’il offense apparemment et qu’il ait toujours de l’argent ? Je ne parle pas de nous deux, mais même Nathanaël qui est riche, même Thomas qui ne manque pas de moyens, n’ont que le nécessaire. Alors que lui… »

      Jésus garde le silence…

      Jacques insinue :

      « Mon frère a en partie raison. Il est certain que Judas trouve toujours moyen d’être seul, de partir seul, de… Mais je ne veux pas murmurer et juger. Tu sais…

      – Oui, je sais. Et c’est pour cela que je dis que je ne veux pas de jugement. Quand vous serez dans le monde pour me remplacer, vous approcherez des individus bien plus étranges que Judas. Quels apôtres serez-vous si vous les laissez de côté parce qu’ils sont étranges ? C’est justement parce qu’ils le sont que vous devrez les aimer d’un patient amour pour faire d’eux des agneaux du Seigneur. 490.8 Maintenant, allons chez Joseph et Simon. Vous avez entendu, n’est-ce pas ? Eux travaillent en secret pour moi. Vous allez dire : en famille, on se soutient. Oui, c’est vrai. Mais c’est toujours de l’amour. Vous vous êtes quittés en mauvais termes la dernière fois. Réconciliez-vous maintenant. Eux et vous avez à la fois tort et raison. Que chacun reconnaisse ses propres torts et ne fasse pas valoir sa part de raison.

      – Il m’a beaucoup offensé en t’offensant extrêmement, dit Jacques.

      – Tu ressembles beaucoup à Joseph, mon père. Et Joseph, ton frère, ressemble à Alphée, votre père. Eh bien : Joseph fut souvent critiqué par son frère aîné mais, chaque fois, il s’est montré indulgent et a pardonné, car mon père était un grand juste ! A toi de l’être autant que lui.

      – Et s’il me fait des reproches comme si j’étais encore un enfant ? Tu sais que, lorsqu’il est fâché, il n’entend pas raison…

      – Garde le silence : c’est l’unique moyen de calmer la colère. Tais-toi avec humilité et patience, et si tu sens que tu ne peux le faire sans impolitesse, va-t’en. Savoir se taire, savoir fuir, non par lâcheté, ni parce que l’on ne sait plus que dire, mais par vertu, par prudence, par charité, par humilité. Dans les discussions, il est si difficile de conserver la justice, tout comme la paix de l’esprit ! Quelque chose descend toujours pour altérer les profondeurs, pour troubler, pour faire du vacarme. L’image de Dieu qui se reflète en toute âme bonne s’en trouve ternie, elle s’évanouit, et on ne peut plus écouter ses paroles. Paix ! Paix entre frères. Paix même avec les ennemis. S’ils sont nos ennemis, ils sont les amis de Satan. Mais voudrions-nous devenir, nous aussi, des amis de Satan, en haïssant ceux qui nous haïssent ? Comment pourrions-nous les amener à l’amour, si nous sommes en dehors de l’amour ? Vous me dites : “ Jésus, tu l’as déjà dit de nombreuses fois et tu agis de la sorte, mais tu es toujours haï. ” Je le répéterai toujours. Quand je ne serai plus avec vous, je vous l’inspirerai du Ciel. Je vous recommande aussi de ne pas compter les défaites, mais les victoires. Louons-en le Seigneur! Il ne se passe pas de lune qui ne soit marquée par quelque conquête. C’est cela que doit remarquer l’ouvrier de Dieu, en s’en réjouissant dans le Seigneur, sans le dépit qu’ont ceux du monde quand ils perdent l’une de leurs pauvres victoires. Si vous agissez ainsi…

      490.9 – Paix à toi, Maître. Tu ne me reconnais pas ? dit un jeune homme qui remontait de la ville vers Gethsémani.

      – Toi ?… Tu es le lévite qui, l’an dernier, était avec nous, avec le prêtre.

      – C’est bien moi. Comment m’as-tu reconnu, toi qui vois tant de monde autour de toi ?

      – Je n’oublie pas les visages, les âmes et ce qui les caractérise.

      – Qu’est-ce qui caractérise mon âme ?

      – Elle est bonne et insatisfaite. Tu es las de ce qui t’entoure, ton esprit vise à des espirations supérieures. Tu pressens qu’elles existent. Tu sens qu’il est temps de te décider pour un bien éternel, tu sens qu’au-delà des brumes, il y a un Soleil, la Lumière. Tu veux la Lumière. »

      Le jeune homme se jette à genoux :

      « Maître, tu l’as dit ! C’est vrai. C’est ce que j’ai dans le cœur, et je n’arrivais pas à me décider. Le vieux prêtre Jonathas a cru, puis il est mort. Il était âgé, moi je suis jeune. Mais je t’ai entendu parler au Temple… Ne me repousse pas, Seigneur, car là-bas tous ne te haïssent pas, et je suis de ceux qui t’aiment. Dis-moi ce que je dois faire, comme lévite…

      – Ton devoir, jusqu’au temps nouveau. Réfléchir, car tu ne vas pas vers la gloire terrestre en venant à moi, mais vers la souffrance. Si tu persévères, tu obtiendras la gloire au Ciel. Instruis-toi dans ma doctrine ; affermis-toi en elle…

      – Avec quoi ?

      – Le Ciel lui-même te soutiendra par ses signes. Deviens fort à l’aide de mes disciples ; apprends et pratique de plus en plus ce que j’ai enseigné. Agis de la sorte, et tu auras la vie éternelle.

      – Je le ferai, Seigneur. Mais… puis-je encore servir au Temple ?

      – Je te l’ai dit : jusqu’au temps nouveau.

      – Bénis-moi, Maître. Ce sera ma nouvelle consécration. »

      Jésus le bénit et l’embrasse. Ils se séparent.

      490.10 « Vous voyez ? C’est cela, la vie des ouvriers du Seigneur. Il y a un an que la semence est tombée dans ce cœur, et cela n’a pas semblé être une victoire, puisqu’il n’est pas venu aussitôt à nous. Un an plus tard, le voilà qui arrive pour confirmer mes propos de tout à l’heure. C’est une victoire. Et n’embellit-elle pas notre journée ?

      – Tu as toujours raison, mon Jésus… Mais fais attention à Judas ! Je regrette de le répéter. Je le sais. Tu le sais… Mais j’ai ce tourment au fond du cœur … Je n’en parle pas aux autres, mais … je suis certain qu’ils l’ont eux aussi. »

      Jésus ne réplique pas. Il dit :

      « Je suis content que Joseph et Nicodème m’aient donné cet argent, ainsi j’ai pu envoyer une aide à mes petits pauvres de Galilée… »

      Les voilà arrivés à la Porte et, à peine entrés en ville, ils se perdent dans la foule.
   



[1] Je ne vois que Samuel, celui qui fit mourir de chagrin sa mère Esther. Il fut pardonné sur la prière de Marie et le dernier désir de sa mère mourante (Cf. 6.151). Il s'agit donc ici soit d'un autre personnage, soit d'un lapsus de Maria Valtorta. Les "Alphée" vivants de Galilée sont : Alphée de Sara, le voisin de la sainte Famille, Alphée, le jeune neveu de Jésus, Alphée de Capharnaüm, un personnage de rencontre qui aurait reçu des bienfaits. Aucun ne semble correspondre à la situation décrite ici.

[2] Matthieu 18,4 – Luc 9,48

[3] Matthieu 10,42 – Marc 9,41

[4] Il sera alors ressuscité. Cf. Matthieu 28,10 – Marc 16,7

[5] Jean 14,10 : " Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi? Ce que je vous dis, je ne le dis pas de moi-même: le Père demeure en moi et c’est lui qui accomplit ainsi ses propres œuvres"

[6] Cf. Marc 10,14 et Luc 18,16 : " Laissez donc les petits enfants venir à moi, ne les en empêchez pas, car le royaume de Dieu appartient à ceux qui leur ressemblent".




Observations

Zacharie le lévite et la nappe de la Cène

Zacharie est un jeune lévite du Temple. Hésitant pendant un an, il finit par surmonter sa crainte, et rejoint Jésus qui lui conseille : « Ton devoir, jusqu'au temps nouveau. Réfléchir, car tu ne vas pas vers la gloire terrestre en venant à Moi, mais vers la souffrance. Si tu persévères, tu auras la gloire au Ciel. Instruis-toi dans ma doctrine ; affermis-toi en elle… ». (EMV 490.9/10). Jésus ressuscité lui apparaît. « “Pardonne-moi, Seigneur. J'ai péché. J'ai accueilli en moi le doute sur ta vérité.” “Plus que toi sont coupables ceux qui cherchent à séduire ton esprit. Ne cède pas à leurs tentations. Je suis un corps vivant et réel. Sens le poids et la chaleur, la consistance et la force de ma main.” Il lui prend l'avant-bras et le lève avec force en disant :“Lève-toi et marche dans les voies du Seigneur, hors du doute et de la peur. Et tu seras heureux si tu sais persévérer jusqu'à la fin” » (EMV 632.31). Il est alors accueilli parmi les 72 disciples.


Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Doutes-sur-judas-et-conversion-de-zacharie-le-leviteAncienne église Saint-Pierre (Vienne)


Deux chroniques du 7e siècle rapportent que saint Pierre nomma évêque de la ville de Vienne, dans la vallée du Rhône, un disciple nommé Zacharie. Il demeura à Vienne 42 ans et y laissa une précieuse relique que lui avait confiée saint Pierre : un morceau de la nappe de lin sur laquelle Jésus célébra la dernière Cène. Il est très peu probable que Maria Valtorta ait eu connaissance de cette tradition locale, qui apporte une racine historique à son personnage. Et réciproquement Maria Valtorta nous éclaire sur ce saint peu connu de nos jours, et qualifié au 9e siècle de prothomartir Galliarum dans la chronique d’Adon.

La sainte nappe (la sainte toaille, ou le saint mantil), propriété de l'abbaye de Saint-Pierre, était offerte à la vénération des fidèles aux fêtes de Pâques et de la Pentecôte, et au 13e siècle le pape Innocent IV avait accordé de nombreuses indulgences à cette occasion. L'affluence des pèlerins était alors si grande, que les hôtelleries ne pouvaient les contenir, et qu'une partie de ces derniers étaient obligés de passer la nuit dans les églises ou sur les places publiques (1). Cette précieuse relique semble avoir été détruite lors de la Révolution française.

(1) Jean Lelièvre, Histoire de l'antiquité et sainteté de la cité de Vienne 1623.
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-185.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/doutes-sur-judas-et-conversion-de-zacharie-le-levite.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 12 Jan - 21:34

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

491. Au Temple pour le dernier jour de la fête des Tentes. Discours sur l'eau vive

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 186.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 491.

Le 13 septembre 1946.

Mercredi 19 septembre 29
Jérusalem


      491.1 Le Temple regorge de monde. Il y manque pourtant l’élément féminin et les enfants. La persistance d’une saison venteuse et d’averses précoces, violentes, même si elles sont brèves, doit avoir poussé les femmes à partir avec les enfants. Mais les hommes de toute la Palestine et les prosélytes de la Diaspora ont envahi le Temple pour faire les dernières prières, les dernières offrandes, et écouter les derniers enseignements des scribes.

      Les Galiléens qui suivent Jésus sont au complet, avec les chefs les plus importants au premier rang, et au milieu, très pénétré de sa qualité de parent, se trouve Joseph, fils d’Alphée, avec son frère Simon. Un autre groupe serré et qui attend, c’est celui des soixante-douze disciples. Je les nomme ainsi pour indiquer les disciples choisis par Jésus pour évangéliser. Leur nombre a changé, et aussi les visages : certains des anciens n’y sont plus, après la défection qui a suivi le discours sur le Pain du Ciel, et d’autres nouveaux s’y sont joints, comme Nicolaï d’Antioche. Un troisième groupe, très uni lui aussi et bien nombreux, c’est celui des juifs, parmi lesquels je vois les chefs des synagogues d’Emmaüs, d’Hébron, de Kérioth ; de Yutta, c’est le mari de Sarah qui est présent, et de Bet-Çur, les parents d’Elise [1].

      Ils se trouvent près de la Belle Porte, et il est clair qu’ils ont intention d’entourer le Maître dès qu’il va paraître. En effet, Jésus ne peut faire un pas à l’intérieur de l’enceinte sans que ces trois groupes l’entourent, comme pour l’isoler des malveillants ou même des simples curieux.

      Jésus se dirige vers la Cour des Juifs pour les prières, et les autres le suivent en groupe compact autant que la foule le leur permet, sourds au mécontentement de ceux qui doivent s’écarter pour faire place au grand nombre de personnes qui entourent Jésus. Lui reste en compagnie de ses frères. Toutefois le regard de Joseph, fils d’Alphée, n’est pas doux comme celui de Jésus, ni son attitude aussi humble : il dévisage certains pharisiens d’une manière très expressive…

      Après avoir prié, ils reviennent à la Cour des Païens. Jésus s’assied humblement par terre, le dos au mur du portique. Il se forme un demi-cercle qui devient de plus en plus serré en raison des files de personnes qui se placent derrière ceux qui sont plus près de lui, s’asseyent ou s’adossent en restant debout : ce sont d’autant plus d’yeux et d’oreilles qui convergent vers un unique Visage. Les curieux, les ignorants venus de loin, les malveillants se tiennent au-delà de cette barrière de fidèles et s’efforcent de voir en allongeant le cou et en se dressant sur la pointe des pieds.

      Pendant ce temps, Jésus écoute tel ou tel qui lui demande des conseils ou rapporte des informations. Ainsi, les parents d’Elise donnent de ses nouvelles et demandent si elle peut venir servir le Maître. Et lui répond :

      « Je ne reste pas ici. Elle viendra plus tard. »

      Un parent de Marie, femme de Simon — la mère de Judas —, lui dit qu’elle est restée pour garder l’exploitation, mais qu’elle est presque toujours avec la mère de Joanne. Judas, étonné, écarquille les yeux, mais ne dit mot. Puis c’est le mari de Sarah qui lui annonce la proche naissance d’un autre enfant et lui demande comment l’appeler. Jésus répond :

      « Jean, si c’est un garçon, ou Anne, si c’est une fille. »

      Et le vieux chef de la synagogue d’Emmaüs lui murmure doucement quelque cas de conscience, auquel Jésus répond doucement. Et ainsi de suite.

      491.2 Entre-temps, l’assistance n’a cessé de croître. Jésus lève la tête et regarde. Comme le portique est surélevé de quelques marches, il domine une bonne partie de la cour, de ce côté, tout en restant assis par terre, et il voit quantité de visages.

      Il se lève et dit, de toute la puissance de sa voix juste et forte :

      « Que celui qui a soif vienne à moi et qu’il boive ! Du sein de ceux qui croient en moi jailliront des fleuves d’eau vive. »

      Sa voix remplit la vaste cour, les splendides portiques, elle franchit certainement ceux qui sont de ce côté et se propage ailleurs, dominant tout autre son, telle un tonnerre harmonieux plein de promesses. Après ces paroles, il se tait quelques instants comme s’il avait voulu énoncer le thème du discours et ensuite donner le temps à ceux que cela n’intéresse pas de s’en aller sans déranger plus tard. Les scribes et les docteurs se taisent, ou plutôt baissent la voix en un murmure certainement malveillant. Quant à Gamaliel, je ne le vois pas.

      Jésus s’avance au milieu de la foule, qui s’ouvre à son arrivée pour se refermer derrière lui, de sorte que le demi-cercle se change en anneau. Il marche lentement, majestueusement. Il semble glisser sur les marbres polychromes du dallage, avec le manteau un peu ouvert, qui lui fait une sorte de traîne. Il va jusqu’au coin du portique, de la marche qui donne sur la cour, et s’arrête là. Il domine ainsi deux côtés de la première enceinte. Il lève le bras droit — c’est le geste qu’il fait d’ordinaire quand il commence à parler — et, de la main gauche sur la poitrine, il retient son manteau.

      Il répète ses mots du début :

      « Que celui qui a soif vienne à moi et boive ! Du sein de ceux qui croient en moi jailliront des fleuves d’eau vive !

      491.3 Celui qui a assisté à la théophanie [2] du Seigneur, le grand Ezéchiel, prêtre [3] et prophète, avait vu prophétiquement les actes impurs accomplis dans la maison profanée du Seigneur, il avait vu — toujours prophétiquement — que seuls ceux qui sont marqués du Tau seront vivants dans la vraie Jérusalem, alors que les autres connaîtront massacre, condamnation, et châtiment [4]. Ô vous qui m’écoutez, ce temps est proche, plus proche que vous ne l’imaginez. C’est pourquoi je vous exhorte, en tant que Maître et Sauveur, à ne pas tarder davantage à vous marquer du Signe qui sauve, à rechercher et à intérioriser la lumière et la sagesse, à vous repentir et à pleurer, pour vous et pour les autres, pour pouvoir vous sauver. Ezéchiel, donc, après avoir vu tout cela, et plus encore, décrit une terrible vision : celle des ossements desséchés [5].

      Un jour viendra où, sur un monde mort, sous un firmament éteint, apparaîtront au son de la trompette angélique des multitudes d’ossements de morts. Comme un ventre qui s’ouvre pour enfanter, ainsi la terre expulsera de ses entrailles tous les os des hommes qui sont morts sur elle et ont été ensevelis dans sa boue, depuis Adam jusqu’au dernier homme. C’est alors que se produira la résurrection des morts, pour le grand et suprême jugement après lequel, tel une pomme de Sodome, le monde se videra pour devenir néant. Ce sera la fin du firmament et de ses astres. Tout prendra fin, sauf deux demeures éternelles, éloignées, aux extrémités de deux abîmes d’une profondeur incalculable, en opposition quant à la forme, à l’aspect et à la manière dont la puissance de Dieu se poursuivra éternellement en eux : le Paradis : lumière, joie, paix, amour ; et l’Enfer : ténèbres, souffrance, horreur, haine.

      491.4 Mais croyez-vous que, parce que le monde n’est pas encore mort et que les trompettes angéliques ne sonnent pas le rassemblement, le champ sans limites de la terre n’est pas couvert d’ossements sans vie, complètement desséchés, inertes, séparés, morts, morts, morts ? En vérité, je vous dis qu’il en est ainsi. Parmi les êtres vivants — parce qu’ils respirent encore —, innombrables sont ceux qui ressemblent à des cadavres, aux ossements desséchés vus par Ezéchiel. Qui sont-ils ? Tous ceux qui n’ont pas en eux la vie spirituelle.

      Il y en a en Israël comme dans le monde entier. Que, parmi les païens et les idolâtres, il n’y ait que des morts qui attendent d’être vitalisés par la Vie, c’est chose naturelle, et qui ne fait souffrir que ceux qui possèdent la vraie sagesse : celle-ci leur permet en effet de comprendre que l’Eternel a créé les créatures pour lui et non pour l’idolâtrie, et il s’afflige d’en voir tant dans la mort. Mais si le Très-Haut éprouve une telle douleur — et elle est déjà grande —, que doit-elle être pour les membres de son Peuple, qui sont des ossements blanchis, sans vie, sans esprit ?

      Ceux qui ont été élus, préférés, protégés, nourris, instruits par lui directement, ou par ses serviteurs et ses prophètes, pourquoi doivent-ils être coupablement des ossements desséchés, alors que pour eux, il a toujours coulé du Ciel un filet d’eau vitale qui les a abreuvés de vie et de vérité ? Pourquoi se sont-ils desséchés, eux qui ont été plantés dans la terre du Seigneur ? Pourquoi leur âme est-elle morte, quand l’Esprit éternel a mis à leur disposition tout un trésor de sagesse pour qu’ils l’atteignent et en vivent ? Lequel d’entre eux, et par quel prodige, pourra revenir à la vie, s’ils ont abandonné les sources, les pâturages, les lumières données par Dieu, s’ils avancent à tâtons dans le brouillard, boivent à des sources qui ne sont pas pures, et se repaissent d’aliments qui ne sont pas saints ?

      Ils ne reviendront donc jamais à la vie? Si. Je le jure au nom du Très-Haut. Beaucoup ressusciteront. Dieu a déjà préparé ce miracle, et même il est déjà à l’œuvre, il a déjà agi en certains, et des ossements desséchés se sont revêtus de vie : le Très-Haut, à qui rien n’est interdit, a tenu sa promesse, y reste fidèle et ne cesse de la parachever. Du haut des Cieux, il crie à ces ossements qui attendent la vie : “ Voici, je vais répandre en vous l’esprit et vous vivrez. ” Et il a pris son Esprit, il s’est pris lui-même, il a formé une chair pour revêtir sa Parole, et l’a envoyée à ces morts pour que, par elle, la vie se répande de nouveau en eux.

      Que de fois, au cours des siècles, Israël a crié : “ Nos os sont desséchés, notre espérance est morte, nous sommes séparés ! ” Mais toute promesse est sacrée, toute prophétie est vraie. Voici venu le temps où l’Envoyé de Dieu ouvre les tombes pour en faire sortir les morts et les vivifier, pour les conduire avec lui dans le véritable Israël, dans le Royaume du Seigneur, dans le Royaume de mon Père et du vôtre.

      491.5 Je suis la Résurrection et la Vie ! Je suis la Lumière venue pour éclairer ceux qui gisaient dans les ténèbres ! Je suis la source d’où jaillit la vie éternelle. Celui qui vient à moi ne connaîtra pas la mort. Que celui qui a soif de vie vienne et boive. Que celui qui veut posséder la Vie, c’est-à-dire Dieu, croie en moi, et de son sein jailliront non pas des gouttes, mais des fleuves d’eau vive. Car ceux qui croient en moi, formeront avec moi le Temple nouveau d’où jaillissent les eaux du salut dont parle Ezéchiel.

      Venez à moi, ô peuples ! Venez à moi, ô créatures ! Venez former un unique Temple, car je ne repousse personne, mais par amour je vous veux avec moi, dans mon travail, dans mes mérites, dans ma gloire.

      “ Et je vis les eaux qui sortaient de dessous le seuil du Temple, vers l’orient… Et les eaux descendaient de dessous le côté droit, au sud de l’autel. ” [6]

      Ce Temple, ce sont ceux qui croient dans le Messie du Seigneur, dans le Christ, dans la Loi nouvelle, dans la Doctrine du temps du salut et de la paix. Comme les murs de ce temple sont formés de pierres, c’est d’âmes vivantes que seront formées les murailles mystiques du Temple qui ne mourra pas pour toujours et qui, de la terre, s’élèvera vers le Ciel, comme son Fondateur, après la lutte et l’épreuve.

      Cet autel d’où jaillissent les eaux, cet autel à l’orient, c’est moi. Et mes eaux jaillissent de la droite, car la droite est la place des élus au Royaume de Dieu. Elles jaillissent de moi, pour se déverser en mes élus et les enrichir des eaux vitales, chargés de les conduire, de les répandre au nord et au midi, au levant et au couchant, pour donner la vie à la terre chez ses peuples qui attendent l’heure de la lumière, l’heure qui viendra, qui devra absolument venir partout, avant que la terre ne cesse d’exister.

      Mes eaux jaillissent et se répandent, mêlées à celles que moi-même j’ai données et donnerai à mes disciples. Tout en étant répandues pour bonifier la terre, elles seront unies en un seul fleuve de grâce, de plus en plus profond, de plus en plus vaste, qui s’accroîtra jour après jour, pas après pas, des eaux des nouveaux fidèles, jusqu’à devenir comme une mer qui baignera tous les lieux pour sanctifier la terre entière.

      491.6 Dieu le veut, Dieu le fait. Un déluge a lavé le monde en donnant la mort aux pécheurs. Un nouveau déluge, d’un fluide qui ne sera pas de la pluie, lavera le monde pour lui donner la vie.

      Et, par une mystérieuse action de grâce, les hommes pourront faire partie de ce déluge sanctificateur en unissant leur volonté à la mienne, leurs fatigues à la mienne, leurs souffrances à la mienne. Alors le monde connaîtra la vérité et la vie, et qui voudra y participer le pourra. Seuls ceux qui ne voudront pas être nourris des eaux de la Vie deviendront un lieu marécageux et pestilentiel, ou resteront tels et ne connaîtront pas les récoltes abondantes des fruits de grâce, de sagesse, de salut que possèderont les hommes qui vivront en moi.

      En vérité, je vous dis, une fois de plus, que celui qui a soif et vient à moi, boira et n’aura plus soif, car ma grâce ouvrira en lui des sources et des fleuves d’eau vive. Et celui qui ne croit pas en moi périra comme un marais salant où la vie ne peut subsister.

      En vérité, je vous dis qu’après moi la source ne se tarira pas, car je ne mourrai pas, mais je vivrai. Et après que je serai parti — parti et non pas mort —, pour ouvrir les portes des Cieux, un Autre viendra qui est pareil à moi, et qui achèvera mon œuvre, en vous faisant comprendre ce que je vous ai dit et en vous embrasant pour faire de vous des “ lumières ”, puisque vous avez accueilli la Lumière. »

      Jésus se tait.

      491.7 La foule, qui est restée silencieuse sous l’empire du discours, chuchote maintenant, et commente de différentes façons.

      Quelqu’un dit :

      « Quelles paroles ! C’est un vrai prophète ! »

      Un autre :

      « C’est le Christ, je vous l’assure ! Jean lui-même ne parlait pas ainsi, et aucun prophète n’est aussi fort.

      – Et puis, lui nous fait comprendre les prophètes, même Ezéchiel, dont les symboles sont si obscurs.

      – Tu as entendu, hein ? Les eaux ! L’autel ! C’est clair !

      – Et les ossements desséchés ? Tu as vu comme les scribes, les pharisiens et les prêtres se sont troublés ? Ils ont compris le psaume !

      – Oui ! Et ils ont envoyé les gardes. Mais eux !… Ils ont oublié de le prendre et ils sont restés comme des enfants qui voient des anges. Regarde-les là-bas ! Ils semblent ébahis.

      – Regarde ! Regarde ! Un magistrat les rappelle et les semonce. Allons écouter ! »

      Pendant ce temps, Jésus guérit des malades qu’on lui a amenés, et ne il se soucie de rien d’autre jusqu’au moment où, se frayant un passage dans la foule, arrive à Jésus un groupe de prêtres et de pharisiens, qui ont à leur tête un homme d’environ trente, trente-cinq ans, et que tout le monde fuit avec une crainte qui ressemble à de la terreur.

      « Tu es encore ici ? Va-t’en, au nom du grand-prêtre ! »

      Jésus se redresse — il était penché sur un paralytique — et le regarde avec calme et douceur. Puis il se courbe de nouveau pour imposer les mains au malade.

      « Va-t’en ! Tu as compris, séducteur des foules ? Sinon, nous te ferons arrêter.

      – Va, et loue le Seigneur par une vie sainte » dit Jésus au malade qui se lève, guéri.

      C’est son unique réponse alors que ceux qui le menacent crachent leur venin, mais la foule, par ses hosannas, les avertit de ne pas faire de mal à Jésus.

      Mais, si Jésus est doux, Joseph, fils d’Alphée, ne l’est pas. Il se redresse en bombant la poitrine, rejetant sa tête en arrière pour paraître plus grand, et il crie :

      « Eléazar, toi et tes semblables, vous voudriez abattre le sceptre du Fils élu de Dieu et de David, mais sache que tu es en train de couper tout arbre, et pour commencer, le tien dont tu es si fier, car ton iniquité agite au-dessus de ta tête l’épée du Seigneur ! »

      Il aurait volontiers poursuivi, mais Jésus lui pose la main sur l’épaule en disant :

      « Paix, paix, mon frère ! »

      Et Joseph, rouge d’indignation, se tait.

      491.8 Ils se dirigent vers la sortie. Une fois hors de l’enceinte, on vient rapporter à Jésus que les chefs des prêtres et les pharisiens ont reproché aux gardes de ne pas avoir arrêté Jésus, et que ces derniers avaient pris comme excuse que personne n’avait jamais parlé comme lui. Réponse qui avait rendus fous de rage les princes des prêtres et les pharisiens, parmi lesquels se trouvaient plusieurs membres du Sanhédrin. Alors, pour prouver aux gardes que seuls les imbéciles pouvaient être séduits par un fou, ils ont voulu aller l’arrêter comme blasphémateur. Un tel geste aurait aussi appris à la foule à comprendre la vérité. Mais Nicodème, qui était présent, s’y était opposé :

      « Vous ne pouvez intenter une action contre lui. Notre Loi défend de condamner un homme avant de l’avoir entendu et d’avoir vu ce qu’il fait. Or nous n’avons entendu et vu de lui que des choses qui ne sont pas condamnables. »

      A ces mots, la colère des ennemis de Jésus s’était retournée contre Nicodème qu’ils avaient menacé, insulté et bafoué, comme si c’était un débile et un pécheur. Et, avec les plus acharnés, Eléazar ben Hanna était parti personnellement chasser Jésus, car il n’osait rien de plus par peur de la foule.

      Joseph, fils d’Alphée, est furieux. Jésus le regarde :

      « Tu vois cela, mon frère ? »

      II n’en dit pas davantage… Mais il y a tant de sous-entendus dans ces mots ! Il y a l’avertissement que c’est Lui qui a raison — qu’il parle ou se taise —, il y a le rappel de ses paroles, il y a l’indication de ce que sont en Judée les castes dominantes, de ce qu’est le Temple, et ainsi de suite.

      Joseph baisse la tête et reconnaît :

      « Tu as raison… »

      Il se tait, l’air pensif, puis à l’improviste jette les bras autour du cou de Jésus et pleure sur sa poitrine en disant :

      « Mon pauvre Frère ! Pauvre Marie ! Pauvre Mère ! »

      Je crois que Joseph, à ce moment, a une claire intuition du sort de Jésus…

      « Ne pleure pas ! Fais, comme moi, la volonté de notre Père ! » dit Jésus pour le réconforter.

      Et il l’embrasse pour le consoler.

      491.9 Une fois Joseph un peu calmé, ils se dirigent vers la maison où il loge et, là, se saluent en s’embrassant. Et Joseph, excessivement ému, reprend :

      « Va en paix, Jésus ! Par dessus tout. Ce que je t’ai dit près de Nazareth, je te le répète, et plus fortement encore : va en paix. Aie seulement le souci de ta mission. Pour le reste, je m’en occupe. Va, et que Dieu te réconforte. »

      Il l’embrasse encore, l’air paternel, et lui fait une caresse comme pour laisser sur sa tête sa bénédiction de chef de famille.

      Puis Joseph salue ses frères, et Simon aussi. Mais je remarque que Jacques, je ne sais pour quel motif, se montre quelque peu réservé à l’égard de Joseph, et réciproquement. En revanche, il y a davantage d’affection entre Simon et lui.

      Joseph demande à Jacques :

      « Je dois donc constater que tu es perdu pour moi ?

      – Non, mon frère. Tu dois dire que toi, tu sais où je suis et qu’il te revient de me trouver. Sans rancune. Je prie beaucoup pour toi, au contraire. Mais dans le domaine spirituel, il ne faut pas s’engager sur deux chemins à la fois. Tu sais ce que je veux dire…

      – Tu vois pourtant que je prends sa défense…

      – Tu défends l’homme et ton parent. Ce n’est pas assez pour te donner ces fleuves de grâce dont il parlait. Défends le Fils de Dieu, sans avoir peur du monde, sans calculs intéressés, alors tu seras parfait. Adieu. Je te confie notre mère et Marie, femme de Joseph… »

      Je ne sais si Jésus a entendu, car il est occupé à saluer les autres Nazaréens et Galiléens. Une fois les salutations finies, il ordonne :

      « Partons pour le mont des Oliviers. De là, nous nous dirigerons ailleurs… »
   



[1] Ils doivent donc être âgés de plus de 80 ans puisque Élise en a environ 57/60

[2] La théophanie est la manifestation de Dieu, au cours de laquelle a lieu la révélation d'un message divin aux hommes.

[3] En effet, son appartenance à la classe sacerdotale n'est pas explicite (malgré quelques traductions de Bible), mais tout le laisse à penser : attachement aux institutions religieuses, compétence en matière de droit et de morale, aversion pour les impuretés légales, … Il était fils d'un prêtre : Bouzi (Ézéchiel 1,3).

[4] Ézéchiel 9,1-11

[5] Ézéchiel 37,1-14

[6] Ézéchiel 47,1



Observations

La pomme de Sodome


Au Temple, le dernier jour de la fête des Tabernacles, Jésus prononce le discours sur l’Eau vive. Il évoque la fin du monde : « C’est alors que se produira la résurrection des morts, pour le grand et suprême jugement après lequel, tel une pomme de Sodome, le monde se videra pour devenir néant » (EMV 491.3).

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Discours-sur-l-eau-vivePommier de Sodome

Le pommier de Sodome (Calotropis procera) est un arbuste très commun dans les régions arides du Moyen Orient. Ses fruits verts ressemblent à de petites pommes. C’est un arbuste à la fois toxique et utile. On peut lire, dans le Dictionnaire de théologie de Bergier, tome 1, 1844 page 828 à la rubrique Mer morte un témoignage sur la pomme de Sodome : « le fruit est peu différent du limon, quant à l’écorce et à la couleur, mais spongieux, pourri et vide au-dedans ». Chateaubriand, dans Itinéraire de Paris à Jérusalem, s’interroge aussi sur ce fruit « mystérieux, la pomme de Sodome, agréable à l’œil, mais amère au goût et pleine de cendre ». Flavius Josèphe (Guerres juives IV-8.4) évoque l’existence des « pommes de Sodome ». Ceci confirme donc que cet arbuste, et son appellation était connue en Palestine au temps de Jésus.
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-186.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/discours-sur-l-eau-vive.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 13 Jan - 21:07

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

492. Il est fait mémoire de Jean d'En-dor

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 187.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 492.

Le 16 septembre 1946.

Mercredi 19 septembre
Béthanie


      492.1 Bien que toujours plus morne, la maison de Béthanie reste accueillante… La présence d’amis et de disciples n’enlève pas à la maison sa tristesse. Il y a là Joseph, Nicodème, Manahen, Elise et Anastasica. A ce que je comprends, ces dernières n’ont pas su rester loin de Jésus et s’en excusent comme d’une désobéissance, bien décidées cependant à ne pas s’en aller. Elise en explique les raisons valables : l’impossibilité pour les sœurs de Lazare de suivre le Maître pour lui procurer, ainsi qu’aux apôtres, ces soins féminins nécessaires à un groupe d’hommes seuls et, de plus, persécutés.

      « Nous seules le pouvons. Marthe et Marie ne peuvent quitter leur frère. Jeanne n’est pas là. Annalia est trop jeune pour vous accompagner. Quant à Nikê, il est bon qu’elle reste là où elle se trouve pour vous y accueillir. Mes cheveux blancs permettent d’éviter les commérages. Je te précéderai là où tu iras, je resterai là où tu me le diras ; tu auras toujours une mère auprès de toi, et moi je penserai que j’ai encore un fils. Je ferai ce que tu veux, mais laisse-moi te servir. »

      Jésus se rend compte que tous trouvent que c’est une bonne idée, et il y consent. Peut-être aussi, dans la grande amertume qu’il a certainement dans le cœur, désire-t-il avoir auprès de lui un cœur maternel où trouver un reflet de la douceur de sa Mère…

      La joie d’Elise est manifeste.

      Jésus lui dit :

      « Je serai souvent à Nobé. Tu iras dans la maison du vieux Jean. Il me l’a offerte pour mes séjours. Je t’y trouverai à chacun de nos retours…

      492.2 – Tu comptes repartir, malgré les pluies ? demande Joseph d’Arimathie.

      – Oui. Je veux encore me rendre en Pérée en m’arrêtant chez Salomon, puis à Jéricho et en Samarie. Ah ! je voudrais aller à tant d’endroits encore…

      – Maître, ne t’éloigne pas trop des routes gardées et des villes où il y a un centurion. Eux ne sont pas sûrs, et les autres non plus : deux craintes, deux surveillances, sur toi, et réciproquement. Mais crois bien que les Romains sont moins dangereux pour toi …

      – Ils nous ont abandonnés !… dit avec brusquerie Judas.

      – Tu crois cela ? Non. Parmi les païens qui écoutent le Maître, peux-tu distinguer les envoyés de Claudia de ceux de Ponce ? Parmi les affranchis de la première et de ses amies, rares sont ceux qui pourraient parler au Bel Nidrasc s’ils étaient juifs. N’oublie jamais qu’il y a partout des gens instruits, que Rome a asservi le monde, que ses patriciens aiment prendre le meilleur butin pour en orner leurs maisons. Si les gymnasiarques et ceux qui dirigent les cirques choisissent tout ce qui peut leur procurer argent et gloire, les patriciens préfèrent ceux dont la culture ou la beauté sont un ornement et un agrément pour leur maison et pour eux-mêmes… 492.3Maître, ces commentaires me rappellent un souvenir… M’est-il permis de te poser une question ?

      – Parle.

      – Cette femme, cette Grecque qui était avec nous l’an dernier… et qui fournissait un chef d’accusation contre toi, où est-elle ? Plusieurs ont cherché à le savoir… mais pas dans une bonne intention. Mais moi, je n’ai pas de mauvais dessein… Seulement… qu’elle soit retournée à l’erreur ne me paraît pas possible. Elle avait une grande intelligence et une justice sincère. Mais on ne la voit plus…

      – Quelque part sur la terre, elle, la païenne, a su exercer envers un juif persécuté une charité que les juifs ne possédaient pas.

      – Tu veux parler de Jean d’En-Dor ? Est-il avec elle ?

      – Il est mort.

      – Mort ?

      – Oui. Et on pouvait le laisser mourir près de moi… Il n’y avait pas beaucoup à attendre… Ceux — et ils sont nombreux — qui ont œuvré à provoquer son éloignement, ont commis un homicide comme s’ils avaient levé sur lui une main armée d’un couteau. Ils lui ont percé le cœur. Et, même le sachant mort de cela, ils ne pensent pas être homicides. Ils n’en éprouvent aucun remords. On peut tuer son frère de bien des manières, avec une arme ou par la parole, ou par quelque mauvaise action. Par exemple en rapportant à un persécuteur le lieu de refuge d’un persécuté, où en enlevant à un malheureux l’abri où il trouve quelque réconfort… De combien de façons ne tue-t-on pas ! Mais l’homme ne s’en repent pas. L’homme, et c’est le signe de sa décadence spirituelle, a tué le remords. »

      Jésus s’exprime avec une telle sévérité que personne ne trouve la force de parler. Ils se regardent du coin de l’œil, tête basse, confus, même les plus innocents et les meilleurs. Après un temps de silence, Jésus reprend :

      « II faut que personne ne rapporte aux ennemis du mort et aux miens ce que je viens de dire, pour leur procurer une joie satanique. Mais, si on vous interroge, répondez simplement que Jean est en paix, que son corps se trouve dans un tombeau lointain et que son âme m’attend.

      – Seigneur, cela t’a-t-il fait souffrir ? demande Nicodème.

      – Quoi ? Sa mort ?

      – Oui.

      – Non. Sa mort m’a donné la paix, car c’était sa paix à lui. C’est une peine, une grande peine que m’ont faite ceux qui, par un bas sentiment, ont dénoncé au Sanhédrin sa présence parmi les disciples, et ont amené son départ. Mais chacun a ses idées, et il n’y a qu’une grande et bonne volonté qui puisse changer les instincts et les idées. Cependant, je vous dis : “ Qui a dénoncé, dénoncera encore. Qui a fait mourir fera encore mourir. ” Mais malheur à lui : il croit triompher et va à sa perte, et le jugement de Dieu l’attend.

      – Pourquoi me regardes-tu ainsi, Maître ? demande Jean, qui se trouble et rougit comme s’il était coupable.

      – Parce que, si je te regarde, personne ne pensera, pas même le plus mauvais, que tu puisses avoir haï un frère.

      – Cela pourrait être un pharisien, ou un Romain… Il leur vendait des œufs… déclare Judas.

      – C’était un démon. Mais il lui a fait du bien en voulant lui nuire. Il a hâté sa complète purification et sa paix.

      492.4 – Comment l’as-tu su ? Qui t’en a apporté la nouvelle » demande Joseph.

      Marie de Magdala intervient avec véhémence.

      « Le Maître aurait-il donc besoin qu’on lui apporte les nouvelles ? Ne voit-il pas les actes des hommes ? N’est-il pas allé appeler Jeanne pour qu’elle vienne à lui et qu’il la guérisse ? Qu’est-ce qui est impossible à Dieu ?

      – C’est vrai, femme. Mais rares sont ceux qui ont ta foi… Et c’est pourquoi j’ai posé une question stupide.

      – C’est bien. Mais maintenant, Maître, viens. Lazare s’est éveillé, il t’attend… »

      Et elle l’emmène, tranchante et décidée, coupant toute possibilité de conversation et de questions.

*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-187.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/il-est-fait-memoire-de-jean-d-en-dor.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 16 Jan - 10:17

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493. Instructions près de la fontaine d'En-Rogel, qui fut une halte des trois Sages

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 188.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 493.

Le 16 septembre 1946.

Mercredi 19 septembre 29
Jérusalem


      493.1 Jésus revient de Béthanie par la route d’en bas (c’est-à-dire la route la plus longue, qui ne passe pas par le mont des Oliviers, et qui entre dans la ville en passant par le faubourg de Tophet) [1].

      Il s’arrête d’abord pour donner quelques secours aux lépreux, qui n’ont su lui demander que du pain, puis se dirige vers un grand bassin rectangulaire, couvert et fermé de tous les côtés, sauf un. C’est un puits, un grand puits couvert, le plus grand que j’aie jamais vu, plus encore que celui de la Samaritaine. Il doit d’ailleurs donner davantage d’eau, car le sol, tout autour, s’en ressent et montre une grande fertilité qui contraste avec l’aride et sépulcrale vallée de Hinnon qu’on entrevoit en partie au nord-ouest. Seule une construction en pierres de taille, telles que celles du puits et de sa couverture, aurait pu résister à l’humidité du sol. Et les pierres, noires et massives — il n’est pas besoin d’être grand clerc pour les juger anciennes —, résistent, pour protéger l’eau précieuse.

      Bien que la journée soit sombre, et malgré la proximité des tombeaux des lépreux, qui communiquent toujours une grande tristesse au voisinage, l’endroit est agréable : cela est dû à sa fertilité, certes, mais aussi parce que, à l’arrière, au nord, s’étendent de vastes jardins plantés d’arbres de toute espèce qui dressent leurs cimes feuillues contre le ciel gris qui s’abaisse sur la ville. Par devant, au sud, la vallée du Cédron, dont le lit s’élargit et charrie des eaux plus abondantes, se fait plus gaie et plus lumineuse en suivant la route qui va à Béthanie et à Jéricho, sur un assez long parcours.

      Il y a beaucoup de monde près du puits : des femmes avec des amphores, des âniers avec des seaux, des caravanes qui partent ou qui arrivent… Tous puisent de l’eau. Une grande partie du sol est humide à cause des seaux qui débordent quand on les verse dans les récipients.

      Voix de femmes, paisibles et douces, voix fluettes et perçantes des enfants, voix graves, rauques, puissantes des hommes, ânes qui braient et chameaux qui blatèrent, couchés sous leurs charges, en attendant que le chamelier revienne avec l’eau : tout cela forme une scène très particulière, sous un sombre crépuscule où le ciel a des taches étranges d’un jaune qui n’est pas naturel, inattendu, baignant tout d’une lumière bizarre, tandis que, plus haut, de lourds nuages couleur de plomb s’amoncellent en courant vers l’occident.

      Les parties les plus élevées de la ville prennent un aspect spectral dans cette lumière insolite contre l’horizon de plomb strié de traits couleur de soufre.

      493.2 « Tout ça, c’est de l’eau et du vent… » déclare Pierre sentencieusement, avant de demander : « Où allons-nous ce soir ?

      – Chez l’homme des jardins. Demain, je monte au Temple et…

      – Encore ? Fais attention à ce que tu fais ! Accepte plutôt l’invitation des affranchis dans leur synagogue [2], conseille Simon le Zélote.

      – Synagogue pour synagogue, il y en a bien d’autres qui ont montré qu’elles désiraient sa présence ! Pourquoi eux en particulier ? dit Judas.

      – Parce que ce sont les plus sûrs, cela va sans dire, réplique Simon le Zélote.

      – Les plus sûrs ! Qu’est-ce qui te le laisse croire ?

      – Le fait qu’ils ont su rester fidèles malgré ce qu’ils ont subi.

      – Ne vous disputez pas. Demain, je monte au Temple. Je l’ai dit.

      493.3 Pour le moment, restons un peu ici. C’est toujours un bon endroit pour évangéliser.

      – Pas plus qu’un autre. Je ne sais pourquoi tu le préfères.

      – Pourquoi, Judas ? Pour plusieurs raisons que je donnerai à ceux qui y sont rassemblés, et pour une autre que je vous partage, à vous en particulier. C’est à ce puits de la fontaine d’En-Rogel que firent halte, incertains et déçus, les trois Sages d’Orient, car l’étoile qui les avait amenés de si loin avait disparu ici. Tout autre homme aurait perdu confiance en Dieu et en soi. Eux prièrent jusqu’à l’aube près de leurs chameaux fatigués, seuls à rester éveillés parmi leurs serviteurs endormis. A l’aube, ils se levèrent pour se diriger vers les portes, défiant le danger d’être pris pour des fous et des fauteurs de troubles, défiant même le danger qui menaçait leur vie. Rappelez-vous : cela se passait sous le règne d’Hérode, le sanguinaire. Et il suffisait de bien moins que ce que les Sages voulaient lui dire, pour qu’il décrète leur mort. Mais eux me cherchaient. Ils ne cherchaient pas la gloire, la richesse ni les honneurs. Ils me cherchaient, moi seulement, un petit enfant : leur Messie, leur Dieu. La recherche de Dieu, parce qu’elle est bonne, donne toujours tous les secours et toutes les hardiesses. Les peurs, les déchéances sont le lot de ceux qui rêvent de bassesses. Eux aspiraient à adorer Dieu. Ils étaient forts de cet amour et, quelques heures plus tard, celui-ci fut récompensé : c’est ici, pendant la nuit lunaire, que l’étoile réapparut à leurs yeux. L’étoile de Dieu ne fait jamais défaut à qui cherche Dieu avec justice et amour. Les trois Sages ! Ils auraient pu s’arrêter parmi les faux honneurs que leur rendait Hérode après la réponse des princes des prêtres, des scribes et des docteurs. Ils étaient si las !… Mais ils ne s’arrêtèrent pas même une nuit et, avant que ne se ferment les portes, ils sortirent pour rester ici jusqu’à l’aube. Puis… ce n’est pas l’aube solaire, mais l’aube de Dieu qui réapparut pour donner à leur route un éclat argenté : l’étoile les appela par sa clarté, et ils vinrent à la Lumière ! Bienheureux furent-ils, et bienheureux ceux qui savent les imiter ! »

      Les apôtres et Marziam avec Isaac sont tout ouïe : ils ont une expression de bonheur sur le visage, comme toujours lorsque Jésus évoque sa naissance. Isaac soupire, sourit, à ce souvenir … Il a l’air absent, en extase, il est loin du lieu et du temps, revenu en arrière de plus de trente années, à cette nuit, à cette étoile qu’il a vue certainement au milieu de son troupeau…

      493.4 Comme ils sont sur une route de grande circulation, d’autres personnes s’approchent et écoutent ; et quelqu’un rappelle la fantastique caravane, la nouvelle qu’elle apportait… et ce qui s’ensuivit.

      « C’est toujours ici un lieu de réflexion. L’histoire se répète inlassablement. Mais c’est aussi un lieu d’épreuve, pour les bons comme pour les mauvais. Mais toute la vie est une épreuve pour la foi et la justice de l’homme.

      Je vous rappelle la fidélité d’Hushaï, de Sadoq et d’Ebyatar, de Yehonatân et d’Ahimaas, qui partirent d’ici pour sauver leur roi et qui furent protégés par Dieu parce qu’ils agissaient avec droiture [3].

      Je vous rappelle un événement relatif à cet endroit et qui tourna mal, car c’était une œuvre injuste, que Dieu ne bénissait donc pas. Près de la pierre de Zoélet, proche de la fontaine d’En-Rogel, Adonias conspira contre la volonté de son père et se fit proclamer roi par ceux de son parti [4]. Mais cet abus ne lui servit pas, car avant la fin du banquet, les hosannas qui résonnaient dans Gihôn lui apprirent, avant même que ne parle Yonatân — le fils d’Ebyatar —, que Salomon était roi et que lui, qui avait voulu usurper le trône, devait s’en remettre seulement à la miséricorde de Salomon.

      Il y a trop de personnes qui répètent le geste d’Adonias et combattent le vrai Roi, ou conjurent contre lui en suivant le parti qui leur semble le plus fort. Et trop rares, ceux qui, agissant ainsi, savent ensuite s’attacher à l’autel pour demander pardon et se fier à la miséricorde de Dieu.

      Pouvons-nous, nous qui avons considéré trois événements survenus près de ce puits, dire que cet endroit est sujet à des influences bonnes ou mauvaises ? Non. Ce ne sont ni le lieu, ni le temps, ni les événements, mais la volonté de l’homme qui trouble ses actes. En-Rogel a vu la fidélité des serviteurs de David et le péché d’Adonias, tout comme il a vu la foi des trois Sages. Il s’agit de ce même puits. Yonatân et Ahimaas, Adonias et les siens, les trois Sages, tous se sont appuyés à ses pierres et se sont désaltérés à ses eaux. Mais l’eau et les pierres ont vu trois attitudes différentes : une fidélité au roi David, une trahison envers David, et une fidélité à Dieu et au Roi des rois. C’est toujours la volonté de l’homme qui fait accomplir le bien ou le mal. Et sur la volonté de l’homme, la Volonté de Dieu projette ses lumières et la volonté de Satan ses vapeurs empoisonnées. Il appartient à l’homme d’accueillir la lumière ou le poison, et de devenir juste ou pécheur.

      On a posté un gardien à ce puits afin que personne ne corrompe l’eau. Qui plus est, on lui a édifié des murs et un toit pour que le vent n’y fasse pas voler des feuilles ou des ordures qui souilleraient cette eau précieuse. De même, Dieu a établi pour l’homme un gardien — sa volonté intelligente et consciente —, ainsi que des abris — les commandements et les conseils des anges pour éviter que son âme ne soit corrompue sciemment ou inconsciemment. Mais quand l’homme corrompt sa conscience, son intelligence, il n’écoute pas les inspirations du Ciel, il foule aux pieds la Loi. Il est semblable à un gardien qui laisse le puits sans surveillance, ou comme un fou qui en démantèle les défenses. Il laisse le champ libre aux ennemis sataniques, aux concupiscences du monde et de la chair, et aux tentations que, même si on ne les favorise pas, il est toujours prudent de surveiller et de repousser.

      493.5 Fils de Jérusalem, Hébreux, prosélytes, voyageurs que le hasard a réunis ici pour écouter la voix de Dieu, faites preuve de la vraie sagesse, qui consiste à savoir défendre son propre moi des actions qui déshonorent l’homme.

      J’aperçois ici de nombreux païens. Je leur déclare qu’il ne s’agit pas seulement de se procurer des richesses et des marchandises, mais qu’il y a autre chose à acquérir, et c’est la vie de son âme. Car l’homme possède en lui une âme, un esprit impalpable, mais qui est ce qui le rend vivant, un principe qui ne meurt pas, même après que la chair est morte, une image de Dieu qui a le droit de mener sa vie véritable, éternelle. Or c’est impossible si l’homme tue son vrai lui-même par ses mauvaises actions.

      L’idolâtrie et le paganisme ne sont pas insurmontables. Le sage médite et se dit : “ Pourquoi devrais-je suivre des idoles et vivre sans l’espérance d’une vie meilleure, alors qu’en allant au Dieu vrai, je peux conquérir la joie éternelle ? ” L’homme est avare de ses jours et la mort lui fait horreur. Plus il est enveloppé dans les ténèbres d’une fausse religion, ou dans l’incroyance, et plus il craint la mort. Mais celui qui vient à la vraie foi perd toute terreur de la mort, car il sait qu’au-delà de la mort, il y a une vie éternelle, où les âmes se retrouveront et où n’existeront plus ni peines ni séparations. Il n’est pas difficile de suivre le chemin de la Vie : il suffit de croire à l’unique vrai Dieu, d’aimer son prochain et de désirer n’accomplir que des actes honnêtes.

      Vous autres, enfants d’Israël, vous connaissez ce qui est commandé et ce qui est défendu. Mais je dis à ceux qui m’écoutent et qui emporteront au loin mes paroles, quels sont ces commandements… (et il récite le Décalogue).

      La vraie religion consiste en cela, non en de vains et pompeux sacrifices. Obéir aux préceptes d’une morale parfaite, d’une vertu sans défauts, faire preuve de miséricorde, fuir ce qui déshonore l’homme, laisser tomber les vanités, les divinations de l’erreur, les augures menteurs, les rêves des méchants, comme dit le livre sapientiel [5], user avec justice des dons de Dieu, en d’autres termes de la santé, de la prospérité, des richesses, de l’intelligence, de la puissance, ne pas avoir d’orgueil — qui est un signe de sottise car l’homme est vivant, en bonne santé, riche, sage, puissant tant que Dieu le lui accorde —, ne pas avoir de désirs immodérés qui parfois portent jusqu’au crime. Vivre, en un mot, en homme et non pas en brute, ne serait-ce que par respect pour soi-même.

      Il est facile de descendre, difficile de remonter. Mais qui voudrait vivre dans un abîme de pourriture, par le seul fait qu’il y est tombé, sans chercher à en sortir en remontant sur les sommets fleuris et pleins de soleil ? En vérité, je vous dis que la vie du pécheur se trouve dans un gouffre, de même que la vie dans l’erreur. Mais ceux qui accueillent la Parole de vérité et viennent à la vérité s’élèvent sur les cimes, dans la lumière.

      Maintenant, allez tous à vos occupations. Et souvenez-vous que, près de la fontaine d’En-Rogel, la source de la Sagesse vous a donné à boire ses eaux pour que vous en ayez encore soif et que vous y reveniez. »

      Jésus se fraie un passage et se dirige vers la ville, en laissant les gens à leurs commentaires, à leurs questions et à leurs réponses.




[1] Quartier sud de la Ville Basse de Jérusalem.

[2] C'est de la synagogue des affranchis que partira le complot qui aboutira au martyre d'Étienne. (Actes 6,9). Jésus s'y rendra cependant quelques temps plus tard et y sera bien accueilli (EMV 532 / Tome 7, chapitre 231 dans l'ancienne édition).

[3] Houchaï (Cousaï), ami de David, feint d'épouser la cause d'Absalom le fils révolté du roi. Son stratagème permettra à Yehonatân (Jonathas), fils de Sadoq et à Ahimaaç (Achimaas), fils d'Ébyatar (Abiatar) de prévenir David des manœuvres fomentées contre lui et d'ainsi d'emporte une victoire au cours de laquelle Absalom mourra.
Yehonatân et Ahimaaç étaient cachés à En Roguel (la fontaine du foulon) (2 Samuel 17,17)
Ébyatar (Abiatar) échappe à un massacre des prêtres de Nobé ordonné par Saül en représailles de l'aide apportée à David. Il rejoint David et partage la fonction de grand-prêtre avec Sadoq. C'est à eux que David confie Jérusalem et l'Arche lorsqu'il dût fuir devant son fils Absalom (2Samuel 15, 24 et suivants). Mais si Sadoq resta fidèle, Ébyatar choisit plus tard le parti d'Adoniyyahou contre le choix de David qui s'était porté sur Salomon. (1Rois 1,7 et suivants). Il s'exila à Anatot.

[4] Adoniyyahou (Adonias) aîné des fils survivants de David, prétend au trône. Avec l'aide de Joab et d'Ébyatar, il donne un banquet pour son sacre à En Rogel. David, prévenu, fait sacrer en hâte par le prêtre Sadoq, Salomon, le fils de son choix. (1Rois 1,5-10). Adonias échappera temporairement à la mort, en saisissant les cornes de l'Autel en signe de protection, mais son goût du complot la rendra inéluctable.

