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Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Anayel
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 4 Fév - 8:37

210. Vers Hébron. Les raisons du monde et celles de Dieu. Les inquiétudes de Judas de Iscariote

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 72
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 210


Dimanche 9 avril 28
Hébron

      210.1 « Mais je ne crois pas que vous ayez l’intention de faire un pèlerinage à tous les lieux célèbres d’Israël, dit ironiquement Judas qui discute dans un groupe où se trouvent Marie, femme d’Alphée, et Salomé, ainsi qu’André et Thomas.

      – Et pourquoi pas ? Qui est-ce qui l’interdit ? demande Marie, femme de Cléophas.

      – Mais moi ! Ma mère m’attend depuis longtemps…

      – Va donc chez ta mère, nous te rejoindrons après, dit Salomé – elle semble ajouter mentalement : “ Personne ne souffrira de ton absence ” –.

      – Ce n’est pas cela ! J’y vais avec le Maître. Déjà, il n’y a plus la Mère, comme c’était entendu. Et cela n’aurait vraiment pas dû se faire parce qu’il était promis qu’elle y viendrait.

      – Elle s’est arrêtée à Bet-çur pour une œuvre charitable. Cette femme était bien malheureuse.

      – Jésus pouvait la guérir sur-le-champ. Il n’avait pas besoin de la faire revenir graduellement à son état normal. Je ne sais pas pourquoi, désormais, il n’aime plus faire des miracles éclatants.

      – S’il a agi ainsi, il aura eu de saintes raisons, rétorque calmement André.

      – Ah oui ! C’est ainsi qu’il perd des prosélytes.

      210.2 Ce séjour à Jérusalem, quelle déception ! Plus il lui faudrait faire des gestes d’éclat, plus il se cache à l’ombre. Je m’étais tellement promis de voir, de combattre…

      – Excuse ma question… Mais que voulais-tu voir et qui voulais-tu combattre ? demande Thomas.

      – Quoi ? Qui ? Mais voir ses œuvres miraculeuses et pouvoir tenir tête à ceux qui prétendent que c’est un faux prophète ou un possédé. Car c’est bien ce qu’on dit ! Comprends-tu ? On dit que si Béelzéboul ne le soutient pas, il n’est qu’un pauvre homme. Et comme l’humeur capricieuse de Béelzéboul est bien connue, et qu’on sait qu’il se plaît à prendre et à quitter, comme le fait le léopard avec sa proie, et comme les faits justifient cette façon de voir, je m’inquiète de constater qu’il n’agit pas. Quelle piètre figure nous faisons ! Nous sommes les apôtres d’un Maître… qui ne fait qu’enseigner, c’est indéniable, mais rien d’autre. »

      Judas s’est arrêté brusquement après le mot “ Maître ” et cela me fait penser qu’il allait dire quelque chose de pire.

      Les femmes sont abasourdies et Marie, femme d’Alphée, en tant que parente de Jésus, répond clairement :

      « Ce n’est pas de cela que je m’étonne, mais de ce que, lui, il te supporte, mon garçon ! »

      Mais André, lui qui est toujours doux, perd patience, rougit de colère – ce en quoi il ressemble pour une fois à son frère – et crie :

      « Mais va-t’en ! Et ne fais plus mauvaise figure à cause du Maître ! D’ailleurs, qui t’a appelé ? Nous, il nous a voulus, mais toi, non. Tu as dû insister à plusieurs reprises pour te faire accepter. C’est toi qui t’es imposé. Je ne sais ce qui me retient de tout raconter aux autres…

      – Avec vous il est impossible de parler. Ils ont raison, ceux qui vous disent querelleurs et ignorants… »

      Thomas plaisante pour détourner la tempête qui approche :

      « Eh bien, vraiment, à mon tour je ne comprends pas du tout où tu vois l’erreur chez le Maître. Je n’étais pas au courant de ces humeurs capricieuses du démon. Le pauvre ! Il doit être bizarre. S’il avait eu une intelligence équilibrée, il ne se serait pas révolté contre Dieu. Je vais en prendre bonne note.

      – Ne plaisante pas, car moi, je ne plaisante pas. Peux-tu donc soutenir qu’il s’est fait connaître à Jérusalem ? Lazare aussi l’a dit, du reste… »

      Thomas éclate de rire, et bruyamment. Riant encore – son rire a déjà désorienté Judas –, il rétorque :

      « Ah ! Il n’a rien fait ? Va donc le demander aux lépreux de Siloan et d’Hinnom. Ou plutôt pas à Hinnom, car il n’y a plus de lépreux : ils sont tous guéris. Si tu n’étais pas là — car tu avais hâte de partir chez des… amis et tu n’es donc pas au courant —, cela n’empêche pas que les vallées de Jérusalem et même beaucoup d’autres résonnent des chants de louange de ceux qui ont été guéris. »

      Thomas a pris pour finir un ton sérieux.

      210.3 Là-dessus, il ajoute sévèrement :

      « Tu fais une crise de bile, mon ami, et elle te fait trouver tout amer et tout voir en noir. Ce doit être une maladie récurrente chez toi. D’ailleurs, crois moi, il n’est guère agréable de vivre avec quelqu’un comme toi. Il te faut changer. Moi, je n’irai rien dire à personne et si ces braves femmes veulent bien m’écouter, elles resteront silencieuses comme moi. André en fera autant. Mais il te faut changer. Ne te crois pas déçu, car il n’y a pas de déception. Ne te crois pas nécessaire, car le Maître sait ce qu’il fait. Ne prétends pas être le maître du Maître. Si, pour cette pauvre femme d’Elise, il a agi de cette manière, c’est qu’il était bien de le faire. Laisse les serpents siffler et cracher comme il leur plaît. Ne te soucie pas de te faire l’intermédiaire entre eux et lui, et encore moins de penser que tu te déconsidères en restant avec lui. Même s’il ne guérissait plus ne serait-ce qu’un simple rhume, cela ne l’empêcherait pas d’être toujours puissant. Sa parole est un continuel miracle. Et trouve la paix. Nous n’avons pas les archers à nos trousses ! Nous arriverons, bien sûr, nous arriverons à convaincre le monde que Jésus est Jésus. Et puis, sois tranquille : si Marie a promis d’aller chez ta mère, elle ira. Nous, pendant ce temps, nous voyageons en pèlerins à travers ces belles contrées, c’est notre travail ! Sans compter, bien sûr, que nous faisons plaisir aux femmes disciples en allant voir le tombeau d’Abraham, son arbre [1], et puis la tombe de Jessé et… qu’avez-vous dit d’autre ?

      – On dit que c’est ici l’endroit où Adam habita et où Abel fut tué…

      – Les absurdes légendes habituelles… bougonne Judas.

      – Dans un siècle, on dira que la grotte de Bethléem et bien d’autres choses ne sont que légende ! 210.4 Et puis, excuse-moi ! Tu as voulu aller dans cette puante caverne d’En-Dor qui, tu dois en convenir, n’appartenait pas à un… cycle saint, n’est-ce pas ? Or les femmes vont là où l’on dit qu’il y a du sang et des cendres de saints. En-Dor nous a donné Jean, et qui sait…

      – Belle acquisition que Jean ! Grommelle Judas.

      – Pour ce qui est de son visage peut-être, mais en ce qui concerne son âme, il peut être meilleur que nous.

      – Lui alors ! Avec ce passé !

      – Tais-toi ! Le Maître a dit que nous ne devons pas le rappeler.

      – C’est bien commode ! Je voudrais voir, si moi je faisais quelque chose de semblable, si vous ne vous en souviendriez pas !

      – Adieu, Judas. Il vaut mieux que tu restes seul. Tu es trop énervé. Si, du moins, tu savais ce que tu as !

      – Ce que j’ai, Thomas ? J’ai que je vois que l’on nous délaisse pour les premiers venus. J’ai que je vois qu’on préfère tout le monde à moi. J’ai que je remarque qu’on attend que je sois absent pour enseigner à prier. Et tu veux que cela me fasse plaisir ?

      – Cela ne fait pas plaisir. Mais je te fais observer que, si tu étais venu avec nous pour le repas de la Pâque, tu aurais été aussi avec nous sur le mont des Oliviers, quand le Maître nous a enseigné la prière. Je ne vois pas en quoi nous sommes délaissés pour les premiers venus. Est-ce de ce pauvre petit innocent que tu parles, ou bien de ce malheureux Jean ?

      – De l’un et de l’autre. Jésus ne nous parle pour ainsi dire plus. Regarde-le, encore maintenant… Il est là qui s’attarde à parler tant et plus avec ce gamin. Il lui faudra attendre un bon moment avant qu’il puisse le compter au nombre des disciples ! Quant à l’autre, il ne le deviendra jamais : trop orgueilleux, pédant, insensible, avec des tendances mauvaises. Et pourtant : “ Jean par ci… Jean par là ”…

      – Père Abraham, donne-moi de la patience ! Et en quoi te paraît-il que le Maître te préfère les autres ?

      – Mais ne le vois-tu pas, même maintenant ? Le moment venu de quitter Bet-çur, après un séjour pour instruire trois bergers qui pouvaient très bien être pris en main par Isaac, qui laisse-t-il avec sa Mère ? Moi, toi ? Non. Il laisse Simon, un vieux qui ne parle pour ainsi dire pas !

      – Mais le peu qu’il dit est toujours bien dit » réplique Thomas, seul désormais, car les femmes et André se sont éclipsés et vont rapidement de l’avant comme pour fuir un bout de chemin trop ensoleillé.

      210.5 Les deux apôtres se sont tellement échauffés qu’ils ne re­marquent pas l’arrivée de Jésus, car le bruit de ses pas se perd complètement dans le nuage de poussière de la route. Mais si, lui, il ne fait pas de bruit, eux crient comme dix et Jésus les entend. Il est suivi de Pierre, de Matthieu, des deux cousins du Seigneur, de Philippe et Barthélemy et des deux fils de Zébédée qui ont avec eux Marziam.

      Jésus dit :

      « Tu as bien raison, Thomas : Simon parle peu, mais le peu qu’il dit est toujours bien. C’est un esprit paisible et un cœur honnête. Il a surtout beaucoup de bonne volonté. C’est pour cela que je l’ai laissé avec ma Mère. C’est un parfait honnête homme et, en même temps, quelqu’un qui sait vivre, qui a souffert et qui est âgé. Par conséquent – je dis cela parce que, je suppose, ce choix paraît injuste à l’un de vous –, par conséquent il était plus indiqué que ce soit lui qui reste. Je ne pouvais pas, Judas, permettre que ma Mère reste seule auprès d’une pauvre femme encore malade. Et il était juste que je la quitte. Ma Mère mènera à bonne fin l’œuvre que j’ai commencée. Mais je ne pouvais pas non plus la laisser avec mes frères, ni avec André, Jacques ou Jean, ni même avec toi. Si tu n’en comprends pas les raisons, je ne sais que dire…

      – Parce que ta Mère est jeune, belle et les gens…

      – Non ! Les gens auront toujours de la fange dans leur pensée, sur leurs lèvres, dans leurs mains et surtout dans leur cœur, ces gens sans honnêteté qui voient en tous les sentiments qu’ils éprouvent eux-mêmes ; mais je ne me soucie guère de leur fange. Elle tombe d’elle-même quand elle est sèche. Mais j’ai préféré Simon, parce qu’il est âgé et ne rappellerait pas trop ses fils morts à cette femme qui souffre. Vous, les jeunes, les lui auriez rappelés par votre jeunesse… Simon sait veiller et il sait ne pas se faire entendre, il n’exige jamais rien, il sait compatir, il sait se surveiller. J’aurais pu choisir Pierre. Qui mieux que lui pourrait être auprès de ma Mère ? Mais il est encore trop impulsif. Tu vois que je le lui dis en face sans qu’il s’en formalise : Pierre est sincère et aime la sincérité, même à son détriment. Je pouvais prendre Nathanaël. Mais il n’a jamais parcouru la Judée. Simon, au contraire, connaît bien le pays et il sera précieux pour conduire ma Mère à Kérioth. Il sait aussi où se trouvent ta maison de campagne et celle de la ville et il ne fera…

      210.6 – Mais… Maître !… Ta Mère ira vraiment chez la mienne ?

      – Mais c’était chose dite ! Et quand on a promis, on s’y tient. Nous marcherons lentement en nous arrêtant dans ces villages pour évangéliser. Ne veux-tu pas que j’évangélise ta Judée ?

      – Oh si ! Maître… Mais je croyais… je pensais…

      – Surtout, tu te faisais de la peine pour des chimères que tu avais rêvées. Au second quartier de la lune de Ziv, nous serons tous chez ta mère. Nous, c’est-à-dire ma Mère aussi, avec Simon. Pour le moment, elle évangélise Bet-çur, ville de Judée, tout comme Jeanne évangélise Jérusalem et avec elle une jeune fille et un prêtre [2], jadis lépreux, tout comme Lazare, Marthe et le vieil Ismaël évangélisent Béthanie, tout comme Sara évangélise à Yutta ; et, à Kérioth, ta mère parle certainement du Messie. Tu ne peux vraiment pas dire que je laisse la Judée sans voix. Au contraire, je lui donne, à elle qui est plus fermée et arrogante que toute autre région, les voix les plus douces, celles des femmes en plus de celles d’Isaac, qui est saint, et de mon ami Lazare. Les femmes joignent à la parole cet art subtil bien féminin d’amener les âmes au point où elles le désirent. Tu ne dis plus rien ? Pourquoi es-tu sur le point de pleurer, espèce de grand enfant capricieux ? A quoi te sert-il de t’empoisonner avec des ombres chimériques ? As-tu encore des motifs d’inquiétude ? Allons ! Parle…

      – Je suis mauvais… et toi, tu es tellement bon ! Ta bonté me frappe toujours plus car elle est toujours si fraîche, si nouvelle… Moi… je ne sais jamais que dire quand je la trouve sur mon chemin.

      – Tu as dit vrai. Tu ne peux le savoir, mais c’est parce qu’elle n’est ni fraîche, ni nouvelle. Elle est éternelle, Judas. Elle est partout présente, Judas… 210.7 Ah ! Nous voici arrivés dans les environs d’Hébron. Marie, Salomé et André nous font de grands gestes. Allons-y. Ils parlent avec des hommes. Ils ont dû demander où se trouvent les lieux historiques. Ta mère rajeunit, mon frère, à cette nouvelle évocation ! »

      Jude sourit à son cousin – Jésus –, qui sourit à son tour.

      « Nous rajeunissons tous ! Dit Pierre. J’ai l’impression d’être à l’école. Mais c’est une belle école ! Meilleure que celle de ce grognon d’Elisée. Tu t’en souviens, Philippe ? Qu’est-ce que nous ne lui avons pas fait, hein ? Cette histoire des tribus ! “ Dites les villes des tribus ! ”… “ Vous ne les avez pas dites en chœur… Recommencez… ” ; “ Simon, tu ressembles à un crapaud endormi. Tu restes en arrière. Reprenez au début. ” Hélas ! Je ne savais plus que la liste des villes et pays de l’ancien temps ; je ne savais rien d’autre. Au contraire, ici, on apprend vraiment ! Tu sais, Marziam ? Un de ces jours, ton père va faire passer l’examen, maintenant qu’il est savant… »

      Tout le monde rit rejoignant les femmes et André.

[1] Le chêne de Mamré (Mambré) près d’Hébron.

[2] Jean le prêtre et Annalia. Cf. 3.60 (EMV 199).
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 5 Fév - 9:17

211. Accueil joyeux à Hébron. Discours et miracles dans le jardin de la maison de Jean-Baptiste

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 73
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 211


Dimanche 9 avril 28
Hébron


211.1 Tous assis en cercle dans un petit bois près d’Hébron, ils mangent en discutant. Judas, maintenant qu’il est sûr que Marie ira chez sa mère, est revenu à de meilleures dispositions d’esprit et il cherche, par mille politesses, à effacer le souvenir de sa mau­vaise humeur auprès de ses compagnons et des femmes. Il a dû aller faire des achats au village et il raconte qu’il l’a trouvé bien changé depuis l’année précédente :

« La nouvelle de la prédication et des miracles de Jésus est arrivée jusqu’ici. Et les gens ont commencé à réfléchir sur bien des choses. Tu sais, Maître, qu’il y a un domaine de Doras dans ces parages ? Et même l’épouse de Kouza possède ici, sur ces montagnes, des terres et un château qui lui appartiennent personnellement, qui font partie de sa dot [1]. On voit que le terrain a été préparé, un peu par elle, un peu par les paysans de Doras – car il doit s’en trouver ici quelques-uns d’Esdrelon –. Lui, Doras, a ordonné le silence. Mais eux… Je crois qu’ils ne se tairaient pas, même sous le supplice. La mort du vieux pharisien [2] a frappé les gens de stupeur, sais-tu ? Tout comme l’excellente santé de Jeanne [3], qui est venue ici avant la Pâque. Ah ! Et puis il y a eu aussi l’amant d’Aglaé qui t’a rendu service. Sais-tu qu’elle s’est échappée peu après notre passage ici ? Et lui, pour se venger, a agi comme un démon envers plusieurs innocents. C’est ainsi que les gens ont fini par penser à toi comme à un vengeur des opprimés, et ils désirent ta présence. Je parle des meilleurs…

– Vengeur des opprimés ! Je le suis en effet, mais surnaturellement. Ceux qui m’imaginent avec le sceptre et la hache à la main, en roi et justicier selon l’esprit de la terre font erreur. Il est certain, néanmoins, que je suis venu libérer des oppressions : du péché – c’est la plus grave –, des maladies, des afflictions, de l’ignorance et de l’égoïsme. Beaucoup apprendront qu’il n’est pas juste d’opprimer sous prétexte que le sort les a placés dans une situation élevée, mais qu’on doit utiliser cette situation pour soulager ceux qui ont un rang inférieur.

– C’est bien ainsi que Lazare agit, et Jeanne également, mais ils sont deux contre des centaines, se désole Philippe.

– Les fleuves ne sont pas aussi larges à leur source qu’à l’es­tuaire. Quelques gouttes, un filet d’eau, mais après… Il y a des fleuves qui ressemblent à des mers à leur embouchure.

– Le Nil, hein ? intervient Marie, femme d’Alphée. Ta mère me racontait votre séjour en Egypte. Elle me disait souvent : “ Une mer, crois-moi, une mer d’un vert bleuté. C’était un vrai rêve de le voir au maximum de sa crue ! ” Elle me parlait aussi des arbres qui paraissaient surgir de l’eau et puis de tout ce vert qui semblait naître de l’eau quand elle se retirait…

– Eh bien, je vous le dis : à sa source, le Nil n’est qu’un filet d’eau puis il devient ce géant ; de même, ce qui n’est actuellement qu’un filet de faible grandeur qui se penche avec amour et par amour sur les plus petits deviendra par la suite une multitude. Jeanne, Lazare, Marthe pour le moment, mais par la suite, combien, combien de personnes ! »

Jésus semble voir ceux qui seront miséricordieux pour leurs frères, et il sourit, absorbé dans sa vision.

211.2 Judas confie que le chef de la synagogue voulait venir avec lui, mais qu’il n’a pas osé prendre cette décision de son propre chef :

« Tu te souviens, Jean, comme il nous a chassés l’an dernier ? [4]

– Je m’en souviens… Mais disons-le au Maître. »

Jésus, interrogé, répond qu’ils vont entrer à Hébron. Si les habitants veulent les voir, ils les appelleront, et eux s’arrêteront. Sinon ils passeront sans s’arrêter.

« Ainsi, nous verrons aussi la maison de Jean-Baptiste. A qui appartient-elle, maintenant ?

– A qui la veut, je crois. Shammaï est parti et n’est plus revenu. Il a enlevé ses serviteurs et ses meubles. Les habitants, pour se venger de ses injustices, ont abattu le mur de clôture et la maison est à tout le monde. Le jardin, du moins. Ils s’y réunissent pour vénérer leur Jean-Baptiste. On dit que Shammaï a été assassiné. Je ne sais pourquoi… une affaire de femmes, semble-t-il…

– Quelque intrigue louche de la cour, certainement !… » marmonne Nathanaël dans sa barbe.

211.3 Ils se lèvent et se dirigent vers Hébron, vers la maison de Jean-Baptiste. Au moment où ils vont y arriver, voilà un groupe serré d’habitants. Ils s’avancent, un peu indécis, curieux et gênés. Mais Jésus les salue d’un sourire. Ils s’enhardissent, s’ouvrent, et le chef de la synagogue — si impoli, l’an passé —, sort du groupe.

« Paix à toi ! Salue immédiatement Jésus. Nous permets-tu de séjourner dans ta ville ? Je suis accompagné de tous mes disciples préférés et des mères de certains d’entre eux.

– Maître, mais tu ne gardes pas de rancune contre nous, contre moi ?

– De la rancune ? Je ne sais pas ce que c’est et je ne vois pas pourquoi je devrais en avoir.

– L’an passé, je t’ai offensé…

– Tu as offensé l’Inconnu, te croyant en droit de le faire. Puis tu as compris et tu as regretté de l’avoir fait. Mais c’est du passé et, comme le regret efface la faute, le présent efface le passé. Maintenant, pour toi, je ne suis plus l’Inconnu. Quels sentiments éprouves-tu donc pour moi ?

– Du respect, Seigneur. Du… désir…

– Du désir ? Qu’attends-tu de moi ?

– Te connaître mieux que je ne te connais.

– Comment ? De quelle façon ?

– Par ta parole et tes œuvres. La connaissance de ta personne, de ta doctrine, de ta puissance est parvenue jusqu’ici, et on nous a dit que tu n’es pas étranger à la libération de Jean-Baptiste. Tu ne le haïssais donc pas, tu n’as pas cherché à supplanter notre Jean ! Lui-même n’a pas nié que c’est grâce à toi qu’il a revu la vallée du saint Jourdain. Nous sommes allés auprès de lui, lui parler de toi, et il nous a dit : “ Vous ne savez pas qui vous avez repoussé. Je devrais vous maudire, mais je vous pardonne parce qu’il m’a enseigné à pardonner et à être doux. Mais, si vous ne voulez pas être anathème au Seigneur et à moi son serviteur, aimez le Messie. Et n’ayez pas de doute. Voici à quoi vous le reconnaîtrez : esprit de paix, amour parfait, sagesse supérieure à toute autre, doctrine céleste, douceur suprême, puissance sur toute chose, humilité absolue, chasteté angélique. Vous ne pouvez pas vous tromper. Quand vous respirerez la paix auprès d’un homme qui se dit le Messie, quand vous boirez son amour, l’amour qui émane de lui, quand vous passerez de vos ténèbres à la lumière, quand vous verrez les pécheurs se racheter et les corps guérir, alors dites : ‘Celui-ci est vraiment l’Agneau de Dieu !’ ” Nous savons que tes œuvres sont celles dont parle notre Jean. Par conséquent, pardonne-nous, aime-nous, donne-nous ce que le monde attend de toi.

– C’est pour cela que je suis ici. Je viens de très loin pour donner aussi à la ville de Jean ce que je donne à tout lieu qui m’accueille. Dites ce que vous désirez de moi.

– Nous avons, nous aussi, des malades, et nous sommes ignorants, surtout en ce qui est amour et bonté. Jean, dans son amour absolu pour Dieu, a une main de fer et une parole de feu, et il veut nous plier tous comme un géant froisse un brin d’herbe. Beaucoup tombent dans le découragement parce que l’homme est plus pécheur que saint. Il est difficile d’être saint… Toi… on dit que tu ne courbes pas, mais que tu relèves, que tu ne cautérises pas, mais que tu appliques du baume, que tu n’écrases pas, mais que tu caresses. On sait que tu es paternel à l’égard des pécheurs et puissant contre les maladies quelles qu’elles soient, et surtout les maladies du cœur. Les rabbins ne savent plus le faire.

211.4 – Amenez-moi vos malades, puis réunissez-vous dans ce jardin abandonné et profané par le péché après avoir servi de temple pour la grâce qui y a habité. »

Tels des hirondelles, les habitants d’Hébron s’envolent dans toutes les directions et il ne reste que le chef de la synagogue qui entre avec Jésus et ses disciples dans l’enceinte du jardin ; ils se mettent à l’ombre d’une tonnelle où se mêlent les rosiers et les vignes qui ont poussé librement. Les habitants d’Hébron ont vite fait de revenir ; ils amènent un paralytique sur un brancard, une jeune aveugle, un petit muet et deux personnes qui souffrent de je ne sais quelle maladie, qu’on accompagne en les soutenant.

« Paix à toi », dit Jésus à chaque malade qui arrive.

Puis il les interroge avec une grande douceur :

« Que voulez-vous que je fasse pour vous ? »

Il s’élève alors tout un chœur de lamentations de ces infortunés, chacun voulant raconter sa propre histoire.

Jésus, qui était assis, se lève et s’avance vers le petit muet : il lui mouille les lèvres de sa salive et dit la grande parole :

« Ouvre-toi ! »

De même, il mouille les paupières fermées de l’aveugle, avec son doigt humide de salive. Puis il donne la main au paralytique et lui dit :

« Lève-toi ! »

Enfin, il impose les mains aux deux malades en leur disant :

« Soyez guéris, au nom du Seigneur ! »

Le petit muet, qui auparavant gémissait, dit nettement : « Maman ! », tandis que la jeune fille remue ses paupières dessillées sous la lumière et, de ses doigts, abrite ses yeux du soleil qui était pour elle un inconnu ; elle pleure, elle rit, elle regarde de nouveau, en fermant à moitié les yeux car elle n’est pas habituée à la lumière, elle regarde les feuillages, la terre, les personnes et particulièrement Jésus. Le paralytique descend avec assurance de son brancard ; puisque ce dernier est vide, ses charitables porteurs le haussent pour bien montrer à ceux qui sont loin que la grâce est accordée, pendant que les deux malades pleurent de joie et s’agenouillent pour vénérer leur Sauveur. La foule pousse un cri frénétique de louange.

Thomas, qui se tient à côté de Judas, le regarde si intensément et avec une expression si claire que celui-ci lui répond :

« J’étais un imbécile, pardonne-moi. »

211.5 Lorsque les cris ont cessé, Jésus commence à prêcher.

« Le Seigneur s’adressa à Josué en ces termes [5] : “ Parle aux fils d’Israël et dis-leur : établissez les villes de refuge dont je vous ai parlé par l’intermédiaire de Moïse, afin que celui qui aura tué involontairement puisse y trouver un asile et échapper ainsi à la colère du plus proche parent, du vengeur du sang. ” Or Hébron est l’une de ces villes.

Il est encore dit : “ Et les anciens de la ville ne livreront pas l’innocent aux mains de celui qui le cherche pour le tuer, mais ils l’accueilleront et lui permettront d’y habiter et il y restera jusqu’au jugement et jusqu’à la mort du grand prêtre alors en fonction ; après quoi, il pourra rentrer dans sa ville et dans sa maison. ”

Cette loi observe et organise l’amour miséricordieux à l’égard du prochain. C’est Dieu qui l’a imposée, car il n’est pas permis de tuer dans un accès de colère ni de condamner l’accusé sans l’entendre. On peut en dire autant des crimes et des accusations d’ordre moral. Il n’est pas permis d’accuser sans connaître, ni de juger sans entendre l’accusé. Mais aujourd’hui, une nouvelle série s’ajoute aux accusations et aux condamnations pour les fautes habituelles ou prétendues : elle montre de quelle manière sont traités ceux qui viennent au nom de Dieu. Au cours des siècles, cela s’est produit contre les prophètes et, de nos jours, cela se reproduit contre le Précurseur du Christ et contre le Christ.

Vous le voyez : attiré par tromperie hors du territoire de Sichem, Jean-Baptiste attend la mort dans les prisons d’Hérode, car jamais il ne consentira aux mensonges ou aux compromis. On pourra bien lui ôter la vie et lui couper la tête, mais on ne pourra briser son honnêteté, ni séparer son âme de la vérité qu’il a servie fidèlement sous toutes ses formes, divines, surnaturelles ou mo­rales. De la même façon, on persécute le Christ avec une furie redoublée – même décuplée – parce qu’il ne se borne pas à dire à Hérode : “ Cela ne t’est pas permis ”, mais qu’il proclame d’une voix de tonnerre ce : “ Cela ne t’est pas permis ” partout où, en entrant, il trouve le péché ou sait que le péché existe, sans exclure aucune catégorie, et cela au nom de Dieu et pour l’honneur de Dieu.

211.6 Comment cela se fait-il donc ? N’y a-t-il plus de serviteurs de Dieu en Israël ? Si, il y en a. Mais ce sont des “ idoles ”.

Dans la lettre de Jérémie aux exilés [6], il est dit, entre autres choses, ce qui suit. Et j’attire votre attention là-dessus, car toute parole du Livre est un enseignement qui, au moment où l’Esprit Saint l’a fait écrire pour un événement du moment, se rap­porte aussi à un fait à venir. Il est donc dit : “ …Une fois arrivés à Babylone, vous verrez des dieux d’or, d’argent, de pierre, de bois… Gardez-vous d’imiter la façon de faire des étrangers, d’avoir peur, de les craindre… Dites en votre cœur : ‘ Il ne faut adorer que toi, Seigneur. ’ ”

Cette lettre donne également des indications particulières sur ces idoles qui ont une langue faite par un artisan et ne s’en servent pas pour réprimander leurs faux prêtres, qui les dépouillent pour revêtir les courtisanes de l’or de l’idole, quitte ensuite à enlever l’or profané par la sueur de la prostitution pour en revêtir l’idole ; de ces idoles que la rouille et les vers ronger et qui ne sont décrassées et bien vêtues que si l’homme leur lave la figure et les habille car, d’elles-mêmes, elles ne peuvent rien faire, même si elles ont en main le sceptre ou la hache.

Et le prophète de conclure : “ Ne les craignez donc pas. ” Et il poursuit : “ Ces dieux sont aussi inutiles que des vases brisés. Leurs yeux sont remplis de la poussière soulevée par les pieds de ceux qui entrent dans le temple. On les tient bien enfermés comme dans un tombeau ou comme un homme qui a offensé le roi, car n’importe qui peut leur enlever leurs vêtements précieux. Ils ne voient pas la lumière des lampes, car ils sont dans les temples comme des poutres et les lampes ne servent qu’à les enfumer pendant que les chouettes, les hirondelles, et autres oiseaux volent au-dessus de leurs têtes et les souillent d’excréments, et que les chats se font un nid dans leurs vêtements et les déchirent. Il ne faut donc pas les craindre, ce sont des choses mortes. Même l’or ne leur sert à rien, c’est seulement pour l’apparence. D’ailleurs, si on ne le polit pas, ils ne brillent pas, de même qu’ils n’ont rien senti quand on les a fabriqués. Le feu ne les a pas réveillés. On les a achetés à des prix fabuleux. L’homme les porte là où il veut car ils sont honteusement impuissants… Pourquoi donc leur donne-t-on le nom de dieux ? Car on les adore en leur faisant des offrandes et par toute une pantomime de fausses cérémonies que ne comprennent pas ceux qui les font et que ne croient pas ceux qui les voient. Qu’on leur fasse du mal ou du bien, ils y sont indifférents, ils sont incapables d’élire ou de détrôner un roi, ils ne peuvent rendre les richesses ni le mal, ils ne peuvent sauver un homme de la mort, ni sauver le faible de celui qui le domine. Ils n’ont pas pitié des veuves et des orphelins. Ils sont semblables aux pierres de la montagne ”…

C’est plus ou moins ce que dit cette lettre.

211.7 Voici. Nous aussi, nous avons des idoles, et non plus des saints, dans les rangs du Seigneur. C’est pour cela que le mal peut se dresser contre le bien. Or le mal souille de fumier l’intelligence et le cœur de ceux qui ne sont plus saints, et qui font leurs nids sous de fausses apparences de bonté.

Ils ne savent plus tenir le langage de Dieu. C’est bien naturel ! Ils ont une langue faite par l’homme et ils tiennent un langage humain, quand ce n’est pas celui de Satan. Ils savent juste faire des reproches déplacés aux innocents et aux pauvres, mais ils se taisent devant le spectacle de la corruption des puissants. Car ils sont tous corrompus et ne peuvent s’accuser l’un l’autre, étant coupables des mêmes fautes. Cupides, non au profit du Seigneur, mais au profit de Mammon, ils travaillent en acceptant l’or de la luxure et du crime, en le troquant, en le volant, pris par une frénésie qui dépasse toute limite et tout ce qu’on peut imaginer. La poussière se dépose sur eux, fermente sur eux et, s’ils font voir une figure bien lavée, le regard de Dieu y voit un cœur souillé. La rouille de la haine et le ver du péché les rongent, et ils ne savent pas s’y opposer pour se sauver. Ils brandissent les malédictions comme des sceptres et des haches, mais ils ne savent pas qu’ils sont maudits. Enfermés dans leurs pensées et dans leur haine comme des cadavres dans un tombeau, ou des prisonniers dans un cachot, ils y restent, s’agrippant aux barreaux par crainte qu’une main ne les en sorte, parce que, là, ces morts sont encore quelque chose : des momies, non plus des momies à l’aspect humain, mais des corps desséchés comme du bois sec alors qu’au dehors ils seraient des objets démodés, négligés par le monde qui cherche la Vie, qui a besoin de la Vie comme l’enfant du sein maternel, et qui recherche celui qui lui donne la Vie et non les puanteurs de la mort.

Ils résident au Temple, oui, et la fumée des lampes – c’est-à-dire des honneurs –, les enfume, mais la lumière ne descend pas en eux. Toutes les passions font en eux leurs nids comme des oiseaux et des chats, alors que le feu de la mission ne leur donne pas le tourment mystique d’être brûlés par le feu de Dieu. Ils sont réfractaires à l’amour. Le feu de la charité ne les enflamme pas, comme la charité ne les revêt pas de ses splendeurs d’or, cette charité qui est double par sa manifestation et par sa source : charité envers Dieu et le prochain pour ce qui est de sa manifestation ; charité qui provient de Dieu et de l’homme pour ce qui est de sa source. Car Dieu s’éloigne de l’homme qui n’aime pas ; ainsi cette première source est tarie, et l’homme s’éloigne du méchant et ainsi se tarit la seconde source. Tout est enlevé par la Charité aux hommes sans amour. Ils se laissent acheter par de l’argent maudit et se laissent entraîner là où l’intérêt et la puissance l’exigent.

Non : cela n’est pas permis ! Il n’y a pas d’argent pour acheter les consciences, en particulier celles des prêtres et des maîtres. Il n’est pas permis d’acquiescer aux puissances de la terre quand elles veulent porter à des actes contraires à ce que Dieu commande. C’est de l’impuissance spirituelle ; or il est dit : “ L’eunuque n’entrera pas dans l’assemblée du Seigneur. ” Si donc l’homme physiquement impuissant ne peut appartenir au peuple de Dieu, l’impuissant spirituel peut-il être son ministre ? C’est pourquoi je vous dis que, en vérité, bon nombre de prêtres et de maîtres sont actuellement affligés d’un “ eunuchisme ” spirituel coupable, car ils sont mutilés dans leur virilité spirituelle. Il y en a beaucoup trop !

211.8 Réfléchissez. Observez. Comparez. Vous verrez que nous avons beaucoup d’idoles et peu de ministres du bien, qui est Dieu. Voilà pourquoi il peut se faire que les villes de refuge ne soient plus des refuges. On ne respecte plus rien en Israël, et les saints meurent parce que ceux qui ne le sont pas les haïssent.

Mais, moi, je vous invite : “ Venez ! ” Je vous appelle au nom de votre Jean qui souffre parce qu’il est saint, qu’on a frappé parce qu’il m’a précédé et qu’il a tenté d’enlever les ordures des chemins de l’Agneau. Venez servir Dieu. Le temps est proche. Ne restez pas non préparés à la Rédemption. Faites que la pluie puisse tomber sur un terrain ensemencé. Sinon, c’est pour rien qu’elle se déverserait. Vous, vous les habitants d’Hébron, vous devez être en tête ! Ici, vous avez vécu avec Zacharie et Elisabeth, ces saints qui ont mérité que le Ciel leur donne Jean. Ici, Jean a répandu le parfum de la grâce avec sa véritable innocence de petit enfant et, de son désert, il vous a envoyé les encens anticorrupteurs de sa grâce, devenue un prodige de pénitence. Ne décevez pas votre Jean. Il a porté l’amour du prochain à un degré pour ainsi dire divin qui lui fait aimer le dernier habitant du désert autant qu’il vous aime, vous, ses concitoyens. Mais il vous obtiendra sûrement le salut. Or le salut, c’est de suivre la voix du Seigneur et de croire en sa Parole. De cette cité sacerdotale, venez en masse vous mettre au service de Dieu. Je passe et je vous appelle. Ne vous montrez pas inférieurs aux prostituées auxquelles une parole de miséricorde suffit pour qu’elles abandonnent le chemin qu’elles suivaient et prennent la voie du bien.

On m’a demandé à mon arrivée : “ Mais tu ne nous gardes pas rancune ? ” De la rancune ? Oh non ! C’est de l’amour que je vous garde ! Et je garde l’espoir de vous voir dans les rangs de mon peuple, du peuple que je conduis à Dieu dans le nouvel exode vers la véritable Terre Promise : le Royaume de Dieu, au-delà de la Mer Rouge de la sensualité et des déserts du péché, libres des esclavages de tous genres, vers la Terre éternelle, riche de délices, comblée de paix…

Venez ! C’est l’Amour qui passe. Quiconque le veut peut le suivre, car pour être accueilli par lui, il ne faut que de la bonne volonté. »

211.9 Jésus achève dans un silence étonnant. Il semble que beaucoup soupèsent ce qu’ils ont entendu, l’examinent, le goûtent, le com­parent.

Pendant que se produisent ces réactions, Jésus, fatigué et en sueur, s’assied et parle avec Jean et Judas. Or voilà qu’un cri s’é­lève en dehors de l’enceinte du jardin, un cri d’abord indistinct puis plus clair :

« Le Messie est-il ici ? Il est ici ? »

Sur une réponse affirmative, on fait avancer un estropié qui ressemble à un S tant il est difforme.

« Oh ! C’est Masala !

– Mais il est trop recroquevillé ! Qu’espère-t-il ?

– Voici sa mère ! La malheureuse !

– Maître, son mari l’a renvoyée à cause de cet avorton qu’est son fils, et elle vit ici de charité. Mais elle est vieille, maintenant, et il lui reste peu de temps à vivre… »

L’avorton – le mot est juste – se tient maintenant devant Jésus. Il ne peut même pas voir son visage tant ce pauvre être est voûté et tordu. On dirait une caricature d’homme-chimpanzé ou d’homme-chameau.

Sa mère, âgée et misérable, ne parle même pas, elle gémit seulement :

« Seigneur, Seigneur… je crois… »

Jésus pose les mains sur les épaules déformées de l’homme qui lui arrive à peine à la taille, lève les yeux vers le ciel et dit d’une voix de tonnerre :

« Lève-toi et marche sur les chemins du Seigneur. »

L’infirme a une secousse, puis il bondit, debout comme l’homme le plus parfait. Le changement est si subit qu’il semble s’être débarrassé des ressorts qui le maintenaient dans cette position anormale. Maintenant, il arrive aux épaules de Jésus. Il le regarde, puis tombe à genoux, avec sa mère, et baise les pieds de son Sauveur.

Ce qui se produit ensuite dans la foule est indescriptible… Et, contre sa volonté, Jésus est contraint de séjourner à Hébron, car les gens font rapidement barrage aux issues pour l’empêcher d’en partir.

C’est ainsi qu’il entre dans la maison du vieux chef de la synagogue, qui a tellement changé depuis l’année passée.

[1] Probablement le château de Béther

[2] Cf. la mort dramatique de Doras en 2.93, EMV 126.

[3] Cf. la guérison de Jeanne de Chouza en 2.68, EMV 102.

[4] Cf. 2.41, EMV 77.

[5] Josué 20,1-3 ; 20,7

[6] Lettre de Jérémie 1,1-72
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 6 Fév - 8:59

Une onde d’amour pour Jésus. Prédication dans la maison d’Isaac

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 74
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 212


Jeudi 13 avril 28
Yutta

212.1 Toute la ville de Yutta est accourue à la rencontre de Jésus avec des fleurs sauvages des pentes de la montagne et les prémices de ses cultures, sans compter le sourire de ses enfants et les bénédictions de ses habitants. Et, avant même que Jésus puisse mettre les pieds dans le village, il est entouré par tous ces braves gens qui, prévenus par Judas et Jean envoyés en avant, sont accourus avec ce qu’ils ont trouvé de mieux pour faire honneur au Sauveur, et surtout avec leur amour.

Jésus ne cesse de bénir du geste et de la parole toutes ces personnes, grandes et petites, qui se serrent contre lui en baisant ses vêtements et ses mains et qui lui mettent leurs bébés dans les bras pour qu’il les bénisse par un baiser. La première à le faire, c’est Sarah qui lui met sur le cœur ce splendide petit amour de dix mois qu’est maintenant Jésaï [1].

Leur amour est si impétueux qu’il gêne les marcheurs. C’est comme une vague qui soulève. Je crois que Jésus avance moins par ses pieds que porté par tout ce flot, et son cœur est certainement soulevé bien haut, dans la sérénité, sous l’effet du bonheur que cet amour lui procure. Son visage resplendit comme aux moments de sa plus vive joie d’Homme-Dieu. Il n’a pas le visage puissant au regard magnétique des heures de miracle, ni le visage majestueux des moments où il exprime son union continuelle avec son Père, et encore moins l’expression sévère qu’il a quand il s’oppose à une faute. Tous ces visages resplendissent d’une lumière différente ; mais celle de maintenant est la lumière des heures de détente de tout son être, si souvent assailli de toutes parts, contraint de surveiller constamment ses moindres gestes ou paroles, ou de déjouer les pièges tendus par les plus pervers. Ces derniers, comme une araignée malfaisante, jettent leurs filets sataniques autour du divin Papillon qu’est l’Homme-Dieu dans l’espoir de paralyser son vol, d’emprisonner son esprit, pour l’empêcher de sauver le monde ; ils espèrent bâillonner sa parole pour qu’il n’instruise pas les suprêmes et coupables ignorances de la terre, lui lier les mains, ses mains de Prêtre éternel, pour qu’elles ne sanctifient pas les hommes dépravés par le démon et par la chair, lui voiler les yeux pour que la perfection de son regard — qui est aimant, pardon, amour et fascination victorieuse de toute résistance qui n’est pas celle d’un vrai satan — n’attire pas à lui les cœurs.

212.2 Ah ! N’en va-t-il pas encore et toujours de même à l’instigation des ennemis du Christ ? Est-ce que la science et l’hérésie, la haine et l’envie, les ennemis de l’humanité issus de cette humanité même comme des rameaux empoisonnés d’un bon arbre, ne font pas tout cela, aujourd’hui encore, pour faire mourir l’humanité ? Oui, c’est ce qu’ils font, car ils la haïssent plus encore qu’ils ne haïssent le Christ : en effet, ils s’en prennent activement à elle en la privant de sa joie par la déchristianisation, alors qu’ils ne peuvent rien ôter à Jésus, puisqu’il est Dieu, et eux poussière.