[5] Isaïe 1,11-17 , mais ce n'est pas un livre sapientiel, du moins au sens de la classification canonique.






*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-188.htm
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 18 Jan - 20:05

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

494. La femme adultère et l’hypocrisie de ses accusateurs. Divers enseignements

Ancienne édition : Tome 7, chapitres 189 et 190.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 494.

Vision du lundi 20 mars 1944

Jeudi 20 septembre 29
Jérusalem


      494.1 Je vois l’intérieur de l’enceinte du Temple, c’est-à-dire l’une des si nombreuses cours entourées de portiques. Jésus parle à la foule qui l’entoure, bien enveloppé dans le manteau qui couvre son vêtement. Celui-ci n’est pas blanc mais rouge foncé (c’est, semble-t-il, une lourde étoffe de laine).

      Je pense que c’est l’hiver, car tous les gens sont emmitouflés. Il doit faire froid car, au lieu de rester immobiles, ils marchent vivement comme pour se réchauffer. Le vent remue les manteaux et soulève la poussière des cours.

      Le groupe qui se presse autour de Jésus — c’est le seul à rester à sa place alors que tous les autres vont et viennent autour de tel ou tel maître — s’ouvre pour laisser passer un détachement de scribes et de pharisiens gesticulants et plus que jamais fielleux. Tout en eux lance du venin : leurs regards, leur visage, leur bouche. Quelles vipères ! Plutôt qu’ils ne la conduisent, ils traînent une femme d’environ trente ans, échevelée, les vêtements en désordre, et en larmes comme une personne que l’on a maltraitée. Ils la jettent aux pieds de Jésus comme un tas de chiffons ou une dépouille morte. Et elle reste là, recroquevillée sur elle-même, le visage appuyé sur ses deux bras, qui la cachent et lui font un coussin entre son visage et le sol.

      « Maître, cette femme a été prise en flagrant délit d’adultère. Son mari l’aimait, et ne la laissait manquer de rien. C’était la reine de sa maison. Or elle l’a trahi, car c’est une pécheresse, une vicieuse, une ingrate, une profanatrice. Elle est adultère et, comme telle, doit être lapidée. C’est ce que dit Moïse [1]. Dans sa Loi, il ordonne que de telles femmes soient lapidées comme des bêtes immondes. Et elles sont immondes, car elles trahissent la foi conjugale ainsi que l’homme qui les aime et prend soin d’elles ; elles sont comme une terre jamais rassasiée, toujours assoiffée de luxure. Elles sont pires que des courtisanes car, sans la morsure du besoin, elles se donnent pour assouvir leur impudicité. Elles sont corrompues. Elles sont contaminatrices. Elles doivent être condamnées à mort. Moïse l’a dit. Et toi, Maître, qu’en penses-tu ? »

      494.2 Jésus avait interrompu son discours à l’arrivée tumultueuse des pharisiens, il avait promené un regard pénétrant sur la meute haineuse, puis avait tourné les yeux sur la femme avilie, jetée à ses pieds. Mais il ne dit mot. Il s’est penché, tout en restant assis et, d’un doigt, il écrit sur les pierres du portique que la poussière soulevée par le vent recouvre d’une couche épaisse. Eux parlent, et lui écrit.

      « Maître, c’est à toi que nous parlons. Ecoute-nous. Réponds-nous. Tu n’as pas compris ? Cette femme a été prise en flagrant délit d’adultère. Dans sa maison, dans le lit de son mari. Elle l’a souillé par sa passion. »

      Jésus écrit.

      « Mais c’est un abruti, cet homme ! Vous ne voyez pas qu’il ne comprend rien et qu’il trace des signes sur la poussière comme un pauvre fou ?

      – Maître, pour ton bon renom, parle. Que ta sagesse réponde à nos questions. Nous te le répétons : cette femme ne manquait de rien. Elle avait vêtements, nourriture, amour. Or elle a trahi. »

      Jésus écrit.

      « Elle a menti à l’homme qui avait confiance en elle. De sa bouche menteuse, elle l’a salué, elle l’a accompagné jusqu’à la porte en souriant, puis elle a ouvert la porte secrète et a fait entrer son amant. Et pendant que son mari était absent et travaillait pour elle, elle s’est vautrée dans sa luxure comme une bête immonde.

      – Maître, plus encore que de la couche nuptiale, elle a profané la Loi. C’est une rebelle, une sacrilège, une blasphématrice. »

      Jésus écrit. Du pied, il efface et écrit plus loin, en tournant lentement sur lui-même pour trouver de la place. On dirait un enfant qui s’amuse. Mais ce qu’il écrit, ce ne sont pas des mots pour rire. Il a écrit successivement : “ Usurier ”, “ Faussaire ”, “ Fils irrespectueux ”, “ Fornicateur ”, “ Assassin ”, “ Profanateur de la Loi ”, “ Voleur ”, “ Luxurieux ”, “ Usurpateur ”, “ Mari et père indigne ”, “ Blasphémateur ”, “ Rebelle à Dieu ”, “ Adultère ”. Il écrit et écrit encore pendant qu’interviennent de nouveaux accusateurs.

      « Mais enfin, Maître ! Rends ton jugement ! Cette femme doit être jugée. Elle ne peut de son poids contaminer la terre. Son souffle est un poison qui trouble les cœurs. »

      494.3 Jésus se lève. Mon Dieu, quel visage ! Ses yeux sont des éclairs qui foudroient les accusateurs. Il semble encore plus grand, tant il redresse la tête. On dirait un roi sur son trône, tant il est sévère et solennel. Son manteau est tombé d’une épaule et forme une légère traîne derrière lui, mais il ne s’en soucie pas.

      Le visage fermé et sans la moindre trace de sourire sur les lèvres ni dans les yeux, il darde son regard sur la foule, qui recule comme devant deux lames acérées. Il les fixe un par un, en semblant fouiller en eux avec une intensité qui fait peur. Ceux qu’il dévisage ainsi cherchent à reculer dans la foule et s’y perdre ; ainsi le cercle s’élargit et s’effrite, comme miné par quelque force cachée.

      Finalement, il parle :

      « Que celui d’entre vous qui est sans péché lance à la femme la première pierre. »

      Sa voix est un tonnerre qu’accompagnent des regards encore plus fulgurants. Jésus a croisé les bras et reste sans bouger, droit comme un juge qui attend. Son regard ne laisse pas en paix : il fouille, pénètre, accuse.

      C’est d’abord un homme qui s’éloigne, tête basse, puis deux, puis cinq, puis toute l’assistance, par groupes. Non seulement les scribes et les pharisiens, mais aussi ceux qui se tenaient auparavant autour de Jésus et d’autres, qui s’étaient approchés pour entendre le jugement et la condamnation et qui, les uns comme les autres, s’étaient unis pour insulter la coupable et réclamer sa lapidation.

      Jésus reste seul avec Pierre et Jean. Je ne vois pas les autres apôtres.

      Pendant la fuite des accusateurs, Jésus s’est remis à écrire : “ Pharisiens ”, “ Vipères ”, “ Tombeaux de pourriture ”, “ Menteurs ”, “ Traîtres ”, “ Ennemis de Dieu ”, “ Insulteurs de son Verbe ”…

      494.4 Une fois la cour tout entière vidée, un grand silence s’établit. Il ne reste plus que le bruissement du vent et le murmure d’une fontaine dans un coin. Alors Jésus lève la tête et regarde. Son visage s’est apaisé. Il est attristé, mais n’est plus irrité. Il jette un coup d’œil à Pierre qui s’est légèrement éloigné pour s’appuyer à une colonne et à Jean qui, presque derrière Jésus, le regarde avec amour. Jésus esquisse un sourire à la vue de Pierre et ce sourire s’élargit quand ses yeux se tournent vers Jean : ce sont deux sourires différents.

      Puis il regarde la femme encore prostrée à ses pieds et en larmes. Il l’observe. Il se lève, rajuste son manteau comme s’il allait se mettre en route. Il fait signe aux deux apôtres de se diriger vers la sortie.

      Resté seul, il appelle la femme.

      « Femme, écoute-moi. Regarde-moi. »

      Il répète son ordre, car elle n’ose lever la tête.

      « Femme, nous sommes seuls. Regarde-moi. »

      La malheureuse lève un visage sur lequel les larmes et la poussière forment un masque avilissant.

      « Femme, où sont tes accusateurs ? »

      Jésus parle doucement, avec un sérieux plein de pitié. Son visage et son corps s’inclinent légèrement vers la terre, vers cette misère, et ses yeux sont pleins d’une expression indulgente et rénovatrice.

      « Personne ne t’a condamnée ? »

      La femme, entre deux sanglots, répond :

      « Personne, Maître.

      – Moi non plus, je ne vais pas te condamner. Va, et ne pèche plus. Rentre chez toi, et sache te faire pardonner, par Dieu et par l’offensé. N’abuse pas de la bonté du Seigneur. Va. »

      Il l’aide à se relever en la prenant par la main, mais il ne la bénit pas et ne lui donne pas la paix. Il la regarde s’éloigner, tête basse et légèrement chancelante sous le poids de sa honte, puis, quand elle a disparu, il s’éloigne à son tour avec les deux disciples.




[1] Lévitique 20,10 – Deutéronome 22,22.




Enseignement de Jésus


      494.5 Jésus dit :

      « Ce qui me blessait, c’était le manque de charité et de sincérité des accusateurs. Non que l’accusation fût mensongère. La femme était réellement coupable. Mais ils manquaient de sincérité en se scandalisant d’une faute qu’eux-mêmes avaient commise mille fois et que seules une ruse plus habile et une plus grande chance avaient permis de garder cachée. La femme, à son premier péché, avait été moins rusée et moins chanceuse. Mais aucun de ses accusateurs et de ses accusatrices — car, même si elles n’élevaient pas la voix, les femmes aussi l’accusaient au fond de leur cœur — n’était exempt de faute.

      Est adultère celui qui passe à l’acte comme celui qui aspire à l’acte et le désire de toutes ses forces. La luxure existe aussi bien chez celui qui souhaite pécher que chez le pécheur. Il ne suffit pas d’éviter le mal, il faut aussi ne pas désirer le commettre.

      Rappelle-toi, Maria, la première parole de ton Maître, quand il t’a appelée du bord du précipice où tu te trouvais : “ Il ne suffit pas d’éviter de commettre le mal. Il faut aussi ne pas désirer le faire. ” [1]

      Celui qui caresse des pensées voluptueuses et provoque des impressions luxurieuses, par des lectures, des spectacles recherchés exprès et par des habitudes malsaines, est aussi impur que celui qui commet la faute matériellement. J’ose même dire qu’il est plus coupable, car il va par la pensée contre la nature et pas seulement contre la morale. Je ne parle pas non plus de ceux qui passent à de véritables actes contre nature. Leur seule excuse est une maladie organique ou psychique. Celui qui n’a pas cette excuse est de dix degrés inférieur à la bête la plus dégoûtante.

      Pour condamner avec justice, il faudrait être exempt de faute. Je vous renvoie aux dictées antérieures où je parle des conditions essentielles pour être juge [2]. Le cœur des pharisiens et des scribes ne m’était pas inconnu, ni celui des personnes qui s’étaient unies à eux pour se déchaîner contre la coupable. Péchant contre Dieu et contre le prochain, ils étaient coupables de fautes contre le culte, contre leurs parents, contre leur prochain, et surtout contre leurs épouses. Si, par un miracle, j’avais ordonné à leur sang d’écrire sur leur front leur péché, c’est de loin l’accusation d’adultère de fait ou de désir qui aurait dominé.

      494.6 J’ai dit : “ C’est ce qui vient du cœur qui souille l’homme. ” [3] Or, à part mon cœur, il n’y avait personne parmi les juges qui eût le cœur sans souillure.

      Non seulement ils n’étaient pas sincères, mais ils n’avaient aucune charité. Pas même le fait de lui ressembler dans la soif du désir de volupté ne les y portait. C’était moi qui faisais preuve de charité envers la femme avilie, moi, le seul qui aurait dû éprouver du dégoût devant elle. Mais rappelez-vous bien ceci : “ Meilleur on est, plus on éprouve de la pitié pour les coupables. ” On n’a pas d’indulgence pour la faute elle-même, cela non. Mais on a de la compassion pour les faibles qui n’ont pas su résister à la faute.

      Ah ! l’homme ! Plus qu’un roseau fragile et un délicat liseron, il est facilement dominé par la tentation et porté à s’accrocher là où il espère trouver du réconfort.

      Car bien souvent la faute arrive, surtout chez le sexe le plus faible, à cause de cette recherche de réconfort. C’est pourquoi je dis que l’homme qui manque d’affection pour sa femme, et même pour sa fille, est quatre-vingt-dix fois sur cent responsable de leur faute et il en répondra pour elles. Aussi bien une sotte affection — qui n’est qu’un stupide esclavage d’un homme pour une femme ou d’un père pour sa fille —, que l’absence d’affection ou, pis encore, une faute de la propre passion qui porte un mari à d’autres amours et des parents à des soucis étrangers à leurs enfants, sont des foyers d’adultères et de prostitution, et comme tels sont condamnés par moi. Vous êtes des êtres doués de raison et guidés par une loi divine et une loi morale. Donc se rabaisser à une vie de sauvages ou de brutes devrait horrifier votre grand orgueil. Mais l’orgueil, qui dans ce cas serait même utile, vous le mettez dans bien d’autres satisfactions.

      494.7 J’ai regardé Pierre et Jean d’une manière différente, car j’ai voulu dire au premier, un homme adulte : “ Pierre, toi aussi, ne manque pas de charité et de sincérité ”, et en tant que mon futur Pontife : “ Rappelle-toi cette heure et, à l’avenir, juge comme ton Maître  ” ; alors qu’au second, un jeune à l’âme encore d’enfant, je laissais entendre : “ Tu pourrais juger, mais tu ne juges pas, car tu as le même cœur que moi. Merci, mon bien-aimé, d’être tellement mien que tu es un second moi-même. ”

      Et j’ai éloigné ces deux apôtres avant d’appeler la femme, pour ne pas augmenter son humiliation par la présence de deux témoins. Apprenez-le, hommes sans pitié : si coupable que soit quelqu’un, il faut toujours le traiter avec respect et charité, ne pas se réjouir de son abaissement, ne pas s’acharner contre lui, pas même par des regards de curiosité. Pitié, pitié pour celui qui tombe !

      A la coupable, j’indique la voie à suivre pour se racheter : rentrer chez elle, demander humblement pardon et l’obtenir par une vie droite. Ne plus céder à la chair. Ne pas abuser de la bonté divine et de la bonté humaine pour ne pas payer plus durement que la première fois sa double ou multiple faute. Dieu pardonne, parce qu’il est la Bonté même. Mais, bien que j’aie demandé à l’homme de pardonner à son frère soixante-dix fois sept fois [4], il ne sait pas le faire deux fois.

      Je ne lui ai pas donné la paix ni la bénédiction parce qu’elle n’avait pas en elle ce complet détachement de son péché qui est requis pour être pardonné. Dans sa chair, et malheureusement dans son cœur, elle n’avait pas la nausée du péché. Marie de Magdala, après avoir goûté la saveur de mon Verbe, avait eu le dégoût du péché et elle était venue à moi avec la volonté totale d’être une autre. Mais cette femme flottait encore entre les voix de la chair et celles de l’esprit. Et, dans le trouble du moment, elle n’avait pas encore pu mettre la cognée à la souche de la chair et l’abattre pour repartir mutilée du poids de son avidité vers le Royaume de Dieu, amputée de ce qui était pour elle la ruine, mais pourvue de ce qui est le salut.

      Tu veux savoir si, par la suite, elle s’est sauvée ? Ce n’est pas pour tous que j’ai été Sauveur. Pour tous, j’ai voulu l’être, mais je ne l’ai pas été, car tous n’ont pas eu la volonté d’être sauvés. Et cela a été une des flèches les plus pénétrantes de mon agonie à Gethsémani.

      Quant à toi, Maria de Marie, va en paix et désire éviter tout péché, même les bagatelles. Sous le manteau de Marie, il n’y a que pureté. Sache t’en souvenir.




[1] Ceci est rapporté par Maria Valtorta dans son Autobiographie, à la page 175, À 19 ans, elle subit son premier chagrin d’amour à la suite d’une relation amoureuse, pure et innocente, interrompue brutalement par sa mère. Le jeune homme ne tarde pas à mourir à la guerre. Le 11 juin 1916, elle a un songe qui la marque profondément : Satan sous un aspect d'abord séduisant tente de la détourner de Jésus et de lui ravir son âme. Jésus lui délivre en finale son pardon avec cet avertissement : "Sache qu'il ne suffit pas de ne point commettre le mal, mais qu'il faut encore ne point désirer l'accomplir".

[2] Voir les différents critères d'évaluation d'une faute en EMV 126 et en EMV 448.

[3] Matthieu 15,17-18. Voir aussi EMV 300.9 et EMV 301 5/6.

[4] Voir EMV 278.3 et EMV 423.8.





Le texte suivant ne figure que dans l’ancienne édition de 1985 :


Un jour, Maria, ma Mère, t'a dit : "Je vous demande avec pleurs à mon Fils". Et une autre fois : "Je laisse à mon Jésus le soin de me faire aimer... Quand vous m'aimez, je viens et ma venue est joie et salut".    

La Mère t'a voulue, et je t'ai donnée à elle. Je t'y ai portée plutôt, car je sais que là où je puis faire plier par l'autorité, elle vous porte par la caresse de l'amour et elle vous y porte encore mieux que Moi. Son toucher est un sceau devant lequel fuit Satan. Maintenant tu as son vêtement, et si tu es fidèle aux prières des deux Ordres, tu médites chaque jour toute la vie de notre Mère : ses joies et ses douleurs; c'est-à-dire mes joies et mes douleurs. Car du moment où de Verbe je devins Jésus, j'ai avec elle, et pour les mêmes motifs, jubilé ou pleuré.  

Tu vois donc qu'aimer Marie c'est aimer Jésus. C'est l'aimer plus facilement. Car Moi, je te fais porter la croix et je te mets sur la croix. La Mère, au contraire, te porte ou reste au pied de la croix pour te recevoir sur son cœur qui ne sait qu'aimer. Même dans la mort, le sein de Marie est plus doux qu'un berceau. Celui qui expire en elle n'entend que les voix des chœurs angéliques qui tourbillonnent autour de Marie. Il ne voit pas les ténèbres, mais le doux rayonnement de l'Étoile du Matin. Il n'entend pas les pleurs mais son sourire. Il ne connaît pas la terreur. Qui ose arracher, de Nous qui l'aimons, une de ses créatures des bras de Marie ?

Ne me dis pas "Merci" à Moi. Dis-le à elle qui a voulu ne se souvenir de rien, excepté du peu de bien que tu as fait et de l'amour que tu as pour Moi. Et c'est pour cela qu'elle t'a voulue, pour dompter sous son pied, ce que ta bonne volonté n'arrivait pas à maîtriser. Crie : "Vive Marie !" Et reste à ses pieds, au pied de la Croix. Tu orneras ton vêtement des rubis de mon Sang et des perles de ses larmes. Tu auras un vêtement de reine pour entrer dans mon Royaume.      

Va en paix. Je te bénis."


*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-189.htm
http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-190.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/la-femme-adultere.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 19 Jan - 21:52

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

495. Leçon sur la Miséricorde

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 191.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 495.

Le 17 septembre 1946.

Jeudi 20 septembre 29
Jérusalem


       495.1 Jésus a rejoint les dix apôtres et les principaux disciples au pied du mont des Oliviers, près de la fontaine de Siloé. Quand ils le voient arriver à pas rapides entre Pierre et Jean, ils vont à sa rencontre, et c’est justement près de la fontaine qu’ils se réunissent.

      « Montons sur la route de Béthanie. Je quitte la ville quelque temps. Tout en marchant, je vous indiquerai ce que vous devez faire » ordonne Jésus.

      Parmi les disciples se trouvent aussi Manahen et Timon qui, rassérénés, ont repris leur place. Il y a aussi Etienne et Hermas, Nicolaï, Jean d’Ephèse, le prêtre Jean et, en somme, tous les plus notables pour leur sagesse, à côté des autres hommes, simples, mais si actifs par la grâce de Dieu et leur propre volonté.

      « Tu quittes la ville ? Il t’est arrivé quelque chose ? demandent certains.

      – Non. Mais on m’attend ailleurs aussi…

      495.2 – Qu’as-tu fait ce matin ?

      – J’ai parlé… J’ai expliqué les prophètes, encore une fois. Mais ils ne comprennent pas…

      – Aucun miracle, Maître ? demande Matthieu.

      – Aucun. Un pardon et une défense.

      – Qui était-ce ? Qui attaquait ?

      – Ceux qui se croient sans péché accusaient une pécheresse. Je l’ai sauvée.

      – Mais si c’était une pécheresse, ils avaient raison !

      – Sa chair était certainement pécheresse. Son âme… J’aurais beaucoup à dire sur les âmes. Et je n’appellerais pas pécheresses seulement celles dont la faute est évidente. Sont pécheresses aussi celles qui en poussent d’autres à pécher. Et leur péché est plus rusé. Elles jouent à la fois le rôle du serpent et du pécheur.

      – Qu’avait donc commis cette femme ?

      – Un adultère.

      – Un adultère ? Et tu l’as sauvée ! Tu n’aurais pas dû ! s’écrie Judas.

      Jésus le regarde fixement :

      « Pourquoi ne l’aurais-je pas dû ?

      – Mais parce que… Cela peut te nuire. Tu sais comme ils te haïssent et cherchent des accusations contre toi ! Or il est certain que… sauver une femme adultère, c’est aller contre la Loi.

      – Je n’ai pas dit que je la sauvais. Je leur ai seulement dit : “ Que celui qui est sans péché la frappe. ” Or personne ne l’a frappée, car personne n’était sans péché. J’ai donc confirmé la Loi qui prescrit la lapidation pour les adultères, mais j’ai sauvé la femme, car il ne s’est pas trouvé de lapidateur.

      – Mais toi…

      – Tu aurais voulu que, moi, je la lapide ? Cela aurait été juste car, moi, j’aurais été en droit de le faire, mais j’aurais alors manqué de miséricorde.

      – Ah ! elle s’était repentie ! Elle t’a supplié, et toi…

      – Non. Elle ne s’était même pas repentie. Elle était seulement humiliée et effrayée.

      – Mais alors… pourquoi ?… Je ne te comprends plus ! Avant, je pouvais encore comprendre tes pardons à Marie de Magdala, à Jean d’En-Dor, à… en somme à beaucoup de pé…

      – Dis-le carrément, Judas : à Matthieu. Moi, je ne m’en formalise pas. Au contraire, je te suis reconnaissant si tu m’aides à me rappeler ma dette de reconnaissance envers mon Maître, interrompt Matthieu avec calme et dignité.

      – Eh bien, oui, même à Matthieu… Mais eux s’étaient repentis de leurs péchés, de leur vie de désordre. Mais elle !… Je ne te comprends plus ! Et je ne suis pas le seul à ne pas te comprendre…

      – Je le sais. Tu ne me comprends pas, Judas… Tu m’as toujours peu compris, et tu n’es pas le seul. Mais cela ne modifie en rien ma façon d’agir.

      – Le pardon ne doit être accordé qu’à ceux qui le demandent.

      – Ah ! Si Dieu devait pardonner seulement à ceux qui le demandent, et frapper aussitôt celui dont la faute n’est pas suivie de repentir… Tu ne t’es jamais entendu pardonner avant de t’être repenti ? Peux-tu vraiment affirmer que c’est parce que tu t’es repenti que tu as été pardonné ?

      – Maître, moi…

      495.3 – Ecoutez-moi tous, car plusieurs d’entre vous estiment que je me suis trompé, et que Judas a raison. Il y a ici Pierre et Jean. Ils ont entendu ce que j’ai dit à la femme et ils peuvent vous le répéter. Je n’ai pas fait preuve de sottise en pardonnant. Je ne lui ai pas parlé comme aux autres âmes, auxquelles j’ai pardonné parce qu’elles s’étaient pleinement repenties. Mais j’ai donné à cette âme la possibilité et le temps d’arriver au repentir et à la sainteté, si elle le veut. Souvenez-vous-en, quand vous serez les maîtres des âmes.

      Pour pouvoir être de vrais maîtres et en être dignes, deux conditions sont essentielles. La première : mener soi-même une vie austère, pour pouvoir juger sans l’hypocrisie de condamner chez les autres ce qu’on se pardonne à soi-même. La seconde : être patient et miséricordieux pour donner aux âmes la possibilité de guérir et de se fortifier.

      Toutes les âmes ne guérissent pas instantanément de leurs blessures. Certaines n’y parviennent que par étapes successives, parfois longues et susceptibles de rechutes. Les chasser, les condamner, les effrayer, ce n’est pas l’art du médecin spirituel.

      Si vous les chassez loin de vous, elles retourneront se jeter par contrecoup dans les bras des faux amis et des faux maîtres. Ouvrez toujours vos bras et votre cœur aux pauvres âmes. Qu’elles sentent en vous un vrai et saint confident sur les genoux de qui elles n’aient pas honte de pleurer. Si vous les condamnez en les privant des secours spirituels, vous les rendrez de plus en plus malades et faibles. Si elles ont peur de vous et de Dieu, comment pourront-elles lever les yeux vers vous et vers Dieu ?

      C’est l’homme que l’homme rencontre comme premier juge. Seule la personne qui mène une vraie vie spirituelle sait rencontrer Dieu en premier. Mais la créature qui est déjà arrivée à vivre spirituellement, ne tombe pas dans des fautes graves. La partie humaine peut encore avoir des faiblesses, mais l’esprit, qui est fort, veille et les faiblesses ne deviennent pas des fautes graves. Tandis que l’homme, qui est encore essentiellement chair et sang, pèche et rencontre l’homme. Or, si l’homme qui doit lui indiquer Dieu et former son âme, lui inspire la peur, comment le coupable peut-il s’abandonner à lui ? Et comment peut-il dire : “ Je m’humilie car je crois que Dieu est bon et qu’il pardonne ”, s’il voit qu’un de ses semblables n’est pas compatissant ?

      Vous devez être le terme de comparaison, la mesure de ce qu’est Dieu, comme une piécette est la partie qui fait comprendre la valeur d’un talent. Mais si vous vous montrez cruels envers les âmes, vous, les piécettes qui êtes une partie de l’Infini et le représentez, qui croiront-elles qu’est Dieu ? Quelle dureté intransigeante imagineront-elles en lui ?

      495.4 Judas, toi qui juges avec sévérité, si en ce moment, je te disais : “ Je vais te dénoncer au Sanhédrin pour pratiques magiques ” [1]…

      – Seigneur ! Tu ne ferais pas cela ! Ce serait… ce serait… Tu sais que c’est…

      – Je sais et je ne sais pas. Mais tu vois comment tu demandes aussitôt pitié pour toi… et tu sais qu’ils ne te condamneraient pas, car…

      – Que veux-tu dire, Maître ? Pourquoi dis-tu cela ? » proteste Judas, très agité, en interrompant Jésus.

      Lui, très calme, mais avec un regard qui transperce le cœur de Judas, et en même temps freine son apôtre troublé sur lequel convergent les regards des onze autres apôtres et de plusieurs disciples, dit :

      « Mais parce qu’ils t’aiment. Tu y as de bons amis. Tu l’as dit à plusieurs reprises. »

      Judas pousse un soupir de soulagement et essuie la sueur de son front, étrange en cette journée froide et venteuse :

      « C’est vrai. De vieux amis. Mais je ne crois pas que si je péchais…

      – Et tu demandes pitié pour cette raison ?

      – Certainement. Je suis encore imparfait, et je veux devenir parfait.

      – Tu l’as dit. Cette créature aussi est très imparfaite. Je lui ai donné le temps de devenir bonne, si elle le veut. »

      Judas ne répond rien.

      495.5 Les voici parvenus sur la route de Béthanie, déjà loin de Jérusalem. Jésus s’arrête et dit :

      « Et vous, avez-vous donné aux pauvres ce que je vous ai remis ? Avez-vous fait tout ce que je vous avais demandé ?

      – Tout, Maître, répondent apôtres et disciples.

      – Alors, écoutez. Je vais maintenant vous bénir et vous congédier. Vous vous disperserez comme toujours à travers la Palestine. Vous vous réunirez de nouveau ici pour la Pâque. Soyez bien présents à ce moment-là… Et, pendant ces mois, fortifiez votre cœur et le cœur de ceux qui croient en moi. Soyez de plus en plus justes, désintéressés, patients. Soyez ce que je vous ai enseigné à être. Faites le tour des villes, des villages, des maisons isolées. N’évitez personne. Supportez tout. Ce n’est pas vous-mêmes que vous servez, comme je ne sers pas Jésus de Nazareth, mais mon Père. Vous aussi, servez votre Père. Par conséquent, ce sont ses intérêts, et non les vôtres, qui doivent vous être sacrés, même s’ils peuvent faire souffrir et léser vos intérêts humains. Ayez l’esprit d’abnégation et d’obéissance. Il pourrait arriver que je vous appelle ou que je vous donne l’ordre de rester là où vous êtes. Ne jugez pas mon ordre. Quel qu’il soit, obéissez, en croyant fermement qu’il est bon et qu’il vous est donné pour votre bien. Et ne soyez pas jaloux si j’appelle certains, et pas les autres. Vous voyez… Plusieurs se sont détachés de moi… et j’en ai souffert. C’étaient ceux qui voulaient encore se conduire d’après leur intelligence. L’orgueil est le levier qui renverse les âmes, et l’aimant qui me les arrache. Ne maudissez pas ceux qui m’ont quitté. Priez pour qu’ils reviennent… Mes bergers resteront deux par deux dans le voisinage immédiat de Jérusalem. Pour le moment, Isaac m’accompagne, avec Marziam. Aimez-vous beaucoup les uns les autres. Aidez-vous mutuellement. Mes amis, que votre âme et vos anges gardiens vous disent tout le reste, en vous rappelant ce que je vous ai enseigné. Je vous bénis. »

      Tous se prosternent pendant que Jésus récite la bénédiction mosaïque. Puis ils s’empressent de le saluer. Enfin ils se séparent de lui qui, avec les Douze, Isaac et Marziam, prend la direction de Béthanie.

      « Nous allons maintenant nous arrêter, le temps de saluer Lazare, puis nous continuerons vers le Jourdain.

      – Allons-nous à Jéricho ? demande Judas, l’air intéressé.

      – Non. A Beth Abara.

      – Mais… la nuit…

      – Il ne manque pas de maisons ni de villages d’ici au fleuve… »

      Personne ne parle plus et, hormis le frémissement des oliviers et le bruit des pas, on n’entend plus rien.




[1] Judas a développé ce penchant notamment lorsque le pouvoir de faire des miracles, donné aux apôtres, a commencé à se tarir chez lui.



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-191.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/lecon-sur-la-misericorde.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 20 Jan - 20:59

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

496. Halte dans la petite maison de Salomon

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 192.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 496.

Le 18 septembre 1946.

endredi 21 septembre 29
Béthabara


      496.1 Pour éviter d’être vus, ils entrent dans le village où se trouve la petite maison de Salomon en remontant la berge du fleuve. Précaution inutile, à mon avis, parce que le soir précoce de novembre ou de fin d’octobre tombe, et les habitants sont déjà rentrés chez eux. Le chemin est vide, absolument vide, et s’il n’y avait quelques bêlements, on aurait cru l’endroit désert.

      Ils secouent le portillon. Il est fermé, bien fermé sur le petit jardin que, malgré la pénombre, on voit en bon ordre.

      « Appelez ! Il est dans la cuisine. Un filet de lumière passe à travers les volets » dit Jésus.

      Thomas, de sa voix puissante, se charge de héler le vieillard, qui ouvre aussitôt la porte en regardant du côté de la route. Il y voit mal, à cause du peu de jour à l’extérieur, et parce qu’il sort de la cuisine où le feu éclaire et où une lampe est allumée.

      Mais quand Jésus lance : “ C’est nous ”, le vieil homme reconnaît immédiatement sa voix et s’écrie : “ Le Maître ! ” Aussitôt, il descend les quelques marches et court ouvrir.

      « Mon Seigneur ! Entre, entre dans ta maison et que soit béni le jour qui s’achève par ta venue ! » dit-il en s’affairant autour de la fermeture du portail.

      Et il explique :

      « Je suis seul et je ferme soigneusement… Les voleurs sont capables de tout. Il y en a qui font des dégâts ici ou là, en descendant des monts de Galaad dans la vallée. Ce n’est pas que je craigne pour ma vie, mais j’avais fait des préparatifs pour toi et… Voilà, Maître, viens. La soirée est humide et tes cheveux sont trempés de rosée…

      – Et tu es plus empressé que l’épouse du Cantique, père. Cela ne t’ennuie pas de te déranger pour accueillir le Pèlerin, dit Jésus en souriant.

      – Me déranger ? Comme le temps était long ! Je t’ai attendu jour après jour. J’avais semé vos graines et je voyais les légumes pousser. Je me disais : “ S’il venait, cela lui plairait sûrement. ” Mais ils sont arrivés à maturité et tu n’es pas venu… Et je voyais les fruits qui se coloraient sur les arbres et j’en mangeais à regret, puisque tu n’en profitais pas. Cette brebis m’a donné un agneau, tout blanc. Je l’ai gardé longtemps pour le manger avec toi. J’espérais te voir avant la fête des Tentes. D’ailleurs… un agneau entier pour moi, c’était trop ! Je l’ai échangé contre une petite brebis, et ils ont été bons au point de refuser la différence. Mais des fruits et des fromages, j’en ai gardé le plus possible pour toi, ainsi que du poisson séché et des légumes. Il me reste encore quelques melons. Et un peu de vin… moi, je n’en bois pas, mais je l’ai préparé pour toi, pour l’hiver. »

      496.2 Tout en parlant, il essuie la table, y pose la vaisselle, attise le feu, ajoute de l’eau dans le chaudron et il s’affaire, visiblement heureux. Il ne ressemble plus au pauvre vieux d’il y a quelques mois [1].

      Il sort, revient avec du lait, s’excuse :

      « Il y en a peu, car il n’y a qu’une brebis qui donne du lait. Il y en aura bientôt deux. Mais pour toi, cela suffit. »

      Il est à la fois dévoué et paternel. Il a pris les manteaux humides, les sandales boueuses et les a portés ailleurs. Il est revenu avec des pommes, des grenades, du raisin et quelques figues à moitié sèches, et il explique :

      « Je les ai séchées ainsi pour te les faire goûter. Je pensais… je pensais que mon petit Ananias les aimait tant, préparées de cette façon !… »

      A ces mots, sa voix, auparavant paisible, baisse tristement, et il achève :

      « Et… et je pensais qu’elles te feraient plaisir et, en les préparant… j’avais l’impression que c’était encore pour mon petit-fils. »

      Il secoue la tête et s’efforce de sourire, mais des larmes brillent dans ses yeux.

      Jésus, qui s’était assis à table, se lève et passe un bras au cou du vieil homme en l’attirant à lui :

      « Je les aime beaucoup. Cela me rappelle mon enfance… et mon père. Mais il ne fallait pas te priver de tant de bonnes choses pour moi ! Elles t’auraient fait du bien. Tu dois être en bonne santé et fort pour m’accueillir toujours de cette façon. C’est si doux de trouver une telle maison, avec un père qui nous attend. N’est-ce pas, mes amis ?

      – Bien sûr ! C’est même tellement beau, qu’on paresse sans aider Ananias » s’exclame Pierre, qui se lève en disant : « Eh bien, allons préparer nos lits pendant que Jésus parle avec notre ami.

      – Oh ! c’est inutile, ils sont toujours prêts et tout est propre… Seulement… il n’y en a pas assez. Vous êtes plus de douze. Mais j’irai dormir sur le foin et…

      – Ah non, père ! C’est moi qui vais y aller ! s’écrie Jean.

      – Non, moi, déclarent André et les autres.

      – Non, ce n’est pas nécessaire. Moi je dors ici, sur cette table. Elle n’est certainement pas plus dure que le fond de ma barque, et Marziam… dit Pierre.

      – Il dort avec moi… interrompt Jésus.

      – Ou avec moi, si tu veux… comme le faisait le petit Ananias » murmure le vieillard.

      Ses yeux se font implorants.

      « Oui, Maître. Toi, tu m’as encore. Lui… Je vais avec lui » déclare Marziam.

      Comprenant son geste, Jésus lui fait une caresse.

      496.3 « Ils sont venus te chercher à plusieurs reprises, après la Pentecôte. Puis ils ont cessé de venir, dit ensuite le vieil homme.

      – Qui le recherchait ?

      – Des pharisiens, tiens ! Et d’autres comme eux. Ils voulaient t’interroger. Mais moi, j’ai répliqué : “ Allez à son village. Il n’est pas ici, et je ne sais pas quand il viendra… ” C’était vrai, et ils se sont lassés. Ils cherchaient aussi quelqu’un d’autre, un certain Jean, qu’ils disaient être avec toi et qu’ils pensaient peut-être caché ici. J’ai répondu : “ Mais c’est son apôtre, il est avec lui. ” Ils ont repris : “ Serait-il borgne, son apôtre, et vieux, malade, mourant ? ” J’ai compris que ce n’était pas toi, et j’ai répondu : “ Je ne connais que l’apôtre Jean, un bon jeune homme, presque un enfant. Il est sain de cœur et en bonne forme physique. ” Ils m’ont menacé. Mais que pouvais-je dire d’autre ? C’est la vérité…

      – Oui, c’est la vérité. Et sois toujours franc ; même si tu devais me porter tort, ne mens jamais, père.

      – Seigneur, mes cheveux ont blanchi en désirant toujours obéir au Seigneur. Et parmi les obéissances, il y a aussi celle de ne pas dire de choses fausses. Mais… pourquoi te cherchent-ils ainsi, Seigneur ? Moi, j’étais aveugle. Je ne me rendais donc pas à Jérusalem. J’y suis retourné maintenant… Rien que pour le rite, car je voulais être ici à t’attendre… J’ai senti haine et amour autour de toi… Et j’ai jugé qu’il y a plus de haine que d’amour chez les chefs du peuple. J’étais au Temple, ce matin où ils voulaient t’offenser… et je m’en suis enfui, désolé, pour t’attendre et pleurer ici. Pourquoi l’homme est-il si méchant ?

      – Parce qu’il a tué son âme. Et avec son âme, la capacité de sentir le remords d’être injuste.

      – C’est vrai !… Et ils te cherchent pour te faire du mal ?

     – Oui.

      – Oui ? Israël veut donc nuire à son Roi ? Quelle horreur ! Israël se condamne aux châtiments annoncés par les prophètes !… Ah ! je suis content, maintenant, que mon fils soit mort… et je voudrais mourir moi aussi pour ne pas voir le péché d’Israël… »

      496.4 Un grand silence s’établit. On n’entend que le crépitement du bois dans le feu.

      « Mais parlons d’autre chose ! On ne parle que de mort, de haine, de trahison ! Assez ! Assez ! Je ne peux en entendre plus ! » vocifère Judas.

      Il est bouleversé, nerveux, il a les yeux torves, et il gesticule dans la cuisine, remuant les jambes, les bras, tout son corps.

      « Judas a raison, approuvent certains.

      – Mais ne pas vouloir entendre ne sert à rien. Ce qu’il faut, c’est ne pas consentir, dit Jésus avec son geste résigné d’ouvrir les mains, les paumes tournées vers le haut, au-dessus de la table rustique.

      – Que veux-tu dire ? Consentir ? Qui consent à cela ? »

      Judas agite les mains, presque sur le visage de Jésus, en se penchant, comme s’il se jetait sur la table pour atteindre le Maître.

      « Qui ? Tous ceux qui rêvent déjà de me voir périr dans mon sang. Sang ! Sang de ton Messie ! Sang sur toi, terre, qui ne veux pas de ton Seigneur ! Sang plus resplendissant que ces flammes ! Sang, feu dans la glace et les ténèbres d’un monde criminel ! Ils espèrent tuer la Lumière en lui enlevant son sang. Mais la lumière, c’est l’âme ; le sang est encore de la matière. La matière alourdit l’esprit. Le sang sur une plaque de mica affaiblit la lumière, n’est-ce pas ?

      Ce bois n’éclairait pas jusqu’au moment où il est devenu flamme, et ses résines, en s’embrasant, se sont changées en splendeur, formant maintenant une lueur incandescente. En vérité, en vérité je vous dis que de la même façon, quand tout sera accompli et que le sang et la chair auront été consumés par le sacrifice, alors, comme ce feu qui a maintenant tout changé en lumière, mon esprit flamboiera plus que jamais sur le monde et je serai plus que jamais lumière. Une lumière telle, qu’elle éblouira pour toujours ceux qui la haïssent et ont voulu la tuer. Une lumière telle, qu’elle fera fondre les portes d’or des Cieux, fermées à l’humanité depuis tant de siècles, et le Ciel s’ouvrira aux justes. Une lumière telle, qu’elle percera les pierres qui forment la voûte de l’Abîme et l’horrible feu de l’enfer deviendra d’une atrocité extrême sous l’éclat de mes rayons. Et malheur, malheur, malheur à ceux qui auront dressé des embûches à la lumière ! Sang et lumière ! Ils seront tous deux devant eux, jusqu’à les rendre fous et désespérés : des démons ! »

      Jésus, qui s’était levé en disant “ en vérité ” et avait fait peur, tant il était imposant, ainsi auréolé par les flammes du foyer, dans la basse cuisine aux murs sombres, s’assied et se tait.

      496.5 Tous se regardent les uns les autres. Tous, sauf Judas que la vue du bois qui flambe semble hypnotiser, épouvanter… Sa terreur lui donne un masque atroce, d’une pâleur verdâtre et livide, sur lequel le feu de bois lance des reflets rougeâtres. Il me rappelle son visage effrayant du vendredi saint. Puis il se tourne brusquement et crie :

      « Mais tais-toi donc ! Tais-toi ! Pourquoi nous tourmentes-tu ? »

      Et il sort en claquant la porte…

      « C’est sa manière de faire, c’est vrai, mais il t’aime beaucoup… et il souffre d’entendre certains mots » dit Thomas, qui conclut : « Ils nous font bien mal à nous aussi ! Mais nous, nous sommes moins… étranges, oui, disons : étranges… »

      Tous restent silencieux. Jésus lui-même se tait…

      « Les légumes sont cuits, le lait est chaud… » signale Ananias, intimidé, en parlant tout bas, comme s’il n’osait dire cette banalité après une telle algarade…

      « Appelez Judas et dînons » ordonne Jésus.

      Jean sort pour appeler son compagnon. Ils rentrent… Judas a le visage tourmenté, sans le moindre signe d’apaisement… Il s’assied cependant à table et se lève avec les autres quand Jésus offre et bénit, mais il le regarde par en dessous quand Jésus fait les parts en gardant pour lui la dernière.

      Tout le monde voudrait dissiper la tristesse qui règne dans la pièce. Personne n’y parvient jusqu’à ce que Jésus lui-même s’adresse au vieillard pour lui demander si le hameau et les alentours ont accueilli la parole du Seigneur.

      « Oui, oui, Maître. Et vraiment bien, mieux que sur l’autre rive, à mon avis. Tu sais… le souvenir de Jean-Baptiste est très vif ici, et ses disciples, qui sont maintenant les tiens, le gardent éveillé et te mettent en lumière au moyen de ses paroles. Et puis… ici… en Pérée et en Décapole, il y a peu de pharisiens, par conséquent… »




[1] Avril, il y a 5 mois et demi (Cf. 5.75). .



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-192.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/halte-dans-la-petite-maison-de-salomon.html


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 21 Jan - 20:36

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

497. Une heure de découragement de Simon-Pierre

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 193.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 497.

Le 20 septembre 1946.

Lundi 24 septembre 29
Livias


497.1 Je ne sais où ils se trouvent : certainement plus dans la vallée du Jourdain, mais déjà sur les montagnes qui la bordent, car je vois la verte vallée et le beau fleuve bleu tout en bas, tandis que les sommets de montagnes élevées se dressent au-dessus du vaste haut plateau qui s’étend en Transjordanie.

Je vois Pierre qui, solitaire sur une petite hauteur, regarde fixement vers le nord-est et soupire avec tristesse. Il a un fagot à ses pieds, qu’il a certainement ramassé dans les bois qui couvrent cette colline. Un petit village se niche dans la verdure. Pierre est vraiment tout à fait accablé. Il finit par s’asseoir sur son fagot et se prend la tête dans les mains, tout replié sur lui-même. Il reste ainsi, perdant la conscience du temps et de toute chose, tellement absorbé qu’il ne remarque même pas le passage de quelques enfants derrière des chevrettes capricieuses. Les enfants l’observent, puis courent derrière leurs chèvres en direction du hameau. Le soleil descend lentement, mais Pierre ne bouge pas.

497.2 Par le sentier qui monte du village sur le coteau, Jésus s’avance. Il marche doucement, évitant de faire du bruit. Il atteint l’endroit où se trouve Pierre, et il l’appelle, en restant debout devant lui :

« Simon ! »

Pierre sursaute et lève un visage troublé :

« Maître !

– Que faisais-tu, Simon ? Tes compagnons sont tous rentrés. Toi seul ne revenais pas et nous étions inquiets, à tel point que ton frère et les fils de Zébédée avec Thomas et Judas se sont dispersés dans la montagne, tandis que mes frères avec Isaac et Marziam sont descendus vers la plaine.

– Je suis désolé… Je suis désolé d’avoir causé de la peine et de la fatigue…

– Tes compagnons t’aiment bien… Et c’est justement Judas qui s’est tracassé le premier et a reproché à Marziam de t’avoir laissé partir tout seul.

– Hmm !…

– Simon, qu’as-tu ?

– Rien, Maître.

– Que faisais-tu ici, sur ce talus, seul, alors que le soir tombe ?

– Je regardais…

– Tu as peut-être regardé, Simon. Mais, maintenant, tu ne regardais pas… Des enfants sont passés près de toi et ils ont presque eu peur que tu ne sois mort tant tu étais ramassé sur toi-même. Ils ont couru à la bergerie qui nous a logés et ils me l’ont dit. Je suis venu… Que regardais-tu, Simon ?

– Je regardais… Je regardais vers Ramoth Galaad, vers Gerasa, Bozra, Arbéla… notre voyage de l’an dernier, si beau, si… Ta Mère qui était avec nous ! Les femmes disciples… Jean d’En-Dor… Le marchand… Même lui était bon et rendait notre voyage agréable… Comme tout a changé ! Quelle différence… et quelle douleur !… Voilà ce que je regardais : le passé.

– Et l’avenir, mon Simon ? »

Jésus s’assied sur le fagot à côté de Pierre et lui passe un bras autour du cou :

« Tu regardais l’horizon… et la tristesse te l’a assombri. Le présent, comme un tourbillon, a fait s’élever des nuages effrayants et t’a caché le souvenir serein, plein de promesses et d’espérances, et cela t’a fait peur. Simon, tu es en proie à une de ces heures de tristesse et de dégoût que notre nature humaine rencontre sur son chemin. Personne n’en est exempt, car ces heures sont suscitées par celui qui hait l’homme. Et plus l’homme sert Dieu, plus Satan cherche à l’effrayer et à le lasser pour le détacher de son ministère. Tu es soumis, toi aussi, à un moment de lassitude… Le martelage continuel de la persécution contre ton Maître te fatigue. Et enfin — tu ignores que ce n’est pas toi, mais le Tentateur —, tu écoutes une voix te murmurer : “ Et demain ? Que sera demain ? ”…

497.3 – Seigneur, c’est vrai. Tu lis dans mon cœur. Mais tu vois aussi que, si je m’interroge, ce n’est pas par crainte pour moi. C’est parce que… Non, je ne pourrai jamais te voir tourmenté… Tu parles souvent de crime, de trahison. Moi… Oh ! je ne suis pas le seul ! Combien, surtout parmi les plus âgés, t’ont demandé de mourir avant de voir leur Roi offensé ? Et moi… tu es tout pour moi, tu sais. Ce qui n’est pas toi ne m’intéresse plus. Il ne s’agit pas, comme dit Judas, de la nostalgie de ma barque et de ma femme… Regarde : tu vois que je dis la vérité. J’ai tant insisté pour obtenir Marziam. Mon humanité voulait avoir au moins un fils adoptif à la place du fils que ma femme ne m’a pas donné, offensant ma virilité qui voulait se perpétuer. Et maintenant, aujourd’hui, moi… je l’aime, oui. Mais si tu me l’enlevais, je ne réagirais pas. Je te dirais seulement… mais non ! Je ne dirais rien !

– Tu me dirais seulement ? Achève.

– C’est inutile, Maître.

– Parle !

– Je dirais : “ Donne-le à celui qui, mieux que moi, le fera grandir en homme juste. ” Rien de plus ! C’est-à-dire… et cela, je te le dis en pleurant, pour lui, pour moi, pour mon frère, et aussi pour Jean et Jacques… et pour les autres, mais nous… nous sommes tes premiers… »

Et Pierre glisse à genoux pour s’appuyer aux genoux de Jésus, les mains levées, paumes vers le haut, suppliant, avec des larmes qui coulent sur ses joues et se perdent dans sa barbe…

« …Je le dis pour nous : fais-nous mourir, emmène-nous avant que nous… Ah ! moi, j’y ai pensé, j’y pense toujours, depuis des mois. Tu vois que cette pensée me ronge et me vieillit, que cette crainte continuelle m’empêche même de dormir. Je pense que, s’il en est vraiment comme tu le dis, je pourrais être moi aussi le traître, ou bien André, Jean, Jacques, ou Marziam… Et si on n’en arrive pas là, je pourrais être l’un de ceux dont tu parlais aussi, il y a trois soirs chez Ananias, l’un de ceux qui arrivent à vouloir qu’on t’enlève ton sang, ou l’un de ceux qui par lâcheté ne savent pas s’y opposer et qui, par peur du mal, donnent leur consentement au mal… Moi… si je devais seulement consentir par absence de réaction, par peur… Maître ! Mon Maître, je me tuerais pour me punir, ou bien… si je rencontrais tes assassins, je les tuerais. Si tu ne le veux pas, fais-moi mourir avant, tout de suite, ici… La vie n’est rien, mais manquer à l’amour pour toi… Etre l’un d’eux… être… voir et ne pas… »

Il est si agité que même les mots lui manquent. Il se penche, le visage sur les genoux de Jésus, pleurant les larmes âpres d’un homme rude, âgé, peu habitué à cela et bouleversé par trop de sentiments.

497.4 Jésus pose sa main sur sa tête, comme pour calmer cette douleur et dissiper les pensées perturbatrices, et il lui dit :

« Mon ami, crois-tu que, même s’il devait arriver que… tu ne sois pas parfait à cette heure-là, que le Seigneur, qui est juste, ne mettrait pas en balance ton erreur et le poids de ton amour et de ta volonté présentes ? Et crains-tu que l’or de cet amour et de cette volonté ait moins de poids que ton imperfection momentanée, et qu’il ne suffirait pas à obtenir l’indulgence de Dieu, et avec l’indulgence tous les secours pour redevenir toi-même, mon Simon bien-aimé ?

– Fais-moi mourir ! Sauve-moi ! J’ai peur !

– Tu es ma Pierre, Simon. Puis-je, moi, effriter la pierre sur laquelle je dois fonder celle qui doit me perpétuer sur la terre, mon Eglise ?

– J’en suis indigne. Je le sens. Je suis un pauvre homme, ignorant, pécheur. Toutes les tendances mauvaises sont en moi. Je ne suis pas digne, je ne suis pas digne ! Je deviendrai pervers, homicide, tout ce qu’il y a de pire… Fais-moi mourir. Comprends que, si je devais découvrir celui qui te hait…

– C’est tout un monde qui me hait, Simon. Il faut pardonner.

– Je parle du principal coupable. Il doit y en avoir un qui est le principal, et…

– Il y aura de nombreux un, et tous y joueront un rôle principal.

– Quel rôle ? Celui de… Oh ! ne me le fais pas dire ! Mais moi…

– Mais tu dois pardonner, comme moi et avec moi. Pourquoi te troubles-tu ainsi, Simon, en pensant à ce que tu pourrais faire pour punir ? Laisse ce soin au Seigneur. Toi, aime et pardonne, compatis et pardonne. Eux, tous ceux qui seront coupables envers ton Jésus, ont tant besoin d’être aidés pour obtenir le pardon !

– Il n’y a pas de pardon pour eux.

– Oh ! Comme tu es sévère avec tes frères, Simon ! Bien sûr que le pardon existe pour eux aussi, s’ils se repentent ! Malheur, si tous ceux qui m’offensent ne pouvaient être pardonnés ! 497.5 Allons, lève-toi, Simon. La peine de tes compagnons s’est sûrement accrue en voyant que, moi aussi, je ne suis plus au bercail. Mais, quitte à les faire souffrir quelque temps encore avant d’aller les trouver, prions. Prions ensemble. Il n’y a rien d’autre à faire pour retrouver paix, force spirituelle, amour, compassion… même envers nous-mêmes. La prière met en fuite les fantômes de Satan, elle nous fait nous sentir près de Dieu. Et avec Dieu près de soi, on peut tout affronter et supporter avec justice et mérite. Prions ainsi, toi et moi ensemble, ici sur cette montagne d’où la vue s’étend sur une si grande partie de notre patrie, comme du haut du mont Nébo la Terre Promise s’est découverte à la vue de Moïse. Nous, qui sommes plus chanceux que lui, nous apportons à cette terre qui appartiendra au Christ, la Parole et le Salut. Moi pour commencer, et toi ensuite. Regarde ! Dans les dernières lueurs du jour, on distingue encore les monts de Judée. Mais, au-delà, il y a la plaine, la mer, et puis d’autres terres, le monde… Tous t’attendent, Pierre. Ils t’attendent pour savoir qu’il existe un vrai Dieu, un Dieu qui apportera la lumière véritable aux âmes qui marchent à tâtons dans la nuit du paganisme et de l’idolâtrie. Vois : sur la terre, la lumière s’affaiblit. Comment les voyageurs pourraient-ils ne pas perdre la direction par une nuit sans lumière ? Mais voici l’étoile Polaire. Elle se lève déjà pour guider les voyageurs. Ma religion sera l’étoile qui guidera les voyageurs spirituels sur la route du Ciel. Et tu seras uni à elle au point d’être une seule lumière avec moi et avec ma Doctrine, ô mon Pierre, ma Pierre bénie. Prions pour cette heure où les hommes seront sauvés grâce à mon nom. “ Notre Père, qui es aux Cieux ”… »

Il dit lentement le Notre Père en tenant Pierre par la main, et on dirait qu’il le présente au Père, en élevant ainsi les bras et les mains, avec dans sa main droite la main gauche de l’apôtre.

497.6 « Maintenant descendons, et laissons ici les vaines tristesses et les soucis inutiles du lendemain. Avec notre pain quotidien, le Père nous donnera demain, chaque jour, ses secours. En es-tu convaincu, Simon ?

– Oui, Maître, je le crois » dit avec fermeté Pierre, dont le visage n’est plus troublé, mais austère, comme il l’est depuis plusieurs mois, ce qui lui donne un aspect bien différent du pêcheur rustre et jovial qu’il était les deux premières années.

Ils descendent, Jésus devant, Pierre derrière avec son fagot, et presque à la première maison du village ils trouvent les apôtres en émoi.

« Mais où étais-tu parti ? crient-ils à Pierre.

– Nous aurions pu être ici depuis longtemps, mais je me suis arrêté pour parler avec lui, en regardant vers Gerasa… » répond pour lui Jésus.

Ils tournent à droite, vers un bercail à moitié démoli. A l’intérieur d’une palissade en partie écroulée et pour le reste moisie et chancelante se trouve un hangar aux parois grossières, mal couvert, mal clos par des murs sur trois côtés, et par des planches sur le quatrième.

A l’intérieur, il n’y a qu’un peu de paille sur le sol, et dans un coin un foyer primitif.