Mais le Christ se réfugie dans les cœurs fidèles et c’est de là qu’il regarde, parle, bénit l’humanité, et puis… et puis il se donne à ces cœurs, et eux… et eux touchent le Ciel avec sa béatitude, tout en restant ici-bas, mais en brûlant jusqu’à en éprouver un délicieux tourment de tout l’être : dans les sens et les organes, les sentiments et la pensée et dans leur âme enfin… Larmes et sourires, gémissements et chants, épuisement et même activité vitale sont nos compagnons ; encore plus que des compagnons, ils sont notre être même. En effet, de même que les os sont entourés de chair et que veines et nerfs sont situés sous l’épiderme, mais que tout ne fait qu’un seul homme, ainsi également toutes ces choses embrasées, nées du fait que Jésus s’est donné à nous, se trouvent en nous, dans notre pauvre humanité. Et que sommes-nous à ces moments qui ne pourraient durer éternellement, car s’ils duraient plus que quelques instants on mourrait brûlé et brisé ? Nous ne sommes plus des hommes. Nous ne sommes plus des animaux doués de raison qui vivent sur la terre. Nous sommes… nous sommes… oh ! Seigneur, laisse-moi le dire une fois, non par orgueil, mais pour chanter ta gloire, puisque ton regard me brûle et me fait délirer… Nous sommes alors des séraphins ! Et je m’étonne qu’il ne sorte pas de nous des flammes et des ardeurs sensibles aux êtres et à la matière, comme cela se produit lors des apparitions des damnés. En effet, si le feu de l’enfer est tel qu’un seul reflet émanant d’un damné peut brûler le bois et faire fondre les métaux, qu’en est-il donc de ton feu, mon Dieu, en qui tout est infini et parfait ?

On ne meurt pas de cette fièvre, non, ce n’est pas elle qui nous brûle. Ce n’est pas la fièvre des maladies physiques qui nous consume. C’est toi qui es notre fièvre, Amour ! Et c’est de lui que nous brûlons, que nous mourons, que nous nous consumons, c’est de lui et par lui que se déchirent les fibres du cœur qui ne peut résister à chose si grande. Mais je me suis mal exprimée car l’amour est délire, c’est une cascade qui brise les digues et descend en renversant tout ce qui n’est pas elle. L’amour est, dans l’âme, affolement des sensations de l’esprit, toutes vraies, toutes présentes. Mais la main ne peut les transcrire tant l’esprit est rapide pour traduire en pensée le sentiment qu’éprouve le cœur. Ce n’est pas vrai que nous mourons. Nous vivons. Nous vivons d’une vie décuplée, d’une vie double, en tant qu’hommes et que bienheureux : la vie de la terre, celle du Ciel. Nous atteignons et nous dépassons – j’en suis bien certaine – la vie sans défauts, sans amoindrissement ni limites que toi, Père, Fils et Esprit Saint, toi, Dieu Créateur, un et trine, avais donnée à Adam, en prélude à la Vie qui suit la montée vers toi, la Vie dont on jouit au Ciel après un tranquille passage du paradis terrestre au paradis céleste et un voyage fait dans les bras aimants des anges comme le fut le doux sommeil et la douce montée de Marie au Ciel pour venir à toi, à toi, à toi ! Nous vivons la vraie vie.

Et puis nous nous retrouvons ici et, comme je le fais en ce moment, nous nous étonnons, nous avons honte d’être allés jusque là, et nous disons : « Seigneur, je ne suis pas digne de telles hauteurs. Pardon, Seigneur. » Nous nous battons la poitrine par peur d’être tombés dans l’orgueil et nous laissons tomber un voile plus épais sur cette splendeur qui, si elle ne continue pas à flamber d’une ardeur plus que complète, par pitié pour nos limites, se rassemble pourtant au centre de notre cœur, prête à s’enflammer puissamment pour un nouveau moment de béatitude voulu de Dieu. Nous descendons le voile sur le sanctuaire où Dieu brûle de ses feux, de ses lumières, de ses amours… et, épuisés mais régénérés, nous reprenons notre marche… ivres d’un vin fort et suave qui n’émousse pas la raison, mais qui empêche de tourner ses yeux et ses pensées vers ce qui n’est pas le Seigneur, toi, mon Jésus, anneau qui joins notre misère à la Divinité, moyen de rédemption pour notre faute, créateur de béatitude pour notre âme, toi, le Fils qui, de tes mains blessées, mets nos mains dans les mains spirituelles du Père et de l’Esprit, pour que nous soyons en vous, maintenant et toujours. Amen.

212.3 Mais où suis-je allée pendant que Jésus me brûle en brûlant de son regard d’amour les habitants de Yutta ? Vous aurez remarqué que je ne parle plus de moi, ou bien rarement. Que de choses je pourrais dire ! Mais la fatigue et la faiblesse physique qui m’ac­cablent aussitôt après les dictées ainsi que la pudeur spirituelle toujours plus forte à mesure que j’avance m’incitent, m’o­bligent à me taire. Mais aujourd’hui… je suis montée trop haut et, vous savez, l’air de la stratosphère fait perdre tout contrôle… Je suis montée beaucoup plus haut que la stratosphère… et je n’avais plus la possibilité de me contrôler… Et puis, je crois que, si nous nous taisions toujours, nous qui sommes pris par ces tourbillons d’amour, nous finirions par éclater comme des projectiles ou plutôt comme des chaudières surchauffées et closes. Pardonnez-moi, Père. Et maintenant poursuivons.

212.4 Jésus entre à Yutta, et il est conduit sur la place du marché, puis à la pauvre cabane où Isaac a souffert pendant trente ans. On lui explique :

« C’est ici que nous venons pour parler de toi et pour prier comme dans une synagogue, la plus vraie. Car c’est ici que nous avons commencé à te connaître et ici que les prières d’un saint t’ont rappelé à nous. Entre. Vois comment nous avons arrangé sa demeure. »

Jusqu’à l’an dernier, la maisonnette comprenait trois petites pièces : celle où mendiait Isaac infirme, un débarras et une petite cuisine qui donnait sur la cour. On les a réunies en une seule pièce et il y a des bancs qui servent pour les rassemblements. Dans la cour, dans une petite baraque, on a rangé les quelques meubles d’Isaac comme des reliques ; le respect des habitants de Yutta a rendu la cour moins désolée, on y a mis des plantes grimpantes qui couvrent maintenant de fleurs la palissade rustique et forment un commencement de tonnelle en suivant des cordes tendues à la manière de filets au-dessus de la cour, au niveau du toit peu élevé.

Jésus les félicite et ajoute :

« Nous pouvons séjourner ici. Je vous prie seulement de loger les femmes et l’enfant.

– Oh, notre Maître ! Jamais de la vie ! Nous viendrons ici avec toi et tu nous parleras, mais tes disciples et toi, vous êtes nos hôtes. Accorde-nous la bénédiction de te recevoir ainsi que les serviteurs de Dieu. La seule chose qui nous déplaise, c’est qu’il n’y en ait pas autant que de maisons… »

Jésus accepte et sort de la maisonnette pour aller dans la maison de Sarah, qui ne cède à personne son droit de recevoir à dîner Jésus et ses disciples…

212.5 … Jésus, dans la maison d’Isaac, parle. Les gens occupent la pièce et la cour et s’entassent même dehors. Pour que tout le monde l’entende bien, Jésus se met au milieu de la pièce, de façon à ce que sa voix se fasse entendre tant dans la cour que sur la place. Il doit traiter un sujet suggéré par une question qu’on lui a posée ou par un événement. Il dit :

« …Mais, n’en doutez pas. Comme le dit Jérémie [2], ils verront à l’épreuve combien il est douloureux et amer d’avoir abandonné le Seigneur. Pour certaines fautes, mes amis, il n’existe ni salpêtre ni bore capable d’en effacer l’empreinte. Même le feu de l’enfer ne peut enlever cette marque. Elle est indélébile.

Là encore, il faut remarquer la justesse de la parole de Jérémie. Nos grands d’Israël ressemblent vraiment aux ânes sauvages dont parle le prophète. Ils sont habitués au désert de leur cœur. Pourtant, croyez-le bien, tant qu’on est avec Dieu, même si on est pauvre comme Job, seul ou nu, on n’est jamais seul, on n’est jamais pauvre, jamais dépouillé, jamais un désert. Mais eux, ils ont chassé Dieu de leur cœur et se trouvent ainsi dans un désert aride. Comme les ânesses sauvages, ils flairent dans le vent l’odeur des mâles, qui, dans notre cas et en raison de leurs passions, s’appellent puissance, argent, sans oublier la luxure proprement dite et ils suivent cette odeur jusqu’au crime. Oui, ils la suivent et la suivront de plus en plus. Ils ignorent que ce ne sont pas leurs pieds qui sont nus, mais leur cœur exposé aux flèches de Dieu, qui vengera leurs crimes. Comme ils seront alors confondus, le roi et les princes, les prêtres et les scribes qui en vérité ont dit et disent à ce qui est néant ou, pire, est péché : “ Tu es pour moi un père. C’est toi qui m’as engendré ” ! [3]

En vérité, en vérité je vous dis que Moïse brisa avec colère les Tables de la Loi [4] à la vue du peuple idolâtre, puis il retourna sur la montagne, pria, adora, obtint grâce. Il y a des siècles de cela. Mais l’idolâtrie n’a pas encore disparu du cœur des hommes, elle ne disparaîtra pas : au contraire, elle grandit comme le levain qu’on met dans la pâte. Maintenant, presque tout le monde a son veau d’or. La terre est une forêt d’idoles, car chaque cœur est un autel et il est bien difficile d’y trouver Dieu. Celui qui n’a pas une passion mauvaise en a une autre, celui qui n’a pas un désir mauvais en a un qui porte un autre nom. Celui qui ne pense pas à l’or ne pense qu’à sa situation sociale, celui qui n’est pas obnubilé par la chair est possédé par l’égoïsme. Combien d’êtres devenus des veaux d’or ne reçoivent-ils pas l’adoration des cœurs ! A cause de cela, le jour viendra où ils seront frappés. Alors ils appelleront le Seigneur et s’entendront répondre : “ Adresse-toi à tes dieux. Moi, je ne te connais pas. ”

Je ne te connais pas ! Parole redoutable, si c’est Dieu qui la dit à un homme. Dieu a créé l’espèce humaine et connaît chaque homme en particulier. Donc si Dieu dit : “ Je ne te connais pas ”, c’est signe que, de toute la force de sa volonté, il a effacé cet homme de sa mémoire. Je ne te connais pas ! Dieu est-il trop sévère en prononçant ce verdict ? Non. L’homme a crié au Ciel : “ Je ne te connais pas ” et le Ciel a répondu à l’homme : “ Je ne te connais pas. ” Fidèle comme l’écho…

212.6 D’ailleurs, réfléchissez : l’homme est obligé de connaître Dieu par devoir de reconnaissance, et par respect pour sa propre intelligence.

Par reconnaissance : Dieu a créé l’homme en lui faisant le don ineffable de la vie et en le pourvoyant du don encore plus ineffable de la grâce. Une fois celle-ci perdue par sa propre faute, l’homme s’entend faire une grande promesse : “ Je te rendrai la grâce. ” C’est Dieu, l’offensé, qui parle à l’offenseur comme s’il était lui, Dieu, le coupable tenu de réparer. Et Dieu tient sa promesse. Voilà, je suis ici pour rendre la grâce à l’homme. Dieu ne se borne pas aux dons surnaturels, mais il abaisse son Essence spirituelle à pourvoir aux lourdes nécessités de la chair et du sang de l’homme : il lui procure la chaleur du soleil, le soulagement de l’eau, les grains, les vignes, les arbres de toute sorte et les animaux de toute espèce. Ainsi l’homme reçoit-il de Dieu tout ce qu’il lui faut pour vivre. C’est le Bienfaiteur. Il faut lui en être reconnaissant et le lui montrer en s’efforçant de le connaître.

Par respect pour sa propre raison. Le fou, le simple d’esprit ne sont pas reconnaissants envers ceux qui les soignent parce qu’ils ne comprennent pas la valeur réelle des soins. Ils n’éprouvent que de la haine à l’égard de celui qui les lave ou les fait manger, les conduit ou les met au lit, ou encore veille à leur faire éviter les dangers, car, étant semblables à des animaux à cause de leur infirmité, ils prennent les soins pour des tortures. Mais l’homme qui manque à ses devoirs envers Dieu se déshonore lui-même, car il est un être doué de raison. Seuls les attardés mentaux ou les déments n’arrivent pas à distinguer le père de l’étranger, le bienfaiteur de l’ennemi. Mais l’homme intelligent connaît son père et son bienfaiteur et il se plaît à le connaître toujours mieux, même dans les choses qu’il ignore parce qu’elles sont arrivées avant sa naissance ou avant que son père ou son bienfaiteur ne l’en aient fait bénéficier. On doit donc agir de même avec le Seigneur pour montrer que l’on est un être intelligent et pas un sauvage.

Mais trop de personnes en Israël ressemblent à ces fous qui ne reconnaissent pas leur père ni leur bienfaiteur.

Jérémie se demande : “ La vierge peut-elle oublier ses pa­rures et une épouse sa ceinture ? [5] ” Oh, oui ! Israël est rempli de ces vierges folles, de ces épouses impudiques qui oublient leurs pa­rures et leurs ceintures honnêtes pour se revêtir d’oripeaux de prostituées ; et cela prend une proportion d’autant plus grande que l’on monte davantage dans l’échelle sociale, chez ceux qui devraient donner l’exemple au peuple. C’est donc à eux que s’adressent les reproches de Dieu, accompagnés de son courroux et de ses pleurs : “ Pourquoi essaies-tu de faire valoir l’honnêteté de ta conduite pour chercher l’amour, toi qui, au contraire, enseignes la perversion et tes manières d’agir et dont les pans de ton vêtement évoquent le sang des pauvres et des innocents ? ”

212.7 Mes amis, la distance est un bien et un mal. Etre très loin des endroits où je parle facilement est un mal, car cela vous empêche d’entendre les paroles de la vie. Vous vous en plaignez. C’est vrai. Mais c’est un bien parce que cela vous tient éloignés des lieux où fermente le péché, où bouillonne la corruption, où siffle le serpent insidieux pour agir sur moi en me gênant dans mon œuvre, et dans les cœurs en insinuant doutes et mensonges sur ma personne. Mais je préfère que vous soyez loin des corrompus. Je pourvoirai moi-même à votre formation. Vous voyez que Dieu a pourvu d’abord à ce que nous nous connaissions et donc que nous nous aimions. Je vous étais connu avant que nous ne nous soyons jamais vus. C’est Isaac qui m’a annoncé à vous. J’enverrai beaucoup d’Isaac pour vous transmettre mes paroles. Sachez, du reste, que Dieu peut parler partout, seul à seul avec l’âme de l’homme, et le perfectionner par son enseignement.

Ne craignez pas que la solitude puisse vous conduire à l’erreur. Non. Si vous ne le voulez pas, vous ne serez pas infidèles au Seigneur et à son Christ. D’ailleurs, que celui qui ne peut vraiment pas rester loin du Messie sache que le Messie lui ouvre son cœur et ses bras et lui dit : “ Viens. ” Venez, vous qui voulez venir. Restez, vous qui voulez rester. Mais, les uns comme les autres, annoncez le Christ par une vie honnête. Annoncez-le à l’encontre de la malhonnêteté qui se niche dans trop de cœurs. Annoncez-le à l’encontre de la légèreté des personnes innombrables qui ne savent pas rester fidèles et qui oublient leurs parures et leurs ceintures d’âmes invitées à leurs noces avec le Christ.

Vous m’avez dit avec joie : “ Depuis que tu es venu, nous n’avons pas eu de malades ni de morts. Ta bénédiction nous a protégés. ” Oui, la santé est importante. Mais faites en sorte que ma venue présente vous procure à tous la santé de l’âme, toujours, et en toute chose. C’est dans ce but que je vous bénis et vous donne ma paix, à vous-mêmes, à vos enfants, à vos champs, à vos maisons, à vos moissons, à vos troupeaux, à vos vergers. Servez-vous-en saintement, c’est-à-dire non pas en vivant pour eux, mais grâce à eux et en donnant le surplus aux nécessiteux, en achetant ainsi la pleine mesure des bénédictions du Père et une place aux Cieux.

Allez. Moi, je reste pour prier… »

[...]

212.8 Je relis, Père, ce que j’ai écrit hier, pour réécrire certains mots inintelligibles, par pitié pour vos yeux. Je suis désolée en le relisant… c’est tellement au-dessous de ce que j’éprouvais pendant que je décrivais mon état d’âme ! J’ai pourtant appelé mon saint Jean pour m’aider à exprimer ce que le Seigneur me faisait éprouver, à la fois par peur de mal m’expliquer et pour trouver en lui un réconfort – car c’est aussi une souffrance, savez-vous ? –. Je lui ai dit : « Tu connais bien ces choses. Tu les as éprouvées. Aide- moi. » Et sa présence ne m’a pas fait défaut, ni son sourire d’éternel enfant bon, ni ses caresses. Néanmoins, je sens maintenant que ma pauvre parole est tellement inférieure au sentiment que j’éprouvais… Tout est paille de ce qui est humain, il n’y a que le surnaturel qui soit de l’or. Mais l’humain ne peut pas même le décrire !

[1] Cf.2.40, EMV 76.

[2] Jérémie 2,19

[3] En référence au Psaume 2,7

[4] Exode 32,19 et 30-32

[5] Jérémie 2,32

[6] Jérémie 2,34
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 7 Fév - 10:06

213.Une prophétie de Jésus et le début de la prédication apostolique

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 75
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 213


Vision du lundi 9 juillet 1945

Samedi 22 avril 28
Kérioth

      213.1 Je vois l’intérieur de la synagogue de Kérioth, à l’endroit même où Saül mort fut couché sur le sol après avoir vu la gloire future du Christ [1]. Jésus et Judas émergent au dessus d’un groupe agglutiné ; ce sont les deux plus grands, et tous deux ont le visage rayonnant, l’un d’amour, l’autre de joie de voir que sa ville est toujours fidèle au Maître et qu’elle lui rend les honneurs solennels. Il y a là d’abord les notables de Kérioth puis, plus loin de Jésus, les habitants, serrés comme des sardines, de sorte que la synagogue est si comble qu’il y est difficile de respirer bien que les portes soient ouvertes. Et, pour faire honneur au Maître, pour l’écouter, ils finissent par créer un désordre indescriptible et tant de chahut que l’on n’entend plus rien.

      Jésus supporte tout en silence. Mais les autres se fâchent, font de grands gestes et crient :

      « Silence ! »

      Mais ces cris se perdent dans le vacarme comme un hurlement poussé sur une plage pendant une tempête.

      Judas ne tergiverse pas : il monte sur un siège élevé et donne un grand coup sur les lampes suspendues en grappes au milieu d’eux. Le métal creux résonne, et les chaînettes retentissent en se frappant, comme des instruments de musique. Les gens se calment, et on peut enfin entendre parler Jésus.

      Il dit au chef de la synagogue :

      « Donne-moi le dixième rouleau de cette étagère. »

      Dès qu’il l’a en main, il le déroule et le présente au chef de la synagogue en lui disant :

      « Lis le chapitre 4 de l’histoire, dans le second livre des Maccabées. »

      Obéissant, le chef lit. Et les épreuves d’Onias, les erreurs de Jason, les trahisons et les vols de Ménélas défilent ainsi devant l’assistance. Le chapitre est terminé. Le lecteur regarde Jésus, qui a écouté attentivement.

      213.2 Jésus fait signe que cela suffit, puis il se tourne vers le peuple :

      « Dans la ville de mon très cher disciple, je ne ferai pas mon enseignement habituel. Nous resterons ici quelques jours et je veux que ce soit lui qui vous le rapporte. C’est en effet d’ici que je veux que commence le contact direct, le contact continuel entre les apôtres et le peuple. Cela a été décidé en Haute-Galilée et il y eut là-bas une première lueur. Mais l’humilité de mes disciples les a fait rentrer dans l’ombre parce qu’ils craignent de ne pas savoir faire et d’usurper ma place. Non. Ils doivent le faire, ils le feront bien et aideront leur Maître. C’est donc ici que doit commencer la véritable prédication apostolique, en unissant dans un seul amour les frontières galiléennes et phéniciennes avec les terres de Juda, les plus au midi, des frontières de la Palestine jusqu’aux pays du soleil et des sables. Car le Maître ne suffit plus aux besoins des foules. D’ailleurs, il est juste que les aiglons quittent le nid et fassent leurs premiers vols pendant que le Soleil est encore avec eux et que son aile robuste les conduit.

      Pendant ces jours, je serai donc votre ami et votre réconfort. Eux, ils seront la parole et iront semer les graines que je leur ai données. C’est pourquoi je ne vous adresserai pas d’enseignement public, mais je vous donnerai une chose privilégiée : une prophétie. Je vous prie d’en garder le souvenir pour l’avenir lorsque l’événement le plus horrible de l’histoire humaine aura voilé le soleil et que, dans les ténèbres, les cœurs pourront être amenés à des jugements erronés. Je ne veux pas que vous soyez induits en erreur, vous qui, dès le premier instant, avez été bons avec moi. Je ne veux pas que le monde puisse dire : “ Kérioth fut l’ennemie du Christ. ” Je suis juste. Je ne peux permettre qu’une critique rancunière ou née par amour pour moi puisse, poussée par l’aiguillon de son ressentiment, vous accuser de fautes à mon égard. Dans une famille nombreuse, on ne peut exiger une égale sainteté de tous les enfants ; de la même façon, on ne peut l’exiger dans une ville bien peuplée. Mais ce serait très opposé à la charité de dire, pour un mauvais fils ou pour un habitant qui n’est pas bon : “ Toute la famille, ou toute la ville est anathème. ”

      Ecoutez donc, rappelez-vous, soyez toujours fidèles et, tout comme je vous aime au point de vouloir vous défendre d’une accusation injuste, vous aussi, sachez aimer ceux qui ne sont pas coupables. Toujours. Quels qu’ils soient. Quel que soit leur lien de parenté avec les coupables.

      213.3 Maintenant, écoutez. Il viendra un temps où, en Israël, il y aura des gens qui pilleront le trésor et trahiront leur patrie. Dans l’espoir de gagner l’amitié des étrangers, ils diront du mal du véritable Grand-Prêtre en l’accusant de s’allier avec les ennemis d’Israël et de mal se conduire à l’égard des fils de Dieu. Pour parvenir à leur fin, ils seront capables de commettre des crimes dont ils feront porter la responsabilité à l’Innocent. Et, toujours en Israël, il viendra un temps où, plus encore qu’au temps d’Onias, un infâme, complotant de prendre la place du Pontife, ira trouver les puissants d’Israël et les corrompra avec de l’or et, plus infâme encore, par des paroles mensongères. Qui plus est, il déformera la réalité des faits, ne parlera pas contre les fautes, mais au contraire, poursuivant son but indigne, il se mettra à changer les coutumes pour avoir plus facilement prise sur les âmes privées de l’amitié de Dieu : tout cela pour parvenir à ses fins. Et il réussira. Ah ! C’est certain ! Car, si l’on ne trouve pas les gymnases de l’impie Jason dans la demeure même sur le mont Moriah, ils sont en réalité dans les cœurs des habitants du mont qui sont disposés à vendre ce qui est bien plus qu’un terrain : leur conscience même. Les fruits de l’antique erreur sont maintenant visibles et celui qui a des yeux pour voir voit ce qui se produit là où l’on devrait trouver charité, pureté, justice, bonté, ainsi qu’une religion sainte et profonde. Mais s’il y a des fruits qui font déjà trembler, les fruits nés des semences qu’ils auront jetées ne seront pas seulement objets de crainte, mais de malédiction divine.

      Et nous voilà à la prophétie proprement dite. En vérité, je vous dis que celui qui a arraché la place et la confiance grâce à un jeu prolongé et astucieux, celui-là livrera pour de l’argent le souverain Prêtre, le vrai Prêtre à ses ennemis. Trompé par des protestations d’affection, désigné aux bourreaux par un acte d’amour, celui-ci sera tué en dépit de toute justice.

      Quelles accusations adressera-t-on au Christ, puisque c’est de moi que je parle, pour justifier le droit de le tuer ? Quel sort sera réservé à ceux qui agiront ainsi ? Un sort immédiat d’effroyable justice. Un sort non pas individuel, mais collectif pour les complices du traître. Un sort plus lointain et encore plus terrible que celui de l’homme que le remords amènera à couronner son âme de démon par le dernier crime contre lui-même. Ce dernier, en effet, ne durera qu’un instant. L’autre châtiment sera long, effroyable. Trouvez-le dans cette phrase : “ et, enflammé d’indignation, il ordonna qu’Andronique soit dépouillé de la pourpre et exécuté à l’endroit même où il avait commis l’impiété contre Onias. [2] ” Oui, la caste sacerdotale sera frappée dans ses enfants, après l’avoir été dans les exécuteurs du crime. Quant au destin de la masse complice, lisez-le dans ces mots : “ de la terre, la voix de ce sang crie vers moi. Tu seras donc maudit… [3] ” Et c’est Dieu qui les prononcera à tout un peuple qui n’aura pas su protéger le don du Ciel. Car, s’il est vrai que je suis venu pour racheter, malheur à ceux qui seront des assassins et ne seront pas rachetés, parmi ce peuple qui aura eu comme première rédemption ma Parole.

      J’ai dit. Gardez-en le souvenir. Et, quand vous entendrez dire que je suis un malfaiteur, répondez : “ Non, il l’a prédit : c’est l’accomplissement de ce qu’il a annoncé ; il est la Victime mise à mort pour les péchés du monde. ” »

      213.4 La synagogue se vide et tout le monde parle et gesticule à propos de la prophétie et de l’estime dont Jésus fait preuve envers Judas. Les habitants de Kérioth sont flattés de l’honneur que leur a fait le Messie en choisissant la ville d’un apôtre, et précisément celle de l’apôtre de Kérioth, pour commencer le ministère apostolique, et aussi pour le don de la prophétie. Car, si triste qu’elle soit, c’est un grand honneur de l’avoir reçue, et avec elle les paroles d’amour qui précèdent…

      Dans la synagogue, il ne reste que Jésus et le groupe des apôtres. Ou plutôt ils passent dans le jardinet qui se trouve entre la synagogue et la maison du chef. Judas s’est assis, en larmes.

      « Pourquoi pleures-tu ? Je n’en vois pas la raison…, lui dit Jude.

      – Mais voilà, je ferais bien comme lui. Vous avez entendu ? Désormais c’est à nous de parler…, dit Pierre.

      – Mais nous l’avons déjà fait sur la montagne. Nous ferons toujours mieux. Jean et toi en avez été capables immédiatement, dit Jacques, fils de Zébédée, pour les encourager.

      – Le pire, c’est pour moi… mais Dieu m’aidera. N’est-ce pas, Maître ? » demande André.

      Jésus, qui parcourait des rouleaux qu’il avait emportés, se retourne :

      « Que disais-tu ?

      – Que Dieu m’aidera quand je devrai parler. J’essaierai de répéter tes paroles du mieux que je pourrai. Mais mon frère a peur et Judas pleure.

      – Tu pleures ? Pourquoi ? demande Jésus.

      – Parce que j’ai vraiment péché. André et Thomas peuvent le dire. J’ai médit sur ton compte, et toi, tu me récompenses en m’appelant “ mon très cher disciple ” et en voulant que j’enseigne ici… Quel amour !

      – Mais ne savais-tu pas que je t’aimais ?

      – Si, mais… Merci, Maître. Je ne médirai plus jamais, car je suis les ténèbres et, toi, tu es vraiment la Lumière. »

      Le chef de la synagogue revient et les invite chez lui. Tout en marchant, il dit à Jésus :

      « Je réfléchis à tes paroles. Si j’ai bien compris, de même que tu as trouvé à Kérioth un préféré, notre Judas, fils de Simon, tu prophétises qu’il s’y trouvera un homme indigne. Cela m’afflige. Heureusement que Judas compensera l’autre…

      – J’y apporterai tout mon effort », dit Judas, qui s’est ressaisi.

      Jésus garde le silence, mais il regarde ses interlocuteurs et ouvre les bras comme pour dire : « C’est comme ça. »


[1] Cf. 2.42, EMV 78.

[2] 2 Maccabées 4,31-38

[3] Genèse 4,10 en parlant de Caïn
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 8 Fév - 8:52

214. La mère de Judas se confie à la Mère de Jésus

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 76
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 214


Dimanche 23 avril 28
Kérioth

    214.1 Jésus est sur le point de se mettre à table, dans la belle maison de Judas, en compagnie de tous ses disciples. Et il dit à la mère de Judas, venue de sa maison de campagne pour recevoir dignement le Maître :

      « Non, mère, tu dois rester toi aussi avec nous. Ici, nous sommes en famille. Ce n’est pas le banquet froid et compassé des hôtes d’occasion. Moi, je t’ai pris un fils et je veux que tu me prennes comme fils, de même que, moi, je te prends comme mère, car tu en es bien digne. N’est-ce pas vrai, mes amis, qu’ainsi nous nous sentirons tous plus contents et plus à notre aise ? »

      Les apôtres et les deux Marie acquiescent chaleureusement, et la mère de Judas, les yeux scintillant de larmes, doit s’asseoir entre son fils et le Maître qui a en face de lui les deux Marie, et Marziam au milieu.

      La servante apporte les mets, que Jésus offre et bénit ; puis il les distribue – car, sur ce point, la mère de Judas reste inflexible – mais en commençant toujours par elle, ce qui émeut toujours plus la femme et rend Judas tout fier, et en même temps pensif.

      Les conversations roulent sur divers sujets, et Jésus cherche à intéresser la mère de Judas et à la mettre en relation avec les deux Marie.

      214.2 Margziam y joue un grand rôle lorsqu’il déclare qu’il aime déjà bien la mère de Judas “ parce qu’elle s’appelle Marie, comme toutes les femmes qui sont bonnes. ”

      « Et celle qui nous attend sur le lac, tu ne l’aimeras pas, petit méchant ? demande Pierre, à moitié sérieux.

      – Oh si ! Beaucoup, si elle est bonne.

      – Pour cela, tu peux en être certain. Tout le monde le dit, et je dois reconnaître moi aussi que, si elle a toujours été douce avec sa mère et avec moi, c’est vraiment signe qu’elle est bonne. Mais elle ne s’appelle pas Marie, mon fils. Elle a un nom bizarre, car son père lui a donné le nom de ce qui l’avait enrichi : il a voulu l’appeler Porphyrée. La pourpre [1] est belle et précieuse. Mon épouse n’est pas belle, mais sa bonté la rend précieuse. Et moi, je l’ai aimée parce qu’elle est paisible, chaste, silencieuse. Trois vertus… qui ne sont guère faciles à trouver ! Je l’avais remarquée alors qu’elle n’était qu’une petite fille. Je descendais à Capharnaüm avec le poisson et je la voyais travailler silencieusement aux filets ou à la fontaine, ou encore dans le jardin de la maison. Ce n’était pas le papillon distrait qui volette de-ci de-là, ni la poulette étourdie qui se retourne à chaque cocorico du coq. Elle ne levait jamais la tête, même si elle entendait des voix d’homme. Alors, quand je lui ai adressé mes premières salutations, tout amoureux de sa bonté et de ses magnifiques tresses – c’était tout ce qu’elle avait de bien – et aussi… oui, et aussi apitoyé par sa condition d’esclave dans sa famille (elle avait alors seize ans), elle a à peine répondu, en baissant davantage son voile et en restant encore plus à la maison. Ah, il m’en a fallu du temps pour réussir à savoir si elle ne me prenait pas pour un ogre et pour envoyer le paranymphe ! Mais je ne regrette rien. J’aurais pu faire tout le tour de la terre, mais jamais je n’en aurais trouvée une comme elle. N’est-ce pas, Maître, qu’elle est bonne ?

      – Très bonne. Et je suis sûr que Marziam l’aimera, même si elle ne s’appelle pas Marie. N’est-ce pas, Marziam ?

      – Oui. Elle s’appelle “ maman ”, or les mamans sont bonnes et on les aime. »

      214.3 Puis Judas raconte ce qu’il a fait pendant la journée. Je comprends qu’il est allé prévenir sa mère de leur arrivée et que, ensuite, il a commencé à parler dans les campagnes de Kérioth en compagnie d’André. Il ajoute :

      « Mais je voudrais que, demain, vous veniez tous. Je ne veux pas être le seul à briller. Nous irons, autant que possible, un Judéen avec un galiléen. Moi, par exemple avec Jean, et Simon avec Thomas. Si l’autre Simon pouvait venir ! Quant à vous deux (il désigne les fils d’Alphée), vous pouvez y aller ensemble. J’ai dit, même à ceux qui ne voulaient pas le savoir, que vous étiez les frères du Maître. Vous deux aussi (il montre Philippe et Barthélemy), vous pouvez aller ensemble. J’ai dit que Nathanaël est un rabbin venu à la suite du Maître. Cela fait bonne impression. Et… il reste vous trois. Mais dès l’arrivée de Simon le Zélote on pourra faire un couple de plus. Et puis nous alternerons, parce que je veux qu’ils vous connaissent tous… »

      Judas est plein d’entrain.

      « J’ai parlé sur le Décalogue, Maître, en cherchant à mettre en lumière spécialement les points auxquels je sais que cette région est plus infidèle…

      – N’aie pas la main lourde, Judas, je t’en prie. Garde toujours à l’esprit que la douceur obtient plus que l’intransigeance et que tu es un homme, toi aussi. Examine-toi donc, et vois comme il t’est facile à toi aussi de tomber et comment tu te fâches pour des reproches trop directs, intervient Jésus tandis que la mère de Judas baisse la tête en rougissant.

      – Ne crains rien, Maître, je m’efforce de t’imiter en tout. Cependant, dans le village que nous apercevons par cette porte même – ils déjeunent portes ouvertes et l’on découvre un bel horizon de cette pièce surélevée –, il y a un infirme qui voudrait guérir et qu’on ne peut transporter. Voudrais-tu venir avec moi ?

      – Demain, Judas, demain matin sans faute. Et s’il y a d’autres malades, prévenez-moi ou conduisez-moi à eux.

      – Veux-tu vraiment combler de bienfaits ma patrie, Maître ?

      – Oui, pour qu’on ne puisse pas dire que j’ai été injuste envers ceux qui ne m’ont pas fait de mal. Je fais du bien même aux méchants ! Par conséquent, pourquoi pas aux habitants honnêtes de Kérioth ? Je veux laisser de moi un souvenir indélébile…

      – Mais comment ? Nous ne reviendrons plus ici ?

      – Nous reviendrons encore, mais…

      214.4 – Voici ta Mère, ta Mère avec Simon ! » s’écrie l’enfant qui voit Marie et Simon monter l’escalier qui mène à la terrasse où se trouve la pièce.

      Tous se lèvent et vont à la rencontre des deux arrivants. Bruits d’exclamations, de salutations, de sièges qu’on remue. Mais rien ne détourne Marie de saluer en premier Jésus, puis la mère de Judas qui s’est profondément inclinée et que Marie, au contraire, relève et embrasse comme si c’était une chère amie retrouvée après une longue absence.

      Ils rentrent dans la pièce, et Marie, la mère de Judas, ordonne à la servante d’apporter de nouveaux plats pour ceux qui viennent d’arriver.

      « Voici, mon Fils, la salutation d’Elise » dit Marie, qui remet à Jésus un petit rouleau qu’il ouvre et lit.

      Il dit ensuite :

      « Je le savais, j’en étais certain. Merci, Maman, pour Elise et pour moi. Tu es vraiment la santé des infirmes !

      – Moi ? Toi, mon Fils, pas moi.

      – Toi, et tu es ma plus grande aide. »

      Puis il se tourne vers les apôtres et vers les femmes disciples :

      « Elise écrit : “ Reviens, ma Paix. Je veux non seulement t’aimer mais te servir. ” Ainsi, nous avons relevé une femme de l’angoisse, de la mélancolie, et nous avons gagné en elle un disciple. Nous reviendrons, oui.

      – Elle veut connaître aussi les femmes disciples. Elle reprend lentement, mais régulièrement. Pauvre chérie ! Elle a encore des moments de défaillance et de peur. N’est-ce pas, Simon ? Un jour, elle a voulu essayer de sortir avec moi, mais elle a vu un ami de son Daniel… et nous avons eu beaucoup de mal à calmer son chagrin. Mais Simon est si bon ! Puisqu’elle éprouve le désir de rentrer dans le monde, mais que le monde de Bet-çur est chargé de trop de souvenirs pour elle, il m’a suggéré d’appeler Jeanne. Et il est allé l’appeler lui-même. Elle était revenue à Béther après les fêtes, auprès de ses splendides roseraies de Judée. Simon dit qu’il lui semblait rêver en traversant ces collines couvertes de rosiers, il croyait être au paradis. Elle est venue aussitôt. Elle a pu comprendre une mère qui pleure ses fils et compatir à ses souffrances ! Elise s’est beaucoup attachée à elle et, moi, je suis venue. Jeanne veut la persuader de sortir de Bet-çur et de l’accompagner dans son château. Et elle y parviendra, car elle est douce comme une colombe, mais ferme comme du granit quand elle le veut.

      – Nous irons à Bet-çur au retour, puis nous nous séparerons. Vous, les femmes disciples, vous resterez quelque temps avec Elise et Jeanne. Nous, nous parcourrons la Judée et nous nous retrouverons à Jérusalem pour la Pentecôte. »…

      214.5 … Marie la très sainte et Marie, mère de Judas, sont ensemble. Non pas dans la maison de ville, mais dans celle de campagne. Elles sont seules. Jésus et les apôtres sont dehors. Les femmes disciples et l’enfant sont dans la splendide pommeraie, et l’on entend leurs voix se mêler au bruit du linge que l’on bat au lavoir. Peut-être font-elles la lessive pendant que l’enfant joue.

      La mère de Judas, assise dans une pièce dans la pénombre à côté de Marie, lui confie :

      « Ces jours paisibles resteront en moi comme un doux rêve. Ils sont vraiment trop courts ! Je comprends qu’il ne faut pas être égoïste et qu’il est juste que vous alliez chez cette pauvre femme et vers tant d’autres malheureux. Mais si je pouvais ! Si je pouvais arrêter le temps, ou venir avec vous !… Mais cela m’est impossible. Je n’ai pas de parents en dehors de mon fils et je dois m’occuper des biens de la maison…

      – Je comprends… Tu souffres de te séparer de ton fils. Nous les mères, nous voudrions rester toujours avec nos enfants. Mais nous les donnons pour une bien grande cause et nous ne les perdons pas. La mort elle-même ne nous enlève pas nos enfants, s’ils sont et si nous sommes en grâce aux yeux de Dieu. Mais nous les avons encore sur la terre, même si la volonté de Dieu les arrache à notre sein pour les donner au monde, pour le bien de ce monde. Nous pouvons toujours les atteindre et le seul écho de leurs œuvres est déjà pour nous comme une caresse au cœur, car leurs œuvres sont le parfum de leurs âmes.

      214.6 – Qu’est ton Fils, pour toi, Femme ? » questionne doucement Marie, mère de Judas.

      Marie répond avec assurance :

      « C’est ma joie.

      – Ta joie ! »

      A ces mots, la mère de Judas fond en larmes en se courbant sur elle-même, comme pour cacher son chagrin. Son front touche pour ainsi dire ses genoux, tant elle est repliée sur elle-même.

      « Pourquoi pleures-tu, ma pauvre amie ? Pourquoi ? Dis-le-moi. Je suis heureuse dans ma maternité, mais je sais comprendre aussi les mères qui ne le sont pas…

      – Oui, les mères qui ne sont pas heureuses ! J’en suis une. Ton Fils est ta joie… Le mien est ma douleur. Il l’était, du moins. Maintenant, depuis qu’il est avec ton Fils, il m’afflige moins. Ah ! De tous ceux qui prient pour ton saint Fils, pour son bien et son triomphe, il n’y en a pas une, après toi – qui es bienheureuse –, qui prie autant que cette malheureuse qui te parle… Dis-moi la vérité : que penses-tu de mon fils ? Nous sommes deux mères, l’une en face de l’autre. Entre nous, il y a Dieu. Et nous parlons de nos fils. Tu ne peux que trouver facile de parler du tien. Moi… moi, je dois me faire violence pour parler du mien. Pourtant, quel bien ou quelle douleur cette conversation peut m’apporter ! Et même si c’est de la douleur, ce sera toujours un soulagement d’en avoir parlé…

      Cette femme de Bet-çur a été rendue presque folle par la mort de ses fils, n’est-ce pas ? Mais, moi, je te jure que, parfois, j’ai pensé et pense encore en regardant mon Judas, beau, en pleine santé, intelligent, mais qui n’est ni bon ni vertueux, qui n’a pas l’âme droite, dont les sentiments ne sont pas sains, que je préférerais le pleurer mort plutôt que de le savoir… de le savoir très mal vu de Dieu. Toi, dis-moi, que penses-tu de mon fils ? Sois franche. Cela fait plus d’un an que cette question me brûle le cœur. Mais à qui le demander ? Aux habitants ? Eux, ils ignoraient encore que le Messie est sur terre et que Judas voulait aller avec lui. Moi, je le savais. Il me l’avait dit en venant ici, après la Pâque, exalté, violent, comme toujours quand il fait un caprice et comme toujours plein de mépris pour les conseils de sa mère. A ses amis de Jérusalem ? Une sainte prudence et une pieuse espérance me retenaient de le faire. Je ne voulais pas leur dire, à eux que je ne peux pas aimer parce qu’ils sont tout sauf des saints : “ Judas suit le Messie. ” Et j’espérais que son caprice passerait comme tant d’autres, comme tous, en me causant, bien sûr, larmes et chagrins comme à plus d’une jeune fille ici et ailleurs dont il s’est entiché, mais qu’il n’a jamais épousée. Tu ne sais pas qu’il y a des endroits où il ne va plus parce qu’il pourrait s’y trouver à juste titre châtié ? Même son engagement au Temple fut un caprice. Il ne sait pas ce qu’il veut. Il ne l’a jamais su. Son père — que Dieu lui pardonne — l’a pourri. Les deux hommes de la maison ne m’ont jamais écoutée. Je n’ai eu qu’à pleurer et à réparer par des humiliations de toutes sortes… A la mort de Joanna — bien que personne ne l’ait dit, je sais, moi, qu’elle est morte de chagrin quand, après l’avoir attendu pendant toute sa jeunesse, elle a su par Judas qu’il ne voulait pas se marier, alors qu’il était notoire qu’à Jérusalem il avait envoyé des amis pour demander sa fille à une femme riche qui possédait des comptoirs jusqu’à Chypre — j’ai dû beaucoup pleurer, beaucoup, à cause des reproches que me fit la mère de la jeune morte, comme si j’avais été complice de mon fils. Non. Je ne le suis pas, mais je ne suis rien auprès de lui.

      L’an dernier, quand le Maître est venu ici, je me suis rendu compte que, lui, il avait compris… et je fus sur le point de parler. Mais il est douloureux pour une mère de devoir dire : “ Méfie-toi de mon fils. Il est avide, il a le cœur dur, c’est un vicieux, un orgueilleux, un instable. ” Et il l’est bien. Moi…, moi je prie pour que ton Fils, lui qui fait tant de miracles, en fasse un pour mon Judas… Mais toi, toi, dis-moi : que penses-tu de lui ? »

      214.7 Marie, qui est restée silencieuse, avec une expression de douloureuse pitié devant ces lamentations maternelles auxquelles son âme droite ne peut apporter de démenti, dit doucement :

      « Pauvre mère !… Qu’est-ce que je pense ? Oui, ton fils n’a pas l’âme limpide de Jean, il n’est pas le doux André, il n’a pas la fermeté de Matthieu qui a voulu se convertir et qui l’a fait. C’est… un instable, oui, c’est cela. Mais nous prierons beaucoup pour lui, toi et moi. Ne pleure pas. Peut-être que, dans ton amour de mère qui voudrait pouvoir être fière de ton enfant, tu le vois pire qu’il n’est…

      – Non, non ! Je vois juste et j’ai tellement peur ! »

      La pièce est emplie des plaintes de la mère de Judas ; dans la pénombre, la blancheur du visage de Marie ressort : elle est devenue plus pâle, après ces aveux maternels qui avivent tous les soupçons de la Mère du Seigneur.

      Mais elle se domine. Elle attire à elle la malheureuse mère et la caresse, alors que celle-ci, une fois rompues les digues qui la retenaient, raconte confusément, fiévreusement, toutes les duretés, les exigences, les violences de Judas, avant d’achever :

      « Je rougis pour lui quand je me vois l’objet des attentions affectueuses de ton Fils ! Je ne le lui demande pas. Mais je suis sûre que, au-delà de la bonté qu’elles expriment, il agit ainsi pour signifier par ses actes à Judas : “ Souviens-toi que c’est ainsi qu’on doit traiter une mère. ” Maintenant, maintenant il me paraît être toute bonté… Ah, si c’était vrai ! Aide-moi, aide-moi par ta prière, toi qui es sainte, pour que mon fils ne soit pas indigne de la grande grâce que Dieu lui a accordée ! S’il ne veut pas m’aimer, s’il ne veut pas m’être reconnaissant, à moi qui l’ai enfanté et élevé, cela n’est rien. Mais qu’il sache aimer réellement Jésus, qu’il sache le servir avec fidélité et reconnaissance. Si cela ne devait pas être, alors… alors que Dieu lui ôte la vie. Je préfère l’avoir au tombeau… je l’aurais enfin car, depuis qu’il a été en âge de raisonner, il m’a bien peu appartenu. Mort plutôt que mauvais apôtre. Puis-je faire cette prière ? Qu’en dis-tu ?

      – Prie le Seigneur d’agir pour le mieux. Ne pleure plus. J’ai vu des prostituées et des païens aux pieds de mon Fils et, avec eux, des publicains et des pécheurs. Tous étaient devenus des agneaux par sa grâce. Espère, Marie, espère. Les peines des mères sauvent les enfants, ne le sais-tu pas ?… »

      Tout s’achève sur cette question pleine de pitié.

[1] Pourpre, en grec : porphyra
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 10 Fév - 8:46

215. Guérison de la fille lunatique de l’aubergiste

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 77
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 215


Mercredi 3 mai 28
Bet-Ginna

215.1 Je ne vois ni le retour à Bet-çur, ni les roseraies de Béther que j’ai tellement désiré voir. Jésus est seul avec les apôtres. Même Marziam n’est plus là. Il est certainement resté avec Marie et les femmes disciples. L’endroit est très montagneux, mais avec encore une végétation très riche de bois de conifères, ou plutôt de pins pignons et l’odeur de la résine se répand partout, balsamique et vivifiante. Dans ces montagnes verdoyantes, Jésus chemine avec ses disciples, tournant le dos à l’orient.

      J’entends que l’on parle d’Elise — qui a paru très changée et qui s’est décidée à suivre Jeanne dans son domaine de Béther —, et aussi de la bonté de Jeanne. Ils parlent également d’un nouveau déplacement à faire en direction des plaines fertiles qui précèdent la côte. Et les noms des gloires passées reviennent à la mémoire, donnant lieu à des récits, des questions, des explications et des discussions courtoises.

      « Quand nous serons parvenus au sommet de cette montagne, je vous montrerai de là-haut toutes les régions qui vous intéressent. Vous pourrez en tirer des idées pour vos allocutions au peuple.

      – Mais comment allons-nous faire, mon Seigneur ? Moi, je ne suis bon à rien, gémit André, à qui se joignent Pierre et Jacques. Nous sommes les plus malheureux, nous !

      – Oh, pour cela, je ne vaux pas mieux ! S’il s’agissait d’or ou d’argent, je pourrais en parler, mais de ces choses… dit Thomas.

      – Et moi ? Qu’est-ce que j’étais ? demande Matthieu.

      – Mais toi, tu n’as pas peur du public, tu sais parler, réplique André.

      – Mais sur d’autres sujets…, répond Matthieu.

      – C’est vrai… Mais… Bref, tu sais déjà ce que je veux dire, fais comme si je te l’avais dit. Le fait est que tu vaux mieux que nous, dit Pierre.

      – Mais, mes amis, il n’est nul besoin d’aller dans les hauteurs. Dites simplement ce que vous pensez, ce dont vous êtes convaincus. Soyez-en sûrs : un homme convaincu persuade toujours » intervient Jésus.

      Mais Judas supplie :

      « Donne-nous beaucoup d’idées, toi. Une idée bien présentée peut servir à beaucoup de choses. Ces lieux, je crois, sont restés sans rien savoir de toi parce que personne ne manifeste qu’il te connaît.

      – C’est parce qu’ici il y a encore beaucoup de vent qui vient du mont Moriah… Or ce vent dessèche… répond Pierre.

      – C’est parce qu’on n’a pas semé. Mais nous ferons les semailles », reprend Judas, sûr de lui, heureux de ses premiers succès.

      215.2 Ils ont atteint le sommet de la montagne. Un vaste panorama s’ouvre à cet endroit, et il est beau de le regarder en se tenant à l’ombre des arbres touffus qui en couronnent la cime : c’est tout un enchevêtrement de chaînes de montagnes variées et ensoleillées qui vont en tous sens comme les lames pétrifiées d’un océan battu par des vents contraires ; puis, comme dans une baie tranquille, tout s’apaise dans une luminosité sans limite, prélude à une vaste plaine où s’élève, solitaire comme un phare à l’entrée d’un port, une petite montagne.

      « Voici : ce pays qui s’étend ainsi sur la crête comme pour profiter pleinement du soleil, et où nous séjournerons, sert de pivot à tout un éventail de lieux historiques. Approchez : là (au nord), se trouve Gerimot. Vous souvenez-vous de Josué ? C’est le lieu de la défaite des rois qui voulurent assaillir le camp d’Israël, renforcé par son alliance avec les Gabaonites [1]. Et, tout près, Bet-Shémesh, la cité sacerdotale de Juda, où les Philistins rendirent l’Arche avec l’offrande en or, imposée au peuple par les devins et les prêtres pour être libérés des fléaux qui tourmentaient les Philistins coupables [2]. Et voilà là-bas çoréa, en plein soleil, la patrie de Samson et, un peu plus à l’est, Timna, où il se maria et où il fit tant de prouesses, mais aussi de sottises [3]. Et là, Azeqa et Soko, alors camp philistin [4]. Plus bas encore, voici Zanuah, une des villes de Judée. Et ici – tournez-vous – voici la vallée du Térébinthe où David battit Goliath. Là, c’est Maqqeda, où Josué défit les Amorrites. Tournez-vous encore. Vous voyez cette montagne solitaire au milieu de la plaine qui appartenait autrefois aux Philistins ? Là se trouve Gat, patrie de Goliath et lieu de refuge pour David auprès d’Akish pour fuir la folle colère de Saül. Ce sage roi y feignit la folie, car le monde défend les fous contre les sages. Cet horizon ouvert, ce sont les plaines de la terre très fertile des Philistins. Nous irons par là jusqu’à Ramlé. Maintenant, entrons à Bet-Ginna. Toi, oui toi, Philippe, qui me regardes avec des yeux implorants, tu traverseras le village avec André. Pendant ce temps, nous resterons près de la fontaine ou sur la place du village.

      – Oh ! Seigneur ! Ne nous y envoie pas seuls ! Viens, toi aussi ! Disent les deux apôtres d’un ton suppliant.

      – Je vous ai dit d’y aller. L’obéissance vous aidera davantage que ma présence muette. »

      215.3 … Philippe et André marchent donc dans le village, au hasard, jusqu’à ce qu’ils trouvent une minuscule auberge, ou plutôt une gargote, à l’intérieur de laquelle des courtiers en bétail négocient des agneaux avec des bergers. Ils entrent et s’arrêtent, interdits, au milieu de la cour entourée de portiques très rustiques.

      L’hôtelier accourt :

      « Que désirez-vous ? Un logement ? »

      Les deux apôtres se consultent du regard. Ils ont l’air décontenancés. Très probablement, ils ne trouvent plus un seul mot de ce qu’ils avaient décidé de dire. Mais André, justement, est le premier à se ressaisir :

      « Oui, un logement pour nous et pour le Rabbi d’Israël.

      – Quel rabbi ? Il y en a tant ! Mais ce sont de grands seigneurs. Ils ne viennent pas dans des villages de pauvres leur apporter leur sagesse. Ce sont les pauvres qui doivent aller les trouver, et encore, c’est une grâce s’ils supportent notre voisinage !

      – Le Rabbi d’Israël est unique et il vient justement apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres ; plus ils sont pauvres et pécheurs, plus il les recherche et les approche, répond doucement André.

      – dans ce cas, il ne fera pas fortune !

      – Il ne recherche pas les richesses. Il est pauvre et bon. Sa journée est bien remplie quand il a pu sauver une âme, répond encore André.

      – Hum ! C’est la première fois que j’entends dire d’un rabbi qu’il est bon et pauvre. Jean-Baptiste est pauvre, mais il est sévère. Tous les autres sont sévères et riches, avides comme des sangsues. Vous avez entendu, vous autres ? Venez ici, vous qui parcourez le monde. Ces hommes assurent qu’il y a un maître pauvre, bon, qui vient à la recherche des pauvres et des pécheurs.

      – Ah ! Ce doit être celui qui est vêtu de blanc comme un essénien. Je l’ai vu aussi, il y a quelque temps, à Jéricho, intervient l’un des courtiers.

      – Non. Celui-là est seul. Ce doit être celui dont parlait Thomas : il s’était trouvé par hasard à parler de lui avec des bergers du Liban, répond un grand berger musclé.

      – Oui, vraiment ! Et il vient jusqu’ici alors qu’il était sur le mont Liban ! Pour tes yeux de chat ! » s’exclame un autre.

      Pendant que l’hôtelier s’entretient avec ses clients, les deux apôtres sont restés plantés là, au milieu de la cour. Finalement un homme dit :

      215.4 « Hé ! Vous ! Venez ici ! De qui s’agit-il ? D’où vient celui dont vous parlez ?

      – C’est Jésus, fils de Joseph, de Nazareth » répond sérieusement Philippe.

      Il reste là, comme s’il s’attendait à ce qu’on se moque de lui. Mais André ajoute :

      « C’est le Messie annoncé. Je vous en conjure, pour votre bien, écoutez-le. Vous avez cité Jean-Baptiste. Eh bien, j’étais avec lui et c’est lui qui nous a désigné Jésus qui passait, en disant : “ Voici l’Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde. ” Quand Jésus descendit au Jourdain pour s’y faire baptiser, les Cieux s’ou­vrirent et une voix cria : “ Voici mon Fils bien-aimé, en qui je me suis complu ”, et l’amour de Dieu descendit sous la forme d’une colombe pour resplendir sur sa tête.

      – Tu vois ? Il s’agit bien du Nazaréen ! Mais, dites un peu, vous qui vous dites ses amis…

      – Amis, non. Nous sommes ses apôtres, ses disciples, envoyés par lui pour annoncer son arrivée, afin que celui qui a besoin d’être sauvé aille à lui, corrige André.

      – Bon, mais dites un peu : est-il bien, comme certains l’af­firment, un saint, plus grand que Jean-Baptiste, ou bien un démon, comme le prétendent les autres ? Vous qui êtes avec lui – puisque, si vous êtes ses disciples, vous êtes ensemble –, dites un peu, et sincèrement : est-il vrai qu’il est luxurieux et noceur ? Qu’il aime les courtisanes et les publicains ? Qu’il pratique la nécromancie et que, la nuit, il invoque les esprits pour connaître les secrets des cœurs ?

      – Mais pourquoi demandes-tu cela à ces hommes ? Demande-leur plutôt s’il est vrai qu’il est bon. Ces deux hommes vont le prendre mal, ils rapporteront au Rabbi nos mauvaises raisons, et il nous maudira. On ne sait jamais… Qu’il soit Dieu ou diable, il est préférable de bien le traiter. »

      Cette fois, c’est Philippe qui intervient :

      « Nous pouvons vous répondre sincèrement, car il n’y a rien de mauvais ni rien qu’il faille tenir caché. Lui, notre Maître, est le Saint entre les saints. Sa journée se passe dans les fatigues de l’enseignement. Il va inlassablement d’un endroit à l’autre à la recherche des cœurs. Sa nuit, il la passe à prier pour nous. S’il ne dédaigne pas la table et l’amitié, ce n’est par intérêt personnel, mais pour approcher ceux qu’il ne pourrait accoster autrement. Il ne repousse pas les publicains et les courtisanes ; mais c’est seulement pour les racheter. Il marque sa route de miracles de rédemption et de miracles sur les maladies. Les vents et la mer lui obéissent, mais il n’a besoin de personne pour opérer des prodiges, ni d’invoquer les esprits pour connaître les cœurs.

      – Et comment le peut-il ? Tu as dit que les vents et la mer lui obéissent, mais ce sont des éléments privés de raison. Comment donc peut-il leur commander ? demande l’hôtelier.

      – Réponds-moi, homme : à ton avis, est-il plus difficile de commander au vent et à la mer, ou à la mort ?

      – Pardi ! On ne commande pas à la mort ! On peut jeter de l’huile sur la mer, on peut lui opposer les voiles, on peut, sagement, ne pas s’embarquer. Au vent, on peut opposer les serrures. Mais à la mort, on ne commande pas. Il n’y a pas d’huile pour la calmer et il n’est pas de voile qui, montée sur notre petit bateau, le rende si rapide qu’il distance la mort. Il n’existe pas de serrures contre elle. Quand elle veut venir, elle passe, même si on pousse les verrous. Personne ne commande à cette reine !

      – Et pourtant notre Maître la commande. Non seulement quand elle est proche, mais même quand elle a déjà saisi sa proie. On allait mettre un jeune homme de Naïm dans la gueule horrible du tombeau, quand il a ordonné : “ Je te le dis : lève-toi ! ” et le jeune homme est redevenu vivant. Naïm n’est pas au bout du monde. Vous pouvez aller voir [5].

      – De cette manière-là ? Devant tout le monde ?

      – Sur le chemin, devant tout Naïm. »

      215.5 L’hôtelier et les clients se regardent en silence. Puis l’hôtelier dit :

      « Mais il fera cela pour des amis ?

      – Non, homme : pour tous ceux qui croient en lui, et pas seulement pour eux. C’est la Pitié sur la terre, sois-en sûr. Personne ne se tourne vers lui en vain. Ecoutez, vous tous. En est-il parmi vous qui souffrent et qui pleurent à cause de maladies dans leur famille, ou à cause de doutes, de remords, de tentations, d’ignorances ? Adressez-vous à Jésus, le Messie de la Bonne Nouvelle. Il est ici aujourd’hui. Demain, il sera ailleurs. Ne laissez pas s’envoler sans en profiter la grâce du Seigneur qui passe », dit Philippe qui prend toujours plus d’assurance.

      L’hôtelier s’ébouriffe les cheveux, ouvre et ferme la bouche, tourmente les franges de sa ceinture… et dit enfin :

      « Je vais essayer !… J’ai une fille. Jusqu’à l’été dernier, elle allait bien. Puis elle est devenue lunatique. Elle reste muette comme une bête dans un coin, toujours plantée là, et sa mère a du mal à l’habiller et à la faire manger. Les médecins affirment que le soleil lui a brûlé la cervelle, d’autres que c’est un chagrin d’amour. Le peuple prétend qu’elle est possédée. Mais comment, si cette petite n’est jamais sortie d’ici ? Où a-t-elle pris ce démon ? Qu’en dit ton Maître ? Que le démon peut posséder même un innocent ? »

      Philippe, sûr de lui, répond :

      « Oui, pour tourmenter les parents et les pousser au désespoir.

      – Et… Lui, il guérit les lunatiques ? Dois-je espérer ?

      – Tu dois croire », répond vivement André.

      Il raconte alors le miracle des Géraséniens et ajoute pour finir :

      « Si ces démons, qui étaient légion dans les cœurs des pécheurs, ont ainsi pris la fuite, comment celui qui a pénétré de force dans un jeune cœur ne s’enfuirait-il pas ? Je te le dis, homme : pour qui espère en lui, l’impossible devient aussi facile que respirer. J’ai vu les œuvres de mon Seigneur et je témoigne de sa puissance.

      – Oh ! Alors, lequel de vous va l’appeler ?

      – Moi-même, homme. Attends-moi un instant. »

      Et André part promptement pendant que Philippe reste à parler.

      215.6 Quand André voit Jésus abrité sous un porche pour fuir le soleil implacable qui remplit la petite place du village, il court vers lui en disant :

      « Viens, viens, Maître. La fille de l’hôtelier est lunatique. Son père implore de toi sa guérison.

      – Mais il me connaissait ?

      – Non, Maître. Nous avons essayé de te faire connaître…

      – Et vous y avez réussi. Quand quelqu’un arrive à croire que je peux guérir un mal sans remède, il est déjà avancé dans la foi. Et vous aviez peur de ne pas savoir faire ! Qu’avez-vous dit ?

      – Je ne saurais même pas te le répéter. Nous avons dit ce que nous pensons de toi et de tes œuvres. Surtout, nous avons dit que tu es l’Amour et la Pitié. Le monde te connaît si mal !

      – Mais vous, vous me connaissez bien. Et cela suffit. »

      215.7 Ils arrivent à la petite auberge. Curieux, tous les clients se tiennent sur la porte et, au milieu d’eux, Philippe, avec l’hôtelier qui continue son monologue.

      Dès qu’il voit Jésus, il court à sa rencontre :

      « Maître, Seigneur, Jésus… je… je crois, je crois que tu es toi, que tu sais tout, que tu vois tout, que tu connais tout, que tu peux tout. Je le crois tellement que je te dis : aie pitié de ma fille, bien que j’aie beaucoup de fautes sur le cœur. Que ma fille ne soit pas châtiée parce que j’ai été malhonnête dans mon métier. Je ne serai plus cupide, je le jure. Tu vois mon cœur avec son passé et ce qu’il pense maintenant. Pardon et pitié, Maître. Je parlerai de toi à tous ceux qui viennent ici dans ma maison… »

      L’homme est à genoux.

      Jésus lui dit :

      « Lève-toi et persévère dans tes sentiments actuels. Conduis-moi à ta fille.

      – Elle est dans une écurie, Seigneur. Cette chaleur accablante la rend encore plus malade, et elle refuse de sortir.

      – Peu importe. C’est moi qui vais aller la trouver. Ce n’est pas la chaleur, mais le démon qui me sent venir. »

      Ils entrent dans la cour, puis dans une écurie obscure, et tous les autres à la suite.

      La fillette, décoiffée, chétive, s’agite dans le coin le plus sombre et, quand elle voit Jésus, elle hurle :

      « Arrière, arrière ! Ne me dérange pas. Tu es le Christ du Seigneur et moi l’un de ceux que tu poursuis. Laisse-moi tranquille. Pourquoi viens-tu toujours sur mes traces ?

      – Sors de cette enfant. Va-t’en. Je le veux. Rends à Dieu ta proie et tais-toi ! »

      Un cri déchirant, une brusque détente, un corps qui s’ef­fondre sur la paille… et puis, calmes, tristes, étonnées, les questions : « Où suis-je ? Pourquoi suis-je ici ? Qui sont ces gens ? » suivies de l’appel : « Maman ! » de la jeune fille qui a honte d’être sans voile, avec un vêtement déchiré, sous les yeux de plusieurs étrangers.

      « Oh, Seigneur éternel ! Mais elle est guérie !… »

      Il paraît étrange de voir sur le visage rubicond et bouffi de l’aubergiste des pleurs d’enfant… Il est heureux, il sanglote, il ne sait que baiser les mains de Jésus, pendant que la mère pleure, au milieu de ses petits enfants étonnés, en embrassant sa fille aînée délivrée du démon.

      Les personnes présentes crient toutes ensemble et d’autres accourent pour voir le prodige. La cour est pleine.

      « Reste, Seigneur. La nuit va tomber. Reste sous mon toit.

      – Nous sommes treize, homme.

      – Seriez-vous même trois cents, ce ne serait rien. Je sais ce que tu veux dire. Mais le Samuel avide et malhonnête est mort, Seigneur. Mon démon aussi est parti. Maintenant, c’est un nouveau Samuel. Il fera encore l’hôtelier, mais en saint. Viens, viens avec moi, que je t’honore comme un roi, comme un dieu. Ce que tu es. Oh ! Béni soit le soleil d’aujourd’hui qui t’a amené à moi ! »…

[1] Josué 10,1-14

[2] 1 Samuel 6,1-15

[3] Juges 14,1-20

[4] 1 Samuel 17,1

[5] Cf. 3.50, EMV 189.


Dernière édition par Anayel le Mar 11 Fév - 8:56, édité 1 fois
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 11 Fév - 8:55

216. Les infidélités des disciples, dans la parabole du pissenlit

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 78
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 216


Samedi 6 mai 28
Près d'Ashqelôn

216.1 C’est une plaine inondée d’un soleil, qui brûle les grains mûrs et en fait émaner une odeur qui rappelle déjà le pain : l’odeur du soleil, des lessives, des moissons, l’odeur de l’été.

      Car chaque saison, je pourrais dire chaque mois, et même chaque heure de la journée, a son odeur, comme toute localité a la sienne pour ceux qui possèdent un odorat très fin et un esprit d’observation aiguisé. L’odeur d’un jour d’hiver, sous un vent cinglant, est bien différente de celle, pâteuse, d’un jour d’hiver brumeux, ou de la fraîcheur que répand la neige. Et celles-ci ont peu de chose à voir avec l’odeur du printemps qui arrive et qui s’annonce ainsi, avec un parfum qui n’en est pas un, mais diffère bien de l’odeur de l’hiver. Un matin on se lève, et on respire un air différent : c’est le premier souffle du printemps. Le temps passant, se succèdent la senteur des vergers en fleurs, puis celle des jardins, des moissons, jusqu’à celle de la chaleur des vendanges et, entre temps, comme un intermède, l’odeur de la terre après un orage…

      Et les heures ? il serait stupide de dire que l’odeur de l’aurore ressemble à celle de midi et cette dernière à celle du soir ou de la nuit. La première est fraîche et virginale, la seconde riante et joyeuse, la troisième lassitude et aussi saturation de tout ce qui, dans la journée, a répandu ses exhalaisons ; la dernière, celle de la nuit, est paisible, recueillie, comme si la terre était un immense berceau qui accueille le repos de ses petits.

      Et les lieux ? Ah ! L’odeur des rivages, si différente de l’aube au soir, de midi à la nuit, des tempêtes au temps calme, des régions rocheuses à celles aux plages plates ! Et l’arôme des algues que laisse la marée, quand il semble que la mer ait ouvert ses entrailles pour nous faire respirer la senteur âcre du fond. Elle diffère bien de celle des plaines à l’intérieur des terres, de celle des collines ou encore des hautes montagnes.

      Le Créateur est tellement infini qu’il a pu donner un cachet spécial, de lumière, de couleur, de parfum, de son, de forme, de saveur à chacune des choses infinies qu’il a créées. Beauté infinie de l’univers — que je ne vois plus qu’ainsi, à travers les visions et le souvenir de ce que j’ai vu en aimant Dieu et en le priant à travers ses œuvres et pour la joie que leur vision me procurait —, comme tu es vaste, puissante, inépuisable et exempte d’ennui ! Pas d’ennui chez toi et tu n’en provoques pas. Bien au contraire, l’homme se renouvelle en te contemplant, univers de mon Seigneur. Il devient meilleur, plus pur, il s’élève, il oublie… Ah ! Pouvoir te contempler sans cesse, oublier les hommes et ce qui est bas en eux, et les aimer dans leur âme et pour elle, pour les conduire à Dieu !

      Et voilà qu’en suivant Jésus, qui marche avec les apôtres à travers cette plaine couverte de moissons, je m’écarte de nouveau de mon sujet en me laissant prendre par la joie de parler de mon Dieu et de ses œuvres splendides. C’est encore de l’amour, car la créature loue dans la création ce qui lui plaît et l’attire, ou bien elle loue, tout simplement, la créature qu’elle aime. Or il en va de même entre la créature et le Créateur. Celle qui l’aime le loue, et plus elle l’aime plus elle le loue, pour lui-même et pour ses œuvres. Mais maintenant, j’impose silence à mon cœur, et je vais suivre Jésus en tant que fidèle chroniqueur et non plus comme adoratrice.

      216.2 Jésus marche donc à travers les moissons. La journée est chaude, la région déserte. On ne voit pas âme qui vive dans les champs. Rien que les épis mûrs et, çà et là, des arbres. Soleil, blés, oi­seaux, lézards, touffes vertes et immobiles dans l’air paisible : voilà ce qui entoure Jésus. Aux deux extrémités de la grand-route que suit Jésus, ruban poussiéreux et éblouissant à travers la mer des grains, se trouvent d’un côté un petit village, de l’autre une ferme. Rien d’autre.

      Tous avancent en silence, en sueur. Ils ont ôté leurs manteaux mais doivent souffrir pareillement sous leurs vêtements de laine, même s’ils sont légers. Seuls Jésus, ses deux cousins et Judas Iscariote sont habillés de lin ou de chanvre. Les vêtements de Jésus et de Judas sont sûrement en lin blanc, les autres, ceux des fils d’Alphée me paraissent, à cause de leur épaisseur, plus lourds que du lin, et ils sont teints d’une couleur ivoire foncé, précisément comme celle du chanvre non blanchi. Les autres portent leurs vêtements habituels et marchent en essuyant leur transpiration avec le voile de lin qui leur couvre la tête.

      Ils parviennent à un bouquet d’arbres, à un carrefour. Ils s’ar­rêtent à leur ombre salutaire et boivent avidement à leurs gourdes.

      « Elle est aussi chaude que si elle avait été sur le feu, bougonne Pierre.

      – Si seulement il y avait un ruisseau ! Soupire Barthélemy. Mais rien, rien ! Bientôt, je n’en aurai plus.

      – Je dirais presque que mieux vaut la montagne, gémit Jacques, fils de Zébédée, congestionné par la chaleur.

      – Le mieux, c’est la barque. Elle est fraîche, reposante, propre, ah ! » dit Pierre.

      Son cœur s’envole vers le lac et sa barque.

      « Vous avez tous raison ! Dit Jésus pour les encourager. Mais les pécheurs se trouvent en montagne comme en plaine. S’ils ne nous avaient pas chassés de la Belle Eau et s’ils n’avaient pas été toujours sur nos talons, je serais venu ici entre Tébet et Shebat [1]. Mais nous allons bientôt arriver au bord de la mer. L’air y est tempéré par le vent du large.

      – On en a bien besoin ! Ici, on ressemble à des brochets mourants. Mais comment font les blés pour être si beaux, s’il n’y a pas d’eau ? demande Pierre.

      – Il y a des eaux souterraines, elles maintiennent le terrain humide, explique Jésus.

      – Il vaudrait mieux qu’elles soient en surface au lieu d’être en dessous. A quoi me servent-elles, si elles sont en dessous ? Je ne suis pas une racine, moi ! » dit impétueusement Pierre, ce qui les fait tous rire.

      Mais Jude devient sérieux :

      « Le sol est égoïste comme le sont les âmes, et aride de la même manière. S’ils nous avaient laissé séjourner dans ce village et y passer le sabbat, nous aurions eu de l’ombre, de l’eau, un lieu où nous reposer. Mais ils nous ont chassés…

      – On aurait eu aussi de la nourriture, mais pas même cela. Moi, j’ai faim. S’il y avait des fruits ! Mais les arbres fruitiers sont tout près des maisons, et qui y va ? S’ils sont tous de l’humeur de ceux-là ! Dit Thomas en montrant le village qu’ils ont laissé derrière eux, à l’est.

      – Prends ma part. Moi, je n’ai jamais très faim, dit Simon le Zélote.

      – Prenez aussi la mienne, dit Jésus. Que les plus affamés mangent. »

      Cependant, même mis en commun, les vivres de Jésus, de Simon le Zélote et de Nathanaël semblent bien peu de chose et le regard inquiet de Thomas et des jeunes l’exprime bien. Mais ils se taisent, en grignotant leurs portions minuscules.

      Simon le Zélote, patient, se dirige vers un endroit où une trace verte sur le sol brûlé fait supposer l’existence de l’humidité. Effectivement, il y coule un filet d’eau sur un fond sableux, rien qu’un filet destiné à disparaître rapidement. Il pousse un cri pour héler ceux qui sont loin afin qu’ils viennent se rafraîchir, et tous accourent, en suivant l’ombre irrégulière d’une rangée d’arbres qui longent la rive de ce ruisselet presque à sec ; là, ils peuvent rafraîchir leurs pieds couverts de poussière, laver leurs visages en sueur, et auparavant encore remplir leurs gourdes désormais vides et les laisser dans l’eau, à l’ombre, pour qu’elles soient plus fraîches.

      Ils s’assoient au pied d’un arbre et sommeillent, épuisés.

      216.3 Jésus les regarde avec amour et compassion et hoche la tête. Simon le Zélote, qui était retourné boire, l’aperçoit et lui demande :

      « Qu’as- tu, Maître ? »

      Jésus se lève, va vers lui et, l’entourant de son bras, il l’amène vers un autre arbre en disant :

      « Ce que j’ai ? Je m’afflige de votre lassitude. Si je ne savais pas ce que je suis en train de faire de vous, je ne serais pas tranquille à l’idée de vous causer tant de privations.

      – Des privations ? Non, Maître : c’est notre joie. Tout cela disparaît devant le fait de t’accompagner. Nous sommes tous heureux, tu peux en être sûr. Nous n’éprouvons ni regret ni…

      – Tais-toi, Simon. L’humanité crie, même chez les bons et, humainement parlant, vous n’avez pas tort. Je vous ai enlevés à vos maisons, à vos familles, à vos intérêts, et vous êtes venus, en pensant que, me suivre, ce serait bien autre chose… Mais votre cri de maintenant, ce qui crie à l’intérieur de vous, s’apaisera un jour ; alors vous comprendrez qu’il aura été beau de cheminer dans les brumes, la boue, la poussière et la canicule, persécutés, assoiffés, épuisés, sans nourriture, à la suite d’un Maître persécuté, mal-aimé, calomnié… et plus encore. Alors tout vous paraîtra beau, car vous penserez autrement et vous verrez tout sous une autre lumière. Et vous me bénirez de vous avoir conduits sur mes voies difficiles…

      – Tu es triste, Maître, et le monde justifie ta tristesse. Mais pas nous. Nous sommes tous contents…

      – Tous ? En es-tu sûr ?

      – Penses-tu autrement ?

      – Oui, Simon, autrement. Toi, tu es toujours content. Tu as compris. Beaucoup d’autres, non. Vois-tu ceux qui dorment ? Sais-tu combien de pensées ils ruminent, même dans leur sommeil ? Et tous ceux qui sont au nombre des disciples ? Crois-tu qu’ils seront fidèles jusqu’à ce que tout soit accompli ? regarde : jouons à ce vieux jeu auquel tu as sûrement joué toi aussi quand tu étais enfant (Jésus cueille un beau pissenlit qui se dresse au milieu des cailloux et qui a atteint sa parfaite maturité. Il le porte à sa bouche délicatement, souffle et le pissenlit se décompose en minuscules ombrelles qui volettent en l’air ici et là, leur petite aigrette bien droite sur sa tige minuscule). Tu vois ? Regarde… Combien sont retombées sur ma poitrine comme si elles étaient éprises de moi ? Compte-les… Il y en a vingt-trois. Il y en avait au moins trois fois plus. Et les autres ? Regarde. Certaines errent encore, d’autres sont déjà retombées comme entraînées par leur poids, d’autres encore montent orgueilleusement, fières de leur panache argenté, enfin d’autres tombent dans la vase que nous avons remuée avec nos gourdes. Seulement… Regarde, regarde !… Même sur ces vingt-trois qui sont tombées sur mes genoux, sept sont reparties. Il a suffi du vol de ce bourdon pour qu’elles s’envolent !… De quoi avaient-elles peur ? Ou qu’est-ce qui les a attirées ? Peut-être son aiguillon ou bien ses belles couleurs noir et jaune, son aspect gracieux ou ses ailes irisées… Elles sont parties… à la suite d’une beauté mensongère…

      Simon, il en sera ainsi de mes disciples. Les uns s’en iront par agitation, d’autres par inconstance, d’autres par pesanteur, d’autres encore par orgueil, par légèreté, à cause de l’attrait de la fange, par peur ou par naïveté. Crois-tu que, à l’heure décisive de ma mission, je retrouverai à mes côtés tous ceux qui me disent aujourd’hui : “ Je viens avec toi ” ? les petites ombrelles de la plante que mon Père a créée étaient certainement plus de soixante-dix… alors qu’il n’y en a plus que sept maintenant sur ma poitrine, car les autres se sont envolées sous ce souffle de vent qui a fait dire oui aux plus légères. Ainsi en sera-t-il, et je pense à tout ce qui lutte en vous pour me rester fidèles…

      216.4 Viens, Simon. Allons regarder ces libellules qui dansent sur l’eau. A moins que tu ne préfères te reposer.

      – Non, Maître. Tes paroles m’ont attristé. Mais j’espère que le lépreux que tu as guéri, l’homme persécuté que tu as réhabilité, le solitaire à qui tu as donné des compagnons, le nostalgique des affections auquel tu as ouvert le Ciel et le monde pour qu’il trouve et donne de l’amour, ne t’abandonneront pas… Maître… que penses-tu de Judas ? L’an passé, tu as pleuré avec moi pour lui [2]. D’ailleurs… je ne sais pas… Maître, laisse ces deux libellules, regarde-moi, écoute-moi. Je ne dirais cela à personne, pas même à mes compagnons, pas même à mes amis, mais à toi, oui. Je ne réussis pas à aimer Judas. Je l’avoue. C’est lui qui repousse le désir que j’ai de l’aimer. Non qu’il me méprise, non, au contraire il serait plutôt flatteur à l’égard du vieux Zélote qu’il devine plus expérimenté que les autres dans la connaissance des hommes. Mais c’est sa manière d’agir. Te paraît-il sincère ? Dis-le-moi. »

      Jésus garde le silence pendant un moment comme s’il était fasciné par les deux libellules qui, posées à fleur d’eau, font un petit arc-en-ciel avec leurs ailes irisées, un précieux arc-en-ciel qui sert à attirer un moucheron curieux aussitôt avalé par l’un des insectes voraces. Ce dernier, à son tour, est attrapé au vol par un crapaud caché ou une grenouille, qui le mange en même temps que le moucheron qu’il a happé.

      Jésus, en se relevant – car il s’était presque allongé pour regarder ces petits drames de la nature – dit :

      « C’est ainsi. La libellule a de robustes mâchoires pour se nourrir des herbes et de robustes ailes pour abattre les moucherons, et la grenouille a une large gueule pour engloutir les libellules. Chaque être a ses moyens et s’en sert. Allons, Simon. Les autres s’éveillent.

      – Tu ne m’as pas répondu, Seigneur. Tu ne l’as pas voulu.

      – Mais si, je t’ai répondu ! Mon vieux sage, réfléchis et tu trouveras… »

      Et Jésus remonte la grève et se dirige vers ses disciples qui s’éveillent et le cherchent.

[1] Début janvier. Pour la "Belle Eau", propriété de Lazare en bordure du Jourdain, voir les épisodes de 2.88. à 2.99, EMV 121 à 132.

[2] cf. 2.47., EMV 83
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 12 Fév - 9:15

217. Les épis cueillis le jour du sabbat.

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 79
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 217


Vision du vendredi 13 juillet 1945

Samedi 6 mai 28
Près d'Ashqelôn

217.1 Toujours le même endroit, mais le soleil est moins implacable car il ne va pas tarder à se coucher.

      « Il faut atteindre cette maison » dit Jésus.

      Ils marchent, ils y arrivent. Ils demandent du pain et des vivres, mais le régisseur les repousse durement.

      « Race de philistins [1] ! Vipères ! Toujours les mêmes ! Ils sont nés du même cep et donnent des fruits empoisonnés, bougonnent les disciples affamés et fatigués. Que vous soit rendu ce que vous donnez !

      – Mais pourquoi manquez-vous de charité ? Nous ne sommes plus à l’époque de la loi du talion. Avancez. Il ne fait pas encore nuit et vous ne mourez pas de faim. Un peu de sacrifice pour que ces âmes arrivent à avoir faim de moi » exhorte Jésus.

      Mais les disciples — et je crois que c’est plutôt par dépit qu’à cause d’une faim insupportable — entrent au beau milieu d’un champ et se mettent à cueillir des épis. Ils les égrènent dans leurs mains et se mettent à les manger.

      « Ils sont bons, Maître, crie Pierre. Tu n’en prends pas ? Ils ont beaucoup de goût… Je voudrais manger tout le champ !

      – Tu as raison ! Comme cela, ils vont regretter de ne pas nous avoir donné un pain », enchérissent les autres.

      Ils passent à travers le champ de blé, et mangent avidement. Jésus marche tout seul sur la route poussiéreuse. Simon le Zélote et Barthélemy discutent à cinq ou six mètres derrière.

      217.2 A un autre carrefour entre la route principale et un chemin secondaire, plusieurs pharisiens hargneux se sont arrêtés. Ils reviennent sûrement des offices du sabbat auxquels ils ont assisté dans le hameau que l’on aperçoit au bout de ce chemin secondaire, large, plat, comme si c’était une grosse bête tapie dans sa tanière.

      Jésus les voit, les regarde, doux et souriant, et leur adresse son salut :

      « Que la paix soit avec vous. »

      Au lieu de répondre à son salut, un des pharisiens lui demande avec arrogance :

      « Qui es-tu ?

      – Jésus de Nazareth.

      – Vous voyez bien que c’est lui ! » dit l’un d’eux aux autres.

      Pendant ce temps, Nathanaël et Simon s’approchent du Maître, tandis que les autres, cheminant à travers les sillons, se dirigent vers la route. Ils mâchent encore des grains de blé et en ont dans le creux de la main.

      Le pharisien qui a parlé le premier, peut-être le plus puissant, recommence à parler avec Jésus, qui s’est arrêté pour écouter la suite :

      « Ah ! C’est donc toi, le fameux Jésus de Nazareth ? Comment se fait-il que tu sois venu jusqu’ici ?

      – Parce que, ici aussi, il y a des âmes à sauver.

      – Nous y suffisons. Nous savons sauver les nôtres et nous savons sauver celles qui dépendent de nous.

      – S’il en est ainsi, vous faites bien. Mais moi, je suis envoyé pour évangéliser et sauver.

      – Envoyé ! Envoyé ! Et qu’est-ce qui nous le prouve ? Sûrement pas tes œuvres !

      – Pourquoi dis-tu cela ? Tu ne tiens pas à ta vie ?

      – Ah, c’est vrai ! C’est toi qui administres la mort à ceux qui ne t’adorent pas. Alors, tu veux tuer toute la classe sacerdotale, celle des pharisiens, celle des scribes et beaucoup d’autres parce qu’ils ne t’adorent pas et ne t’adoreront jamais. Jamais, comprends-tu ? Jamais, nous, les élus d’Israël, nous ne t’adorerons ni ne t’aimerons.

      – Je ne vous force pas à m’aimer et je vous dis : “ Adorez Dieu ”, parce que…

       – Ou toi, parce que tu es Dieu, n’est-ce pas ? Mais nous ne sommes pas de ces Galiléens pouilleux, ni de ces imbéciles de Judée qui te suivent et délaissent nos rabbins…

       – Ne te fâche pas, homme. Je ne demande rien. J’accomplis ma mission. J’enseigne comment aimer Dieu et je reviens rappeler le Décalogue parce qu’il est trop oublié, et surtout parce qu’il est mal appliqué. Je veux donner la vie, celle de l’éternité. Je ne souhaite pas la mort corporelle, et encore moins la mort spirituelle. La vie dont je te demandais si tu ne tenais pas à la perdre, c’était celle de ton âme, car moi, j’aime ton âme, même si elle ne m’aime pas. Et je souffre de voir que tu la tues en offensant le Seigneur et en méprisant son Messie. »

       Le pharisien semble pris de convulsions tant il s’agite : il chiffonne ses vêtements, en arrache les franges, enlève son couvre-chef, se passe la main dans les cheveux, et crie :

       « Ecoutez ! Ecoutez ! C’est à moi, Jonathas, fils d’Uziel, descendant direct de Simon le Juste, c’est à moi qu’il dit cela ! Moi, offenser le Seigneur ! Je ne sais ce qui me retient de te maudire, mais…

       – C’est la peur qui te retient, mais fais-le donc. Tu ne seras pas réduit en cendres pour autant. En temps voulu, tu le seras, alors tu m’appelleras. Mais entre moi et toi, il y aura alors un ruisseau rouge : mon sang.

       – D’accord. 217.3 Mais en attendant, toi qui te prétends saint, pourquoi permets-tu certaines choses ? Toi qui te dis Maître, pourquoi n’instruis-tu pas tes apôtres, avant les autres ? Regarde-les, derrière toi ! Les voilà, avec encore l’instrument du péché dans leurs mains ! Tu les vois ? Ils ont cueilli des épis, or c’est le sabbat. Ils ont cueilli des épis qui ne leur appartenaient pas. Ils ont violé le sabbat et ils ont volé. »

       Pierre répond :

       « Nous avions faim. Nous avons demandé logement et nourri­ture au village où nous sommes arrivés hier soir. Ils nous ont chassés. Seule une petite vieille nous a donné de son pain et une poignée d’olives. Que Dieu le lui rende au centuple, car elle a donné tout ce qu’elle avait et s’est contentée de demander une bénédiction. Nous avons marché pendant un mille, puis nous nous sommes arrêtés, comme la Loi le prescrit, et nous avons bu l’eau d’un ruisseau. Plus tard, au crépuscule, nous sommes allés à cette maison… Ils nous ont repoussés. Tu vois que nous avions la volonté d’obéir à la Loi.

       – Mais vous ne l’avez pas fait. Il n’est pas permis, pendant le sabbat, de faire des travaux manuels et il n’est jamais permis de prendre ce qui appartient à autrui. Mes amis et moi, nous en sommes scandalisés.