Je suppose qu’ils n’ont pas été accueillis dans le village et qu’ils se sont réfugiés ici…     


*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-193.htm
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 22 Jan - 21:35

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

498. Jésus exhorte Jude et Jacques

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 194.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 498.

Le 21 septembre 1946.

Lundi 24 septembre 29
Hesbon


      498.1 « Tu veux vraiment prendre cette route ? Cela ne me paraît guère prudent, pour plusieurs raisons… objecte Judas.

      – Lesquelles ? Des hommes de ces villages, jusqu’à Capharnaüm, ne sont-ils pas venus à moi pour chercher le salut et la sagesse ? Ne sont-ils pas eux aussi des créatures de Dieu ?

      – Oui… Mais… Il n’est pas prudent pour toi de t’avancer trop près de Machéronte… C’est un endroit funeste aux ennemis d’Hérode.

      – Machéronte est loin, et je n’ai pas le temps d’aller jusque là. Je voudrais me rendre à Pétra, et au-delà… Mais je n’arriverai qu’à mi-route, ou moins encore. De toute façon, avançons…

      – Joseph t’a conseillé…

      – De rester sur des routes surveillées. Celle-ci est justement la route sur l’autre rive du Jourdain, sur laquelle les Romains ont établi de fortes garnisons. Je ne suis pas lâche, Judas, ni imprudent.

      – Moi, je ne m’y fierais pas. Moi, je ne m’éloignerais pas de Jérusalem. Moi…

      – Mais laisse donc faire le Maître. C’est lui le Maître, et nous sommes ses disciples. Quand donc a-t-on vu que c’est au disciple de conseiller son maître ? dit Jacques, fils de Zébédée.

      – Quand ? Cela ne fait pas des années que ton frère lui a recommandé de ne pas se rendre à Acor, et il l’a écouté. A présent, qu’il m’écoute !

      – Tu es jaloux et autoritaire. Si mon frère a parlé et a été écouté, c’est signe que sa remarque était juste et qu’il fallait l’écouter. Il suffisait de regarder Jean, ce jour-là, pour comprendre que c’était le cas !

      – Oh ! avec toute sa sagesse, il n’a jamais su le défendre, et ne le saura jamais. En revanche, ce que j’ai fait, moi, en arrivant à Jérusalem est récent.

      – Tu as fait ton devoir. Mon frère aussi l’aurait fait à l’occasion, mais par d’autres moyens, car lui ne sait pas mentir, même pour de bonnes raisons… et j’en suis heureux !

      – Tu m’offenses ! Tu me traites de menteur…

      – Tu voudrais que je te dise sincère, alors que tu as menti si habilement sans changer de couleur ?

      – Je le faisais…

      – Oui. Je sais, je sais : pour sauver le Maître ! Mais cela ne me va pas, ni à aucun d’entre nous. Nous préférons la simple réponse du vieil homme. Nous préférons nous taire, quitte à être traités de débiles ou même malmenés, plutôt que de mentir. On commence à mentir pour une bonne raison, et on finit dans un but qui ne l’est pas.

      – Qui est mauvais ? Pas moi. Qui est débile ? Pas moi.

      498.2 – Cela suffit ! Même si vous avez raison, vous finissez par avoir tort, un tort différent de celui que vous vous reprochez, car il s’en prend à la charité. Ce que je pense de la sincérité, vous le savez tous, et ce que j’exige pour la charité aussi. Allons. Vos disputes me sont plus pénibles que les insultes de mes ennemis. »

      Et Jésus, visiblement attristé, se met à marcher rapidement, seul, sur la route : il n’est pas besoin d’être archéologue pour comprendre qu’elle a été construite par les Romains. Elle va vers le sud, presque toute droite à perte de vue entre deux chaînes de montagnes assez remarquables. La voie est monotone, assombrie par les pentes boisées qui l’enserrent et empêchent de découvrir l’horizon, mais en bon état. De temps à autre, quelque pont romain est jeté sur un torrent ou un ruisseau qui descend certainement vers le Jourdain ou la mer Morte. Je ne le sais pas précisément, car les monts m’empêchent de voir du côté de l’occident où doivent se trouver les fleuves et la mer. Il passe des caravanes sur cette route, des caravanes qui remontent peut-être de la mer Rouge pour aller je ne sais où, avec de nombreux chameaux et chameliers, et des marchands d’une race visiblement différente de l’hébraïque.

      Jésus marche toujours en avant, seul. Derrière, divisés en deux groupes, les apôtres discutent. Les Galiléens devant, les Judéens derrière, avec, en plus, André et Jean et les deux disciples qui se sont unis à eux. Le premier groupe essaie de consoler Jacques, fils de Zébédée, accablé par le sévère reproche du Maître ; l’autre tente de persuader Judas de ne pas être toujours aussi obstiné et agressif. Les deux groupes sont d’accord pour conseiller aux deux hommes qui ont reçu des reproches d’aller trouver le Maître et de faire la paix avec lui.

      « Moi ? Mais j’y vais tout de suite ! Je sais que j’ai raison. Je me connais bien : ce n’est pas moi qui ai fait des insinuations malveillantes. J’y vais » dit Judas.

      Il montre de l’assurance, il semble effronté. Il accélère le pas pour rejoindre Jésus. Je me demande une fois de plus si, ces jours-là, il était déjà disposé à trahir et s’il conspirait déjà avec les ennemis du Christ…

      Jacques, au contraire, qui au fond est le moins coupable, est si abattu d’avoir peiné le Maître qu’il n’a pas le courage d’aller en avant. Il le regarde, son Maître, qui maintenant parle avec Judas… Il le regarde, et le désir d’entendre qu’il est pardonné se manifeste vivement sur son visage. Mais son amour même, sincère, constant, fort, lui fait paraître impardonnable son méfait.

      498.3 Maintenant, les deux groupes se sont réunis, et même Simon le Zélote, André, Thomas et l’autre Jacques l’exhortent :

      « Mais, allons ! Comme si tu ne le connaissais pas ! Il t’a déjà pardonné ! »

      Et, avec beaucoup de finesse de jugement, Barthélemy, qui est âgé et sage, pose sa main sur l’épaule de Jacques en lui disant :

      « Je peux te l’assurer : c’est pour ne pas susciter d’autres tempêtes qu’il a fait impartialement des reproches à vous deux, mais son cœur s’adressait seulement à Judas.

      – C’est bien cela, Barthélemy ! Mon Frère s’épuise à supporter cet homme dont il s’obstine à vouloir le repentir, et il s’efforce de le faire paraître… comme l’un de nous. Lui, c’est le Maître, et moi… je suis moi… Mais si j’étais lui… l’homme de Kérioth ne serait pas avec nous ! lance Jude, avec des éclairs dans ses yeux très beaux qui rappellent ceux du Christ.

      – Tu crois ? Tu as des soupçons ? A quel propos ? demandent plusieurs.

      – Sur rien, rien de précis. Mais cet homme-là ne me plaît pas.

      – Il ne t’a jamais plu, mon frère. C’est une répulsion irraisonnée car elle s’est produite dès la première rencontre, tu me l’as avoué. C’est contraire à l’amour. Tu devrais la vaincre, ne serait-ce que pour faire plaisir à Jésus, intervient Jacques, fils d’Alphée, sur un ton calme mais persuasif.

      – Tu as raison, mais… je n’y arrive pas. 498.4 Viens, Jacques, allons ensemble trouver mon Frère. »

      Et Jude saisit résolument le bras de Jacques, fils de Zébédée, et l’entraîne avec lui.

      Judas les entend venir et il se retourne, puis il dit quelque chose à Jésus. Jésus s’arrête et les attend. Judas, l’œil malicieux, observe l’apôtre dépité.

      « Excuse-moi. Pousse-toi un peu. J’ai besoin de parler à mon Frère » dit Jude.

      La phrase est polie, mais le ton est très sec.

      Judas a un petit rire puis, haussant les épaules, il revient sur ses pas pour rejoindre ses compagnons.

      « Jésus, nous sommes pécheurs… dit Jude.

      – C’est moi qui suis pécheur, pas toi, murmure Jacques, la tête basse.

      – Nous sommes pécheurs, Jacques, car ce que tu as fait, moi je l’ai pensé, je l’ai approuvé, je l’ai dans le cœur. Je suis donc, moi aussi, dans le péché. Car ce jugement sur Judas sort de mon cœur pour contaminer ma charité… Jésus, tu ne dis rien à tes disciples qui reconnaissent leur péché ?

      – Que dois-je dire que vous ne sachiez déjà ? Allez-vous peut-être changer à l’égard de votre compagnon à cause de mes paroles ?

      – Non. Pas plus que lui ne change pour celles que tu lui dis, lui répond franchement son cousin, pour lui et pour les autres.

      – Laisse faire, Jude, laisse faire ! C’est moi qui suis fautif. C’est de moi qu’il est question, et je dois m’occuper de moi, pas des autres. Maître, ne sois pas fâché contre moi…

      498.5 – Jacques, j’attends de toi, de tous, un appui. J’ai tant de douleur devant toutes les incompréhensions que je rencontre… toutes les résistances obstinées. Vous le voyez vous-mêmes : pour un village qui me donne de la joie, trois me la refusent et me chassent comme un malfaiteur. Mais ce réconfort, cette adhésion dont les autres me privent, je voudrais l’avoir au moins de vous. Que le monde ne m’aime pas, que je me sente étouffé par toute cette haine, cette antipathie, cette inimitié, ces soupçons qui m’entourent, par les vilenies de toute espèce, par les égoïsmes, par tout ce que seul mon amour infini pour l’homme me fait endurer, c’est pénible. Mais je le supporte encore. Je suis venu pour le subir de la part de ceux qui haïssent le Salut. Mais vous ! Non, je ne supporte pas que vous ne soyez pas capables de vous aimer les uns les autres et par conséquent de me comprendre, que vous n’adhériez pas à mon esprit en vous efforçant de m’imiter.

      Croyez-vous, pouvez-vous croire, vous tous, que je ne voie pas les erreurs de Judas, que j’ignore quoi que ce soit de lui ? Ah ! soyez bien sûrs qu’il n’en est pas ainsi. Mais si j’avais voulu des hommes parfaits spirituellement, j’aurais fait s’incarner des anges et je m’en serais entouré. J’aurais pu le faire. Cela aurait-il été un vrai bien ? Non. De ma part, cela aurait été égoïsme et mépris. J’aurais évité la douleur qui me vient de vos imperfections, et j’aurais méprisé les hommes créés par le Père et qu’il a aimés au point de m’envoyer les sauver. Et de la part de l’homme, cela aurait été nuisible pour l’avenir. Une fois ma mission achevée, quand je serais remonté au Ciel avec mes anges, que serait-il resté qui puisse continuer ma mission, et qui? Quel homme aurait pu s’efforcer de faire ce que je dis, s’il n’y avait qu’un Dieu et des anges pour donner l’exemple d’une vie nouvelle, réglée par l’esprit ?

      Il était nécessaire que je revête une chair pour persuader l’homme que, s’il le veut, il peut être chaste et saint à tous points de vue. Et il était nécessaire que je choisisse des hommes qui, par leur esprit, répondraient à l’appel de mon esprit, sans regarder s’ils étaient riches ou pauvres, doctes ou ignorants, citadins ou paysans ; que je les choisisse comme je les trouvais, et que ma volonté et la leur les transforment lentement en maîtres des autres hommes.

      L’homme peut croire à l’homme, qu’il voit. Mais il lui est difficile, lui qui est tombé si bas, de croire à un Dieu qu’il ne voit pas. Les foudres sur le Sinaï n’avaient pas encore fini de tomber, que déjà l’idolâtrie réapparaissait au pied de la montagne… Moïse n’était pas encore mort, lui dont on ne pouvait regarder le visage, que déjà on péchait contre la Loi. Mais quand vous, une fois transformés en maîtres, vous serez comme un exemple, comme un témoignage, comme un levain parmi les hommes, ceux-ci ne pourront plus prétendre : “ Ce sont des dieux descendus parmi les hommes, et nous ne pouvons pas les imiter. ” Ils devront dire : “ Ce sont des hommes comme nous. Il ne fait aucun doute qu’ils ont les mêmes instincts et les mêmes penchants que nous, les mêmes réactions, et cependant ils savent y résister et réagir sans la brutalité que nous y mettons. ” Ils auront ainsi la certitude que l’homme peut se diviniser, pourvu qu’il veuille entrer dans les voies de Dieu.

      Observez les païens et les idolâtres. Tout leur Olympe, toutes leurs idoles les rendent-ils meilleurs ? Non. Car s’ils sont incrédules, ils disent que ce n’est qu’une fable ; et s’ils sont croyants, ils pensent : “ Ce sont des dieux, mais moi, je suis un homme ”, donc ils ne s’efforcent pas de les imiter. Pour vous, cherchez donc à devenir d’autres moi-même, et n’ayez pas de hâte. L’homme évolue lentement de l’état d’animal raisonnable à celui d’être spirituel. Ayez de l’indulgence les uns pour les autres ! Personne, à part Dieu, n’est parfait.

      498.6 Et maintenant tout est passé, n’est-ce pas ? Transformez-vous par une ferme volonté à l’imitation de Simon-Pierre qui, en moins d’un an, a fait des pas de géant. Et pourtant… qui parmi vous était plus homme que Simon avec tous les défauts d’une humanité très matérielle ?

      – C’est vrai, Jésus. Je ne cesse pas de l’étudier. Il fait mon admiration, avoue Jude.

      – Oui. Je suis avec lui depuis l’enfance. Je le connais comme s’il était mon frère, mais j’ai en face de moi un nouveau Simon. Je t’avoue que, lorsque tu as annoncé qu’il était notre chef, je suis resté perplexe — et je ne suis pas le seul. Il me semblait le moins indiqué de tous. Je me disais : “ Qu’est-ce que Simon par rapport à l’autre Simon et à Nathanaël, à mon frère Jean et à tes frères ! ” Surtout par rapport à ces cinq-là ! Cela me paraissait vraiment être une erreur… A présent, je sais que tu avais raison.

      – Et vous ne voyez que la surface de Simon ! Mais moi, j’en vois le fond. Pour être parfait, il a encore beaucoup à faire et à souffrir. Mais je voudrais que tous aient sa bonne volonté, sa simplicité, son humilité et son amour… »

      Jésus regarde devant lui. Il semble voir je ne sais quoi. Il est absorbé dans ses pensées et sourit à ce qu’il voit. Puis il baisse les yeux sur Jacques et lui sourit.

      « Alors… Je suis pardonné ? demande ce dernier.

      – Je voudrais pouvoir pardonner à tous comme à toi… Voilà, cette ville doit être Hesbon. L’homme l’a dit : “ La ville se trouve après le pont à trois arches. ” Attendons les autres pour y entrer ensemble.    


*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-194.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/jesus-exhorte-jude-et-jacques.html


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 23 Jan - 23:13

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

499. Fuite d’Hesbon et rencontre d’un marchand de Pétra

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 195.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 499.

Le 22 septembre 1946.

Lundi 24 septembre 29
Vers le Nébo


      499.1 Je ne vois pas la ville d’Hesbon. Jésus et ses disciples en sortent déjà et, à voir les visages des apôtres, je comprends que ce fut une déception. Ils sont suivis, ou plutôt poursuivis, à la distance de quelques mètres par une foule vociférante et menaçante…

      « Ces lieux qui entourent la mer Salée sont maudits comme la mer elle-même, dit Pierre.

      – Quel endroit ! Rien n’a changé depuis l’époque de Moïse, et tu es trop bon de ne pas le punir comme il le fut alors [1]. Mais il le mériterait bien, et il faudrait en venir à bout par les puissances du Ciel ou par celles de la Terre. Tous, jusqu’au dernier homme et la dernière localité, lance Nathanaël, visiblement irrité.

      Une lueur de mépris passe dans ses yeux profonds. La race hébraïque ressort fortement chez cet apôtre maigre et âgé, et ce sentiment de dédain le fait ressembler fortement aux nombreux rabbis et pharisiens qui s’opposent toujours à Jésus.

      Jésus se retourne et lève la main pour dire :

      « Paix ! Paix ! Ils seront eux aussi attirés à la Vérité. Mais il nous faut faire preuve de paix et de compassion. Nous ne sommes jamais venus ici, ils ne nous connaissent pas. D’autres endroits furent ainsi la première fois, mais ils ont changés par la suite.

      – Ces lieux sont comme Massada : des repaires de vendus ! Retournons au Jourdain » insiste Pierre.

      Mais Jésus poursuit sa marche sur la route milliaire qu’il vient de reprendre, en direction du sud. Les habitants les plus enflammés contre lui ne cessent de le talonner, en attirant l’attention des voyageurs.

      499.2 Un homme — un riche marchand, je suppose, ou du moins quelqu’un qui est au service d’un marchand — conduit une longue caravane en route vers le nord. Stupéfait, il les observe, et arrête son chameau. Tous les autres font de même.

      Il regarde Jésus, il regarde les apôtres, désarmés et d’un aspect si bienveillant ; il regarde ces gens qui arrivent en criant et en menaçant et, curieux, il les interpelle. Je n’entend pas ses paroles mais les cris qui lui répondent :

      « C’est le Nazaréen maudit, le fou, le possédé. Nous ne voulons pas de lui dans nos murs ! »

      Le marchand n’en écoute pas plus. Il fait faire demi-tour à son chameau, crie quelque chose à un homme qui le suivait de près, et aiguillonne l’animal qui, en quelques foulées, rejoint les apôtres.

      « Au nom de votre Dieu, lequel d’entre vous est Jésus le Nazaréen ? demande-t-il au dernier petit groupe de disciples, composé de Matthieu, Philippe, Simon le Zélote et Isaac.

      – Pourquoi veux-tu savoir cela ? Viens-tu l’importuner, toi aussi ? Ses compatriotes n’y suffisent-ils pas ? Toi aussi tu t’y mets ? dit Philippe, très irrité.

      – Je vaux mieux qu’eux, et je demande une grâce. Ne me repoussez pas. Je vous la demande au nom de votre Dieu. »

      Il y a dans la voix de l’homme quelque chose qui persuade les quatre disciples, et Simon répond :

      « C’est le premier de tous, à l’avant, avec les deux plus jeunes. »

      L’homme éperonne de nouveau sa monture car Jésus, qui était déjà en tête, a encore avancé durant ce bref dialogue, qu’il ignore.

      499.3 « Seigneur !… Ecoute un malheureux… » dit-il en le rejoignant.

      Etonnés, Jésus, Jean et Marziam se retournent.

      « Que veux-tu ?

      – Je suis de Pétra, Seigneur. Je transporte pour le compte d’autrui des marchandises venant de la mer Rouge, jusqu’à Damas. Je ne suis pas pauvre, mais c’est comme si je l’étais. J’ai deux enfants, Seigneur, et le mal les a pris aux yeux : ils sont aveugles, l’un tout à fait — le premier à avoir été pris par la maladie —, l’autre presque aveugle, et il le sera bientôt complètement. Les médecins ne font pas de miracles, mais toi, oui.

      – Comment le sais-tu ?

      – J’ai, parmi mes connaissances, un riche marchand qui te connaît. Il arrive qu’il fasse escale dans mon entrepôt, et je suis quelquefois à son service. A la vue de mes enfants, il m’a dit : “ Seul Jésus de Nazareth pourrait les guérir. Pars à sa recherche. ” Je l’aurais bien fait, mais j’ai peu de temps et je dois suivre les routes les plus indiquées.

      – Quand as-tu vu Alexandre ?

      – Entre vos deux fêtes de printemps [2]. Depuis lors, j’ai fait deux autres voyages, mais je ne suis jamais tombé sur toi. Seigneur, aie pitié !

      – Homme, je ne puis descendre à Pétra, et toi, tu ne peux pas quitter la caravane…

      – Si, c’est possible. Arisa est un homme de confiance. Je l’envoie en avant : il ira lentement. Moi, je vole à Pétra. J’ai un chameau plus rapide que le vent du désert et plus agile qu’une gazelle. Je prends les enfants et un autre serviteur fidèle. Je te rejoins, tu les guéris… Ah ! si la lumière éclairait les étoiles noires de leurs yeux, maintenant couverts d’un nuage épais ! Et je poursuivrai ma route tandis qu’eux retourneront chez leur mère. Je vois que tu continues, Seigneur. Où te diriges-tu ?

      – J’allais à Debon…

      – N’y va pas. Elle est pleine de… de ceux de Machéronte. Ce sont des endroits maudits, Seigneur. Ne te soustrais pas aux malheureux, Seigneur, pour être présent auprès des impies.

      – C’est bien ce que je disais » bougonne Barthélemy dans sa barbe.

      Plusieurs lui donnent raison. 499.4 Ils sont maintenant tous groupés autour de Jésus et de l’homme de Pétra. Les habitants d’Hesbon, au contraire, voyant que la caravane paraît bienveillante pour le Persécuté, rebroussent chemin. La caravane, à l’arrêt, attend l’issue et la décision.

      « Homme, si je ne vais pas vers les villes du midi, je retourne vers le septentrion. Et il n’est pas dit que je t’écoute.

      – Je sais que je suis abject pour vous, habitants d’Israël. Je suis incirconcis, je ne mérite pas que l’on m’écoute. Mais toi, tu es le Roi du monde, et nous sommes, nous aussi dans le monde …

      – Ce n’est pas cela. C’est… Comment peux-tu croire que je fasse, moi, ce que les médecins n’ont pu accomplir ?

      – Parce que tu es le Messie de Dieu et que ce sont des hommes. Tu es le Fils de Dieu. C’est Misace qui me l’a dit, et je le crois. Tu peux tout, même pour un pauvre homme comme moi. »

      La réponse est pleine d’assurance, et l’homme la complète en se laissant glisser à terre, sans même faire agenouiller le chameau, et en se prosternant de tout son long dans la poussière.

      « Ta foi est plus grande que celle de beaucoup. Va ! Tu sais où est le mont Nébo ?

      – Oui, Seigneur. C’est cette montagne. Nous aussi, nous con­naissons Moïse. Il est grand, trop grand pour que nous l’ignorions, mais toi, tu es plus grand encore. Il y a autant de différence entre Moïse et toi qu’entre un rocher et une montagne.

      – Va à Pétra. Moi, je t’attendrai sur le mont Nébo…

      – Il y a un village au pied pour les visiteurs [3]. On y trouve des auberges… J’y serai d’ici dix jours au plus. Je forcerai la bête, et si Celui qui t’envoie me protège, je ne rencontrerai pas de tempête.

      – Va ! Et reviens le plus tôt possible. Je dois aller ailleurs…

      – Seigneur ! Moi… je ne suis pas circoncis. Ma bénédiction est pour toi un opprobre. Mais celle d’un père n’est jamais un opprobre. Je te bénis, et je m’en vais. »

      Il prend un sifflet d’argent et siffle trois fois. L’homme qui est en tête de la caravane arrive au galop. Ils se parlent, se saluent. Puis l’homme retourne à la caravane qui se met en mouvement. L’autre remonte sur son chameau et part vers le sud, au galop. 499.5 Jésus et ses disciples se remettent en route.

      « Nous allons vraiment au mont Nébo ?

      – Oui, nous quitterons les villes pour les pentes des monts Abarim [4]. Il y aura beaucoup de bergers. Nous saurons par eux quelle est la route du mont Nébo et eux apprendront de nous le chemin qui mène à la montagne de Dieu. Puis nous nous arrêterons quelques jours, comme nous l’avons fait sur les monts d’Arbel et près du mont Carit.

      – Oh ! Comme ce sera beau ! Et nous deviendrons meilleurs. Nous sommes toujours descendus de ces sommets plus forts et meilleurs, dit Jean.

      – Et tu nous parleras de tout ce que le mont Nébo rappelle [5]. Mon Frère, te rappelles-tu, quand nous étions enfants, un jour où tu faisais Moïse bénissant Israël avant de mourir ? dit Jude.

      – Oui. Et ta Mère poussa un cri, en te voyant étendu, comme mort. Maintenant, nous y montons réellement, dit Jacques, fils d’Alphée.

      – Et tu béniras Israël. Tu es le vrai Chef du Peuple de Dieu ! s’écrie Nathanaël.

      – Mais tu n’y meurs pas. Tu ne meurs jamais, n’est-ce pas, Maître ? demande Judas avec un rire étrange.

      – Je mourrai et je ressusciterai comme il est dit. Beaucoup d’hommes mourront sans être morts, ce jour-là. Alors que les justes, même morts depuis des années, ressusciteront, des hommes vivant dans leur chair, mais à l’âme définitivement morte ce jour-là, ne ressusciteront pas. Attention à ne pas être de ceux-là.

      – Et toi, prends garde que l’on ne t’entende pas répéter que tu ressusciteras. Ils disent que c’est un blasphème, réplique Judas.

      – C’est pourtant vrai, et je l’affirme.

      – Quelle foi a cet homme ! Et ce Misace ! dit Simon le Zélote pour tenter de faire diversion.

      – Mais qui est Misace ? demandent ceux qui, l’année précédente, n’étaient pas du voyage en Transjordanie.

      Et ils s’éloignent en discourant de tout cela, tandis que Jésus reprend, avec Marziam et Jean, leur conversation interrompue précédemment.






[1] Au terme de leur exode sous la conduite de Moïse, les israélites demandent au roi Sihôn de traverser son territoire. Son refus entraîne une bataille sanglante au terme de laquelle "Israël habita dans toutes les villes des Amorrhéens, à Hechbôn et dans toutes ses Filles". (Nombres 21,21-35)

[2] Pâques (mars-avril) et Pentecôte (mai-juin)

[3] Medeba ou Madeba. Le Mont Nebo est situé sur le plateau de Madeba

[4] Chaîne de montagne dominant la Mer Morte à l'est et dont le Mont Nébo est au nord le dernier et le plus haut sommet.

[5] Le Mont Nébo est le lieu de la mort de Moïse qui verra ainsi la Terre Promise de loin, mais sans y entrer. Il avait en effet douté de la promesse de Dieu.(Deutéronome 32,49-50)




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-195.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/fuite-d-hesbon-et-rencontre-d-un-marchand-de-petra.html


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Dim 24 Jan - 19:38

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

500. Réflexions de Barthélemy et de Jean

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 196.
Nouvelle édition : Tome 7, chapitre 500.

Le 23 septembre 1946.

Dimanche 30 septembre 29
Au pied du Mont Nébo


       500.1 « Je regretterai toujours cette montagne et ce repos dans le Seigneur » dit Pierre, alors qu’ils s’apprêtent à descendre dans la vallée par une côte très sauvage.

      Ils se trouvent dans une chaîne de hautes montagnes. A l’est, au-delà de la vallée, on voit d’autres monts, et au sud aussi. Et ils sont encore plus élevés au nord. Au nord-ouest, la vue englobe la verte vallée du Jourdain qui débouche dans la mer Morte ; à l’ouest, on découvre d’abord la mer de couleur sombre, puis, au-delà, le désert aride et pierreux, interrompu seulement par la splendide oasis d’Engaddi, enfin les monts de Judée. C’est un panorama imposant, étendu, de quelque côté où l’œil se tourne. Et on oublie, dans une pareille vision de vie végétale, que l’on suppose ou que l’on sait habitée, la mélancolie du lac Asphaltite, sans voiles, sans vie, toujours morne même sous le soleil, triste même dans la basse péninsule qui s’avance du côté oriental presque jusqu’au milieu du lac. Mais quels sentiers pour descendre dans la vallée ! Seuls les animaux sauvages peuvent s’y trouver à l’aise. Si on ne pouvait s’agripper aux troncs et aux buissons, on ne pourrait descendre du sommet, ce qui fait bougonner Judas.

      « Et pourtant, je voudrais encore y retourner, réplique Pierre.

      – Tu as des goûts singuliers. Ici, c’est pire encore que les deux premiers endroits.

      – Mais pas pire que celui où notre Maître s’est préparé à la prédication, objecte Jean.

      – Oh ! pour toi, tout est toujours beau…

      – Oui, tout ce qui entoure mon Maître est beau et bon, et je l’aime.

      – Fais attention : dans ce “ tout ”, j’y suis moi aussi… et souvent il y a des pharisiens, des sadducéens, des scribes, des hérodiens… Tu les aimes eux aussi ?

      – Lui, il les aime.

      – Et toi, ha ! ha ! tu fais comme lui, hein ? Mais lui, c’est lui, et toi, c’est toi. Je ne sais si tu pourras toujours les aimer, toi qui pâlis quand tu entends parler de trahison et de mort, ou quand tu vois ceux qui le souhaitent.

      – C’est signe que je ne suis encore que très imparfait, si je me trouble par crainte pour lui et par indignation envers les coupables.

      – Ah ! tu te troubles aussi par indignation ? Je ne l’aurais pas cru… Alors si toi, par hasard, tu voyais un jour quelqu’un nuire réellement au Maître, que ferais-tu ?

      – Moi ? Tu me poses cette question ? La Loi dit : “ Œil pour œil, dent pour dent. ” [1] Mes mains deviendraient des tenailles autour de sa gorge.

      – Oh ! Oh ! Le Maître dit pourtant qu’il faut pardonner ! C’est tout le bien que t’a fait la méditation ?

      – Laisse-moi, tu me troubles ! Pourquoi me tenter et me troubler ? Qu’as-tu dans le cœur ? Je voudrais pouvoir y lire…

      500.2 – Celui qui scrute les eaux de la mer Salée n’en voit pas le fond et leur mystère. Ces eaux sont une plaque funéraire sur la pourriture qu’elles recouvrent » déclame derrière eux Barthélemy, qui était resté à l’arrière du groupe.

      Les autres, tant bien que mal, sont en tête et n’ont rien entendu. Mais Barthélemy, si. Il s’interpose donc dans la conversation des deux hommes et son regard est réprobateur.

      « Ah ! le sage Barthélemy ! Mais tu ne veux sûrement pas dire que je suis comme la mer Salée !

      – Ce n’est pas à toi que je parlais, mais à Jean. Viens avec moi, fils de Zébédée, moi je ne te troublerai pas. »

      Et il prend Jean par le bras comme pour s’appuyer, lui, l’ancien, sur son agile et jeune compagnon.

      Judas reste en arrière et fait derrière eux un méchant geste de colère. On dirait qu’il se jure à lui-même quelque chose, ou qu’il menace…

      « Que voulait dire Judas ? Et toi, que voulais-tu dire ? demande Jean au bon vieux Nathanaël [2].

      – N’y pense plus, mon ami. 500.3 Pensons, au contraire, à tout ce que nous a expliqué le Maître ces jours-ci. Comme on a compris Israël !

      – C’est vrai. Moi, je ne comprends pas que le monde ne le comprenne pas !

      – Nous non plus, Jean, nous n’y arrivons pas complètement. Nous ne voulons pas le comprendre. Tu vois quelle difficulté nous avons à accepter son idée messianique ?

      – Oui. Nous le croyons aveuglément dans tous les domaines, excepté celui-là. Toi qui es instruit, peux-tu m’en dire la raison ? Nous qui trouvons que, devant le Christ, les rabbis sont obtus, pourquoi, nous aussi, n’arrivons-nous pas à l’idée parfaite d’une royauté spirituelle du Messie ?

      – Je me le suis demandé bien des fois. Car je voudrais arriver à ce que tu appelles l’idée parfaite. Et je crois pouvoir me tranquilliser en me disant ceci : ce qui s’oppose à cette acceptation, en nous qui avons la volonté de le suivre, non seulement matériellement et doctrinalement, mais aussi spirituellement, ce sont tous les siècles qui sont derrière nous… et qui sont en nous, à l’intérieur de nous. Tu vois ? Regarde à l’orient, au midi et à l’occident. Chaque pierre porte un souvenir et un nom. Chaque fontaine, chaque sentier, chaque village ou citadelle, chaque ville, chaque fleuve, chaque montagne, que nous rappellent-ils ? Que nous crient-ils ? La promesse d’un Sauveur, les miséricordes de Dieu pour son peuple. Comme la goutte d’huile d’une outre percée, le petit groupe du début, le noyau du futur peuple d’Israël s’est répandu avec Abraham à travers le monde jusqu’à la lointaine Egypte ; puis, de plus en plus nombreux, il est revenu avec Moïse aux terres de son père Abraham, riche de promesses de plus en plus vastes et plus assurées, et de marques de la paternité de Dieu, devenant un vrai Peuple, car pourvu d’une Loi, la plus sainte des lois. Mais que s’est-il produit ensuite ? Ce qui est arrivé à cette cime qui, il y a un moment, brillait dans le soleil. Regarde-la maintenant. La voici enveloppée de nuages qui en modifient l’aspect. Si nous ne savions pas que c’est elle, et si nous devions la reconnaître pour nous diriger sur un chemin sûr, le pourrions-nous, changée comme elle l’est par d’épaisses couches de nuages qui ressemblent à des mamelons et des dômes ? C’est ce qui s’est passé en nous. Le Messie est ce que Dieu a dit à nos pères, aux patriarches et aux prophètes : immuable. Mais ce que nous y avons mis de nous, pour… l’expliquer, selon notre pauvre sagesse humaine, voilà ce qui nous a créé un Messie, une figure morale du Messie tellement fausse que nous ne reconnaissons plus le vrai Messie. Et nous, avec les siècles et les générations qui sont derrière nous, nous croyons au Messie que nous avons imaginé, au Vengeur, au Roi humain, très humain. Et nous n’arrivons pas, en dépit de ce que nous disons et croyons, à concevoir Celui qui est Messie et Roi tel qu’il est réellement, dans la Pensée et la Volonté de Dieu. C’est cela, mon ami !

      500.4 – Mais alors nous n’arriverons jamais, nous, au moins nous, à voir, à croire, à vouloir le vrai Messie ?

      – Si, nous y arriverons ! Si nous ne devions pas y parvenir, il ne nous aurait pas choisis. Et si l’humanité ne devait jamais arriver à bénéficier du Messie, le Très-Haut ne l’aurait pas envoyé.

      – Mais le Maître rachètera la Faute, même sans le concours de l’humanité ! Par son seul mérite.

      – Mon ami, ce serait une grande rédemption que celle du péché originel. Mais elle ne serait pas complète. Nous avons aussi en nous d’autres fautes individuelles, et celles-là, pour être lavées, ont besoin du Rédempteur et de la foi de celui qui recourt à lui comme à son salut. Je pense que la Rédemption agira jusqu’à la fin des siècles. Le Christ ne sera pas inactif un seul instant, à partir du moment où il sera Rédempteur et communiquera à l’humanité la Vie qui est en lui. Il sera comme une source qui s’offre à celui qui a soif, continuellement, jour après jour, une lune après l’autre, une année après l’autre, un siècle après l’autre. L’humanité aura toujours besoin de la Vie. Il ne peut cesser de la donner à ceux qui espèrent et croient en lui avec sagesse et justice.

      – Tu es instruit, Nathanaël. Moi, je suis un pauvre ignorant.

      – Tu fais, par instinct spirituel, ce que j’accomplis péniblement par la réflexion intellectuelle : notre transformation de juifs en chrétiens… Mais tu parviendras plus vite au terme, car tu sais mieux aimer que penser. C’est l’amour qui te transporte et te transforme.

      – Tu es bon, Nathanaël. Si nous étions tous comme toi ! »

      Jean pousse un profond soupir.

      « N’y pense pas, Jean ! Prions pour Judas, lui dit l’apôtre âgé qui a compris le soupir de Jean…

      500.5 – Tiens ! Vous êtes ici, vous aussi ! Nous vous regardions venir. De quoi discutiez-vous ainsi ? demande Thomas en souriant.

      – Nous parlions de l’ancien Israël. Où se trouve le Maître ?

      – Il est allé de l’avant, avec les frères et Isaac, voir un berger malade. Il nous a dit de passer par ce chemin jusqu’à celui qui monte au sommet.

      – Allons donc. »

      Ils descendent maintenant par un sentier moins casse-cou jusqu’à un vrai chemin muletier qui va au mont Nébo. Quelques maisons sont éparses dans la forêt. Plus bas, presque dans la vallée, un village proprement dit étale ses maisons blanches sur la pente, qui devient très douce. Du petit chemin où ils sont, ils voient les gens qui entrent dans le village.

      « C’est là que nous attendons l’homme de Pétra ? demande Pierre.

      – Oui, c’est le village. Espérons qu’il est arrivé, auquel cas nous reprendrons demain la route du Jourdain. Je ne sais pas. Je ne me sens pas du tout tranquille ici, dit Matthieu.

      – Le Maître avait dit d’aller beaucoup plus en avant, rappelle Judas.

      – Oui. Mais j’espère qu’on va le convaincre du contraire.

      – Mais de quoi as-tu peur ? D’Hérode ? De ses sbires ?

      – Des sbires, il n’y en a pas seulement près d’Hérode. Ah ! voilà le Maître ! Les bergers sont nombreux et heureux. Eux sont conquis. Ce sont des nomades. Ils vont aller répandre la bonne nouvelle que le Messie est arrivé sur terre » dit encore Matthieu.

      Jésus les rejoint avec toute une escorte de bergers et de troupeaux.

      « Allons. Nous avons à peine le temps d’arriver au village. Eux, ils vont nous héberger, ils sont connus. »

      Jésus est content d’être parmi des simples qui savent croire au Seigneur.





[1] Exode 21,24 – Lévitique 24,19-20 – Deutéronome 19,21
[2] C'est le plus âgé des apôtres.



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-196.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/reflexions-de-barthelemy-et-de-jean.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 25 Jan - 22:35

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

501. La parabole des fils plus ou moins éloignés de leur père

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 197.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 501.

Le 24 septembre 1946.

Lundi 1er octobre 29
Nébo


      501.1 C’est une belle matinée d’automne. Si l’on excepte les feuilles d’un jaune roux qui couvrent le sol et prouvent que nous sommes bien à cette saison, l’herbe est très verte, quelques fleurs sortent des buissons qui ont repris vie avec les pluies d’octobre, l’air qui circule à travers les branches déjà en partie dépouillées est vraiment serein, et tout cela fait penser à un début de printemps. En outre, les arbres à feuilles persistantes, qui se mêlent à ceux à feuilles caduques, apportent une note de gaieté : leurs nouvelles feuilles de couleur émeraude ont poussé au bout des rameaux, près des branches dénudées des autres arbres, et elles semblent ainsi bourgeonner. Les brebis sortent des enclos et se dirigent en bêlant vers les pâturages avec les agneaux des portées d’automne. L’eau d’une fontaine qui se trouve à l’entrée du village brille comme du diamant liquide sous le baiser du soleil et, en retombant dans un sombre bassin, elle produit un scintillement multicolore contre une maisonnette dont le temps a noirci les murs.

      Jésus est assis sur un muret dont un côté borde le chemin, et il attend. Ses disciples l’entourent ainsi que les habitants du village, tandis que les bergers, que leurs troupeaux obligent à ne pas trop s’écarter, se répandent sur les deux côtés de la route vers la plaine au lieu de monter plus haut.

      De la route qui grimpe de la vallée au mont Nébo, il ne vient personne pour le moment.

      « Est-ce qu’il va arriver ? demandent les apôtres.

      – Oui, et nous allons l’attendre. Je ne veux pas décevoir une espérance qui se forme et détruire une foi future, répond Jésus.

      – N’êtes-vous pas bien parmi nous ? Nous vous avons donné ce que nous avions de meilleur, dit un vieillard qui se chauffe au soleil.

      – Mieux qu’ailleurs, père. Et Dieu récompensera votre bonté, lui répond Jésus.

      – Alors, parle-nous encore. Il vient parfois ici des pharisiens zélés et des scribes orgueilleux. Mais ils n’ont rien à nous dire. C’est juste. Leur élévation les sépare de… tout [1], et ils sont les sages. Nous… Devrions-nous ne rien savoir, parce que le sort nous a fait naître ici ?

      – Dans la Maison de mon Père, il n’y a pas de séparations ni de différences pour ceux qui parviennent à croire en lui et à mettre en pratique sa Loi, qui est le code de sa volonté, pourvu que l’homme vive en juste pour obtenir une récompense éternelle dans son Royaume.

      501.2 Ecoutez : un père avait plusieurs fils. Certains avaient toujours vécu en contact étroit avec lui ; d’autres, pour diverses raisons, en avaient été relativement plus éloignés. Pourtant, connaissant malgré la distance les désirs de leur père, ils pouvaient agir comme s’il avait été proche. D’autres étaient encore plus loin, et, élevés depuis le premier jour de leur naissance au milieu de serviteurs qui parlaient d’autres langues et avaient des coutumes différentes, ils s’efforçaient de servir leur père d’après le peu que, par instinct plus que par connaissance, ils savaient devoir lui être agréable. Un jour, le chef de famille voulut rassembler toute sa descendance et la convia auprès de lui. Il n’ignorait pas comment, malgrés ses ordres, les serviteurs s’étaient abstenus de faire connaître ses pensées à ses enfants éloignés — car, dans leur orgueil, ils les considéraient comme inférieurs et non aimés, uniquement parce qu’ils n’habitaient pas avec leur père. Eh bien, croyez-vous que, arbitrant selon le droit humain, il a donné possession de ses biens à ceux-là seuls qui étaient toujours restés chez lui, ou qui étaient assez proches pour être au courant de ses ordres et de ses désirs ? Au contraire, il suivit une tout autre manière de juger. Observant les actes de ceux qui avaient été sages par amour de ce père qu’ils ne connaissaient que de nom et qu’ils avaient honoré par toutes leurs actions, il les appela auprès de lui pour leur dire : “ Vous avez le double mérite d’être justes, puisque vous l’avez été par votre seule volonté et sans être aidés. Venez m’entourer. Vous en avez bien le droit ! Les premiers m’ont toujours possédé et tous leurs actes étaient réglés par mes conseils et récompensés par mon sourire. Vous, vous avez dû agir uniquement par foi et par amour. Venez, car dans ma maison votre place est prête, et cela depuis longtemps ; à mes yeux, la différence ne tient pas au fait d’avoir toujours été à la maison ou au loin : ce qui fait la différence, ce sont les actions que mes fils ont accomplies, qu’ils soient proches ou non. ”

      Telle est la parabole, et voici son explication : les scribes ou les pharisiens, qui vivent autour du Temple, peuvent au Jour éternel ne pas se trouver dans la Maison de Dieu, et beaucoup de personnes, que la distance oblige à ne connaître que succinctement ce qui concerne Dieu, pourront être alors dans son Sein. Car ce qui permet d’obtenir le Royaume, c’est la volonté de l’homme tendue vers l’obéissance à Dieu, et non un amas de pratiques et de science.

      Faites donc ce que je vous ai expliqué hier. Qu’aucune crainte excessive ne vous paralyse. Faites-le sans escompter éviter ainsi le châtiment. Agissez seulement par amour pour Dieu, qui vous a créés pour vous aimer et être aimé de vous. Et vous obtiendrez une place dans la Maison paternelle.

      501.3 – Ah ! parle-nous encore !

      – Sur quoi donc dois-je vous enseigner ?

      – Tu disais hier qu’il y a des sacrifices plus agréables à Dieu que celui des agneaux et des béliers [2], et aussi que certaines lèpres sont plus honteuses que celles de la chair. Je n’ai pas bien compris ta pensée » dit un berger. Et il poursuit : « Avant qu’un agneau ait un an et qu’il soit le plus beau du troupeau, sans tache et sans défauts, sais-tu combien de sacrifices il faut faire, et combien de fois il faut vaincre la tentation d’en faire le mouton du troupeau ou de le vendre comme tel ? Or, si pendant un an, on résiste à toute tentation, si on le soigne et si on s’attache à lui, la perle du troupeau, sais-tu comme est grand le sacrifice de l’immoler sans profit et avec douleur ? Peut-il y avoir un sacrifice plus grand à offrir au Seigneur ?

      – Homme, je te dis en vérité que le sacrifice ne réside pas dans l’animal immolé, mais dans l’effort que tu as fait pour le garder pour l’immolation. En vérité, je vous déclare que le jour va venir où, conformément à la parole inspirée, Dieu dira : “ Je n’ai pas besoin du sacrifice des agneaux et des béliers ”, et il exigera un sacrifice unique et parfait. A partir de cette heure, tout sacrifice sera spirituel. Mais il est déjà annoncé depuis des siècles quel sacrifice préfère le Seigneur. David s’exclame en pleurant : “ Si tu avais désiré un sacrifice, je te l’aurais offert, mais tu ne veux pas d’holocauste. Le sacrifice à Dieu, c’est un esprit contrit (et j’ajoute : obéissant et affectueux, car on peut accomplir aussi un sacrifice de louange, de joie et d’amour et non seulement d’expiation). Le sacrifice à Dieu, c’est un esprit brisé ; d’un cœur brisé et broyé, mon Dieu, tu n’as point de mépris. ” [33] Non, votre Père ne méprise pas non plus le cœur qui a péché et s’est humilié. Alors comment accueillera-t-il le sacrifice d’un cœur pur, juste, qui l’aime ? C’est là celui qui lui est le plus agréable : le sacrifice quotidien de la volonté humaine à la volonté divine, qui se montre dans la Loi, les inspirations et dans les événements journaliers. De même, la lèpre de la chair n’est pas la plus honteuse, celle qui exclut de la vue des hommes et des lieux de prière, mais c’est la lèpre du péché. Il est vrai qu’elle passe bien souvent inaperçue des hommes. Mais vivez-vous pour les hommes ou pour le Seigneur ? Est-ce que tout se termine ici, ou bien continue dans l’autre vie ? Vous connaissez la réponse. Soyez donc saints pour n’être pas lépreux aux yeux de Dieu, qui voit le cœur des hommes, et gardez-vous purs spirituellement pour pouvoir vivre éternellement.

      – Et si quelqu’un a gravement péché ?

      – Qu’il n’imite pas Caïn, ni Adam et Eve, mais qu’il coure aux pieds de Dieu et qu’avec un vrai repentir il lui demande pardon. Un malade, un blessé, va voir le médecin pour guérir. Que le pécheur aille à Dieu pour obtenir sa miséricorde. Moi…

      501.4 – Toi ici, Maître ? » crie un homme qui monte par le chemin, tout enveloppé dans son manteau, et en compagnie de plusieurs autres.

      Jésus se retourne pour le regarder.

      « Tu ne me reconnais pas ? Je suis le rabbi Sadoq. Nous nous rencontrons de temps à autre.

      – Le monde est toujours petit quand Dieu veut que deux personnes se rencontrent. Nous nous retrouverons encore, rabbi. En attendant, que la paix soit avec toi. »

      L’autre ne lui rend pas son salut de paix, mais il demande :

      « Que fais-tu ici ?

      – J’ai fait ce que tu t’apprêtes à faire. Cette montagne n’est-elle pas sacrée pour toi ?

      – Si, et j’y viens avec mes disciples. Mais moi, je suis un scribe !

      – Et moi, un fils de la Loi. Je vénère donc Moïse tout comme toi.

      – C’est un mensonge. Tu remplaces sa parole par la tienne et tu demandes que l’on obéisse à toi, et non plus à nous.

      – Pas à vous, non. L’obéissance à votre égard n’est pas nécessaire…

      – Elle n’est pas nécessaire ? Quelle horreur !

      – Non, pas plus que ne le sont, pour te garder de l’air automnal, les zizits flottants et nombreux qui ornent ton habit. C’est ton vêtement qui te protège. Ainsi en est-il des nombreuses paroles que l’on enseigne : j’accepte celles qui sont nécessaires et saintes, celles de Moïse, et je ne m’occupe pas des autres.

      – Samaritain ! Tu ne crois pas aux prophètes !

      – Les prophètes, vous non plus ne les observez pas. Si c’était le cas, vous ne me traiteriez pas de Samaritain.

      – Mais laisse-le donc, Sadoq. Veux-tu parler avec un démon ? » lance un autre pèlerin qui arrive avec d’autres personnes.

      Puis, portant un regard dur sur le groupe qui entoure Jésus, il voit Judas et le salue ironiquement.

      501.5 Les villageois veulent défendre Jésus. Peut-être en effet arriverait-il quelque incident, mais voilà que l’homme de Pétra, suivi d’un serviteur, se fraie un chemin en criant. Tous les deux portent un enfant dans les bras.

      « Laissez-moi passer. Seigneur, je me suis trop fait attendre ?

      – Non, homme, viens auprès de moi. »

      Les gens s’écartent pour le laisser passer. Il s’approche de Jésus et s’agenouille pour mettre par terre une fillette dont la tête est bandée de lin. Son serviteur l’imite en déposant un petit garçon aux yeux éteints.

      « Ce sont mes enfants, Maître Seigneur ! » dit-il.

      Dans cette courte phrase, tremble toute la souffrance et l’espérance d’un père.

      « Tu as fais preuve d’une grande foi, homme. Et si je t’avais déçu ? Si tu ne m’avais pas trouvé ? Si je te disais que je ne puis les guérir ?

      – Je ne te croirais pas. Je ne croirais même pas à l’évidence de ne pas te voir. Je dirais que tu t’es caché pour éprouver ma foi et je te chercherais jusqu’à ce que je te trouve.

      – Et la caravane ? Et tes profits ?

      – Qu’est-ce en comparaison de toi, qui peux guérir mes enfants et me donner une foi pleine d’assurance en toi ?

      501.6 – Découvre le visage de la fillette, ordonne Jésus.

      – Je le garde couvert, car elle souffre beaucoup de la lumière.

      – Ce ne sera qu’un instant de souffrance » dit Jésus.

      Mais la petite fille se met à pleurer désespérément et refuse qu’on lui enlève la bande.

      « Elle croit que tu vas lui faire mal avec du feu, à l’instar des médecins, explique le père, qui se débat pour écarter de la bande les mains de l’enfant.

      – Oh ! Ne crains rien, fillette. Comment t’appelles-tu ? »

      La petite pleure sans mot dire. C’est son père qui répond pour elle :

      « Tamar, du lieu où elle est née. Et le garçon, Fara.

      – Ne pleure pas, Tamar. Tu ne vas pas souffrir. Sens mes mains : je n’ai rien dans les doigts. Viens sur mes genoux. En attendant, je vais guérir ton frère et il te dira ce qu’il a éprouvé. Viens ici, mon petit. »

      Le serviteur pousse près de ses genoux le pauvre petit aveugle, aux yeux éteints par le trachome [4]. Jésus lui fait une caresse sur la tête et lui demande :

      « Sais-tu qui je suis ?

      – Jésus le Nazaréen, le Rabbi d’Israël, le Fils de Dieu.

      – Veux-tu croire en moi ?

      – Oui. »

      Jésus lui met la main sur les yeux en lui couvrant plus de la moitié du visage. Il dit :

      « Je le veux ! Et que la lumière des pupilles ouvre la voie à la lumière de la foi. »

      Puis il retire sa main. L’enfant pousse un cri en portant ses menottes à ses yeux, et s’exclame :

      « Papa ! Je vois ! »

      Mais il ne court pas vers son père. Dans sa spontanéité enfantine, il s’attache au cou de Jésus, lui dépose un baiser sur les joues, et reste ainsi, attaché à son cou, avec sa petite tête qui se réfugie sur l’épaule de Jésus pour habituer ses pupilles au soleil.

      La foule crie au miracle tandis que le père essaie de détacher le petit garçon du cou de Jésus.

      « Laisse-le. Il ne m’ennuie pas. Seulement, Fara, dis à ta sœur ce que je t’ai fait.

      – Une caresse, Tamar. Comme la main de maman. Oh ! sois guérie toi aussi, et nous jouerons de nouveau ensemble ! »

      501.7 Avec encore un peu d’hésitation, la petite fille se fait mettre sur les genoux de Jésus, qui voudrait la guérir sans même toucher la bande. Mais les scribes et leurs compagnons se mettent à crier :

      « C’est truqué : l’enfant y voit ! C’est un coup monté pour abuser de la bonne foi des villageois !

      – Ma fille est malade. Moi…

      – Laisse tomber. Toi, maintenant, Tamar, sois gentille et laisse-moi t’enlever les bandes. »

      La fillette, convaincue, laisse faire. Quel spectacle, quand tombe la dernière bande ! Deux plaies rouges, croûteuses, enflées, occupent la place des yeux et il en coule des larmes et du pus. De la foule s’élève un murmure d’horreur et de pitié, tandis que l’enfant porte ses mains à son visage pour se protéger de la lumière, qui doit la faire souffrir horriblement ; sur les tempes rougissent de récentes brûlures.

      Jésus écarte ses menottes et effleure légèrement cette ruine en y appuyant la main et en disant :

      « Père, toi qui as créé la lumière pour la joie des vivants, et qui as donné des pupilles même aux moucherons, rends la lumière à cette créature qui t’appartient, afin qu’elle te voie et croie en toi, et que, de la lumière de la terre, elle entre par la foi dans celle de ton Royaume. »

      Il retire sa main…

      « Oh ! » s’écrie la foule.

      Il n’y a plus de plaies, mais la petite garde les yeux fermés.

      « Ouvre-les, Tamar. N’aie pas peur. La lumière ne te fera aucun mal. »

      La fillette obéit, avec quelque crainte et, en ouvrant ses paupières, elle découvre deux petits yeux noirs bien vifs.

      « Papa ! Je te vois ! »

      Et elle aussi s’abandonne sur l’épaule de Jésus pour s’habituer lentement à la lumière.

      La foule est en émoi, tandis que l’homme de Pétra se jette aux pieds de Jésus en sanglotant de joie.

      « Ta foi a obtenu sa récompense. Dorénavant, que ta reconnaissance porte ta foi en l’Homme à une plus haute sphère : à la foi dans le vrai Dieu. Lève-toi et partons. »

      Jésus pose par terre la fillette qui sourit de bonheur, et se sépare du garçon en se levant. Il les caresse encore et voudrait fendre le cercle des gens qui l’entourent pour voir les yeux guéris.

      501.8 « Tu devrais demander la guérison toi aussi pour tes yeux voilés » dit un disciple à un vieil homme que l’on conduit par la main, tant il a la vue brouillée.

      – Moi ?! Moi ?! Je ne veux pas voir la lumière par un démon. Au contraire, je crie vers toi, Dieu éternel ! Ecoute-moi. A moi ! A moi les ténèbres absolues ! Mais que je ne voie pas le visage du démon, de ce démon, de ce sacrilège, de cet usurpateur, de ce blasphémateur, de ce déicide ! Que tombent les ombres sur mes yeux pour toujours. Les ténèbres, les ténèbres pour ne pas le voir, jamais, jamais, jamais ! »

      C’est lui qui semble être un démon ! Dans son paroxysme, il se frappe les orbites comme s’il voulait faire éclater ses yeux.

      « Ne crains rien : tu ne me verras pas. Les Ténèbres ne veulent pas de la Lumière, et la Lumière ne s’impose pas à ceux qui la repoussent. Je pars, vieil homme. Tu ne me verras plus sur la terre. Mais tu me verras tout de même ailleurs. »

      Alors Jésus, avec cette langueur qui accentue la démarche particulière des gens de haute taille, légèrement penchée en avant, commence à descendre la route. Il est si abattu qu’il ressemble déjà au Condamné qui parcourt le mont Moriah chargé de la croix… Et les hurlements des ennemis, excités par le vieil homme en furie, rappellent beaucoup les cris de la foule de Jérusalem le vendredi saint.

      Désolé, l’homme de Pétra, portant dans ses bras sa fillette effrayée qui pleure, murmure :

      « C’est pour moi Seigneur ! A cause de moi ! Toi qui as montré tant d’amour pour moi ! Et moi pour toi ! J’ai placé dans la tente sur le chameau des cadeaux pour toi. Mais que sont-ils en comparaison des insultes que je t’ai attirées ? J’ai honte d’être venu à toi…

      – Non, homme. C’est mon pain amer de chaque jour, et tu es le miel qui l’adoucit. Il y a toujours plus de pain que de miel, mais il suffit d’une goutte de miel pour rendre doux beaucoup de pain.

      – Tu es bon… Mais dis-moi au moins ce que je dois faire pour soigner ces blessures.