       – Moi, au contraire, je ne le suis pas, dit Jésus. N’avez-vous jamais lu comment David, à Nob, prit les pains consacrés pour se nourrir [2], lui et ses compagnons ? Les pains consacrés appartenaient à Dieu, dans sa maison, réservés par un ordre éternel aux prêtres. Il est dit : “ Ils appartiendront à Aaron et à ses fils qui les mangeront en un lieu sacré [3], car c’est une chose très sainte. ” Néanmoins, David les prit pour lui et ses compagnons parce qu’ils avaient faim. Or si le saint roi entra dans la maison de Dieu et mangea les pains consacrés le jour du sabbat, lui à qui il n’était pas permis de s’en nourrir – pourtant la chose ne lui fut pas comptée comme péché puisque Dieu continua encore après cela de lui garder son amour –, comment peux-tu dire que nous sommes pécheurs si nous cueillons sur le sol de Dieu les épis qui ont poussé et mûri par sa volonté, les épis qui appartiennent aussi aux oiseaux ? et tu refuses que les hommes s’en nourrissent, eux qui sont les enfants du Père ?

       – Il avait demandé ces pains. Il ne les avait pas pris sans les demander. Et cela change tout ! Et puis, ce n’est pas vrai que Dieu n’a pas compté à David cet acte comme péché. Dieu l’a frappé durement !

       – Mais pas pour cette raison. Pour sa luxure [4], pour son recensement [5], pas pour…, rétorque Jude.

       – Oh ! Assez ! Ce n’est pas permis, voilà tout. Vous n’avez pas le droit de le faire, et vous ne le ferez pas. 217.4 Allez-vous-en ! Nous ne voulons pas de vous sur nos terres. Nous n’avons pas besoin de vous. Nous ne savons que faire de vous.

       – Nous allons partir, dit Jésus en empêchant ses disciples de répliquer.

       – Et pour toujours, souviens-t’en. Que jamais plus Jonathas, fils d’Uziel, ne te trouve sur son chemin. Va-t’en !

       – Oui, nous partons. Toutefois, nous nous retrouverons. Cette fois, ce sera Jonathas qui voudra me voir pour répéter ma condamnation et délivrer pour toujours le monde de moi. Mais ce sera alors le Ciel qui te dira : “ Il ne t’est pas permis de faire cela ”, et cette parole “ il ne t’est pas permis ” résonnera dans ton cœur comme une sonnerie de trompette pendant toute ta vie et au-delà. De même que, le jour du sabbat, les prêtres violent au Temple le repos sabbatique sans pécher, nous aussi, les serviteurs du Seigneur, nous pouvons recevoir amour et secours du Père très saint sans pour autant commettre de faute, puisque l’homme nous refuse l’amour. Il y a ici quelqu’un de bien plus grand que le Temple et qui peut prendre ce qu’il veut de la création, car Dieu a disposé toutes choses pour servir d’escabeau à la Parole. Et moi, je prends et je donne. Il en est ainsi des épis du Père servis sur l’immense table qu’est la terre, comme de la Parole. Je prends et je donne. Aux bons comme aux mauvais, car je suis la Miséricorde. Mais vous ignorez ce qu’est la miséricorde. Si vous saviez ce que cela signifie, vous comprendriez aussi que je ne veux qu’elle [6]. Si vous saviez ce qu’est la miséricorde, vous n’auriez pas condamné des innocents. Mais vous l’ignorez. Vous ne savez pas non plus que je ne vous condamne pas, vous ne savez pas que je vous pardonnerai et que je demanderai même au Père de vous pardonner. Car c’est la miséricorde que je veux, et non le châtiment. Mais vous, vous ne le savez pas. Vous ne voulez pas le savoir. C’est là un péché plus grand que celui que vous m’imputez, que celui que, selon vous, ces innocents ont commis. Du reste, sachez que le sabbat est fait pour l’homme et non pas l’homme pour le sabbat, et que le Fils de l’homme est le maître même du sabbat. Adieu… »

       Il se tourne vers ses disciples :

       « Venez, allons chercher un lit dans les sables, qui ne sont plus loin maintenant. Nous aurons toujours les étoiles pour compagnes et la rosée nous rafraîchira. Dieu, qui a envoyé la manne à Israël, pourvoira à nous nourrir nous aussi, qui sommes pauvres et qui lui sommes fidèles. »

       Jésus plante là le groupe hargneux et part avec ses disciples alors que la nuit tombe avec les premières ombres violettes…

       Ils trouvent finalement une haie de figuiers d’Inde [7] aux sommets desquels, hérissées de piquants, des figues commencent à mûrir. Mais tout est bon pour qui a faim et, en se piquant les doigts, ils cueillent les plus mûres et vont à l’endroit où les champs font place à des dunes de sable. De loin arrive la rumeur de la mer.

       « Arrêtons-nous ici. Le sable est fin et chaud. Demain, nous entrerons à Ashqelôn », dit Jésus, et tous tombent de fatigue au pied d’une haute dune.


[1] Le pays philistin, dont Ashqelôn (Ascalon) s’étend de l’actuelle bande de Gaza jusqu’à Jaffa. Une grande inimitié régnait entre les philistins et les juifs. Elle remonte aux guerres qui les affrontèrent dont l’épisode de David contre Goliath est les plus célèbre. Ce pays est encore identifié en tant que tel au IIe siècle avant J.C. Cf. 1 Maccabées (livre des martyrs d’Israël) 3,24.

[2] 1 Samuel 21, 1-7.

[3] Lévitique 24,9.

[4] 2 Samuel 12, 9-14. Voir aussi EMV 94.7.

[5] 2 Samuel 24,1-17 et 1 Chroniques 21, 1-17.

[6] Cf. Osée 6,6 repris aussi dans Matthieu 9,13.

[7] Cette mention intrigue : le figuier d’Inde ou figuier de Barbarie est censé avoir été importé du Mexique par Christophe Colomb. S’agit-il d’un  anachronisme grossier ou d’une connaissance rare de Maria Valtorta ? VOIR LE COMMENTAIRE.  


Observation - Pas plus de six stades durant le sabbat !

La nécessité du respect des distances sabbatiques est plusieurs fois évoquée dans l’œuvre de Maria Valtorta. Et c’est l’occasion pour la mystique italienne de nous transmettre deux indications très précises. Ainsi lorsque Jésus se justifie auprès des pharisiens, Il déclare : « Nous avons marché pendant un mil, et puis nous nous sommes arrêtés, comme la Loi le prescrit » (EMV 217.3). Effectivement, le Talmud, (par interprétation de Exode 16,29 et de Josué 3,4) fixa à 2000 amot (i. e. coudées), la plus longue distance qu'un juif avait le droit de parcourir un jour de sabbat (1). Mais le jeune Margziam, lui, pour répondre à une question que lui pose Jésus, mentionne les mesures romaines : « Demain c'est la Parascève et, après le coucher du soleil, on ne peut parcourir que six stades » (EMV 194.4). Cette autre affirmation recoupe parfaitement la précédente (2) mais, clouée au lit pendant la seconde guerre mondiale, Maria Valtorta n’avait certainement aucune possibilité de le vérifier par elle-même !

Dans les Actes des Apôtres l’expression « un chemin de sabbat » désigne le trajet séparant le mont des Oliviers de Jérusalem (Ac 1,12). Or Flavius Josèphe en donne la mesure quand il écrit : «  La dixième légion (…) reçut l'ordre de camper à six stades de Jérusalem sur la montagne des Oliviers, qui fait face à la ville du côté de l'Orient et en est séparée par la profonde vallée du Cédron » (Guerres des juifs 5.2.3). La valeur de la distance sabbatique que l’on trouve dans l’Evangile tel qu’il m’a été révélé se trouve donc confirmée par la juxtaposition d’un texte canonique et d’un écrit profane !

(1) 1 mil = 2000 amot, soit 960 m à 1150 m selon la valeur retenue pour la coudée (0,48 à 0,58 m).

(2) Soit 1090 m à 1110 m selon la valeur retenue pour le stade (182 à 185 m)

https://valtorta.fr/deuxieme-annee-vie-publique-de-jesus/jesus-maitre-du-sabbat.html

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 13 Fév - 8:45

218. Diverses rencontres à Ashqelôn, ville de Philistie

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 80
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 218


Dimanche 7 mai 28
Ashqelôn

218.1 L’haleine fraîche de l’aube réveille les dormeurs. Ils se lèvent de la couche de sable sur laquelle ils ont dormi, à l’abri d’une dune parsemée de quelques herbes sèches, et ils grimpent à son sommet. Une immense côte sableuse se trouve devant eux, alors que, tout près et un peu plus loin, des terrains portent de belles cultures. Les pierres blanches d’un torrent à sec font ressortir la couleur blonde du sable. Il descend, avec cette blancheur d’os desséchés, jusqu’à la mer qui scintille au loin. Les flots de cette dernière sont gonflés par la marée du matin, mais surtout par un léger mistral qui ride l’océan. Ils suivent le bord de la dune jusqu’au torrent à sec, le franchissent, reprennent leur marche en diagonale sur les dunes qui s’éboulent sous leurs pas. Ainsi ondulées, elles semblent continuer l’océan en vagues solides et sèches, à la place des flots agités.

      Ils arrivent sur le rivage humide et marchent plus à leur aise. Jean est comme hypnotisé par le spectacle de la mer sans fin qu’illuminent les premiers rayons du soleil. Il semble boire cette beauté et ses yeux paraissent en devenir plus bleus. Pierre, plus pratique, se déchausse, relève son vêtement et patauge dans les flaques de la rive en quête de quelque crabe ou coquillage à sucer.

      A deux bons kilomètres de là, une belle ville maritime s’étend le long de la rive sur une ligne de rochers en forme de demi-lune au-delà de laquelle le vent et la tempête ont transporté du sable. Maintenant que l’eau se retire avec la marée basse, cette barrière rocheuse se découvre aussi à cet endroit, les obligeant à revenir sur le sable sec pour ne pas blesser leurs pieds nus sur les écueils.

      « Par où entrons-nous, Seigneur ? D’ici, on ne voit qu’une épaisse muraille. Du côté de la mer, impossible d’entrer. La ville est au point le plus profond de l’arc, dit Philippe.

      – Venez, dit Jésus. Je sais par où l’on entre.

      – Tu y es déjà allé ?

      – Une fois, quand j’étais tout petit, mais je ne m’en souviendrais pas. Cependant, je sais par où passer.

      – Etrange ! Je l’ai remarqué bien des fois… Tu ne te trompes jamais de route. Parfois, nous te faisons te tromper. Mais toi, on dirait que tu es toujours déjà venu dans le lieu où tu vas », s’extasie Jacques, fils de Zébédée.

      Jésus sourit sans répondre.

      218.2 Sûr de lui, il avance jusqu’à un petit faubourg rural où les maraîchers cultivent des légumes pour la ville. Les petits champs et les jardins sont réguliers et bien entretenus. Femmes et hommes les cultivent et sont en train d’arroser les sillons en tirant l’eau des puits à la force des bras, ou bien à l’aide du vieux et grinçant système des seaux soulevés par un pauvre ânon qui, les yeux bandés, tourne autour du puits. Mais ils ne disent mot. Jésus salue :

      « Paix à vous. »

      Mais les gens restent, sinon hostiles, du moins indifférents.

      « Seigneur, on court ici le risque de mourir de faim. Ils ne comprennent pas ta salutation. A mon tour d’essayer », dit Thomas.

      Il aborde le premier maraîcher qu’il voit et lui demande :

      « Ils coûtent chers, tes légumes ?

      – Pas plus que ceux d’autres maraîchers. Chers ou bon marché, cela dépend comment la bourse est garnie.

      – C’est bien dit. Mais comme tu le vois, je ne meurs pas de faim. Je suis gras et j’ai de belles couleurs, même sans tes légumes. C’est signe que ma bourse est bien garnie. Bref : nous sommes treize et nous pouvons acheter. Qu’est-ce que tu nous vends ?

      – Des œufs, des légumes, des amandes nouvelles et des pommes qui sont ratatinées car ce n’est pas la saison, des olives… Tout ce que tu veux.

      – Donne-moi des œufs, des pommes et du pain pour tout le monde.

      – Je n’ai pas de pain. Tu en trouveras en ville.

      – C’est maintenant que j’ai faim, pas dans une heure ! Je ne crois pas que tu n’aies pas de pain.

      – Je n’en ai pas. Ma femme est en train d’en faire. Mais tu vois ce vieillard, là-bas ? Lui, il en a toujours une grande quantité. Comme il est sur la route, les pèlerins lui en demandent souvent. Va trouver Ananias et demande-lui du pain. Je t’apporte les œufs tout de suite, mais remarque qu’ils valent un denier [1] les deux.

      – Voleur ! Ce sont des œufs en or que pondent tes poules ?

      – Non. Mais ce n’est pas agréable d’être au milieu de la puanteur des poulets et cela se paie. Et puis, est-ce que vous n’êtes pas juifs ? Payez !

      – Garde-les. Comme cela, tu es bien payé. »

      Et Thomas lui tourne le dos.

      « Hé, l’homme, reviens ! Je te les fais meilleur marché : trois pour un denier.

      – Pas même quatre. Bois-les et qu’ils te restent dans la gorge.

      – Viens, écoute. Combien veux-tu m’en donner ? »

      Le maraîcher suit Thomas.

      « Rien. Je n’en veux plus. Je voulais casser la croûte avant d’aller en ville. Mais c’est mieux comme ça. Je ne perdrai pas ma voix et mon appétit pour chanter les histoires du roi et faire un bon repas à l’hôtellerie.

      – Je te les laisse pour un didrachme les deux.

      – Ouf ! Tu es pire qu’un taon ! Donne-les-moi, tes œufs. Et qu’ils soient frais, sinon je reviens et je te fais le museau plus jaune qu’il ne l’est. »

      Thomas y va et revient avec au moins deux douzaines d’œufs dans le pli de son manteau.

      « Tu as vu ? A partir de maintenant, c’est moi qui fais les achats dans ce pays de voleurs. Je sais comment les prendre. Ils viennent avec de l’argent plein les poches faire des achats chez nous pour leurs femmes, et les bracelets ne sont jamais assez gros, et ils marchandent à n’en plus finir. Je me venge. 218.3 Maintenant, allons voir cette autre crapule. Viens, Pierre, et toi, Jean, prends les œufs. »

      Ils vont trouver le vieillard, dont le terrain borde la grand-route qui, du côté nord, conduit à la ville en longeant les maisons du faubourg. C’est une belle route, bien pavée, certainement faite par les Romains. La porte de la ville, à l’est, est maintenant proche et on aperçoit, au-delà, la route qui continue tout droit, avec un certain cachet artistique : elle se transforme en effet en un double portique ombragé soutenu par des colonnes de marbre. Les gens cheminent sous une fraîche verdure, laissant le milieu de la voie aux ânes, chameaux, chiens et chevaux.

      « Salut ! Tu nous vends du pain ? » demande Thomas.

      Le vieillard n’entend pas, ou ne veut pas entendre. Vraiment, le grincement de la noria est tel qu’on ne peut se comprendre.

      Pierre perd patience et crie :

      « Arrête ton Samson ! Laisse-le au moins souffler pour qu’il ne meure pas sous mes yeux, et écoute-nous ! »

      L’homme arrête sa bourrique et regarde de travers son interlocuteur, mais Pierre le désarme en disant :

      « Eh ! Est-ce que Samson n’est pas un nom approprié pour une bourrique ? Si tu es philistin, cela doit te plaire, car c’est une insulte pour Samson. Si tu es d’Israël, cela doit te plaire, car cela rappelle une défaite des philistins. Tu vois donc… [2]

      – Je suis philistin et je m’en vante.

      – Tu fais bien. Je te vanterai moi aussi si tu nous donnes du pain.

      – Mais n’es-tu pas juif ?

      – Je suis chrétien.

      – Où cela se trouve-t-il ?

      – Ce n’est pas un endroit. C’est une personne. J’appartiens à cette personne.

      – Tu es son esclave ?

      – Je suis plus libre que quiconque, car celui qui appartient à cette personne ne dépend plus que de Dieu.

      – Tu dis vrai ? Pas même de César ?

      – Pouah ! Qu’est-ce César devant celui à la suite de qui je marche, auquel j’appartiens et au nom de qui je te demande du pain ?

      – Mais où est cet homme puissant ?

      – C’est cet homme, là-bas, qui nous regarde en souriant. C’est le Christ, le Messie. Tu n’en as jamais entendu parler ?

      – Si, le roi d’Israël. Il vaincra Rome ?

      – Rome ? Mais le monde entier et même l’enfer !

      – Et vous, vous êtes ses généraux ? Habillés comme ça ? Peut-être pour fuir les persécutions des juifs perfides ?

      – Oui et non, mais donne-moi du pain et, pendant que nous mangerons, je t’expliquerai.

      – Du pain ? Mais aussi de l’eau, du vin, des sièges à l’ombre, pour toi, ton compagnon et ton Messie. Appelle-le. »

      Pierre court à toutes jambes vers Jésus :

      « Viens, viens ! Il nous offre ce que nous voulons, ce vieux philistin. Je crois cependant qu’il va t’assaillir de questions… Je lui ai dit qui tu es… en gros, du moins. Mais il est bien disposé. »

      218.4 Tous, ils se rendent dans le jardin où l’homme a déjà installé des bancs autour d’une table grossière sous une tonnelle bien garnie de vigne.

      « Paix à toi, Ananias. Que, grâce à ta charité, ta terre soit féconde et te donne de beaux produits.

      – Merci. Paix à toi. Assieds-toi, asseyez-vous. Anibé ! Nubi ! Du pain, du vin, de l’eau. Tout de suite ! » ordonne le vieillard à deux femmes.

      Ce sont sûrement des africaines, car l’une est tout à fait noire avec de grosses lèvres et des cheveux crépus, et l’autre a le teint très foncé, bien qu’elle soit de type plus européen. Le vieil homme explique :

      « ce sont les filles des esclaves de ma femme. Elle est morte, de même que celles qui étaient venues avec elle, mais leurs filles sont restées. Elles viennent du haut et du bas Nil. Mon épouse était originaire de là-bas. C’est défendu, hein ? Mais moi, je n’en ai cure. Je ne suis pas d’Israël, et les femmes de race inférieure sont douces.

      – Tu n’es pas d’Israël ?

      – Je le suis par force, car nous avons Israël sur le cou comme un joug. Mais… Tu es israélite et mes paroles t’offensent ?

      – Non, je ne m’en offusque pas. Je voudrais seulement que tu écoutes la voix de Dieu.

      – Il ne nous parle pas, à nous.

      – C’est toi qui le dis. Moi, je te parle, et c’est sa voix.

      – Mais toi, tu es le Roi d’Israël. »

      Les femmes qui arrivent avec du pain, de l’eau et du vin et qui entendent parler de “ roi ” s’arrêtent, interdites, à la vue de l’homme blond, souriant, digne, que leur maître appelle “ roi ”, et font mine de se retirer, en se courbant presque jusqu’à terre, par respect.

      « Merci, femmes, et que la paix soit avec vous aussi. »

      Puis, se tournant vers le vieil homme :

      « Elles sont bien jeunes… Tu peux aussi continuer ton travail.

      – Non. La terre est arrosée et elle peut attendre. Parle un peu. Anibé, détache l’âne et rentre-le. Et toi, Nubi, vide les derniers seaux et puis… Tu t’arrêtes, Seigneur ?

      – Ne te dérange pas davantage. Il me suffit de prendre un peu de nourriture, puis j’entrerai à Ashqelôn.

      – Non, cela ne me dérange pas. Oui, va en ville, mais reviens ce soir. Nous romprons le pain et partagerons le sel. Dépêchez-vous ! Toi, au pain ! Toi, appelle Geteo pour qu’il tue un chevreau et prépare-le pour ce soir. Allez ! »

      Et les deux femmes se retirent en silence.

      218.5 « Alors, tu es roi ? Mais tes armes ? Hérode est cruel, de toutes manières. Il nous a reconstruit Ashqelôn, mais c’est pour sa gloire. Et maintenant… Mais tu connais mieux que moi les hontes d’Israël. Comment feras-tu ?

      – Je n’ai d’autre arme que celle qui me vient de Dieu.

      – L’épée de David ?

      – L’épée de ma parole.

      – Quel pauvre rêveur ! Elle s’émoussera et perdra son tranchant sur le bronze des cœurs.

      – Tu crois ? Je ne vise pas à un royaume terrestre. Pour vous tous, je vise au Royaume des Cieux.

      – Nous tous ? Même moi, qui suis philistin ? Même mes esclaves ?

      – Tous. Elles et toi, et jusqu’au plus sauvage au cœur des forêts africaines.

      – Tu veux faire un si grand royaume ? Pourquoi l’appelles-tu Royaume des Cieux ? Tu pourrais l’appeler : Royaume de la Terre.

      – Non, ne te méprends pas. Mon Royaume est le Royaume du vrai Dieu. Dieu est au Ciel. Par conséquent, c’est le Royaume du Ciel. Tout homme est une âme revêtue d’un corps, et l’âme ne peut vivre que dans les Cieux. Je veux vous guérir l’âme, en enlever les erreurs et les rancœurs, la mener à Dieu par la bonté et l’amour.

      – Cela me plaît beaucoup. Les autres – moi, je ne vais pas à Jérusalem, mais je le sais – les autres en Israël ne tiennent pas ce langage, et cela depuis des siècles. Alors, tu ne nous hais pas ?

      – Je ne hais personne. »

      Le vieil homme réfléchit… et demande :

      « Et mes deux esclaves ont aussi une âme, comme vous, les israélites ?

      – Certainement. Ce ne sont pas des bêtes qu’on a capturées. Ce sont des créatures malheureuses qu’on doit aimer. Les aimes-tu ?

      – Je ne les traite pas mal. Je veux qu’elles obéissent, mais je n’emploie pas le fouet et je les nourris bien. Une bête mal nourrie ne travaille pas, dit-on. Mais l’homme mal nourri n’est pas non plus un bon travailleur. D’ailleurs, elles sont nées dans la maison. Je les ai vues toutes petites. Désormais, il ne reste qu’elles parce que je suis très vieux, sais-tu ? Presque quatre-vingts ans. Geteo et elles forment le reste de ma maison d’autrefois. J’y suis attaché comme à mes meubles. Elles me fermeront les yeux…

      – Et après ?

      – Après… je n’en sais rien ! Elles entreront en service et la maison se défera. Cela me déplaît. Elle est devenue riche, grâce à mon travail. Cette terre redeviendra sableuse, stérile… Cette vigne… Nous l’avons plantée, ma femme et moi. Et ce rosier… il est égyptien, Seigneur. C’est l’odeur de mon épouse que je sens en lui… Il me semble que c’est un fils… mon fils unique qui est enterré, poussière désormais à ses pieds… Douleurs… Il vaut mieux mourir jeune et ne pas voir cela ni la mort qui arrive…

      – Ton fils n’est pas mort, ni ta femme. L’âme survit. La chair seule est morte. La mort ne doit pas effrayer. La mort est vie pour qui espère en Dieu et vit en juste. Penses-y… Je vais en ville. Je reviendrai ce soir et je te demanderai ce portique pour y dormir avec mes disciples.

      – Non, Seigneur. J’ai plusieurs chambres vides. Je te les offre. »

      Judas met de l’argent sur la table.

      « Non. Je n’en veux pas. Je suis de cette terre qui vous est odieuse, mais je suis peut-être meilleur que ceux qui nous do­minent. Adieu, Seigneur.

      – Paix à toi, Ananias. »

      Les deux esclaves sont accourues avec Geteo, un homme musclé, ancien paysan, pour le voir partir :

      « Paix aussi à vous. Soyez-bons. Adieu. »

      Et Jésus effleure les cheveux crépus de Nubi et ceux, luisants et raides, d’Anibé, il sourit à l’homme et s’en va.

      218.6 Peu après, ils entrent dans Ashqelôn par la rue au double portique qui mène tout droit au centre de la ville. Ashqelôn singe Rome, avec ses bassins et ses fontaines, ses places qui servent de forum, ses tours le long des murs d’enceinte, et, partout, le nom d’Hérode apposé par lui-même pour s’applaudir, puisque les habitants d’Ashqelôn ne le font pas. Il y a beaucoup de circulation et elle augmente à mesure que le temps passe et qu’on approche du centre de la cité, ouverte, aérée, avec des échappées de lumière sur la mer qui paraît enfermée comme une turquoise dans une tenaille de corail rose par les maisons éparses le long de l’arc profond qui forme la côte : ce n’est pas un golfe, mais un arc véritable, une portion de cercle que le soleil teint tout entière d’un rose très pâle.

      « Partageons-nous en quatre groupes. Je pars, ou plutôt je vous laisse aller. Puis je choisirai. Allez. Après la neuvième heure, nous nous retrouverons à la Porte par laquelle nous sommes entrés. Soyez prudents et patients. »

      Et Jésus les regarde partir ; il est resté seul avec Judas qui a déclaré qu’il ne leur parlerait pas sous prétexte qu’ils sont pires que des païens. Mais quand il s’est rendu compte que Jésus veut aller de-ci de-là sans parler, alors il change d’avis et dit :

      « Est-ce que cela te déplaît de rester seul ? Moi, j’irais avec Matthieu, Jacques et André. Ce sont les moins capables…

      – Vas-y. Adieu. »

      Et Jésus, seul, fait un tour dans la ville, se promenant en long et en large, anonyme au milieu des gens affairés qui ne le re­marquent même pas. Seuls deux ou trois enfants curieux le dévisagent et une femme à la tenue provocante va résolument à sa rencontre avec un sourire plein de sous-entendus. Mais Jésus la regarde si sévèrement qu’elle rougit comme une pivoine et s’éloigne en baissant les yeux. Au coin de la rue, elle se retourne encore et, comme un homme du peuple qui a observé la scène lui lance une plaisanterie mordante et méprisante à cause de son peu de succès, elle s’enveloppe dans son manteau et s’enfuit.

      Les enfants, au contraire, tournent autour de Jésus, le regardent, sourient en le voyant sourire. L’un d’eux, plus hardi, le questionne :

      « Qui es-tu ?

      – Jésus, répond-il en lui donnant une caresse.

      – Que fais-tu ?

      – J’attends des amis.

      – D’Ashqelôn ?

      – Non, de mon pays et de Judée.

      – Es-tu riche ? Moi, oui. Mon père a une belle maison et, à l’intérieur, il fait des tapis. Viens voir. C’est tout près d’ici. »

      Et Jésus part, seul avec l’enfant. Il pénètre sous un porche très long qui ressemble à un chemin couvert. Au fond, rendu plus vif par contraste avec la pénombre du porche, resplendit un coin de la mer, tout illuminé par le soleil.

      218.7 Ils rencontrent une fillette chétive en larmes.

      « C’est Dina. Elle est pauvre, tu sais ? Ma mère lui donne de la nourriture. Sa mère ne peut plus gagner sa vie. Son père est mort en mer : une tempête, pendant qu’il allait de Gaza au port du Grand Fleuve porter des marchandises et en prendre. Comme les marchandises étaient à mon père et que le père de Dina était l’un de nos marins, maman pense maintenant à eux. Mais les enfants restés ainsi sans père sont si nombreux… Qu’en dis-tu, toi ? Ce doit être dur, de rester orphelins et pauvres ! Voilà ma maison. Ne dis pas que j’étais dans la rue : je devais être à l’école, mais on m’a renvoyé parce que je faisais rire mes camarades avec cela… »

      Et il sort de ses vêtements un pantin taillé dans le bois, dans un morceau de bois tendre, très comique réellement, pourvu d’un menton en galoche et d’un nez très caricaturaux.

      Jésus esquisse un sourire, mais il le refrène — on voit à sa bouche qui tremble qu’il a du mal à se retenir —. Il dit :

      « Il ne représente pas le maître, n’est-ce pas ? Ni un parent ? Ce ne serait pas bien.

      – Non. C’est le chef de la synagogue des juifs. Il est vieux et laid, et nous nous moquons toujours de lui.

      – Ce n’est pas bien non plus. Il est sûrement plus âgé que toi et…

      – Oh ! C’est un vieux, à moitié bossu, presque aveugle et tellement laid… Ce n’est pas ma faute s’il est comme ça !

      – Non, mais tu es fautif de te moquer d’un vieillard. Toi aussi, quand tu seras vieux, tu deviendras laid car tu te voûteras, tu n’auras plus beaucoup de cheveux, tu seras à moitié aveugle, tu marcheras avec un bâton, tu auras ce genre de visage. Et alors ? Cela te plaira d’être ridiculisé par un enfant irrespectueux ? Et puis, pourquoi fâcher le maître, distraire tes camarades ? Ce n’est pas bien. Si ton père le savait, il te punirait. Ta mère en souffrirait. Moi, je ne leur dirai rien. Mais toi, donne-moi tout de suite deux choses : d’une part la promesse de ne plus faire de tels manquements, et d’autre part ce pantin. Qui l’a fabriqué ?

      – Moi, Seigneur… » dit l’enfant, mortifié, conscient maintenant de la gravité de ses… méfaits…

      Et il ajoute :

      « J’aime tellement travailler le bois ! Parfois, j’imite les fleurs des tapis ou les animaux qui s’y trouvent. Tu sais, les dragons, les sphinx, et d’autres bêtes encore…

      – Cela, tu peux le faire. Il y a tant de belles choses sur la terre ! Donc, tu me fais cette promesse et tu me donnes ce pantin ? Sinon, nous ne sommes plus amis. Je le garderai en souvenir de toi et je prierai pour toi. Comment t’appelles-tu ?

      – Alexandre. Et toi, qu’est-ce que tu me donnes ? »

      Jésus est embarrassé. Il a toujours si peu de choses ! Mais il se rappelle qu’il a une très belle boucle au col d’un vêtement. Il cherche dans son sac, la trouve, la détache et la donne à l’enfant.

      « Et maintenant, allons-y. Mais fais attention : même si je pars, cela ne m’empêche pas de tout savoir. Et si j’apprends que tu es méchant, je reviens ici et je dis tout à ta maman. »

      Le pacte est scellé.

      218.8 Ils entrent dans la maison. Après le vestibule, il y a une grande cour sur laquelle donnent, de trois côtés, de grandes pièces où se trouvent les métiers.

      La servante qui a ouvert, étonnée de voir l’enfant avec un inconnu, prévient sa maîtresse, et celle-ci, une femme de grande taille, à l’aspect plein de douceur, accourt et demande :

      « Mon fils s’est-il senti mal ?

      – Non, femme. Il m’a amené ici pour voir tes tapis. Je suis étranger.

      – Tu veux faire des achats ?

      – Non. Je n’ai pas d’argent, mais j’ai des amis qui aiment les belles choses et qui sont riches. »

      La femme regarde avec curiosité cet homme qui avoue aussi simplement sa pauvreté, et elle dit :

      « Je te prenais pour un seigneur. Tu as des manières et l’aspect d’un grand seigneur.

      – Pas du tout. Je suis simplement un rabbi galiléen : Jésus, le Nazaréen.

      – Nous, nous faisons du commerce et nous n’avons aucune prévention. Viens et regarde. »

      Elle l’emmène voir ses tapis auxquels travaillent des jeunes filles sous la direction de la maîtresse. Les tapis sont vraiment de grande valeur, pour leurs dessins comme par leurs couleurs. Grands, souples, on dirait des parterres tout en fleurs ou un kaléidoscope de pierres précieuses. D’autres mêlent aux fleurs des figures allégoriques comme des hippogriffes, des sirènes, des dragons, ou bien des griffons héraldiques semblables aux nôtres.

      Jésus admire :

      « Tu es très habile. Je suis content d’avoir vu tout cela. Et je suis content que tu sois bonne.

      – Comment le sais-tu ?

      – Cela se lit sur ton visage. Et ton enfant m’a parlé de Dina. Que Dieu t’en récompense. Même si tu ne le crois pas, tu es très proche de la Vérité car tu as la charité en toi.

      – Quelle vérité ?

      – Celle du Très-Haut. Celui qui aime le prochain, qui exerce la charité dans sa famille et envers ses subordonnés et qui la déploie sur les malheureux possède déjà en lui-même la Religion.

      218.9 Cette fillette, c’est Dina, n’est-ce pas ?

      – Oui, sa mère est mourante. Après je la prendrai, mais pas pour les tapis. Elle est trop petite et trop grêle. Viens, Dina, auprès de ce seigneur. »

      La fillette, qui a le visage triste des enfants malheureux, s’approche timidement.

      Jésus lui fait une caresse et lui demande :

      « Tu me conduis auprès de ta mère ? Tu voudrais bien qu’elle guérisse, n’est-ce pas ? Alors, emmène-moi chez elle. Adieu, femme. Adieu à toi aussi, Alexandre, et sois bon. »

      Il sort en tenant la fillette par la main.

      « Tu es seule ? demande-t- il.

      – J’ai trois petits frères. Le dernier n’a pas connu son père.

      – Ne pleure pas. Es-tu capable de croire que Dieu peut guérir ta mère ? Tu sais, n’est-ce pas, qu’il existe un seul Dieu, qui aime les hommes qu’il a créés, et tout particulièrement les enfants qui sont bons ? Et qu’il peut tout ?

      – Je le sais, Seigneur. Auparavant, mon frère Tolmé allait à l’école, et à l’école, on est mélangé aux juifs. C’est comme cela qu’on sait beaucoup de choses. Je sais qu’il existe et qu’il s’appelle Yahvé, et qu’il nous a punis parce que les Philistins ont été mauvais avec lui. Les enfants juifs nous le reprocheront toujours. Mais, à cette époque-là, je n’existais pas, ni maman ni mon père. Alors, pourquoi… »

      Les larmes lui coupent la parole.

      « Ne pleure pas. Dieu t’aime, toi aussi, et il m’a conduit ici pour toi et pour ta maman. Tu sais que les israélites attendent le Messie qui doit venir pour établir le Royaume des Cieux ? Le Royaume de Jésus, rédempteur et sauveur du monde ?

      – Je le sais, Seigneur. Et ils nous menacent en disant : “ A ce moment-là, malheur à vous ! ”

      – Et sais-tu ce que fera le Messie ?

      – Il fera d’Israël un grand peuple et il nous traitera très mal.

      – Non : il rachètera le monde, il enlèvera le péché, il apprendra à ne pas pécher. Il aimera les pauvres, les malades, les affligés. Il ira vers eux. Il apprendra aux hommes riches, en bonne santé ou heureux, à les aimer. Il recommandera d’être bons pour obtenir la Vie éternelle et bienheureuse au Ciel. C’est cela qu’il fera. Et il n’opprimera personne.

      – Et comment comprendra-t-on que c’est lui ?

      – Parce qu’il aimera tout le monde et guérira les malades qui croiront en lui, il rachètera les pécheurs et enseignera l’amour.

      – Ah ! S’il venait ici avant que maman ne meure ! Comme je croirais, moi ! Comme je le prierais ! J’irais le chercher jusqu’à ce que je le trouve et je lui dirais : “ Je suis une pauvre enfant sans père, ma mère est mourante. J’espère en toi ” et je suis sûre qu’il m’accueillerait, bien que je sois philistine. »

      Toute une foi, simple et forte, vibre dans la voix de la fillette. Jésus sourit en regardant la pauvre petite fille qui marche à côté de lui. Elle ne voit pas ce sourire éclatant, parce qu’elle regarde devant, du côté de la maison, maintenant proche.

      218.10 Ils arrivent à un cabanon bien misérable au fond d’une impasse.

      « C’est ici, Seigneur, entre… »

      Une pauvre chambrette, une paillasse sur laquelle est étendu un corps épuisé, trois petits enfants, de dix à trois ans, assis près de la paillasse. Tout trahit la misère et la faim.

      « Paix à toi, femme. Ne t’agite pas. Ne te dérange pas. J’ai trouvé ta fille et je sais que tu es malade. Je suis venu. Voudrais-tu guérir ? »

      La femme n’a qu’un filet de voix pour répondre :

      « Oh ! Seigneur !… Mais pour moi c’est fini !… »

      Elle pleure.

      « Ta fille est arrivée à croire que le Messie pourrait te guérir. Et toi ?

      – Ah ! Moi, je le croirais aussi, mais où est le Messie ?

      – C’est moi, qui te parle. »

      Et Jésus qui était penché sur la paillasse pour murmurer ses paroles près du visage de la malade, se redresse et s’écrie :

      « Je le veux. Sois guérie ! »

      Les enfants ont presque peur de son air majestueux et, la surprise sur le visage, ils se tiennent autour du grabat de la mère.

      Dina serre ses mains sur sa petite poitrine. Une lueur d’espoir, de béatitude brille sur son petit visage. Elle halète, pour ainsi dire, si grande est son émotion. Elle a la bouche ouverte pour dire quelque chose que déjà son cœur murmure. Quand elle voit sa mère, auparavant au teint cireux et abandonnée, se redresser pour s’asseoir comme si une force l’attirait et pénétrait en elle, puis se lever sans quitter un instant des yeux le Sauveur, Dina pousse un cri de joie : « Maman ! » Le mot qui gonflait son cœur est dit !… Un autre suit : « Jésus ! » tout en embrassant sa mère, elle l’oblige alors à s’agenouiller en disant :

      « Adore ! Adore ! C’est lui, celui que le maître de Tolmé appelait : le Messie annoncé par les prophètes.

      – Adorez le vrai Dieu, soyez bons, souvenez-vous de moi. Adieu. »

      Et il sort rapidement pendant que les deux femmes, tout à leur bonheur, restent prosternées par terre…

[1] Le denier est le salaire journalier d’un ouvrier agricole. Dans le contexte actuel, cela revient à proposer le prix d’une journée de SMIC (salaire minimum en France) soit 40 €.

[2] Juges 15,15-17
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 14 Fév - 8:37

219. Les différents fruits de la prédication des apôtres à Ashqelôn

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 81
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 219


Vision du dimanche 15 juillet 1945

Dimanche 7 mai 28
Ashqelôn

219.1 Obéissant à l’ordre qu’ils ont reçu, les groupes d’apôtres ar­rivent l’un après l’autre près de la porte de la ville. Jésus n’est pas encore là, mais il ne tarde pas à arriver par une ruelle qui longe les murs.

      « Le Maître doit avoir eu du succès, dit Matthieu. Voyez comme il sourit. »

      Ils marchent à sa rencontre et, sortant ensemble par la porte, ils reprennent la grand-route bordée par les cultures maraîchères du faubourg.

      Jésus les interroge :

      « Alors ? Qu’avez-vous fait ? Comment cela s’est-il passé ?

      – Très mal, répondent ensemble Judas et Barthélemy.

      – Pourquoi ? Qu’est-ce qui vous est arrivé ?

      – Pour un peu, ils nous auraient lapidés ! Il a fallu que nous nous échappions. Quittons ce pays de barbares. Allons là où on nous aime. Moi, je ne parle plus ici. Déjà, je ne voulais pas parler, mais ensuite je me suis laissé entraîner et toi, tu ne m’as pas retenu. Et pourtant, tu sais bien comment vont les choses… »

      Judas est fâché.

      219.2 « Mais qu’est-ce qui t’est arrivé ?

      – J’accompagnais Matthieu, Jacques et André. Nous nous sommes rendus sur la place des Juges, car c’est le rendez-vous des gens distingués qui ont du temps à perdre pour écouter ceux qui parlent. Nous avons décidé que ce serait Matthieu qui parlerait, puisque c’est le plus habitué à parler aux publicains et à leurs clients. Il a commencé par s’adresser à deux hommes qui se disputaient au sujet d’un champ dans une affaire embrouillée de succession : “ Ne vous haïssez pas pour ce qui périt et que vous ne pouvez emporter dans l’autre vie, mais aimez-vous pour pouvoir jouir des biens éternels qu’on gagne sans lutte autre que contre les passions mauvaises qu’il nous faut vaincre pour devenir victorieux et entrer en possession du Bien. ” C’est bien ce que tu disais, n’est-ce pas ? il continuait, alors que deux ou trois s’approchaient pour l’écouter. “ Ecoutez la Vérité qui enseigne cela au monde, pour que le monde possède la paix. Vous voyez combien un intérêt excessif pour ce qui passe est source de souffrances. Mais la terre n’est pas tout. Il y a aussi le Ciel, et au Ciel il y a Dieu, de même que son Messie est actuellement sur terre. C’est lui qui nous envoie pour vous annoncer que le temps de la miséricorde est venu et qu’il n’y a pas de pécheur qui puisse dire : ‘ Il ne m’écoutera pas ’ ; s’il a un vrai repentir, il obtient le pardon, il est écouté, aimé et invité au Royaume de Dieu. ”

      Entre-temps, beaucoup de monde s’était attroupé. Certains écoutaient avec respect, d’autres posaient des questions, ce qui troublait Matthieu. Moi, je ne donne jamais de réponse pour ne pas interrompre mon discours. Je parle et j’attends la fin pour répondre à chacun en particulier. Qu’ils gardent à l’esprit ce qu’ils veulent dire et qu’ils se taisent ! Mais Matthieu voulait répondre tout de suite… Et nous aussi, on nous interrogeait. Certains ricanaient : “ Voilà encore un fou ! Il vient sûrement de cette tanière qu’est Israël. Les juifs, c’est du chiendent qui envahit tout ! Voilà, voilà leurs éternelles histoires ! Eux, ils ont Dieu comme compère. Ecoutez-moi ça ! Il est sur le fil de leur épée et dans l’acide de leur langue. Voilà, voilà ! Maintenant, c’est leur Messie qu’ils mettent sur le tapis ! Sûrement quelque autre fou qui nous tourmentera comme cela a toujours été le cas au cours des siècles. La peste soit pour lui et pour cette race ! ”

      Alors, j’ai perdu patience. J’ai tiré en arrière Matthieu qui continuait à parler en souriant comme si on lui avait fait honneur et, à mon tour, j’ai pris la parole en m’appuyant sur Jérémie : “ Voici les eaux qui montent du Nord, elles deviennent un torrent dévastateur… ” [1] . “ Race malfaisante, la punition que Dieu vous infligera fera le fracas d’un fleuve, mais ce seront des armes ainsi que des soldats de la terre et de célestes guerriers frondeurs des Cieux, mis en mouvement à l’ordre des chefs du Peuple de Dieu pour vous punir de votre entêtement. Devant leur vacarme, vous perdrez votre force ; et votre fierté, votre courage, vos bras, vos affections, tout s’écroulera. Vous serez exterminés, vous qui êtes les restes du refuge du péché, la porte de l’enfer ! Vous avez repris votre arrogance parce qu’Hérode vous a reconstruits ? Mais vous serez rasés au point de devenir irrémédiablement chauves, vous serez frappés par toute sorte de châtiments dans vos villes et vos villages, dans vos vallées et dans vos plaines. La prophétie n’est pas encore accomplie… ”

      Je voulais poursuivre, mais ils se sont jetés sur nous et c’est seulement parce qu’une caravane providentielle passait dans une rue que nous avons pu nous sauver, car déjà les pierres volaient. Elles ont frappé les chameaux et les chameliers. Il s’est ensuivi une bagarre et nous, nous avons filé. Ensuite, nous sommes restés tranquillement dans une petite cour du faubourg. Ah ! Moi, je ne reviens plus ici…

      219.3 – Mais, excuse-moi, tu les as offensés ! C’est ta faute ! On comprend maintenant pourquoi ils sont venus nous chasser avec une telle hostilité ! » s’exclame Nathanaël.

      Et il continue :

      « Ecoute, Maître. Nous, c’est-à-dire Simon-Pierre, Philippe et moi, nous étions allés du côté de la tour qui donne sur la mer. Il y avait là des marins et des capitaines de navires qui chargeaient des marchandises pour Chypre, la Grèce et encore plus loin. Ils adressaient des imprécations au soleil, à la poussière et à la fatigue. Ils maudissaient leur sort de philistins, esclaves, disaient-ils, des puissants, alors qu’ils pouvaient être rois. Et ils blasphémaient contre les prophètes, contre le Temple, contre nous tous. Je voulais m’en aller de là, mais Simon a refusé. Il disait :

      “ Non, au contraire ! Ce sont justement ces pécheurs que nous devons approcher. Le Maître le ferait et nous devons en faire autant, nous aussi. ”

      “ Parle, alors, toi ”, avons-nous dit, Philippe et moi.

      “ Et si je ne sais pas m’y prendre ? ”, a dit Simon.

      “ Dans ce cas, nous t’aiderons ”, avons-nous répondu.

      Simon s’est alors avancé en souriant vers deux marins en sueur qui s’étaient assis sur une grosse balle, parce qu’ils n’arrivaient pas à la hisser sur le bateau. Il leur a dit :

      “ Elle est lourde, n’est-ce pas ? ”

      “ Plus que lourde, nous sommes à bout de forces. Et il nous faut avoir terminé le chargement, parce que le patron le veut. Il veut lever l’ancre avec la marée car, ce soir, la mer sera plus forte et il faut avoir franchi les écueils pour ne pas être en danger. ”

      “ Des écueils en mer ? ”

      “ Oui, là où l’eau écume. Ce sont de mauvais passages. ”

      “ Les courants, n’est-ce pas ? Oui ! Le vent du midi contourne la pointe et, là, se heurte au courant… ”

      “ Tu es matelot ? ”

      “ Pêcheur en eau douce, mais l’eau c’est toujours l’eau, et le vent c’est toujours le vent. Moi aussi, j’ai bu la tasse plus d’une fois et le chargement a coulé au fond plus d’une fois. C’est un beau métier que le nôtre, mais il est dur. Mais, en toute chose, il y a du beau et du laid, le bon et le mauvais côté. Il n’y a pas d’endroits où il n’y ait que des méchants, ni de race où tous sont cruels. Avec un peu de bonne volonté, on se met toujours d’accord et on trouve qu’il y a partout de braves gens. Allons ! Je veux vous aider. ”

      Simon a alors appelé Philippe :

      “ Allons ! Prends de ce côté-ci et moi de celui-là ; ces braves marins nous conduisent sur le navire, vers la cale. ”

      Les philistins ne voulaient pas, puis ils nous ont laissé faire. Une fois la balle en place, et d’autres encore qui étaient sur le pont, Simon s’est mis à faire l’éloge du bateau, comme il sait le faire, à admirer la mer, la ville si belle vue de la mer, à s’intéresser à la navigation en mer, aux villes des autres nations. Et tous l’entouraient, le remerciaient, le complimentaient… Jusqu’à ce que quelqu’un demande :

      “ Mais toi, d’où es-tu ? De la région du Nil ? ”

      “ Non, de la mer de Galilée. Mais, comme vous le voyez, je ne suis pas un tigre. ”

      “ C’est vrai. Tu cherches du travail ? ”

      “ Oui. ”

      “ Moi, je te prends si tu veux. Je vois que tu es un matelot capable ”, a dit le patron.

      “ Au contraire, c’est moi qui te prends. ”

      “ Moi ? Mais ne m’as-tu pas dit que tu cherches du travail ? ”

      “ C’est vrai : mon travail c’est d’amener les hommes au Messie de Dieu. Tu es un homme, donc je suis chargé de toi. ”

      “ Mais je suis philistin ! ”

      “ Et qu’est ce que cela veut dire ? ”

      “ Cela veut dire que vous nous haïssez, que vous nous persécutez depuis la nuit des temps. Vos chefs nous l’ont toujours dit… ”

      “ Les prophètes, hein ? Mais aujourd’hui, les prophètes sont des voix qui ne hurlent plus. Il n’y a plus désormais que le seul, le grand, le saint Jésus. Lui, il ne crie pas, mais il appelle d’une voix amicale. Il ne maudit pas, mais il bénit. Il n’inflige pas d’infirmités, mais les fait disparaître. Il ne hait pas et ne veut pas que l’on haïsse. Au contraire, il aime tout le monde et il veut que nous aimions même nos ennemis. Dans son Royaume, il n’y aura plus ni vaincus ni vainqueurs, ni hommes libres ni esclaves, ni amis ni ennemis. Ces distinctions qui engendrent le mal n’existeront plus ; elles sont venues de la méchanceté humaine. Mais il n’y aura plus que ses disciples à lui, c’est-à-dire des gens vivant dans l’amour, dans la liberté, dans la victoire sur tout ce qui est pesant et douloureux. Je vous en prie : veuillez croire à mes paroles et le désirer, lui. Les prophéties ont été écrites, certes, mais il est plus grand encore que les prophètes. Pour ceux qui l’aiment, les prophéties n’existent plus. Voyez-vous cette belle ville qu’est la vôtre ? Vous la retrouverez au Ciel, plus belle encore, si vous arrivez à aimer notre Seigneur Jésus, le Christ de Dieu. ”

      Ainsi parlait Simon, jovial et inspiré à la fois. Et tous l’écoutaient avec attention et respect. Oui, avec respect. Puis des citadins armés de bâtons et de pierres ont débouché d’une rue en hurlant. Ils nous ont vus et reconnus à notre vêtement comme étant des étrangers — et des étrangers, je le comprends maintenant, de ton espèce, Judas —, et ils ont cru que nous étions de ta bande. Si ceux du navire ne nous avaient pas protégés, nous étions frais ! Ils ont descendu une chaloupe et nous ont emmenés en mer. Ils nous ont conduit sur la plage près des jardins où nous étions à midi, et nous sommes revenus de là, en même temps que ceux qui cultivent des fleurs pour les riches du pays.

      219.4 Mais toi, Judas, tu gâches tout ! Qu’est-ce que c’est que ces manières insolentes ?

      – C’est la vérité.

      – Mais il faut savoir comment la présenter. Pierre n’a pas dit de mensonges, mais il a su parler ! Réplique Nathanaël.

      – Moi, j’ai cherché à me mettre à la place du Maître, en pensant : “ Lui, il serait doux. Alors, moi aussi… ”, dit Pierre avec simplicité.

      – Moi, j’aime la manière forte. C’est plus royal.

      – Toujours ton idée fixe ! Tu as tort, Judas. Cela fait un an que le Maître essaie de te corriger sur ce point, mais tu ne te prêtes pas à la correction. Tu es aussi obstiné dans l’erreur que ces philistins contre lesquels tu pars en guerre, objecte Simon le Zélote.

      – Quand m’a-t-il corrigé sur ce point ? Et puis, chacun a sa manière de faire et la met en œuvre. »

      A ces mots, Simon le Zélote sursaute et regarde Jésus qui reste silencieux, mais répond à son regard évocateur, par un léger sourire complice.

      « Ce n’est pas une raison, intervient calmement Jacques, fils d’Alphée, avant de poursuivre : Nous sommes ici pour nous corriger nous-mêmes avant de corriger les autres. Le Maître a été d’abord notre maître. Il ne l’aurait pas été, s’il n’avait pas voulu que nous changions nos habitudes et nos idées.

      – Il était notre Maître en sagesse…

      – Il était ? Il l’est, réplique sérieusement Jude.

      – Que d’arguties ! Il l’est, oui, il l’est.

      – Il est le Maître pour le reste également, pas seulement pour ce qui est de la sagesse. Son enseignement s’applique à tout ce qui est en nous. Il est parfait, nous imparfaits. Efforçons-nous donc de devenir comme lui, conseille doucement Jacques, fils d’Alphée.

      – Je ne vois pas en quoi je me suis trompé. La raison est qu’il s’agit d’une race maudite. Tous sont pervertis.

      – Non. Tu ne peux dire cela, éclate Thomas.

      219.5 Jean est allé chez les plus humbles : les pêcheurs qui portaient leurs poissons au marché. Or regarde ce sac humide : c’est du poisson de première qualité. Ils ont renoncé à leur gain pour nous l’offrir. Par crainte que celui du matin ne soit pas frais le soir, ils sont retournés en mer et ont voulu nous prendre avec eux. Nous avions l’impression d’être sur le lac de Galilée, et je t’assure que, si l’endroit le rappelait, si les barques remplies de visages attentifs le rappelaient aussi, Jean le rappelait encore plus. On aurait dit un autre Jésus. Des paroles douces comme le miel tombaient de sa bouche rieuse et son visage étincelait comme un autre soleil. Comme il te ressemblait, Maître ! J’en étais ému.

      Nous sommes restés en mer trois heures durant, à attendre que les filets, tendus entre les bouées, soient remplis de poissons, et ce furent trois heures de béatitude. Ensuite, ils voulaient te voir, mais Jean a répondu : “ Je vous donne rendez-vous à Capharnaüm ”, comme s’il avait dit : “ Je vous donne rendez-vous sur la place de votre ville. ” Ils ont pourtant promis : “ Nous viendrons ” [2] et ils en ont pris bonne note. Nous avons même dû nous défendre pour qu’ils ne nous chargent pas de trop de poissons. Ils nous ont donné du plus fin. Allons le cuire. Ce soir, grand banquet pour nous refaire du jeûne d’hier !

      – Mais qu’est-ce que tu as bien pu dire ? interroge Judas, désemparé.

      – Rien de spécial. J’ai parlé de Jésus, répond Jean.

      – Mais comme tu en parles, toi ! Jean aussi a pris les prophètes, mais dans l’autre sens, explique Thomas.

      – Dans l’autre sens ? demande Judas, interloqué.

      – Oui, toi, tu as extrait des prophètes l’âpreté, lui, la douceur. Car enfin, leur rigueur elle-même est amour, un amour exclusif, violent, si tu veux, mais toujours de l’amour envers les âmes, qu’ils voudraient rendre toutes fidèles au Seigneur. Je ne sais pas si tu y as jamais réfléchi, toi qui as été élevé parmi les scribes. Moi, oui, en tant qu’orfèvre. Même l’or, on le martèle et on le passe au creuset pour le rendre plus beau. Ce n’est pas par haine, mais par amour. C’est ainsi que les prophètes agissent avec les âmes. Je le comprends, justement parce que je suis orfèvre. Jean a cité Zacharie, dans sa prophétie contre Hadrak et Damas et, arrivé à ce point : “ A cette vue, Ashqelôn sera saisie d’épouvante, Gaza se tordra de douleur ainsi qu’Eqrôn [3], car son espérance s’est évanouie. Gaza n’aura plus de roi ”[4], il s’est mis à expliquer comment tout cela est arrivé parce que l’homme s’est détaché de Dieu. Parlant de la venue du Messie qui est pardon d’amour, il a promis que, au lieu d’une pauvre royauté telle que les fils de la terre la souhaitaient pour leur nation, les hommes qui suivront la doctrine du Messie parviendront à posséder une royauté éternelle et infinie au Ciel. Le dire, ce n’est rien, mais l’entendre ! Il semblait entendre une musique et s’élever, porté par les anges. Et voilà que les prophètes qui t’ont donné, à toi, des coups de bâton, nous ont offert, à nous, du poisson excellent. »

      Décontenancé, Judas se tait.

      219.6 « Et vous ? demande le Maître à ses cousins et à Simon le Zélote.

      – Nous sommes allés sur les chantiers où travaillent les calfats. Nous aussi, nous avons préféré aller vers les pauvres. Mais il y avait aussi de riches philistins qui surveillaient la construction de leurs navires. Nous ne savions pas qui parlerait. Alors, comme des enfants, nous avons joué aux points. Jude a sorti sept doigts, moi quatre, Simon deux. C’était donc à Jude de parler, explique Jacques, fils d’Alphée.

      – Qu’as-tu dit ? questionnent-ils tous.

      – Je me suis franchement fait connaître pour ce que je suis, disant qu’à leur hospitalité, je demandais la faveur d’accueillir la parole du pèlerin qui voyait en eux des frères ayant une origine et une fin communes, et l’espérance non commune mais pleine d’amour, de pouvoir les amener dans la maison du Père et de les appeler “ frères ” pour l’éternité, dans la grande joie du Ciel. J’ai ajouté : “ Il a été dit par Sophonie, notre prophète : ‘ La région de la mer deviendra un lieu de pacage pour les bergers… ils y feront paître leurs troupeaux et, le soir, ils se reposeront dans les maisons d’Ashqelôn [5]. ’ ” Puis j’ai développé cette idée en disant : “ Le Pasteur suprême est arrivé parmi vous, armé non pas de flèches, mais d’amour. Il vous tend les bras, il vous indique ses pâturages saints. S’il se souvient du passé, c’est uniquement pour dire aux hommes sa compassion à la vue du grand mal qu’ils se font et qu’ils se sont fait, comme des enfants fous, par haine, alors qu’ils auraient pu éviter tant de souffrances par l’amour réciproque, puisqu’ils sont frères. Cette terre, ai-je dit, sera le lieu des saints bergers, les serviteurs du Pasteur suprême : ils savent déjà que c’est ici qu’ils auront les pâtures les plus fertiles et les meilleurs troupeaux, et leur cœur, au soir de leur vie, pourra reposer en pensant à vos cœurs, à ceux de vos fils, plus familiers des maisons amies, car ils auront comme maître Jésus, notre Seigneur. Ils m’ont compris. Ils m’ont interrogé, ou plutôt, ils nous ont interrogés. Et Simon a raconté sa guérison, mon frère ta bonté envers les pauvres. La preuve, la voilà : cette bourse bien garnie pour les pauvres que nous trouverons sur notre chemin. A nous aussi, les prophètes ne nous ont pas fait de mal… »

      Judas ne souffle mot.

      219.7 « Eh bien, dit Jésus pour le réconforter, la prochaine fois, Judas fera mieux. Il a cru bien faire en agissant ainsi. Ayant donc agi dans un but honnête, il n’a péché en aucune façon. Et je suis content de lui aussi. L’apostolat n’est pas un métier facile, mais il s’apprend. Une chose me contrarie : ne pas avoir eu cet argent plus tôt et ne pas vous avoir trouvés. Il m’aurait servi pour une famille dans l’épreuve.

      – Nous pouvons y retourner. Il est encore temps… Mais, excuse-moi, Maître. Comment l’as-tu trouvée ? Qu’as-tu fait, toi ? Vraiment rien ? Tu n’as pas évangélisé ?

      – Moi ? Je me suis promené. Par mon silence, j’ai dit à une prostituée : “ Quitte ton péché. ” J’ai trouvé un enfant, un peu polisson, et je l’ai évangélisé en échangeant des cadeaux. Je lui ai donné la boucle que Marie Salomé avait mise à mon vêtement à Béthanie, et lui m’a donné son œuvre. »

      Et Jésus sort de son vêtement le pantin caricatural. Tout le monde regarde et rit.

      « Puis je suis allé voir de splendides tapis qu’un habitant d’Ashqelôn fabrique pour les vendre en Egypte et ailleurs… et j’ai consolé une fillette qui a perdu son père, et j’ai guéri sa mère. C’est tout.

      – Et cela te semble peu de chose ?

      – Oui, parce qu’il aurait aussi fallu de l’argent, or je n’en avais pas.

      – Mais retournons-y, nous qui… n’avons ennuyé personne, dit Thomas.

      – Et ton poisson ? plaisante Jacques, fils de Zébédée.

      – Le poisson ? Le voilà. Vous, qui avez l’anathème sur vous, allez chez le vieil homme qui nous offre l’hospitalité et commencez à préparer. Nous, nous allons en ville.

      – Oui, dit Jésus. Mais je vous indiquerai la maison de loin. Il y aura du monde. Moi, je n’y vais pas. Ils me retiendraient. Je ne veux pas offenser l’hôte qui nous attend en manquant à son invitation. Le manque de politesse est toujours contraire à la charité. »

      Judas baisse encore davantage la tête et il en devient tout rouge, tant il change de couleur au souvenir des nombreuses fois où il est tombé dans cette faute.

      Jésus reprend :

      « Vous, allez à la maison et cherchez la fillette. Il n’y a que cette fillette, vous ne pouvez pas vous tromper. Vous lui donnerez cette bourse et vous lui direz : “ C’est Dieu qui te l’envoie parce que tu as su croire. C’est pour toi, ta maman et tes petits frères. ” Rien de plus. Et revenez tout de suite. Allons. »

      Le groupe se divise donc : Jésus, Jean, Thomas et les cousins de Jésus vont en ville pendant que les autres se rendent la maison du maraîcher philistin.


[1]  Jérémie 47,1-5

[2] L’un de ces pêcheurs est Hermastée. Le seul qui viendra effectivement au rendez-vous, non pas à Capharnaüm, mais à Tyr (4.114)

[3] Acron - Écron – Ekron : La plus au nord des cinq principales villes des Philistins.

[4] Zacharie 9,5

[5] Sophonie 2,7
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 15 Fév - 10:02

220. Les idolâtres de Magdalgad et le miracle accompli pour une femme en couches

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 82
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 220


Vision du lundi 16 juillet 1945

Lundi 8 mai 28
Magdalgad

      220.1 Ashqelôn et ses cultures maraîchères ne sont plus qu’un souvenir. Dans la fraîcheur d’une splendide matinée, tournant le dos à la mer, Jésus se dirige avec ses disciples vers des collines toutes vertes, de faible altitude mais jolies, qui s’élèvent au-dessus de la plaine fertile. Ses apôtres reposés et satisfaits, sont tout joyeux ; ils parlent d’Ananias, de ses esclaves, d’Ashqelôn, de la bagarre qu’il y avait, à leur retour en ville pour apporter l’argent à Dina.

      « J’étais destiné, dit Thomas, à subir l’étreinte des philistins. La haine et l’amour se manifestent, si l’on veut, de la même façon et moi, qui n’avais pas souffert de leur haine, je n’ai pas été loin d’être blessé par leur amour. Pour un peu, ces gens que le miracle avait exaltés allaient nous mettre en prison pour nous faire dire où était le Maître. Et quel chahut ! N’est-ce pas, Jean ? La ville bouillonnait comme un chaudron. Ceux qui étaient fâchés ne voulaient pas entendre raison et voulaient rechercher les juifs pour les rosser. Ceux qui avaient profité du miracle et leurs amis voulaient persuader les premiers qu’un dieu était passé. Quelle confusion ! Ils ont de quoi discuter pendant des mois. L’ennui est qu’ils discutent plus avec des bâtons qu’avec leur langue. Eh bien… ils sont entre eux, qu’ils fassent ce qu’ils veulent !

      – Pourtant… ils ne sont pas méchants…, fait remarquer Jean.

      – Non. Ils sont seulement aveuglés par bien de choses » répond Simon le Zélote.

      Jésus garde le silence pendant un bon bout de chemin. Puis il dit :

      « Moi, je vais dans ce hameau sur la colline. Quant à vous, continuez vers Azoto. Faites attention. Soyez courtois, doux, patients. Même s’ils vous ridiculisent, supportez-le paisiblement, comme Matthieu hier, et Dieu vous viendra en aide. Sortez au crépuscule et allez près de l’étang qui se trouve aux environs d’Azoto. Nous nous retrouverons là.

      – Mais, Seigneur, je ne vais pas te laisser aller seul ! Ces gens-là sont violents. C’est imprudent, s’exclame Judas.

      – N’ayez pas peur pour moi. Va, Judas, va et sois prudent, toi. Adieu. Que la paix soit avec vous. »

      Guère enthousiastes, les douze s’éloignent. Jésus les regarde partir, puis il prend le sentier de la colline, frais, ombragé. La colline est couverte de vignes et de bosquets d’oliviers, de noyers, de figuiers bien cultivés, qui annoncent déjà une belle récolte. De petits champs de céréales occupent les endroits plats et, sur les pentes, paissent des chèvres blanches dans l’herbe verte.

      220.2 Jésus arrive aux premières maisons du pays. Il est sur le point d’y entrer quand il rencontre un étrange cortège. Des femmes crient, la voix des hommes alterne avec la leur dans un chant funèbre, et tous se livrent à une sorte de danse autour d’un bouc qui avance, les yeux bandés, meurtri de coups, les genoux en sang pour avoir trébuché et être tombé sur les pierres du sentier.

      Un second groupe, lui aussi vociférant et hurlant, s’agite autour d’une statue d’idole sculptée, bien laide en vérité, et tient en l’air des poêles avec des braises allumées dont ils alimentent la combustion en y jetant de la résine et du sel – du moins à ce qu’il me semble, car la première dégage une odeur de térébenthine et l’autre crépite comme le fait le sel –.

      Un dernier groupe entoure un santon devant lequel ils s’in­clinent en criant :

      « Par ta force ! (hommes).

      – Toi seul le peux ! (femmes).

      – Supplie le dieu ! (hommes).

      – Enlève le sortilège ! (femmes).

      – Commande à la matrice !

      – Sauve la femme ! »

      Et tous ensemble, en un hurlement infernal :

      « Mort à la magicienne ! »

      Et, de nouveau, avec une variante :

      « Par ta force !

      – Toi seul le peux !

      – ordonne au dieu !

      – Qu’il fasse voir !

      – Ordonne au bouc !

      – Qu’il montre la magicienne ! »

      Puis, avec des cris de damnés :

      « Qui hait la maison de Fara ! »

      220.3 Jésus arrête un homme du dernier groupe et lui demande doucement :

      « Qu’est-ce qu’il se passe ? Je suis étranger… »

      Comme la procession s’est arrêtée un moment pour frapper le bouc, jeter de la résine sur les braises et reprendre haleine, l’homme explique :

      « L’épouse de Fara, le grand homme de Magdalgad, est en train de mourir en couches. C’est une femme qui la hait qui lui a jeté un sort. Ses entrailles se sont nouées, et l’enfant ne peut naître. Nous recherchons la magicienne pour la tuer. C’est seulement comme cela que l’épouse de Fara sera sauve et, si nous ne trouvons pas la magicienne, nous sacrifierons le bouc, pour obtenir la plus grande pitié de la déesse Matrice. »

      (Je comprends alors que cette horreur de poupée est une déesse…).

      « Arrêtez-vous, dit Jésus à l’homme et à deux autres qui se sont approchés. Je suis capable de guérir la femme et de sauver le garçon. Dites-le au prêtre.

      – Tu es médecin ?

      – Plus que cela. »

      Les trois hommes fendent la foule et s’avancent vers le prêtre idolâtre. Ils lui parlent. La rumeur se répand. La procession, qui avait repris sa marche, s’arrête.

      Le prêtre, que ses oripeaux multicolores rendent imposant, fait signe à Jésus et ordonne :

      « Jeune homme, viens ici ! »

      Et quand il est près de lui :

      « Est-ce vrai, ce que tu dis ? Prends garde : si ce que tu prétends ne se produit pas, nous penserons que l’esprit de la magicienne s’est incarné en toi, et nous te tuerons à sa place.

      – C’est vrai. Conduisez-moi immédiatement auprès de cette femme et, en attendant, donnez-moi le bouc. J’en ai besoin. Otez-lui son bandeau et amenez-le-moi ici. »

      Ils obéissent. La pauvre bête, abasourdie, chancelante, tout en sang, est amenée à Jésus qui caresse son épais poil noir.

      « Maintenant il faut m’obéir en tout. L’acceptez-vous ?

      – Oui ! Crie la foule.

      – Allons, ne criez plus. Ne brûlez plus de résine. Je vous l’ordonne. »

      220.4 Ils se mettent en chemin, rentrent dans le village et, par la meilleure route, ils se rendent à une maison située au milieu d’un verger. Des cris et des pleurs sortent par les portes grandes ouvertes et, dominant tout, lugubres, les lamentations atroces de la femme qui ne peut donner le jour à son enfant.

      Ils courent avertir Fara qui s’avance, le teint terreux, échevelé, accompagné de femmes qui pleurent et d’inutiles santons pour qui on brûle de l’encens et des feuilles au-dessus des poêles en cuivre.

      « Sauve ma femme !

      – Sauve ma fille !

      – Sauve-la, sauve-la ! Crient tour à tour l’homme, une vieille femme, la foule.

      – Je la sauverai, et ton garçon avec elle, car c’est un garçon. Il est bien robuste, et il a des yeux doux de la couleur d’une olive qui mûrit et la tête couverte de cheveux noirs comme cette toison.

      – Comment le sais-tu ? Que vois-tu ? Même dans les entrailles ?

      – C’est en toute chose que je vois et pénètre. Je connais et je peux tout. Je suis Dieu. »

      Il aurait lancé la foudre que cela aurait produit moins d’effet. Tous se jettent par terre, comme morts.

      « Relevez-vous. Ecoutez : je suis le Dieu puissant et je ne supporte pas d’autres dieux en ma présence. Allumez un feu, et je­tez-y cette statue. »

      La foule se révolte. Elle commence à douter du “ dieu ” mystérieux qui lui enjoint de brûler la déesse. Les plus enflammés sont les prêtres.

      Mais Fara et la mère de l’épouse, à qui la vie de la femme tient à cœur, s’opposent à la foule hostile. Comme Fara est le grand homme du village, la foule réfrène son indignation. L’homme interroge néanmoins Jésus :

      « Comment puis-je croire que tu es un dieu ? Donne-m’en une preuve et j’ordonnerai qu’on fasse ce que tu veux.

      – Regarde. Vois-tu les blessures de ce bouc ? Elles sont ouvertes, n’est-ce pas ? Sanglantes, n’est-ce pas ? La bête est quasi mourante, n’est-ce pas ? Eh bien, je veux que cela ne soit pas… Voilà, regarde. »

      L’homme se penche et regarde… il s’écrie :

      « Il n’a plus de blessures ! » et il se jette par terre en suppliant :

      « Ma femme, ma femme ! »

      Mais le prêtre de la procession intervient :

      « Méfie-toi, Fara. Nous ne savons pas qui est cet homme ! Crains la vengeance des dieux. »

      L’homme est pris entre deux peurs : les dieux, sa femme… Il demande :

      « Qui es-tu ?

      – Je suis Celui qui suis, au Ciel, sur la terre. Toute force m’est soumise, toute pensée connue. Les habitants du Ciel m’adorent, les habitants de l’enfer me craignent. Et ceux qui croient en moi verront s’accomplir toutes sortes de prodiges.

      – Je crois ! Je crois… Quel est ton nom ?

      – Jésus Christ, le Seigneur incarné. Jetez cette idole aux flammes ! Je ne supporte pas de dieux en ma présence. Eteignez ces encensoirs ! Il n’y a que mon Feu qui possède puissance et volonté. Obéissez, ou je réduis en cendre votre vaine idole et je pars sans opérer le salut. »

      Jésus est terrible, dans son vêtement de lin des épaules duquel pend le manteau bleu qui retombe en arrière. Il a le bras levé dans l’attitude du commandement, le visage fulgurant. Ils en ont peur. Personne ne parle plus… Le cri, de plus en plus épuisé de la femme, déchire le silence. Mais ils hésitent à obéir.

      Le visage de Jésus devient de plus en plus insoutenable à regarder. C’est vraiment un feu qui brûle la matière et les âmes. Les encensoirs sont les premiers à subir sa volonté. Ceux qui les tiennent doivent les jeter parce qu’ils ne peuvent plus en supporter la chaleur. Et pourtant, les charbons paraissent éteints… Puis ce sont ceux qui portent l’idole qui doivent poser à terre le brancard qu’ils portaient sur leurs épaules avec des barres, car le bois se carbo­nise comme si une flamme mystérieuse le léchait et à peine arrivé au sol, le brancard de l’idole prend feu. Les gens fuient, terrorisés…

      220.5 Jésus se tourne vers Fara :

      « Peux-tu donc réellement croire à ma puissance ?

      – Je crois, je crois. Tu es Dieu. Tu es le dieu Jésus.

      – Non. Je suis le Verbe du Père, de Yahvé d’Israël [1], venu avec sa chair, son sang, son âme et sa divinité racheter le monde et lui donner la foi au Dieu véritable, un et trine, qui se tient dans les Cieux très hauts. Je viens apporter aide et miséricorde aux hommes pour qu’ils abandonnent l’erreur et viennent à la vérité, qui est le Dieu unique de Moïse et des prophètes. Peux-tu croire encore ?

      – Je crois, je crois !

      – Je suis venu apporter aux hommes la voie, la vérité, et la vie pour abattre les idoles, pour enseigner la sagesse. Le monde obtiendra la rédemption par moi, car je mourrai par amour pour le monde et pour le salut éternel des hommes. Peux-tu croire encore ?

      – Je crois, je crois !

      – Je suis venu dire aux hommes que, s’ils croient au vrai Dieu, ils auront la vie éternelle dans les Cieux, près du Très-Haut qui a créé tous les hommes, les animaux, les plantes et les planètes. Peux-tu croire encore ?

      – Je crois, je crois ! »

      Jésus n’entre même pas dans la maison. Il tend seulement les bras vers la pièce où souffre la femme, les mains tendues comme à la résurrection de Lazare et il crie :

      « Sors à la lumière, pour connaître la Lumière divine et sur l’ordre de la Lumière qui est Dieu ! »

      C’est un commandement de tonnerre auquel, après un moment, fait écho un cri de triomphe où résonnent une plainte et une joie, puis le cri d’un nouveau-né, faible, mais bien distinct, et qui se renforce de plus en plus.

      « Ton fils pleure en saluant la terre. Va le trouver et dis-lui, maintenant et plus tard, que la patrie ce n’est pas la terre, mais le Ciel. Fais-le grandir et, toi aussi, grandis avec lui, pour le Ciel. C’est la Vérité qui te parle. Cela (et il montre les encensoirs de cuivre, tordus comme des feuilles sèches qui ne peuvent plus servir à rien et gisent sur le sol, et la cendre qui marque la place du brancard de l’idole) cela, c’est le Mensonge qui n’apporte ni aide, ni salut. Adieu. »

      Il est sur le point de partir.

      220.6 Mais une femme accourt avec un vigoureux nouveau-né enveloppé dans des langes et elle crie :

      « C’est un garçon, Fara. Beau, robuste, aux yeux noirs foncés comme une olive qui mûrit ; ses cheveux sont plus noirs et plus fins que la toison d’un chevreau sacré. Et ta femme repose, heureuse. Elle ne souffre plus, comme s’il n’y avait rien eu. C’est inattendu, alors qu’elle était mourante… et après ces mots… »

      Jésus sourit et, comme l’homme lui présente son nouveau-né, il lui touche la tête du bout des doigts. A l’exception des prêtres qui sont partis, indignés à la vue de la défection de Fara, la foule s’approche, curieuse de voir le nouveau-né et désireuse de regarder Jésus.

      Fara voudrait lui offrir des objets et de l’argent pour le miracle. Mais Jésus dit avec douceur et fermeté :

      « Rien. Le miracle ne se paie que par la fidélité à Dieu qui l’a accordé. Je garde seulement ce bouc, en souvenir de ta ville. »

      Sur ce, il s’éloigne avec le bouc qui trottine auprès de lui comme si Jésus était son maître. Il est revenu à la vie, heureux, bêlant sa joie d’être avec quelqu’un qui ne le frappe pas…

      Ils descendent ainsi les pentes de la colline pour reprendre la grand-route qui conduit à Azoto…

      220.7 Quand, vers le soir, près de l’étang ombragé, Jésus voit arriver ses disciples, l’étonnement est réciproque : pour eux de voir Jésus avec ce bouc et pour lui de voir leurs visages déconfits d’hommes qui n’ont pas obtenu de résultats.

      « C’est un désastre, Maître ! Ils ne nous ont pas frappés, mais ils nous ont chassés de la ville. Nous avons erré dans la campagne et, en payant bien cher, nous avons pu nous procurer de la nourriture. Et pourtant, nous avons été doux…, disent-ils d’un air désolé.

      – Peu importe. A Hébron aussi, ils nous avaient chassés l’an dernier. Pourtant, cette fois, ils nous ont fait honneur. Il ne faut pas vous décourager.

      – Et toi, Maître ? Cet animal ? demandent-ils.

      – Je suis allé à Magdalgad. J’ai brûlé une idole et ses encensoirs. J’ai fait naître un garçon. J’ai prêché le vrai Dieu en faisant des miracles et j’ai emmené avec moi le bouc destiné à un rite idolâtre, à titre de récompense. Pauvre bête, elle n’était qu’une plaie !

      – Mais maintenant il se porte bien ! C’est une superbe bête !

      – C’était un animal sacré destiné à l’idole… En bonne santé, oui. Ce fut mon premier miracle pour les convaincre que c’était moi, le Puissant, et non pas leur morceau de bois.

      – Mais que vas-tu en faire ?

      – Je l’amène à Marziam. Un pantin hier, un bouc aujourd’hui. Je vais lui faire plaisir !

      – Mais tu veux le prendre avec toi jusqu’à Béther ?

      – Certainement. Je ne vois pas ce qu’il y a de déplaisant à le faire. Si je suis le Berger, je pourrai avoir un bouc. Puis nous le donnerons aux femmes et elles iront ainsi en Galilée. Nous trouverons une chevrette. Simon, tu deviendras berger de chèvres. Il vaudrait mieux des brebis… mais dans le monde, il y a plus de boucs que d’agneaux… C’est un symbole, mon Pierre. Rappelle-toi cela… Par ton sacrifice, tu feras en sorte que les boucs deviennent des agneaux. Venez. Rejoignons ce village parmi les vergers. Nous trouverons à nous loger soit dans les maisons, soit sur les gerbes qui sont déjà liées dans les champs. Et demain, nous irons à Jabnia. »

      Les apôtres sont étonnés, peinés, découragés. Etonnés par les miracles, affligés de ne pas y avoir assisté, découragés par leur incapacité alors que Jésus peut tout.

      Mais lui, au contraire, est si content ! Et il réussit à les persuader que “ rien n’est inutile, pas même un échec, car il sert à vous former à l’humilité alors que la parole sert à faire résonner un nom, le mien, et à laisser un souvenir dans les cœurs. ” Et il est si convaincant, sa joie est si lumineuse qu’ils retrouvent eux aussi la sérénité.

[1] Cette prononciation intermédiaire entre Jéhovah et Yahvé, est caractéristique de l'œuvre de Maria Valtorta. Elle correspond aux recherches actuelles sur la prononciation du Tétragramme (IHVH) ou nom propre de Dieu. 

Observation - Jésus détruit l'idole d'Astarté

Jésus vient de quitter Ascalon. Alors qu’Il aborde Magdalgag, les habitants sont rassemblés autour d’« une statue sculptée, très grossière », qui « tient en l'air des poêles avec des braises allumées dont ils alimentent la combustion en jetant dessus de la résine et du sel… ». Les participants expliquent : « nous sacrifierons le bouc, pour obtenir la plus grande pitié de la déesse Matrice (on comprend que cette horreur de poupée est une déesse) ». Jésus intervient avec vigueur : «  Cette idole aux flammes ! Je ne supporte pas de dieux en ma présence. Ces encensoirs éteints ! Il n'y a que mon Feu qui possède puissance et volonté. Obéissez, ou je réduis en cendre votre vaine idole et je m'en irai sans opérer le salut ». (EMV 220.2). Lorsque Jésus rejoint ses apôtres, Il les informe : « Je suis allé à Magdalgad. J'ai brûlé une idole et ses encensoirs. J'ai fait naître un garçon. J'ai prêché le Dieu Vrai en faisant des miracles et j'ai pris pour Moi le bouc destiné à un rite idolâtre, à titre de récompense ». (EMV 220.7)

Les phéniciens nommaient leur déesse Ashtart (ou Ishtar). Déesse de la fertilité, elle représentait l'élément féminin du couple qu'elle formait avec Baal. A l'origine le culte de la déesse Astarté comportait des cérémonies qui se concluaient parfois par des sacrifices sanglants. Dans la Bible, le nom d'Astarté désigne les déesses païennes en général, tout comme le nom de Baal désigne les dieux. Dans le premier Livre des Rois (1R 11,5.33) il est précisément dit que le roi Salomon a commis une faute en élevant un lieu de culte à Astarté, désignée aussi comme la "déesse des Sidoniens".

Bien plus loin dans l’œuvre, Jésus évoque les idoles phéniciennes : « Ne te bouleverse pas, Simon. Je ne dis pas que j'établirai un culte semblable à celui de Moloch, de Baal et d'Astarté. Ce sont les hommes eux-mêmes qui nous immoleront ». (EMV 555.7)

https://valtorta.fr/deuxieme-annee-vie-publique-de-jesus/les-idolatres-de-magdalgad-et-le-miracle-accompli-pour-une-femme-en-couches.html#vision-220.2

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 17 Fév - 9:05

221. Les préventions des apôtres à l’égard des païens et la parabole du fils difforme

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 83
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 221


Vision du mardi 17 juillet 1945

Mardi 9 mai 28
Jabnia

21.1 « De Jabnia, est-ce que nous irons à Acron ? » demandent les apôtres.

      Ils traversent une campagne très fertile où les blés dorment de leur dernier sommeil, sous le soleil, sous ce grand soleil qui les a fait mûrir, étendus en gerbes dans les champs fauchés et tristes comme autant d’immenses lits funèbres, maintenant qu’ils ne sont plus revêtus d’épis, mais de dépouilles qui attendent d’être transportées ailleurs.

      Mais si les champs sont nus, les vergers sont en habits de fête : les fruits se hâtent de mûrir, ils passent du vert cru du fruit encore jeune au vert tendre, jaune, rosé, brillant comme la cire, du fruit qui arrive à maturité. Les figuiers ouvrent l’écrin de leurs fruits, en en faisant éclater la peau souple, le doux écrin du fruit-fleur et montrent, sous la fente verte-blanche ou violette et blanche, la gélatine transparente et criblée des petits grains rose foncé de la pulpe. Une brise légère agite les olives couleur de jade au milieu du feuillage vert argenté des oliviers. Solides sur leur pied, les noyers imposants présentent leurs fruits qui se gonflent sous la peluche de leur brou pendant que les amandes achèvent de mûrir dans leur enveloppe dont le velours se ride et change de couleur. Les vignes gonflent leurs grains et quelques grappes bien exposées com­mencent à prendre la couleur transparente de la topaze et du futur rubis des grains mûrs. Pendant ce temps, les cactées de la plaine ou des bas coteaux exultent sous les couleurs de jour en jour plus gaies des ovules de corail bizarrement posées par quelque joyeux décorateur au sommet des spatules charnues qui ressemblent à autant de mains ; ces dernières forment en se fermant des étuis piquants qui tendent vers le ciel les fruits qu’elles ont fait croître et mûrir.

      Des palmiers isolés et des caroubiers en groupe rappellent déjà l’Afrique toute proche. Les premiers font résonner les casta­gnettes de leurs feuilles dures en éventail et les caroubiers habillés de vert foncé plastronnent, tout fiers de leur revêtement somptueux. Des chèvres blanches ou noires, grandes, agiles, aux longues cornes recourbées, aux yeux doux et vifs broutent les cactées et donnent l’assaut aux agaves charnus, à ces énormes pinceaux de feuilles dures et épaisses qui ont l’air d’artichauts ouverts au milieu desquels se dresse le candélabre de cathédrale formé par leur tige géante aux sept bras sur lesquels flamboie une fleur jaune et rouge au parfum agréable. L’Afrique et l’Europe se donnent la main pour recouvrir le sol de splendeurs végétales.

      221.2 Le groupe des apôtres vient de quitter la plaine pour prendre un sentier qui gravit une colline littéralement couverte de vignes, sur cette côte qui regarde la mer. Le sol pierreux et calcaire, permet au raisin, nourri par le soleil, d’élaborer un nectar précieux par la transformation de sa sève en véritable sirop. Et voilà qu’ils découvrent la mer, ma mer, la mer de Jean, la mer de Dieu. Elle se montre dans sa draperie démesurée de crêpe de soie bleue et elle parle de lointain, d’infini, de puissance, chantant avec le ciel et le soleil le trio des gloires de la création. Et la plaine se déploie tout entière, dans toute la beauté de ses ondulations, avec ses semblants de collines peu élevées qui succèdent à des zones plates, à des dunes dorées, jusqu’aux villes et aux villages du bord de mer dont la blancheur contraste avec l’azur de la mer.

      « Comme c’est beau ! Comme c’est beau ! S’extasie Jean à mi-voix.

      – Mon Seigneur, ce garçon se nourrit d’azur : tu dois l’y destiner. Il paraît voir son épouse quand il voit la mer ! » dit Pierre qui ne voit pas beaucoup de différence entre les eaux de la mer et celles du lac.

      Il rit d’un air bon enfant.

      « Oui, il a déjà sa destinée, Simon. Vous avez tous votre destin.

      – Eh bien ! Et moi, où m’enverras-tu ?

      – Oh, toi !…

      – Dis-le-moi. Sois gentil !

      – Dans un endroit plus grand que ta ville, la mienne, Magdala et Tibériade réunies.

      – Je vais m’y perdre !

      – N’aie pas peur. Tu ressembleras à une fourmi sur un grand squelette. Mais par tes allées et venues inlassables, tu ressusciteras le squelette.

      – Je n’y comprends rien… Sois plus clair.

      – Tu comprendras, tu comprendras !… »

      Jésus sourit.

      « Et moi ?

      – Et moi ? »

      Tous veulent savoir.

      « Voici comment je ferai. »

      Jésus se penche – ils se trouvent le long de la rive tout en gravier d’un torrent au milieu duquel l’eau est encore assez profonde – et il prend une poignée de graviers très fins. Il la jette en l’air et elle s’éparpille dans toutes les directions.

      « Voilà : il n’y a que ce caillou-ci qui soit resté dans mes cheveux. Vous aussi, vous serez dispersés de la même manière.

      – Et toi, frère, tu représentes la Palestine n’est-ce pas ? demande sérieusement Jacques, fils d’Alphée.

      – Oui.

      – Je voudrais savoir quel sera celui qui restera en Palestine, demande encore Jacques.

      – Prends ce caillou, en souvenir. »

      Jésus donne le caillou resté accroché à ses cheveux à son cousin Jacques, en souriant.

      « Ne pourrais-tu pas me laisser en Palestine ? dit Pierre. Je suis le plus apte parce que je suis le moins débrouillard ; dans notre maison, encore, je sais me retourner. Mais, au dehors !…

      – Tu es le moins indiqué, au contraire, pour rester ici.

      221.3 Vous avez des préventions contre le reste du monde et vous croyez qu’il est plus facile d’évangéliser dans des pays de fidèles que dans des pays d’idolâtres et de païens, alors que c’est justement le contraire. Réfléchissez à ce que vous offre la vraie Palestine, aussi bien dans ses classes élevées que, à un moindre degré, dans son peuple, et voyez comme ici, en un lieu où le nom de la Palestine est haï et le vrai sens du nom de Dieu inconnu, nous n’avons certainement pas été accueillis plus mal qu’en Judée, en Galilée ou dans la Décapole. Alors vos préventions tomberont et vous verrez que j’ai raison de dire qu’il est plus facile de convaincre des gens qui ignorent le vrai Dieu que les membres du peuple de Dieu, car ce sont des idolâtres subtils, coupables, qui, dans leur orgueil, se croient parfaits et entendent rester tels qu’ils sont.