      – Garde la foi en moi. Pour le moment, comme tu le peux et autant que tu le peux. Dans quelque temps… Oui, mes disciples viendront jusqu’à Pétra et au-delà. Alors suis leur enseignement, car c’est moi qui parlerai en eux. Et en attendant, parle aux habitants de Pétra de ce que j’ai fait pour toi. Ainsi, quand ceux qui m’entourent, et d’autres encore, viendront en mon nom, que mon nom ne leur soit pas inconnu. »

      501.9 Tout en-bas, sur la voie romaine, sont arrêtés trois chameaux, l’un avec une selle seulement, les autres avec un baldaquin. Un serviteur les surveille.

      L’homme se dirige vers une tente et y prend des paquets :

      « Voilà » dit-il, en les offrant à Jésus. « Ils te seront utiles. Ne me remercie pas : c’est moi qui dois te bénir pour ce que tu m’as donné. Si tu peux le faire pour des incirconcis, bénis-moi, avec mes enfants, Seigneur ! »

      Et il s’agenouille avec les enfants, suivi par les serviteurs. Jésus étend les mains et prie à voix basse, les yeux fixés vers le Ciel.

      « Va ! Sois juste et tu trouveras Dieu sur ton chemin, alors tu le suivras sans plus le perdre. Adieu, Tamar ! Adieu, Fara ! »

      Il les caresse avant qu’ils montent avec les serviteurs, un par chameau. Les bêtes se lèvent au crrr, crrr des chameliers et font demi-tour pour partir au trot sur le chemin qui va vers le sud. Deux petites mains brunes se penchent à travers les rideaux, et l’on entend deux voix d’enfant :

      « Adieu, Seigneur Jésus ! Adieu, père ! »

      Alors l’homme se penche jusqu’à terre et baise le vêtement de Jésus ; puis il monte en selle et part vers le nord.

      « Et maintenant, allons-y, dit Jésus en prenant à son tour la direction du nord.

      – Comment ? Tu ne vas plus là où tu voulais ? demandent les apôtres.

      – Non. Nous ne pouvons plus nous y rendre !… Les voix du monde avaient raison !… Et cela parce que le monde est rusé et connaît les œuvres du démon… Nous allons à Jéricho… »

      Comme Jésus est triste !… Tous le suivent, chargés des paquets donnés par l’homme, accablés et muets…





[1] Pharisiens veut dire "séparés" (Perouchim).
(Néhémie 10,28 ou 29 selon les versions).

[2] Isaïe 1,11.

[3] Psaume 51(50) 18-19 (le Miserere)

[4] Trachome : Conjonctivite transmise par une bactérie de petite taille. Elle dégénère en cécité par perforation cornéenne. Cette maladie se transmet par les mouches, les linges sales, les poussières et le sable transporté par le vent. Le trachome sévit surtout dans les pays au climat chaud et sec.




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-197.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/la-parabole-des-fils-plus-ou-moins-eloignes-de-leur-pere.html


Dernière édition par Anayel le Mer 27 Jan - 8:35, édité 1 fois
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 27 Jan - 8:34

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

502. Nouveau découragement de Pierre

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 198.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 502.

Le 25 septembre 1946.

Mardi 2 octobre 29
Vers Jéricho


      502.1 Le gué de Bethabara vient d’être franchi. Le fleuve bleu est bien haut, car il est nourri par des affluents remplis par les pluies de l’automne. Sur la rive orientale, on voit une foule de personnes qui gesticulent. Sur la rive occidentale, en revanche, là où se trouvent Jésus et ses disciples, il n’y a qu’un berger, avec son troupeau qui broute l’herbe verte au bord de l’eau.

      Pierre s’affale sur un reste de muret qui se trouve là, sans même essuyer ses jambes toutes mouillées par la traversée du gué. C’est qu’à cette saison, on utilise des barques, c’est vrai, mais pour ne pas les échouer sur les bas-fonds, on s’en sert dans la partie la plus profonde en s’arrêtant pour déposer les voyageurs là où la quille rencontre les herbes submergées. Ainsi, quand on débarque, il faut faire quelques pas dans l’eau.

      « Qu’est-ce que tu as ? Tu te sens mal ? lui demande-t-on.

      – Non, mais je n’en peux plus. Cette violence sur le mont Nébo, et avant à Hesbon, et avant à Jérusalem, et avant à Capharnaüm, et après le mont Nébo à Calliroé, et maintenant à Bethabara…. Oh !… »

      Il se prend la tête dans les mains et pleure…

      « Ne te décourage pas, Simon. Ne me rends pas aussi pauvre de ton courage, de votre courage ! lui dit Jésus en s’approchant de lui et en posant sa main sur le lourd vêtement gris qui couvre l’apôtre.

      – Je ne peux pas voir ça ! Je ne peux pas te voir ainsi maltraité ! Si tu me laissais réagir… peut-être que je le pourrais. Mais ainsi… devoir me contenir… et assister à leurs insultes, à tes souffrances, comme un enfant impuissant… Ah ! cela me mine intérieurement, et je deviens une loque… Regardez : est-il possible de le voir ainsi ! On dirait un malade, quelqu’un qui meurt de fièvres… Ou un coupable poursuivi, qui ne trouve pas de lieu où s’arrêter pour manger une bouchée de pain, boire une gorgée, chercher une pierre où poser sa tête ! Cette hyène du mont Nébo ! Ces serpents de Calliroé ! Ce forcené qui est encore là ! (il indique l’autre rive). L’homme de Calliroé est moins démoniaque, bien qu’il soit seulement le second dont tu dis qu’il est dominé par Belzébuth ! 502.2 Moi, j’ai peur des possédés, je pense que si Satan les a pris ainsi, ils doivent avoir été très mauvais. Mais… l’homme peut tomber sans avoir la volonté absolue de le faire. Au contraire, ceux qui sans être possédés agissent comme ils le font, avec toute leur liberté de raisonnement… Ah ! tu ne les vaincras jamais, puisque tu ne veux pas les châtier ! Ce sont eux… qui te vaincront… »

      Les larmes de l’apôtre fidèle, qui s’étaient un peu taries sous le feu de l’indignation, reprennent de plus belle…

      « Mon Pierre, tu crois qu’ils ne sont pas possédés ? Tu crois que, pour cela, il faut être comme l’homme de Calliroé et d’autres que nous avons rencontrés ? Tu crois que la possession se manifeste seulement par des cris désordonnés, des bonds, des accès de fureur, la manie de vivre dans des tanières, le mutisme, la paralysie des membres, l’engourdissement de la raison, de sorte que le possédé parle et agit inconsciemment ? Non. Il y a aussi des obsessions, ou plutôt des possessions, plus subtiles et plus puissantes ; ce sont les plus dangereuses, car elles ne gênent pas et n’affaiblissent pas la raison pour l’empêcher de bien agir, mais la développent. Mieux, elles l’augmentent pour qu’elle serve avec puissance celui qui la possède. Quand Dieu possède une intelligence et l’utilise à son service, il y transfuse une intelligence surnaturelle qui accroît de beaucoup l’intelligence naturelle de la personne. Croyez-vous par exemple qu’Isaïe, Ezéchiel, Daniel et les autres prophètes, s’ils avaient dû lire et expliquer ces prophéties comme écrites par d’autres, n’auraient pas trouvé les obscurités indéchiffrables qu’y voient leurs contemporains ? Et pourtant, je vous le dis, lorsqu’ils les recevaient, ils les comprenaient parfaitement. Regarde, Simon : prenons cette fleur poussée ici à tes pieds ; que vois-tu dans l’ombre qui entoure le calice ? Rien. Tu vois un calice profond et une petite bouche et rien de plus. Maintenant, regarde-la pendant que je la cueille et que je la porte ici, sous ce rayon de soleil. Que vois-tu ?

      – Je vois des pistils, du pollen, une petite couronne de duvets qui ressemblent à des cils autour des pistils ainsi qu’une minuscule bande toute ciliée qui orne le pétale large et les deux plus petits… Je vois encore une gouttelette de rosée au fond du calice… et… oh ! voilà ! Un moucheron est descendu à l’intérieur pour boire, et il s’est englué dans le duvet cilié et il n’arrive plus à se dégager… Mais alors ! Montre-moi mieux… Oh ! le duvet est comme couvert de miel, il colle… J’ai compris ! Dieu l’a fait ainsi soit pour que la plante se nourrisse, ou pour que les oiseaux y trouvent leur nourriture en venant becqueter les moucherons, ou encore pour que l’air en soit débarrassé… Quelle merveille !

      – Pourtant, tu n’aurais rien vu sans la puissante lumière du soleil.

      – Hé ! non !

      – Il en va de même de la possession divine. La créature qui, d’elle-même met toute sa bonne volonté à aimer totalement son Dieu, l’abandon à ses volontés, la pratique des vertus et la maîtrise de ses passions, se trouve absorbée en Dieu — dans la Lumière qui est Dieu, dans la Sagesse qui est Dieu — et elle voit et comprend tout. Une fois cette action absolue passée, la créature en vient à un état où ce qui a été reçu se transforme en règle de vie et de sanctification, mais ce qui l’instant d’avant semblait si clair redevient obscur, ou plutôt crépusculaire. Le démon, qui ne cesse de singer Dieu, produit chez les possédés de l’esprit, un effet analogue bien que limité puisque Dieu seul est infini. A ceux qu’il possède, parce qu’ils se sont spontanément donnés à lui pour triompher, il communique une intelligence supérieure, mais uniquement tournée vers le mal, pour nuire, pour offenser Dieu et l’homme. Ainsi l’action satanique, quand elle trouve dans l’âme des complicités, est continuelle et conduit par degrés à la science totale du Mal. Ce sont les pires possessions. Rien n’en apparaît à l’extérieur, de sorte qu’on ne fuit pas ces possédés. Mais elles existent. Comme je l’ai dit plusieurs fois, le Fils de l’homme sera frappé par des possédés de cette sorte.

      – Mais Dieu ne pourrait-il pas frapper l’enfer ? demande Philippe.

      – Il le pourrait. Il est le plus fort.

      – Dans ce cas, pourquoi ne le fait-il pas pour te défendre ?

      – Les raisons de Dieu seront connues au Ciel. Allons, et sortez de votre accablement. »

      502.3 Le berger, qui a écouté sans en avoir l’air, demande :

      « Tu sais où aller ? Tu es attendu ?

      – Non, homme. Je devrais me rendre au-delà de Jéricho, mais je n’y suis pas attendu.

      – Et tu es très fatigué, Rabbi ?

      – Fatigué, oui. Depuis le mont Nébo, personne ne nous a offert l’hospitalité et on ne nous a pas permis de faire halte.

      – Alors… Je voulais te dire… J’habite près de l’ancienne Bétagla… Mon père est aveugle et je ne peux trop m’éloigner pour ne pas le laisser seul pendant des lunes. Mais mon cœur en souffre, et le troupeau aussi. Si tu voulais… Je t’hébergerais. Ce n’est pas loin. Mon vieux père croit tellement en toi ! Joseph, fils de Joseph, ton disciple, le sait.

      – Allons-y. »

      L’homme ne se le fait pas dire deux fois. Il rassemble son troupeau et le dirige vers le village, qui doit être au nord-ouest. Jésus et ses disciples marchent derrière le troupeau.

      502.4 « Maître, dit Judas après un moment, Bétagla ne possède cer­­tainement pas quelqu’un qui puisse acheter les dons de cet homme… [1]

      – Quand nous irons à Jéricho chez Nikê, nous les vendrons.

      – C’est que… cet homme est pauvre et il faudra le dédommager. Je n’ai pas le moindre sou.

      – Nous avons des vivres en grande quantité, même pour quelque mendiant. Nous n’avons besoin de rien d’autre en ce moment.

      – Comme tu veux. Mais il aurait mieux valu que tu m’envoies en avant. J’aurais pu… [2]

      – Ce n’est pas nécessaire.

      – Maître, c’est de la défiance ! Pourquoi ne nous envoies-tu pas comme avant, deux par deux ?

      – Parce que je vous aime et que je pense à votre bien.

      – Ce n’est pas bien de nous garder ainsi inconnus. On va penser que nous sommes indignes, incapables… Autrefois, tu nous laissais partir, nous prêchions, nous faisions des miracles, nous étions connus…

      – Tu regrettes de ne plus le faire ? Tu aimais être loin de moi ? Tu es bien le seul à te plaindre de ne pas aller seul… Judas !…

      – Maître, tu sais que je t’aime ! dit Judas avec assurance.

      – Oui, je le sais. Et je te garde avec moi pour que ton esprit ne se corrompe pas… Tu es déjà celui qui recueille et distribue, qui vend ou échange pour les pauvres. C’est assez, c’est déjà trop. Observe tes compagnons : pas un seul ne demande ce que tu sollicites.

      – Mais, aux disciples, tu l’as accordé… cette différence est une injustice.

      – Judas, tu es le seul à me dire injuste… Mais je te pardonne. Va en avant, et envoie-moi André. »

      Jésus ralentit pour attendre André et lui parler à part. J’ignore ce qu’il lui dit. Je sais qu’André sourit de son doux sourire et s’incline pour baiser les mains du Maître, puis il retourne à l’avant.

      Jésus reste seul, derrière tout le groupe… La tête très penchée, il avance en essuyant son visage avec un coin de son manteau comme s’il transpirait. Mais ce sont des larmes et non des gouttes de sueur qui coulent sur ses joues décharnées et pâles.



[1]  L'homme de Pétra. Cf. EMV 501

[2] Judas cherche à aller vendre les bijoux chez  Diomède le marchand de Jéricho qu'il connaît bien (EMV 82) et ainsi en tirer une "commission" à l'insu de tous.



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-198.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/nouveau-decouragement-de-pierre.html
Anayel
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 2 Fév - 21:19

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

503. Savoir distinguer le surnaturel de l’occulte

Ancienne édition : Tome 7, chapitres 199 et 200.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 503.

Le 3 octobre 1944.

Mercredi 3 octobre 29
Bétagla, Jéricho


      503.1 Une nouvelle fois, Jésus parcourt inlassablement les routes de Palestine. Le fleuve à sa droite, il suit le sens de l’eau ; celle-ci est belle, bleue et scintillante là où elle reçoit la caresse du soleil, et bleu-vert près des rives, où l’ombre des arbres la teinte de vert foncé.

      Jésus marche au milieu de ses disciples. J’entends Barthélemy lui demander :

      « Alors, nous nous dirigeons vraiment vers Jéricho ? Tu ne crains pas quelque embûche ?

      – Absolument pas. Je suis arrivé à Jérusalem pour la Pâque par un autre chemin et eux, déçus, ne savent plus où me prendre sans trop attirer l’attention des foules. Crois-moi, Barthélemy, il y a moins de danger pour moi dans une ville très peuplée que sur des sentiers à l’écart. Le peuple est bon et sincère, mais aussi impétueux, et il se soulèverait si on m’arrêtait quand je suis au milieu de lui pour évangéliser et guérir. Les serpents agissent dans la solitude et dans l’ombre. Et puis… J’ai encore un certain temps devant moi pour œuvrer… Après… viendra l’heure du Démon et vous me perdrez. Pour me retrouver ensuite. Croyez-le bien. Et sachez le croire quand il vous semblera que les événements me contredisent plus que jamais. »

      Affligés, les apôtres soupirent en le regardant avec amour et douleur ; Jean gémit : « Non ! » et Pierre, de ses bras courts et robustes, l’entoure comme pour le défendre : « Mon Seigneur et Maître ! » Il ne dit rien de plus, mais ces mots contiennent tout.

      « C’est ainsi, mes amis. C’est pour cela que je suis venu. Soyez forts. Voyez : je marche avec assurance vers mon but, comme quelqu’un qui avance vers le soleil et sourit au rayon qui lui baise le front. Mon sacrifice sera un soleil pour le monde. La lumière de la grâce descendra dans les cœurs, la paix avec Dieu les rendra féconds, les mérites de mon martyre rendront les hommes capables de gagner le Ciel. Et qu’est-ce que je veux, sinon cela ? Mettre vos mains dans les mains de l’Eternel, mon Père et le vôtre, et dire : « Voilà, je te ramène ces enfants. Regarde, Père, ils sont purs. Ils peuvent revenir vers toi. » Vous voir serrés sur son sein et dire : « Aimez-vous enfin, puisque l’Un et les autres, vous en étiez impatients, et que vous souffriez de n’avoir pu vous aimer profondément. » Voilà ma joie, et chaque jour qui me rapproche de l’accomplissement de ce retour, de ce pardon, de cette union, augmente mon impatience de consommer l’holocauste pour vous donner Dieu et son Royaume. »

      En disant cela, Jésus est solennel, presque en extase. Il marche, bien droit dans son vêtement bleu et son manteau plus foncé, tête nue à cette heure encore fraîche du matin, et il paraît sourire à je ne sais quelle vision que ses yeux contemplent sur l’azur d’un ciel serein. Le soleil qui caresse sa joue gauche enflamme encore davantage son regard rayonnant et met des étincelles d’or dans sa chevelure, que soulèvent une légère brise et sa démarche vive. Il fait ressortir le rouge des lèvres qui s’ouvrent pour sourire et il semble éclairer son visage tout entier par une joie qui, en réalité, vient de l’intérieur de son Cœur adorable, enflammé de charité pour nous.

      503.2 « Maître, puis-je te dire un mot ? demande Thomas.

      – Quoi donc ?

      – Avant-hier, tu nous as annoncé que le Rédempteur — toi —, serait livré par un traître. Comment un homme pourra-t-il te trahir, toi, le Fils de Dieu ?

      – Un homme, en effet, ne pourrait trahir le Fils de Dieu — qui est Dieu comme le Père. Mais le traître ne sera pas un homme. Ce sera un démon dans un corps d’homme, le plus possédé, le plus obsédé des hommes. Marie de Magdala avait sept démons, et le possédé des jours derniers était dominé par Belzébuth. Mais il y aura en lui Belzébuth et toute sa cour démoniaque… Ah ! comme il est vrai que l’Enfer sera tout entier dans ce cœur pour lui donner l’audace de vendre le Fils de Dieu à ses ennemis, comme on vend un agneau au boucher ! »

      Judas intervient :

      « Maître, aujourd’hui, cet homme est-il déjà possédé par Satan ?

      – Non, Judas. Mais il a une inclination pour Satan : cela veut dire qu’il se met dans les conditions de tomber en lui. »

      André demande :

      « Et pourquoi ne vient-il pas à toi pour que tu le guérisses de son attrait ? Sait-il qu’il l’a ou bien l’ignore-t-il ?

      – S’il l’ignorait, il ne serait pas coupable comme il l’est, car il sait qu’il tend au mal, et qu’il ne persiste pas dans la résolution d’en sortir. S’il persistait, il viendrait à moi… mais il ne vient pas… Le poison pénètre, et le fait que je sois proche ne le purifie pas, car au lieu de désirer la guérison, il la fuit… C’est là l’erreur des hommes. Ils me fuient quand ils ont le plus besoin de moi. »

      A son tour, Matthieu demande :

      « Mais est-il venu vers toi quelquefois ? Le connais-tu, et nous, le connaissons-nous ?

      – Matthieu, je connais les hommes avant même qu’ils me connaissent. Tu le sais, et eux le savent. C’est moi qui vous ai appelés parce que je vous connaissais.

      – Mais nous, est-ce que nous le connaissons ? insiste Matthieu.

      – Pouvez-vous ne pas connaître ceux qui viennent vers votre Maître ? Vous êtes mes amis et vous partagez avec moi nourriture, repos et fatigues. Je vous ai ouvert jusqu’à ma maison, la maison de ma sainte Mère. Je vous amène à elle pour que ce qui se dégage d’elle vous rende capables de comprendre le Ciel, ses voix et ses commandements. Je vous amène à elle comme un médecin conduit ses malades, à peine sortis des séquelles d’une maladie, à des sources salutaires qui les fortifient en vainquant les restes de maladie qui pourraient redevenir nocifs. Vous n’ignorez donc aucun de ceux qui viennent à moi.

      – Dans quelle ville l’as-tu rencontré ?

      – Pierre, Pierre !

      – C’est vrai, Maître, je suis pire qu’une commère ! Pardonne-moi. Mais c’est l’amour, tu sais…

      – Je le sais, et je t’assure que ton défaut ne me rebute pas. Néanmoins, tu dois t’en défaire.

      – Oui, mon Seigneur. »

      503.3 Pris entre une rangée d’arbres et une rigole, le sentier se rétrécit et le groupe se défait. Jésus parle justement avec Judas, à qui il donne des ordres pour les dépenses et les aumônes. Les autres marchent derrière eux, deux par deux. Pierre est le dernier, tout seul. Il réfléchit. Il marche, la tête inclinée, tellement absorbé dans ses pensées qu’il ne s’aperçoit même pas qu’il reste à grande distance des autres.

      « Hé ! toi, l’homme ! l’interpelle un cavalier qui vient à passer. Es-tu avec le Nazaréen ?

      – Oui, pourquoi ?

      – Vous allez à Jéricho ?

      – Tu tiens à le savoir ? Moi, je n’en sais rien. Je marche à la suite du Maître et je ne demande rien. Où qu’il aille, c’est bien. Ce chemin est celui de Jéricho, mais nous pourrions aussi revenir dans la Décapole. Qui sait ! Si tu veux en apprendre davantage, le Maître est là-bas. »

      L’homme éperonne son cheval, et Pierre lui fait par derrière une curieuse grimace en bougonnant :

      « Je n’ai pas confiance, mon beau seigneur ! Vous n’êtes tous qu’une bande de chiens ! Moi, je ne veux pas être le traître. Je me le jure à moi-même : “ Cette bouche sera scellée. ” Voilà. »

      Et il fait un signe sur ses lèvres comme pour les cadenasser.

      Le cavalier a atteint Jésus et l’interpelle. Cela donne à Pierre la possibilité de rejoindre les autres. Quand l’homme repart, il salue de la main Judas. Personne ne le remarque, sauf Pierre qui arrive le dernier, et paraît ne pas applaudir à ce salut. Il saisit Judas par la manche et lui demande :

      « Qui est-ce ? Tu le connais ? Comment ça se fait ?

      – De vue. C’est un riche de Jérusalem.

      – Tu as des amitiés en haut lieu, toi ! Bien… pourvu que ce soit bien. Dis-moi un peu : c’est cette figure de renard qui te dit tant de choses ?…

      – Quelles choses ?

      – Mais celles que tu dis connaître sur le Maître !

      – Moi ?

      – Oui, toi. Tu ne te souviens pas de cette soirée d’eau et de boue, à l’époque de la crue ?

      – Ah ! Non ! Non ! Mais tu penses encore à des paroles lancées dans un moment de mauvaise humeur ?

      – Je pense à tout ce qui peut faire du mal à Jésus : calomnies, personnes, amis, ennemis… Et je suis toujours prêt à tenir les promesses que je fais à celui qui veut nuire à Jésus. Adieu. »

      Judas le regarde partir avec une attitude curieuse. Il y a de la stupeur, de la souffrance, du dépit, et je dirais même plus : de la haine.

      503.4 Pierre rejoint Jésus et l’appelle.

      « Oh ! Pierre ! Viens ! »

      Jésus pose la main sur l’épaule de Pierre.

      « Qui était ce Judéen hirsute ?

      – Hirsute, Pierre ? Il était tout pomponné et parfumé !

      – C’est sa conscience qui est hirsute. Méfie-toi, Jésus !

      – Je t’ai dit que mon heure n’était pas encore venue. Et quand elle arrivera, aucune méfiance ne me sauvera… si je voulais me sauver. Les pierres elles-mêmes crieraient et m’enchaîneraient si je voulais me sauver.

      – C’est possible… Mais méfie-toi… Maître ?

      – Pierre, qu’as-tu ?

      – Maître… j’ai une chose à te dire et un poids sur le cœur.

      – Une chose ? Un poids ?

      – Oui. Le poids est un péché ; la chose est un conseil.

      – Commence par le péché.

      – Maître… je… je hais… j’éprouve du dégoût, voilà, si je ne hais pas puisque tu ne veux pas que l’on haïsse, pour l’un de nous. Il me semble être près d’une tanière d’où provient une puanteur de serpents en chaleur… et je ne voudrais pas qu’ils en sortent pour te nuire. Cet homme est une tanière de serpents, et lui-même est en chaleur avec le démon.

      – D’où déduis-tu cela ?

      – Bah !… Je ne sais pas. Je suis rustre et ignorant, mais pas stupide. Je suis habitué à lire dans les vents et les nuages… et il m’arrive aussi de déchiffrer les cœurs. Jésus… j’ai peur.

      – Ne juge pas, Pierre. Pas de soupçons. Le soupçon crée des chimères : on voit des choses qui n’existent pas.

      – Que le Dieu éternel veuille qu’il n’y ait rien, mais moi, je n’en suis pas sûr.

      – De qui s’agit-il, Pierre ?

      – De Judas. Il se vante d’avoir des amitiés en haut lieu, et même, tout à l’heure, cet individu louche l’a salué comme on salue une connaissance. Auparavant, il ne les avait pas.

      – Judas est celui qui reçoit et distribue. Il a l’occasion de fréquenter les riches. Il sait y faire.

      – C’est ça ! Il sait y faire… Maître, dis-moi la vérité. Tu n’as aucun soupçon ?

      – Pierre, c’est en raison de ton cœur que tu m’es si cher. Mais je te veux parfait. N’est pas parfait celui qui n’obéit pas. Je te l’ai dit : ne juge pas et ne soupçonne pas.

      – Mais en attendant, tu ne me révèles pas…

      – Nous allons bientôt arriver près de Jéricho et nous nous y arrêterons pour attendre une femme qui ne peut nous recevoir sous son toit…

      – Pourquoi ? C’est une pécheresse ?

      – Non, une malheureuse. Ce cavalier qui t’a tant tracassé est venu me dire de l’attendre. Et je l’attendrai, bien que je sache ne pouvoir rien faire pour elle. Et sais-tu qui l’a mise sur mes traces ainsi que le cavalier ? Judas. Tu vois qu’il a une raison honnête de connaître ce Judéen. »

      Pierre baisse la tête en silence, confus, peut-être pas vraiment convaincu, et encore curieux. Mais il se tait.

      503.5 Jésus s’arrête en dehors des murs de la ville et, fatigué, il s’assied à l’ombre d’un bosquet. Celui-ci protège du soleil une fontaine auprès de laquelle se trouvent des animaux à l’abreuvoir. Les disciples s’asseyent eux aussi en attendant. Ce quartier de la ville doit être de peu d’importance car, hormis les chevaux et les ânes qui appartiennent certainement à des marchands en voyage, il n’y a guère de monde.

      Une femme s’avance, enveloppée dans un grand manteau foncé et le visage presque couvert ; un voile épais, foncé lui aussi, lui descend à la moitié du visage. Le cavalier de tout à l’heure, maintenant à pied, ainsi que trois autres hommes somptueusement vêtus l’accompagnent.

      « Nous te saluons, Maître.

      – Paix à vous.

      – Voici la femme. Ecoute-la et exauce son désir.

      – Si je le puis.

      – Tu peux tout.

      – Tu crois cela, toi qui es sadducéen ? »

      Le sadducéen [1], c’est celui qui était à cheval.

      « Je crois à ce que je vois.

      – Et tu as vu que je peux le faire ?

      – Oui.

      – Dans ce cas, en connais-tu la raison ? »

      Silence.

      « Puis-je savoir, moi, comment tu juges que je le peux ? »

      Silence.

      Jésus ne s’occupe plus de lui ni des autres. Il s’adresse à la femme :

      « Que veux-tu ?

      – Maître… Maître…

      – Parle sans crainte. »

      La femme jette un coup d’œil oblique à ceux qui l’accompagnent, ce qu’ils interprètent à leur manière.

      « Le mari de cette femme est malade, et elle te demande sa guérison. C’est une personne influente de la cour d’Hérode. Tu as intérêt à l’exaucer.

      – Ce n’est pas parce qu’elle est influente, mais parce qu’elle est malheureuse que je l’exaucerai, si je le peux. Je l’ai déjà dit. Qu’a donc ton mari ? Pourquoi n’est-il pas venu ? Et pourquoi ne veux-tu pas que j’aille le trouver ? »

      Autre silence, et autre regard oblique.

      « Veux-tu me parler sans témoin ? Viens. »

      503.6 Ils s’écartent de quelques pas.

      « Parle.

      – Maître… moi, je crois en toi. Je crois tellement que je suis certaine que tu sais tout de lui, de moi, de notre vie malheureuse… Mais lui ne croit pas… Il te déteste… Il…

      – Il ne peut pas guérir, car il n’a pas la foi : non seulement il n’a pas la foi en moi, mais pas même dans le vrai Dieu.

      – Ah ! Tu sais cela ? »

      La femme pleure désespérément.

      « Ma maison est un enfer ! Un enfer ! Tu délivres les possédés. Tu sais donc ce qu’est le démon. Mais ce démon subtil, intelligent, faux et instruit, le connais-tu ? Sais-tu à quelles perversions, à quels péchés il conduit ? Sais-tu quelles ruines il provoque autour de lui ? Ma maison, est-ce une maison ? Non. C’est le seuil de l’enfer. Mon mari, est-ce mon mari ? Maintenant, il est malade et ne s’occupe pas de moi. Mais quand il était encore fort et désireux d’amour, était-ce un homme qui m’embrassait, qui me tenait, qui me possédait ? Non ! J’étais dans les serres d’un démon, je sentais l’haleine et la viscosité d’un démon. Je l’ai tellement aimé, je l’aime ! Je suis sa femme et il m’a pris ma virginité quand j’étais à peine plus qu’une enfant : j’avais tout juste quatorze ans. Mais quand je me rappelais cette première heure, et qu’avec elle je repensais aux sensations intactes de la première étreinte qui m’a rendue femme, moi, avec d’abord ce qu’il y a de meilleur en moi, puis avec la chair et le sang, je reculais d’horreur quand je me rappelais qu’il est, lui, souillé par la nécromancie. Il me semblait que ce n’était pas mon mari qui était sur moi pour se rassasier de moi, mais les morts qu’il invoquait. Et même maintenant, de le voir mourant et encore plongé dans cette magie me donne du dégoût. Ce n’est pas lui que je vois… C’est Satan. Ah ! quelle douleur est la mienne ! Même dans la mort, je ne serai pas avec lui, car la Loi l’interdit. Sauve-le, Maître. Je te demande de le guérir pour lui donner le temps de se guérir. »

      La femme pleure avec angoisse.

      « Pauvre femme ! Il m’est impossible de le guérir.

      – Pourquoi, Seigneur ?

      – Parce qu’il le refuse.

      – Si, il a peur de la mort. Si, il le veut.

      – Il ne le veut pas. Ce n’est pas un fou, ce n’est pas un possédé qui ne connaît pas son état et qui ne demande pas d’être délivré parce qu’il ne peut penser librement. Ce n’est pas une personne dont la volonté est inhibée. Il veut être tel. Il sait que ce qu’il fait est défendu. Il sait qu’il est maudit par le Dieu d’Israël, mais il persiste. Même si je le guérissais, en commençant par son âme, il reviendrait à sa jouissance satanique. Sa volonté est corrompue. C’est un rebelle. Je ne puis. »

      503.7 La femme pleure plus fort. Ceux qui l’ont accompagnée s’en approchent.

      « Tu ne l’exauces pas, Maître ?

      – Cela m’est impossible.

      – Je vous l’avais bien dit, moi. Et la raison ?

      – C’est toi, sadducéen, qui le demandes ? Je te renvoie au livre des Rois. Lis ce que Samuel disait à Saül [2] et ce qu’Elie disait à Ochozias [3]. L’esprit du prophète reproche au roi de l’avoir dérangé en l’invoquant du royaume des morts. Il n’est pas permis de le faire. Lis le Lévitique, si tu ne te souviens plus de la parole de Dieu, Créateur et Seigneur de tout ce qui existe, gardien de la vie et de ceux qui sont morts. Morts et vivants sont dans les mains de Dieu [4] et il ne vous est pas permis de les arracher à elles, ni par quelque vaine curiosité, ni par violence sacrilège, ni par quelque maudite incrédulité. Que voulez-vous savoir ? S’il existe un avenir éternel ? Vous dites que vous croyez en Dieu. S’il y a un Dieu, il aura lui aussi une cour. Or que sera-t-elle, si elle n’est pas éternelle comme lui, composée d’esprits éternels ? Si vous prétendez que vous croyez en Dieu, pourquoi ne croyez-vous pas à sa parole ? Sa parole ne dit-elle pas : « Vous ne pratiquerez ni divination ni incantation » [5] ? Ou encore : « Si quelqu’un s’adresse aux mages et aux devins, et se souille avec eux, je retournerai contre lui ma face et l’exterminerai du milieu de son peuple. » [6] N’y est-il pas écrit : « Ne vous faites pas des dieux à votre convenance » ? Or qu’êtes-vous ? Des Samaritains et des hommes perdus, ou bien des fils d’Israël ? Et qu’êtes-vous : des sots, ou des êtres capables de raisonner ? Et si vous raisonnez pour nier l’immortalité de l’âme, pourquoi invoquer les morts ? Si ces parties incorporelles qui animent l’homme ne sont pas immortelles, que reste-t-il d’un homme après sa mort ? De la pourriture et des ossements, des ossements calcinés pleins de vermine. Et si vous ne croyez pas en Dieu, au point de recourir à des idoles et à des signes pour obtenir une guérison, de l’argent, des réponses, comme le fait celui dont vous demandez la santé, pourquoi vous fabriquez-vous des dieux à votre convenance et croyez-vous qu’ils peuvent vous dire des paroles plus vraies, plus saintes, plus divines que celles de Dieu ? Je vous fais donc la même réponse qu’Elie à Ochozias : « Pourquoi as-tu envoyé des messagers interroger Belzébuth, dieu d’Accaron, comme s’il n’y avait pas en Israël un Dieu que l’on puisse consulter ? A cause de cela, tu ne descendras pas du lit sur lequel tu es monté et tu mourras certainement dans ton péché.

      503.8 – C’est toujours toi qui nous insultes et nous attaques. Je te le fais remarquer. Nous venons te rencontrer pour…

      – Pour m’attirer dans un piège. Mais je lis dans votre cœur ! Bas les masques, hérodiens vendus à l’ennemi d’Israël ! Bas les masques, pharisiens faux et cruels ! Bas les masques, sadducéens, vrais Samaritains ! Bas les masques, scribes dont les paroles sont contraires aux faits ! Bas les masques, vous tous, vous violateurs de la Loi de Dieu, ennemis de la vérité, concubins du mal ! A bas les profanateurs de la Maison de Dieu que vous êtes ! Vous entraînez les consciences faibles ; vous n’êtes que des chacals qui flairez la victime dans le vent qui l’a effleurée, et vous suivez cette piste, vous guettez l’heure favorable pour tuer, vous vous pourléchez les babines sur lesquelles vous savourez d’avance le goût du sang, vous rêvez à cette heure ! Escrocs et fornicateurs que vous êtes, vous vendez pour bien moins qu’une poignée de lentilles votre droit d’aînesse parmi les peuples, et vous n’avez plus les bénédictions. Ce seront d’autres peuples qui se revêtiront de la toison de l’Agneau de Dieu et, comme de vrais Christs, ils apparaîtront aux yeux du Très-Haut. Quand celui-ci sentira le parfum de son Christ émaner d’eux, il dira :

      « Voici le parfum de mon Fils, semblable à l’odeur d’un champ fleuri béni par Dieu. Sur vous se déverse la rosée du Ciel : la grâce. En vous vient la fécondité de la terre : les fruits de mon sang. En vous se trouve l’abondance de froment et de vin : mon corps et mon sang, que je donnerai aux hommes pour qu’ils aient la vie et fassent mémoire de moi. Que les peuples vous servent, que les nations s’inclinent devant vous, car là où sera le signe de mon Agneau, là sera le Ciel. Et la terre est soumise au Ciel. Soyez les maîtres de vos frères, car les disciples de mon Christ seront les rois de l’esprit puisqu’ils auront la Lumière, et vers cette Lumière, les autres tourneront les yeux en espérant son aide. Que s’inclinent devant eux les enfants de votre mère : la terre. Oui, tous les enfants de la terre s’inclineront un jour devant mon Signe. Maudit soit celui qui vous maudit et béni soit celui qui vous bénit, car les malédictions et les bénédictions qui vous sont données s’élèvent vers moi, votre Père et votre Dieu. »

      Voilà ce qu’il dira, ô fornicateurs qui, pouvant avoir la vraie foi comme épouse aimée de vos âmes, forniquez avec Satan et ses fausses doctrines. C’est cela qu’il vous dira, ô assassins, assassins des consciences et des corps. Ici se trouvent vos victimes. Mais s’il y a deux cœurs assassinés, vous n’aurez un Corps que pour le temps de Jonas, après quoi lui, réuni à son immortelle Essence, vous jugera. »

      Jésus est terrible dans ce réquisitoire. Terrible ! A mon avis, c’est plus ou moins ainsi qu’il sera au Dernier Jour.

      503.9 « Et où sont ces assassinés ? Tu délires ! Tu es un concubin de Belzébuth. Tu forniques avec lui, et c’est en son nom que tu opères des miracles. Tu n’as pas de pouvoir dans notre cas, car c’est nous qui avons l’amitié de Dieu.

      – Satan ne se chasse pas lui-même. Moi, je chasse les démons. Alors au nom de qui est-ce que je le fais ? »

      Silence.

      « Répondez !

      – Inutile de s’occuper de cet obsédé ! Je vous l’avais bien dit. Vous ne m’avez pas cru. Entendez-le de lui. Réponds, fou de Nazaréen. Connais-tu le shemaflorasc ?

      – Je n’en ai nul besoin !

      – Vous entendez ça ? Encore une question : n’es-tu pas allé en Egypte ?

      – Si.

      – Vous voyez ? Qui est le nécromancien, le satan ? Horreur ! Viens, femme. Ton mari est saint en comparaison de lui. Viens !… Il faudra que tu te purifies. Tu as touché Satan !… »

      Et ils s’éloignent, avec de vifs gestes de répulsion, en traînant la femme en pleurs.

      Jésus, les bras croisés, les suit avec des éclairs dans ses yeux.

      503.10 « Maître… Maître… »

      Les apôtres sont terrorisés, à la fois par la violence de Jésus et par les paroles des juifs.

      Pierre se courbe presque pour demander :

      « Qu’ont-ils voulu dire par ces dernières questions ? Qu’est-ce que c’est ?

      – Quoi ? Le shemaflorasc ? » (en effet, de quoi peut-il bien s’agir ?)

      « Oui. C’est quoi ?

      – Ne t’en préoccupe pas. Ils confondent la Vérité avec le Mensonge, Dieu avec Satan, et dans leur orgueil satanique, ils s’imaginent que Dieu, pour se plier aux volontés des hommes, a besoin d’être conjuré par son tétragramme. Le Fils parle avec le Père un langage vrai, et c’est avec Lui, dans l’amour mutuel du Père et du Fils, que s’accomplissent les miracles.

      – Mais pourquoi t’a-t-il demandé si tu étais allé en Egypte ?

      – Parce que le Mal se sert des ruses les plus subtiles pour en faire un acte d’accusation contre celui qu’il veut frapper. Mon séjour d’enfance dans la terre d’Egypte sera l’un des chefs d’accusation à l’heure où ils se vengeront [7]. Vous et vos successeurs, sachez que, à l’égard de Satan si plein d’astuce et de ses serviteurs fidèles, il faut être deux fois plus rusé. C’est pour cela que je vous ai recommandé : « Soyez rusés comme des serpents et pas seulement simples comme des colombes » [8], pour ne pas laisser la plus petite arme aux mains des démons. Et cela ne sert pas non plus. Allons.

      – Où, Maître ? A Jéricho ?

      – Non. Nous allons prendre une barque et passer de nouveau dans la Décapole. Nous remonterons le Jourdain jusqu’à la hauteur d’Enon, puis nous débarquerons. Ensuite, sur la rive de Génésareth, nous prendrons une autre barque et nous passerons à Tibériade, et de là à Cana et à Nazareth. J’ai besoin de ma Mère, et vous aussi. Ce que le Christ ne fait pas par sa parole, Marie le fait par son silence. Ce que n’opère pas ma puissance, sa pureté l’opère. Oh ! ma Mère !

      – Tu pleures, Maître ? Tu pleures ? Oh ! non ! Nous te défendrons ! Nous t’aimons !

      – Je ne pleure pas, et je ne crains pas ceux qui me veulent du mal. Je suis accablé parce que les cœurs sont plus durs que du jaspe et je ne peux rien sur beaucoup d’entre eux. Venez, mes amis. »

      Ils descendent sur la rive et remontent le fleuve en barque. Tout finit ainsi.

Enseignement de Jésus


      503.11 Jésus dit :

      « Toi et celui qui te conduit spirituellement, méditez beaucoup sur ma réponse à Pierre.

      Le monde — et par monde, je n’entends pas seulement les laïcs — nie le surnaturel, mais ensuite, devant les manifestations de Dieu, il a vite fait de les expliquer, non par le surnaturel, mais par des forces cachées, occultes. Il confond deux sources différentes. Maintenant, écoutez-moi : est surnaturel ce qui vient de Dieu. Est occulte ce qui vient d’une puissance extra-terrestre, mais qui n’a pas sa racine en Dieu.

      En vérité, je vous dis que les esprits peuvent venir à vous. Mais comment ? De deux façons : sur l’ordre de Dieu ou par la violence de l’homme. Sur l’ordre de Dieu viennent les anges, et les bienheureux, et les âmes qui sont déjà dans la lumière de Dieu. Par la violence de l’homme peuvent venir des esprits sur lesquels un homme même a autorité, parce qu’ils sont plongés dans des régions plus basses que les régions humaines où il y a encore un souvenir de la grâce, même s’il n’y a plus une grâce active. Les premiers viennent spontanément, obéissant à un seul commandement : le mien. Et ils vous apportent la vérité que je veux que vous connaissiez. Les autres viennent par un ensemble de forces conjointes : les forces d’un homme idolâtre unies aux forces de Satan pris comme idole. Peuvent-elles vous donner la vérité ? Non. Jamais. Absolument jamais. Une formule, même si elle est enseignée par Satan, peut-elle soumettre Dieu aux volontés de l’homme ? Non. Dieu vient toujours de lui-même. Une prière peut vous unir à Dieu, pas une formule magique.

      Et si l’on objecte : « Samuel est apparu à Saül », je réponds : « Ce n’est pas grâce à la magicienne, mais par ma volonté, dans le but de secouer le roi, qui était rebelle à ma Loi. » Certains diront : « Et les prophètes ? » Les prophètes parlent parce qu’ils connaissent la vérité, infusée en eux directement ou par le ministère des anges. D’autres rétorqueront : « Et la main qui écrivait dans le festin du roi Balthasar ? » Qu’ils lisent la réponse de Daniel : « … même toi, tu t’es dressé contre le Maître du Ciel… en célébrant des dieux d’argent, de bronze, de fer, d’or, de bois, de pierre, qui ne voient, n’entendent ni ne connaissent, et tu n’as pas glorifié ce Dieu entre la main de qui se trouvent toute ta respiration et tout ton mouvement. C’est à cause de cela qu’il a envoyé le doigt (envoyé spontanément, alors que toi, roi aveugle et homme imbécile, tu ne pensais et ne t’occupais qu’à te remplir le ventre et à te gonfler l’esprit) le doigt de cette main qui a écrit ce qui se trouve là. »

      Oui, parfois Dieu vous rappelle par des manifestations que vous appelez “ médiumniques ”, qui révèlent en réalité la pitié d’un Amour qui veut vous sauver. Mais vous, vous ne devez pas vouloir les susciter. Celles que vous suscitez ne sont jamais sincères, ne sont jamais utiles, elles n’amènent jamais le bien. Ne vous rendez pas esclaves de ce qui vous détruit. Ne vous dites pas et ne vous croyez pas plus intelligents que les humbles, qui se soumettent à la vérité déposée depuis des siècles dans mon Eglise, seulement parce que vous êtes des orgueilleux qui cherchez dans la désobéissance des permissions pour vos instincts illicites. Rentrez et demeurez dans la discipline, plusieurs fois séculaire. De Moïse au Christ, du Christ à vous, de vous au dernier jour, il n’y a que celle-là, et pas d’autre.

      Votre science est-elle vraiment de la science? Non. La science est en moi et dans ma doctrine, et la sagesse de l’homme consiste à m’obéir. Curiosité sans danger ? Non : contagion dont vous subissez ensuite les conséquences. Chassez Satan, si vous voulez avoir le Christ. Je suis le Bon, mais je ne viens pas vivre avec l’esprit du Mal. C’est lui ou moi : choisissez.

      503.12 O mon “ porte-parole ”, rapporte cela à ceux à qui il faut le dire. C’est la dernière parole qui ira vers eux. Ton directeur de conscience et toi, soyez prudents. Les preuves deviennent des contre-preuves aux mains de l’Ennemi et des ennemis de mes amis. Soyez vigilants ! Allez avec ma paix. »




[1] Les sadducéens ou sadocites forment le clan issu de Sadoc, grand prêtre de David. C'est d'eux que sortent traditionnellement les grands prêtres (Hanne, Caïphe, …). Ils ne croient pas à la résurrection des morts.

[2] 1Samuel 28,11 et suivants. Saül demande à une nécromancienne d'Endor de faire apparaître le prophète Samuel.

[3] Le roi Ochozias, blessé, envoie consulter Belzébuth à Acron (Ekron). Élie avertit, arrête les messagers et prédit que la blessure sera mortelle (2Rois 1,2-17)

[4] ???

[5] Deutéronome 18,10-11

[6] Lévitique 20,6

[7] Cf. la comparution de Jésus devant Caïphe : 9.22, page 216

[8] Cf. 6.151



Observation




Le schemhamphoras

Au retour d'un pèlerinage au mont Nébo, Jésus passe par Jéricho. Il est alors pris violemment à partie par quelques sadducéens qui l'interrogent avec hargne : « Réponds, fou de Nazaréen. Connais-tu le shemaflorasc ? » (EMV 503.9). Tout comme Simon Pierre, nous nous posons la question : Qu'est-ce que ce shemaflorasc (1)? Voici un mot qui n'apparaît dans aucun dictionnaire, et qui semble inconnu aujourd'hui... A peine peut-on, d'après le contexte, supposer qu'il se rapporte à quelque incantation magique. S'agit-il d'une formule d'exorcisme, ou d'un terme secret de magie kabbalistique ? Heureusement dans un ouvrage rare et ancien, l'abbé Bullet (2) nous apporte un début d'explication. Il y a tout lieu de lire ici l'expression hébraïque Schem hamphoras (ou « Shemhamephoras ; Shem ha-Meforash »), c'est-à-dire le nom ineffable de Dieu que M. Valtorta a rapporté avec une orthographe phonétique approximative. Un autre auteur (3) explique, au début du 19e siècle, à l'usage des francs-maçons du rite écossais, que Schem Hammephoras signifie Nomen explicatum, expansum, pronuntiatum : « le nom bien prononcé, bien expliqué ». C'est ce nom que le grand-prêtre prononçait une fois par an dans le temple, le 10 thisri, nom grâce auquel il prétendait pouvoir interroger Dieu. Quiconque de non autorisé l'aurait alors entendu, aurait encouru immédiatement la peine de mort. Le grand prêtre ne pouvait le transmettre à ses disciples, oralement, qu’une seule fois tous les sept ans. Les kabbalistes affirmaient que le nom de Dieu se décompose en 72 syllabes et 216 lettres, et c'est ce qu’ils appellent Schem hamphoras. (Ce nom serait bâti à partir des versets de 72 lettres du texte hébraïque originel du livre de l'Exode 14, 19-21). Ce nom fut remplacé ensuite par le Tétragramme, le nom de 4 lettres : Yod, He, Vau, He. (Yahvé).


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Schemhamphoras



C'est aussi sous le titre Vom Schem Hamephoras qu'en 1546 Martin Luther fit paraître un violent pamphlet anti judaïque. Et de nos jours le schemhamphoras est devenu un article de magie, vendu comme talisman dans les boutiques de magie et d'ésotérisme. Dans son ouvrage, l'abbé Bullet cite quelques textes juifs forts rares qui affirment justement que Jésus faisait des prodiges « parce qu'Il avait découvert le nom secret de Dieu ». La question posée par les docteurs de la loi, et la réponse de Jésus à Pierre : « Ils confondent la Vérité avec le Mensonge, Dieu avec Satan, et dans leur orgueil satanique ils pensent que Dieu pour se plier aux volontés des hommes a besoin d'être conjuré par son tétragramme » (EMV 503.10) prennent alors tout leur sens.

(1) Dans l’original italien, « sciemanflorasc »
(2) Abbé Bullet, Histoire de l'établissement du Christianisme 1764, réédition de 1825, p 140 et suivantes.
(3) F.-H. Stanislas de l'Aulnaye, Thuileur des trente-trois degrés de l'écossisme de rit ancien dit accepté 1813 page 92.
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-199.htm
http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-200.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/savoir-distinguer-le-surnaturel-de-l-occulte.html


Dernière édition par Anayel le Mer 3 Fév - 21:45, édité 1 fois
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 3 Fév - 21:43

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

504. Marziam préparé à la séparation

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 201.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 504.

Le 26 septembre 1946.

Jeudi 4 octobre 29
Béthabara


      504.1 « Levez-vous, et partons. Retournons au fleuve et cherchons une barque. Toi, Pierre, vas-y avec Jacques. Il faut qu’elle nous emmène aux alentours de Bethabara. Nous resterons un jour chez Salomon, puis…

      – Mais… on n’allait pas à Nazareth ?

      – Non. J’ai pris cette décision pendant la nuit. Je suis désolé pour vous, mais je dois revenir en arrière.

      – Je suis content ! » s’écrie Marziam. « Je vais pouvoir rester encore avec toi !

      – Oui, bien que, mon pauvre enfant, tu vives à mes côtés de bien tristes jours !

      – C’est justement pour ça que j’aime rester en ta compagnie : pour te donner de l’amour. Je ne veux que cela. Je ne demande rien de plus. »

      Jésus lui dépose un baiser sur le front.

      « Et nous repassons par Bethabara ? demande Matthieu.

      – Non. Nous traversons le fleuve dans la barque de quelque pêcheur. »

      504.2 Pierre revient avec Jacques :

      « Pas de barque avant ce soir, Maître… Et… dois-je le dire ?

      – Oui.

      – Des hommes sont passés par ici… Ils doivent avoir payé grassement ou fait de fortes menaces… Je ne crois pas que ce soir non plus tu trouves une barque… Ils sont impitoyables… »

      Pierre soupire.

      « Peu importe. Mettons-nous en route… et le Seigneur nous aidera. »

      La saison est mauvaise, tout n’est que pluie et gadoue. La route est boueuse près de la berge, à la pluie s’ajoute la rosée de la nuit, abondante tout au long du fleuve. Malgré tout, ils avancent sur l’étroite levée de terre qui borde la route, moins bourbeuse et moins exposée aux gouttes de la pluie, fine mais continue, grâce à une rangée de peupliers qui les abritent quelque peu… quand un coup de vent ne précipite pas d’un coup toutes les gouttes d’eau retenues par les branches.

      « C’est un temps de saison ! observe philosophiquement Thomas en relevant son vêtement.

      – Hé oui ! approuve Barthélemy en soupirant.

      – Nous nous sécherons quelque part. Ils ne seront pas tous… excités contre nous, dit Pierre.

      – Nous pourrons toujours trouver une barque… Mais ce n’est pas sûr ! ajoute Jacques, fils d’Alphée.

      – Si nous avions de l’argent, nous trouverions tout. Mais il n’a pas voulu que j’aille vendre à Jéricho ! lance Judas.

      – Tais-toi, je t’en prie. Le Maître est si affligé ! Tais-toi ! supplie Jean.

      – Je me tais. Mieux, je ne peux que me réjouir de son ordre. Ainsi, on ne pourra pas dire que c’est moi qui ai envoyé ces sadducéens des alentours de Jéricho. »

      Il regarde Pierre, mais Pierre, plongé dans ses pensées, ne voit rien et ne répond pas.

      Inlassablement, ils marchent sous une bruine fine comme le brouillard dans la journée grisâtre. De temps en temps, ils échangent quelques mots, mais ils donnent surtout l’impression de se parler à eux-mêmes : leurs paroles semblent conclure un dialogue avec quelque interlocuteur invisible.

      « Nous devrons bien finir par nous arrêter quelque part.

      – C’est partout la même chose, car eux, ils viennent partout.

      – Persécution pour persécution, il vaut mieux s’arrêter dans une ville. Au moins, nous n’y serons pas trempés.

      – Mais à quoi veulent-ils donc en venir ?

      – Pauvre Marie ! Si elle savait !

      – Dieu très-haut, protège tes serviteurs ! »… et ainsi de suite…

      Puis ils se rassemblent et discutent à voix basse.

      Jésus est en avant, seul… Seul ! Jusqu’au moment où Marziam et Simon le Zélote le rejoignent.

      « Les autres sont descendus sur la grève pour voir s’il y a une barque… On ferait plus vite. Tu nous permets de venir avec toi ?

      – Venez. De quoi parliez-vous à l’instant ?

      – De ta souffrance.

      – Et de la haine des hommes. Que pouvons-nous faire pour te soulager et pour juguler la haine ? demande Simon le Zélote.

      – Pour alléger ma douleur, il y a votre amour… Quant à la haine… nous ne pouvons que la supporter… Elle cesse avec la vie de la terre… et cette pensée donne de la patience et du courage

      pour nous y aider. 504.3 Margziam, mon enfant ! Pourquoi es-tu troublé ?

      – Parce que cela me rappelle Doras…

      – Tu as raison. Il est temps que je te renvoie à la maison…

      – Non ! Jésus ! Non ! Pourquoi veux-tu me punir d’un mal que je n’ai pas fait ?

      – Mon intention n’est pas de te punir, mais de te préserver… Je ne veux pas que tu te rappelles Doras. Qu’est-ce que ce souvenir suscite en toi intérieurement ? Réponds… »

      Marziam pleure, la tête penchée, puis il la relève et dit :

      « Tu as raison. Mon esprit n’est pas encore capable de voir et de pardonner. Mais pourquoi m’éloignes-tu ? Si tu souffres, je dois à plus forte raison rester à tes côtés. Et pourtant c’est toi qui m’as toujours consolé ! Je ne suis plus cet enfant naïf qui te disait l’an dernier : “ Ne me fais pas voir ta douleur. ” Je suis vraiment un homme, maintenant. Permets-moi de rester, Seigneur ! Ah ! dis-le-lui, toi, Simon !

      – Le Maître sait ce qui est bon pour nous. Et peut-être… peut-être veut-il te confier quelque charge… Je ne sais pas… Je dis ma pensée…

      – Tu as raison. Je l’aurais bien gardé, et avec joie, jusqu’aux encénies. Mais… ma Mère est seule là-bas. La rumeur de la haine est si forte ! Elle pourrait craindre plus qu’il ne faut. Ma Mère est seule, et elle pleure certainement. Tu iras chez elle lui dire que je la salue et que je l’attends désormais, après les encénies. Et tu ne lui révéleras rien d’autre, Marziam.

      – Mais si elle m’interroge ?

      – Oh ! tu peux ne pas mentir en racontant… que la vie de son Jésus est comme ce ciel d’Etanim [1] : nuages et pluie, parfois la bourrasque, mais il ne manque pas de jours de soleil. Comme hier, comme peut-être demain. Se taire n’est pas mentir. Tu lui raconteras les miracles que tu as vus. Tu lui apprendras qu’Elise est avec moi, qu’Ananias m’a accueilli comme un père, qu’à Nobé je suis

      dans la maison d’un bon juif. Garde le silence sur le reste. 504.4Ensuite, tu iras chez Porphyrée et tu y resteras jusqu’à ce que je t’appelle. »

      Marziam redouble de larmes.

      « Pourquoi pleures-tu ainsi ? N’es-tu pas content d’aller chez Marie ? Hier, tu l’étais… dit Simon.

      – Hier, oui, car tous y allaient. Je pleure aussi parce que je redoute de ne plus te voir… Oh ! Seigneur ! Seigneur ! Jamais plus il n’y aura de moments heureux comme l’étaient ces derniers jours!