      Que de pierres précieuses, que de perles mon œil voit là où vous ne voyez que la terre et la mer ! La terre des multitudes qui ne sont pas la Palestine. La mer de l’humanité qui n’est pas la Palestine et qui ne demande, comme mer, qu’à accueillir les chercheurs pour leur donner ces perles et, comme terre, qu’on la fouille pour livrer les pierres précieuses. Il y a des trésors partout, mais il faut les chercher. Toute motte de terre peut receler un trésor et nourrir une semence, toute profondeur peut cacher une perle. Mais quoi ? prétendriez-vous donc que la mer ravage ses profondeurs par des tempêtes horribles pour arracher à leurs bancs les huîtres perlières, pour les ouvrir par le choc des vagues et les offrir ensuite sur le rivage aux paresseux qui ne veulent pas faire d’effort, aux pusillanimes qui ne veulent pas s’exposer au danger ? Prétendriez-vous que la terre transforme en un arbre un grain de sable pour vous donner des fruits sans semence ? Non, mes chers amis. Cela exige de la fatigue, du travail, de la hardiesse. Et par-dessus tout, il faut ne pas avoir de préventions.

      221.4 Je le sais, vous désapprouvez, les uns plus, d’autres moins, ce voyage en pays philistin. Même les gloires que rappellent ces terres, les gloires d’Israël qui parlent de ces champs fécondés par le sang des hébreux répandu pour faire d’Israël une grande nation, de ces villes qui furent arrachées une à une aux mains de ceux qui les possédaient, pour couronner Juda et en faire une nation puissante, rien de cela ne peut vous faire aimer ce pèlerinage. Et je ne vous parle pas non plus de l’idée de préparer le terrain à recevoir l’Evangile et de l’espérance de sauver des âmes : cela ne peut vous convaincre. Je ne mets pas cela au nombre des raisons que je présente à votre esprit pour vous faire considérer le bien-fondé de ce voyage. Cette pensée vous dépasse encore trop. Vous y parviendrez un jour. Alors vous direz : “ Nous nous imaginions que c’était un caprice ou une prétention, nous croyions que c’était un manque d’amour du Maître à notre égard de nous faire aller si loin, par des chemins longs et pénibles, au risque de passer de très mauvais moments. Or c’était, au contraire, de l’amour, c’était de la prévoyance, c’était pour nous aplanir la route maintenant que nous ne l’avons plus et que nous nous sentons encore plus perdus. C’est qu’alors nous étions comme des sarments qui poussent dans tous les sens, mais qui savent que la vigne les nourrit et qu’il y a toujours auprès d’eux l’échalas robuste qui peut les soutenir ; en revanche, nous sommes aujourd’hui des sarments qui doivent créer une tonnelle tout seuls, en tirant, oui, leur nourriture du cep de la vigne, mais sans plus de tuteur pour s’y appuyer. ” C’est ce que vous direz, et alors vous me remercierez.

      D’ailleurs, n’est-il pas beau de s’en aller ainsi, en laissant tomber des étincelles lumineuses, des notes d’une musique céleste, des corolles qui viennent du Ciel, des parfums de vérité au service et à la louange de Dieu sur des terres enveloppées de ténèbres, sur des cœurs muets, sur des âmes stériles comme des déserts, pour vaincre les puanteurs du Mensonge, et de le faire ensemble, moi et vous, vous et moi, le Maître et les apôtres, en n’étant tous qu’un seul cœur, un seul désir, une seule volonté ? Pour que Dieu soit connu et aimé, pour que Dieu rassemble toutes les nations sous son étendard, pour que, là où il est, tous se trouvent avec lui. C’est l’espérance, le désir, la faim de Dieu ! Et c’est l’espérance, le désir, la faim des âmes qui, elles, ne sont pas de races différentes, mais qui appartiennent à une unique race : celle que Dieu a créée, car étant toutes filles du Dieu unique, elles ont les mêmes désirs, la même espérance, la même faim du Ciel, de la Vérité, de l’Amour réel…

      221.5 Il semble que des siècles d’erreur ont changé l’instinct des âmes. Mais non. L’erreur enveloppe les âmes parce qu’elles ont fusionné avec la chair et subissent l’effet du poison que Satan a inoculé à l’animal-homme. C’est ainsi que l’erreur peut envelopper le cœur, parce qu’il est lui aussi greffé sur la chair et en subit les poisons. La triple concupiscence mord les sens, le sentiment et la pensée. Mais l’âme n’est pas greffée sur la chair. Elle sera étourdie par les coups que Satan et la concupiscence lui assèneront. Elle sera presque aveuglée par les murs que dresse devant elle la chair et par les éclaboussures du sang bouillant de l’animal-homme dans lequel elle est répandue, mais elle n’a pas changé son aspiration vers le Ciel, vers Dieu. Elle ne peut changer.

      Voyez-vous l’eau pure de ce torrent ? Elle est descendue du ciel et elle retournera au ciel par évaporation de l’eau sous l’influence du vent et du soleil. Elle descend et elle remonte. L’élément ne se détruit pas, mais revient à son origine. L’âme revient à son origine. Si cette eau au milieu des pierres pouvait parler, elle vous dirait qu’elle aspire à remonter là-haut pour que les vents la poussent à travers les beaux champs du firmament, fraîche, blanche, ou encore rosée à l’aurore et cuivrée au coucher du soleil, ou violette comme une fleur au crépuscule qui se pare des premières étoiles. Elle vous dirait qu’elle voudrait servir de crible aux astres qui regardent à travers les éclaircies des cirrus pour rappeler le Ciel aux hommes, ou bien de voile à la lune pour l’empêcher de voir les horreurs de la nuit, au lieu d’être ici, enserrée entre les rives du torrent, menacée de se transformer en boue, contrainte de connaître les unions des couleuvres et des crapauds alors qu’elle aime tant la liberté solitaire de l’atmosphère. De même les âmes, si elles osaient parler, diraient toutes la même chose : “ Donnez-nous Dieu ! Donnez-nous la vérité ! ” Mais elles ne le font pas, car elles savent que l’homme ne remarque pas, ne comprend pas ou tourne en dérision la supplication des “ grands mendiants ”, des âmes qui cherchent Dieu pour apaiser leur effroyable faim. La faim de la vérité.

      221.6 Ces idolâtres, ces romains, ces athées, ces malheureux que nous rencontrons sur notre route et que vous rencontrerez toujours, ces gens méprisés à cause de leur désir de Dieu, que ce soit par politique, par égoïsme de la famille ou par quelque hérésie née d’un cœur dépravé et qui a proliféré dans des nations, ces gens ont faim. Ils ont faim ! Et j’ai pitié d’eux. Etant Celui que je suis, pourrais-je ne pas en avoir pitié ? Si je pourvois à la nourriture de l’homme et du passereau parce que j’en ai pitié, pourquoi n’aurais-je pas pitié des âmes devant lesquelles Satan a dressé des obstacles pour les empêcher d’appartenir au vrai Dieu et qui tendent les bras en clamant : “ Nous avons faim ! ” ? Vous les croyez mauvaises, sauvages, incapables d’arriver à aimer la religion de Dieu, et Dieu lui-même ? Vous êtes dans l’erreur. Ce sont des âmes qui attendent amour et lumière.

      Ce matin, nous avons été réveillés par les bêlements menaçants du bouc qui voulait chasser ce gros chien, venu pour me flairer. Et vous avez ri en voyant comment le bouc pointait ses cornes menaçantes, après avoir arraché la corde qui l’attachait à l’arbre sous lequel nous dormions. D’un bond, il s’est interposé entre moi et le chien sans penser qu’il pouvait être attaqué et égorgé par le molosse en un combat inégal. Il en est de même des peuples que vous prenez pour des boucs sauvages : ils sauront se dresser courageusement pour défendre la foi au Christ quand ils auront appris que le Christ est amour et qu’il les invite à sa suite. Il les invite. Oui. Et vous devez les aider à venir.

      221.7 Ecoutez une parabole.

      Un homme se maria et eut plusieurs enfants de son épouse. Mais l’un d’eux naquit avec un corps difforme et paraissait être d’une autre race. L’homme le considéra comme un déshonneur et ne l’aima pas, bien que cet enfant soit innocent. Négligé, ce dernier grandit parmi les serviteurs de la plus basse condition ; c’est pourquoi il était inférieur même en pensée à ses frères. Sa mère, morte en lui donnant le jour, n’était plus là pour adoucir la dureté de son père, empêcher le mépris de ses frères, corriger les idées fausses nées dans la pensée inculte du garçon. C’était une petite bête sauvage qu’on supportait difficilement près de la maison des enfants que le père aimait.

      C’est ainsi que l’enfant devint un homme. Sa raison se développa tardivement, mais finit par arriver à la maturité. Il comprit alors que ce n’était pas être fils que de vivre dans les étables, recevoir un quignon de pain, un vêtement en guenilles et jamais le moindre baiser, le moindre mot, la moindre invitation à entrer dans la maison paternelle. Il en souffrait grandement et gémissait dans sa tanière : “ Père ! Père ! ” Il mangeait son pain, mais rien n’apaisait la faim de son cœur. Il se couvrait de son vêtement, mais il lui restait un grand froid au cœur. Il avait pour amis les animaux et quelques personnes du village qui le prenaient en pitié. Mais la solitude du cœur était son lot. “ Père ! Père ! ”… Ce cri ne cessait d’arriver aux oreilles des serviteurs, de ses frères, de ses concitoyens. C’était comme s’il avait perdu la raison. Et on l’appelait “ le fou ”.

      Finalement, un serviteur osa aller le trouver alors qu’il était devenu quasiment une bête, et il lui dit :

      “ Pourquoi ne te jettes-tu pas aux pieds de ton père ? ”

      “ Je le ferais bien, mais je n’ose pas… ”

      “ Pourquoi ne viens-tu pas à la maison ? ”

      “ Cela me fait peur. ”

      “ Mais voudrais-tu le faire ? ”

      “ Oh oui ! Car c’est de cela que j’ai faim, sans cela, je me sens glacé et seul comme dans un désert. Mais je ne sais pas comment on vit dans la maison de mon père. ”

      Le bon serviteur se mit alors à l’instruire, à le rendre plus présentable, à le délivrer de la terreur d’être mal vu de son père. Il lui disait :

      “ Ton père t’aimerait bien, mais il ne sait pas si, toi, tu l’aimes. Tu le fuis toujours… Enlève à ton père le remords d’avoir été trop sévère et sa douleur de te savoir vagabond. Viens. Aujourd’hui, tes frères eux-mêmes ne veulent plus te mépriser parce que je leur ai raconté ta peine. ”

      Et le pauvre fils s’avança un soir, conduit par le bon serviteur, vers la maison de son père et il cria :

      “ Père, je t’aime ! Laisse-moi entrer… ”

      Le père, vieux et triste, qui songeait à son passé et à son avenir éternel, sursauta au son de cette voix, et il dit :

      “ Ma douleur s’apaise enfin, car, dans la voix de mon fils difforme, j’ai entendu la mienne et son amour prouve que son sang est mon sang et sa chair ma chair. Qu’il vienne donc prendre sa place parmi ses frères et que soit béni le bon serviteur qui a rendu complète ma famille en replaçant le fils rejeté au milieu de tous les enfants du père. ”

      221.8 Cela, c’est la parabole. Mais pour ce qui est de son application, vous devez penser que Dieu est le Père de ceux qui sont atteints d’une difformité spirituelle : les schismatiques, les hérétiques, les séparés. Il a été contraint à la rigueur à cause des difformités qu’ils ont eux-mêmes voulues. Mais son amour n’a jamais fléchi. Il les attend. Amenez-les-lui. C’est votre devoir.

      Je vous ai appris à dire : “ Notre Père, donne-nous aujourd’hui notre pain. ” Mais savez-vous ce que veut dire ce “ notre ” ? Il ne s’agit pas de vous douze en tant que disciples du Christ. Il s’agit de vous en tant qu’hommes. Cette demande, vous la faites pour tous les hommes, présents ou futurs. Pour ceux qui connaissent Dieu comme pour ceux qui ne le connaissent pas. Pour ceux qui aiment Dieu et son Christ comme pour ceux qui ne l’aiment pas ou l’aiment mal. La prière que j’ai mise sur vos lèvres vaut pour tous. C’est votre ministère. Vous qui connaissez Dieu, son Christ, et les aimez, vous devez prier pour tous.

      Je vous ai dit que ma prière est universelle et qu’elle durera autant que la terre. Mais vous, vous devez prier dans un esprit universel, en unissant vos voix et vos cœurs d’apôtres et de disciples de l’Eglise de Jésus aux voix et aux cœurs qui appartiennent à d’autres Eglises, qui seront chrétiennes, mais pas apostoliques. Et insistez, puisque vous êtes frères — vous dans la maison du Père, eux en dehors de la maison du Père commun avec leur faim et leur nostalgie —, jusqu’à ce que soit donné, à eux comme à vous, le vrai “ pain ” — c’est-à-dire le Christ du Seigneur — servi sur les tables apostoliques, et non sur d’autres où il est mêlé à des aliments impurs. Insistez, tant que le Père n’a pas dit à ces frères “ difformes ” : “ Ma douleur s’apaise parce qu’en vous, dans votre voix, j’ai entendu la voix et les paroles de mon Fils unique et premier-né. Que soient bénis ces serviteurs qui vous ont amenés à la maison de votre Père pour que ma famille soit complète. ” Serviteurs d’un Dieu infini, vous devez mettre l’infinité dans toutes vos intentions. Avez-vous compris ?

      221.9 Voici Jabnia. Autrefois, l’Arche est passée par ici pour aller à Akron qui ne put la garder et l’envoya à Bet-Shémesh [1]. L’Arche revint à Akron. Jean, viens avec moi. Quant à vous, restez à Jabnia et sachez réfléchir et parler. Que la paix soit avec vous. »

      Et Jésus s’en va avec Jean et le bouc qui, en bêlant, les suit comme un chien.

[1] 1 Samuel 5,10 et 6,14
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 18 Fév - 9:13

222. Un secret de l’apôtre Jean. Jésus avec les siens à Modîn

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 84
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 222


Vision du mercredi 18 juillet 1945

Dimanche 14 mai 28
Modîn

222.1 Après Jabnia, les collines, dirigées d’ouest en est par rapport à l’étoile polaire, prennent de l’altitude et on en voit surgir de plus hautes, de toujours plus hautes les unes derrière les autres. Au loin, les sommets verts et violets des montagnes de Judée se profilent à la dernière lueur du soir.

Le soleil est tombé rapidement comme il le fait dans les pays situés au midi. De l’orgie de rouge du couchant, il est passé en moins d’une heure au premier scintillement des étoiles ; il paraît impossible que l’incendie solaire se soit éteint si vite, faisant disparaître le rouge sang du ciel sous un voile de plus en plus épais d’améthyste sanguine, puis d’un mauve qui pâlit et devient de plus en plus transparent pour laisser voir un ciel irréel, non pas bleu mais vert pâle, qui ensuite s’assombrit en une couleur glauque d’a­voines nouvelles, prélude à l’indigo qui dominera pendant la nuit en se parsemant de diamants comme un manteau royal.

Et les premières étoiles rient déjà à l’orient en même temps qu’une faucille de lune à son premier quartier. Sous la lumière des astres et dans le silence des hommes, la terre devient peu à peu un vrai paradis. C’est l’heure du chant de ce qui ne pèche pas : celui du rossignol, l’arpège des eaux, le bruissement des feuillages, le chant des grillons, des crapauds qui émettent des notes de hautbois en chantant à la rosée. Peut-être que les étoiles, là haut, chantent elles aussi… Elles sont plus proches des anges que nous… L’incendie de la chaleur s’éteint progressivement dans l’air de la nuit, humide d’une rosée si douce à l’herbe, aux hommes et aux animaux !

222.2 Jésus a attendu, au pied d’une colline, les apôtres qui sortent de Jabnia où Jean est allé les prendre. Il parle longuement avec Judas, lui remet des bourses d’argent et lui donne des instructions pour leur répartition. Derrière lui se trouve Jean, qui tient le bouc et reste silencieux entre Simon le Zélote et Barthélemy, qui discutent de Jabnia où André et Philippe se sont distingués. Plus à l’arrière, en groupe, tous les autres parlent à haute voix et font une sorte de récapitulation de leurs aventures en Philistie ; ils manifestent clairement leur joie de revenir prochainement en Judée pour la Pentecôte.

« Vraiment, nous y allons tout de suite ? demande Philippe, épuisé de parcourir les sables brûlants.

– C’est ce qu’a dit le Maître. Tu l’as entendu, répond Jacques, fils d’Alphée.

– Mon frère le sait certainement, mais il semble perdu dans ses rêves. Ce qu’ils ont fait pendant ces cinq jours est un mystère, dit Jacques, fils de Zébédée.

– Oui. Or moi, je n’en peux plus du désir de le savoir ! Au moins cela, pour nous récompenser de cette… purge à Jabnia. Cinq jours où il fallait surveiller chaque mot, chaque regard, chaque pas pour éviter un malheur, dit Pierre.

– Nous avons pourtant réussi. Nous commençons à avoir un certain savoir-faire, souligne Matthieu d’un air satisfait.

– Vraiment… j’ai tremblé deux ou trois fois. Ce sacré Judas ! N’apprendra-t-il donc jamais à se modérer ? dit Philippe.

– Quand il sera vieux. Et pourtant, si l’on veut, il agit dans une bonne intention. Tu l’as entendu ? Le Maître lui-même l’a reconnu. C’est par zèle qu’il agit ainsi » dit André pour l’excuser.

Pierre intervient:

« Naturellement ! Le Maître a dit cela parce qu’il est la Bonté et la Prudence, mais je ne crois pas qu’il l’approuve.

– Il ne ment pas, lui, réplique Jude.

– Pour ce qui est de mentir, non. Mais il sait mettre dans ses réponses toute la prudence que nous ne savons pas y mettre, et il dit la vérité sans faire saigner le cœur de personne, sans provoquer des indignations, sans susciter des reproches. Ah, lui, c’est lui ! » soupire Pierre.

222.3 Ils marchent en silence dans la blancheur toujours plus nette du clair de lune. Puis Pierre dit à Jacques, fils de Zébédée :

« Essaie d’appeler Jean. J’ignore pourquoi il nous évite.

– Je vais te le dire tout de suite : il sait que nous allons le tourmenter pour savoir, dit Thomas.

– C’est vrai ! Et il reste avec les deux plus prudents et les plus sages, confirme Philippe.

– Eh bien, essaie quand même, Jacques, sois serviable », insiste Pierre.

Jacques accepte. Il appelle par trois fois Jean qui n’entend pas ou fait mine de ne pas entendre. Barthélemy au contraire se retourne, et Jacques lui dit :

« Demande à mon frère de venir ici. »

Et il ajoute à l’adresse de Pierre :

« Mais je ne crois pas que nous saurons. »

Jean, obéissant, vient aussitôt et demande :

« Que voulez- vous ?

– Savoir si nous allons directement d’ici en Judée, répond son frère.

– C’est ce qu’a dit le Maître. Il ne voulait pour ainsi dire pas revenir en arrière à partir d’Akron et il voulait m’envoyer vous prendre, mais ensuite il a préféré venir jusqu’aux dernières pentes… De toutes manières, d’ici aussi on va en Judée.

– Par Modîn ?

– Par Modîn.

– C’est une route peu sûre. Les malfaiteurs y attendent les caravanes et font des coups de mains, objecte Thomas.

– Oh !… avec lui !… Rien ne lui résiste, à lui !… »

Jean lève vers le ciel un visage qui l’entraîne dans je ne sais quel souvenir, et il sourit.

Tout le monde le remarque et Pierre lance :

« Dis un peu : tu es en train de lire une merveilleuse histoire dans le ciel constellé, pour avoir ce visage ?

– Moi ? Non…

– Allons donc ! Même les pierres se rendent compte que tu es loin du monde. Dis : que t’est-il arrivé, à Akron [1] ?

– Mais rien, Simon, je te l’assure. Je ne serais pas heureux s’il m’était arrivé quelque chose de pénible.

– Pas de pénible. Au contraire !… Allons ! Parle !

– Mais je n’ai rien à ajouter à ce que, lui, il vous a dit. Ils ont été bons, comme des personnes étonnées par les miracles. Voilà tout. Exactement comme il vous l’a relaté.

222.4 – Non. »

Pierre hoche la tête.

« Non, tu ne sais pas mentir. Tu es limpide comme de l’eau de source. Non. Tu changes de couleur. Je te connais depuis que tu étais tout petit. Tu ne sauras jamais mentir. Par impuissance du cœur, de la pensée, de la langue et jusque de la peau qui change de couleur. C’est pour cela que je t’aime tant et que je t’ai toujours aimé. Allons, viens ici, près de ton vieux Simom-Pierre, près de ton ami. Tu te souviens quand tu étais petit, et que moi, j’étais déjà un homme ? Comme je te choyais ? Tu voulais des histoires et des barquettes de liège “ qui ne font jamais naufrage ”, disais-tu, et qui te servaient à aller au loin… Maintenant encore, tu vas au loin et tu laisses sur la rive le pauvre Simon. Et ta petite barque ne fera jamais naufrage. Elle s’en va, couverte de fleurs, comme celles qu’enfant tu lançais à Bethsaïde dans le fleuve, pour que le fleuve les porte au lac et qu’elles suivent leur chemin tout au loin. Tu t’en souviens ? Je t’aime bien, Jean. Tous, nous t’aimons bien. Tu es notre voile. Tu es notre barque qui ne fait pas naufrage. Tu nous emmènes dans ton sillage. Pourquoi ne nous racontes-tu pas le prodige d’Akron ? »

Tout en parlant, Pierre entoure de son bras la taille de Jean, mais Jean cherche à éluder la question en disant :

« Et toi qui es le chef, pourquoi ne t’adresses-tu pas aux foules avec la même intensité persuasive que celle dont tu te sers à mon égard ? Elles ont besoin d’être convaincues, moi pas.

– C’est qu’avec toi, je me sens à l’aise. Toi, je t’aime. Elles, je ne les connais pas, dit Pierre pour s’excuser.

– Et tu ne les aimes pas. Voilà ton erreur. Aime-les, même si tu ne les connais pas. Dis-toi : “ Elles appartiennent à notre Père. ” Tu verras : tu auras l’impression de les connaître et tu les aimeras. Vois en chaque personne autant de Jean…

– C’est vite dit ! Comme si l’on pouvait échanger aspics et porcs-épics [2] contre toi, qui es un éternel enfant.

– Oh, non ! Je suis comme tout le monde.

– Non, mon frère. Pas comme tout le monde. Nous autres, sauf peut-être Barthélemy, André et Simon le Zélote, nous aurions déjà dit, même aux herbes, ce qui nous serait arrivé et qui nous rendrait heureux. Toi, tu te tais. Cependant tu dois le dire à moi, ton frère aîné. Je suis pour toi comme un père, dit Jacques, fils de Zébédée.

– Mon Père, c’est Dieu, mon Frère c’est Jésus, ma Mère c’est Marie…

– Alors le sang, pour toi, cela ne compte plus ? s’irrite Jacques.

– Ne te fâche pas. Moi, je bénis le sang et le sein qui m’ont formé : mon père et ma mère ; et je te bénis, toi, mon frère, qui es du même sang. Mais c’est parce que mes parents m’ont engendré et élevé pour me permettre de suivre le Maître, et toi, parce que tu le suis. Depuis que notre mère est disciple, je l’aime à un double titre : par la chair et le sang, en tant que fils ; avec mon âme, en tant que condisciple. Ah ! Quelle joie d’être unis dans un même amour pour lui !… »

222.5 En entendant la voix courroucée de Jacques, Jésus est revenu en arrière et les derniers mots l’éclairent sur la question.

« Laissez Jean tranquille. Cela ne sert à rien de le tourmenter. Il ressemble beaucoup à ma Mère, et il ne parlera pas.

– Dans ce cas, dis-le-nous toi-même, Maître, disent-ils tous d’une voix suppliante.

– Eh bien, voici : j’ai emmené Jean avec moi, parce qu’il était le plus apte pour ce que je voulais faire. J’ai été aidé par lui, et lui en a été perfectionné. Voilà qui est dit. »

Pierre, Jacques, frère de Jean, Thomas, Judas se regardent ; déçus, ils font un peu la moue. Judas ne se borne pas à faire voir sa déception, il proteste :

« Pourquoi le perfectionner, lui qui est déjà le meilleur ? »

Jésus lui répond :

« C’est toi qui as dit : “ Chacun a sa manière de faire, et la met en œuvre. ” J’ai ma manière. Jean a la sienne, qui lui ressemble beaucoup. La mienne ne peut se perfectionner. La sienne, si. Et je veux qu’il en soit ainsi parce qu’il est bon qu’il en soit ainsi. C’est pour cette raison que je l’ai pris avec moi : j’avais besoin de quelqu’un qui ait cette manière-là de voir et cette âme. Donc, pas de mauvaise humeur ni de curiosité. Nous allons à Modîn. La nuit est sereine, fraîche et lumineuse. Nous marcherons tant qu’il y aura la lune, puis nous dormirons jusqu’à l’aube. J’emmènerai Jude et Judas vénérer la tombe des Maccabées dont ils portent le nom glorieux [3].

– Seuls avec toi ! Dit Judas, tout heureux.

– Non, avec tous. Mais la visite à la tombe des Maccabées est pour vous, pour que vous sachiez les imiter surnaturellement, en portant luttes et victoires dans un domaine tout spirituel. »


[1] Jean "a tourné une page du livre de la Vie, et il a lu et connu de nouveaux mystères. Rien de plus. Il vous a précédés…" (3.86, EMV 224 ). Allusion au premier miracle fait par Jean au nom de Jésus. Ce point sera révélé à Jacques plus tard "Jean, près de Jabnia a fait un miracle par amour, en guérissant un mourant par une onction et une prière" (4.122., EMV 259)

[2] Le porc-épic, hystrix cristata, est commun en Palestine dans les ruines abandonnées. Mammifère rongeur, il se nourrit de fruits et de racines. Nocturne, solitaire et craintif, il devient dangereux s'il est attaqué, en dressant ses piquants acérés comme des aiguilles. Les plus grands individus atteignent un mètre de long. Le porc-épic entre dans l'alimentation des bédouins arabes et des fellahs d'Égypte.

[3] 1 Maccabées 9,19 - Mattathias, était un prêtre âgé retiré au village de Modin d’où il déclencha la révolte en tuant un officier syrien qui voulait imposer les décrets idolâtres d’Antiochus. Il s’enfuit avec ses cinq fils dans les montagnes de Judée. Le mouvement de "résistance" s’organisa dans le pays, et en divers lieux des autels idolâtres furent renversés et le culte juif rétabli. Mattathias mourut en 166 av. J.-C. en confiant à ses 5 fils la conduite de la guerre de libération. - Juda, dit Maccabée (de l’hébr. maqqabhah: marteau) en prit le commandement. Il remporta une série de victoires d’autant plus remarquables que les Juifs ne s’étaient plus battus depuis plus de trois siècles. En 165, le 25 du mois de Kislèv, il purifia le Temple profané depuis trois ans et rétablit le sacrifice quotidien à Jérusalem. La fête nationale de la Dédicace en rappelait encore le souvenir à l’époque du Christ (Jn 10,22). C’est aussi le jour de sa naissance selon Maria Valtorta.
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par sofoyal Mar 18 Fév - 17:14

Bonjour!

Les récits de Maria Valtorta sont si beaux, si rayonnants et si limpides.
Je ne sais pas comment on peut ne pas y voir un chemin de la Divinité, 
et y reconnaître pour de bon Jésus et ses apôtres,
C'est aussi beau que la plus belle des symphonies et les cathédrales elles même pâliraient d'envie,
devant la sainte structure de ces divins récits.
Et ce n'était là que quelques lignes....
Bonne méditation à tous et toutes!


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Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Signat10
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 19 Fév - 9:10

sofoyal a écrit:Bonjour!

Les récits de Maria Valtorta sont si beaux, si rayonnants et si limpides.
Je ne sais pas comment on peut ne pas y voir un chemin de la Divinité, 
et y reconnaître pour de bon Jésus et ses apôtres,
C'est aussi beau que la plus belle des symphonies et les cathédrales elles même pâliraient d'envie,
devant la sainte structure de ces divins récits.
Et ce n'était là que quelques lignes....
Bonne méditation à tous et toutes!
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 19 Fév - 9:10

223. Un discours de Jésus évite que des pillards s’en prennent à une caravane nuptiale

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 223
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 85


Vision du 19 juillet 1945

Lundi 15 mai 28
De Modîn à Béther

223.1 « Là où nous allons nous rendre, c’est moi qui vais parler », dit le Seigneur, tandis que la troupe s’enfonce progressivement dans des vallées qui partent à l’assaut de la montagne par des chemins difficiles, caillouteux, étroits, qui montent, descendent, perdent l’horizon de vue pour le retrouver ensuite, jusqu’à ce que la petite troupe, enfin arrivée à une vallée profonde après une descente très raide — sur laquelle, comme dit Pierre, seul le bouc se sent à l’aise —, puisse se reposer, dîner et se rafrîchir auprès d’une source au débit abondant.

      D’autres personnes sont éparpillées dans l’herbe et les bosquets et prennent leur repas comme Jésus et ses disciples. C’est un endroit où l’on s’arrête parce qu’il est à l’abri des vents, avec des prés agréables et de l’eau. Il y a des pèlerins en route pour Jérusalem, des voyageurs qui se rendent peut-être au Jourdain, des marchands d’agneaux destinés au Temple, des bergers avec leurs troupeaux. Certains font le voyage sur des montures, la plupart à pied.

      223.2 Or voilà qu’arrive une caravane nuptiale tout ornée pour la fête. L’or brille sous les voiles dont s’enveloppe l’épouse — qui sort à peine de l’enfance —, accompagnée de deux matrones toutes scintillantes de bracelets et de colliers et d’un homme, peut-être le paranymphe [1], sans compter deux serviteurs. Ils sont arrivés sur des ânes empanachés et couverts de grelots, et se retirent dans un coin pour dîner, comme s’ils avaient peur qu’un regard des voisins ne viole la petite épouse. Le paranymphe, ou peut-être un parent, monte la garde, l’air menaçant, pendant que les femmes mangent. Ils font en effet l’objet de la curiosité la plus vive et, sous prétexte de demander du sel, un couteau, une goutte de vinaigre, il y a toujours quelqu’un qui va trouver l’un ou l’autre pour savoir si l’épouse est connue, où elle va, et plein de belles choses du même genre…

      Quelqu’un, de fait, sait d’où elle vient et où elle va, et il est bien content de raconter tout ce qu’il sait, excité par un autre qui le fait parler en lui versant un vin généreux. Par moments, les détails les plus secrets des deux familles sont étalés : le trousseau que l’épouse emporte dans ses coffres, les richesses qui l’attendent dans la maison de son mari, et ceci et cela. On arrive ainsi à savoir que l’épouse est la fille d’un riche marchand de Joppé et qu’elle va épouser le fils d’un riche marchand de Jérusalem, et que l’époux l’a précédée pour décorer la maison nuptiale, vu l’imminence de son arrivée, et encore que celui qui l’accompagne, l’ami de l’époux, est, lui aussi, fils d’un marchand, Abraham, qui travaille les diamants et les bijoux, alors que l’époux est orfèvre et le père de l’épouse marchand de laine, toile, tapis et rideaux…

      223.3 Comme le bavard est tout proche du groupe des apôtres, Thomas l’entend et lui demande :

      « Mais l’époux n’est-il pas Nathanaël, fils de Lévi ?

      – Exactement. Tu le connais ?

      – Je connais bien son père avec qui j’ai fait des affaires, un peu moins Nathanaël. C’est un riche mariage !

      – Et l’épouse est heureuse ! Elle est couverte d’or. Abraham, parent de la mère de l’épouse et père de l’ami de l’époux, s’en est fait un point d’honneur, et de même l’époux et son père. On dit qu’il y a dans ces coffres la valeur de plusieurs talents d’or [2].

      – Bigre ! » s’exclame Pierre en sifflant d’étonnement.

      Et il ajoute :

      « Je vais voir de plus près si la principale marchandise correspond au reste. »

      Il se lève avec Thomas et ils vont faire un petit tour autour du groupe nuptial ; ils regardent attentivement les trois femmes, qui forment un amas d’étoffes et de voiles d’où émergent les mains et les poignets couverts de joyaux et d’où filtrent des scintillements aux oreilles et au cou, et ils dévisagent le paranymphe fanfaron [3] qui paraît devoir repousser des corsaires partis à l’assaut de la jeune fille, tant il fait le bravache.

      Il regarde aussi de travers les deux apôtres. Mais Thomas le prie de saluer Nathanaël, fils de Lévi, de la part de Thomas, surnommé Didyme. Et la paix est faite, si bien faite que, pendant qu’ils bavardent, la petite épouse trouve le moyen de se faire admirer en se levant de façon que le manteau et le voile tombent et qu’elle apparaisse dans toute sa grâce physique et vestimentaire, avec sa richesse d’idole. Elle peut avoir quinze ans tout au plus, et de ces yeux malicieux ! Elle fait la belle, malgré la désapprobation des matrones. Elle défait ses tresses et les réajuste à l’aide d’épingles précieuses, elle serre sa ceinture ornée de pierreries, délace, ôte ses sandales et les remet bien serrées par des boucles en or et, entre-temps, trouve le moyen de montrer sa magnifique chevelure noire, ses belles mains et ses bras gracieux, sa taille fine, sa poitrine et ses hanches bien formées, son petit pied parfait et tous ses colliers qui tintent et brillent aux dernières lueurs du jour et aux flammes du premier feu de bois.

      223.4 Pierre et Thomas reviennent. Thomas dit :

      « C’est une belle enfant.

      – Et une parfaite coquette. Elle sera… mais ton ami Nathanaël apprendra bien vite que quelqu’un lui tient le lit au chaud pendant que, lui, il tiendra l’or au chaud pour le travailler. Et son ami est un parfait imbécile. Il l’a bien confiée, sa petite épouse ! Achève Pierre en s’asseyant parmi ses compagnons.

      – L’homme qui faisait parler l’autre imbécile ne m’a pas plu, bougonne Barthélemy. Quand il a appris tout ce qu’il voulait savoir, il est parti du côté de la montagne… C’est un mauvais endroit… Et c’est un temps idéal pour les coups de mains des brigands. Nuits de lune. Chaleur épuisante. Arbres couverts de feuilles. Hum ! Cet endroit ne me plaît pas. Il valait mieux poursuivre notre route.

      – Et cet imbécile qui a révélé tant de richesses ! Et cet autre qui joue au héros et au gardien devant les ombres et qui ne voit pas les corps réels… Eh bien, je veillerai sur les feux. Qui vient avec moi ? dit Pierre.

      – Moi, Simon, répond Simon le Zélote. Je résiste bien au sommeil. »

      Plusieurs, surtout des voyageurs isolés, se sont levés et sont partis par petits groupes. Il reste des bergers avec leurs troupeaux, la troupe nuptiale, celle des apôtres ainsi que trois marchands d’agneaux qui dorment déjà. La petite épouse, elle aussi, dort avec les matrones sous une tente montée par les serviteurs. Les apôtres se cherchent une place, Jésus s’isole pour prier, les bergers font un grand feu au centre de l’emplacement où ils se trouvent. Pierre et Simon en font un autre sur le sentier escarpé par lequel s’est éclipsé l’homme qui a donné des soupçons à Barthélemy.

      223.5 Les heures passent, et ceux qui ne ronflent pas somnolent. Jésus prie. Le silence est total. La source semble se taire elle aussi, elle qui resplendit sous les rayons de la lune déjà haute dans le ciel et qui éclaire parfaitement le campement alors que les pentes restent à l’ombre sous les feuillages épais.

      Un gros chien de berger gronde. Un berger lève la tête. Le chien se dresse, et son poil se hérisse sur son échine. Il reste à l’arrêt et écoute. Il tremble même quand le sourd grondement qui trahit son émotion se fait plus fort. Simon lui aussi lève la tête et secoue Pierre qui somnole. Un bruissement presque imperceptible provient du bois.

      « Allons trouver le Maître et faisons-le venir », se disent-il.

      En même temps, le berger réveille ses compagnons. Ils sont tous à l’écoute, sans faire de bruit. Jésus s’est levé lui aussi, avant même qu’on l’appelle, et il va rejoindre les deux apôtres. Ils se réunissent près de leurs compagnons, et donc près des bergers, dont le chien donne des signes de plus en plus manifestes d’agitation.

      « Appelez tous ceux qui dorment. Dites-leur de venir ici sans bruit, en particulier les femmes et les serviteurs avec les coffres. Prévenez-les qu’il y a peut-être des brigands. N’avertissez pas les femmes, mais tous les hommes. »

      Les apôtres se dispersent pour obéir au Maître qui dit aux bergers :

      « Alimentez fortement le feu, afin qu’il donne une flamme très vive. »

      Les bergers obéissent et, comme ils paraissent agités, Jésus les rassure :

      « Ne craignez rien. On ne vous prendra pas même un flocon de laine. »

      Les marchands surviennent et murmurent :

      « Ah ! Nos bénéfices ! »

      Ils ajoutent une litanie de reproches à l’adresse des gouvernants romains et juifs “ qui ne débarrassent pas le monde des voleurs ”.

      « Ne craignez rien. Vous ne perdrez pas une seule pièce de monnaie », dit Jésus pour les calmer.

      Les femmes arrivent, en pleurs, affolées, car le courageux paranymphe, mort de peur, les effraye en gémissant :

      « C’est la mort ! La mort par la main des brigands !

      – Ne craignez rien. On ne vous effleurera pas même d’un regard » dit Jésus pour les réconforter, et il les conduit au milieu de ce petit peuple d’hommes et d’animaux terrifiés.

      Les ânes braient, le chien hurle, les brebis bêlent, les femmes sanglotent, les hommes poussent des imprécations ou défaillent plus que les femmes : c’est une vraie cacophonie produite par l’é­pouvante. Jésus, lui, est calme comme si de rien n’était. Avec tout ce tapage, on n’entend plus le bruissement dans le bois. Mais ce sont des branches brisées ou une dégringolade de pierres qui signalent que des brigands sont à l’approche.

      « Silence ! » impose Jésus, sur un tel ton que le silence se fait.

      223.6 Jésus quitte sa place et s’avance vers le bois en bordure du campement. Il tourne le dos au bois et commence à parler.

      « La faim maudite de l’or entraîne les hommes dans des sentiments abjects. C’est par l’or que l’homme se dévoile plus que par toute autre chose. Regardez combien de maux sème ce métal, par son fascinant et inutile éclat. Je crois que l’air de l’enfer a la même couleur tant il possède une nature infernale depuis que l’homme est pécheur.

      Le Créateur l’avait laissé à l’intérieur de cet énorme lapis-lazuli qu’est la Terre, créée par sa volonté, pour qu’il soit utile à l’homme par ses sels et serve à la décoration des temples. Mais Satan, en baisant les yeux d’Eve et en mordant le moi de l’homme, a donné une saveur malfaisante à cet innocent métal. Depuis, on tue et on pèche pour de l’or. Pour lui, la femme devient coquette et se laisse entraîner au péché de la chair. Pour lui, l’homme devient voleur, usurpateur, homicide, dur à l’égard de son prochain et à l’égard de son âme qu’il dépouille de son véritable héritage pour se procurer ce qui est éphémère, à l’égard de son âme à laquelle il dérobe son trésor éternel pour lui donner quelques écailles bril­lantes qu’il devra quitter à sa mort.

      223.7 A cause de l’or, vous péchez plus ou moins légèrement, plus ou moins gravement. Et plus vous péchez, plus vous vous moquez de ce que vous ont enseigné vos mères et vos maîtres, à savoir qu’il existe une récompense et un châtiment pour les actes qu’on accomplit durant sa vie. Ne réfléchissez-vous donc pas qu’à cause de ce péché, vous perdrez la protection de Dieu, la vie éternelle, la joie, et aurez des remords, des malédictions plein le cœur, la peur pour compagne, la peur des châtiments des hommes, qui n’est rien en comparaison de la peur que vous devriez éprouver et que vous n’éprouvez pas, la peur sainte des punitions de Dieu ? Ne réfléchissez-vous pas que vous pouvez avoir une fin terrible à cause de vos méfaits, s’ils sont joints au crime, et une fin encore plus redoutable parce qu’éternelle, si les fautes que vous avez commises par amour de l’or même si elles n’ont pas provoqué l’effusion de sang, ont méprisé la loi de l’amour et du respect dus au prochain en refusant par avarice de secourir ceux qui ont faim, en volant des situations, de l’argent, en trompant sur le poids, par avidité ?

      Non. Vous n’y pensez même pas. Vous dites : “ Ce sont des idées folles ! Je les ai écrasées sous le poids de mon or. Et elles n’existent plus. ” Or ce ne sont pas des idées folles. C’est la vérité. Ne prétendez pas : “ Une fois que je serai mort, tout sera fini. ” Non : tout commence. L’autre vie n’est pas, comme vous l’imaginez, un abîme sans pensée et sans souvenir de ce que l’on a vécu, ni sans aspiration vers Dieu. Ce sera une pause dans l’attente de la libération par le Rédempteur. L’autre vie est une attente bienheureuse pour les justes, une attente patiente pour ceux qui ont à expier, une attente affreuse pour les damnés. Pour les premiers dans les limbes, pour les seconds au purgatoire, pour les derniers en enfer. Et, alors que pour les premiers l’attente cessera avec l’entrée aux Cieux à la suite du Rédempteur, pour les seconds après cette heure, l’attente sera réconfortée par l’espérance, pour les troisièmes elle assombrira la terrible certitude de leur malédiction éternelle.

      Pensez-y, vous qui péchez. Il n’est jamais trop tard pour se repentir. Changez par un vrai repentir le verdict qui est en train de s’inscrire aux Cieux pour vous. Que le shéol[102] soit pour vous non pas l’enfer, mais une attente pénitente, au moins cela, grâce à votre volonté. Non pas l’obscurité, mais un crépuscule. Non pas déchirement, mais nostalgie. Non pas désespoir, mais espérance.

      223.8 Allez. Ne cherchez pas à lutter contre Dieu. Il est le Fort et le Bon. Ne méprisez pas le nom de vos parents. Ecoutez le gémissement de cette source, un gémissement semblable à celui qui brise le cœur de vos mères quand elles vous savent assassins. Ecoutez la plainte du vent dans cette gorge. Elle semble menacer et maudire, tout comme votre père vous maudit pour la vie que vous menez. Ecoutez comment le remords crie dans vos cœurs. Pourquoi voulez-vous souffrir, alors que vous pourriez jouir d’une satisfaction sereine avec le peu qui suffit sur la terre et le tout que vous aurez au Ciel ? Accordez la paix à votre âme ! Accordez la paix aux hommes qui craignent, qui doivent tout craindre de vous comme des fauves ! Accordez-vous la paix à vous-mêmes, pauvres malheureux ! Tournez les yeux vers le ciel, débarrassez votre bouche de la nourriture empoisonnée, purifiez vos mains qui ruissellent du sang de vos frères, purifiez votre cœur.

      J’ai foi en vous. C’est pour cela que je vous parle. Car, si le monde entier vous hait et vous craint, moi, je ne vous hais pas, je ne vous crains pas. Mais je vous tends seulement les mains pour vous dire : “ Levez-vous. Venez. Redevenez doux parmi les hommes, hommes parmi les hommes. ” Je vous crains si peu, que je dis maintenant à tous ceux qui sont ici : “ Retournez vous reposer, sans rancœur pour ces pauvres frères. Priez pour eux. Moi, je reste à les regarder d’un regard d’amour et je vous jure qu’il n’arrivera plus rien. Car l’amour désarme les violents et rassasie les avides. Que soit béni l’Amour, vraie force du monde, force inconnue et puissante, force qui est Dieu. ” »

      Il se tourne alors vers tous ceux qui campent :

      « Allez, allez, ne craignez pas. Il n’y a plus ici de malfaiteurs, mais des hommes effrayés et des hommes qui pleurent. Celui qui pleure ne fait pas de mal. Dieu veuille qu’ils restent comme ils sont maintenant. Ce serait leur rédemption. [4] »

[1] Paranymphe : étymologiquement : auprès – fiancé(e) - Terme de l'antiquité grecque désignant la personne qui va chercher la fiancée et l'amène au marié.

[2] Cela correspondrait à plusieurs millions d’euros

[3] Dans l’ancienne édition, il était écrit « rodomont », soit « fanfaron », « bravache » (rodomontades)

[4] L'un d'eux est Dismas, le bon larron
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 20 Fév - 8:47

224. Le secret de l’apôtre Jean dévoilé. Arrivée à Béther

Ancienne édition : Tome 3, chapitre 86
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 224


Vision du vendredi 20 juillet 1945

Mardi 16 mai 28
Béther

  224.1 La “ suite ” des animaux du groupe des apôtres a subi un changement. Il n’y a plus de bouc, mais une brebis et deux petits agneaux, une brebis bien grasse avec des mamelles pleines, des agnelets joyeux comme des gamins. Cela forme un minuscule troupeau qui, bien qu’ayant un aspect moins magique que le bouc tout noir, plaît davantage à tout le monde.

      « Je vous avais dit qu’il viendrait une chèvre pour faire de Marziam un petit berger heureux. Au lieu de la chevrette, puisque vous ne voulez pas entendre parler de chèvres, voilà des brebis, qui plus est blanches, comme Pierre les rêvait.

      – Mais certainement ! J’avais l’impression d’avoir Béelzéboul derrière moi ! Dit Pierre.

      – En effet, depuis qu’il était avec nous, les événements pénibles se sont succédé. C’était le sortilège à nos trousses, confirme Judas, irrité.

      – Un bon sortilège, alors. Car qu’est-ce qui nous est arrivé de mal ? » intervient tranquillement Jean.

      Tous se récrient comme pour lui reprocher son aveuglement.

      « Tu n’as donc pas vu comment on s’est moqué de nous à Modîn ?

      – Et cette chute qu’a faite mon frère te paraît peu de choses ? Il aurait pu se blesser grièvement. Comment aurions-nous fait pour l’emmener s’il s’était fracturé une jambe ou la colonne vertébrale ?

      – Et, la nuit dernière, l’intermède t’a paru charmant ?

      – J’ai tout vu, tout pris en considération et j’ai béni le Seigneur parce qu’il ne nous est rien arrivé de mal. Le mal est venu vers nous, mais il s’est enfui, comme toujours. En outre, il est certain que la rencontre a servi à laisser des semences de bien tant à Modîn qu’auprès des vignerons, accourus avec la certitude de trouver au moins un blessé et le regret d’avoir manqué de charité, de sorte qu’ils ont voulu réparer ; comme auprès des voleurs de la nuit dernière. Ils ne nous ont pas fait de mal et nous, c’est-à-dire Pierre, y a gagné les brebis en échange du bouc, en guise de cadeau parce qu’ils avaient été sauvés. En outre, les pauvres ont maintenant beaucoup d’argent grâce aux bourses données par les marchands et ce qu’ont offert les femmes. Et, ce qui a plus de valeur, tous ont reçu la parole de Jésus.

      – Jean a raison », disent Simon le Zélote et Jude.

      Et ce dernier conclut :

      « Il semble vraiment que tout survient d’après une nette connaissance de l’avenir. Se trouver justement là, en retard, par suite de ma chute, en même temps que ces femmes couvertes de bijoux, que ces bergers aux gras troupeaux, que ces marchands chargés d’argent, qui étaient autant de proies magnifiques pour les brigands ! 224.2 Mon frère, dis-moi la vérité. Savais-tu ce qui allait arriver ? demande Jude à Jésus.

      – Je vous ai dit bien des fois que je lis dans les cœurs et que, quand mon Père n’en dispose pas autrement, je n’ignore pas ce qui doit arriver.

      – Mais alors, pourquoi t’arrive-t-il de faire des erreurs, comme celle d’aller à la rencontre de pharisiens malveillants ou dans des villes vraiment hostiles ? » demande Judas.

      Jésus le fixe longuement, puis répond avec calme, lentement :

      « Ce ne sont pas des erreurs. Ce sont les nécessités de ma mission. Les malades ont besoin du médecin et les ignorants du maître. Les uns comme les autres repoussent le médecin ou le maître. Mais eux, s’ils sont de bons médecins et de bons maîtres, continuent d’aller vers ceux qui les repoussent, car c’est leur devoir d’y aller. Moi, j’y vais. Vous voudriez que toute résistance cède là où je me présente. Je pourrais le faire, mais je ne fais violence à personne. Je persuade. La contrainte s’emploie dans des cas très exceptionnels et seulement quand l’âme éclairée par Dieu comprend qu’elle peut servir à persuader de l’existence de Dieu et qu’il est le plus fort, ou encore quand il s’agit de sauver une multitude.

      – Comme hier soir, hein ? demande Pierre.

      – Hier soir, les brigands ont eu peur en nous voyant bien éveillés pour les recevoir, lance Judas avec un mépris visible.

      – Non, ils ont été persuadés par les paroles de Jésus, dit Thomas.

      – Ouais… Tu peux toujours attendre ! Ce sont vraiment des âmes tendres que deux mots, fussent-ils de Jésus, ont suffi à convaincre ! Je le sais, moi, depuis que nous avons été assaillis, toute ma famille et moi, ainsi que de nombreux habitants de Bethsaïde dans le défilé d’Adomin ! Répond Philippe.

      – Maître, dis-le moi : depuis hier je voulais te le demander. Est-ce que ce sont tes paroles ou ta volonté qui font que rien de mal n’arrive ? » demande Jacques, fils de Zébédée.

      Jésus sourit, mais garde le silence.

      Matthieu répond :

      « Je crois que c’est sa volonté qui a vaincu la dureté de leurs cœurs et l’a paralysée, pour ainsi dire, pour lui permettre de parler et de sauver.

      – Moi aussi, je crois qu’il en est ainsi. C’est pour cela qu’il est resté là-bas, seul à regarder le bois. Il les tenait subjugués par son regard, par sa confiance en eux, par son calme sans défense. Il n’avait pas même un bâton ! Dit André.

      – D’accord. Mais c’est nous qui le disons. Ce sont nos idées. Je veux connaître l’avis du Maître », dit Pierre.

      Il s’ensuit une vive discussion, à laquelle Jésus laisse libre cours. Les uns avancent que Jésus, ayant déclaré qu’il ne force personne, n’aura pas usé de violence même avec ces brigands. C’est ce qu’affirme Barthélemy. Judas au contraire, quelque peu soutenu par Thomas, déclare qu’il ne peut croire que le regard d’un homme ait tant de puissance.

      Matthieu réplique :

      « Il a cette puissance, et plus encore. J’ai été converti par son regard, avant même de l’être par ses paroles. »

      Les pour et les contre s’opposent violemment, chacun s’en tenant à son point de vue. Jean se tait comme Jésus, et il sourit en baissant la tête pour cacher son sourire.

      Pierre revient à l’assaut, car les arguments de ses compagnons n’arrivent pas à le convaincre. Il pense et il dit que le regard de Jésus est différent de celui d’un homme quelconque, et il veut savoir si c’est parce qu’il est Jésus, le Messie, ou si c’est parce qu’il est toujours Dieu.

      224.3 Jésus prend la parole :

      « En vérité, je vous dis que non seulement moi, mais quiconque s’unira à Dieu par une sainteté, une pureté, une foi sans faille pourra en faire autant, et encore davantage. Le regard d’un enfant, si son esprit est uni à celui de Dieu, peut faire crouler les temples des idoles, sans les secouer comme Samson, imposer la douceur aux fauves et aux hommes-fauves, repousser la mort, vaincre les maladies de l’âme, tout comme la parole d’un enfant, instrument du Seigneur et uni à lui, peut aussi guérir des maladies, enlever leur venin aux serpents, accomplir toutes sortes de miracles. Car c’est Dieu qui agit en lui.

      – Ah ! J’ai compris ! » dit Pierre.

      Il regarde longuement Jean, puis conclut à voix haute tout un raisonnement qu’il se faisait intérieurement :

      « Voilà ! Toi, Maître, tu as eu ce pouvoir en tant que Dieu, et en tant qu’homme uni à Dieu. Et il en va de même de celui qui arrive ou qui est déjà arrivé à l’union avec Dieu. J’ai compris ! J’ai bien compris !

      – Mais tu ne demandes pas quelle est la clé de cette union, ni le secret de cette puissance ? Tous les hommes n’y arrivent pas forcément, alors qu’ils ont les mêmes qualités requises pour y parvenir.

      – C’est juste ! Où se trouve la clé de cette force qui unit à Dieu et domine les choses ? Une prière, ou bien des paroles secrètes…

      – Tout à l’heure, Judas accusait le bouc de toutes les mésaventures qui nous sont arrivées. Il n’y a pas de sortilèges attachés aux animaux. Chassez ces superstitions qui sont encore de l’idolâtrie et qui peuvent provoquer des malheurs. Et, de même qu’il n’existe pas de formules pour envoûter par de la sorcellerie, il n’existe pas de paroles secrètes pour accomplir des miracles. Il n’y a que l’amour. Comme je l’ai dit hier soir, l’amour calme les violents et rassasie ceux qui sont avides. L’Amour, c’est Dieu. Avec Dieu en vous, possédé pleinement par le mérite d’un amour parfait, l’œil devient un feu qui brûle toutes les idoles et jette à terre les statues, la parole devient puissance. Plus encore : l’œil devient une arme qui désarme. On ne résiste pas à Dieu, à l’Amour. Seul le démon y résiste parce qu’il est la Haine parfaite et, avec lui, ses fils. Les autres, les faibles possédés par une passion, mais qui ne se sont pas vendus volontairement au démon, n’y résistent pas. Quelle que soit leur religion, ou leur absence de foi, quel que soit le niveau de leur bassesse spirituelle, ils sont atteints par l’Amour qui est le grand Victorieux. Essaie vite d’y parvenir et tu feras ce que font les fils de Dieu et ceux qui portent Dieu. »

      224.4 Pierre ne quitte pas Jean des yeux ; Simon le Zélote aussi, les fils d’Alphée, Jacques et André ont l’intelligence éveillée et en recherche.

      « Mais alors, Seigneur, dit Jacques, fils de Zébédée, qu’est-il arrivé à mon frère ? Tu parles de lui. C’est lui, l’enfant qui fait des miracles ! Est-ce cela ? En est-il bien ainsi ?

      – Qu’a-t-il fait ? Il a tourné une page du livre de la Vie, et il a lu et connu de nouveaux mystères. Rien de plus. Il vous a précédés, car il ne s’arrête pas à considérer chaque obstacle, à soupeser chaque difficulté, à calculer ce qui rapporte. Mais il ne voit pas la terre. Il ne la voit plus. Il voit la Lumière et se dirige vers elle. Sans arrêt. Mais laissez-le tranquille. Les âmes consumées par une telle flamme ne doivent pas voir troublée l’ardeur qui les remplit de joie et qui les consume. Il faut les laisser brûler. C’est leur suprême joie et leur plus grande fatigue. Dieu leur accorde des instants de nuit parce qu’il sait que l’ardeur tue les âmes-fleurs si elles sont continuellement exposées au soleil. Dieu accorde du silence et des rosées mystiques à ces âmes-fleurs, comme aux fleurs des champs. Laissez reposer l’athlète de l’amour quand Dieu vous le laisse. Imitez les professeurs de gymnastique qui accordent à leurs élèves les détentes normales… Quand vous en serez au même point que lui – et même plus loin, car vous irez plus loin, aussi bien vous que lui –, vous comprendrez le besoin de respect, de silence, de pénombre qu’éprouvent les âmes dont l’Amour a fait sa proie et son instrument. N’allez pas vous imaginer : “ Moi, alors, j’aurai un plaisir qui sera connu, et Jean est un sot, parce que l’âme du prochain, comme celle des enfants, demande à être attirée par le merveilleux. ” Non. Quand en vous serez arrivés là, vous éprouverez le même désir de silence et de pénombre que connaît Jean aujourd’hui. Et quand je ne serai plus parmi vous, souvenez-vous qu’avant de porter un jugement sur une conversion et sur un degré de sainteté, vous devez toujours vous baser sur l’humilité. Si l’orgueil persiste chez quelqu’un, ne vous faites pas d’illusion sur sa conversion. Et si une personne que l’on dit “ sainte ” est dominée par l’orgueil, soyez certains qu’elle ne l’est pas. Elle aura beau jouer au saint comme un pharisien, et simuler des prodiges comme un charlatan, elle n’est pas sainte pour autant. Son apparence n’est qu’hypocrisie, ses prodiges ne sont que satanisme. Avez-vous compris ?

      – Oui, Maître. »

      Tous se taisent et restent pensifs. Mais si les bouches demeurent fermées, on devine clairement leurs pensées à leurs regards, à l’expression de leur physionomie. Un grand désir de savoir émane d’eux comme une vapeur enivrante d’éther…

      224.5 Simon le Zélote s’ingénie à distraire ses compagnons pour avoir l’occasion de leur parler en particulier et certainement de leur conseiller encore le silence. J’ai l’impression que Simon le Zélote joue beaucoup ce rôle dans le groupe des apôtres. C’est le modérateur, le conciliateur, le conseiller de ses compagnons, sans compter qu’il est celui qui comprend si bien le Maître. Il dit maintenant :

      « Nous voici déjà sur les terres de Jeanne. Le village qui se trouve dans ce creux, c’est Béther. Ce palais, sur la crête, c’est son château natal. Sentez-vous dans l’air ce parfum ? Ce sont les rosiers qui commencent à le répandre au soleil du matin. Le soir, il est encore plus puissant. Mais maintenant, ces arbustes sont si beaux, dans cette fraîcheur du matin, encore couverts d’une rosée qui brille comme des millions de diamants sur les corolles en train de s’ouvrir. Au coucher du soleil, on cueille toutes les fleurs arrivées à leur complet développement. Venez : je veux vous montrer un coteau d’où l’on voit l’ensemble des roseraies qui débordent du sommet en cascade sur les pentes de l’autre versant. C’est une avalanche de roses qui, ensuite, remonte comme une marée sur deux autres collines. C’est un amphithéâtre, un lac de fleurs. C’est magni­fique. La pente du chemin est plus raide, mais cela vaut la peine de le suivre car, de là, on domine tout ce paradis. Et nous serons vite arrivés au château. Jeanne y vit librement, au milieu de ses paysans qui gardent seuls toute cette richesse. Mais ils aiment tant leur maîtresse, qui fait de ces vallées un paradis de beauté et de paix, qu’ils valent mieux que tous les gardes d’Hérode. Voici, regarde, Maître. Regardez, mes amis. »

      Et, de la main, il montre un hémicycle de collines envahies par les roses.

      De quelque côté qu’on tourne les yeux, on voit partout des rosiers et encore des rosiers, sous des arbres très hauts, chargés d’abriter des vents et des rayons trop chauds du soleil et de la grêle. Le soleil se répand et l’air circule, sous ces abris feuillus qui servent de léger voile aux plantes sans les opprimer, que les jardiniers main­tiennent en état et sous lesquels vivent heureux les plus beaux rosiers du monde. On en trouve des milliers, de toutes variétés : rosiers nains, tiges, buissons, géants. Disposés en touffes, comme des coussins brodés de fleurs aux pieds des arbres, sur les prés d’herbes verdoyantes, ou formant des haies le long des sentiers, au bord des ruisseaux, en cercle autour des bassins d’irrigation, disséminés dans un parc qui comprend des collines, ou bien grimpant autour des arbres, avec des chevelures fleuries qui d’un arbre à l’autre forment des festons et des guirlandes. Un vrai jardin de rêve. Toutes les tailles, toutes les nuances s’y trouvent et s’entremêlent, disposant les couleurs ivoire des roses thé auprès des couleurs rouge sang d’autres fleurs et, régnant comme des souveraines grâce à leur nombre, les vraies roses de la couleur des joues d’un enfant, avec un dégradé blanc teinté de rose sur les bords.

      Tous les disciples sont éberlués par tant de beauté.

      « Mais que fait-elle de tout cela ? demande Philippe.

      – Elle en profite, répond Thomas.

      – Non. Elle en extrait aussi l’essence, donnant ainsi du travail à des centaines de serviteurs fleuristes et aux spécialistes de l’extraction des essences. Les romains en sont avides. Jonathas me le disait en me montrant les comptes de la dernière récolte.

      224.6 Mais voici là-bas Marie, femme d’Alphée, avec l’enfant. Ils nous ont vus et ils appellent les autres… »

      En effet, voici Jeanne et les deux Marie que précède Marziam qui descend en courant, les bras déjà prêts à embrasser. Elles se hâtent vers Jésus et Pierre, et se prosternent devant Jésus.

      « La paix à vous toutes. Où se trouve ma Mère ?

      – Au milieu des rosiers, Maître, avec Elise. Ah ! Cette dernière est bien guérie ! Elle peut affronter le monde et te suivre. Merci de t’être servi de moi pour cela.

      – Merci à toi, Jeanne. Tu vois qu’il était utile de venir en Judée ? Marziam, voici des cadeaux pour toi : ce beau pantin et ces belles brebis. Cela te plaît ? »

      De joie, l’enfant en a le souffle coupé. Il s’avance vers Jésus qui s’est penché pour lui donner la poupée et est resté ainsi pour le regarder en face. L’enfant se jette à son cou, et l’embrasse le plus fort qu’il peut.

      « Comme ça, tu vas devenir doux comme ces brebis et tu deviendras plus tard un bon berger pour ceux qui croient en Jésus. N’est-ce pas ? »

      Tout essoufflé, les yeux illuminés par la joie, Marziam dit oui, oui, oui…

      « Maintenant, va voir Pierre ; moi, je vais trouver ma Mère. J’aperçois là-bas un pan de son voile qui voltige le long d’une haie de rosiers. »

      Il court vers Marie et la reçoit sur son cœur au détour du sentier. Marie, après le premier baiser, explique, encore tout essoufflée :

      « Elise arrive derrière moi… J’ai couru pour t’embrasser… car je n’aurais pas pu m’en priver, mon Fils… et je ne voulais pas le faire devant elle… Elle est bien changée… Mais son cœur souffre encore devant les joies des autres, qui lui sont pour toujours refusées. La voilà qui arrive. »

      Elise fait vivement les derniers pas et s’agenouille pour baiser le vêtement de Jésus. Ce n’est plus la femme tragique de Bet-çur, mais une vieille femme, austère, marquée par la souffrance et par la trace qu’elle a laissée sur son visage et dans son regard.

      « Béni sois-tu, Maître, maintenant et toujours, pour m’avoir rendu la sérénité que j’avais perdue.

      – Toujours plus de paix pour toi, Elise. Je suis content de te trouver ici. Relève-toi.

      – Moi aussi, je suis contente. J’ai tant de choses à te dire et à te demander, Seigneur !

      – Nous en aurons tout le temps car je vais rester ici quelques jours. Viens que je te fasse connaître tes condisciples.

      – Oh ! Tu as donc déjà compris ce que je voulais te dire ? Que je veux renaître à une vie nouvelle : la tienne ; me refaire une famille : la tienne ; retrouver des fils : les tiens. Comme tu l’as dit en parlant de Noémi chez moi, à Bet-çur [1]. Moi, je suis une nouvelle Noémi, par ta grâce, mon Seigneur. Sois-en béni. Je ne suis plus amère et stérile. Je serai encore mère. Et, si Marie le permet, un peu ta mère aussi, ainsi que la mère des fils de ta doctrine.

      – Oui, tu le seras. Marie n’en sera pas jalouse, et moi, je t’aimerai de façon à ne pas te faire regretter d’être venue. Allons maintenant trouver ceux qui veulent te dire qu’ils t’aiment comme des frères. »

      Et Jésus la prend par la main pour la conduire vers sa nouvelle famille.

      Le voyage dans l’attente de la Pentecôte est terminé.


[1] Cf. 3.70. – 3.71 (EMV 208209). - Noémi (ma gracieuse). Femme d’Elimélek, qui l’emmena, avec ses deux fils, dans le pays de Moab, à cause de la famine régnant en Juda. Les fils épousèrent des Moabites. Elimélek et ses fils moururent. Noémi, accompagnée de Ruth, sa belle-fille, revint à Bethléem de Juda. (Ruth 1,1-4)

Observation - La roseraie de Jeanne à Béther

A la mi-mai de la seconde année de sa vie publique, Jésus vient rendre visite à Jeanne de Chouza, dans son château de Béther. Simon le Zélote, qui s’est déjà rendu sur place, sert de guide : « Nous voilà déjà sur les terres de Jeanne. Le pays qui est dans ce berceau, c'est Béther. Ce palais, sur la crête, c’est son château natal ». L’apôtre complète ses commentaires. « Il montre un hémicycle de collines envahies par les roses (…) Au coucher du soleil, on cueille toutes les fleurs arrivées à leur complet développement (…) Elle (Jeanne) en extrait aussi l'essence... Les romains en sont avides » (EMV 224.5). Ailleurs Maria Valtorta donne cette autre information pertinente à propos de Béther : « le petit village s'étale sur les pentes occidentales de la montagne, sur laquelle s'élève le château » (EMV 400.1).

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Le-sec11
Culture en terrasse, aujourd’hui, à Béther

Tous ces détails sur Béther sont parfaitement crédibles. Le château dont il est question ici est très probablement celui où les compagnons de Bar-Kokhba, révoltés contre Rome sous Adrien, résistèrent pendant deux ans et demi aux troupes de Jules Sévère (132-135). Les ruines de Khirbet el Yahud (Ruines des Juifs) sont encore visibles aujourd’hui.

Apollonius, disciple d'Hérophile, a écrit un traité sur les parfums où il vante l’essence de roses de Phasales, Naples et Capoue, ainsi que les parfums venus d’Orient (1). Les Romains faisaient une énorme consommation de roses, sous forme d’eau de roses ou d’essence, comme il ressort des écrits de Virgile, Varron, Columelle, Pline, Dioscoride, Palladius, etc. (2). Le site actuel, avec ses cultures en gradin, semble avoir gardé en partie la beauté du temps des roseraies de Jeanne de Chouza, même si la culture des roses n’y est plus pratiquée.

   (1) G. W. Septimus Piesse, Des odeurs, des Parfums et des Cosmétiques 1865, page xix

   (2) R. Blondel Le Parfum  des Roses 1889, pages 11 et 12.

https://valtorta.fr/deuxieme-annee-vie-publique-de-jesus/le-secret-de-l-apotre-jean-devoile.html
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 21 Fév - 10:41

225. Le paralytique de la piscine probatique - Partie 1

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 87
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 225


Vision du samedi 21 juillet 1945

Samedi 20 mai 28
Jérusalem

225.1 Jésus se trouve à Jérusalem, plus précisément aux environs de l’Antonia, accompagné de tous les apôtres, sauf de Judas. Une grande foule se hâte vers le Temple. Tout le monde est en habits de fête, tant les apôtres que les autres pèlerins, et je pense donc que nous sommes à l’époque de la Pentecôte [1]. De nombreux mendiants se mêlent à la foule. Ils se plaignent de leurs misères en des refrains apitoyés et se dirigent vers les meilleurs endroits, près des portes du Temple ou au croisement des rues par lesquelles la foule arrive. Jésus passe en faisant l’aumône à ces malheureux qui s’ingénient, non seulement à raconter leurs misères, mais à en exposer les moindres détails.

      J’ai l’impression que Jésus est déjà allé au Temple car j’entends les apôtres parler de Gamaliel, qui a fait semblant de ne pas les voir, bien qu’Etienne, un de ses auditeurs, lui ait signalé le passage de Jésus.

      J’entends aussi Barthélemy demander à ses compagnons :

      « Qu’a voulu dire ce scribe par cette phrase : “ Un groupe de mou­tons de boucherie ” ?

      – Il parlait de quelque affaire qui le concernait, répond Thomas.

      – Non, il nous montrait du doigt. Je l’ai bien vu. D’ailleurs, sa seconde phrase confirmait la première : il a ajouté sur un ton sarcastique : “ D’ici peu, l’agneau lui aussi sera tondu et mené à l’abattoir. ”

      – Oui, je l’ai entendu, moi aussi, confirme André.

      – Bon ! Mais je brûle d’envie de retourner là-bas et de demander au compagnon du scribe ce qu’il sait sur Judas dit Pierre.

      – Mais il ne sait rien ! Cette fois, Judas n’est pas là parce qu’il est réellement malade. Nous le savons, nous. Peut-être a-t-il trop souffert du voyage que nous avons fait. Nous, nous sommes plus résistants, alors que, lui, il a vécu ici, dans le confort. Il se fatigue plus facilement, répond Jacques, fils d’Alphée.

      – Oui, nous le savons. Mais ce scribe a dit : “ Le caméléon est absent du groupe. ” Le caméléon, n’est-ce pas cet animal qui change de couleur à son gré ? demande Pierre.

      – Si, Simon. Mais il a sûrement voulu parler de ses vêtements toujours nouveaux. Il y tient, il est jeune. Il faut l’excuser…, dit d’un ton conciliant Simon le Zélote.

      – C’est vrai aussi. Pourtant… Quelles phrases curieuses ! Soupire Pierre.

      – On a l’impression qu’ils nous menacent sans cesse, dit Jacques, fils de Zébédée.

      – Le fait est que nous nous savons menacés et nous voyons des menaces même là où il n’y en a pas… constate Jude.

      – Et nous voyons des fautes même où il n’y en a pas, conclut Thomas.

      – C’est bien vrai ! Le soupçon est une vilaine chose… Qui sait comment va Judas, aujourd’hui ? En attendant, il jouit de ce paradis et de la présence de ces anges… J’aurais plaisir à être malade, moi aussi, pour profiter de tous ces délices » dit Pierre.

      Ce à quoi Barthélemy répond :

      « Espérons qu’il sera bientôt guéri. Il faut terminer le voyage parce que la saison chaude nous presse.

      – Oh, les soins ne lui font pas défaut, et puis… le Maître s’en occupera si besoin est, assure André.

      – Il avait beaucoup de fièvre quand nous l’avons quitté. Je ne sais comment elle lui est venue… » dit Jacques, fils de Zébédée.

      Matthieu lui répond :

      « Comment la fièvre arrive ! Parce qu’elle doit venir. Mais ce ne sera rien. Le Maître ne s’en inquiète pas le moins du monde. S’il avait vu du danger, il n’aurait pas quitté le château de Jeanne. [2] »

      225.2 En effet Jésus n’est guère inquiet. Il discute avec Marziam et Jean, et il avance en donnant des aumônes. Il explique certainement à l’enfant bien de choses, car je vois qu’il lui indique tel ou tel détail. Il se dirige vers l’extrémité des murs du Temple, à l’angle nord-est. Là se trouve une foule nombreuse qui se rend près d’un endroit où des portiques précèdent une porte que j’entends nommer “ du Troupeau ”.

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Image011
Dessin de Lorenzo Ferri d’après les indications de Maria Valtorta © FMVC.

      « C’est la Probatique, la piscine de Béthesda [3]. Maintenant, observe bien l’eau. Tu vois comme elle est calme en ce moment ? D’ici peu tu verras qu’elle a une sorte de mouvement et qu’elle se soulève jusqu’à cette marque humide. La vois-tu ? L’ange du Seigneur descend alors, l’eau sent sa présence et le vénère comme elle le peut. L’ange porte à l’eau l’ordre de guérir l’homme qui s’y plongera le plus vite. Tu vois toute cette foule ? Mais un trop grand nombre sont distraits et ne voient pas le premier mouvement de l’eau ; ou bien les plus forts repoussent sans pitié les plus faibles. On ne doit jamais se distraire en présence des signes de Dieu. Il faut garder l’âme toujours éveillée parce qu’on ne sait jamais quand Dieu se manifeste ou envoie son ange. Et il ne faut jamais être égoïste, même pour raison de santé. Bien des fois, parce qu’ils sont restés à discuter sur celui qui plonge le premier ou qui en a le plus besoin, ces malheureux manquent le bienfait de la venue de l’ange. »

      Patiemment, Jésus donne toutes ces explications à Marziam qui le regarde, les yeux grands ouverts, attentifs, mais sans cesser de surveiller l’eau pour autant.

      « Peut-on voir l’ange ? Cela me plairait.

      – Lévi, un berger de ton âge, l’a vu. Regarde bien, toi aussi, et sois prêt à le louer. »

      L’enfant ne se distrait plus. Ses yeux regardent alternativement l’eau et au-dessus de l’eau ; il n’entend plus rien, ne voit rien d’autre. Jésus, pendant ce temps, regarde ce petit peuple d’in­firmes, d’aveugles, d’estropiés, de paralytiques, qui attendent. Les apôtres eux aussi observent attentivement. Le soleil produit des jeux de lumière sur l’eau et envahit royalement les cinq rangées de portiques qui entourent les piscines.

      « Voilà, voilà ! S’écrie Marziam. L’eau se gonfle, s’agite, resplendit ! Quelle lumière ! L’ange ! »… et l’enfant se met à genoux.

      En effet, le mouvement de l’eau dans le bassin donne l’impression qu’elle augmente de volume sous l’effet d’un flot subit qui s’y introduit, la fait bouillonner et monter jusqu’au bord. Pendant un instant, l’eau resplendit comme un miroir sous le soleil, en une lumière éblouissante.

      Un boiteux se jette rapidement dans l’eau pour en sortir peu après, avec la jambe, déjà marquée d’une grande cicatrice, parfaitement saine. Les autres se plaignent et se disputent avec l’homme guéri. Ils lui disent que, lui, il pouvait encore travailler, mais pas eux. Et la querelle se prolonge.

      225.3 Jésus regarde tout autour et voit sur un grabat un paralytique qui pleure doucement. Il s’en approche, se penche et le caresse en lui demandant :

      « Tu pleures ?

      – Oui. Personne ne pense jamais à moi. Je reste ici, je reste ici, tous guérissent, moi, jamais. Cela fait trente-huit ans que je suis sur le dos. J’ai tout dépensé, les miens sont morts, et maintenant je suis à la charge d’un parent éloigné qui me porte ici le matin et me reprend le soir… Mais comme cela lui pèse de le faire ! Oh ! Je voudrais mourir !

      – Ne te désole pas. Tu as eu tant de patience et de foi ! Dieu t’exaucera.

      – Je l’espère… mais il me vient des moments de découragement. Toi, tu es bon, mais les autres… Celui qui est guéri pourrait, par reconnaissance pour Dieu, rester ici pour secourir ses pauvres frères…

      – Ils devraient le faire, en effet. Mais n’aie pas de rancœur. Ils n’y pensent pas, ce n’est pas de la mauvaise volonté. C’est la joie de la guérison qui les rend égoïstes. Pardonne-leur…

      – Tu es bon, toi. Tu n’agirais pas ainsi. Moi, j’essaie de me traîner avec les mains jusque-là, lorsque l’eau du bassin s’agite. Mais il y a toujours quelqu’un d’autre pour me passer devant et je ne puis rester près du bord, on me piétinerait. Et même si je restais là, qui m’aiderait à descendre ? Si je t’avais vu plus tôt, je te l’aurais demandé…

      – Veux-tu vraiment guérir ? Alors, lève-toi, prends ton lit et marche ! »

      Jésus s’est redressé pour donner cet ordre et il semble qu’en se relevant, il relève aussi le paralytique, qui se met debout, puis fait un, deux, trois pas, comme s’il n’y croyait pas, derrière Jésus qui s’éloigne. Et comme il marche vraiment, il pousse un cri qui fait se retourner tout le monde.

      « Mais qui es-tu ? Au nom de Dieu, dis-le-moi ! L’ange du Seigneur, peut-être ?

      – Je suis plus grand qu’un ange. Mon nom est Pitié. Va en paix. »

      Tous s’attroupent. Ils veulent voir. Ils veulent parler. Ils veulent guérir. Mais les gardes du Temple accourent – je crois qu’ils surveillent aussi la piscine – et dispersent par des menaces cette assemblée bruyante.

      Le paralytique prend son brancard – deux barres montées sur deux paires de petites roues et une toile usée clouée sur les barres – et il s’en va, tout heureux, en criant à Jésus :

      « Je te retrouverai. Je n’oublierai pas ton nom ni ton visage. »

      225.4 Jésus, se mêlant à la foule, part d’un autre côté, vers les murs.

      Mais il n’a pas encore dépassé le dernier portique qu’arrivent, comme poussés par une rafale de vent, un groupe de juifs des pires castes, tout enflammés par le désir de se montrer insolent vis-à-vis de Jésus. Ils cherchent, regardent, scrutent. Mais ils n’arrivent pas à bien comprendre ce dont il s’agit, et Jésus s’éloigne. Déçus, suivant les renseignements des gardiens, ils assaillent le pauvre paralytique guéri et heureux et lui font des reproches :

      « Pourquoi emportes-tu ce lit ? C’est le sabbat. Cela ne t’est pas permis. »

      L’homme les regarde :

      « Moi, je ne sais rien. Je sais que celui qui m’a guéri m’a dit : “ Prends ton lit et marche. ” Voilà tout ce que je sais.

      – C’est sûrement un démon car il t’a ordonné de violer le sabbat. Comment était-il ? Qui était-ce ? Un Judéen ? Un galiléen ? Un prosélyte ?

      – Je ne sais pas. Il était ici. Il m’a vu pleurer et s’est approché de moi. Il m’a parlé. Il m’a guéri. Il est parti en tenant un enfant par la main. Je suppose que c’est son fils, car il pourrait avoir un fils de cet âge.

      – Un enfant ? Alors ce n’est pas lui !… Comment a-t-il dit qu’il s’appelait ? Ne le lui as-tu pas demandé ? Ne mens pas !

      – Il m’a dit qu’il s’appelait Pitié.

      – Tu n’es qu’un imbécile ! Ce n’est pas un nom, cela ! »

      L’homme hausse les épaules et part.

      Les autres disent :

      « C’était sûrement lui. Les scribes Anias et Zachée l’ont vu au Temple.

      – Mais lui, il n’a pas d’enfant !

      – Et pourtant c’est bien lui. Il était avec ses disciples.

      – Mais Judas n’y était pas. C’est celui que nous connaissons bien. Les autres… peuvent être des gens quelconques.

      – Non, c’étaient bien eux. »

      Et la discussion se poursuit alors que les portiques se rem­plissent de malades…

      […]

[1] Huit semaines environ après la Pâque.

[2] Château de Jeanne de Kouza à Béther. Cf. EMV 324.

[3] Béthesda : L’original italien parle de Betseida que la traduction de 1985 avait traduit par Bethsaïda et que celle de 2017 traduit par Béthesda. Dans l’évangile de Jean, elle est autrement appelée Bethzatha (Jean 5, 2). Les différentes orthographes se retrouvent dans les anciens manuscrits de l’évangile de Jean. Chacune renvoie à une signification différente, mais convergente. Elles sont donc issues probablement de surnoms usuels d’un endroit célèbre.


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Sam 22 Fév - 11:07

Le paralytique de la piscine probatique - Partie 2

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 87
Nouvelle édition : Tome 3, chapitre 225


Vision du samedi 21 juillet 1945

Samedi 20 mai 28
Jérusalem

[...]

       225.5 Jésus rentre dans le Temple par un autre côté, du côté ouest, celui qui fait le plus face à la ville. Les apôtres le suivent. Jésus regarde autour de lui et voit enfin ce qu’il cherche : Jonathas qui, de son côté, le cherche aussi.

      « Il va mieux, Maître. La fièvre tombe. Ta Mère dit aussi qu’elle espère pouvoir venir d’ici le prochain sabbat.

      – Merci, Jonathas, tu as été ponctuel.

      – Pas tellement : j’ai été retenu par Maximin, l’intendant de Lazare. Il te cherche. Il est allé au portique de Salomon.

      – Je vais le rejoindre. Que la paix soit avec toi, et porte ma paix à ma Mère et aux femmes disciples, ainsi qu’à Judas. »

      Et Jésus se dirige rapidement vers le portique de Salomon où, effectivement, il trouve Maximin.

      « Lazare a appris que tu étais ici. Il veut te voir pour te dire une chose importante. Viendras-tu ?

      – Sans aucun doute et sans tarder. Tu peux lui dire de m’at­tendre dans le courant de la semaine. »

      Maximin s’en va à son tour après avoir échangé quelques mots.

      « Allons encore prier, puisque nous sommes revenus jusqu’ici », dit Jésus ; il se dirige vers l’atrium des juifs.

      Mais, tout près de là, il rencontre le paralytique guéri qui est venu remercier le Seigneur. Le miraculé l’aperçoit au milieu de la foule, le salue joyeusement et lui raconte ce qui est arrivé à la piscine après son départ. Et il termine :

      « Un homme qui s’est étonné de me voir ici en bonne santé m’a dit qui tu es. Tu es le Messie. Est-ce vrai ?

      – Je le suis. Mais, même si tu avais été guéri par l’eau ou par une autre puissance, tu aurais toujours le même devoir envers Dieu : celui d’utiliser ta bonne santé pour bien agir. Tu es guéri. Va donc, avec de bonnes intentions, reprendre les activités de la vie, et ne pèche jamais plus. Que Dieu n’ait pas à te punir davantage encore. Adieu. Va en paix.

      – Je suis âgé… je ne sais rien… Mais je voudrais te suivre pour te servir et pour apprendre. Veux-tu de moi ?

      – Je ne repousse personne. Réfléchis cependant avant de venir, et si tu te décides, viens.

      – Où ? Je ne sais pas où tu vas…

      – Je parcours le monde. Tu trouveras partout des disciples qui te guideront vers moi. Que le Seigneur t’éclaire pour le mieux. »

      Jésus rejoint sa place et prie…

      225.6 Je ne sais si le miraculé va spontanément trouver les juifs ou si ceux-ci, étant aux aguets, l’arrêtent pour lui demander si celui qui lui a parlé est celui qui l’a miraculeusement guéri. Je sais que l’homme parle avec les juifs puis s’en va, alors que ceux-ci s’a­vancent près de l’escalier par lequel Jésus doit descendre pour passer dans les autres cours et sortir du Temple. Quand Jésus arrive, sans même le saluer, ils le questionnent :

      « Tu continues donc à violer le sabbat malgré tous les reproches qui t’ont été faits ? Et tu veux qu’on te respecte comme envoyé de Dieu ?

      – Envoyé ? Davantage encore : comme Fils, car Dieu est mon Père. Si vous ne voulez pas me respecter, abstenez-vous-en. Mais moi, je ne cesserai pas pour autant d’accomplir ma mission. Il n’est pas un seul instant où Dieu cesse d’agir. Maintenant encore, mon Père est à l’œuvre et moi de même, car un bon fils fait ce que fait son Père et parce que je suis venu sur la terre pour être à l’œuvre. »

      Des gens s’approchent pour écouter la discussion. Certains d’entre eux connaissent Jésus, à d’autres il a fait du bien, d’autres encore le voient pour la première fois. Certains l’aiment, d’autres le haïssent, beaucoup sont incertains. Les apôtres entourent de près le Maître. Marziam a presque peur et sa petite frimousse paraît au bord des larmes.

      Les juifs, un mélange de scribes, de pharisiens et de saducéens, crient bien fort au scandale :

      « Tu oses ! Ah ! Il se dit le Fils de Dieu ! Sacrilège ! Dieu est celui qui est et il n’a pas de Fils ! Appelez donc Gamaliel ! Appelez donc Sadoq ! Rassemblez les rabbis pour qu’ils l’entendent et le confondent.

      – Ne vous agitez pas. Appelez-les et ils vous diront, s’il est vrai qu’ils savent, que Dieu est un et trine : Père, Fils et Saint-Esprit et que le Verbe, c’est-à-dire le Fils de la Pensée, est venu, comme on l’avait prophétisé, pour sauver du péché Israël et le monde. Je suis le Verbe. Je suis le Messie annoncé. Il n’y a donc pas de sacrilège si j’appelle mon Père celui qui est le Père.

      225.7 Vous vous irritez de ce que j’accomplis des miracles, parce que grâce à eux j’attire à moi les foules et les persuade. Vous m’accusez d’être un démon parce que j’opère des prodiges. Mais Béelzéboul est dans le monde depuis des siècles et, en vérité, il ne manque pas d’adorateurs dévoués… Alors pourquoi ne fait-il pas ce que je fais ? »

      Les gens murmurent :

      « C’est vrai ! C’est vrai ! Personne ne fait ce qu’il fait, lui. »

      Jésus poursuit :

      « Je vous le dis : c’est parce que je sais ce que, lui, il ignore, et que je peux ce qui lui est impossible. Si je fais les œuvres de Dieu, c’est parce que je suis son Fils. De soi-même, personne ne peut arriver à faire que ce qu’il a vu faire. Moi, le Fils, je peux seulement faire ce que j’ai vu faire du Père car je suis Un avec lui depuis les siècles des siècles, pas différent de lui ni en substance ni en puissance. Tout ce que fait le Père, je le fais moi aussi, qui suis son Fils. Ni Béelzéboul ni d’autres ne peuvent en faire autant, parce qu’ils ne savent pas ce que je sais. Le Père m’aime, moi, son Fils, et il m’aime sans mesure comme moi aussi je l’aime. C’est pourquoi il m’a montré et me montre tout ce qu’il fait afin que je fasse ce qu’il fait, moi, sur la terre en ce temps de grâce, lui au Ciel, avant que le temps n’existe pour la terre. Et il me montrera des œuvres toujours plus grandes afin que je les accomplisse et que vous puissiez vous en émerveiller. Sa Pensée est inépuisable. Moi, je l’imite, puisque je suis également inépuisable pour accomplir ce que le Père pense et veut par sa pensée.