      – Nous nous reverrons, Marziam. Je te le promets.

      – Quand ? Pas avant la Pâque. C’est long ! »

      Jésus se tait.

      « Vraiment, tu ne veux pas de moi avant la Pâque ? »

      Jésus passe un bras autour de ses épaules encore chétives et l’attire à lui.

      « Pourquoi vouloir connaître l’avenir ? Nous existons aujourd’hui. Demain, nous n’existons plus. Même le plus riche et le plus puissant des hommes ne peut ajouter un jour à sa vie. Elle est, comme tout l’avenir, dans les mains de Dieu…

      – Mais pour Pâque je dois venir au Temple. Je suis juif. Tu ne peux pas me faire pécher !

      – Tu ne pécheras pas, et le premier péché que tu dois me promettre de ne jamais faire, c’est la désobéissance. Tu obéiras, toujours. A moi maintenant, à celui qui te parlera en mon nom, ensuite. Me le promets-tu ? Souviens-toi que moi, ton Maître et ton Dieu, j’ai obéi à mon Père et que je le ferai jusqu’à la… fin de mes journées. »

      Jésus s’exprime de façon solennelle. Marziam, comme fasciné, dit :

      « J’obéirai. Je le jure devant toi et le Dieu éternel. »

      Un silence. Puis Simon le Zélote demande :

      « Est-ce qu’il part seul ?

      – Non, bien sûr : avec des disciples. Nous en trouverons d’autres en plus d’Isaac.

      – Tu envoies aussi Isaac en Galilée ?

      – Oui, il reviendra avec ma Mère. »

      504.5 On les hèle du fleuve. Les trois hommes traversent la route et se dirigent vers l’eau.

      « Regarde, Maître, nous avons trouvé et ils ne demandent rien. Ce sont des parents d’un miraculé. Mais ils portent du sable à ce village. Il faut aller jusque-là à pied, puis ils nous prendront. »

      – Que Dieu les en récompense. Nous serons ce soir chez Ananias. »

      Pierre, tout content, remonte vers la route et voit le visage troublé de Marziam.

      « Qu’est-ce que tu as ? Qu’a-t-il fait ?

      – Rien de mal, Simon. Je lui ai dit que, arrivé au premier endroit où je trouverai des disciples, je le renverrai à la maison ; cela l’attriste.

      – A la maison… Oui !… Mais c’est juste… La saison… »

      Pierre réfléchit. Puis il regarde Jésus et le tire par la manche pour qu’il se baisse jusqu’à sa bouche. Pierre lui parle à l’oreille :

      « Maître, mais pourquoi l’envoies-tu sans attendre…

      – A cause de la saison, tu l’as dit.

      – Et puis ?

      – Simon, je ne veux pas te mentir : l’autre motif est qu’il vaut mieux que Marziam ne s’empoisonne pas le cœur…

      – Tu as raison, Maître. S’empoisonner le cœur… Voilà ! C’est exactement ce qui finit par arriver. »

      Il hausse la voix :

      « Le Maître a vraiment raison. Tu iras là-bas et… nous nous verrons à la Pâque. Enfin… ça viendra vite… Une fois Casleu passé… Ah ! dans peu de temps, ce sera le beau mois de Nisan. Oui, certainement ! Il a raison… »

      La voix de Pierre se fait moins assurée. Il répète lentement et avec tristesse :

      « Il a raison… » et en se parlant à lui-même : « Que sera-t-il arrivé d’ici Nisan ? »

      Il se frappe le front de la main, l’air désolé.

      504.6 Ils avancent par un temps humide. Il cesse de pleuvoir jusqu’au moment où, avec de la boue jusqu’aux genoux, ils montent dans cinq petites barques mouillées et sableuses qui redescendent en suivant le courant. Alors la pluie reprend et, en frappant l’eau calme du fleuve qui reflète les nuages grisâtres, elle y dessine des cercles qui se font et se défont continuellement en un jeu de facettes nacrées.

      Le paysage ressemble à un désert. Sur les berges, dans les minuscules bourgades, on ne voit pas âme qui vive. La pluie ferme les habitations et vide les routes. Aussi, quand au début du crépuscule ils débarquent à l’endroit où se trouve le petit village de Salomon, ils trouvent la rue silencieuse et déserte et arrivent à la maison sans être vus de personne.

      Ils frappent, ils appellent : rien. On n’entend que le roucoulement des colombes, le bêlement des brebis et le bruit de la pluie.

      « Il n’y a personne. Que faisons-nous ?

      – Allez aux maisons du village. D’abord à celle du petit Mickaël » ordonne Jésus.

      Et pendant que les apôtres les plus jeunes s’y rendent rapidement, Jésus reste près de la maison avec les plus âgés ; ils observent et commentent :

      « Tout est fermé… La grille elle-même est bien attachée, barricadée. Regarde ! Il y a jusqu’à un gros clou et les fenêtres sont closes comme pour la nuit. Quelle tristesse ! Et cette plainte des brebis et des colombes ? Il est peut-être malade ? Qu’en penses-tu, Maître ? »

      Jésus secoue la tête. Il est las et triste…

      504.7 Les apôtres reviennent en courant. André arrive le premier et, alors qu’il se trouve encore à quelques mètres, il crie :

      « Il est mort… Ananias est mort… On ne peut entrer dans la maison : elle n’est pas encore purifiée… Depuis quelques heures, il est au tombeau. Si nous avions pu venir hier… La femme, la mère de Mickaël, va venir.

      – Mais qu’est-ce qui nous poursuit ? ! éclate Barthélemy.

      – Pauvre vieux ! Il était si heureux ! Il se trouvait si bien ! Mais comment ? Quand est-il tombé malade ? »

      Ils parlent tous à la fois.

      La femme survient et, en se tenant à distance de tout le monde, elle dit :

      « Seigneur, la paix soit avec toi. Ma maison t’est ouverte. Mais… je ne sais pas si… J’ai préparé le mort. C’est pour cela que je reste loin. Je peux pourtant t’indiquer ceux qui vous accueilleront.

      – Oui, femme. Que Dieu te récompense, et avec toi ceux qui font preuve de pitié envers les voyageurs. Mais comment l’homme est-il mort ?

      – Je l’ignore. Il n’a pas été malade. Avant-hier, il allait bien. Oui, vraiment il allait bien. Mickaël était venu le matin même prendre les deux brebis et les mettre avec les nôtres. C’était convenu ainsi. Et à sexte, je lui avais apporté des vêtements que je lui avais lavés. Il était à table et il mangeait, en très bonne santé. Le soir encore, Mickaël avait ramené les brebis et lui avait puisé deux brocs d’eau, et il lui avait donné deux fouaces qu’il s’était faites. Hier matin, mon fils est venu pour les brebis. Tout était fermé comme maintenant, et personne n’a répondu aux cris de l’enfant. Il a poussé la grille, mais sans arriver à l’ouvrir. Elle était bien fermée. Alors Mickaël a eu très peur et il s’est hâté de venir me trouver. Mon mari et moi, nous sommes accourus avec d’autres. Nous avons ouvert la grille, frappé à la cuisine… puis nous avons forcé la porte… Il était encore assis près du foyer, la tête penchée sur la table, la lampe encore toute proche, mais éteinte comme lui, un coutelas à ses pieds, une écuelle en bois à moitié incisée… La mort l’a pris ainsi… Il souriait… Il était en paix… Ah ! quel visage de juste il avait ! Il paraissait même plus beau… Moi… Il y a peu de temps que je m’occupais de lui, mais je m’étais attachée… et je pleure…

      – Il est en paix. Tu l’as dit toi-même. Ne pleure pas ! Où l’avez-vous mis ?

      – Nous savions que tu l’aimais beaucoup, par conséquent nous l’avons mis dans le tombeau que Lévi s’est construit depuis peu. Le seul, car Lévi est riche. Nous, nous ne le sommes pas. C’est là, au fond, de l’autre côté de la route. Maintenant, si tu veux, nous allons tout purifier et…

      – Oui. Tu prendras les brebis et les colombes. Le reste, conserve-le pour mes disciples et moi, pour que je puisse y séjourner quelquefois. Que Dieu te bénisse, femme. 504.8 Allons au tombeau.

      – Tu veux le ressusciter ? s’étonne Thomas.

      – Non. Pour lui, ce ne serait pas une joie. Là où il est, il est plus heureux. Il le désirait, d’ailleurs… »

      Mais Jésus est vraiment accablé. Il semble que tout concoure à augmenter sa tristesse. Au seuil des habitations, des femmes regardent et saluent en commentant.

      Ils sont vite arrivés au tombeau, un petit cube récemment construit. Jésus prie tout près de lui. Puis il se retourne, les yeux humides, et dit :

      « Allons… dans les maisons du village. Dans notre maisonnette, il n’y a plus personne qui nous attende pour nous bénir… Mon Père ! La solitude enveloppe ton Fils, le vide se fait de plus en plus vaste et plus ténébreux. Ceux qui m’aiment s’en vont, et il reste ceux qui me haïssent… Mon Père ! Que ta volonté soit toujours faite et bénie !… »

      Ils retournent vers le village, et deux ici, trois là, ils entrent dans les maisons de ceux qui n’ont pas touché le mort pour y trouver un abri et se restaurer.


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[1] Nom donné au mois de Tisri avant l'exil. Ce mois, le premier de l'année, correspond à octobre. Compte-tenu du décalage du calendrier soli-lunaire, nous sommes au début du mois de Boul, bien qu'en octobre. Jésus est certainement préoccupé.



*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-201.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/marziam-prepare-a-la-separation.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 10 Fév - 21:17

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

505. La parabole du juge et de la veuve

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 202.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 505.

Vision du vendredi 27 septembre 1946

Mercredi 10 octobre 29
Jérusalem


      505.1 De nouveau, Jésus se trouve à Jérusalem, une Jérusalem hivernale, grise et venteuse. Marziam est encore avec Jésus ainsi qu’Isaac. Ils se dirigent, tout en parlant, vers le Temple.

      Avec les Douze se trouvent Joseph et Nicodème, qui discutent avec Simon le Zélote plus qu’avec les autres, et avec Thomas. Mais ensuite, ils se séparent et passent à l’avant pour saluer Jésus sans s’arrêter.

      « Ils ne veulent pas faire remarquer leur amitié avec le Maître. C’est dangereux ! siffle Judas à l’oreille d’André.

      – Je crois qu’ils agissent ainsi par une juste appréciation, pas par lâcheté, dit André pour les défendre.

      – Du reste, ils ne sont pas disciples et ils peuvent le faire. Ils ne l’ont jamais été, ajoute Simon le Zélote.

      – Non ? Il me semblait…

      – Lazare non plus n’est pas disciple, ni…

      – Mais si tu exclus tout le monde, qui reste-t-il ?

      – Qui ? Ceux qui ont la mission de disciples.

      – Et eux, alors, que sont-ils ?

      – Des amis, pas plus que des amis. Est-ce que, par hasard, ils quittent leurs maisons et leurs affaires pour suivre Jésus ?

      – Non. Mais ils l’écoutent avec plaisir, ils lui apportent leur aide et…

      – S’il ne s’agissait que de cela ! Même les païens le font, dans ce cas. Tu vois que, chez Nikê, nous en avons trouvé qui avaient pensé à lui. Et ces femmes ne sont certainement pas des disciples.

      – Ne t’énerve pas! Je disais cela seulement pour parler. Tiens-tu tellement à ce que tes amis ne soient pas disciples ? Tu devrais vouloir le contraire, me semble-t-il.

      – Je ne m’énerve pas, et je ne veux rien, pas même que tu leur fasses du mal en disant qu’ils sont ses disciples.

      – Mais à qui veux-tu que je le dise ? Je suis toujours avec vous… »

      Simon le Zélote le regarde si sévèrement que le sourire se fige sur les lèvres de Judas. Il lui semble opportun de changer de sujet de conversation, et il demande :

      « Que voulaient aujourd’hui ces deux hommes, qui discutaient ainsi avec vous ?

      – Ils ont trouvé une maison pour Nikê, du côté des jardins, près de la Porte. Joseph connaissait le propriétaire, et il savait qu’il la vendrait à un prix avantageux. Nous le ferons savoir à Nikê [1].

      – Quel désir de jeter l’argent par les fenêtres !

      – Il lui appartient. Elle peut en faire ce qu’elle veut. Elle souhaite rester près du Maître. Elle obéit en cela à la volonté de son époux, et à son cœur.

      – Il n’y a que ma mère qui soit au loin… soupire Jacques, fils d’Alphée.

      – Et la mienne, dit l’autre Jacques.

      – Mais pour peu de temps. As-tu entendu ce qu’a dit Jésus à Isaac comme à Jean et Matthias ? “ Quand vous reviendrez à la nouvelle lune de Scebat, venez avec les femmes disciples, en plus de ma Mère. ”

      – J’ignore pourquoi il refuse que Marziam revienne avec elles. Il lui a dit : “ Tu viendras quand je t’appellerai. ”

      – Peut-être pour que Porphyrée ne reste pas sans aide… Si personne ne pêche, là-bas on ne mange pas. Si nous n’y allons pas, Marziam doit s’en charger. Le figuier, le rucher, quelques oliviers et deux brebis ne suffisent évidemment pas à entretenir une femme, à la vêtir, à la nourrir…, remarque André.

      505.2 Jésus, arrêté contre le mur d’enceinte du Temple, les regarde venir. Il est en compagnie de Pierre, de Marziam et de Jude. Des pauvres se lèvent de leurs grabats de pierre, placés sur le chemin qui mène au Temple — celui qui va de Sion vers le mont Moriah, non celui qui va de l’Ophel au Temple [2]— et ils se dirigent vers Jésus en se lamentant pour lui demander une obole. Aucun ne demande la guérison. Jésus ordonne à Judas de leur donner de l’argent, puis il entre dans le Temple.

      Il n’y a pas foule. Après la grande affluence des fêtes, les pèlerins sont rares. Seuls ceux qui sont obligés de venir à Jérusalem pour quelque affaire importante, ou ceux qui habitent dans la ville elle-même, montent au Temple. Aussi les cours et les portiques, sans être déserts, sont-ils beaucoup moins fréquentés et semblent plus vastes, et aussi plus sacrés parce que moins bruyants. Même les changeurs, et les marchands de colombes et d’autres animaux, sont moins nombreux, adossés aux murs du côté du soleil, un soleil blafard qui se fraie un chemin à travers les nuages gris.

      Après avoir prié dans la Cour des Juifs, Jésus revient sur ses pas et s’adosse à une colonne pour observer… tout en étant lui-même observé.

      505.3 Il voit revenir, certainement de la Cour des Hébreux, un homme et une femme qui, sans pleurer ouvertement, montrent un visage plus douloureux que des larmes. L’homme essaie de réconforter sa femme, mais on voit que lui aussi est très affligé.

      Jésus se détache de la colonne et va à leur rencontre.

      « De quoi souffrez-vous ? » demande-t-il avec pitié.

      L’homme le regarde, étonné de cet intérêt qui, peut-être, lui semble indélicat. Mais le regard de Jésus est si doux qu’il en est désarmé. Pourtant, avant de parler de sa douleur, il demande :

      « Comment donc un rabbi s’intéresse-t-il aux souffrances d’un simple fidèle ?

      – Parce que le rabbi est ton frère, ô homme, ton frère dans le Seigneur, et il t’aime comme le commandement le requiert.

      – Ton frère ! Je suis un pauvre cultivateur de la plaine de Saron, vers Dora. Toi, tu es un rabbi.

      – La souffrance concerne les rabbis comme tout le monde. Je sais ce qu’elle est, et je voudrais te consoler. »

      La femme écarte un instant son voile pour regarder Jésus et murmure à son mari :

      « Dis-le-lui. Peut-être pourra-t-il nous aider…

      505.4 – Rabbi, nous avions une fille… nous l’avons, pour le moment, nous l’avons encore… Et nous l’avons mariée honorablement à un jeune homme, qu’un ami commun nous… garantissait devoir être un bon mari. Ils sont mariés depuis six ans et ils ont eu deux enfants de leur mariage. Deux… car après l’amour a cessé… au point que maintenant… l’époux veut le divorce. Notre fille pleure et se consume, et c’est pour cela que nous t’avons dit que nous l’avions encore : car d’ici peu, elle mourra de chagrin. Nous avons tout tenté pour convaincre l’homme, et nous avons tant prié le Très-Haut… Mais aucun des deux ne nous a écoutés… Nous sommes venus ici en pèlerinage pour cela, et nous y sommes restés toute une lune. Tous les jours au Temple, moi à ma place, elle à la sienne… Ce matin, un serviteur de ma fille est venu nous apprendre que l’époux s’est rendu à Césarée pour lui envoyer de là le libelle de divorce. Voilà la réponse à nos prières…

      – Ne parle pas ainsi, Jacques » supplie sa femme à voix basse, avant de poursuivre : « Le Rabbi nous maudira comme blasphémateurs… et Dieu nous punira. C’est notre peine, elle vient de Dieu… Et s’il nous a frappés, c’est signe que nous l’avons mérité, achève-t-elle dans un sanglot.

      – Non, femme. Moi, je ne vous maudis pas, et Dieu ne vous punira pas. Je vous le déclare, ce n’est pas Dieu qui est la source de cette souffrance, mais l’homme. Dieu la permet pour vous éprouver et pour éprouver le mari de votre fille. Ne perdez pas la foi, et le Seigneur vous exaucera.

      – C’est trop tard. Désormais notre fille est répudiée et déshonorée, et elle va mourir… dit l’homme.

      – Il n’est jamais trop tard pour le Très-Haut. En un instant et en raison de la persévérance d’une prière, il peut changer le cours des événements. De la coupe aux lèvres, il y a encore du temps pour que la mort insinue son poignard et pour empêcher de boire celui qui approchait la coupe de ses lèvres, et cela par l’intervention de Dieu. Je vous le dis. Retournez aux places où vous priez, et persévérez aujourd’hui, demain et après-demain encore : si vous savez avoir foi, vous verrez le miracle.

      – Rabbi, tu veux nous réconforter… mais en ce moment… Ce n’est plus possible, et tu le sais, d’annuler le libelle une fois qu’il a été remis à la femme répudiée, insiste l’homme.

      – Aie foi, te dis-je. Il est vrai qu’on ne peut l’annuler. Mais sais-tu si ta fille l’a reçu ?

      – De Dora à Césarée, le chemin n’est pas bien long. Pendant que le serviteur arrivait ici, Jacob est certainement revenu à la maison et il a chassé Marie.

      – Le trajet n’est pas long, mais es-tu certain qu’il l’ait accompli ? Une volonté supérieure à celle de l’homme ne peut-elle avoir arrêté un homme si Josué, avec l’aide de Dieu, a arrêté le soleil ? Votre prière persévérante et confiante, faite dans une bonne intention, n’est-elle pas un désir saint opposé à la volonté mauvaise de l’homme ? Et, puisque vous demandez quelque chose de bon à votre Père, ne vous aidera-t-il pas pour arrêter la marche d’un fou ? Ne vous aura-t-il pas déjà aidés ? Et même si l’homme s’obstinait encore à avancer, le pourrait-il, si vous vous obstinez à demander au Père une chose juste ? Je vous le dis : allez et priez aujourd’hui, demain et après-demain, et vous verrez le miracle.

      – Oh ! allons-y, Jacques ! Le Rabbi sait. S’il dit de prier, c’est signe qu’il sait que la chose est juste. Aie foi, mon époux. Je sens une grande paix, une forte espérance qui se lève là où j’éprouvais tant de douleur. Que Dieu te récompense, Rabbi, toi qui es bon, et qu’il t’écoute. Prie pour nous, toi aussi. Viens, Jacques, viens. »

      Elle réussit à convaincre son mari, qui la suit après avoir adressé à Jésus la salutation habituelle des Hébreux : « Que la paix soit avec toi », à laquelle Jésus répond par la même formule.

      « Pourquoi ne leur as-tu pas révélé qui tu es ? Ils auraient prié avec plus de paix » disent les apôtres.

      Et Philippe ajoute :

      « Je vais le leur dire. »

      Mais Jésus le retient :

      « Je ne veux pas. Ils auraient en effet prié avec paix, mais avec moins de valeur, avec moins de mérite. Ainsi, leur foi est parfaite et sera récompensée.

      – Réellement ?

      – Voulez-vous que je mente en trompant deux malheureux ? »

      505.5 Il regarde la foule qui s’est rassemblée, une centaine de personnes, et reprend :

      « Ecoutez cette parabole qui vous apprendra la valeur de la prière constante.

      Vous savez ce que dit le Deutéronome au sujet des juges et des magistrats [3]. Ils doivent être justes et miséricordieux en écoutant avec impartialité ceux qui ont recours à eux, en essayant toujours de juger, comme si le cas qui se présente à eux était leur cas personnel, sans tenir compte des cadeaux ou des menaces, sans égards pour les amis coupables et sans dureté envers ceux qui sont en mauvais termes avec les amis du juge. Mais si les paroles de la Loi sont justes, les hommes ne le sont pas autant et ils ne savent pas obéir à la Loi. On voit ainsi que la justice humaine est souvent imparfaite, car rares sont les juges qui savent se garder purs de toute corruption, miséricordieux et patients envers les pauvres comme envers les riches, envers les veuves et les orphelins, comme ils le sont envers les plus aisés et influents.

      Il y avait dans une ville un juge très indigne de sa charge, qu’il avait obtenue au moyen d’une parenté puissante. Il jugeait de façon très partiale, car il était toujours porté à donner raison aux riches et aux puissants ou aux personnes que ceux-ci lui recommandaient, ou bien à ceux qui l’achetaient en lui offrant de grands cadeaux. Il ne craignait pas Dieu et se riait des plaintes des pauvres et des faibles, parce qu’ils étaient seuls et privés de puissants défenseurs. Quand il ne voulait pas écouter quelqu’un qui avait des raisons évidentes de l’emporter sur un riche et auquel il ne pouvait donner tort d’aucune manière, il le faisait chasser de sa présence en le menaçant de le jeter en prison. Et la plupart subissaient ses violences en se retirant, vaincus et résignés à leur défaite, avant même le début du procès.

      Mais dans cette ville, il y avait aussi une veuve chargée d’enfants. Elle devait recevoir une forte somme d’un homme puissant pour des travaux exécutés par son défunt mari pour lui. Poussée par le besoin et par l’amour maternel, elle avait essayé de se faire remettre par le riche la somme qui lui aurait permis de rassasier ses enfants et de les vêtir pour le prochain hiver. Mais lorsque toutes les pressions et les supplications qu’elle lui adressait se furent révélées vaines, elle eut recours au juge.

      Ce juge était un ami du riche, qui lui avait dit : “ Si tu me donnes raison, le tiers de la somme est pour toi. ” Aussi fut-il sourd aux paroles de la veuve qui le suppliait : “ Rends-moi justice contre mon adversaire. Tu vois que j’en ai besoin. Tout le monde peut te dire que j’ai droit à cette somme. ” Il alla jusqu’à la faire chasser par ses commis.

      Mais la femme revient une, deux, dix fois, le matin, à sexte, à none, le soir, inlassablement. Et elle le poursuivait de ses cris sur la route : “ Rends-moi justice. Mes enfants ont faim et froid. Je n’ai pas d’argent pour acheter de la farine et des vêtements. ” Elle se faisait trouver sur le seuil de la maison du juge quand il y revenait pour s’asseoir à table avec ses enfants. Et le cri de la veuve : “ Rends-moi justice contre mon adversaire, car mes enfants et moi, nous avons faim et froid ” pénétrait jusqu’à l’intérieur de la maison, dans la salle à manger, dans la chambre à coucher pendant la nuit, insistant comme le cri d’une huppe : “ Fais-moi justice, si tu ne veux pas que Dieu te frappe ! Fais-moi justice ! Rappelle-toi que la veuve et les orphelins sont sacrés pour Dieu, et malheur à celui qui les piétine ! Rends-moi justice, si tu ne veux pas subir un jour ce que nous souffrons. Notre faim, notre froid, tu les trouveras dans l’autre vie si tu ne nous rends pas justice ! Malheureux homme que tu es ! ”

      Le juge ne craignait ni Dieu ni son prochain. Mais à force d’être harcelé, de se voir devenu objet de risée de la part de toute la ville à cause des persécutions de la veuve, et même objet de blâme, il en eut assez. Aussi un jour, il se dit : “ Je ne crains ni Dieu ni les menaces de la femme, ni ce qu’en pensent les habitants ; cependant, pour en finir avec tant d’ennuis, je donnerai audience à la veuve et lui ferai justice, en obligeant le riche à payer. Il me suffit qu’elle ne me poursuive plus et ne soit plus sans cesse à hurler autour de moi. ” Et, ayant appelé son riche ami, il lui annonça : “ Mon ami, il ne m’est plus possible de te satisfaire. Fais ton devoir et paie, car je ne supporte plus d’être harcelé à cause de toi. J’ai parlé. ” Et le riche dut débourser la somme conformément à la justice.

      505.6 Voici la parabole. Maintenant, à vous de l’appliquer.

      Vous avez entendu les paroles d’un homme inique : “ Pour en finir avec tant d’ennuis, je donnerai audience à la femme. ” Or c’était un homme inique. Mais Dieu, le Père très bon, pourrait-il être inférieur au juge mauvais ? Ne rendra-t-il pas justice à ses enfants qui savent l’invoquer jour et nuit ? Et leur fera-t-il attendre cette grâce tellement longtemps que, d’accablement, leur âme cesse de prier ? Je vous le dis : il leur rendra promptement justice pour que leur âme ne perde pas la foi. Mais il faut aussi savoir prier sans se lasser après les premières prières, et savoir demander à bon escient. Et encore se confier à Dieu en disant : “ Pourtant, que soit fait ce que ta Sagesse voit pour nous de plus utile. ”

      Ayez foi. Sachez prier avec foi dans la prière et avec foi en Dieu votre Père. Et lui vous rendra justice contre ceux qui vous oppriment, qu’il s’agisse d’hommes ou de démons, de maladies ou d’autres malheurs. La prière persévérante ouvre le Ciel, et la foi sauve l’âme, quelle que soit la façon dont la prière est écoutée et exaucée. Allons ! »

      Jésus se dirige vers la sortie. Il est presque hors de l’enceinte quand, levant la tête pour observer le peu de gens qui le suivent et les nombreux indifférents ou hostiles qui le regardent de loin, il s’écrie tristement :

      « Mais quand le Fils de l’homme reviendra, trouvera-t-il encore la foi sur la terre ? »

      Et, avec un soupir, il s’enveloppe plus étroitement dans son manteau pour s’acheminer à grands pas vers le faubourg d’Ophel.




[1] La Porte des jardins est à l'ouest de la ville non loin du Golgotha et du palais de Chouza.

[2] Du sud-ouest et non du sud. Le Moriah est la partie où est construite le Temple. Sion désigne soit l'éperon rocheux au sud d'Ophel, ce n'est pas le cas ici, soit le mont où est le Cénacle. C'est le cas ici.

[3] Deutéronome 16,18-20.





Observations


De la coupe aux lèvres

Des paysans venus prier au Temple confient à Jésus leur désespoir, car leur fille est en instance de divorce. Jésus les réconforte et leur assure que par leurs prières ils obtiendront le miracle : « Il n’est jamais trop tard pour le Très-Haut. En un instant et en raison de la persévérance d’une prière, il peut changer le cours des événements. De la coupe aux lèvres, il y a encore du temps pour que la mort insinue son poignard et pour empêcher de boire celui qui approchait la coupe de ses lèvres, et cela par l’intervention de Dieu » (EMV 505.4). Quelques jours plus tard, à Béthanie, Jésus rappelle aux apôtres qu’il « n’est jamais trop tard pour essayer et espérer de sauver une âme ». Et Il ajoute : « Entre la coupe et les lèvres, dit le proverbe, il y a toujours place pour la mort. Moi, je dis au contraire : entre la fin de l’agonie et la mort, il est toujours temps d’obtenir le pardon, pour soi-même ou ceux pour qui nous le demandons » (EMV 519.2). Jésus donne ainsi une nouvelle dimension à ce proverbe bien connu alors des grecs et des romains.


Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 La-parabole-du-juge-et-de-la-veuve


Ce proverbe, traduit du grec en latin par Horace (multa cadunt inter calicem supremaque labra ) et par Caton (Multum interest inter os et offam) est aussi évoqué par Ovide et par Pline. L’original nous est essentiellement connu par un passage d’Aristote cité par Apollodore de Rhodes : Ancée, roi de Samos, quoique fort âgé, faisait planter des vignes, et se montrait très exigeant envers ses esclaves. L’un d’eux lui dit : « Pourquoi tant nous presser. Seigneur ? Vous ne boirez sans doute jamais du vin que cette vigne pourra produire ». Le roi vécut encore assez longtemps pour assister à la récolte du raisin et résolut de donner une leçon à l’impertinent. S’étant fait remplir une coupe de vin nouveau, il dit à l’esclave : « Ose me soutenir à présent que je ne boirai pas de ce vin » « Eh ! Seigneur, réplique l’esclave, je n’assurerai pas que vous en boirez ; il y a loin de la coupe aux lèvres ». A peine achevait-il ces mots qu’on vint annoncer au roi qu’un sanglier ravageait sa vigne. Ancée, furieux, se lève, prend ses armes et va à la rencontre de la bête. Celle-ci lui déchire le ventre d’un coup de boutoir et l’infortuné prince expire sur place.

*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-202222.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/la-parabole-du-juge-et-de-la-veuve.html


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 11 Fév - 20:14

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
506. Au Temple, le discours contesté qui révèle Jésus comme la Lumière du Monde     
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 203.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 506.
 
Vision du 28 septembre 1946.
 
Jeudi 11 octobre 29
Jérusalem

 
       506.1 Jésus est encore à Jérusalem, mais pas à l’intérieur des cours du Temple. Il se trouve dans une vaste pièce bien ornée, l’une des si nombreuses qui se trouvent dans l’enceinte, grande comme un village.
 
       Comme il vient d’entrer, il est encore en train de marcher à côté de celui qui l’y a invité, peut-être pour le mettre à l’abri du vent froid qui balaie le mont Moriah. Derrière lui se trouvent les apôtres et quelques disciples. Je dis « quelques », car, en dehors d’Isaac et de Marziam, il y a Jonathas et, parmi les gens qui entrent à la suite du Maître, je remarque ce lévite, Zacharie, qui lui a dit [1], quelques jours plus tôt, qu’il voulait être son disciple. Il y a encore deux autres hommes que j’ai déjà vus avec les disciples, mais dont j’ignore le nom. Mais mêlés à eux — qui sont bienveillants —, on voit aussi les habituels, les inévitables et immanquables pharisiens. Ils s’arrêtent presque sur le pas de la porte, comme s’ils s’étaient trouvés là par hasard pour parler d’affaires, mais ils sont venus pour écouter. Dans l’assistance, l’attente de la parole du Seigneur est vive.
 
       Il regarde cet attroupement de gens de nationalités visiblement différentes, pas toutes palestiniennes, bien que de religion hébraïque. Il regarde cette assemblée dont bien des membres, demain peut-être, se répandront dans les régions d’où ils viennent et y porteront sa parole en annonçant : « Nous avons entendu l’Homme dont on dit qu’il est notre Messie. » Et à eux, qui sont déjà instruits dans la Loi, il ne parle pas de la Loi, comme il le fait souvent quand il comprend qu’il a en face de lui des gens ignorants ou des personnes dont la foi est ébranlée. Mais il parle de lui-même pour qu’ils le connaissent.
 
       Il dit :
 
       « Je suis la Lumière du monde et celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la Vie. »
 
       Il se tait un instant après avoir énoncé le thème du discours qu’il va développer, selon son habitude quand il s’apprête à parler longuement. Il se tait pour laisser aux gens le temps de décider si le sujet les intéresse ou non, et aussi pour donner à ceux que cela n’intéresse guère le temps de s’en aller. De ceux qui sont présents, personne ne s’en va ; et même les pharisiens, qui se tenaient sur le seuil, occupés à une conversation contrainte et étudiée, se sont tus et se sont tournés vers l’intérieur de la synagogue au premier mot de Jésus. Et ils se frayent un passage pour entrer, autoritaires comme toujours.
 
       506.2 Une fois le silence établi, Jésus répète la phrase, à plus forte voix encore. Puis il poursuit :
 
       « En tant que Fils du Père, qui est le Père de la Lumière, je suis la Lumière du monde. Un fils ressemble toujours au père qui l’a engendré et il a la même nature. De même, je ressemble à Celui qui m’a engendré et j’ai la même nature que lui. Dieu, le Très-Haut, l’Esprit parfait et infini, est lumière d’Amour, lumière de Sagesse, lumière de Puissance, lumière de Bonté, lumière de Beauté. Il est le Père des lumières, et celui qui vit de lui et en lui voit, parce qu’il est dans la Lumière, de même que Dieu désire que les créatures voient. Il a donné à l’homme l’intelligence et le sentiment pour qu’il puisse voir la Lumière, c’est-à-dire lui-même, la comprendre et l’aimer. Il lui a aussi donné des yeux pour qu’il puisse voir la plus belle des choses créées, la perfection des éléments, qui rend visible la Création, celle qui est l’une des premières actions du Dieu Créateur et porte le signe le plus visible de Celui qui l’a créée : la lumière, incorporelle, lumineuse, béatifique, consolante, nécessaire comme l’est le Père de tous : Dieu éternel et très-haut.
 
       Par un ordre de sa Pensée, il a créé le firmament et la terre, c’est-à-dire la masse de l’atmosphère et la masse de la poussière, l’incorporel et le corporel, ce qui est très léger et ce qui est lourd, mais tous les deux encore pauvres, vides et informes, parce qu’enveloppés dans les ténèbres, sans astres et sans vie.
 
       L’Esprit de Dieu planait au-dessus des eaux et ne faisait qu’un avec le Créateur qui créait et l’Inspirateur qui poussait à créer, pour pouvoir aimer non seulement lui-même dans le Père et dans le Fils, mais aussi un nombre infini de créatures portant le nom d’astres, planètes, eaux, mers, forêts, plantes, fleurs, animaux qui volent, frétillent, rampent, courent, sautent, grimpent, et enfin l’homme, la plus parfaite des créatures, plus parfait que le soleil parce qu’il a une âme en plus de la matière, l’intelligence en plus de l’instinct, la liberté en plus de l’ordre, l’homme semblable à Dieu par l’esprit, semblable à l’animal par la chair, le demi-dieu qui devient dieu par participation, par la grâce de Dieu et sa propre volonté, l’être humain qui, s’il le veut, peut se transformer en ange, le plus aimé de la Création sensible pour lequel, tout en le sachant pécheur dès avant l’existence du temps, Dieu a préparé le Sauveur, la Victime dans l’Etre aimé sans mesure, dans le Fils, dans le Verbe, pour qui tout a été fait.
 
       Mais pour donner à la terre et au firmament leur vraie physionomie, pour en faire deux splendeurs, utiles, adaptées à la continuation de l’œuvre créatrice, voilà que l’Esprit de Dieu qui se tenait dans le cosmos crie — et c’est la Parole qui pour la première fois se manifeste — : “ Que la lumière soit. ” Et la lumière existe, bonne, salutaire, puissante pendant la journée, affaiblie de nuit. Elle ne disparaîtra jamais tant que durera le temps.
 
       De cet océan de merveilles qu’est le trône de Dieu, le sein de Dieu, Dieu tire son plus beau joyau, et c’est la lumière, qui précède cette pierre précieuse la plus parfaite qu’est la création de l’homme, en qui se trouve non pas un joyau de Dieu, mais Dieu lui-même, avec son souffle qu’il a envoyé sur la boue pour en faire une chair et une vie, et son héritier dans le Paradis céleste où il attend les justes, ses enfants, pour se réjouir en eux et eux en lui.
 
       Si, au début de la création, Dieu a voulu sur ses œuvres la lumière, si, pour faire apparaître la lumière, il s’est servi de sa Parole, si Dieu donne à ceux qu’il aime davantage sa ressemblance la plus parfaite : la lumière — lumière matérielle joyeuse et incorporelle, lumière spirituelle sage et sanctifiante — pourrait-il ne pas avoir donné au Fils de son amour ce qu’il est lui-même ? En vérité, à Celui en qui il se complaît de toute éternité [2], le Très-Haut a tout donné, et il a voulu que la première chose et la plus puissante soit la lumière, pour que sans attendre de monter au Ciel les hommes connaissent la merveille de la Trinité, ce qui fait chanter les Cieux dans les chœurs bienheureux, chanter en raison de l’harmonie de la joie éblouie que suscite chez les anges la contemplation de la lumière, c’est-à-dire de Dieu, la Lumière qui remplit le Paradis et fait la béatitude de tous ses habitants.
 
       Je suis la Lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la Vie ! De même que la lumière sur la terre informe a permis que les plantes et les animaux aient la vie, ainsi ma lumière permet aux âmes d’obtenir la vie éternelle. Moi qui suis la Lumière, je crée en vous la vie et je la conserve, la développe, vous recrée en elle, je vous transforme, je vous amène à la Demeure de Dieu par des chemins de sagesse, d’amour, de sanctification. Celui qui a la lumière en lui, possède Dieu en lui, car la lumière ne fait qu’un avec la charité. Or qui a la charité possède Dieu. Celui qui a la lumière a en lui la vie, car Dieu est présent là où il est fait bon accueil à son Fils bien-aimé.
 
       506.3 – Tu parles sans raison. Qui a vu ce qu’est Dieu ? Moïse lui-même n’a pas vu Dieu [3]. En effet, sur l’Horeb, dès qu’il sut qui parlait du buisson ardent, il se couvrit le visage ; les autres fois, il ne put le voir parmi les éclairs éblouissants. Et toi, tu prétends avoir vu Dieu ? A Moïse, qui l’entendit seulement parler, il resta un éclat sur le visage. Mais toi, quelle lumière as-tu sur le visage ? Tu es un pauvre Galiléen dont le visage est pâle comme la plupart d’entre vous. Tu es un malade, fatigué et maigre. En vérité, si tu avais vu Dieu et s’il t’aimait, tu n’aurais pas l’air d’un mourant. Tu veux donner la vie, toi qui ne l’as même pas pour toi-même ? »
 
       Ils hochent la tête avec une compassion ironique.
 
       « Dieu est Lumière et moi, je sais ce qu’est sa lumière, car les enfants connaissent leur père et chacun se connaît soi-même. Moi, je connais mon Père, et je sais qui je suis. Je suis la Lumière du monde. Je suis la Lumière parce que mon Père est la Lumière et qu’il m’a engendré en me donnant sa nature. La Parole n’est pas dissemblable de la Pensée, car la parole exprime ce que pense l’intelligence. Du reste, ne connaissez-vous plus les prophètes ? Ne vous rappelez-vous pas Ezéchiel et surtout Daniel ? Pour décrire Dieu, dont il avait la vision sur le char des quatre animaux, le premier dit [4] : “ Sur le trône se tenait quelqu’un dont l’aspect semblait être celui d’un homme et, en lui et autour de lui, je vis quelque chose de couleur ambre jaune qui avait l’apparence du feu, et de ses reins, au-dessus et au-dessous, j’ai vu comme une sorte de feu qui resplendissait tout autour, ayant l’aspect de l’arc-en-ciel quand il se forme dans les nuages un jour de pluie, tel était l’aspect de cet éclat tout autour. ” Quant à Daniel, il dit [5] : “ Tandis que je contemplais, des trônes furent placés et l’Ancien s’assit. Ses vêtements étaient blancs comme la neige, ses cheveux comme de la laine d’une blancheur éclatante, son trône était des flammes vives et les roues de son trône étaient un feu ardent. Un fleuve de feu coulait avec rapidité devant sa face. ” C’est ainsi qu’est Dieu, et c’est ainsi que je serai quand je viendrai vous juger.
 
       506.4 – Ton témoignage n’est pas recevable : tu te rends témoignage à toi-même. Alors quelle valeur pourrait-il avoir ? Pour nous, il n’est pas vrai.
 
       – Bien que je me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est vrai, car je sais d’où je suis venu et où je vais. Mais vous, vous ne savez ni d’où je viens ni où je vais. Vous avez pour sagesse ce que vous voyez. Moi, je connais au contraire tout ce qui est inconnu à l’homme, et je suis venu pour vous le faire connaître. C’est pour cela que j’ai dit que je suis Lumière, car la lumière manifeste ce qui était caché par les ombres. Dans le Ciel, il y a la Lumière ; la terre est surtout le règne des ténèbres, qui cachent les vérités aux esprits : les ténèbres haïssent les âmes des hommes, et elles ne veulent pas qu’ils connaissent la Vérité et les vérités pour qu’ils ne puissent se sanctifier. C’est précisément pour cela que je suis venu : pour que vous ayez la lumière, et par conséquent la vie. Mais vous ne voulez pas m’accueillir. Vous voulez porter un jugement sur ce que vous ne connaissez pas. Or vous ne le pouvez, car c’est tellement au-dessus de vous ! C’est incompréhensible pour celui qui ne le contemple pas d’un œil spirituel et avec une âme humble et nourrie de foi. Mais vous, vous jugez selon la chair, c’est pourquoi vous ne pouvez être dans la vérité de jugement. Moi, au contraire, je ne juge personne pourvu que je puisse m’abstenir de juger. Je vous regarde avec miséricorde et je prie pour vous, pour que vous vous ouvriez à la lumière. Mais quand je dois vraiment juger, alors mon jugement est vrai, car je ne suis pas seul, mais je suis avec le Père qui m’a envoyé. Lui, de sa gloire, voit l’intérieur des cœurs. Et comme il voit le vôtre, il voit le mien. Et s’il voyait dans mon cœur un jugement injuste, par amour pour moi et pour l’honneur de sa justice, il m’en avertirait. Mais le Père et moi, nous jugeons d’une seule manière, et nous sommes deux et non seuls pour juger et témoigner. Dans votre Loi, il est écrit que le témoignage de deux personnes qui affirment la même chose doit être compté pour vrai et valable [6]. Je rends donc témoignage à ma nature, et avec moi le Père qui m’a envoyé témoigner de la même façon. Par conséquent ce que je dis est vrai.
 
       506.5 – Nous, nous n’entendons pas la voix du Très-Haut. C’est toi qui prétends qu’il est ton Père…
 
       – Il vous a parlé de moi sur le Jourdain…
 
       – D’accord. Mais tu n’étais pas seul au Jourdain, il y avait Jean aussi. Il pouvait parler de lui. C’était un grand prophète.
 
       – Vous vous condamnez vous-mêmes ! Dites-moi : qui parle sur les lèvres des prophètes ?
 
       – L’Esprit de Dieu.
 
       – Et pour vous, Jean était un prophète ?
 
       – Un des plus grands, sinon le plus grand.
 
       – Dans ce cas, pourquoi n’avez-vous pas cru à ses paroles et pourquoi n’y croyez-vous toujours pas ? Lui, il m’avait désigné comme étant l’Agneau de Dieu, venu effacer les péchés du monde. A qui lui demandait s’il était le Christ, il répondait : “ Je ne suis pas le Christ, mais celui qui le précède. Et derrière moi vient celui qui en réalité me précède, car il existait avant moi. Je ne le connaissais pas, mais l’ai reconnu dès le ventre de ma mère. Il m’a investi dans le désert, m’a envoyé baptiser et m’a dit : ‘ Celui sur lequel tu verras descendre l’Esprit est celui qui baptisera avec l’Esprit Saint et dans le feu [7] ’. ” Vous ne vous le rappelez pas ? Pourtant, beaucoup d’entre vous étaient présents… Pourquoi donc ne croyez-vous pas au prophète qui m’a désigné après avoir entendu les paroles du Ciel ? Est-ce cela que je dois dire à mon Père : que son peuple ne croit plus aux prophètes ?
 
       – Et où est donc ton père ? Joseph le menuisier repose depuis des années dans son tombeau. Tu n’as plus de père.
 
       – Vous ne connaissez ni mon Père, ni moi. Mais si vous vouliez me connaître, vous connaîtriez aussi mon vrai Père.
 
       – Tu es un obsédé et un menteur. Tu es un blasphémateur quand tu veux soutenir que le Très-Haut est ton Père. Et tu mériterais que l’on te frappe conformément à la Loi. »
 
       Les pharisiens et d’autres personnes du Temple poussent des cris menaçants, alors que les gens les regardent de travers, pour défendre le Christ.
 
       Jésus les contemple sans ajouter un mot, puis il sort de la pièce par une petite porte latérale qui donne sur un portique.

 


[1] Lui a dit, en EMV 490.9.

[2] Ab æterno = éternellement. Ab eterno dans le manuscrit original.
 
[3] Moïse, dont on relate les manifestations divines en Exode 3, 1-6 ; Exode 19, 16-25 et Exode 34, 29-35.
 
[4] Le premier dit, en Ézéchiel 1, 26-28.
 
[5] Et Daniel dit, en Daniel 7, 9-10.
 
[6] Témoignage comme prescrit en Deutéronome 19, 15-20.
 
[7] Marc 1, 7-8. Voir aussi le Baptême de Jésus en EMV 45.7.



 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-203.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/jesus-revele-comme-la-lumiere-du-monde.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 12 Fév - 21:27

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
507. Grande discussion avec les Juifs. Fuite du Temple avec l’aide du lévite Zacharie.
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 204.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 507.
 
Vision du lundi 30 septembre 1946.
 
Jeudi 11 octobre 29
Jérusalem

 
       507.1 Jésus rentre au Temple avec les apôtres et les disciples. Certains apôtres — et pas seulement eux — lui font remarquer que c’est imprudent. Mais lui répond :
 
       « De quel droit pourrait-on m’en refuser l’entrée ? Suis-je donc condamné ? Non, pour le moment je ne le suis pas encore. Je monte donc vers l’autel de Dieu comme tout israélite qui craint le Seigneur.
 
       – Mais tu as l’intention de parler…
 
       – N’est-ce donc pas le lieu où d’ordinaire les rabbis se réunissent pour parler ? C’est l’exception d’être hors d’ici pour parler et enseigner ; cela peut correspondre au repos que prend un rabbi ou à quelque nécessité personnelle, mais c’est ici que chacun aime à faire l’école aux disciples. Ne voyez-vous pas autour des rabbis des gens de toutes nationalités s’approcher pour entendre au moins une fois les célèbres rabbis ? Au moins pour pouvoir dire en revenant dans leur pays : “ Nous avons entendu un maître, un philosophe parler à la manière d’Israël. ” Maître, pour ceux qui déjà sont juifs ou tendent à l’être ; philosophe, pour les païens proprement dits. Et les rabbis ne dédaignent pas d’être écoutés par ces derniers, dans l’espoir d’en faire des prosélytes. Sans cette espérance qui, si elle était humble, serait sainte, ils ne se tiendraient pas dans la Cour des Gentils, mais exigeraient de parler dans la Cour des Juifs et, si possible, dans le Saint lui-même : car, d’après le jugement qu’ils portent sur eux-mêmes, ils sont tellement saints que Dieu seul leur est supérieur… Et moi, qui suis Maître, je parle là où parlent les maîtres. Mais ne craignez rien ! Leur temps n’est pas encore venu. Quand ce sera le cas, je vous avertirai, pour que vous fortifiiez votre cœur.
 
       – Tu ne nous avertiras pas, dit Judas.
 
       – Pourquoi donc ?
 
       – Parce que tu ne pourras pas le savoir. Aucun signe ne te l’indiquera. Il n’y a pas de signe. Cela fait presque trois ans que je suis avec toi, et je t’ai toujours vu menacé et persécuté. Qui plus est, tu étais seul, alors. Maintenant, tu as derrière toi le peuple qui t’aime et les pharisiens le craignent. Tu es donc plus fort. Qu’est-ce qui pourra t’indiquer que le moment sera venu ?
 
       – Je le vois dans le cœur des hommes. »
 
       Judas reste un instant interdit, puis il reprend :
 
       « Une autre raison, c’est que… Tu nous épargnes en doutant de notre courage.
 
       – C’est pour ne pas nous affliger qu’il se tait, intervient Jacques, fils de Zébédée.
 
       – Cela aussi. Ce qui est sûr, c’est que tu ne diras rien.
 
       – Je vous préviendrai. Et tant que je ne le ferai pas, quelles que soient la violence et la haine que vous verrez contre moi, n’en soyez pas épouvantés. Elles n’ont pas de conséquences. 507.2 Allez de l’avant. Je reste ici à attendre Manahen et Marziam. »
 
       Les Douze et leurs compagnons obtempèrent à contrecœur.
 
       Jésus revient vers la porte attendre les deux hommes. Il sort même dans la rue et tourne vers l’Antonia.
 
       Des légionnaires, arrêtés près de la forteresse, se le montrent du doigt et conversent. Il semble qu’il y ait comme un peu de discussion, puis l’un d’eux dit à haute voix :
 
       « Je le lui demande »
 
       Il quitte ses compagnons pour venir vers Jésus.
 
       « Salut, Maître. Parles-tu aussi aujourd’hui à l’intérieur ?
 
       – Que la Lumière t’éclaire. Oui, je parlerai.
 
       – Alors… prends garde à toi. Quelqu’un qui est au courant nous a avertis, et une femme qui t’admire nous a ordonné d’être vigilants [1]. Nous nous tiendrons près du souterrain du côté de l’orient. En connais-tu l’entrée ?
 
       – Je ne l’ignore pas, mais il est fermé aux deux bouts.
 
       – Tu crois cela ? »
 
       Le légionnaire a un bref rire et, dans l’ombre de son casque, ses yeux et ses dents brillent, le faisant paraître plus jeune. Puis il salue en se raidissant :
 
       « Salut, Maître. Souviens-toi de Quintus Félix.
 
       – Je m’en souviendrai. Que la Lumière t’éclaire » dit Jésus en se remettant en route.
 
       Le légionnaire retourne à sa place et parle avec ses camarades.
 
       « Maîtres, nous avons tardé ? Il y avait tant de lépreux ! s’exclament en même temps Manahen, vêtu simplement de marron foncé, et Marziam.
 
       – Non. Vous avez vite fait. Dépêchons-nous cependant, les autres nous attendent. Manahen, est-ce toi qui as prévenu les Romains ?
 
       – De quoi, Seigneur ? Je n’ai parlé avec personne. Et je ne saurais… Les Romaines ne sont pas à Jérusalem. »
 
       Les voilà de nouveau près de la porte d’enceinte. Comme s’il s’y trouvait par hasard, le lévite Zacharie est là.
 
       « Paix à toi, Maître. Je veux te dire… J’essaierai toujours d’être à tes côtés, ici à l’intérieur. Quant à toi, ne me perds pas de vue. Et s’il y a du tumulte et que tu vois que je m’en vais, cherche toujours à me suivre. Ils te haïssent tant ! Je ne puis faire davantage… Comprends-moi…
 
       – Que Dieu te récompense et te bénisse pour la pitié que tu as pour son Verbe. Je ferai ce que tu dis, et ne crains pas que quiconque connaisse ton amour pour moi. »
 
       Ils se séparent.
 
       « C’est peut-être lui qui a parlé aux Romains. Comme il est à l’intérieur, il aura su… » murmure Manahen.
 
       507.3 Ils vont prier en traversant la foule. Les gens les regardent avec des sentiments divers et se réunissent ensuite à Jésus quand, une fois sa prière finie, il revient de la Cour des Juifs.
 
       Alors qu’il est sur le point de s’arrêter, hors de la seconde enceinte, il se trouve entouré par un groupe où se mêlent scribes, pharisiens et prêtres. Un des magistrats du Temple prend la parole au nom de tous.
 
       « Tu es encore là ? Tu ne comprends pas que nous ne voulons pas de toi ? Ne redoutes-tu même pas le danger qui te menace ici ? Va-t’en. C’est déjà beaucoup que nous te laissions entrer pour prier. Nous ne te permettons pas d’enseigner tes doctrines.
 
       – Oui. Va-t’en. Va-t’en, blasphémateur !
 
       – Bien, je m’en vais comme vous le souhaitez. Et pas seulement hors de ces murs : je partirai. Je suis déjà en train de partir, plus loin, là où vous ne pourrez plus me rejoindre. Il viendra des heures où vous me chercherez vous aussi, et non plus seulement pour me persécuter : vous serez poussés par une terreur superstitieuse d’être frappés pour m’avoir chassé, par un désir superstitieux d’être pardonnés de votre péché pour obtenir miséricorde. Mais, je vous le dis : cette heure-ci est celle de la miséricorde. C’est l’heure de gagner l’amitié du Très-Haut. Une fois qu’elle sera passée, tout abri sera inutile. Vous ne m’aurez plus et vous mourrez dans votre péché. Même si vous parcouriez toute la terre, même si vous parveniez à atteindre les astres et les planètes, vous ne me trouveriez plus, car là où je vais, vous ne pouvez venir. Je vous l’ai déjà dit : Dieu vient et il passe. Le sage l’accueille avec ses dons à son passage. Le sot le laisse s’éloigner et ne le retrouve jamais plus. Vous êtes d’ici-bas ; moi, je suis d’en haut. Vous êtes de ce monde ; moi, je ne suis pas de ce monde. Aussi, une fois que je serai revenu dans la demeure de mon Père, hors de ce monde qui est le vôtre, vous ne me trouverez plus et vous mourrez dans vos péchés, car vous ne saurez même pas me rejoindre spirituellement par la foi.
 
       – Tu veux te tuer, espèce de satan ? Dans ce cas, il est certain que dans l’enfer où descendent les violents, nous ne pourrons venir te rejoindre, car l’enfer appartient aux damnés, aux maudits. Or nous, nous sommes les enfants bénis du Très-Haut » disent certains.
 
       Les uns approuvent :
 
       « Il veut sûrement se tuer, puisqu’il prétend que, là où il va, nous ne pouvons aller. Il comprend qu’il est découvert et qu’il a raté son coup, et il se supprime sans attendre d’être supprimé comme l’autre faux Christ galiléen [2]. »
 
       D’autres sont bienveillants :
 
       « Et si, au contraire, il était réellement le Christ et s’il retournait vraiment à Celui qui l’a envoyé ?
 
       – Où ? Au Ciel ? Abraham n’y est pas, et tu veux que lui, il y aille ? Auparavant le Messie doit venir.
 
       – Mais Elie a été enlevé au Ciel sur un char de feu [3].
 
       – Sur un char, oui. Mais au Ciel !… Qui l’assure ? »
 
       Et le débat se prolonge tandis que les pharisiens, les scribes, les magistrats, les prêtres, les juifs asservis aux prêtres, aux scribes, aux pharisiens, harcèlent le Christ sous les vastes portiques comme une meute de chiens harcèle le gibier qu’elle a repéré.
 
       507.4 Mais certains, les bons au sein de cette masse hostile, ceux qui sont vraiment conduits par un désir honnête, se fraient un passage pour rejoindre Jésus et lui posent l’anxieuse question que j’ai déjà tant de fois entendue poser avec amour ou avec haine :
 
       « Qui es-tu ? Dis-le, pour que nous sachions comment nous conduire. Dis la vérité, au nom du Très-Haut !
 
       – Je suis la Vérité même, et je ne mens jamais. Je suis celui que je vous ai toujours déclaré être depuis le premier jour où je me suis adressé aux foules, partout en Palestine, celui que j’ai déclaré être ici, plusieurs fois, près du Saint des Saints dont je ne crains pas les foudres, puisque je dis la vérité. J’ai encore beaucoup de choses à dire et à juger pendant mon jour et en ce qui concerne ce peuple ; bien que le soir paraisse déjà proche pour moi, je sais que je les dirai et que je jugerai tout le monde, car c’est ce que m’a promis Celui qui m’a envoyé et qui est véridique. Il a parlé avec moi dans une éternelle étreinte d’amour, en me partageant toute sa Pensée pour que moi, je puisse la révéler au monde par ma Parole. Je ne pourrai me taire et personne ne pourra me faire taire jusqu’à ce que j’aie annoncé au monde tout ce que j’ai entendu de mon Père.
 
       – Tu blasphèmes encore ? Et tu continues à te prétendre Fils de Dieu ? Mais à qui espères-tu faire croire cela ? Qui pourrait reconnaître en toi le Fils de Dieu ? » lui jettent avec force gestes ses ennemis, lançant leurs poings presque sur son visage, devenus fous de haine.
 
       Les apôtres, les disciples et des gens bien intentionnés les repoussent, en faisant une sorte de barrage pour protéger le Maître.
 
       Le lévite Zacharie se faufile tout doucement, en calculant ses mouvements pour ne pas attirer l’attention des énergumènes, jusqu’à Jésus, à côté de Manahen et des deux fils d’Alphée.
 
       507.5 Ils sont maintenant au bout du Portique des Païens, parce que la marche est lente entre les courants contraires, et Jésus s’arrête à sa place habituelle à la dernière colonne du côté oriental. Du lieu où ils se trouvent, les païens eux-mêmes ne peuvent chasser un véritable israélite sans exciter la foule, ce que, sournoisement, ils évitent de faire. Et de là, il reprend la parole pour répondre à ceux qui l’offensent, et avec eux à tout le monde :
 
       « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme… »
 
       Les pharisiens et les scribes s’écrient :
 
       « Et qui veux-tu qui t’élève ? Misérable pays qui a pour roi un bavard fou et un blasphémateur honni de Dieu… Aucun de nous ne t’élèvera, sois-en certain. Et le peu de lumière qui te reste te l’a fait comprendre à temps quand on t’a mis à l’épreuve [4]. Tu sais bien que nous ne pourrons jamais faire de toi notre roi !
 
       – Je le sais. Vous ne m’élèverez pas sur un trône, et pourtant vous m’élèverez. Et vous croirez m’abaisser en m’élevant. Mais c’est justement quand vous croirez m’avoir abaissé que je serai élevé : non seulement sur la Palestine, non seulement sur l’ensemble d’Israël répandu dans le monde, mais sur le monde entier, et jusque sur les nations païennes, jusque sur les lieux qu’ignorent encore les savants du monde. Et je le serai, non pas pour la durée d’une vie d’homme, mais pour toute la durée de la vie de la terre, et l’ombre du pavillon de mon trône s’étendra sur la terre jusqu’à la couvrir tout entière. C’est seulement alors que je reviendrai et que vous me verrez. Ah ! vous me verrez !
 
       – Mais écoutez ces discours de fou ! Nous le relèverons en l’abaissant, et nous l’abaisserons en l’élevant ! Un fou ! Un fou ! Et l’ombre de son trône s’étendrait sur toute la terre ! Il se dit plus grand que Cyrus ! Qu’Alexandre ! Que César ! Où le mets-tu, César ? Crois-tu qu’il te laissera prendre l’empire de Rome ? Et il resterait sur le trône pour toute la durée du monde ! Ha ! Ha ! Ha ! »
 
       Leur ironie est plus cinglante qu’un fouet.
 
       507.6 Mais Jésus les laisse dire. Il hausse la voix pour être entendu dans la clameur de ceux qui se moquent de lui et de ceux qui le défendent, et qui remplit les lieux comme la rumeur d’une mer en courroux.
 
       « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme, alors vous comprendrez qui je suis et que je ne fais rien de moi-même ; mais je dis ce que mon Père m’a enseigné et je fais ce qu’il veut. Et Celui qui m’a envoyé ne me laisse pas seul, mais il est avec moi. Comme l’ombre suit le corps, de même le Père est derrière moi, veillant, présent bien qu’invisible. Il est derrière moi pour me réconforter et m’aider, et il ne s’éloigne pas parce que je fais toujours ce qui lui plaît. Dieu s’éloigne au contraire quand ses enfants n’obéissent pas à ses lois et à ses inspirations. Alors il s’en va et les laisse seuls. C’est à cause de cela que beaucoup pèchent en Israël. Car l’homme laissé à lui-même a du mal à se garder juste, et il tombe facilement entre les anneaux du Serpent. Et en vérité, en vérité je vous dis qu’à cause de votre péché de résistance à la lumière et à la miséricorde de Dieu, Dieu s’éloigne de vous. Il laissera vide de lui-même ce lieu et vos cœurs ; et ce qu’a pleuré Jérémie dans ses prophéties et les Lamentations s’accomplira exactement [5]. Méditez ces paroles prophétiques, tremblez et faites retour sur vous-mêmes avec un bon esprit. Ecoutez non pas les menaces, mais la bonté du Père qui avertit ses enfants pendant qu’il leur est encore permis de réparer et de se sauver. Ecoutez Dieu dans les paroles et dans les faits, et si vous ne voulez pas croire à mes paroles, parce que le vieil Israël vous étouffe, croyez au moins au vieil Israël. En lui, les prophètes crient les dangers et les malheurs de la cité sainte et de notre patrie tout entière si elle ne se tourne pas vers le Seigneur son Dieu et si elle ne suit pas le Sauveur. La main de Dieu a déjà pesé sur ce peuple au cours des siècles passés, mais le passé comme le présent ne seront rien par rapport à l’avenir redoutable qui l’attend pour n’avoir pas voulu accueillir l’Envoyé de Dieu. Ce qui attend Israël qui répudie le Christ n’est comparable ni en rigueur ni en durée. C’est moi qui vous l’affirme, en plongeant mon regard dans les siècles : tel un arbre brisé et jeté dans les tourbillons d’un fleuve impétueux, ainsi sera la race hébraïque frappée par l’anathème divin. Avec ténacité, elle cherchera à se fixer sur les rives en tel ou tel lieu et, vigoureuse comme elle l’est, elle jettera des surgeons et des racines. Mais quand elle croira s’être installée à demeure, elle sera reprise par la violence du courant qui l’arrachera encore, brisera ses racines et ses rejets, et elle ira plus loin souffrir, s’accrocher pour être de nouveau arrachée et dispersée. Et rien ne pourra lui donner la paix, car le courant qui la poursuit sera la colère de Dieu et le mépris des peuples. Ce n’est qu’en se jetant dans une mer de sang vivant et sanctifiant qu’elle pourrait trouver la paix ; mais elle fuira ce sang bien qu’il l’invite encore, parce qu’il lui semblera qu’il a la voix du sang d’Abel, qui l’appelle, elle, le Caïn de l’Abel céleste. »
 
       Un autre vaste brouhaha se propage dans l’enceinte comme la rumeur de la marée, mais il manque dans ce bruit les voix âpres des pharisiens et des scribes, et des juifs qui leur sont attachés. Jésus en profite pour essayer de s’en aller.
 
       507.7 Mais certains qui étaient au loin s’approchent de lui :
 
       « Maître, écoute-nous. Nous ne sommes pas tous comme eux (et ils indiquent les ennemis), mais nous avons du mal à te suivre, en particulier parce que ta voix est seule contre des centaines qui disent le contraire de toi – mais justement ce que nous avons entendu de nos pères dès notre enfance. Cependant tes paroles nous incitent à croire. Mais comment faire pour croire complètement et avoir la vie ? Nous sommes comme liés par la pensée du passé…
 
       – Si vous vous attachez à ma Parole, ce sera comme une nouvelle naissance, vous croirez complètement et deviendrez mes disciples. Mais il faut que vous vous dépouilliez du passé et que vous acceptiez ma Doctrine. Elle n’efface pas tout le passé. Au contraire, elle maintient et revigore ce qui est saint et surnaturel dans le passé et enlève tout superflu humain en mettant la perfection de ma Doctrine là où étaient les doctrines humaines toujours imparfaites. Si vous venez à moi, vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres.
 
       – Maître, il est vrai que nous t’avons dit que nous sommes comme liés par le passé, mais ce lien n’est pas une prison ni un esclavage. Nous sommes la descendance d’Abraham dans les réalités spirituelles [6]. En effet, si nous ne sommes pas dans l’erreur, on dit descendance d’Abraham pour parler de postérité spirituelle, par opposition à celle d’Agar qui est une descendance d’esclaves. Comment donc peux-tu nous demander de devenir libres ?
 
       – La descendance d’Abraham, c’était aussi Ismaël et ses enfants, je vous le fais remarquer, car Abraham était le père d’Isaac et d’Ismaël.
 
       – Mais une descendance impure, car c’était le fils d’une femme esclave et égyptienne [7].
 
       – En vérité, en vérité je vous dis qu’il n’y a qu’un esclavage : celui du péché. Seul celui qui commet le péché est un esclave, et d’une servitude qu’aucune somme d’argent ne rachète. Son maître est inexorable et cruel, et il perd tout droit à la libre souveraineté dans le Royaume des Cieux. L’homme que la guerre ou des malheurs ont réduit en esclavage, peut aussi tomber en possession d’un bon maître, mais sa bonne situation est toujours précaire car son propriétaire peut le vendre à un maître cruel. Il est une marchandise, et rien de plus. On s’en sert parfois même comme de l’argent pour payer une dette. Et il n’a même pas le droit de pleurer. Le serviteur, au contraire, vit dans la maison de son patron jusqu’à ce qu’il soit congédié. Mais le fils reste toujours dans la maison du père et le père ne pense pas à le chasser : c’est seulement par sa libre volonté qu’il peut en partir. C’est en cela que réside la différence entre esclavage et service, et entre service et filiation. L’esclavage maintient l’homme dans les chaînes, le service le met à la disposition d’un patron, la filiation le place pour toujours et avec parité de vie dans la maison du père. L’esclavage annihile l’homme, le service le rend sujet, la filiation le rend libre et heureux. Le péché rend esclave, et sans fin, du maître le plus cruel qui soit : Satan. Le service — dans ce cas l’ancienne Loi — rend l’homme craintif à l’égard de Dieu comme d’un Etre intransigeant. La filiation, c’est-à-dire le fait de venir à Dieu avec son Premier-Né, avec moi, rend l’homme libre et heureux, car il connaît son Père et il a confiance en son amour. Recevoir ma Doctrine, c’est venir à Dieu avec moi, qui suis le Premier-Né de nombreux enfants bien-aimés. Je briserai vos chaînes pourvu que vous veniez à moi pour que je les brise, et vous serez vraiment libres et cohéritiers avec moi du Royaume des Cieux. 507.8 Je sais parfaitement que vous êtes la postérité d’Abraham. Mais ceux d’entre vous qui cherchent à me faire mourir n’honorent plus Abraham, mais Satan, et le servent en esclaves fidèles. Pourquoi ? Parce qu’ils repoussent ma parole, de sorte qu’elle ne peut pénétrer en beaucoup d’entre vous. Dieu ne violente pas l’homme pour l’obliger à croire, il ne le violente pas pour l’obliger à m’accepter, mais il m’envoie pour que je vous indique sa volonté. Et moi, je vous dis ce que j’ai vu et entendu auprès de mon Père et je fais ce qu’il veut. Mais ceux d’entre vous qui me persécutent font ce qu’ils ont appris de leur père et ce qu’il leur suggère. »
 
       Comme un paroxysme qui revient après une rémission dans une maladie, la colère des juifs, pharisiens et scribes, qui semblait un peu calmée, se réveille avec violence. Ils pénètrent comme un coin dans le cercle compact qui enserre Jésus et ils cherchent à l’approcher. La foule ondoie en vagues aussi contraires que les sentiments des cœurs. Les juifs, livides de colère et de haine, hurlent :
 
       « Notre père, c’est Abraham. Nous n’en avons pas d’autre.
 
       – Le Père des hommes, c’est Dieu. Abraham lui-même est fils du Père universel. Mais beaucoup répudient le vrai Père pour quelqu’un qui n’est pas père, mais qu’ils choisissent comme tel parce qu’il semble plus puissant et disposé à satisfaire leurs désirs immodérés. Les enfants reproduisent les œuvres qu’ils voient leur père commettre. Si vous êtes les fils d’Abraham, pourquoi ne faites-vous pas les œuvres d’Abraham ? Vous ne les connaissez pas ? Dois-je vous les énumérer, comme nature et comme symbole ? Abraham obéit en allant dans le pays que Dieu lui indiqua, figure d’un homme qui doit être prêt à tout quitter pour aller là où Dieu l’envoie. Abraham fit preuve de complaisance envers le fils de son frère et le laissa choisir la région qu’il préférait [8], figure du respect pour la liberté d’action et de la charité que l’on doit avoir pour son prochain. Abraham se montra humble après que Dieu lui eut marqué sa prédilection et il l’honora à Mambré, se sentant toujours un néant en face du Très-Haut qui lui avait parlé, figure de la position de l’amour révérenciel que l’homme doit toujours avoir envers son Dieu. Abraham crut en Dieu et lui obéit, même dans les ordres les plus difficiles à recevoir et les plus pénibles à accomplir, et pour se sentir en sécurité, il ne se rendit pas égoïste, mais il pria pour les habitants de Sodome. Abraham ne conclut pas de pacte avec le Seigneur en voulant être récompensé de ses nombreuses obéissances, et même, pour l’honorer jusqu’à la fin, jusqu’à la dernière limite, il lui sacrifia son fils bien-aimé…
 
       – Il ne l’a pas sacrifié.
 
       – Si, car en vérité son cœur l’avait déjà sacrifié durant le trajet par sa volonté d’obéir, que l’ange arrêta quand déjà le cœur du père se fendait au moment de fendre le cœur de son fils. Il tuait son fils pour honorer Dieu. Vous, c’est de Dieu que vous tuez le Fils pour honorer Satan. Faites-vous donc les œuvres de Celui que vous appelez votre père ? Non, certes pas. Vous cherchez à me tuer parce que je vous dis la vérité, comme je l’ai entendue de Dieu. Abraham n’agissait pas ainsi. Au lieu d'ignorer la voix qui venait du Ciel, il lui obéissait. Non, vous ne faites pas les œuvres d’Abraham, mais celles que vous indique votre père.
 
       507.9 – Nous ne sommes pas nés d’une prostituée, nous ne sommes pas des bâtards. Tu as dit toi-même que le Père des hommes, c’est Dieu. Or nous, nous appartenons au peuple élu, et aux castes élues dans ce peuple. Nous avons donc Dieu pour unique Père.
 
       – Si vous reconnaissiez Dieu pour Père, en esprit et en vérité, vous m’aimeriez, car je procède et je viens de Dieu ; je ne viens pas de moi-même, mais c’est lui qui m’a envoyé. Par conséquent, si vous connaissiez vraiment le Père, vous me connaîtriez moi aussi, son Fils et votre Frère et Sauveur. Est-ce que les frères peuvent ne pas se reconnaître ? Est-ce que les enfants de l’Unique peuvent ne pas reconnaître le langage que l’on parle à la Maison de l’Unique Père ? Pourquoi donc ne comprenez-vous pas mon langage et ne supportez-vous pas mes paroles ? C’est que je viens de Dieu, et pas vous. Vous avez quitté la demeure paternelle et oublié le visage et le langage de Celui qui l’habite. Vous êtes partis de votre plein gré dans d’autres régions, dans d’autres demeures, où règne un autre qui n’est pas Dieu, et où l’on parle un autre langage. Or, pour en permettre l’entrée, celui qui y règne impose que l’on devienne son fils et qu’on lui obéisse. Vous l’avez fait et vous continuez. Vous abjurez, vous reniez le Dieu Père pour vous choisir un autre père : Satan. Vous avez pour père le démon et vous voulez accomplir ce qu’il vous suggère. Or les désirs du démon sont des désirs de péché et de violence, et vous leur faites bon accueil. Dès le commencement, il était homicide. S’il n’a pas persévéré dans la vérité, c’est que lui, qui s’est révolté contre la Vérité, ne peut avoir en lui l’amour du vrai. Quand il parle, il parle comme il est, c’est-à-dire en être menteur et ténébreux car, en vérité, c’est un menteur : il a engendré et enfanté le mensonge après s’être fécondé par l’orgueil et nourri par la rébellion. Il a en son sein toute la concupiscence et il la crache, il l’inocule pour empoisonner toutes les créatures. C’est le ténébreux, le railleur, le maudit reptile rampant, c’est l’Opprobre et l’Horreur. Depuis des siècles et des siècles, ses œuvres tourmentent l’homme, et l’intelligence des hommes a devant elle leurs signes et leurs fruits.
 
       Et pourtant, c’est à lui qui ment et détruit que vous prêtez l’oreille, alors que si je parle et dis ce qui est vrai et bon, vous ne me croyez pas et me traitez de pécheur. Mais qui, parmi tous ceux qui m’ont approché, avec haine ou avec amour, peut dire qu’il m’a vu pécher ? Qui peut l’assurer en toute vérité ? Où sont les preuves pour me convaincre et convaincre ceux qui croient en moi, que je suis un pécheur ? Auquel des dix commandements ai-je manqué ? Qui peut jurer devant l’autel de Dieu qu’il m’a vu violer la Loi et les coutumes, les préceptes, les traditions, les prières ? Quel homme peut me faire changer d’expression pour être, avec des preuves certaines, convaincu de péché ? Personne, aucun homme et aucun ange. Dieu crie au cœur des hommes : “ Il est l’Innocent. ” De cela vous êtes tous convaincus, et vous qui m’accusez encore davantage que ces autres qui ignorent qui, de vous ou de moi, a raison. Mais seul l’homme qui appartient à Dieu écoute les paroles de Dieu. Vous, vous ne les écoutez pas, bien qu’elles tonnent en vos âmes nuit et jour, parce que vous n’êtes pas de Dieu.
 
       507.10 – Nous, nous qui vivons pour la Loi et dans l’observance la plus minutieuse des préceptes pour honorer le Très-Haut, nous ne serions pas de Dieu ? Et c’est toi qui oses dire cela ? Ah !!! »
 
       Ils semblent asphyxiés par l’horreur comme si une corde leur serrait le cou.
 
       « Et nous ne devrions pas dire que tu es un possédé et un Samaritain ?
 
       – Je ne suis ni l’un ni l’autre, mais j’honore mon Père, même si vous le niez pour m’en faire un reproche ; mais votre blâme ne m’afflige pas. Je ne cherche pas ma gloire. Il y a Quelqu’un qui en prend soin et qui juge. Je vous le dis à vous qui voulez m’humilier, mais aux hommes de bonne volonté j’affirme que celui qui accueillera ma parole, ou l’a déjà accueillie et qui saura la garder, ne verra jamais la mort pour l’éternité.
 
       – Ah ! maintenant nous voyons bien que le démon qui te possède parle par ta bouche ! Tu l’as déclaré toi-même : “ Il parle en menteur. ” Ce que tu as dit est une parole de mensonge, ta parole est donc démoniaque. Abraham est mort, les prophètes sont morts, et tu prétends que celui qui gardera ta parole ne verra jamais la mort pour l’éternité. Tu ne mourras donc pas ?
 
       – Je ne mourrai que comme Homme pour ressusciter au temps de grâce, mais comme Verbe je ne mourrai pas. La Parole est vie et elle ne meurt pas. Et celui qui accueille la Parole possède en lui la vie et ne meurt pas pour l’éternité, mais il ressuscite en Dieu, car moi je le ressusciterai.
 
       – Blasphémateur ! Fou ! Démon ! Es-tu plus grand que notre père Abraham qui est mort, et que les prophètes ? Qui prétends-tu donc être ?
 
       – Le Principe, moi qui vous parle. »
 
       Il se produit un grand charivari, pendant lequel le lévite Zacharie pousse insensiblement Jésus dans un coin du portique, aidé en cela par les fils d’Alphée et par d’autres qui l’épaulent, peut-être sans même savoir ce qu’ils font.
 
       507.11 Lorsque Jésus est bien adossé au mur et protégé par les plus fidèles qui se tiennent devant lui, et que le tumulte s’apaise un peu même dans la cour, il dit de sa voix si pénétrante et si belle, si calme, même dans les moments les plus troublés :
 
       « Si je me glorifie moi-même, ma gloire n’a pas de valeur. Chacun peut dire de lui-même ce qu’il veut. Mais Celui qui me glorifie, c’est mon Père dont vous affirmez qu’il est votre Dieu, bien qu’il soit si peu vôtre que vous ne le connaissez pas et que vous ne l’avez jamais connu, et que ne voulez pas le connaître à travers moi, qui vous en parle parce que je le connais. Et si je prétendais ne pas le connaître pour apaiser votre haine envers moi, je serais menteur, comme vous l’êtes, vous, quand vous assurez le connaître. Je sais que je ne dois pas mentir, pour aucune raison. Le Fils de l’homme ne doit pas mentir, même si dire la vérité doit être la cause de sa mort. Car si le Fils de l’homme mentait, il ne serait plus le fils de la Vérité, et la Vérité le repousserait loin d’elle. Je connais Dieu, à la fois comme Dieu et comme homme. Par conséquent, comme Dieu et comme homme, je garde ses paroles et je les observe. Israël, réfléchis ! C’est ici que s’accomplit la promesse. C’est en moi qu’elle s’accomplit. Reconnaissez-moi pour ce que je suis ! Abraham, votre père, a ardemment désiré voir mon jour. Il l’a vu prophétiquement, par une grâce de Dieu, et il en a exulté de joie. Et vous qui le vivez en réalité…
 
       – Mais tais-toi donc ! Tu n’as pas encore cinquante ans et tu veux dire qu’Abraham t’a vu et que tu l’as vu ? »
 
       Leur rire railleur se propage comme un flot empoisonné ou un acide qui ronge.
 
       « En vérité, en vérité je vous le dis : avant qu’Abraham naisse, moi, Je suis.
 
       – « Je suis » [9] ? Seul Dieu peut dire cela, puisqu’il est éternel. Pas toi ! Blasphémateur ! « Je suis » ! Anathème ! Serais-tu donc Dieu, toi, pour affirmer cela ? » lui lance un homme qui doit être un grand personnage car, arrivé depuis peu, il est déjà près de Jésus, tout le monde s’étant écarté presque avec terreur à sa venue.
 
       « Tu l’as dit » répond Jésus d’une voix de tonnerre.
 
       Tout devient une arme aux mains de ceux qui haïssent. Pendant que le dernier à avoir interrogé le Maître s’abandonne à toute une mimique d’horreur scandalisée, arrache son couvre-chef, tripatouille ses cheveux et sa barbe, et défait les boucles qui retiennent son vêtement à son cou, comme s’il se sentait défaillir d’horreur, des poignées de terre, des pierres dont se servent les marchands de colombes et autres animaux pour tendre les cordages des enclos, et des changeurs pour… garder prudemment leurs coffres auxquels ils tiennent plus qu’à leur vie, sont projetées contre le Maître, et naturellement retombent sur la foule elle-même, car Jésus est trop à l’intérieur, sous le portique, pour qu’on puisse l’atteindre. La foule bougonne et se plaint…
 
       507.12 Zacharie, le lévite, donne une forte bourrade à Jésus, seul moyen de le faire arriver à une petite porte basse, cachée dans le mur du portique et déjà prête à s’ouvrir, et il l’y pousse en même temps que les deux fils d’Alphée, Jean, Manahen et Thomas. Les autres restent dehors, dans le tumulte… dont le bruit arrive affaibli dans une galerie, entre les puissantes murailles de pierre, dont je ne sais comment elles s’appellent en architecture. Elles sont pour ainsi dire encastrées dans des pierres larges qui encadrent les plus petites, et vice versa. J’ignore si je m’explique bien. Elles sont grises, puissantes, taillées grossièrement, à peine visibles dans la pénombre des fentes étroites placées en haut à des distances régulières pour aérer et empêcher l’endroit d’être complètement obscur. C’est une étroite galerie dont je ne vois à quoi elle sert, mais qui me donne l’impression de tourner sous tout le portique. Peut-être avait-elle été faite pour protéger, pour abriter, pour doubler et donc rendre plus résistantes, les murailles des portiques qui constituent comme autant d’enceintes au Temple proprement dit, au Saint des Saints. En somme, je ne sais pas. Je dis ce que je vois. Il y règne une odeur d’humidité, et de cette humidité dont on ne sait si elle est froide ou non, comme dans certaines caves.
 
       « Et que faisons-nous ici ? demande Thomas.
 
       – Tais-toi ! Zacharie m’a dit qu’il viendra et que nous devions rester silencieux et immobiles, répond Jude.
 
       – Mais… peut-on avoir confiance ?
 
       – Je l’espère.
 
       – Ne craignez pas. C’est un homme bon », dit Jésus, pour les réconforter.
 
       Au dehors, le tumulte d’apaise. Il se passe un certain temps. Puis arrive un bruit sourd de pas et une petite lueur tremblante provient des profondeurs obscures.
 
       « Es-tu là, Maître ? dit une voix qui veut se faire entendre, tout en redoutant d’être entendue.
 
       – Oui, Zacharie.
 
       – Dieu soit loué [10] ! J’ai été long ? Il m’a fallu attendre que tous courent aux autres sorties. Viens, Maître… Tes apôtres… J’ai réussi à dire à Simon d’aller tous à Bethesda [11] et d’attendre là. D’ici, on descend… Malgré le peu de lumière, le chemin est sûr. On descend aux citernes… et on sort vers le Cédron. C’est un chemin ancien, pas toujours destiné à un bon usage. Mais cette fois, si… Et cela le sanctifie… »
 
       Ils ne cessent de descendre dans une obscurité que rompt seulement la lueur tremblotante de la lampe jusqu’à ce qu’une lumière différente apparaisse, au fond… et au-delà, une clarté verte qui paraît lointaine… Une grille, qui est presque une porte tant elle est massive et serrée, termine la galerie.
 
       « Maître, je t’ai sauvé. Tu peux partir, mais écoute-moi. Cesse de venir pendant quelque temps. Je ne pourrais pas toujours te rendre service sans être remarqué. Et… oublie, oubliez tous ce chemin et moi qui vous y ai conduits » dit Zacharie en faisant fonctionner des mécanismes à l’intérieur de la lourde porte et en l’entrouvrant juste pour laisser passer les personnes.
 
       Et il répète :
 
       « Oubliez, par pitié pour moi.
 
       – Ne crains rien. Aucun de nous ne parlera, et que Dieu soit avec toi en raison de ta charité. »
 
       Jésus lève la main pour la poser sur la tête inclinée du jeune homme.
 
       Il sort, suivi par ses cousins et les autres. Il se trouve sur un petit emplacement sauvage encombré de ronces qui peut à peine les recevoir tous, en face de l’Oliveraie. Un sentier de chèvres descend au milieu des ronces vers le torrent.
 
       « Allons. Nous allons remonter ensuite à la hauteur de la porte des Brebis et moi j’irai avec mes frères chez Joseph, tandis que vous irez chercher les autres à Bethesda avant de me rejoindre. Nous irons à Nobé demain soir après le crépuscule. »
 



[1] Probablement Claudia Procula, la femme de Ponce Pilate.

[2] Judas le Galiléen qui, à l'époque du recensement, s'empara de l'arsenal de Sephoris et se proclama roi. Il fallu que Varus, légat de Syrie, intervienne avec deux légions pour pacifier le pays. Il fit crucifier pour l'exemple 2.000 juifs sur les hauteurs du pays. (Cf. Actes 5,37).
 
[3] Siracide 48,9 – 1 Maccabées 2,58.
 
[4] Comme cela est expliqué en EMV 464.19.
 
[5] Livre des lamentations de Jérémie, chapitre 1 et suivants.
 
[6] Descendance d'Abraham, dans le récit de Genèse 16-17; Genèse 21, 8-20; œuvres d'Abraham, dans les récits de Genèse 12; 13; 15; Genèse 18; 22. Cité dans l'œuvre de Maria Valtorta depuis EMV 8.2 (en relation avec l'épisode bien connu du sacrifice de son fils Isaac), Abraham est dit être le père d'Israël et de tous les croyants. On appelle "sein d'Abraham" (note d’EMV 223.7) le lieu de l'attente bienheureuse de ceux qui meurent dans la fidélité au Dieu d'Israël. En plus de la note d’EMV 300.2 qui concerne Rébecca, l'épouse d'Isaac, on trouvera d'autres notes sur Abraham en EMV 509.4 ; EMV 514,3 ; EMV 635.18 et EMV 638.8.15.
 
[7] Genèse 16,1 et ss.
 
[8] Le territoire devenant trop petit pour deux, Abraham laisse choisir par Lot sa direction. Malencontreusement Lot choisi la région de Sodome, alors qu'Abraham s'établissait à Mambré près d'Hébron. (Genèse 13,5-10).
 
[9] C'est le nom que donne Dieu à Moïse quand il le lui demande. (Exode 3,13-14).
 
[10] Le texte original mentionne Jéovè. Maria Valtorta retranscrit aussi : Geovè, Geovà, Geavè ou Javé. En effet, les galiléens et les judéens prononçaient différemment le Nom divin, selon leurs accents. Les Galiléens prononçant Jéhovah et les Judéens Yahvé. Voir la notice sur le Nom divin.

[11] Bétesda, Béthesda, Bethzatha, Bézatha, Bethsaïda : piscine au nord du Temple, près de la Porte des Brebis.


 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-204.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/avant-abraham-moi-je-suis.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 13 Fév - 23:01

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28

508. Jean sera la lumière du Christ jusqu’à la fin des temps. Le petit Martial-Manassé accueilli par Joseph de Séphoris.

Ancienne édition : Tome 7, chapitre 205.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 508.

Vision du lundi 7 octobre 1946.

Vendredi 12 octobre 29
Jérusalem


      508.1 La maison de Joseph n’est pas celle de Joseph d’Arimathie, mais celle d’un vieux Galiléen de Séphoris, ami des fils d’Alphée et en particulier des plus âgés, car il était ami, — si ce n’est un peu parent — du vieil Alphée maintenant défunt. Et, si je ne me trompe, il est aussi en relations suivies avec les fils de Zébédée pour le commerce du poisson sec du lac de Génésareth, que l’on importe dans la capitale avec d’autres produits de Galilée chers aux Galiléens dépaysés à Jérusalem. C’est ce que je déduis de ce que disent à Thomas les deux fils d’Alphée et Jean.

      Jésus, de son côté, se tient un peu en arrière avec Manahen auquel il donne la charge de se rendre chez Joseph d’Arimathie et chez Nicodème pour les prier de le rejoindre. Il obéit sur-le-champ. Jésus se réunit encore un moment avec les trois hommes pour leur recommander d’être prudents dans leurs conversations « par amour pour le lévite qui les a mis en sécurité », puis il les quitte et s’éloigne à grands pas par un sentier…

      508.2 Mais Jean a vite fait de le rejoindre.

      « Pourquoi es-tu venu ?

      – Nous ne pouvions te laisser seul ainsi… et moi, je suis là.

      – Crois-tu donc que tu pourrais me défendre, à toi tout seul, contre une telle foule ?

      – Je n’en suis pas sûr. Mais au moins, je mourrais avant toi, et cela me suffirait.

      – Tu mourras très longtemps après moi, Jean, mais ne le regrette pas. Si le Très-Haut te laisse dans le monde, c’est pour que tu le serves, lui et son Verbe.

      – Mais après…

      – Après, tu serviras. Il te faudrait vivre bien longtemps pour me servir comme nos deux cœurs le voudraient. Mais, même une fois mort, tu me serviras.

      – Comment ferai-je, mon Maître ? Si je suis avec toi au Ciel, je t’adorerai. Mais je ne pourrai te servir sur la terre quand je l’aurai quittée…

      – Vraiment, tu crois cela ? Eh bien, moi, je te dis que tu me serviras jusqu’à ma nouvelle venue qui sera la dernière. Beaucoup de choses se dessécheront avant les derniers temps, comme des fleuves qui se tarissent et, après avoir été un beau cours d’eau bleue et salutaire, deviennent un terreau pulvérulent et une pierraille aride. Mais toi, tu seras encore le fleuve où résonne ma parole et qui reflète ma lumière. Tu seras le flambeau suprême qui restera pour rappeler le Christ, car tu seras une flamme toute spirituelle, et les derniers temps seront la lutte des ténèbres contre la lumière, de la chair contre l’esprit. Ceux qui sauront persévérer dans la foi trouveront force, espérance, réconfort dans ce que tu laisseras après toi, et qui sera encore toi… et qui surtout sera encore moi, parce que toi et moi nous nous aimons, et parce que, là où tu es, je suis, et là où je suis, tu es.

      J’ai promis à Pierre que l’Eglise, qui aura pour chef et pour base ma Pierre, ne serait pas tirée de ses gonds par les assauts répétés et de plus en plus féroces de l’Enfer ; mais j’ajoute maintenant que ce qui sera encore moi, et que tu laisseras comme lumière pour ceux qui cherchent la Lumière, ne sera pas détruit, malgré tous les efforts de l’Enfer pour l’anéantir. Qui plus est : même ceux qui croiront imparfaitement en moi, parce qu’en m’accueillant, ils n’accueilleront pas mon Pierre, seront toujours attirés à ton phare comme des nacelles sans pilotes et sans boussoles, qui se dirigent à travers leur tempête vers une lumière, car lumière veut dire aussi salut.

      – Mais que laisserai-je, mon Seigneur ? Je suis… pauvre… ignorant… Je n’ai que l’amour…

      – Voilà : tu laisseras l’amour. Et l’amour pour ton Jésus sera parole. Et beaucoup, beaucoup, même parmi ceux qui ne seront pas de mon Eglise, qui ne seront d’aucune église, mais qui chercheront une lumière et un réconfort, aiguillonnés par leurs esprits insatisfaits, par besoin que l’on compatisse à leurs peines, viendront à toi et me trouveront moi.

      – Je voudrais que les premiers qui te trouvent soient ces juifs cruels, ces pharisiens et ces scribes… Mais je ne sers pas à autant…

      – Rien ne peut entrer là où tout est rempli. Mais ne te décourage pas… Nous voici chez Joseph. Frappe et entrons. »

      508.3 C’est une maison haute et étroite, jouxtant un magasin bas et malodorant de marchandises entassées ; à côté, se trouve une cour assombrie par les murs qui la surplombent, une cour qui ressemble à celle d’une auberge comme étaient alors les auberges : des portiques pour les marchandises, des écuries pour les ânes, et des pièces ou de grandes chambres pour les hôtes. Ici, il y a une cour mal pavée, un bassin, deux écuries basses et sombres, un hangar rustique qui sert de portique, adossé à la maison et dont une porte donne dans le magasin. Puis, au-delà, il y a la maison dont j’ai parlé, vieille, sombre, avec une porte haute et étroite où l’on accède par trois marches de pierre usées.

      Jean frappe à la porte, et il attend jusqu’à ce que s’ouvre une fente étroite où, de la pénombre, apparaît le visage ridé d’une petite vieille qui scrute:

      « Oh ! Jean ! J’ouvre tout de suite. Que Dieu soit avec toi » dit la bouche qui appartient à ce visage ridé, et la porte s’ouvre avec un grand bruit de verrous.

      « Je ne suis pas seul, Marie. J’ai le Maître avec moi.

      – Paix à lui aussi, honneur de la Galilée, et heureux le jour qui mène les pieds du Saint dans les murs d’un véritable israélite. Entre, Seigneur. Je vais tout de suite avertir Joseph. Il est en train de faire les dernières livraisons, car le crépuscule arrive tôt pendant ce triste mois d’Etanim [1].

      – Laisse-le à son travail, femme. Nous resterons ici jusqu’à demain.

      – C’est une grande joie pour nous. Nous t’attendions depuis longtemps… Et même, il y a quelques jours, ton frère Joseph a envoyé demander des nouvelles de toi. Mais mon époux t’en dira plus. Voilà, tu peux rester ici… Et je te quitte, Seigneur, car je suis en train de finir le pain. Il faut qu’il soit cuit avant le crépuscule [2]. Si tu veux quelque chose, Jean sait où me trouver.

      – Va en paix. Il ne nous faut rien d’autre que l’hospitalité. »

      508.4 Ils restent seuls quelque temps. Puis, de derrière le rideau qui sépare la pièce d’un couloir, un petit visage brun se fait voir et jette un coup d’œil, craintif et curieux à la fois.

      « Qui est cet enfant ? demande Jésus à Jean.

      – Je ne sais pas, Seigneur. Il n’était pas là les autres fois. Il est vrai que depuis que je suis avec toi, je ne suis plus venu ici pour le compte de mon père. Viens ici, mon enfant. »

      Le petit s’avance à petits pas.

      « Qui es-tu ?

      – Je ne vais pas te le dire.

      – Pourquoi ?

      – Je ne veux pas m’entendre dire des paroles désagréables. Si tu les dis, je te réponds, et Joseph ne le veut pas.

      – Voilà du nouveau ! Maître, qu’en penses-tu ? »

      Jean rit, amusé par les raisons du petit bonhomme.

      Jésus aussi sourit, mais il lève la main pour attirer l’enfant et il l’observe. Puis il demande :

      « Et toi, tu sais qui je suis ?

      – Bien sûr que je le sais ! Tu es le Messie. Celui qui fera sien le monde entier, et alors on ne dira plus des paroles désagréables aux petits comme moi.

      – Tu n’es pas d’Israël, n’est-ce pas ?

      – Je suis circoncis… et cela m’a fait très mal. Mais… la faim aussi me faisait mal et… de ne plus avoir de maman… ni personne… Pourtant cela fait mal encore d’entendre qu’on… qu’on nous… »

      Il pleure, ayant perdu sa primitive hardiesse.

      « Ce doit être un orphelin étranger, Jean. Joseph a dû le recueillir par pitié, et l’a fait circoncire… » explique Jésus à Jean, étonné des raisons et des pleurs.

      508.5 Et Jésus soulève l’enfant et le prend sur ses genoux.

      « Dis-moi ton nom, petit. Je t’aime bien. Jésus aime tous les enfants et surtout les orphelins. J’en ai un, moi aussi, qui s’appelle Marziam et qui…

      – Et moi aussi, car moi (la petite voix n’est plus qu’un murmure à peine perceptible), car moi, je suis romain…

      – Je te l’avais bien dit ! Et tu es orphelin, n’est-ce pas ?

      – Oui… Je ne me souviens pas de mon père. Mais de maman, oui. Elle est morte alors que j’étais déjà grand… Je suis resté seul, et personne ne voulait de moi. Je suis venu de Césarée, à pied, derrière les voyageurs, après que le maître est parti au loin. Et j’avais tellement faim ! Et si je disais mon nom, je recevais des coups… Car mon nom permettait de comprendre d’où je viens, hein ? Et je suis venu ici pour une fête. Comme j’avais faim, je suis entré dans les écuries avec une caravane, et je me suis caché dans la paille pour manger l’avoine et les caroubes des ânes. Mais un âne m’a mordu et j’ai crié ; on est accouru et on voulait me battre, mais Joseph a dit : “ Non. Jésus a fait cela et il dit d’agir comme lui : donc moi, je prends l’enfant et j’en ferai un israélite. ” C’est pourquoi il m’a pris et soigné en même temps que Marie, et il m’a donné un autre nom, car le mien… Maman m’appelait Martial… »

      Ses larmes recommencent à couler.

      « Et moi, je t’appellerai Martial comme ta mère. C’est très bien, ce qu’a fait Joseph. Tu dois l’aimer beaucoup.

      – Oui, mais toi davantage. Lui-même dit toujours : “ Si un jour tu rencontres Jésus de Nazareth, le Messie, aime-le de tout ton être, car c’est par lui que tu as été sauvé de l’erreur. ” Marie disait à côté, à la servante, que le Messie était à la maison, et je suis venu voir celui qui m’a sauvé.

      – Je ne savais pas que Joseph avait fait cela. Il était si… pingre… Jamais je n’aurais pensé qu’il pourrait… Pauvre Joseph ! Avare et brouillé avec ses enfants. Ils n’ont pas respecté ses cheveux blancs.

      – Je le sais. Mais, vois-tu ? Peut-être qu’en cet enfant il se renouvelle… et oublie. Dieu le récompense ainsi de ce qu’il a fait pour l’enfant. Comment t’appelles-tu, maintenant ?

      – J’ai un vilain nom. Il ne me plaît que parce qu’il commence comme le mien : je m’appelle Manassé !… Mais Marie, qui comprend, m’appelle « Man ».

      L’enfant dit cela avec un d’un air si désolé que Jésus et Jean ne peuvent s’empêcher de sourire.

      Mais Jésus, pour le consoler, explique :

      « Manassé est un nom dont le sens est très doux pour nous. Il signifie : le Seigneur m’a fait oublier toute douleur. Joseph te l’a donné, car il a voulu indiquer que tu lui feras oublier toute sa douleur ; et c’est bien ce que tu vas faire, mon enfant, par reconnaissance pour lui. Toi-même, par ton nouveau nom, tu te dis que le Seigneur t’a tant aimé qu’il t’a rendu un père, une mère et une maison. N’est-ce pas ?

      « Oui. Expliqué ainsi, oui… Mais Joseph affirme que je dois oublier même ma maison. Moi, je ne veux pas oublier ma maman ! »

      Jésus regarde Jean et Jean regarde le Maître, et au-dessus de la petite tête brune, il y a tout un discours de regards…

      « On n’oublie pas une mère, mon enfant. Joseph s’est mal expliqué, ou plutôt tu as mal compris. Il voulait sûrement dire que tu dois oublier toute la douleur de ton passé, la douleur de ta maison, parce que maintenant tu as celle-ci et tu dois être heureux.

      – Ah ! vu comme ça, oui. Marie est bonne et me rend heureux. En ce moment même, elle me prépare des fouaces. Je vais voir si elles sont cuites et je t’en apporte à toi aussi. »

      Et il glisse des genoux de Jésus pour courir hors de la pièce. Le bruit de ses petits pieds nus se perd dans le long couloir.

      « Toujours cette tendance à la dureté, même chez les meilleurs d’entre nous ! Prétendre l’impossible ! Ils sont plus sévères que Dieu, les enfants de son peuple ! Pauvre enfant ! Peut-on peut-être prétendre qu’un enfant oublie sa mère, sous prétexte qu’il est désormais circoncis ? Je le dirai à Joseph.

      – Je ne savais vraiment pas qu’il avait fait cela. Mon père, comme beaucoup de Galiléens, descend ici aux fêtes, et il ne m’en a pas parlé, comme s’il ignorait tout… 508.6 Mais j’entends la voix de Joseph… »

      Jésus se lève et Jean l’imite, prêts à saluer, avec les honneurs qui lui sont dus, le maître de maison qui entre et qui, à son tour, s’abîme en profondes courbettes et finit par s’agenouiller aux pieds de Jésus.

      « Lève-toi, Joseph. Je suis venu, tu le vois.

      – Pardonne-moi de t’avoir fait attendre. Le vendredi est toujours un grand jour ! Salut à toi, Jean. As-tu des nouvelles de Zébédée ?

      – Non, pas depuis la fête des Tentes, où je l’ai vu.

      – Alors sache qu’il va bien, et de même Salomé. Ce sont des nouvelles fraîches de ce matin, avec le dernier envoi de poisson. Et à toi aussi, Maître, je puis dire que tes parents se portent tous bien à Nazareth. Le lendemain du sabbat ceux qui arrivent repartiront. Si vous voulez envoyer des nouvelles… Etes-vous seuls ?

      – Non. D’ici peu les autres seront ici…

      – Bien ! Il y a de la place pour tout le monde. C’est une maison fidèle. Je regrette que Marie soit occupée avec le pain et moi avec les ventes. On vous laisse ainsi seuls… Nous ne t’avons pas fait honneur et nous ne t’avons pas tenu compagnie comme il convient pour un hôte, et un hôte important !

      – Un fils de Dieu comme toi, Joseph. Ceux qui suivent la Loi de Dieu sont tous égaux.

      – Eh non ! Toi, c’est toi. Je ne suis pas obtus comme ces juifs. Tu es le Messie !

      – Cela, par la volonté de Dieu. Mais en ce qui concerne ma volonté et mon devoir, je suis comme toi, un fils de la Loi.

      – Eh ! ceux qui te calomnient ne savent pas dire et faire ce que tu dis maintenant et ce que tu fais toujours !

      – Mais toi, tu mets en pratique une bonne partie de mon enseignement. 508.7 J’ai vu l’enfant, Joseph…

      – Ah ! Tu l’as vu ? Il est venu ! Il sait pourtant que je ne veux pas ! Puisque c’est toi, j’en suis heureux… mais il aurait été possible que ce ne soit pas toi…

      – Et alors, que serait-il arrivé ?

      – C’est que… cela ne me plaît pas, voilà !

      – Pourquoi, Joseph ? Pour qu’on ne fasse pas ton éloge ? Ta pensée est louable, mais l’enfant pourrait penser que tu as honte de le montrer…

      – Et c’est vrai !

      – C’est vrai ? Et pourquoi ? Explique-moi cela.

      – Voilà : l’enfant n’est pas né hébreux de parents hébreux, pas même de prosélytes, pas même d’une femme de notre pays et d’un père païen. C’est l’enfant de deux Romains, affranchis dans la maison d’un Romain de Césarée Maritime. Il a gardé l’enfant tant qu’il y est resté. Mais, à son départ, il ne s’en est pas occupé et l’enfant est resté seul. Les Hébreux, naturellement, ne l’ont pas accueilli. Les Romains… Ce que sont les Romains, tu le sais… Et surtout ces Romains de Césarée ! L’enfant, en mendiant…

      – Oui, je le sais. Il est arrivé ici et tu l’as accueilli. Dieu a signé ton acte au Ciel.

      – J’en ai fait un circoncis ! Et j’ai changé son nom. Le sien était païen, idolâtre ! Mais je ne veux pas qu’il se montre, et qu’il se rappelle son passé.

      – Pourquoi, Joseph ? » demande doucement Jésus, avant d’ajouter : « L’enfant en souffre. Il se rappelle sa mère. C’est compréhensible !

      – Mais il est compréhensible aussi, mon désir de n’être pas critiqué pour avoir accueilli un…

      – Un innocent. Rien de plus que cela, Joseph. Pourquoi crains-tu le jugement des hommes, quand un jugement plus haut, celui de Dieu, approuve ton acte, parce qu’il est saint ? Pourquoi avoir honte, par respect humain ou par crainte de représailles, d’une bonne action ? Pourquoi veux-tu donner à l’enfant un exemple de duplicité tel que celui qui ressort du changement de nom, d’étouffer son passé par crainte qu’il te porte préjudice ? Pourquoi veux-tu inculquer à l’enfant le mépris du père et de la mère ? Tu vois, Joseph, tu as fait une action digne d’éloge, mais tu la couvres de poussière avec ces… idées imparfaites. Tu as imité l’un de mes gestes. Tu as accueilli mes paroles. C’est bien.

      Mais pourquoi ne m’imites-tu pas parfaitement, en accomplissant franchement cette œuvre et en disant : “ Oui, l’enfant était romain et moi, je n’en ai pas éprouvé du dégoût parce qu’il est fils du Créateur, tout comme nous. Seulement, j’ai voulu qu’il suive notre Loi et je l’ai circoncis ” ? Vraiment… La circoncision véritable va arriver : elle s’exercera sur le cœur des hommes et elle emportera l’anneau étranglant de la triple concupiscence. Par conséquent, même si l’enfant était resté un enfant jusqu’à ce moment… Mais je ne veux pas t’en faire reproche. Tu as bien agi, toi qui es juif en faisant de lui un juif. Toutefois, laisse-lui son nom. A l’avenir combien de Martial, de Caius, de Félix, de Cornélius, de Claudius et ainsi de suite, appartiendront au Christ et au Ciel ! C’est possible pour lui aussi, qui ne sait pas ce que veut dire hébreu et païen, et qui arrivera à sa majorité [3] quand la véritable et nouvelle Loi sera fondée avec un nouveau Temple et de nouveaux prêtres ; de plus, il y arrivera, non comme tu le penses, mais examiné par Dieu et trouvé digne de son nouveau Temple. Laisse-lui le nom que sa mère lui a donné. C’est encore pour lui une caresse maternelle. Je comprends ce que tu as voulu dire en l’appelant Manassé, mais laisse-lui le nom de Martial. Et à ceux qui t’interrogent, dis simplement : “ Oui, c’est Martial. Presque comme le disciple du Christ à qui ma mère a donné son nom [4]. ” Sois courageux dans le bien, Joseph, et tu seras grand, très grand.

      – Maître… comme tu veux. Je ne veux pas te contrarier. Et tu crois que… j’ai bien agi aussi comme homme ?

      – Tu as bien agi. Ta douleur t’a rendu bon. Aussi tout est bien de ce que tu as fait, et cet acte est bon. »

      Des coups frappés à la porte de la rue interrompent la conversation.




[1] Etanim est l'autre nom du mois de Tishri. Sa période va de la mi-septembre à la mi-octobre habituellement. Marie de Séphoris est donc fondée à parler des jours qui raccourcissent. Compte-tenu de l'avance enregistrée, la mi-octobre correspond, cette année, au mois suivant : Boul. L'année à venir, année de la Passion, aura un treizième mois pour recaler le calendrier sur le soleil. Nous avons conjecturé que le 12 octobre estimé par Jean Aulagnier, correspondait au 15 Boul. Ceci nous engage, non l'œuvre de Maria Valtorta.

[2] Avant que ne commence le sabbat

[3] 12 ans révolus

[4] Marziam, qui d'ailleurs prendra ultérieurement le nom de Martial




*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-205.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/jean-sera-la-lumiere-du-christ-jusqu-a-la-fin-des-temps.html
Anayel
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Dim 14 Fév - 21:22

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
509. Le vieux prêtre Matân, accueilli avec les Apôtres et les disciples qui ont fui du Temple. Le petit Martial et la nouvelle circoncision.
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 206.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 509.
 
Vision du mardi 8 octobre 1946
 
Vendredi 12 octobre 29
Jérusalem
 
       509.1 En entrant, Pierre a le même geste d’accablement qu’au Jourdain après la traversée du gué de Beth-Abara [1] : il se laisse tomber, comme épuisé, sur le premier siège qu’il trouve et se prend la tête dans les mains. Les autres ne sont pas aussi abattus, mais, à des degrés divers, ils paraissent changés, pâles, ils ont l’air égaré. Les fils d’Alphée, Jacques, fils de Zébédée et André ne répondent pour ainsi dire pas à la salutation de Joseph de Séphoris et de sa femme qui arrivent avec une vieille servante, du pain chaud et diverses nourritures.
 
       Marziam a des traces de larmes sous les yeux. Isaac accourt auprès de Jésus et lui saisit la main, la caresse en murmurant :
 
       « C’est toujours comme la nuit du massacre [2]… Sauvé une fois de plus. Ah ! mon Seigneur, jusqu’à quand ? Jusqu’à quand pourras-tu te sauver ? »
 
       C’est ce cri qui fait ouvrir les bouches et tous, dans la confusion, parlent, racontent les mauvais traitements, les menaces, les peurs qu’ils ont eues…
 
       509.2 Un autre coup à la porte.
 
       « Oh ! ils ne nous auraient pas suivis ? Je leur avais bien dit, de venir par petits groupes !… s’exclame Judas.
 
       – Cela aurait mieux valu, oui. Nous les avons toujours sur nos talons. Mais désormais… » approuve Barthélemy.
 
       Joseph, bien que de mauvais gré, va personnellement regarder par le judas tandis que sa femme dit :
 
       « De la terrasse, vous pouvez descendre sur les étables, et de là dans le jardin de derrière. Je vais vous faire voir… »
 
       Mais pendant qu’elle s’éloigne, son mari s’écrie : « Joseph l’Ancien ! Quel honneur ! »
 
       Et il ouvre la porte pour faire entrer Joseph d’Arimathie.
 
       « Paix à toi, Maître. J’y étais et j’ai vu… Manahen m’a rencontré quand je sortais du Temple, écœuré à mort. Ne pas pouvoir intervenir, ne rien pouvoir faire pour t’être davantage utile et… Ah ! tu es là toi aussi, Judas de Kérioth ? Tu pourras agir, toi qui as tant d’amis ! Tu ne t’en es pas senti le devoir, toi qui es son apôtre ?
 
       – Tu es disciple, toi…
 
       – Non. Si je l’étais, je serais à sa suite comme les autres. Je suis l’un de ses amis [3].
 
       – Cela revient au même.
 
       – Non. Lazare aussi est son ami, mais tu ne le qualifierais pas de disciple…
 
       – Dans l’âme, si.
 
       – Ceux qui n’appartiennent pas à Satan sont tous des disciples de sa parole parce qu’ils sentent qu’elle est parole de sagesse. »
 
       La petite prise de bec entre Joseph et Judas retombe pendant que Joseph de Séphoris, qui comprend seulement maintenant que quelque chose de grave s’est passé, questionne l’un ou l’autre avec intérêt et avec des gestes de douleur.
 
       « Il faut le dire à Joseph, fils d’Alphée ! Il faut le dire, et je vais m’en charger… Que veux-tu de moi, Joseph ? demande-t-il en se tournant vers l’Ancien, qui lui touche l’épaule comme pour l’interroger.
 
       – Rien. Je voulais seulement me féliciter avec toi de ta bonne mine. Voilà un bon israélite, fidèle et juste en tout. Eh ! moi, je le sais. On peut dire de lui que Dieu l’a éprouvé et connu… »
 
       On frappe encore une fois. Les deux Joseph se dirigent ensemble vers la porte pour l’ouvrir, et je vois Joseph d’Arimathie se pencher pour murmurer quelque chose à l’oreille de l’autre, qui a un mouvement de vive surprise et se tourne un instant pour regarder les apôtres. Puis il ouvre la porte.
 
       509.3 Nicodème et Manahen entrent, suivis de tous les bergers disciples présents à Jérusalem, c’est-à-dire Jonathas et ceux qui étaient déjà disciples de Jean-Baptiste [4]. Ils sont accompagnés du prêtre Jean et d’un autre très âgé, ainsi que de Nicolaï. En dernier lieu arrivent Nikê avec la jeune fille que Jésus lui a confiée, et Annalia avec sa mère. Elles enlèvent le voile qui cachait leur visage, et on voit leurs visages troublés.
 
       « Maître ! Mais que t’arrive-t-il ? J’ai appris… D’abord par les gens avant de le savoir par Manahen… La ville est pleine de cette rumeur, comme une ruche l’est de bourdonnements, et ceux qui t’aiment s’empressent de te chercher là où ils pensent te trouver. Joseph, ils sont sûrement venus chez toi aussi… Moi-même, je suis allé dans les maisons de Lazare… C’en est trop ! Comment t’es-tu sauvé ?
 
       – La Providence a veillé sur moi. Que les disciples ne pleurent pas mais bénissent l’Eternel et fortifient leur cœur. Et à vous tous, grâces et bénédictions. L’amour et la justice ne sont pas tout à fait morts en Israël, et cela me réconforte.
 
       – Oui. Mais ne va plus au Temple, Maître. N’y va pas, n’y va pas avant longtemps ! »
 
       Tous sont à l’unisson et le “ n’y va pas ” angoissé se répercute entre les murs robustes de la vieille maison comme une voix d’avertissement suppliant.
 
       Le petit Martial, caché je ne sais où, entend ce bruit et, poussé par la curiosité, vient passer son petit visage à travers le rideau entrebâillé. A la vue de Marie, il court se réfugier dans ses bras par crainte des reproches de Joseph de Séphoris. Mais Joseph est bien trop agité et occupé à écouter tel ou tel, à donner conseils, approbations, et ainsi de suite, pour s’occuper de lui, et il ne s’aperçoit de sa présence que lorsque l’enfant, auquel la vieille Marie a dit quelque chose, va vers Jésus et l’embrasse en lui jetant les bras autour du cou. Jésus l’entoure d’un bras pour l’attirer à lui tout en répondant à plusieurs qui lui conseillent ce qu’il y a de mieux à faire.
 
       « Non. Je ne bouge pas d’ici. Allez vous-mêmes chez Lazare, qui m’attendait, pour lui dire qu’il m’est impossible de venir. Moi qui suis galiléen et depuis des années un ami de la famille, je reste ici jusqu’à demain soir. Je verrai alors où aller…
 
       – Tu dis toujours cela, et puis tu y retournes. Mais nous ne te laisserons plus partir. Moi, du moins. Je t’ai vraiment cru perdu… » déclare Pierre.
 
       Deux larmes se forment au coin de ses yeux exorbités.
 
       509.4 « On n’a jamais vu cela. Et ça suffit. C’est ce qui m’a décidé. Si tu ne me refuses pas… Je suis trop âgé pour l’autel, désormais, mais encore assez solide pour mourir pour toi. Et je mourrai, s’il le faut, entre le vestibule et l’autel, comme le sage Zacharie [5], ou bien comme Onias, le défenseur du Temple et du Trésor [6], je mourrai hors de l’enceinte sacrée à laquelle j’ai consacré ma vie. Mais toi, tu m’ouvriras un lieu plus saint ! Oh ! je ne peux voir l’abomination ! Pourquoi mes yeux âgés ont-ils dû en voir autant ? L’abomination vue par le prophète [7] est déjà à l’intérieur des murs, et elle monte, elle monte comme le courant d’eau d’une crue qui s’apprête à submerger une ville ! Elle monte, elle monte. Elle envahit les cours et les portiques, dépasse les marches, elle pénètre toujours plus loin ! Elle monte ! Elle monte ! Elle frappe déjà contre le Saint ! L’eau boueuse lèche les pierres qui pavent le lieu sacré ! Les couleurs précieuses disparaissent ! Le pied du Prêtre en est souillé ! Sa tunique en est détrempée ! L’Ephod s’en imprègne ! Les pierres du Rational en sont voilées et on ne peut plus en lire les mots ! Ah ! Les eaux de l’abomination montent au visage du grand-prêtre et le maculent, la Sainteté du Seigneur est sous une croûte de boue, la tiare est comme un linge tombé dans un étang marécageux. La fange ! La fange ! Mais monte-t-elle de dehors, ou bien déborde-t-elle du sommet du mont Moriah sur la ville et sur tout Israël ? Père Abraham ! Père Abraham ! Ne voulais-tu pas allumer là le feu du sacrifice pour que resplendisse l’holocauste de ton cœur fidèle ? [8] C’est aujourd’hui la fange qui bouillonne, là où devait être le feu ! Isaac est parmi nous, et le peuple l’immole. Mais si pure est la Victime… si pure est la Victime… les sacrificateurs sont souillés. Anathème sur nous ! Sur la montagne, le Seigneur verra l’abomination de son peuple !… Ah ! »
 
       Et le vieillard, qui est avec le prêtre Jean, s’effondre sur le sol en se couvrant le visage et en faisant entendre les pleurs désolés d’un pauvre homme.
 
       « Je te l’avais amené… Il y a si longtemps qu’il le désire… Mais, aujourd’hui, après ce qu’il a vu, personne ne pouvait le retenir… Le vieux Matân (ou Natân) a souvent l’esprit prophétique, et si la vue de ses pupilles se voile peu à peu, celle de son esprit s’illumine de plus en plus. Accepte mon ami, Seigneur, dit le prêtre Jean.
 
       – Je ne repousse personne. Lève-toi, prêtre, et élève ton esprit. En haut, il n’y a pas de fange. Et la fange n’atteint pas celui qui sait se tenir en haut. »
 
       Avant de se lever, le vieillard saisit respectueusement l’extrémité du vêtement de Jésus et le baise.
 
       509.5 Les femmes, surtout Annalia, pleurent encore d’émotion dans leur long voile, et les paroles du vieil homme augmentent leurs larmes. Jésus les appelle, et la tête baissée, elles viennent de leur coin auprès du Maître. Si Nikê et la mère d’Annalia arrivent à dissimuler leurs pleurs et à les étouffer, la jeune disciple sanglote vraiment sans se soucier de ceux qui l’observent avec des sentiments divers.
 
       « Pardonne-lui, Maître. Elle te doit la vie et elle t’aime. Elle ne peut imaginer qu’on te fasse du mal. Et puis elle est restée si… seule et si… triste depuis que…, dit la mère.
 
       – Oh ! non ! Ce n’est pas cela ! Seigneur ! Maître ! Mon Sauveur ! Moi… moi… »
 
       Annalia n’arrive pas à parler, d’une part à cause des sanglots, et d’autre part par honte, ou pour un autre motif.
 
       « Elle a craint des représailles en tant que disciple. C’est sûrement pour ça. Beaucoup s’en vont pour cette raison… dit Judas.
 
       – Oh ! non ! Encore moins! Tu ne comprends rien, homme, ou bien tu prêtes aux autres tes pensées. Mais toi, Seigneur, tu sais ce qui me fait pleurer. J’ai craint que tu ne sois mort et que tu ne te sois pas rappelé ta promesse… »
 
       Elle achève sur un soupir, après avoir souligné avec force les premiers mots pour se révolter contre l’insinuation de Judas.
 
       Jésus lui répond :
 
       « Je n’oublie jamais, ne crains rien. Rentre tranquillement chez toi attendre l’heure de mon triomphe et de ta paix. Va. Le soleil va bientôt se coucher. Retirez-vous, femmes, et que la paix soit avec vous.
 
       – Seigneur, je voudrais ne pas te quitter… dit Nikê.
 
       – L’obéissance est amour.
 
       – C’est vrai, Maître. Mais pourquoi pas moi aussi comme Elise ?
 
       – Parce que tu m’es utile ici, comme elle à Nobé. Va, Nikê, va ! Que des hommes accompagnent les femmes pour qu’on ne les importune pas. »
 
       509.6 Manahen et Jonathas s’apprêtent à obéir, mais Jésus arrête Jonathas pour lui demander :
 
       « Tu retournes donc en Galilée ?
 
       – Oui, Maître, le lendemain du sabbat. Mon maître m’y envoie.
 
       – Tu as de la place sur le char ?
 
       – Je suis seul, Maître.
 
       – Dans ce cas, tu prendras avec toi Marziam et Isaac. Toi, Isaac, tu sais ce que tu dois faire. Et toi aussi, Marziam…
 
       – Oui, Maître » répondent les deux hommes, Isaac avec son doux sourire, Marziam les lèvres tremblantes et des sanglots dans la voix.
 
       Jésus lui fait une caresse et Marziam, oubliant toute retenue, s’abandonne sur sa poitrine en s’exclamant :
 
       « Te quitter… maintenant que tous te persécutent !… Ah ! mon Maître ! Je ne te verrai plus jamais !… Tu as été tout mon Bien. J’ai tout trouvé en toi !… Pourquoi me renvoies-tu ? Laisse-moi mourir avec toi ! Que veux-tu que m’importe désormais la vie, si je ne t’ai pas, toi ?
 
       – Ce que j’ai dit à Nikê vaut pour toi : l’obéissance est amour.
 
       509.7 – Je pars ! Bénis-moi, Jésus ! »
 
       Jonathas s’éloigne avec Manahen, Nikê et les trois autres femmes. Les autres disciples, eux aussi, s’en vont par petits groupes.
 
       C’est seulement quand la pièce, qui auparavant était comble, se vide presque, que l’on remarque que Judas est absent. Plusieurs s’en étonnent, car il était là peu avant et n’a reçu aucun ordre.
 
       « Il est peut-être allé faire des achats pour nous » dit Jésus pour empêcher tout commentaire.
 
       Puis il continue à parler avec Joseph d’Arimathie et Nicodème, les seuls qui soient restés en plus des onze apôtres et de Marziam, qui se tient auprès de Jésus avec le désir avide d’en profiter pendant ces derniers moments en sa compagnie. Et Jésus se trouve ainsi entre le jeune Marziam et l’enfant Martial, tous deux bruns, maigrichons, pareillement malheureux dans leur enfance et pareillement recueillis au nom de Jésus par deux bons israélites.
 
       Joseph de Séphoris et sa femme se sont délicatement éclipsés pour laisser au Maître une entière liberté.
 
       509.8 Nicodème demande :
 
       « Mais qui est cet enfant ?
 
       – C’est Martial, un enfant que Joseph a adopté.
 
       – Je l’ignorais.
 
       – Personne, ou presque, ne le sait.
 
       – Cet homme est très humble. Un autre aurait mis son action en avant, remarque Joseph.
 
       – Tu crois cela ?… Va, Martial. Fais visiter la maison à Marziam… » dit Jésus.
 
       Une fois les deux garçons partis, il reprend :
 
       « Tu es dans l’erreur, Joseph. Comme il est difficile de juger avec justice !
 
       – Mais, Seigneur ! Recueillir un orphelin — car c’est certainement un orphelin — et ne pas s’en vanter, c’est sûrement de l’humilité.
 
       – L’enfant, comme son nom l’indique, n’est pas d’Israël…
 
       – Ah ! maintenant, je comprends ! Il fait bien, dans ce cas, de le tenir caché.
 
       – Mais il a été circoncis…
 
       – Peu importe. Tu sais… Jean d’En-Dor l’était aussi… Il fut néanmoins une cause de réprobation. Joseph, galiléen par surcroît, pourrait avoir des… ennuis malgré la circoncision. Il y a tant d’orphelins aussi en Israël… Il est certain qu’avec ce nom… et cet aspect…
 
       – Comme vous êtes tous “ Israël ”, même les meilleurs ! Même lorsque vous faites le bien, vous ne comprenez pas et ne savez pas être parfaits ! Vous ne comprenez pas encore qu'unique est le Père des Cieux, et que toute créature est à lui ? Vous ne comprenez pas encore que l’homme ne peut avoir qu’une unique récompense ou un unique châtiment, qui soit vraiment récompense ou châtiment ? Pourquoi vous rendre esclave de la peur des hommes ? Mais c’est le fruit de la corruption de la Loi divine, tellement retouchée, tellement trafiquée par des réglementations humaines, au point de rendre fermée et obscure même la pensée du juste qui la pratique. Dans la Loi mosaïque, et par conséquent divine, dans celle pré-mosaïque, et uniquement morale, ou venue par inspiration céleste, serait-il écrit que l’homme qui n’appartenait pas à Israël ne pouvait venir en faire partie ? Ne lit-on pas dans la Genèse : “ Au bout de huit jours, que parmi vous tout enfant mâle soit circoncis, aussi bien celui qui est né dans la maison que celui que l’on a acheté, même s’il n’est pas de votre race ” [9] ? Cela avait été dit.
 
       Tout ce que l’on a ajouté vient de vous. Je l’ai expliqué à Joseph, et je vous l’explique à vous. Bientôt, l’ancienne circoncision n’aura plus beaucoup d’importance. Une nouvelle — bien plus parfaite, et sur une partie plus noble du corps — viendra la remplacer. Mais tant que dure la première et que, par fidélité au Seigneur, vous la faites subir au mâle né de vous, ou que vous avez adopté, ne rougissez pas de l’avoir fait sur la chair d’une autre race. La chair appartient au tombeau, l’âme appartient à Dieu. On circoncit la chair, parce qu’il est impossible de circoncire ce qui est spirituel. Mais c’est sur l’âme que resplendit le signe saint. Or l’esprit appartient au Père de tous les hommes. Méditez cela. »
 
       509.9 Après un temps de silence, Joseph d’Arimathie se lève :
 
       « Je m’en vais, Maître. Tu viens demain chez moi.
 
       – Non, il vaut mieux que je n’y vienne pas.
 
       – Alors chez moi, dans la maison sur le chemin de l’Oliveraie pour Béthanie. C’est paisible, et…
 
       – Non plus. J’irai à l’Oliveraie, pour prier… Mon âme recherche la solitude. Veuillez m’excuser.
 
       – Comme tu veux, Maître. Et… ne va pas au Temple. Paix à toi.
 
       – Paix à vous. »
 
       Les deux hommes s’éloignent…
 
       « Je voudrais savoir où est parti Judas ! » s’écrie Jacques, fils de Zébédée. « J’aurais bien présumé que c’est chez les pauvres, mais la bourse est ici !
 
       – Ne vous en occupez pas… Il va revenir… »
 
       Marie, femme de Joseph, entre avec deux lampes, car la lumière ne traverse plus la plaque épaisse de mica qui sert de lucarne à la pièce, et les deux garçons reviennent.
 
       « Je suis content de te laisser avec quelqu’un qui a presque mon nom. Ainsi, quand tu l’appelleras, tu penseras à moi » dit Marziam.
 
       Jésus l’attire contre lui.
 
       A son tour, entre Judas, auquel la servante a ouvert : hardi, souriant, l’air décidé !
 
       « Maître, j’ai voulu voir… La tempête est apaisée. Et j’ai accompagné les femmes… Comme elle est peureuse, cette jeune fille ! Je ne t’ai rien dit, car tu m’en aurais empêché, et moi, je voulais voir s’il y avait du danger pour toi. Mais personne n’y pense plus. Le sabbat rend les chemins déserts.
 
       – C’est bien. Maintenant, nous restons en paix ici et demain…
 
       – Tu ne voudrais pas déjà aller au Temple ! crient les apôtres.
 
       – Non. A notre synagogue, en bons Galiléens fidèles. »



[1] Cf EMV 502.
 
[2] Massacre des innocents décrété par Hérode lors de la naissance de Jésus.
 
[3] L'un de ses amis : comme en EMV 505.1, où est expliquée la différence entre disciple et ami de Jésus, Mais "l'ami" peut être "plus qu'un disciple par le cœur", comme le dit Jésus à Lazare en EMV 135.2 ; c'est aussi celui "qui fait ce que je fais", comme il le lui répète en EMV 581.5. La différence entre disciple et apôtre est expliquée en EMV 165.8.
 
[4] JeanMatthias et Siméon.
 
[5] Ce fils du grand prêtre Yehoda reprocha publiquement à Israël d'avoir abandonné Dieu. Il fut lapidé sur l'ordre du roi Joas, dans le Temple même entre "le vestibule et l'autel" (2 Chroniques 24,20-24).
 
[6] Onias III, grand prêtre sous le règne des séleucides, défendit le trésor du Temple contre la convoitise d'Héliodore. Une grande ferveur populaire emplit Jérusalem. Au moment du sacrilège, une apparition terrassa Héliodore qui ne du son salut qu'à la prière d'Onias (2 Maccabées 3, 4-40).
 
[7] Cf. Daniel 11, 31.
 
[8] Le Moriah est le mont où est bâti le Temple et où Abraham s'apprêtait à sacrifier son fils (Genèse 22,2).
 
[9] Genèse 17,12.



 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-206.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/le-petit-martial-et-la-nouvelle-circoncision.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 15 Fév - 22:20

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
510. Guérison d’un aveugle-né, provoquée par une manœuvre de Judas.
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 207.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 510.
 
Vision du jeudi 10 octobre 1946
 
Samedi 13 octobre 29
Jérusalem

 
       510.1 Jésus, ses apôtres et Joseph de Séphoris sortent et prennent la direction de la synagogue. La journée, limpide et sereine, réjouit comme une promesse de printemps après les jours venteux et couverts précédents — de vrais jours d’hiver. Beaucoup d’habitants de Jérusalem sont donc dans les rues, les uns allant à la synagogue, d’autres en revenant ou arrivant d’ailleurs, certains avec leur famille afin de sortir de la ville pour profiter du soleil dans la campagne. Par la Porte d’Hérode, visible de la maison de Joseph de Séphoris, on voit les gens sortir des murs pour aller se distraire joyeusement à l’extérieur de la ville  et plonger dans la verdure, dans l’espace, dans la liberté, en dehors des rues étroites serrées entre les hautes maisons. Je crois que la ceinture champêtre qui entourait Jérusalem avait été voulue spontanément par les habitants, qui voulaient concilier la distance du chemin permis le sabbat avec leur désir d’air libre et de soleil, qu’ils prenaient sur les routes, et non seulement sur les terrasses des maisons.
 
       Mais Jésus ne se dirige pas vers la Porte d’Hérode. Au contraire, il lui tourne le dos pour aller vers l’intérieur de la ville. Mais à peine a-t-il eu le temps de faire quelques pas sur la rue plus large, où débouche le petit chemin qui donne accès à la maison de Joseph de Séphoris, que Judas attire son attention sur un jeune homme qui s’avance vers eux, en tâtant les murs avec un bâton, son visage sans yeux levé un peu haut, avec la démarche particulière aux aveugles. Ses habits sont pauvres mais propres. Il doit être bien connu à Jérusalem, car plusieurs le montrent du doigt et certains lui disent :
 
       « Homme, aujourd’hui tu t’es trompé de route. Tu as dépassé tous les chemins du mont Moriah, tu es déjà à Bézéta [1].
 
       – Aujourd’hui, je ne demande pas d’argent, répond l’aveugle avec un sourire et en continuant vers le nord de la ville.
 
       510.2 – Maître, observe-le. Il a les paupières soudées, ou plutôt il n’a pas de paupières. Son front rejoint ses joues sans aucune cavité et il semble ne pas avoir de globes oculaires dessous. Il est né ainsi, le malheureux, et il mourra de même sans avoir vu une seule fois la lumière du soleil ni le visage d’un homme. Maintenant, Maître, dis-moi : pour être ainsi puni, il a certainement péché. Mais s’il est né aveugle, comme c’est certain, comment peut-il avoir péché avant de naître ? Ce sont ses parents qui ont péché, et Dieu les a punis en le faisant naître comme ça ? »
 
       Les autres apôtres, Isaac et Marziam, se serrent près de Jésus pour entendre sa réponse. Deux habitants de Jérusalem [2] de condition aisée qui se tenaient un peu en arrière de l’aveugle pressent le pas, comme attirés par la haute taille de Jésus, qui domine la foule. Parmi eux se trouve Joseph d’Arimathie : il ne s’approche pas, mais, adossé à un portail élevé sur deux marches, il tourne les yeux vers tous les visages pour les observer.
 
       On entend clairement la réponse de Jésus dans le silence qui s’est fait :
 
       « Ni lui ni ses parents n’ont péché plus que ne pèche tout homme : peut-être moins encore, car la pauvreté est souvent un frein au péché. Mais il est né ainsi pour que, une fois encore, soient manifestées en lui la puissance et les œuvres de Dieu. Je suis la Lumière venue dans le monde pour que les hommes, qui ont oublié Dieu ou perdu son image spirituelle, voient et se souviennent, et pour que ceux qui cherchent Dieu, ou lui appartiennent déjà, soient confirmés dans la foi et dans l’amour. Le Père m’a envoyé pour que, dans le temps qui est encore accordé à Israël, je complète la connaissance de Dieu en Israël et dans le monde. Il me faut donc accomplir les œuvres de Celui qui m’a envoyé pour témoigner que je peux ce que lui peut, parce que je suis un avec lui, et pour que le monde sache et voie que le Fils n’est pas dissemblable du Père ; ainsi pourra-t-il croire en moi pour ce que je suis. Après viendra la nuit pendant laquelle on ne peut plus travailler, les ténèbres, et celui en qui mon signe et la foi en moi ne se seront pas gravés, ne pourra plus le faire dans l'obscurité et la confusion, la douleur, la désolation et la ruine qui couvriront ces lieux et étourdiront les âmes par le débordement des peines. Mais, tant que je suis dans le monde, je suis lumière et témoignage, parole, chemin et vie, sagesse, puissance et miséricorde. 510.3 Va donc chercher l’aveugle et amène-le ici.
 
       – André, vas-y, je veux rester là et voir ce que fait le Maître » répond Judas en montrant Jésus.
 
       Celui-ci s’est penché sur le chemin poussiéreux, a craché sur un petit tas de terre et est en train de délayer avec le doigt la poussière dans la salive pour former une boulette de boue. Pendant qu’André, toujours serviable, va chercher l’aveugle — qui est sur le point de tourner dans le petit chemin où se trouve la maison de Joseph de Séphoris —, Jésus étend la boue sur ses deux index en restant ainsi, mains tendues, comme le prêtre pendant la messe. Cependant, Judas quitte sa place pour dire à Matthieu et à Pierre :
 
       « Venez ici, vous qui n’êtes pas grands, vous verrez mieux. »
 
       Puis il se met derrière tout le monde, presque caché par les fils d’Alphée et par Barthélemy, qui sont grands.
 
       André revient en tenant par la main l’aveugle, qui s’époumone :
 
       « Je ne veux pas d’argent. Laisse-moi partir. Je sais où se trouve celui qu’on appelle Jésus, et je vais pour demander… »
 
       – C’est Jésus qui est devant toi » lui dit André en s’arrêtant devant le Maître.
 
       Contrairement à son habitude, Jésus ne pose aucune question à l’homme. Il lui étend aussitôt sur les paupières closes un peu de la boue qu’il a sur les index, et il lui ordonne :
 
       « Maintenant, rends-toi le plus vite possible à la citerne de Siloé, sans t’arrêter pour parler avec quelqu’un. »
 
       L’aveugle, le visage barbouillé de boue, reste un instant perplexe et il ouvre les lèvres pour parler, puis il referme la bouche et obéit. Il commence par marcher lentement comme s’il était pensif ou bien déçu, puis il presse le pas en rasant le mur avec son bâton, de plus en plus vite, autant que le peut un aveugle, peut-être davantage, comme s’il se sentait guidé…
 
       Les deux habitants de Jérusalem ont un rire sarcastique et partent en hochant la tête. Joseph d’Arimathie — et cela m’étonne — les suit sans même saluer le Maître, ce qui le fait revenir sur ses pas, c’est-à-dire vers le Temple, alors qu’il venait de là. Ainsi, tant l’aveugle que les deux hommes et Joseph d’Arimathie, se dirigent vers le sud de la ville, tandis que Jésus tourne vers l’ouest. Et je le perds de vue, car la volonté du Seigneur me fait suivre l’aveugle et ceux qui l’escortent.
 
       510.4 Après avoir passé Bézéta, ils s’engagent tous dans la vallée qui sépare le mont Moriah du mont Sion — il me semble l’avoir entendu appeler Tyropéôn à d’autres occasions — et la parcourent dans toute sa longueur jusqu’à Ophel, le longent, sortent sur la route qui mène à la fontaine de Siloé, en restant toujours dans cet ordre : d’abord l’aveugle qui doit être connu dans ce quartier populaire, puis les deux hommes, et en dernier lieu, à quelque distance, Joseph d’Arimathie.
 
       Joseph s’arrête près d’une maisonnette insignifiante, à demi cachée par une haie de buis qui fait saillie en contournant son jardinet. Mais les deux hommes s’avancent tout près de la fontaine. Ils observent l’aveugle qui s’approche avec précaution du vaste bassin et, en tâtant le mur humide, plonge une main qu’il retire toute ruisselante. Puis il se lave les yeux à trois reprises. La troisième fois, il presse aussi sur son visage l’autre main en laissant tomber son bâton et en poussant un cri comme s’il souffrait.
 
       Puis il retire lentement ses mains et son cri de douleur se fait cri de joie :
 
       « Oh ! Très-Haut ! Je vois ! »
 
       Il se jette à terre, comme vaincu par l’émotion, met ses mains sur ses yeux pour les protéger, les serre contre ses tempes, à la fois impatient de voir, mais gêné par la lumière, tout en répétant :
 
       « J’y vois ! J’y vois ! C’est donc cela, la terre ! La lumière ! L’herbe, dont je ne connaissais que la fraîcheur… »
 
       Il se lève tout en restant courbé, comme quelqu’un qui porte un poids, le poids de sa joie, va au ruisselet qui évacue le trop-plein d’eau et le regarde couler, scintillant et riant… Il murmure :
 
       « Et ceci, c’est l’eau… Voilà ! C’est ainsi que je la sentais entre mes doigts (il y plonge la main) froide et coulante, mais je ne la connaissais pas… Ah ! qu’elle est belle ! Comme tout est beau ! »
 
       Il lève la tête et voit un arbre… il s’en approche, le touche, tend la main, attrape une petite branche, l’observe en riant. Puis, abritant ses yeux de la main, il regarde le ciel, le soleil, et deux larmes tombent de ses paupières vierges qu’il a ouvertes pour contempler le monde… Il baisse alors les yeux sur l’herbe où une fleur se balance sur sa tige et aperçoit son image que reflète l’eau du ruisselet. Il se dévisage et dit :
 
       « Voilà à quoi je ressemble ! »
 
       Il observe avec étonnement une tourterelle venue boire un peu plus loin, puis une chevrette qui arrache les dernières feuilles d‘un rosier sauvage, enfin une femme qui vient à la fontaine avec un bébé sur son sein. Et cette femme lui rappelle sa mère, sa mère au visage inconnu. Alors, levant les bras au ciel, il s’écrie :
 
       « Sois béni, Très-Haut, pour la lumière, pour ma mère et pour Jésus ! »
 
       Puis il part en courant, abandonnant là son bâton désormais inutile…
 
       Les deux hommes n’ont pas attendu aussi longtemps. Dès qu’ils ont remarqué que le miraculé avait recouvré la vue, ils sont partis en courant vers la ville. Joseph, au contraire, reste jusqu’à la fin et quand l’aveugle — qui ne l’est plus — passe devant lui pour entrer dans le dédale des ruelles du quartier populeux d’Ophel, à son tour il quitte sa place et revient sur ses pas, vers la ville, tout pensif…
 
       510.5 Le quartier d’Ophel, toujours bruyant, est maintenant en pleine ébullition. On court à droite, à gauche, on questionne, on répond.
 
       « Vous l’aurez confondu avec quelqu’un d’autre…
 
       – Non, te dis-je. Je lui ai demandé : “ Est-ce bien toi, Sidonia surnommé Bartolmaï ? ” et il m’a répondu : “ Oui, c’est moi. ” Je voulais l’interroger pour savoir comment cela s’était produit, mais il est parti en courant.
 
       – Où est-il maintenant ?
 
       – Chez sa mère, certainement.
 
       – Qui ? Qui l’a vu ? demandent des gens qui accourent.
 
       – Moi, moi, répondent plusieurs.
 
       – Mais comment est-ce arrivé ?
 
       – … Je l’ai vu qui courait sans bâton avec deux yeux au visage et j’ai dit : “ Regarde ! Voilà comment serait Bartolmaï si… ”
 
       – Je t’assure que j’en suis toute tremblante. En entrant, il a crié : “ Mère, je te vois ! ”
 
       – C’est une grande joie pour ses parents. Maintenant, il pourra aider son père et gagner sa vie…
 
       – La pauvre femme ! Ce fut pour elle une telle joie qu’elle s’en est trouvée mal. Ah ! c’est extraordinaire ! J’étais allée lui demander un peu de sel et…
 
       – Courons chez lui, pour savoir… »
 
       Joseph d’Arimathie se trouve pris au milieu de ce vacarme et, je ne sais si c’est par curiosité ou par esprit d’imitation, il suit le courant et aboutit dans une impasse, qui arriverait au Cédron sinon. La foule s’y presse, empêchant d’entendre à cause de ses cris le grondement du torrent, gonflé par les pluies d’automne.
 
       Joseph y arrive quand, d’une autre ruelle qui débouche dans l’impasse, surgissent les deux hommes de tout à l’heure avec trois autres : un scribe, un prêtre et un troisième que son vêtement ne me permet pas d’identifier. Ils se fraient un passage avec autorité et cherchent à entrer dans la maison bondée.
 
       Celle-ci comprend une vaste cuisine noire comme du goudron, avec un coin qui en est séparé par une cloison rudimentaire au-delà de laquelle se trouvent un grabat et une porte qui donne dans une autre pièce avec un lit plus grand. Une porte, ouverte dans le mur opposé, laisse voir un jardinet de quelques mètres carrés. Et c’est tout.
 
       510.6 Appuyé à une table, l’aveugle guéri répond à ceux qui l’interrogent, tous de pauvres gens comme lui, le petit peuple de Jérusalem, de ce quartier qui est peut-être le plus pauvre de tous. Sa mère, debout auprès de lui, le regarde et pleure en s’essuyant les yeux avec son voile. Le père, un homme usé par le travail, se passe dans la barbe une main agitée par un tremblement.
 
       L’entrée dans la maison est impossible, même aux docteurs autoritaires juifs, et les cinq hommes doivent écouter du dehors les paroles de l’aveugle guéri.
 
       « Comment ils se sont ouverts ? Cet homme, que l’on appelle Jésus, m’a barbouillé les yeux avec de la terre mouillée, et il m’a dit : “ Va te laver à la fontaine de Siloé. ” J’y suis allé, je me suis lavé et mes yeux se sont ouverts, et j’ai vu.
 
       – Mais comment as-tu fait pour trouver le Rabbi ? Tu disais toujours que tu étais malheureux, car jamais tu ne le rencontrais, même quand il passait par ici pour se rendre chez Jonas à Gethsémani. Et aujourd’hui, maintenant qu’on ne sait jamais où il est…
 
       – Eh ! hier soir, un de ses disciples [3] est venu et il m’a donné deux pièces de monnaie en me disant : “ Pourquoi ne cherches-tu pas à voir ? ” Je lui ai répondu : “ J’ai cherché, mais je ne trouve jamais ce Jésus qui accomplit des miracles. Je le cherche depuis qu’il a guéri Annalia, qui est de mon quartier, mais quand je vais quelque part, il est ailleurs… ” Il a repris : “ Je suis l’un de ses apôtres, et ce que, moi, je lui demande, il le fait. Viens demain à Bézéta et cherche la maison de Joseph le Galiléen, celui du poisson sec, Joseph de Séphoris, près de la Porte d’Hérode et du tournant de la place, du côté de l’orient, et tu verras que tôt ou tard, il passera par là ou entrera dans la maison. Alors moi, je t’indiquerai au Maître. ” J’ai répondu : “ Mais demain, c’est le sabbat. ” Je voulais dire qu’il ne ferait rien ce jour-là [4]. Il m’a déclaré : “ Si tu veux guérir, c’est le moment, car après on quitte la ville et tu ne sais pas si tu pourras le rencontrer. ” J’ai repris : “ Je sais qu’on s’en prend à lui. Je l’ai entendu depuis les portes de l’enceinte du Temple où je vais mendier. C’est pourquoi je suis sûr que, maintenant qu’il est ainsi persécuté ainsi, il ne voudra pas l’être davantage, et il ne me guérira pas un jour de sabbat. ” Il m’a alors répliqué : “ Fais ce que je te dis, et le jour du sabbat tu verras le soleil ”.
 
       Et j’y suis allé. Qui ne l’aurait pas fait ? Si c’est son apôtre qui l’affirme ! Il a d’ailleurs ajouté : “ Je suis celui que Jésus écoute le plus, et je viens exprès, car tu me fais pitié et je veux que, après avoir été tellement bafouée, sa puissance resplendisse. C’est toi, un aveugle de naissance, qui la feras resplendir. Je sais ce que je dis. Viens et tu verras. ” Alors je m’y suis rendu. Je n’étais pas encore arrivé à la maison de Joseph qu’un homme m’a pris par la main — mais d’après sa voix ce n’était pas celui d’hier — et il m’a proposé : “ Viens avec moi, mon frère. ” Je ne voulais pas le suivre, je croyais qu’il voulait me donner du pain et de l’argent, peut-être des vêtements, et je lui demandais de me laisser partir parce que je savais où trouver celui qu’on appelle Jésus. L’homme m’a répondu : “ Voici Jésus. Il est devant toi. ” Mais je n’ai rien vu, puisque j’étais aveugle. J’ai senti deux doigts couverts de terre mouillée qui me touchaient des deux côtés et j’ai entendu une voix qui disait : “ Va vite à Siloé et lave-toi. Ne parle à personne. ” C’est ce que j’ai fait. Mais j’étais découragé, car j’espérais voir aussitôt, et j’ai failli croire que c’était une plaisanterie de jeunes gens sans cœur. Je me refusais presque à y aller, mais j’ai entendu une sorte de voix me dire : “ Espère et obéis ” ; alors je me suis rendu à la fontaine, je m’y suis lavé, et j’ai vu. »
 
       Le jeune homme s’arrête, comme en extase, pour repenser à la joie de sa première vision…
 
       510.7 « Faites sortir le garçon. Nous voulons l’interroger » crient les cinq hommes.
 
       Le jeune se fraie un chemin et sort sur le seuil.
 
       « Où est celui qui t’a guéri ?
 
       – Je l’ignore, répond le jeune homme auquel un ami a murmuré : “ Ce sont des scribes et des prêtres. ”
 
       – Comment l’ignores-tu ? Tu disais tout à l’heure que tu le savais. Ne mens pas aux docteurs de la Loi et au prêtre ! Malheur à celui qui cherche à tromper les magistrats du peuple !
 
       – Je ne trompe personne. Ce disciple m’a dit : “ Il est dans cette maison ”, et c’était vrai, car j’en étais tout proche quand j’ai été interpellé et conduit à lui. Mais où il est maintenant, je ne le sais pas. Le disciple m’a dit qu’ils s’en allaient. Il pourrait déjà avoir franchi les portes.
 
       – Mais où allait-il ?
 
       – Qu’est-ce que j’en sais ? ! Peut-être en Galilée… A voir la façon dont on le traite ici !…
 
       – Imbécile et impoli ! Fais attention à la façon dont tu parles, lie du peuple ! Je t’ai demandé par quelle route il partait.
 
       – Mais comment voulez-vous que je le sache, puisque j’étais aveugle ? Un aveugle peut-il dire où va quelqu’un d’autre ?
 
       – C’est bien. Suis-nous.
 
       – Où voulez-vous me conduire ?
 
       – Chez les chefs des pharisiens.
 
       – Pourquoi ? Qu’ont-ils à faire avec moi ? Seraient-ce eux qui m’ont guéri, pour que je doive les remercier ? Lorsque j’étais aveugle et que je mendiais, mes mains n’ont jamais touché leur argent, mes oreilles n’ont jamais entendu le moindre mot de pitié de leur part, et mon cœur n’a jamais connu leur amour. Que dois-je leur dire ? Il n’y en a qu’un à qui je doive dire “ merci ” après mon père et ma mère, qui pendant tant d’années m’ont aimé malheureux. Et c’est ce Jésus qui m’a guéri en m’aimant de tout son cœur, comme l’ont fait mes parents. Je refuse d’aller chez les pharisiens. Je reste avec ma mère et mon père pour profiter de la vue de leurs visages, et eux de mes yeux qui sont nés maintenant, après tant de printemps depuis celui où je suis né, mais sans voir la lumière.
 
       – Assez parlé ! Viens et suis-nous.
 
       – Oh non ! Je ne viens pas ! Avez-vous jamais essuyé une larme à ma mère humiliée par mon malheur, ou une goutte de sueur à mon père épuisé par le travail ? Aujourd’hui, je peux le faire par mon aspect, et je devrais les quitter et vous suivre ?
 
       – Nous te l’ordonnons. Ce n’est pas toi qui commandes, mais le Temple et les chefs du peuple. Si l’orgueil d’être guéri te ferme l’intelligence pour te le rappeler, nous nous en chargeons. Avance ! Marche !
 
       – Mais pourquoi devrais-je venir ? Qu’attendez-vous de moi ?
 
       – Que tu fasses une déposition. C’est le sabbat. Or cet acte a été accompli pendant le sabbat. Il doit être enregistré à cause du péché : le tien et celui de ce satan.
 
       – C’est vous qui êtes satan, c’est vous qui êtes péché ! Et je devrais venir déposer contre celui qui m’a fait du bien ? Vous êtes ivres ! Je viendrai au Temple pour bénir le Seigneur, et rien de plus. Je suis resté pendant bien des d’années dans l’ombre de la cécité, mais mes paupières closes n’ont produit de ténèbres que pour mes yeux. Mon intelligence, elle, est restée dans la lumière, dans la grâce de Dieu, et elle me dit que je ne dois pas porter tort à l’unique Saint qui soit en Israël.
 
       – Assez, homme ! Ignores-tu que des châtiments sont prévus pour ceux qui s’opposent aux magistrats ?
 
       – Moi, je ne sais rien. Je suis ici et j’y reste. Et vous n’avez pas intérêt à me nuire. Ne voyez-vous pas qu’Ophel tout entier est de mon côté ?
 
       – Oui ! Oui ! Laissez-le ! Chacals ! Dieu le protège. Ne le touchez pas ! Dieu est avec les pauvres ! Dieu est avec nous, affameurs et hypocrites ! »
 
       Les gens crient et menacent dans l’une de ces manifestations spontanées du peuple qui sont les explosions de l’indignation des humbles envers ceux qui les oppriment, ou d’amour pour ceux qui les protègent. Et ils crient :
 
       « Malheur à vous, si vous frappez notre Sauveur, l’ami des pauvres, le Messie trois fois saint ! Malheur à vous ! On n’a pas craint les colères d’Hérode, ni celles des Chefs, quand on a voulu. Nous ne craignons pas les vôtres, vieilles hyènes aux mâchoires édentées ! Chacals aux ongles coupés ! Puissants inutiles ! Rome ne veut pas de tumulte et n’opprime pas le Rabbi, car lui est paix, mais elle vous connaît. Hors d’ici ! Hors des quartiers de ceux que vous opprimez par des dîmes plus fortes que leurs ressources, afin d’avoir de l’argent pour satisfaire vos désirs et conclure des marchés honteux. Descendants de Jason [5] ! De Simon [6] [7] ! Tortionnaires des vrais Eléazar [8], des saints Onias. Vous méprisez les prophètes ! Hors d’ici ! [9] Fichez le camp ! »
 
       Le tumulte ne cesse de croître.
 
       510.8 Joseph d’Arimathie, écrasé contre un muret, jusqu’alors spectateur attentif, mais inactif des faits, monte d’un saut sur le muret avec une agilité insoupçonnable chez un homme âgé et, de plus, empêtré dans ses vêtements et ses manteaux. Et, debout, il s’écrie :
 
       « Silence, habitants. Ecoutez Joseph l’Ancien ! »
 
       Une, deux, dix têtes se tournent dans la direction du cri. A la vue de Joseph, on crie son nom. Il doit être connu et jouir de la faveur populaire, car les hurlements d’indignation font place aux cris de joie :
 
       « Joseph l’Ancien est là ! Vive lui ! Paix et longue vie au juste ! Paix et bénédiction au bienfaiteur des malheureux ! Silence, pour que Joseph parle ! Silence ! »
 
       Le silence s’établit non sans mal et, pendant quelques minutes, on entend le grondement du Cédron au-delà de l’impasse. Toutes les têtes se tournent vers Joseph, oubliant ce qui les tenait dans la direction opposée : les cinq malheureux et imprévoyants qui ont provoqué le tumulte.
 
       « Habitants de Jérusalem, peuple d’Ophel, pourquoi vous laissez-vous aveugler par les soupçons et la colère ? Pourquoi manquer au respect et aux coutumes, vous qui êtes toujours si fidèles aux lois des pères ? Que craignez-vous ? Peut-être que le Temple soit un Moloch [10] qui ne rend pas ce qu’il accueille ? Peut-être que vos juges soient tous aveugles, plus que votre ami, aveugles de cœur et sourds en matière de justice ? N’est-il pas d’usage qu’un fait prodigieux soit déposé, écrit et conservé par qui de droit pour les Chroniques d’Israël ? Permettez donc que, même pour l’honneur du Rabbi que vous aimez, le miraculé monte faire une déposition pour l’œuvre accomplie. Vous hésitez encore ? Eh bien, je me porte garant qu’il n’arrivera aucun mal à Bartolmaï, et vous savez que je ne mens pas. Comme un fils qui m’est cher, je l’accompagnerai là-haut, et je vous le ramènerai ici ensuite. Fiez-vous à moi, et ne faites pas du sabbat un jour de péché en vous révoltant contre vos chefs.
 
       – Il a raison ! Il ne le faut pas, nous pouvons le croire. C’est un juste. Dans les bonnes délibérations du Sanhédrin, il y a toujours sa voix. »
 
       Les gens changent d’avis et finissent par crier : « A toi, oui, notre ami, nous te le confions ! » Et en s’adressant au jeune homme : « Va ! N’aie pas peur. Avec Joseph d’Arimathie, tu es en sécurité comme avec ton père, et davantage. » Et ils ouvrent leurs rangs pour que l’ancien aveugle puisse rejoindre Joseph, qui est descendu de sa tribune improvisée. Au moment où il passe, ils lui soufflent : « Nous venons nous aussi. Ne crains rien ! »
 
       Joseph, dans ses riches vêtements de laine luxueuse, pose une main sur l’épaule du miraculé, et se met en route. La tunique bise et usée du jeune homme, son petit manteau, frottent l’ample vêtement rouge foncé et le riche manteau encore plus foncé du vieux membre du Sanhédrin. Les cinq hommes suivent, puis la foule innombrable d’Ophel…
 
       510.9 Les voilà au Temple, après avoir traversé les rues centrales, attirant l’attention d’une foule de gens qui se montrent au doigt l’ancien aveugle en disant :
 
       « Mais c’est l’aveugle qui mendiait ! Maintenant, il a des yeux ! Mais peut-être est-ce quelqu’un qui lui ressemble ! Non, c’est sûrement lui, et ils le conduisent au Temple. Allons nous rendre compte ! »
 
       Le cortège ne cesse de grossir, jusqu’au moment où les murs du Temple les engloutissent tous.
 
       Joseph conduit le jeune homme dans une salle — mais ce n’est pas le Sanhédrin — où se trouvent de nombreux scribes et pharisiens. Joseph entre, et avec lui Bartolmaï et les cinq hommes. Les habitants d’Ophel sont repoussés dans la cour.
 
       « Voici l’homme. Je vous l’ai amené moi-même : sans être vu, j’ai assisté à sa rencontre avec le Rabbi et à sa guérison, et je puis vous affirmer que ce fut tout à fait fortuit de la part du Rabbi. L’homme, vous l’entendrez dire vous aussi, fut amené ou plutôt invité à se rendre auprès du Rabbi, par Judas de Kérioth, que vous connaissez. Et j’ai moi-même entendu — tout comme ces deux-là, car ils étaient présents — comment ce fut Judas qui engagea Jésus de Nazareth à accomplir ce miracle. Maintenant je dépose ici que, s’il y a lieu de punir quelqu’un, ce n’est pas l’aveugle ni le Rabbi, mais l’homme de Kérioth qui — Dieu voit si je mens en disant ce que pense mon intelligence — est le seul auteur du fait, puisqu’il l’a provoqué par une manœuvre préméditée. C’est tout ce que j’ai à dire.
 
       – Ta déclaration n’annule pas la faute du Rabbi. Si son disciple pèche, le Maître ne doit pas pécher. Or il l’a fait en guérissant un jour de sabbat. Il a accompli une œuvre servile.
 
       – Cracher par terre n’est pas faire œuvre servile, et toucher les yeux d’un autre n’est pas faire œuvre servile. Moi aussi, je touche l’homme et je ne crois pas pécher.
 
       – Il a accompli un miracle le jour du sabbat : c’est en cela que consiste le péché.
 
       – Honorer le sabbat par un miracle est une grâce de Dieu et de sa bonté. C’est son jour. Et le Tout-Puissant ne peut-il pas le célébrer par un miracle qui fait resplendir sa puissance ?
 
       – Nous ne sommes pas ici pour t’écouter, toi. Tu n’es pas accusé. C’est l’homme que nous voulons interroger. 510.10 A toi de répondre. Comment as-tu obtenu la vue ?
 
       – Je l’ai déjà dit, et ceux-là m’ont entendu. Le disciple de ce Jésus m’a dit hier : “ Viens et je te ferai guérir. ” J’ai obéi, et j’ai senti qu’on me mettait de la boue ici et j’ai entendu une voix qui me disait d’aller à Siloé et de m’y laver. Je l’ai fait, et j’y vois.
 
       – Mais sais-tu qui t’a guéri ?
 
       – Bien sûr que je le sais ! Jésus. Je vous l’ai dit.
 
       – Mais sais-tu exactement qui est Jésus ?
 
       – Moi, je ne sais rien. Je suis un pauvre et un ignorant, et il y a peu de temps, j’étais aveugle. Cela, je le sais et je sais que lui m’a guéri ; s’il a pu le faire, Dieu est certainement avec lui.
 
       – Ne blasphème pas ! Dieu ne peut être avec quelqu’un qui n’observe pas le sabbat » crient certains.
 
       Mais Joseph et les pharisiens Eléazar, Jean et Joachim font remarquer :
 
       « Et pourtant un pécheur ne peut accomplir de tels prodiges.
 
       – Vous aussi êtes séduits par ce possédé ?
 
       – Non : nous sommes justes, et nous disons que si Dieu ne peut être avec celui qui agit un jour de sabbat, il n’est pas possible non plus qu’un homme sans l’aide de Dieu fasse qu’un aveugle-né y voie » déclare calmement Eléazar.
 
       Les trois autres approuvent.
 
       « Et le démon, où le mettez-vous ? hurlent, hargneux, les mauvais.
 
       – Je ne puis croire, et vous non plus, que le démon puisse accomplir des œuvres capables de faire louer le Seigneur, intervient le pharisien Jean.
 
       – Qui donc le loue ?
 
       – Le jeune homme, ses parents, Ophel tout entier et moi avec eux, ainsi que tous les hommes justes qui ont une sainte crainte de Dieu » réplique Joseph.
 
       Les mauvais, tout penauds et ne sachant qu’objecter, s’en prennent à Sidonia, dit Bartolmaï :
 
       « Et toi, que penses-tu de celui qui t’a ouvert les yeux ?
 
       – Pour moi, c’est un prophète, et plus grand qu’Elie avec le fils de la veuve de Sarepta [11]. Car si Elie a fait revenir l’âme dans l’enfant, ce Jésus m’a donné ce que je n’avais jamais perdu, ne l’ayant jamais eu : la vue. Et si, en un éclair, il m’a fait des yeux avec rien qu’un peu de boue, alors qu’en neuf mois ma mère, avec sa chair et son sang n’a pas réussi à me les faire, il doit être grand comme Dieu, qui avec de la boue a créé l’homme.
 
       – Va-t’en ! Fiche le camp ! Blasphémateur ! Menteur ! Vendu ! »
 
       Et ils chassent Bartolmaï comme si c’était un damné.
 
       510.11 « L’homme ment. Ce ne peut être vrai. Tous s’accordent à dire qu’un aveugle de naissance ne peut guérir. C’est peut-être quelqu’un qui ressemble à Bartolmaï, et que le Nazaréen a préparé… ou bien… Bartolmaï n’a jamais été aveugle. »
 
       Devant cette affirmation surprenante, Joseph d’Arimathie rétorque :
 
       « Que la haine aveugle, on le sait depuis le temps de Caïn [12], mais qu’elle rende stupide, on l’ignorait encore ! Imaginez-vous possible d’arriver au plein développement de la jeunesse en feignant d’être aveugle pour… attendre un éventuel événement éclatant et très éloigné ? Croyez-vous réellement que les parents de Bartolmaï ne connaissent pas leur fils ou se prêtent à ce mensonge ?
 
       – L’argent peut tout, or ils sont pauvres.
 
       – Le Nazaréen l’est plus qu’eux.
 
       – Tu mens ! Il lui passe par les mains des sommes de satrape.
 
       – Mais elles ne s’y arrêtent pas un instant. Ces sommes appartiennent aux pauvres. Elles servent pour le bien, pas pour le mensonge.
 
       – Comme tu le défends ! Et tu es un des Anciens !
 
       – Joseph a raison. Il faut dire la vérité, quelle que soit la charge que l’homme occupe, déclare Eléazar.
 
       510.12 – Courez rappeler l’aveugle et ramenez-le ici, et que d’autres aillent chercher ses parents et les fassent venir » s’écrie Elchias en ouvrant la porte toute grande et en donnant ses ordres à des hommes qui attendent dehors.
 
       Sa bouche est presque couverte de bave tant la colère l’étrangle.
 
       Les uns courent d’un côté, les autres de l’autre. Le premier à revenir est Sidonia, dit Bartolmaï, étonné et ennuyé. Ils le fichent dans un coin, en le dévisageant comme une meute de chiens qui guettent un gibier…
 
       Puis, après un bon moment, voilà qu’arrivent ses parents, entourés de la foule.
 
       « Vous, entrez ! Les autres, dehors ! »
 
       Le couple entre. Epouvantés, ils voient leur fils tout au fond, en bonne forme, mais en état d’arrestation. La mère gémit :
 
       « Mon fils ! Dire que ce devait être un jour de fête pour nous !
 
       – Ecoutez-nous. Cet homme est votre fils ? demande avec rudesse un pharisien.
 
       – Oui, c’est notre fils ! Qui d’autre voulez-vous que ce soit ?
 
       – Vous en êtes vraiment sûrs ? »
 
       Le père et la mère sont tellement abasourdis par la question que, avant de répondre, ils se regardent.
 
       « Répondez !
 
       – Noble pharisien, peux-tu penser qu’un père et une mère puissent se tromper à propos de leur enfant ? dit humblement le père.
 
       – Mais… pouvez-vous jurer que… oui… que, contre une certaine somme d’argent, il ne vous a pas été demandé de dire qu’il s’agit de votre fils, alors que c’est quelqu’un qui lui ressemble ?
 
       – Demandé de dire ? Et par qui donc ? Jurer ? Mais mille fois, et sur l’autel et le nom de Dieu, si tu veux ! »
 
       Et ils l’affirment avec tant d’assurance que le plus obstiné en serait démonté. Mais les pharisiens ne se démontent pas ! Ils demandent :
 
       « Mais votre fils n’était pas né aveugle ?
 
       – Si, il était né comme ça. Avec les paupières closes et par dessous le vide, rien…
 
       – Alors comment donc y voit-il maintenant ? Il a des yeux sur lesquels s’ouvrent des paupières. Vous ne voudriez tout de même pas prétendre que des yeux peuvent naître ainsi, comme des fleurs au printemps, et qu’une paupière s’ouvre comme le fait le calice d’une fleur !… lance un autre pharisien avec un rire sarcastique.
 
       – Nous savons que cet homme est vraiment notre fils depuis presque trente ans, et qu’il est né aveugle, mais comment il y voit aujourd’hui, nous ne le savons pas, et nous ignorons qui lui a ouvert les yeux. Du reste, demandez-le-lui. Il n’est pas idiot et ce n’est plus un enfant. Il est bien assez grand. Interrogez-le, et il vous répondra.
 
       – Vous mentez, s’écrie un des deux hommes qui avaient toujours suivi l’aveugle. Lui, dans votre maison, a raconté comment il a été guéri et par qui. Pourquoi dites-vous l’ignorer ?
 
       – Nous étions tellement abasourdis par la surprise que nous n’avons pas entendu » répondent les parents en s’excusant.
 
       510.13 Les pharisiens s’adressent à Sidonia dit Bartolmaï :
 
       « Avance ici, toi, et rends gloire à Dieu si cela t’est possible ! Tu ne sais pas que celui qui t’a touché les yeux est un pécheur ? Tu ne le sais pas ? Eh bien, apprends-le. Nous te l’affirmons, nous qui le savons.
 
       – Bah ! Dites ce que vous voulez ! Pour moi, si c’est un pécheur, je l’ignore. Je sais seulement qu’avant, j’étais aveugle, et que maintenant, je vois clair.
 
       – Mais que t’a-t-il fait ? Comment t’a-t-il ouvert les yeux ?
 
       – Je vous l’ai déjà dit et vous m’avez entendu. Vous voulez l’entendre de nouveau ? Pourquoi ? Peut-être désirez-vous devenir ses disciples ?
 
       – Imbécile ! Sois, toi, un disciple de cet homme. Nous, nous sommes disciples de Moïse. Nous connaissons tout de Moïse, et nous savons que Dieu lui a parlé. Mais de cet homme, nous ne savons rien, ni d’où il vient, ni qui il est, et aucun prodige du Ciel ne l’indique comme prophète.
 
       – C’est justement cela qui est extraordinaire : que vous ne sachiez pas d’où il est et que vous disiez qu’aucun prodige n’indique qu’il soit juste. Mais lui m’a ouvert les yeux, ce qu’aucun de nous en Israël n’a jamais pu faire, pas même l’amour d’une mère et les sacrifices de mon père. Une chose pourtant que nous savons tous, aussi bien vous que moi, c’est que Dieu n’exauce pas le pécheur, mais celui qui craint Dieu et accomplit sa volonté. On n’a jamais entendu dire que quelqu’un, dans le monde entier, ait pu ouvrir les yeux à un aveugle-né : mais cela, Jésus l’a fait. S’il n’était pas de Dieu, cela lui aurait été impossible.
 
       – Tu es né entièrement dans le péché, tu as l’esprit difforme autant et plus que ne l’était ton corps, et tu prétends nous faire la leçon ? Va-t’en, misérable avorton, et fais-toi satan avec ton séducteur. Dehors ! Dehors, tout le monde, plèbe imbécile et pécheresse ! »
 
       Et ils les jettent dehors, fils, père et mère, comme si c’étaient trois lépreux.
 
       510.14 Tous trois s’éloignent rapidement, suivis de leurs amis. Mais une fois l’enceinte franchie, Sidonia se retourne et dit :
 
       « Restez ! Et dites ce que vous voulez. La vérité, c’est que j’y vois et j’en loue Dieu. Et satan, c’est vous qui le serez, et non pas le Bon qui m’a guéri.
 
       – Tais-toi, mon fils ! Tais-toi ! Pourvu que cela ne nous porte pas tort !… gémit la mère.
 
       – Oh ! ma mère ! L’air de cette salle t’a empoisonné l’âme, toi qui dans ma douleur m’enseignais à louer Dieu, et qui, maintenant dans la joie, ne sais pas le remercier et qui crains les hommes ? Si Dieu nous a tant aimés, toi et moi, au point de nous accorder ce miracle, ne saura-t-il pas nous défendre contre une poignée d’hommes ?
 
       – Ton fils a raison, femme. Allons à notre synagogue pour louer le Seigneur, puisqu’ils nous ont chassés du Temple. Et dépêchons-nous, avant la fin du sabbat… »
 
       Pressant le pas, ils se perdent dans les chemins de la vallée.
 



[1] Voir le plan schématique de Jérusalem.
 
[2] Habitants de Jérusalem (gerosolimitani dans le texte original, hiérosolomytains dans l’édition de 1985).
 
[3] Judas. Voir le chapitre précédent. Joseph d'Arimathie est au courant.
 
[4] C'est là le piège tendu par le Temple avec la complicité de Judas : une guérison obtenue pendant le sabbat. Cele explique pourquoi Jésus ne se fait pas connaître de Sidonia : il ne pourra témoigner.
 
[5] 2 Maccabées 4,7-9 : Séleucus ayant quitté cette vie et Antiochus, surnommé Epiphane, lui ayant succédé, Jason, frère d'Onias, usurpa le pontificat : il promit au roi, au cours d'une entrevue, 360 talents d'argent et 80 talents à prélever sur quelque autre revenu. Il s'engageait en outre à payer 150 autres talents si le roi lui donnait pouvoir d'établir un gymnase et une éphébie et de dresser la liste des Antiochéens de Jérusalem.
 
[6] 2 Maccabées 3,4-6 : Mais un certain Simon, de la tribu de Bilga, institué prévôt du Temple, se trouva en désaccord avec le grand prêtre sur la police des marchés de la ville. Comme il ne pouvait l'emporter sur Onias, il alla trouver Apollonius, fils de Thraséos, qui était à cette époque le stratège de Cœlé-Syrie et de Phénicie. Il rapporta que le trésor de Jérusalem regorgeait de richesses indicibles au point que la quantité des sommes en était incalculable et nullement en rapport avec le compte exigé par les sacrifices : il était possible de les faire tomber en la possession du roi.
 
[7] 2 Maccabées 4,1-3 : Le susdit Simon, passé dénonciateur du trésor et de la patrie, calomniait Onias comme si ce dernier avait fait assaillir Héliodore et avait été l'artisan de ce malheur. Le bienfaiteur de la cité, le protecteur de ses frères de race, le zélé observateur des lois, il osait en faire un ennemi de la chose publique. Cette haine grandit au point que des meurtres furent commis par des affidés de Simon.
 
[8] 2 Maccabées 6,18-29 : Eléazar, un des premiers docteurs de la Loi, homme déjà avancé en âge et du plus noble extérieur, était contraint, tandis qu'on lui ouvrait la bouche de force, de manger de la chair de porc. Mais lui, préférant une mort glorieuse à une existence infâme, marchait volontairement au supplice de la roue, ….
 
[9] 2 Maccabées 3,1  Tandis que la ville sainte était habitée dans une paix complète et qu'on y observait les lois le plus exactement possible, à cause de la piété du grand prêtre Onias et de sa haine pour le mal. – 2 Maccabées 3,4 : En conséquence Ménélas, prenant à part Andronique le pressait de supprimer Onias. Andronique vint donc trouver Onias : se fiant à la ruse et lui tendant la main droite avec serment, il le décida, sans toutefois dissiper tout soupçon, à sortir de son asile, et le mit à mort sur-le-champ sans tenir compte de la justice.
 
[10] Moloch ou Molèk est le dieu des Ammonites, une ethnie cananéenne. Ils lui sacrifiaient leurs premiers-nés en les jetant dans un brasier. Salomon vieillissant fit construire, entre autres, un autel à son culte (1Rois 11,7). Il s’agissait d’un culte condamné en Lévitique 18, 21 ; 20, 1-5 et en Deutéronome 12, 31. Il en est fait mention aussi en 2 Rois 16, 3 ; 23, 10 ; 2 Chroniques 33, 6 ; Jérémie 32, 35 ; Ezéchiel 16, 21. Dans la mention que nous rencontrerons en EMV 555.7, le culte idolâtre de Baal et d’Astarté y est associé. En ce qui le concerne, nous renvoyons à Juges 2, 11-13 ; 6, 25-32 ; 10, 6 ; 1 Rois 11, 5.33 ; 18, 16-29 ; 2 Rois 10, 18-28 ; 23, 4-5.13 ; 2 Chroniques 33, 3 ; Osée 11, 2.
 
[11] 1 Rois 17,17.
 
[12] Genèse 4,6-8.



 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-207.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/guerison-d-un-aveugle-ne.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 16 Fév - 22:52

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
511. Eloge de la Co-Rédemptrice. Judas ment
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 208.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 511.
 
Samedi 13 octobre 29
Nobé

 
       511.1 Jésus est à Nobé. Ce doit être récent, car il est en train de s’organiser et de séparer les apôtres en trois groupes de quatre personnes pour les répartir dans les maisons. Il garde avec lui Pierre, Jean, Judas et Simon le Zélote, tandis que Jacques, fils de Zébédée, est à la tête du groupe composé de Matthieu, Jude et Philippe, et qu’au troisième est préposé Barthélemy, avec Jacques, fils d’Alphée, André et Thomas.
 
       « Après le dîner, allez là où on vous a offert l’hospitalité ; vous reviendrez ici demain matin, et je vous dirai ce que vous devrez faire. Aux heures des repas, nous resterons ensemble. Rappelez-vous ce que je vous ai dit maintes fois : vous devez faire connaître ma Doctrine par votre manière de vivre, entre vous, et à l’égard de ceux qui vous accueillent. Soyez donc sobres, patients, honnêtes dans vos conversations, dans vos actes et vos regards, de manière que la justice rayonne de vous comme un parfum. Vous voyez comme les yeux du monde sont toujours sur nous, pour nous calomnier ou nous étudier, ou encore pour nous vénérer. Ces derniers ont beau former le petit nombre, c’est d’eux que nous devons prendre le plus grand soin, car c’est sur leur foi que se braque l’étude du monde pour l’effriter ; or tout lui est utile comme arme pour détruire l’amour des bons envers moi, et envers vous par conséquent. N’aidez donc pas le monde par une manière de vivre qui ne serait pas sainte, et n’augmentez pas la peine de ceux qui doivent défendre leur foi contre les pièges de mes adversaires en étant pour eux un objet de scandale. Le scandale rend les âmes perplexes, il les éloigne, les affaiblit. Malheur à l’apôtre qui scandalise les âmes. Il pèche contre son Maître et contre son prochain, contre Dieu et le troupeau de Dieu. Je me fie à vous. Ne faites pas en sorte qu’à ma douleur, qui est si grande, il s’en ajoute une autre, causée par vous.
 
       – Ne crains rien, Maître. Aucun de nous ne te fera souffrir, à moins que Satan ne nous dévoie tous » dit Barthélemy.
 
       511.2 Anastasica, qui est dans la cuisine avec Elise, entre pour dire :
 
       « Le dîner est prêt, Maître. Descends pendant qu’il est chaud. Tu te restaureras.
 
       – Allons-y. »
 
       Jésus se lève pour suivre la femme qui prend le petit escalier qui, de la chambre du haut où l’on a déjà préparé des lits, descend dans le petit jardin et de là, arrive dans la cuisine égayée par un feu pétillant.
 
       Le vieux Jean se tient auprès du feu. Elise s’affaire autour des plats et se retourne avec un sourire maternel pour regarder Jésus entrer. Elle s’empresse de verser sur un grand plateau les grains d’orge cuit dans le lait, comme je l’ai déjà vu faire par Marie, femme d’Alphée, à Nazareth avant le départ de Jean et de Syntica.
 
       « Voilà. Je me suis rappelée que Marie, femme de Clopas, m’a dit que tu aimes cela, et j’avais gardé le plus beau miel pour le faire, et pour Marziam aussi… Je regrette que l’enfant ne soit pas venu…
 
       – Nikê l’a retenu avec Isaac, puisqu’ils partent demain à l’aurore et qu’elle profite du char jusqu’à Jéricho pour accomplir la mission que tu sais…
 
       – Quelle mission, Maître ? demande Judas, soudain intéressé.
 
       – Une mission très féminine : élever un enfant. Seulement, c’est un enfant qui n’a pas besoin de lait, mais de foi, car son esprit est infantile. Mais la femme est toujours mère et elle sait faire ces choses-là. Et quand elle a compris !… Elle vaut bien l’homme, avec en plus la force de la douceur maternelle.
 
       – Comme tu es bon pour nous, Maître ! dit Elise avec un regard caressant.
 
       – Je suis sincère, Elise. 511.3 Nous autres, en Israël — et pas nous seulement —, nous sommes habitués à voir dans la femme un être inférieur et à penser qu’elle l’est. Non. Si elle est soumise à l’homme, comme il est juste, si elle est davantage atteinte par le châtiment à cause du péché d’Eve, si sa mission est destinée à s’exercer dans les voiles et la pénombre, sans actes et sans cris éclatants, si tout en elle se trouve comme étouffé par un voile, elle n’en est pas moins forte ni moins capable que les hommes. Sans rappeler les grandes femmes d’Israël, je vous dis qu’il y a beaucoup de force dans le cœur de la femme : dans le cœur, comme pour nous, les hommes, dans l’intelligence. Et je vous assure que la place de la femme, par rapport aux coutumes comme par rapport à bien d’autres conditons, va changer. Et ce sera juste parce que, comme moi pour tous les hommes, une Femme obtiendra pour les femmes, d’une manière spéciale, grâce et rédemption.
 
       – Une femme ? Et comment veux-tu qu’une femme rachète ? dit Judas en riant.
 
       – En vérité, je te dis qu’elle est déjà en train de racheter. Sais-tu ce que c’est que racheter ?
 
       – Bien sûr que je le sais ! C’est soustraire quelqu’un au péché.
 
       – Oui, mais soustraire au péché pourrait ne pas servir à grand chose, car l’Adversaire est éternel et il reviendrait tendre des pièges. Mais du Jardin terrestre une voix est venue, la voix de Dieu, pour déclarer : “ Je mettrai une inimitié entre toi et la Femme… Elle t’écrasera la tête et toi, tu l’atteindras au talon. [1] ” Rien de plus que des embûches, car la Femme possédera, possède en elle-même, ce qui vainc l’Adversaire. Elle rachète donc à partir du moment où elle existe. Elle est la Rédemption en acte, bien que cachée. Mais bientôt, elle sortira à la face du monde, et les femmes se fortifieront en elle.
 
       – Que tu rachètes… c’est bien. Mais qu’une femme le puisse… je ne l’accepte pas, Maître.
 
       – Tu ne te rappelles pas Tobie ? Son cantique ? [2]
 
       – Si. Mais c’est de Jérusalem qu’il parle.
 
       – Est-ce que par hasard Jérusalem possède encore un tabernacle où Dieu réside [3] ? Dieu peut-il être présent par sa gloire aux péchés qui se commettent dans les murs du Temple ? Un autre tabernacle était nécessaire, et qui soit saint, et qui soit une étoile pour ramener les égarés au Très-Haut. Il se trouve dans la Corédemptrice qui, dans les siècles des siècles, aura la joie d’être la Mère des sauvés. “ Tu brilleras d’un éclat splendide. Tous les peuples de la terre se prosterneront devant toi. Les nations viendront de loin pour te porter des présents et elles adoreront en toi le Seigneur… Elles invoqueront ton grand nom… Ceux qui ne t’écouteront pas seront comptés au nombre des maudits, et bénis seront ceux qui s'attacheront à toi… Tu te réjouiras dans tes enfants, car ils seront les bénis, réunis auprès du Seigneur. ” Voilà le vrai cantique de la Corédemptrice. Et déjà dans le Ciel les anges qui voient le chantent… C’est en elle que commence la Jérusalem nouvelle et céleste. Oh ! Oui, voilà la vérité. Et le monde l’ignore tout comme les rabbins d’Israël plongés dans les ténèbres… »
 
       Jésus s'abime dans ses pensées…
 
       511.4 « Mais de qui parle-t-il ? » demande Judas à Philippe, qui se tient à côté.
 
       Avant même que ce dernier ait pu répondre, Elise, qui est en train de mettre sur la table du fromage et des olives noires, lui répond assez rudement :
 
       « C’est de sa Mère qu’il parle. Tu ne comprends pas ?
 
       – Mais je n’ai jamais entendu dire que les prophètes voient en elle une martyre… Ils mentionnent uniquement le Rédempteur, et…
 
       – Tu crois qu’il n’existe que la torture de la chair ? Tu ne sais pas que, pour une mère, ce n’est rien en comparaison de celle de voir mourir un enfant ? Ton intelligence — je ne parle pas de ton cœur, je ne connais pas ses battements — ton intelligence, dont tu te vantes, ne t’apprend-elle pas qu’une mère se soumettrait mille fois à la torture et à la mort, plutôt que d’entendre un gémissement de son fils ? Homme, tu es homme, et tu connais le savoir. Moi, je ne sais qu’être femme et mère, mais je t’assure que tu es plus ignorant que moi, car tu ne connais même pas le cœur de ta mère…
 
       – Oh ! tu m’offenses !
 
       – Non. Je suis vieille, et je te conseille. Rends ton cœur clairvoyant, ainsi tu éviteras les pleurs et le châtiment. Fais-le, si tu peux. »
 
       Les apôtres, en particulier Jude, Jacques, fils de Zébédée, Barthélemy et Simon le Zélote, se regardent par en dessous et baissent la tête pour dissimuler le sourire qui pointe sur leurs lèvres, devant la franchise de l’observation d’Elise à l’apôtre qui se croit parfait. Jésus, toujours pensif, n’entend rien.
 
       Elise se tourne vers Anastasica et lui dit :
 
       « Viens : pendant qu’ils achèvent leur repas, allons préparer deux autres lits, car trois, c’est peu. »
 
       Elle s’apprête à sortir.
 
       « Elise, vous n’allez pas nous donner le vôtre ! s’écrie Pierre. Cela ne va pas ! Jean et moi, nous pouvons dormir sur des tables. Nous y sommes habitués.
 
       – Non, Simon. Il y a des treillis et des nattes, mais c’est rangé. Nous allons les monter sur des chevalets. »
 
       Les femmes sortent. Fatigués, les apôtres somnolent presque dans la tiédeur de la cuisine. Jésus réfléchit, le coude appuyé sur la table et la tête soutenue par sa main.
 
       511.5 On frappe. Thomas, qui est le plus près de la porte, se lève pour ouvrir et s’écrie :
 
       « Toi, Joseph ?! Et avec Nicodème ?! Entrez ! Entrez !
 
       – Paix à toi, Maître, et à ceux qui sont dans cette maison. Nous allons à Rama, Maître ; c’est Nicodème qui m’y a invité. En passant, nous nous sommes dit : “ Arrêtons-nous pour saluer le Maître. ” Nous voulions savoir si… si tu avais été encore importuné, puisqu’ils sont allés te chercher chez Joseph. Déjà, ils t’ont cherché partout depuis que tu as guéri cet aveugle. Ils n’ont pas franchi les murs, c’est vrai. Ils n’ont pas déplacé un siège pour ne pas profaner le sabbat ; pour cette raison, ils se croient purs, mais pour te trouver, pour suivre Bartolmaï, ils ont fait bien plus que le chemin permis !
 
       – Et comment l’ont-ils appris, puisque le Maître n’a rien fait en chemin ? demande Matthieu.
 
       – Voilà : nous ne savions pas même qu’il était guéri. Nous sommes allés prier à la synagogue, puis saluer Nikê, ainsi qu’Isaac et Marziam qui étaient chez elle. Enfin, après le coucher du soleil, nous sommes vite venus ici, dit Pierre.
 
       – Vous ne saviez pas, mais les envoyés des pharisiens l’ont su. Vous n’avez pas vu, mais moi, j’ai vu. Deux d’entre eux étaient présents quand le Maître a touché les yeux de l’aveugle. Ils attendaient depuis des heures.
 
       – Comment donc ? demande Judas d’un air innocent.
 
       – C’est à moi que tu poses cette question ?
 
       – C’est une chose étrange, c’est pour cela que je le demande.
 
       – Le plus étrange, c’est que, depuis quelque temps, il y a toujours des espions là où se trouve le Maître.
 
       – Les vautours se rendent là où est la proie, et les loups près du troupeau.
 
       – Et les voleurs, là où un complice a signalé une caravane. Tu as raison.
 
       – Que veux-tu insinuer ?
 
       – Rien. Je complète ton proverbe en l’appliquant aux hommes. Jésus est un homme, et ce sont des hommes qui lui tendent des pièges.
 
       511.6 – Raconte, Joseph, raconte… insistent plusieurs.
 
       – Si le Maître le veut, je suis venu pour en faire le récit.
 
       – Parle » dit Jésus.
 
       Et Joseph expose minutieusement tout ce qu’il a noté, toutefois sans préciser que c’est Judas qui a indiqué à l’aveugle le domicile de Jésus. Les commentaires sont nombreux, haineux, affligés, selon les cœurs, et Judas est (en apparence) le plus affligé et le plus fâché, contre tout le monde, et spécialement contre l’aveugle imprudent qui est venu se placer sur la route de Jésus un jour de sabbat, en se fiant à la bonté notoire du Maître…
 
       « Oh ! c’est toi qui le lui as indiqué ! J’étais à côté de toi, et j’ai entendu, s’étonne Philippe.
 
       – Indiquer ne veut pas dire ordonner de faire.
 
       – Je crois bien aussi que tu ne te serais pas permis de commander au Maître d’agir… intervient Jude.
 
       – Moi ? Mais bien au contraire ! Je l’ai seulement indiqué pour demander au Maître une explication.
 
       – Oui. Mais indiquer, c’est parfois aussi engager à agir, et cela, tu l’as fait, réplique Jude.
 
       – C’est toi qui le dis, mais ce n’est pas vrai, affirme effrontément Judas.
 
       – Ce n’est pas vrai ? demande Joseph d’Arimathie. En es-tu bien sûr ? Sûr comme de vivre, de n’avoir jamais parlé de Jésus à l’aveugle, de ne pas lui avoir suggéré de s’adresser à Jésus, et encore moins de l’avoir poussé à le faire immédiatement, avant que Jésus ne quitte la ville ?
 
       – Mais certainement ! Et qui a jamais parlé avec cet homme ? Pas moi, en tout cas ! Je suis constamment avec le Maître, jour et nuit, et quand ce n’est pas avec lui, c’est avec mes compagnons…
 
       – Je croyais que tu l’avais fait hier, quand tu es parti avec les femmes, intervient Barthélemy.
 
       – Hier ! J’ai mis moins de temps à aller et revenir qu’une hirondelle en vol. Comment aurais-je pu chercher l’aveugle, le trouver et lui parler en aussi peu de temps ?
 
       – Tu pouvais l’avoir rencontré…
 
       – Jamais vu !
 
       – Alors cet homme est un menteur, puisqu’il a affirmé que c’est toi qui l’avais incité à venir et où, et comment faire, et que tu lui avais assuré que Jésus allait t’écouter et… » reprend Joseph d’Arimathie.
 
       Judas l’interrompt violemment :
 
       « Assez ! Assez ! Il mérite de redevenir aveugle à cause de tous les mensonges qu’il profère ! Moi, je peux le jurer sur le Saint, je ne le connais que de vue, et je ne lui ai jamais parlé.
 
       – En voilà vraiment assez ! Ton âme est en règle, Judas de Kérioth qui ne crains pas Dieu puisque tu sais que tes actions sont saintes. Heureux es-tu de n’avoir rien à craindre ! lui lance Joseph en le regardant d’un œil sévère, un œil qui le transperce comme une vrille.
 
       – Je ne crains rien, non, car je suis sans péché.
 
       – Nous péchons tous, Judas. Et c’est encore peu si nous savons nous repentir après les premiers péchés et ne pas accroître leur nombre et leur perversité ! » intervient Nicodème, qui jusque là avait gardé le silence.
 
       511.7 Puis il se tourne vers le Maître et poursuit :
 
       « L’ennui, c’est que Joseph de Séphoris a été menacé d’expulsion de la synagogue, s’il t’accueille encore, et Bartolmaï en a été chassé. Il s’y était rendu avec son père et sa mère, mais des pharisiens les attendaient à leur synagogue, lui en ont refusé l’entrée et ont crié sur lui l’anathème.
 
       – Mais c’en est trop ! Jusqu’à quand, Seigneur… s’écrient plusieurs.
 
       – Paix ! Paix ! Ce n’est rien. Bartolmaï est sur le chemin du Royaume. Qu’a-t-il donc perdu ? Il est dans la Lumière. N’est-il donc pas fils de Dieu plus qu’auparavant ? Ne confondez pas les valeurs ! Paix ! Paix ! Nous n’irons plus chez Joseph… Je regrette qu’Isaac doive y conduire ma Mère et Marie, femme d’Alphée… Mais cela n’aurait été que pour quelques heures, car quelqu’un y a déjà pourvu. »
 
       Il s’adresse à Jean de Nobé :
 
       « Père, as-tu peur du Sanhédrin ? Tu vois ce qu’il en coûte d’héberger le Fils de l’homme… Tu es âgé. Tu es un fidèle israélite. Tu pourrais être chassé de la synagogue pour tes derniers sabbats. Serais-tu capable de le supporter ? Réponds sincèrement. Et si tu le redoutes, je m’en irai. Il y aura bien encore dans les monts d’Israël une grotte pour le Fils de Dieu…
 
       – Moi, Seigneur ? Mais que veux-tu que je craigne, sinon Dieu ? Je ne crains pas la bouche du tombeau. Je la regarde, au contraire, comme une amie ; et tu voudrais que j’aie peur de la bouche des hommes ? Je craindrais seulement le jugement de Dieu si, par crainte des hommes, je chassais de chez moi Jésus, le Christ de Dieu !
 
       – C’est bien. Tu es un juste… Je resterai ici… quand je ne serai pas dans les villes voisines, comme je compte le faire encore une fois.
 
       – Viens à Rama, chez moi, Seigneur, propose Nicodème.
 
       – Et si cela te fait du tort ?
 
       – Est-ce que les pharisiens ne t’invitent pas dans une mauvaise intention ? Ne pourrais-je le faire pour étudier ton cœur ?
 
       – Oui, Maître. Allons à Rama. Mon père en sera si heureux, s’il est à la maison ! Et sinon, comme cela arrive souvent, il trouvera ta bénédiction à son retour, supplie Thomas.
 
       – Nous irons à Rama, comme première destination. Demain…
 
       511.8 – Maître nous te quittons. Nous avons dehors nos montures et nous arriverons à Rama avant la fin de la seconde veille. La lune blanchit les chemins comme un pâle soleil. Adieu, Maître, que la paix soit avec toi, dit Nicodème.
 
       – Paix à toi, Maître… et, écoute un bon conseil de Joseph l’Ancien. Sois un peu rusé. Regarde autour de toi. Ouvre les yeux et serre les lèvres. Agis, sans jamais annoncer d’avance ce que tu comptes faire… Ne viens pas à Jérusalem pendant quelque temps, et si tu y viens, ne t’arrête au Temple que le temps nécessaire pour prier. Tu me comprends ? Adieu, Maître. Paix à toi. »
 
       Joseph a marqué très nettement les paroles que je souligne et, en les disant, il fixait intensément Jésus. Son seul regard était un avertissement.
 
       Ils sortent dans le petit jardin sous les rayons blancs de la lune, détachent leurs robustes montures attachées au tronc du noyer, montent en selle et s’éloignent sur la route déserte et blanche…
 
       Jésus rentre dans la cuisine avec ses apôtres.
 
       « Mais qu’aura-t-il voulu dire, au fond ?
 
       – Et comment ont-ils fait pour savoir ?
 
       – Que vont-ils faire à Joseph de Séphoris ?
 
       – Rien. Ce ne sont que des mots, rien de plus. N’y pensez plus. Des histoires passées et sans conséquences. Allons. Disons la prière et séparons-nous pour la nuit. “ Notre Père… ” »
 
       Il les bénit, les regarde partir, puis monte avec les quatre apôtres qu’il a retenus dans la pièce où se trouvent les lits.



[1] Genèse 3,15

[2] Tobit 13, 9-11
 
[3] Le texte emploie le mot tente qui équivaut à Tabernacle ou Temple.



 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-208.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/nouvel-eloge-de-la-coredemptrice.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 17 Fév - 21:31

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
512. Prophétie devant un village détruit
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 209.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 512.
 
Mardi 16 octobre 29
Entre Rama et Emmaüs

 
       512.1 J’ignore où Jésus se trouve, mais c’est certainement dans les montagnes et à un endroit abandonné après avoir été détruit, soit par quelque cataclysme, soit par des opérations de guerre. Je suppose qu’il s’agit plutôt de ces dernières, car les décombres des maisons montrent même des traces de flammes, dans les voûtes protégées de l’eau et encore visibles dans l’entrelacement des ronces, lierres et autres plantes grimpantes ou parasites qui ont poussé un peu partout. Les larges feuilles peluchées d’une plante dont je ne connais pas le nom — mais que j’ai déjà vue en Italie — recouvrent entièrement une ruine qui ressemble à une petite montagne escarpée. Plus loin, un mur resté debout tout seul pour contempler les vestiges de la maison écroulée, est envahi par des câpriers et des pariétaires. Du parapet ajouré de ce qui était une terrasse, pendent les branches d’une clématite qui ondulent au vent comme une chevelure dénouée. Une autre maison dont l’intérieur est écroulé, mais dont les murs extérieurs sont encore debout, ressemble à un énorme vase qui, au lieu de fleurs, contient des arbres qui ont poussé spontanément là où se trouvaient primitivement les pièces. Une autre, restée en partie debout avec des marches , ressemble à un autel préparé pour quelque cérémonie et tout orné de verdure. En haut de cette ruine, un peuplier, grêle et droit comme une lame, paraît demander au ciel la raison d’un tel malheur. Et d’une maison à l’autre, d’un tas de décombres à l’autre, des arbres fruitiers obstinés et dégénérés, devenus sauvages, dominés par le reste de la végétation ou la dominant, nés de fruits tombés, tordus ou droits, rampants, sortis du trou d’un mur, d’un puits asséché, font penser à un bois enchanté. Des oiseaux et des pigeons, sortant des crevasses des ruines, se jettent avidement sur les alentours où autrefois il y avait certainement des champs cultivés et où maintenant se trouve tout un enchevêtrement de vesces dures, desséchées par le soleil, qui ouvrent leurs cosses pour laisser tomber leurs semences de zizanie et d’ivraie qui pousseront au printemps. Les pigeons chassent avec de féroces coups d’aile les oiseaux plus petits qui cherchent quelque grain de mil ou de chanvre sorti de je ne sais quelle semence lointaine, qui au cours des années s’est perpétuée dans les champs incultes par ensemencement spontané. Les oiseaux, spécialement les moineaux bagarreurs, qui se vengent en arrachant les maigres épis d’un mil misérable pour les emporter vers leurs nids, s’envolent péniblement, tout courbés sous le poids et l’embarras de la panicule.
 
       512.2 Jésus n’est pas seulement accompagné des apôtres, mais aussi d’un bon groupe de disciples, dont Cléophas et Hermas d’Emmaüs, les fils du vieux chef de synagogue Cléophas [1], ainsi que d’Etienne. Il y a également des hommes et des femmes, dont ont peut imaginer qu’ils sont venus de quelque village pour inviter Jésus à venir chez eux, ou bien qu’ils l’ont suivi, après son passage dans leur village. En traversant ce champ de ruines, Jésus s’arrête souvent pour regarder, et définitivement quand, d’un endroit plus élevé, il peut dominer ce labyrinthe de décombres et de végétation où la vie n’est représentée que par des pigeons, certainement autrefois doux et apprivoisés, mais aujourd’hui redevenus sauvages et féroces. Les bras croisés, la tête légèrement inclinée, il contemple, et plus il regarde, plus il devient pâle et triste.
 
       « Pourquoi restes-tu ici, Maître ? Il est visible que cet endroit t’afflige. Ne t’arrête pas à observer. Je me repens de t’avoir fait passer par ici, mais le chemin était plus court, dit Cléophas d’Emmaüs.
 
       – Je ne vois pas ce que vous voyez !
 
       – Et quoi d’autre, Seigneur ? Peut-être revois-tu l’événement passé ? Certes, ce fut effrayant. C’est la manière de faire de Rome… dit l’autre habitant d’Emmaüs [2].
 
       – Et cela devrait faire réfléchir. 512.3 Regardez tous : il y avait ici une ville, pas bien grande, mais belle. Il y avait plus de demeures seigneuriales que d’humbles maisons. Et ils appartenaient à des riches, ces lieux qui aujourd’hui sont des bois sauvages, ils appartenaient à des riches, ces champs stériles couverts de ronces, d’ivraie, d’orties… Il y avait alors de beaux vergers et des champs couverts de moissons. Les maisons étaient belles à cette époque, avec des jardins pleins de fleurs, des puits et des fontaines où se baignaient les pigeons et où jouaient les enfants. Les habitants de cet endroit étaient heureux, et ce bonheur ne les a pas rendus justes. Ils ont oublié le Seigneur et ses paroles… Et voilà !
 
       Plus de maisons, plus de fleurs, plus de fontaines, ni de moissons, ni de fruits. Il ne reste que les pigeons, et pas heureux comme autrefois. Au lieu du grain blond et du cumin dont ils étaient jadis friands et gavés, ils se battent maintenant pour avoir un peu de vesce rêche et d’ivraie amère. Et c’est fête s’ils trouvent un épi d’orge qui a poussé parmi les décombres !…
 
       Et, en regardant, je ne vois même plus les pigeons…
 
       Mais des multitudes de visages… dont beaucoup ne sont pas encore nés… Je vois des ruines et des ruines, des ronces et des vignes sauvages, et des vesces sauvages qui couvrent les terres de la Patrie… Et tout cela parce que l’on n’a pas voulu accueillir le Seigneur… J’entends les pleurs de petits enfants épuisés, plus malheureux que ces oiseaux auxquels Dieu pourvoit encore par un minimum de secours pour leur garder la vie, alors que ces petits seront privés de tout secours, victimes du châtiment général, languissants sur le sein desséché de leur mère, mourant de privations et de douleurs et d’une épouvante sans nom. Et j’entends les lamentations des mères pour leurs enfants morts de faim sur leurs seins. Et les plaintes des épouses qui ont perdu leur époux, des vierges capturées pour servir aux plaisirs des vainqueurs, des hommes envoyés en captivité après avoir connu toutes les hontes de la guerre, et des vieillards qui ont assez vécu pour voir accomplie la prophétie de Daniel [33].
 
       Et j’entends la voix infatigable d’Isaïe dans le souffle de ce vent parmi les ruines, dans la plainte des pigeons au milieu des décombres : “ C’est avec des mots barbares, en une langue étrangère que le Seigneur parlera à ce peuple auquel il avait dit : ‘ C’est ici mon repos. Restaurez celui qui est fatigué ; c’est mon soulagement. [4] ’ ”
 
       Mais ils n’ont pas voulu écouter. Non, ils ne l’ont pas voulu, et le Seigneur n’a pas pu trouver de repos dans son peuple. Celui qui est fatigué, qui s’est épuisé à parcourir ses contrées pour enseigner, guérir, convertir, réconforter, ne trouve pas de repos, mais la persécution. Au lieu du soulagement, pièges et trahison. Le Fils ne fait qu’un avec le Père.
 
       Et si la Vérité vous a enseigné qu’une simple coupe d’eau offerte à un homme aura sa récompense [5] — car tout acte de miséricorde accordé à un frère est fait à Dieu lui-même —, quel châtiment attendra ceux qui retiennent même la pierre du sentier qui pourrait servir d’oreiller à la tête du Fils de l’homme, et la source de la montagne qui coule par la bonté du Créateur, et le fruit oublié sur la branche, laissé de côté parce que pourri ou vert, l’épi disputé aux pigeons, et qui ont déjà préparé le lacet pour étrangler l’air dans la gorge, et avec l’air, la vie ?
 
       512.4 Ah ! malheureux Israël qui as perdu en toi la justice, ainsi que la miséricorde de Dieu !
 
       Voici, voici de nouveau la voix d’Isaïe dans la brise du soir, plus effrayante que le cri de l’oiseau de mort, presque aussi redoutable que la voix qui résonna au Jardin terrestre pour la condamnation des deux coupables. Ah que c’est terrible ! cette voix du prophète n'est plus unie à la promesse d’un pardon, comme à cette époque. Non, il n’est pas de pardon pour ceux qui méprisent Dieu, pour ceux qui disent : “ Nous avons fait alliance avec la mort, nous avons conclu un pacte avec l’enfer. Les fléaux, quand ils viendront, ne tomberont pas sur nous, car nous avons mis notre espérance dans le Mensonge et nous serons protégés par lui, qui est puissant. [6] ” Voici, voici Isaïe qui répète ce qu’il a entendu du Seigneur : “ Voici que pour le fondement de Sion, je placerai une pierre angulaire, choisie avec soin, précieuse… Je pèserai le jugement et mesurerai la justice, et la grêle détruira l’espérance dans le Mensonge. Les eaux bouleverseront les abris : votre alliance avec la Mort sera détruite et votre pacte avec l’enfer n’existera plus. Quand la tempête du fléau passera, elle vous bouleversera, chaque fois elle vous bouleversera, à toute heure, et il n’y aura que les châtiments pour vous faire comprendre la leçon. [7] ”
 
       Malheureux Israël ! Comme ces champs où ne persistent que la vesce aride et l’ivraie amère, et où il n’y a plus de grain, voici ce qu’il en sera d’Israël… Alors la terre qui n’a pas voulu de Dieu ne produira pas de pain pour ses enfants. Ces derniers — qui n’ont pas voulu accueillir Celui qui était fatigué — frappés, devenus sauvages, comme des galériens à la rame, s’en iront, esclaves de ceux qu’ils considéraient avec mépris comme des êtres inférieurs. Vraiment, Dieu battra ce peuple orgueilleux sous le poids de sa justice et l’anéantira sous le brisoir de son jugement…
 
       Voilà ce que je vois dans ces ruines. Des ruines ! Des ruines ! Au septentrion, au midi, à l’orient et à l’occident, et surtout au centre, dans le cœur, où la ville coupable sera changée en une fosse putride… »
 
       Des larmes coulent lentement le long du visage pâle de Jésus qui lève son manteau pour se cacher le visage, ne laissant découverts que ses yeux dilatés par sa douloureuse vision.
 
       Puis il se remet en route, tandis que ses compagnons, glacés d’épouvante, hésitent à parler…
 



[1] Je pense qu'il y a une inversion dans la prise de note, car je ne connais que Cléophas, fils de Cléophas. Hermas est le notable d'Emmaüs. J'écrirais la phrase ainsi : " mais aussi un bon groupe de disciples dont Hermas d'Emmaüs et Cléophas, fils du vieux chef de synagogue Cléophas, et Étienne."
[2] Probablement une séquelle de la conquête de la Palestine par les armées de Pompée, il y a donc environ 80 ans. Notamment des représailles qu'entrepris Gabinius après la révolte d'Aristobule. (Cf. Flavius Josèphe : La guerre des juifs, Livre 1, VII, § 5 et 6)
 
[3] Daniel 9,26-27
 

[4] Isaïe 28,11-12
 

[5] Voir le chapitre [url=http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME 07/07-159.htm#ServiceDesFr%C3%A8res]7.159 / EMV466[/url]
 

[6] Isaïe 28,15
 
[7] Isaïe 28,16-19


 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-209.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/prophetie-devant-un-village-detruit.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 18 Fév - 22:54

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Maria_28
 
513. Une parabole sur la sagesse véritable et un avertissement à Israël
 
Ancienne édition : Tome 7, chapitre 210.
Nouvelle édition : Tome 8, chapitre 513.
 
Jeudi 18 octobre 29
Emmaüs

 
       513.1 La place d’Emmaüs est noire de monde, bondée. Au centre de la place, Jésus a du mal à bouger, tant il est entouré, oppressé par les gens qui l’assiègent. Il se trouve entre le fils du chef de la synagogue et un autre disciple ; autour de lui, dans l’intention hypothétique de le protéger, se pressent les apôtres et les disciples, et entre les uns et les autres, habiles à s’insinuer partout, comme des lézards à travers une haie épaisse, il y a des enfants et encore des enfants.
 
       Qu’elle est merveilleuse, cette attirance que Jésus exerçait sur les petits ! Il était impossible de trouver un lieu, connu ou inconnu, où il ne soit pas aussitôt entouré d’enfants, heureux de s’attacher à ses vêtements, plus heureux encore quand il les effleurait de la main en une légère caresse toute affectueuse, même si pendant ce temps, il s’adressait sévèrement aux adultes ; et extrêmement heureux quand il s’asseyait sur un siège, sur un muret, une pierre, un tronc abattu, ou à même sur l’herbe : comme il était à leur niveau, ils pouvaient l’embrasser, appuyer leur tête sur ses épaules, sur ses genoux, se glisser sous son manteau pour se trouver entourés de ses bras, tels des poussins qui ont trouvé la plus affectueuse et la plus protectrice des défenses. Et toujours Jésus les défend contre la suffisance des adultes, honteux de leur familiarité pour lui qui, faute de s’exercer pour tant de motifs sérieux, veulent faire du zèle en éloignant du Maître les petits enfants…
 
       Maintenant encore, sa phrase habituelle se fait entendre pour protéger ses jeunes amis :
 
       « Laissez-les donc faire ! Ils ne me fatiguent pas ! Ce ne sont pas les enfants qui m’ennuient et me peinent ! »
 
       Jésus se penche sur eux, avec un sourire épanoui qui le rajeunit en le faisant ressembler à un frère aîné, complice bienveillant de quelque jeu innocent, et il murmure :
 
       « Soyez gentils, silencieux, bien sages, afin qu’ils ne vous renvoient pas et que nous restions encore ensemble.
 
       – Et tu nous racontes une belle parabole ? demande le plus… audacieux.
 
       – Oui, rien que pour vous. Ensuite je parlerai à vos parents. Ecoutez tous : ce qui sert aux petits sert aussi aux adultes.
 
       513.2 Un jour, un homme s’entendit appeler par un grand roi qui lui dit :
 
       “ J’ai appris que tu mérites une récompense, car tu es savant, et tu diriges bien ta ville par ton travail et par ta sagesse. Eh bien ! je ne vais pas te donner quelque objet, mais je vais t’amener dans la salle de mes trésors ; tu choisiras ce que tu voudras, et je te l’offrirai. De cette façon, je pourrai voir en plus si tu mérites tout le bien qu’on dit de toi. ”
 
       En même temps, le roi, qui s’était approché de la terrasse qui entourait sa cour, jeta un regard sur la place devant le palais royal et il vit passer un gamin pauvrement vêtu, certainement d’une famille misérable, peut-être un orphelin et un mendiant. Il s’adressa alors à ses serviteurs pour leur dire :
 
       “ Allez chercher cet enfant et amenez-le-moi. ”
 
       Les serviteurs obéirent et revinrent avec le petit garçon, tout tremblant de se trouver en présence du roi. Malgré les prières des courtisans, qui lui ordonnaient : “ Incline-toi, salue et dis : ‘ Honneur et gloire à toi, mon roi. Je plie le genou devant toi, roi puissant que la terre reconnaît comme l’homme le plus grand qui soit ’ ”, le petit ne voulait pas s’incliner et répéter ces mots ; les courtisans, furieux, le secouaient rudement et disaient :
 
       “ O roi, ce gamin grossier et crasseux ne doit pas rester là. Permets-nous de le chasser d’ici et de le jeter dans la rue. Si tu désires avoir à côté de toi un enfant et si tu es las des nôtres, nous irons en chercher un chez les riches de la ville, et nous te l’amènerons. Mais pas ce lourdaud qui ne sait même pas saluer !… ”
 
       L’homme riche et sage, qui venait de plonger jusqu’à terre en cent courbettes, profondes comme s’il s’était trouvé devant un autel, ajouta :
 
       “ Ceux qui te suivent ont raison. Pour la majesté de ta couronne, tu dois empêcher qu’on refuse à ta personne sacrée l’hommage qui lui est dû. ”
 
       Et il se prosternait jusqu’à baiser les pieds du roi.
 
       Mais le roi insista :
 
       “ Non, je veux cet enfant-ci. Mieux : je veux le mener lui aussi dans la salle de mes trésors afin qu’il choisisse ce qu’il veut, et je le lui donnerai. Ne me serait-il pas permis, parce que je suis roi, de rendre heureux un pauvre enfant ? N’est-il pas mon sujet comme vous tous ? A-t-il le tort d’être malheureux ? Non, vive Dieu, je veux lui faire plaisir au moins une fois ! Viens, mon enfant, et n’aie pas peur de moi. ”
 
       Il lui donna la main, que le petit prit simplement en la baisant spontanément. Le roi sourit. Et entre deux rangs de dignitaires inclinés en signe d’hommage, sur des tapis de pourpre à fleurs d’or, il se dirigea vers la pièce des trésors, avec à sa droite l’homme riche et sage et à sa gauche l’enfant ignorant et pauvre. Et son manteau royal contrastait grandement avec le misérable vêtement tout déchiré et les pieds nus du pauvre petit…
 
       Ils entrèrent dans la salle des trésors dont deux grands de la Cour avaient ouvert la porte. C’était une haute pièce ronde, sans fenêtres. Mais la lumière tombait d’un plafond qui n’était qu’une énorme plaque de mica : cela formait une lumière douce qui faisait pourtant briller les clous d’or des coffres-forts et les rubans pourpres des nombreux rouleaux placés sur des pupitres élevés et ornés. Des rouleaux somptueux, avec des baguettes précieuses, des fermoirs et le titre ornés de pierres resplendissantes, des œuvres rares que seul un roi pouvait posséder. Puis, à l’abandon, sur un pupitre sévère, sombre, peu élevé, un petit rouleau enroulé sur une petite baguette de bois blanc, attaché avec un fil grossier, poussiéreux comme quelque chose sans intérêt.
 
       Le roi montra les murs :
 
       “ Voilà, ici se trouvent tous les trésors de la terre, et d’autres plus grands encore, car il y a toutes les œuvres du génie humain, sans oublier celles qui viennent de sources surnaturelles. Allez, prenez ce que vous voulez. ”
 
       Il se plaça au milieu de la pièce, les bras croisés, pour observer.
 
       L’homme riche et sage se dirigea d’abord vers les coffres-forts et il en souleva les couvercles avec une hâte de plus en plus fébrile. De l’or en barres, de l’or en bijoux, de l’argent, des perles, des saphirs, des rubis, des émeraudes, des opales… brillaient de tous les coffres-forts. C’étaient des cris d’admiration à chaque ouverture… Puis il se dirigea vers les pupitres, et à la lecture des titres des rouleaux, de nouveaux cris d’admiration sortaient de ses lèvres. Enfin, l’homme, enthousiasmé, se tourna vers le roi :
 
       “ Mais tu as un trésor sans pareil et les pierres ont autant de valeur que les rouleaux et vice versa ! Et je peux vraiment choisir librement ? ”
 
       “ Je l’ai dit : comme si tout t’appartenait. ”
 
       L’homme se jeta le visage contre le sol :
 
       “ Je t’adore, ô grand roi ! ”
 
       Il se leva, courut d’abord vers les coffres, puis vers les pupitres, en prenant des uns et des autres ce qu’il voyait de meilleur.
 
       Le roi sourit une première fois dans sa barbe en voyant la fièvre avec laquelle l’homme courait d’un coffre-fort à un autre, et une seconde fois quand il le vit se jeter à terre pour l’adorer, et il sourit pour la troisième fois en voyant avec quelle cupidité, quelle adresse et quelle préférence il choisissait les pierres précieuses et les livres ; il se tourna vers l’enfant qui était resté à côté de lui pour lui dire :
 
       “ Et toi, tu ne vas pas choisir les belles pierres et les rouleaux de valeur ? ”
 
       L’enfant secoua la tête pour dire non.
 
       “ Pourquoi donc ? ”
 
       “ Pour ce qui est des rouleaux, je ne sais pas lire, quant aux pierres… je n’en connais pas la valeur. A mes yeux, ce sont de beaux cailloux, rien de plus. ”
 
       “ Mais elles te rendraient riche… ”
 
       “ Je n’ai plus de père, ni de mère, ni de frère. A quoi cela me servirait d’aller dans mon refuge avec un trésor sur moi ? ”
 
       “ Mais avec cela, tu pourrais t’acheter une maison… ”.
 
       “ J’y habiterais toujours seul. ”
 
       “ Des vêtements. ”
 
       “ J’aurais toujours froid puisqu’il me manque l’amour de mes parents. ”
 
       “ De la nourriture. ”
 
       “ Je ne pourrais me rassasier des baisers de maman, ni les acheter à aucun prix. ”
 
       “ Des maîtres, et apprendre à lire… ”
 
       “ Cela me plairait davantage. Mais, ensuite, que lire ? ”
 
       “ Les œuvres des poètes, des philosophes, des sages et les paroles anciennes et les histoires des peuples. ”
 
       “ Choses inutiles, vaines ou passées… Cela ne vaut pas la peine. ”
 
       “ Quel enfant stupide ! ” s’écria l’homme qui avait maintenant les bras chargés de rouleaux, et la ceinture et la tunique sur la poitrine gonflées de pierres précieuses.
 
       Le roi sourit encore dans sa barbe. Il prit l’enfant dans ses bras, et l’amena devant les coffres-forts. Plongeant la main dans les perles, les rubis, les topazes, les améthystes, il les faisait tomber en une pluie scintillante et le poussait à en prendre.
 
       “ Non, ô roi, je n’en veux pas. Je voudrais autre chose… ”
 
       Le roi l’amena aux pupitres et lui lut des strophes des poètes, des histoires de héros, des descriptions de pays.
 
       “ Oh ! lire, c’est plus beau. Mais ce n’est pas cela que je souhaiterais… ”
 
       “ Alors quoi ? Parle et je te le donnerai, mon enfant. ”
 
       “ Je ne crois pas, ô roi, que tu le puisses malgré ta puissance. Ce n’est pas une chose d’ici-bas… ”
 
       “ Ah ! tu veux des œuvres qui ne sont pas de la terre ! Voilà, alors : ici ce sont des œuvres dictées par Dieu à ses serviteurs ; écoute… ”
 
       Et il lut des pages inspirées.
 
       “ C’est beaucoup plus beau, mais pour les comprendre, il faut d’abord connaître le langage de Dieu. Il n’y a pas un livre qui l’enseigne et qui fait comprendre ce qu’est Dieu ? ”
 
       Le roi eut un mouvement de stupeur et cessa de rire, mais il serra l’enfant contre son cœur.
 
       Avec un rire moqueur, l’homme sage ironisa :
 
       “ Même les plus savants ne savent pas qui est Dieu et toi, un enfant ignorant, tu veux le savoir ? Si tu espères devenir riche comme cela !… ”
 
       Le roi le regarda avec sévérité tandis que le garçonnet répondait :
 
       “ Je ne cherche pas la richesse, je cherche l’amour, et il m’a été dit un jour que Dieu est Amour. ”
 
       Le roi l’amena près du pupitre sévère sur lequel se trouvait le petit rouleau poussiéreux attaché avec une cordelette. Il le prit, le déroula et en lut les premières lignes :
 
       “ Que celui qui est petit vienne à moi et moi, Dieu, je lui enseignerai la science de l’amour. Elle se trouve dans ce livre, et moi… ”
 
       “ Oh ! c’est cela que je veux ! Je connaîtrai Dieu et, en le possédant, j’aurai tout. Donne-moi ce rouleau, ô roi, et je serai heureux. ”
 
       “ Mais il est sans valeur pécuniaire ! Cet enfant est vraiment débile ! Il ne sait pas lire, et il prend un livre ! Il n’est pas sage, et ne veut pas s’instruire. Il est dans la misère, et ne prend pas de trésors. ”
 
       “ Je m’efforcerai de posséder l’amour, et ce livre me l’enseignera. Sois béni, ô roi, de me donner de quoi ne plus me sentir orphelin et pauvre ! ”
 
       “ Au moins adore-le, comme moi je l’ai fait, si tu crois que par son aide tu es devenu si heureux ! ”
 
       “ Moi, je n’adore pas l’homme, mais Dieu qui l’a rendu si bon. ”
 
       “ Cet enfant est le vrai sage de mon royaume, ô homme qui ne mérite pas le nom de sage. L’orgueil et l’avidité t’ont rendu ivre au point d’adorer la créature au lieu du Créateur, et cela parce que la créature te donnait des pierres et des œuvres humaines. Et tu n’as pas réfléchi que tu as les pierres précieuses, et que moi je les ai eues, parce que Dieu les a créées, et que tu as les rouleaux rares où se trouve la pensée de l’homme, parce que Dieu a donné à l’homme l’intelligence. Ce petit qui a faim et froid, qui est seul, qui a été frappé par mille souffrances, qui serait excusé et excusable s’il devenait ivre devant les richesses, voilà qu’il sait avec justice rendre grâces à Dieu pour avoir donné la bonté à mon cœur, et qu’il ne cherche que l’unique chose nécessaire : aimer Dieu, connaître l’amour pour posséder les vraies richesses, ici-bas et dans l’au-delà. Homme, je t’ai promis de te donner ce que tu choisirais. Une parole de roi est sacrée. Emporte donc tes pierres et tes rouleaux : cailloux multicolores et… paille de la pensée humaine. Et vis dans la peur des voleurs et des mites : les premiers, ennemis des bijoux ; les secondes, des parchemins. Eblouis-toi avec les fausses lueurs de ces balivernes, et éprouve le dégoût de la saveur douceâtre de la science humaine, qui n’est que fumet et ne nourrit pas. Va ! Cet enfant va rester auprès de moi, et ensemble nous nous efforcerons de lire le livre qui est amour, c’est-à-dire Dieu. Et nous n’aurons pas les lueurs futiles des froides pierres précieuses, ni la saveur douceâtre de paille des œuvres du savoir humain. Mais les feux de l’Esprit éternel nous donneront depuis ici l’extase du Paradis et nous posséderons la sagesse, plus fortifiante que le vin, plus nourrissante que le miel. Viens, mon enfant, à qui la Sagesse a montré son visage pour que tu la désires comme une épouse véritable. ”
 
       Et, après avoir chassé l’homme, il prit l’enfant chez lui et l’instruisit dans la divine sagesse pour qu’il devienne un juste, et sur la terre un roi digne de l’onction sacrée, puis, après la vie, un citoyen du Royaume de Dieu.
 
       Voilà la parabole promise aux petits et proposée aux adultes.
 
       513.3 Vous rappelez-vous Baruch ? Il dit : “ Pourquoi, Israël, es-tu dans une terre ennemie, vieillissant en terre étrangère, te souillant avec les morts et compté au nombre de ceux qui vont au shéol ? ” Et il répond : “ C’est que tu as abandonné la source de la sagesse. Si tu avais marché dans la voie de Dieu, tu habiterais dans la paix pour toujours. ” [1]
 
       Ecoutez, vous qui vous plaignez trop souvent d’être en exil, bien que vous habitiez dans votre patrie, tant la patrie n’est plus à nous, mais à celui qui nous domine ; vous vous lamentez, et vous ne savez pas que c’est une goutte d’eau [2] par rapport à ce qui vous attend à l’avenir, par rapport à la coupe enivrante que l’on donne aux condamnés et qui, vous le savez, est plus amère que toute autre boisson.
 
       Le peuple de Dieu souffre parce qu’il a abandonné la sagesse. Comment pouvez-vous posséder la prudence, la force, l’intelligence, comment pouvez-vous seulement savoir où elles se trouvent, pour connaître ensuite ce qui est de moindre importance, si vous ne vous abreuvez plus aux sources de la sagesse ?
 
       Son Royaume n’est pas de cette terre, mais la miséricorde de Dieu en accorde la source. Elle est en Dieu. Elle est Dieu lui-même. Mais Dieu ouvre son sein pour qu’elle descende vers vous. Israël possède, ou a possédé — et croit encore posséder, avec le sot orgueil des prodigues qui ont tout perdu, mais s’imaginent encore être riches et exigent l’obéissance due à leur rang, alors qu’ils n’attirent que compassion ou raillerie — richesses, conquêtes, honneurs, mais a-t-il l’unique trésor ? Non. Et il perd même le reste, car celui qui perd la sagesse perd la possibilité d’être grand. D’erreur en erreur, l’homme qui ne possède pas la sagesse tombe. Or Israël connaît beaucoup de choses, trop même, mais il ne connaît plus la sagesse.
 
       513.4 Baruch dit avec raison : “ Les jeunes gens de ce peuple ont vu la lumière et ont habité sur la terre, mais ils n’ont pas connu la voie de la connaissance, ils n’ont pas compris ses sentiers ; leurs enfants non plus ne l’ont pas accueillie, et elle s’en est allée loin d’eux. ” [3]
 
       Loin d’eux ! Les enfants ne l’ont pas accueillie ! Quelles paroles prophétiques !
 
       Moi, je suis la Sagesse qui vous parle, or les trois quarts d’Israël ne m’accueillent pas. Et la Sagesse s’éloigne et s’éloignera davantage pour les laisser seuls… Que feront alors les hommes qui se prenaient pour des géants, et se croyaient capables de forcer le Seigneur à les aider, à les servir ? Des géants utiles à Dieu pour fonder son Royaume ? Non ! Je le dis avec Baruch : “ Pour fonder le vrai Royaume de Dieu, Dieu ne choisira pas ces orgueilleux, il les laissera périr dans leur sottise ” [4], loin de ses voies. Car, pour monter au Ciel par l’esprit et comprendre les leçons de la Sagesse, il faut un esprit humble, obéissant et surtout entièrement amour, puisque la Sagesse parle son langage — autrement dit, le langage de l’amour, puisqu’elle est l’Amour —. Pour connaître ses voies, il faut un regard limpide et humble, dégagé de la triple concupiscence. Pour posséder la sagesse, il faut l’acheter avec de la monnaie vivante : les vertus.
 
       Cela, Israël ne l’avait pas et je suis venu pour expliquer la sagesse, pour vous conduire vers son chemin, pour semer dans votre cœur les vertus. Car je connais tout et je sais tout, et je suis venu l’enseigner à Jacob mon serviteur, à Israël mon bien-aimé. Je suis venu sur la terre pour converser avec les hommes, moi qui suis la Parole du Père, pour prendre par la main les enfants de l’homme, moi qui suis Fils de Dieu et de l’homme, moi, le Chemin de la Vie. Je suis venu pour vous introduire dans la salle des trésors éternels, moi, à qui tout a été remis par le Père. Je suis venu, moi, l’Amant éternel, pour prendre mon Epouse, l’humanité, que je veux élever sur mon trône et dans ma chambre nuptiale afin qu’elle soit avec moi dans le Ciel, et pour l’introduire dans le cellier des vins afin qu’elle s’enivre de la vraie vigne de laquelle les sarments tirent la vie.
 
       Mais Israël est une épouse paresseuse et elle ne se lève pas de son lit pour ouvrir à Celui qui est venu. Et l’Epoux s’en va. Il passera, il est sur le point de passer. Plus tard, Israël le cherchera en vain, mais il trouvera, non pas la miséricordieuse charité de son Sauveur, mais les chars de guerre de ceux qui la domineront, et il sera écrasé, perdant son orgueil et sa vie après avoir voulu écraser jusqu’à la miséricordieuse volonté de Dieu.
 
       513.5 Oh ! Israël, Israël, qui perds la vraie vie pour conserver une mensongère illusion de puissance ! Oh ! Israël qui crois te sauver et veux te sauver par des voies qui ne sont pas celles de la sagesse, et qui te perds en te vendant au mensonge et au crime, Israël naufragé qui ne t’attaches pas à la solide amarre que l’on te jette pour te sauver, mais aux restes de ton passé brisé, tandis que la tempête te porte ailleurs, au large, sur une mer effrayante et sans lumière. Israël, à quoi te sert-il de sauver ta vie ou de présumer que tu la sauves pour une heure, un an, dix ans, deux, trois fois dix ans, au prix d’un crime et pour périr ensuite éternellement ? Que sont la vie, la gloire, la puissance ? Une goutte malpropre, à la surface d’une lessive utilisée par les lavandières, irisée, non parce qu’elle est faite de pierres précieuses, mais en raison de la graisse malpropre qui, avec le salpêtre, se gonfle en boules vides destinées à éclater sans qu’il en reste rien, hormis un cercle sur l’eau sale des sueurs humaines. Une seule chose est nécessaire, ô Israël : posséder la sagesse, au prix même de la vie. En effet la vie n’est pas ce qu’il y a de plus précieux, et il vaut mieux perdre cent vies que de perdre son âme. »
 
       Jésus achève au milieu d’un silence plein d’admiration. Il cherche à se dégager et à s’en aller… Mais les enfants réclament un baiser et les adultes sa bénédiction. Ce n’est qu’ensuite, en prenant congé de Cléophas et d’Hermas d’Emmaüs, qu’il peut s’éloigner.
 



[1] Baruch 3,10-13

[2] « Goutte de posca » dans l’édition de 1985. Dans l'Antiquité romaine, la posca était un vin amer composé en fait de vinaigre allongé d'eau et parfois adouci au jaune d'œuf. C'est probablement cette boisson qui a été servi à Jésus sur la Croix.
 
[3] Baruch 3,20
 
[4] Baruch 3,27-28




 
Observations

Jésus évoque la boisson des légionnaires

Durant l’automne de la troisième année de vie publique, Jésus met en garde les habitants d’Emmaüs qui supportent mal la domination romaine. « Écoutez, vous qui trop souvent vous plaignez d'être en exil, tout en étant dans la patrie, tant la patrie n'est plus à nous, mais à celui qui nous domine ; vous vous en plaignez et vous ne savez pas que par rapport à ce qui vous attend dans l'avenir, c'est une goutte de posca par rapport à la coupe enivrante que l'on donne aux condamnés et qui, vous le savez, est plus amère que toute autre boisson » (EMV 513.3). L’allusion à cette boisson romaine n’évoque sans doute plus grand-chose de nos jours. Mais pour l’auditoire de Jésus, elle était éloquente…


Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 19 Une-parabole-sur-la-sagesse-veritable-et-un-avertissement-a-israel
Dans l'Antiquité romaine, la posca était un vin coupé d’eau et de vinaigre et parfois additionné de jaune d'œuf et de coriandre. Ce breuvage bon marché, réputé rafraîchissant, était la boisson par excellence des légionnaires, du peuple et des esclaves. C’était par ailleurs une solution efficace pour épurer l’eau et prévenir ainsi les maladies qui auraient été désastreuses pour les légions romaines. Chaque jour le soldat recevait sa ration de vinaigre pour fabriquer sa dose de posca.

Retrouver dans le récit de Maria Valtorta ce terme aujourd’hui méconnu, est certainement à mettre au crédit de l’authenticité de ses visions.

 
*SOURCE : http://www.maria-valtorta.org/Publication/TOME%2007/07-210.htm
https://valtorta.fr/troisieme-annee-vie-publique-de-jesus/une-parabole-sur-la-sagesse-veritable-et-un-avertissement-a-israel.html
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