      225.8 Vous, vous ne savez pas encore tout ce que l’Amour crée sans jamais s’épuiser. Nous sommes l’Amour. Il n’est pas de limites pour nous, et il n’y a rien qui ne puisse être appliqué aux trois degrés de l’homme : l’inférieur, le supérieur, le spirituel. En effet, de même que le Père ressuscite les morts et leur rend la vie, moi aussi, le Fils, je peux donner la vie à qui je veux et même, en raison de l’amour infini que le Père porte au Fils, il m’est accordé non seulement de rendre la vie à la partie inférieure de l’homme, mais aussi à la partie supérieure en délivrant la pensée et le cœur de l’homme des erreurs de l’esprit et des passions mauvaises, et à la partie spirituelle en rendant à l’âme son indépendance à l’égard du péché. Le Père, en effet, ne juge personne : il a remis tout jugement au Fils, car le Fils est celui qui par son propre sacrifice a acheté l’humanité pour la racheter. Le Père agit ainsi par justice, car il est juste que l’on donne à celui qui paie avec sa propre monnaie, et pour que tous honorent le Fils, comme déjà ils honorent le Père.

      Sachez que, si vous séparez le Père du Fils ou le Fils du Père, et ne vous souvenez pas de l’amour, vous n’aimez pas Dieu comme il doit être aimé, c’est-à-dire avec vérité et sagesse, mais vous commettez une hérésie parce que vous n’honorez qu’une seule personne, alors qu’ils forment une admirable trinité. Aussi, ne pas honorer le Fils revient à ne pas honorer le Père. En effet, Dieu le Père, n’accepte pas qu’une seule partie de lui-même soit adorée, mais il veut que soit adoré son Tout. Celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père qui l’a envoyé dans une pensée parfaite d’amour. Il refuse donc de reconnaître que Dieu sait faire des œuvres justes.

      En vérité, je vous dis que celui qui écoute ma parole et croit en celui qui m’a envoyé possède la vie éternelle et n’est pas frappé par la condamnation ; bien au contraire, il passe de la mort à la vie parce que croire en Dieu et recevoir ma parole signifie recevoir en soi-même la vie qui ne meurt pas.

      L’heure vient — elle est même déjà venue pour beaucoup — où les morts entendront la voix du Fils de Dieu et où celui qui l’aura entendue résonner au fond de son cœur vivra, car cette voix est vivifiante.

      225.9 Que dis-tu, scribe ?

      – Je dis que les morts n’entendent plus rien et que tu es fou.

      – Le Ciel te persuadera qu’il n’en est pas ainsi et que ta science est nulle, comparée à celle de Dieu. Vous avez tellement humanisé le surnaturel que vous ne donnez plus aux mots qu’une signification immédiate et terrestre. Vous avez enseigné la Haggadah avec des formules figées, les vôtres, sans vous efforcer de comprendre les allégories dans toute leur vérité. Et maintenant vous ne croyez même plus à ce que vous enseignez, car votre humanité — triomphante de l’esprit —, a opprimé et épuisé votre âme. C’est la raison pour laquelle vous ne pouvez plus lutter contre les forces occultes.

      La mort dont je parle n’est pas celle de la chair, mais celle de l’esprit. Viendront ceux qui entendent de leurs oreilles ma Parole, l’accueillent dans leur cœur et la mettent en pratique. Ceux-là, même s’ils sont morts spirituellement, recouvreront la Vie car ma Parole est vie qui se répand. Et moi, je peux la donner à qui je veux parce que j’ai en moi la perfection de la vie : comme le Père a en lui la vie parfaite, le Fils a reçu du Père, en lui-même, la vie parfaite, complète, éternelle, inépuisable et transmissible. En outre, avec la vie, le Père m’a remis le pouvoir de juger, car le Fils du Père est le Fils de l’Homme, et il peut et doit juger l’homme.

      Ne vous étonnez pas de cette première résurrection, la spirituelle, que j’opère par ma Parole. Vous en verrez de plus fortes encore, plus fortes pour vos sens appesantis, car en vérité je vous dis que rien n’est plus grand que l’invisible, mais réelle résurrection d’une âme. Bientôt viendra l’heure où la voix du Fils de Dieu pénétrera dans les tombeaux et tous ceux qui s’y trouvent l’entendront. Alors, ceux qui auront fait le bien en sortiront pour aller à la résurrection de la vie éternelle, et ceux qui auront fait le mal à la résurrection de la condamnation éternelle.

      Je ne vous dis pas que je fais et ferai cela par moi-même, par ma seule volonté, mais par la volonté du Père unie à la mienne. Je parle et je juge d’après ce que j’entends, et mon jugement est droit parce que je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé. Je ne suis pas séparé du Père. Je suis en lui, et lui est en moi, je connais sa pensée et je la traduis en paroles et en actes.

      225.10 Ce que je dis pour me rendre témoignage à moi-même ne peut être acceptable pour votre esprit incrédule qui ne veut voir en moi rien d’autre que l’homme semblable à vous tous. Il y en a aussi un autre qui me rend témoignage et que vous dites vénérer comme un grand prophète. Je sais que son témoignage est vrai, mais vous, vous qui prétendez le vénérer, vous n’acceptez pas son témoignage parce qu’il est différent de votre pensée qui s’oppose à moi. Vous ne recevez pas le témoignage de l’homme juste, du dernier prophète d’Israël parce que, quand cela ne vous convient pas, vous dites qu’il n’est qu’un homme et peut donc se tromper.

      Vous avez envoyé des gens interroger Jean dans l’espoir qu’il dirait de moi ce que vous désirez, ce que vous pensez de moi, ce que vous voulez penser de moi. Mais Jean a rendu un témoignage conforme à la vérité, et vous n’avez pu l’accepter. Puisque le prophète dit que Jésus de Nazareth est le Fils de Dieu, vous prétendez, dans le secret de vos cœurs et par crainte des foules, que le prophète est un fou, comme l’est le Christ. Moi non plus, cependant, je ne reçois pas le témoignage de l’homme, fût-il le plus saint d’Israël. Je vous dis : il était la lampe allumée et lumineuse, mais vous avez bien peu voulu profiter de sa lumière. Quand cette lumière s’est projetée sur moi, pour vous faire connaître le Christ pour ce qu’il est, vous avez laissé mettre la lampe sous le boisseau et, avant encore, vous avez dressé entre elle et vous un mur pour ne pas voir, à sa lumière, le Christ du Seigneur.

      Le Père et moi sommes reconnaissants à Jean de son témoi­gnage. Et Jean obtiendra une grande récompense pour le témoignage qu’il a rendu ; pour cette raison, il brillera au Ciel et, de tous les hommes là-haut, il sera le premier soleil qui y resplendira, lumineux comme le seront tous ceux qui auront été fidèles à la vérité et affamés de justice. Mais moi, j’ai un témoignage plus grand que celui de Jean : ce sont mes œuvres. Car je fais les œuvres que le Père m’a donné à accomplir, et elles témoignent que le Père m’a envoyé en me confiant tout pouvoir. Ainsi, c’est le Père lui-même qui m’a envoyé, c’est lui qui témoigne en ma faveur. Vous n’avez jamais vu son visage ni entendu sa voix, mais moi je l’ai vu et je le vois, je l’ai entendue et je l’entends. Sa Parole ne demeure pas en vous, parce que vous ne croyez pas à celui qu’il a envoyé.

      Vous étudiez l’Ecriture parce que vous croyez obtenir par sa connaissance la vie éternelle. Et ne vous rendez-vous pas compte que ce sont justement les Ecritures qui parlent de moi ? Pourquoi donc persistez-vous à ne pas vouloir venir à moi pour obtenir la vie ? Je vous le dis : la raison en est que, lorsque quelque chose est contraire à vos idées invétérées, vous le repoussez. Il vous manque l’humilité. Vous ne pouvez pas arriver à dire : “ Je me suis trompé. Telle personne ou tel livre dit vrai et, moi, je suis dans l’erreur. ” C’est ainsi que vous avez agi avec Jean, avec les Ecritures, avec le Verbe qui vous parle. Vous ne pouvez plus voir ni comprendre parce que vous êtes prisonniers de l’orgueil et rendus sourds par vos propres voix.

      225.11 Croyez-vous que je parle ainsi parce que je veux être glorifié par vous ? Non, sachez-le, je ne cherche ni n’accepte la gloire qui vient des hommes. Ce que je cherche et veux, c’est votre salut éternel. Voilà la gloire que je cherche. C’est ma gloire de Sauveur, qui ne peut exister si je ne possède pas des sauvés ; elle augmente avec le nombre de ceux que je sauve et doit m’être rendue par les âmes que j’ai sauvées et par le Père, Esprit très pur.

      Mais vous, vous ne serez pas sauvés. Je vous connais pour ce que vous êtes. Vous n’avez pas en vous l’amour de Dieu, vous êtes sans amour. C’est pour cela que vous ne venez pas à l’Amour qui vous parle et vous n’entrerez pas dans le Royaume de l’amour. Vous y êtes des inconnus. Le Père ne vous connaît pas parce que vous ne me connaissez pas, moi qui suis dans le Père. Vous ne voulez pas me connaître.

      Je suis venu au nom de mon Père et vous ne me recevez pas, alors que vous êtes disposés à recevoir quiconque viendrait en son propre nom, pourvu qu’il vous dise ce qui vous plaît. Vous prétendez être des âmes qui ont la foi ? Non. Ce n’est pas le cas. Comment pouvez-vous croire, vous qui vous mendiez la gloire les uns aux autres au lieu de rechercher la gloire des Cieux qui vient de Dieu seul ? La gloire qui est vérité ne se complaît pas aux intérêts qui s’arrêtent à la terre et caressent seulement l’humanité vicieuse des fils dégradés d’Adam.

      Moi, je ne vous accuserai pas auprès du Père. Ne pensez pas cela. Il y a déjà quelqu’un qui vous accuse : ce Moïse en qui vous espérez. Lui, il vous reprochera de ne pas croire en lui puisque vous ne croyez pas en moi, car il a écrit sur moi et vous ne me reconnaissez pas d’après ce qu’il a laissé écrit de moi. Vous ne croyez pas aux paroles de Moïse, qui est le grand sur lequel vous jurez. Comment pouvez-vous donc croire aux miennes, à celles du Fils de l’Homme en qui vous n’avez pas foi ? Humainement parlant, c’est logique. Mais ici, nous sommes dans le domaine spirituel et vos âmes y sont confrontées. Dieu les observe à la lumière de mes œuvres et confronte vos actes à ce que je suis venu enseigner. Et Dieu vous juge.

      Quant à moi, je m’en vais. Pendant longtemps, vous ne me trouverez pas. Or croyez bien que ce n’est pas pour vous un triomphe, mais un châtiment. Partons. »

      Jésus fend la foule qui, pour une part reste muette, pour une autre murmure des approbations que la peur des pharisiens réduit à des chuchotements, et il s’éloigne.


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 24 Fév - 9:53

226. Un signe d’éveil de Marie de Magdala. Mort du vieil Ismaël.

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 88
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 226


Vision du dimanche 22 juillet 1945 [1]

Lundi 22 mai 28
Béthanie

226.1 Jésus, accompagné de Simon le Zélote, arrive dans le jardin de Lazare par une belle matinée d’été. L’aurore ne touche pas encore à sa fin, de sorte que tout est frais et riant.

  Le jardinier, qui accourt recevoir le Maître, lui montre un pan de vêtement blanc qui disparaît derrière une haie et dit :

  « Lazare se dirige vers la tonnelle des jasmins avec des rouleaux qu’il va lire. Je vais l’appeler.

  – Non. J’y vais tout seul. »

  Jésus se hâte le long d’un sentier bordé d’une haie en fleurs. L’herbe rase qui côtoie la haie atténue le bruit de ses pas, et Jésus cherche justement à marcher dessus pour arriver à l’improviste devant Lazare.

  Il le surprend debout, ses rouleaux posés sur une table de marbre, priant à voix haute :

  « Ne me déçois pas, Seigneur. Fais grandir ce brin d’espérance qui est né dans mon cœur. Accorde-moi ce que, par mes larmes, je t’ai demandé des milliers de fois, ce que je t’ai demandé par mes actes, par le pardon, par tout mon être. Donne-le-moi en échange de ma vie. Donne-le-moi au nom de ton Jésus qui m’a promis cette paix. Peut-il mentir, lui ? Dois-je penser que sa promesse a été un vain mot ? Que son pouvoir est inférieur à cet abîme de péché qu’est ma sœur ? Dis-le-moi, Seigneur, pour que je me résigne par amour pour toi…

  – Oui, je te l’affirme ! » dit Jésus.

  Lazare se retourne vivement et s’écrie :

  « Oh ! Mon Seigneur ! Mais quand es-tu arrivé ? »

  Et il se penche pour baiser le vêtement de Jésus.

  « Il y a quelques minutes.

  – Seul ?

  – Avec Simon le Zélote, mais là où tu es, je suis venu seul. Je sais que tu dois m’annoncer une grande chose. Dis-la-moi donc.

  – Non. Réponds d’abord à la question que j’ai posée à Dieu. Selon ta réponse, je te la dirai.

  – Dis-la-moi, dis-la-moi, cette grande chose. Tu peux la dire… »

  Jésus sourit en ouvrant les bras pour l’y inviter.

  « Dieu Très-Haut ! C’est donc vrai ? Toi, alors, tu sais que c’est vrai ? ! », et Lazare se réfugie dans les bras de Jésus pour lui confier sa grande chose.

  226.2 « Marie a appelé Marthe à Magdala. Et Marthe est partie, inquiète, craignant quelque grand malheur… Moi, je suis resté seul ici, avec cette même crainte. Mais Marthe m’a fait parvenir une lettre par le serviteur qui l’a accompagnée, une lettre qui m’a rempli d’espoir. Regarde, je l’ai ici, sur le cœur. Je la garde là, parce qu’elle m’est plus précieuse qu’un trésor. Ce ne sont que quelques mots, mais je les relis de temps en temps pour être certain qu’ils ont bien été écrits. Regarde… »

  Lazare sort de son vêtement un petit rouleau lié par un ruban violet et le déroule.

  « Tu vois ? Lis, lis à haute voix. Lue par toi, la chose me paraîtra plus certaine.

  – “ Lazare, mon frère. A toi paix et bénédiction. Je suis arrivée rapidement et en bonnes conditions. Et mon cœur n’a plus palpité de crainte de nouveaux malheurs, parce que j’ai vu Marie, notre Marie, en bonne santé et… dois-je te le dire ? Elle est moins agitée qu’auparavant. Elle a pleuré sur mon cœur, des pleurs interminables… Et puis, à la nuit tombée, dans la pièce où elle m’avait conduite, elle m’a posé des tas de questions sur le Maître. Rien de plus, pour le moment. Mais moi, qui vois le visage de Marie et qui entends ses paroles, je dis que l’espérance est née dans mon cœur. Prie, mon frère. Espère. Ah, si c’était vrai ! Je reste encore parce que je comprends qu’elle me veut auprès d’elle comme pour être défendue contre la tentation et pour apprendre… Quoi ? Ce que nous savons déjà : la bonté infinie de Jésus. Je lui ai parlé de cette femme venue à Béthanie… Je vois qu’elle réfléchit tant et plus… Il nous faudrait Jésus. Prie. Espère. Que le Seigneur soit avec toi. ” »

  Jésus replie le rouleau et le rend.

  « Je vais y aller. Peux-tu prévenir Marthe de venir à ma rencontre à Capharnaüm d’ici quinze jours, tout au plus ?

  – Oui, je le peux, Seigneur. Et moi ?

  – Tu restes ici. Marthe aussi, je la renverrai ici.

  – Pourquoi ?

  – Parce que ceux qui sont rachetés ont une pudeur profonde et rien ne leur fait plus honte que le regard d’un père ou d’un frère. Moi aussi, je te dis : “ Prie, prie, prie. ” »

  Lazare pleure sur la poitrine de Jésus… Ensuite, après s’être repris, il parle encore de son inquiétude, de ses découragements…

  « Cela fait presque un an que j’espère… que je désespère… Comme il est long, le temps de la résurrection !… » s’écrie-t-il.

  226.3 Jésus le laisse parler, parler, parler… jusqu’à ce que Lazare s’aperçoive qu’il manque aux devoirs de l’hospitalité, et il se lève pour conduire Jésus à la maison. Pour ce faire, ils passent à côté d’une épaisse haie de jasmins en fleurs ; des abeilles d’or bourdonnent sur leurs corolles en forme d’étoile.

  « Ah ! J’allais oublier de te le dire : le vieux patriarche que tu m’as envoyé [2] est retourné dans le sein d’Abraham. C’est Maximin qui l’a trouvé, assis ici, la tête appuyée contre cette haie, comme s’il s’était endormi, à côté des ruches dont il s’occupait comme si elles étaient des maisons remplies d’enfants dorés. C’est ainsi qu’il appelait ses abeilles. Il paraissait les comprendre et être compris d’elles. Et quand Maximin a trouvé le patriarche endormi dans la paix de sa bonne conscience, il y avait un voile précieux de petits corps couleur d’or. Toutes les abeilles s’étaient posées sur leur ami. Les serviteurs eurent du mal à les détacher de lui. Il était si bon qu’il avait peut-être un goût de miel… Il était si honnête qu’il était peut-être, pour les abeilles, une espèce de corolle non contaminée… J’en ai eu de la peine. J’aurais voulu l’avoir plus longtemps chez moi. C’était un juste…

  – Ne le pleure pas. Il est en paix, et de ce lieu de paix, il prie pour toi qui as adouci ses derniers jours. Où est-il enseveli ?

  – Au fond du jardin, encore près de ses ruches. Viens, je t’y conduis. »

  Et ils se dirigent, par un petit bois de lauriers-cerises, vers les ruches d’où provient un bourdonnement laborieux…



[1] Le 22 juillet est la fête de Marie-Madeleine.

[2] Ismaël, Cf. 3.32 et 3.33 (EMV 172 et 173).


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 25 Fév - 8:42

Bonjour à tous,

À la fin du chapitre de ce jour, j’ai rajouté exceptionnellement le martyre de Flore et de Marie de Cordoue.

En effet, cette vision est venue après celle d’aujourd’hui et précède chronologiquement l’EMV 228.

Que celui qui veuille lire lise et se nourisse de la foi de ces si beaux martyrs chrétiens.

Fraternellement,

Anayel


227. Un épisode inachevé  

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 88
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 227


Résumé de la vision du lundi 23 Juillet, 8h du matin.

Mardi 23 mai 28
Gethsémani

      227.1 C’est un Judas bien pâle qui descend du char avec Marie et les femmes disciples : les Marie, Jeanne, Elise…

      … mais à cause de la confusion qu’il y a eue dans cette maison ce matin, je n’ai pu écrire au moment où j’avais la vision [1]. Par conséquent, maintenant qu’il est 18 h, je peux simplement dire ce que j’ai compris et entendu : Judas convalescent revient auprès de Jésus, qui est à Gethsémani, en compagnie de Marie qui l’a soigné et de Jeanne, qui insiste pour que les femmes et le convalescent repartent en Galilée en char. Jésus accepte et fait monter aussi l’enfant avec elles. En revanche, Jeanne et Elise restent quelques jours à Jérusalem, puis Elise rentrera à Bet-çur et Jeanne à Béther.

      Je me souviens qu’Elise a dit :

      « Désormais, j’ai le courage d’y retourner parce que ma vie n’est plus sans but. Je te ferai aimer par mes amis. »

      Et je me souviens que Jeanne a ajouté :

      « J’en ferai autant sur mes terres, tant que Kouza me laisse ici. Ce sera encore te servir, même si je préfèrerais te suivre. »

      Je me souviens enfin que Judas disait ne pas avoir éprouvé le désir de la présence de sa mère même aux pires heures de sa maladie parce que, disait-il, “ ta Mère a été une vraie mère pour moi, douce et aimante, et jamais je ne l’oublierai ”.

      Le reste est confus (du moins les paroles) ; je n’en rapporte donc rien, car ce serait moi qui parlerais et non les personnages de la vision.  

[1] Maria Valtorta fait référence à cet incident dans Les Cahiers de 1945 à 1950.

[2] Sur la copie dactylographiée (par le Père Migliorini), Maria Valtorta note :        
"Ceci est à supprimer pour ne pas heurter ceux qui ne veulent pas de révélations … ou à laisser s’ils se décident un jour à permettre que l’œuvre soit imprimée dans son intégrité.


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 26 Fév - 14:02

228. Marziam est confié à Porphyrée.

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 228
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 89


Vision du mardi 24 juillet 1945.

Lundi 29 mai 28
En barque vers Bethsaïde

228.1 Jésus est sur le lac de Galilée avec ses apôtres. C’est le petit matin. Tous les apôtres sont là, car même Judas est de la compagnie, parfaitement guéri [1], le visage adouci par la souffrance passée et les soins qu’on lui a procurés. Il y a aussi Marziam, un peu ému de se trouver sur l’eau pour la première fois : il ne veut pas le montrer, mais, dès que ça tangue un peu fort, il s’agrippe d’un bras au cou de la brebis [2], qui partage sa peur en bêlant lamentablement ; de l’autre bras, il attrape ce qu’il peut, le mât, un siège, une rame, ou même la jambe de Pierre, d’André ou des marins qui passent pour manœuvrer, et il ferme les yeux, comme s’il se croyait arrivé à sa dernière heure.

De temps en temps, Pierre lui donne une petite tape sur les joues en disant :

« Tu n’as pas peur, hein ? Un disciple ne doit jamais avoir peur. »

L’enfant fait signe de la tête que non, mais, comme le vent se renforce et que l’eau est de plus en plus agitée au fur et à mesure qu’ils se rapprochent de l’embouchure du Jourdain dans le lac, il se raidit davantage et ferme plus souvent les yeux. A un moment où la barque se penche de façon imprévue sous une vague qui la prend de côté, il pousse un cri de terreur.

Certains rient, d’autres raillent Pierre d’être devenu le père d’un garçon qui n’a pas le pied marin, d’autres encore taquinent Marziam, qui dit toujours qu’il veut parcourir terres et mers pour annoncer Jésus, mais a peur de faire quelques stades sur un lac. Mais Marziam se défend :

« Chacun a peur de ce qu’il ne connaît pas. Moi de l’eau, Judas de la mort… »

228.2 Je comprends que Judas doit avoir eu bien peur de mourir, et je m’étonne que, au lieu de réagir à cette observation, il réponde d’un air las et triste :

« Tu as raison. On a peur de ce qu’on ne connaît pas. Mais nous sommes maintenant sur le point d’arriver. Bethsaïde n’est plus qu’à quelques stades, et tu es sûr d’y trouver de l’amour. Comme je voudrais être proche de la Maison du Père et être sûr d’y trouver de l’amour !

– Tu n’as pas confiance en Dieu ? s’étonne André.

– Si. C’est en moi que je n’ai pas confiance. Pendant ces jours de maladie, entouré de tant de femmes pures et bonnes, je me suis senti si petit spirituellement ! Comme j’ai réfléchi ! Je me disais : “ Si elles s’efforcent de devenir toujours meilleures et d’acquérir le Ciel, que ne dois-je pas faire, moi ? ” Parce que, elles qui me paraissent toutes déjà saintes, elles se sentent encore pécheresses. Et moi ?… Y arriverai-je un jour, Maître ?

– Avec de la bonne volonté, tout est possible.

– Mais ma volonté est très imparfaite.

– L’aide de Dieu lui procure ce qui lui manque pour la compléter. Ton humilité présente est due à la maladie. Tu vois donc que le bon Dieu a pourvu, par un incident pénible, à te donner quelque chose que tu n’avais pas.

– C’est vrai, Maître. Mais quelles femmes ! Quelles parfaites disciples ! Je ne parle pas même de ta mère – on le sait déjà – mais des autres : elles nous ont vraiment surpassés ! J’ai été une des premières épreuves de leur futur ministère. Crois-moi, Maître, tu peux te reposer sur elles en toute sécurité ! Elise et moi étions soignés par elles : Elise est rentrée à Bet-çur avec une âme renouvelée, quant à moi… j’espère qu’il en ira de même, maintenant qu’elles ont refaçonnée la mienne »

Judas, encore affaibli, pleure.

Jésus, qui est assis près de lui, lui pose une main sur la tête en faisant signe aux autres de garder le silence. Mais Pierre et André sont fort occupés par les dernières manœuvres d’approche et ne parlent donc pas ; Simon le Zélote, Matthieu, Philippe et Marziam n’essaient sûrement pas de le faire, les premiers par prudence naturelle, le dernier parce qu’il est distrait par l’impatience d’être arrivé.

228.3 La barque remonte le cours du Jourdain et s’arrête peu après sur la rive. Les marins descendent l’amarrer par un filin à un rocher, puis ils installent une planche qui servira de passerelle. Pierre enfile son vêtement long, ainsi qu’André. La seconde barque fait la même manœuvre et les autres apôtres en descendent. Jésus et Judas descendent aussi, tandis que Pierre passe à l’enfant son petit vêtement et l’ajuste pour qu’il soit présentable à sa femme. Les voilà tous à terre, y compris les brebis.

« Maintenant, allons-y », dit Pierre.

Il est vraiment ému.

Il donne la main à l’enfant qui, à son tour, est pris par l’émotion au point d’oublier les brebis dont Jean s’occupe. Un sentiment inattendu de peur le pousse à demander :

« Mais voudra-t-elle de moi ? Est-ce qu’elle va m’aimer ? »

Pierre le rassure, mais sa peur doit être contagieuse, car il dit à Jésus :

« Dis-le-lui, toi, Maître, à Porphyrée. Moi, j’ai peur de ne pas savoir lui parler comme il faut. »

Jésus sourit, mais promet de s’en charger.

228.4 Ils ont vite fait d’atteindre la maison en longeant la grève. Par la porte ouverte, on entend que Porphyrée vaque à ses occupations domestiques.

« Paix à toi ! Dit Jésus en arrivant à la porte de la cuisine où la femme est en train de ranger la vaisselle.

– Maître ! Simon ! »

La femme court se prosterner aux pieds de Jésus, puis à ceux de son mari. Son visage, s’il n’est pas beau, a un air de bonté. Puis elle se redresse et dit en rougissant :

« Il y a si longtemps que je vous attendais ! Vous allez tous bien ? Venez, venez ! Vous devez être fatigués…

– Non. Nous venons de Nazareth où nous avons passé quelques jours, et nous avons fait un autre séjour à Cana. A Tibériade, il y avait des barques. Tu vois que nous ne sommes pas fatigués. Nous avons un enfant avec nous, et Judas est affaibli à la suite d’une maladie.

– Un enfant ? Un disciple si petit ?

– Un orphelin que nous avons recueilli en chemin.

– Oh, mon chéri ! Viens, mon trésor, que je t’embrasse ! »

L’enfant qui, par crainte, s’était à moitié dissimulé derrière Jésus, se laisse prendre par la femme qui s’est agenouillée comme pour se mettre à sa hauteur, et il se laisse embrasser sans réticences.

« Et maintenant, vous l’emmenez partout avec vous, alors qu’il est si petit ? Il va se fatiguer… »

La femme est tout apitoyée. Elle serre l’enfant dans ses bras et garde sa joue tout contre celle de l’enfant.

« En réalité, j’avais une autre idée : je pensais le confier à une disciple quand nous partons loin de Galilée, du lac…

– pourquoi pas à moi, Seigneur ? Je n’ai jamais eu d’enfant, mais des neveux, oui, et je sais m’occuper des enfants. Je suis la disciple qui ne sait pas parler, qui n’a pas une santé qui lui permette de te suivre comme le font les autres, qui… ah, tu le sais, je serai même lâche, si tu veux, mais tu sais dans quelles tenailles je suis prise. J’ai dit des tenailles ? Non, je me trouve entre deux cordages qui me tirent dans des directions opposées, et je n’ai pas le courage d’en rompre un. Permets-moi du moins de te servir un peu en devenant une mère-disciple pour cet enfant. Je lui apprendrai tout ce que les autres enseignent à des foules… Je lui apprendrai à t’aimer, toi… »

228.5 Jésus pose la main sur sa tête, sourit et dit :

« L’enfant a été amené ici parce que c’est là qu’il allait trouver une mère et un père. Voilà, faisons la famille. »

Jésus met alors la main de Marziam dans celles de Pierre – dont les yeux brillent –, et de Porphyrée.

« Et élevez-moi saintement cet innocent… »

Pierre, qui est déjà au courant, se borne à essuyer une larme du revers de la main, mais sa femme, qui ne s’y attendait pas, reste un instant muette de surprise ; de nouveau, elle s’agenouille et dit :

« Oh ! Mon Seigneur, tu m’as enlevé mon époux en me rendant, pour ainsi dire, veuve. Cette fois, tu me donnes un fils. Tu rends à ma vie toutes ses roses, non seulement celles que tu m’as prises, mais encore celles que je n’ai jamais eues. Béni sois-tu ! Cet enfant me sera plus cher que s’il était né de moi, car c’est de toi qu’il me vient. »

Et la femme baise le vêtement de Jésus, embrasse l’enfant, l’assied sur ses genoux… Elle est heureuse.

« Laissons-la à ses effusions, dit Jésus. Reste, toi aussi, Simon. Nous allons prêcher en ville. Nous reviendrons tard ce soir te demander nourriture et gîte. »

Et Jésus sort avec ses apôtres, laissant en paix la nouvelle famille…

Jean constate :

« Mon Seigneur, aujourd’hui Simon est heureux !

– Veux-tu toi aussi un enfant ?

– Non. Je voudrais seulement une paire d’ailes pour monter jusqu’aux portes du Ciel et apprendre le langage de la Lumière, pour le répéter aux hommes. »

Il sourit.

Ils parquent les brebis dans le fond du jardin, près du hangar des filets, leur donnent des feuilles, de l’herbe et de l’eau du puits, et partent vers le centre de la ville.

[1] Voir l'indication en EMV 226 qui se passe une semaine avant celui raconté ici.

[2] Il s'agit d'une des brebis échangées (cf. EMV 224) contre le bouc émissaire sauvé à Magdalgad (EMV 220).

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 27 Fév - 8:49

229. Discours aux habitants de Bethsaïde

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 90
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 229


Vision du mercredi 25 juillet 1945

Lundi 29 mai 28
Bethsaïde

229.1 Jésus va parler de la maison de Philippe ; beaucoup de monde s’est rassemblé devant, et Jésus se tient debout sur le seuil, où l’on accède par deux hautes marches.

La nouvelle de l’adoption par Pierre d’un enfant [1] venu avec pour toute fortune (bien maigre !) trois brebis [2] pour trouver cette grande richesse qu’est une famille s’est répandue à la vitesse de l’éclair. Tous ne parlent que de cela, chuchotent ou font des commentaires qui correspondent aux différentes mentalités.

Certains, en amis sincères de Simon et de Porphyrée, se réjouissent de leur bonheur. D’autres, malveillants, allèguent :

« Pour le faire accepter, il a dû le pourvoir d’une dot. »

D’autres encore disent avec bonté :

« Nous allons tous bien aimer cet enfant que Jésus aime. »

Certains lancent :

« La générosité de Simon ? Voyez-vous ça ! Il y trouve sûrement quelque profit, sinon… »

Il y a les avides :

« J’en aurais fait autant moi aussi, si on m’avait proposé un enfant avec trois brebis ! Trois, vous entendez ? C’est un petit troupeau ! Et elles sont belles : c’est la laine et le lait assurés, et plus tard les agneaux à vendre ou à garder. C’est une vraie richesse ! Et puis, l’enfant peut être utile, travailler… »

D’autres enfin haussent la voix :

« Ah, quelle honte ! Se faire payer une bonne action ? Simon n’y a sûrement pas même pensé ! Avec sa modeste richesse de pêcheur, nous l’avons toujours connu généreux envers les pauvres, en particulier les enfants. Maintenant qu’il n’a plus les rentrées de la pêche et que sa famille compte une personne de plus, il est juste qu’il gagne quelque chose d’une autre façon. »

229.2 Pendant que chacun fait ses commentaires, bienveillants ou acerbes, en tirant de son cœur ce qu’il a de bon ou de mauvais, Jésus, qui a tout écouté, parle maintenant avec un habitant de Capharnaüm [3]. Ce dernier l’a rejoint pour lui demander de venir au plus tôt, car la fille du chef de la synagogue [4] est à l’article de la mort. En outre, une dame, accompagnée d’une servante, est à sa recherche depuis quelques jours [5]. Jésus promet de venir le matin suivant, ce qui afflige les habitants de Bethsaïde, qui auraient bien voulu le garder plusieurs jours.

« Vous avez moins besoin de moi que d’autres. Laissez-moi partir. Du reste, je vais rester tout l’été en Galilée, et souvent à Capharnaüm. Il sera facile de nous voir. Là-bas, un père et une mère sont dans l’angoisse. Les secourir est faire preuve de charité. Vous approuvez la bonté de Simon envers l’orphelin, du moins ceux d’entre vous qui êtes bons. Mais seul le jugement des bons a de la valeur. Il ne faut pas écouter les jugements des autres, car ils sont toujours imprégnés de poison et de mensonge. Alors vous, les bons, vous devez approuver ma bonté d’aller soulager un père et une mère. Et gardez-vous de laisser stérile votre approbation, mais qu’elle vous incite à en faire autant.

229.3 Les pages de l’Ecriture nous rapportent tout le bien qui découle d’un acte bon. Rappelons-nous Tobit. Il a mérité que l’ange protège son petit Tobie [6] et lui montre comment rendre la vue à son père [7]. Mais de quelle charité le juste Tobit [8] n’avait-il pas fait preuve, sans aucune arrière-pensée de profit et malgré les reproches de sa femme [9] et les dangers qui menaçaient sa vie ! [10] Souvenez-vous des paroles de l’archange : “ C’est une bonne chose que la prière accompagnée du jeûne ; mieux vaut l’aumône que des montagnes d’or [11], car l’aumône délivre de la mort, purifie des péchés, fait trouver la miséricorde et la vie éternelle [12]… Quand tu priais dans les larmes et que tu ensevelissais les morts… c’est moi qui présentais tes prières au Seigneur. [13] ”

En vérité, je vous le dis, mon Simon surpassera de beaucoup les vertus du vieux Tobit. Il vous restera pour servir de tuteur à vos âmes dans ma Vie quand, moi, je serai parti. Il commence aujourd’hui à exercer sa paternité d’âme pour être demain le saint père de toutes les âmes qui me seront fidèles. Par conséquent, ne médisez pas. Mais s’il vous arrive un jour de trouver sur votre chemin un orphelin semblable à un oisillon tombé du nid, recueillez-le. Ce n’est pas la bouchée de pain partagée avec l’orphelin qui appauvrit la table des vrais enfants. Au contraire, elle apporte à cette maison les bénédictions de Dieu.

Faites-le, car Dieu est le Père des orphelins et c’est lui-même qui vous les présente afin que vous les aidiez en leur rendant leur nid détruit par la mort. Faites-le, car c’est ce qu’enseigne la Loi que Dieu a donnée à Moïse, qui est notre législateur [14] car, en terre ennemie et idolâtre, il a trouvé, pour venir en aide à sa faiblesse d’enfant, un cœur compatissant qui s’est penché sur lui pour le sauver de la mort en le tirant hors des eaux, à l’abri des persécutions [15] : en effet, Dieu l’avait destiné à être un jour le libérateur d’Israël [16]. Un acte de pitié a valu à Israël son chef.

Les répercussions d’un acte bon ressemblent aux ondes sonores qui se répandent très loin de leur lieu d’émission ou, si vous préférez, aux souffles de vent qui emportent très loin les semences enlevées aux terrains fertiles.

Maintenant, partez. Que la paix soit avec vous. »

229.4 – Jésus dit ensuite : "Vous mettrez ici la vision de la résurrection de la fille de Jaïre, reçue le 11 mars 1944".

[1] Marziam : voir le chapitre précédent.

[2] Il s'agit d'une des brebis échangées (cf. EMV 224) contre le bouc émissaire sauvé à Magdalgad (cf. EMV 220).

[3] Thomas de Capharnaüm, ainsi dénommé en EMV 231.1, EMV 237.5, EMV 355.1 et EMV 446.2.
"C'est l'homme qui lui a donné l'hospitalité à Capharnaüm", comme le précise la correction de Maria Valtorta sur une copie dactylographiée. C’est un intime de la famille de Jésus (comme on l'a vu en EMV 47.10 et en EMV 48.7), probablement un parent éloigné. Il a une femme, mais pas d'enfants (comme on le verra en EMV 449.4). À Capharnaüm, sa maison était considérée comme la maison de Jésus (Matthieu 4, 13).

[4] Miryam, la fille de Jaïre.

[5] Marthe de Béthanie et sa servante Marcelle.

[6] Tobie 5, 4 et Tobie 5, 7-9.

[7] Tobie 6, 3-9 et Tobie 11, 7-15.

[8] Tobie 1, 3 - 2, 8.

[9] Tobie 2,14.

[10] Tobie 1, 19-20.

[11] Tobie 12, 8.

[12] Tobie 12, 9.

[13] Tobie 12, 12.

[14] Deutéronome 10, 18 - Deutéronome 24, 17 - Deutéronome 27, 19.

[15] Exode 2, 1-10.

[16] Exode 3, 1-12.

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 28 Fév - 10:25

230. Guérison de l’hémorroïsse et résurrection de la fille de Jaïre

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 91.
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 230


Vision du samedi 11 mars 1944

Lundi 29 mai 28
Capharnaüm

   230.1 J’ai eu cette vision alors que j’étais extrêmement fatiguée, tourmentée, et par conséquent dans les pires conditions pour penser de moi-même à de pareilles choses. Mais mon épuisement physique, mental et mes soucis se sont dissipés dès l’apparition de mon Jésus, et j’écris.

      Il marche sur une route ensoleillée et poussiéreuse qui longe la rive du lac. Il se dirige vers le village, entouré d’une grande foule qui l’attendait sûrement et qui se presse autour de lui bien que les apôtres jouent des bras et des épaules pour lui frayer le chemin et haussent la voix pour amener la foule à lui faire place.

      Mais Jésus ne s’inquiète pas de cette bousculade. Comme il dépasse d’une tête la foule qui l’entoure, il regarde avec un doux sourire tous ces gens qui se pressent contre lui, il répond aux sourires, donne une caresse à quelque enfant qui réussit à se faufiler dans la masse des adultes et parvient à s’approcher de lui, pose la main sur la tête des bébés que les mères soulèvent au-dessus de la tête des gens afin qu’il les touche. Il marche en même temps, lentement, patiemment, au milieu de ce vacarme et de ces continuelles bousculades qui importuneraient tout autre que lui.

      230.2 Une voix masculine crie : « Place ! Place ! » C’est une voix angoissée et que beaucoup doivent connaître et respecter comme celle d’un personnage influent, car la foule, qui s’écarte très difficilement tant elle est compacte, laisse passer un homme d’une cinquantaine d’années, vêtu d’un vêtement long et flou, la tête couverte d’une espèce de foulard blanc dont les pans retombent le long du visage et du cou.

      Arrivé devant Jésus, il se prosterne à ses pieds :

      «Ah ! Maître, pourquoi as-tu été si longtemps absent ? [1] Ma fillette est très malade. Personne n’arrive à la guérir. Toi seul, tu es mon espoir et celui de sa mère. Viens, Maître. Je t’ai attendu avec une immense angoisse. Viens, viens immédiatement ! Mon unique enfant est à l’article de la mort… »

      Il pleure. Jésus pose la main sur la tête de l’homme, en larmes, sur sa tête inclinée que secouent des sanglots, et il lui répond :

      « Ne pleure pas. Aie foi. Ta fille va vivre. Allons auprès d’elle. Lève-toi ! Allons ! »

      Ces deux derniers mots sont dits sur un ton impérieux. Au début, il était le Consolateur, maintenant c’est le Dominateur qui parle.

      Ils se remettent en marche. Jésus tient par la main le père en pleurs, à ses côtés. Lorsqu’un sanglot plus fort secoue le pauvre homme, je vois Jésus le regarder et lui serrer la main. Il ne fait rien d’autre, mais quelle force doit affluer dans une âme quand elle se sent ainsi traitée par Jésus !

      Auparavant, c’est Jacques qui occupait la place du pauvre père, mais Jésus lui a fait céder sa place. Pierre est de l’autre côté. Jean est auprès de Pierre et, avec lui, il tente de faire barrage à la foule ; Jacques et Judas, de l’autre côté, en font autant auprès du père qui pleure. Les autres apôtres sont les uns devant Jésus, les autres derrière. Mais il en faudrait plus ! Les trois de derrière, en particulier, au nombre desquels je vois Matthieu, n’arrivent pas à retenir cette muraille vivante. Mais quand ils vitupèrent trop fort et, pour un peu, insulteraient la foule indiscrète, Jésus tourne la tête et dit doucement :

      « Laissez faire ces petits, ils sont à moi !… »

      230.3 A un certain moment, cependant, il se retourne brusquement, lâche la main du père et s’arrête. Il ne se contente pas de tourner la tête, il se retourne complètement. Il paraît même encore plus grand, car il a pris une attitude solennelle. Son visage, son regard sont devenus graves, inquisiteurs. Il scrute la foule. Ses yeux lancent des éclairs, non pas de dureté, mais de majesté.

      « Qui m’a touché ? » demande-t-il.

      Personne ne répond.

      « Je répète : qui m’a touché ? insiste-t-il.

      – Maître, répondent les disciples, tu ne vois pas comme la foule te presse de tous côtés ? Tout le monde te touche, malgré nos efforts.

      – Je demande qui m’a touché pour obtenir un miracle. J’ai senti une puissance de miracle sortir de moi car un cœur l’a invoqué avec foi. Quel est ce cœur ? »

      Pendant qu’il parle, les yeux de Jésus tombent deux ou trois fois sur une petite femme d’une quarantaine d’années, vêtue fort pauvrement et très ridée, qui cherche à s’éclipser dans la cohue, à se faire avaler par la foule. Ces yeux doivent la brûler. Elle comprend qu’elle ne peut fuir, revient en avant et se jette à ses pieds, le visage presque à mordre la poussière, les mains tendues sans toutefois oser toucher Jésus.

      « Pardon ! C’est moi. J’étais malade. Cela fait douze ans que je suis malade. Tout le monde me fuyait. Mon mari m’a abandonnée. J’ai dépensé tout ce que j’avais pour ne pas être considérée comme déshonorée, pour vivre comme tout le monde. Mais personne n’a pu me guérir. Tu vois, Maître ? Je suis vieille avant l’âge. Ma force s’en est allée avec ce flux inguérissable, et ma paix avec elle. On m’a dit que tu étais bon. Celui qui me l’a dit a été guéri par toi de la lèpre [2]. Comme tous l’ont fui des années durant, il n’a pas éprouvé de répulsion pour moi. Je n’ai pas osé le dire avant. Pardon ! J’ai pensé que, si seulement j’arrivais à te toucher, je serais guérie. Mais je ne t’ai pas rendu impur [3]. J’ai à peine effleuré le bord de ton vêtement là où il traîne sur le sol, sur les ordures du sol… Mais je suis guérie, sois béni ! Au moment même où j’ai touché ton vêtement, mon mal a cessé. Je suis redevenue comme toutes les femmes. Je ne serai plus jamais évitée par tout le monde. Mon mari, mes enfants, mes parents pourront rester avec moi, je pourrai les caresser. Je serai utile dans ma maison. Merci, Jésus, bon Maître. Sois béni éternellement ! »

      Jésus la regarde avec une bonté infinie. Il lui sourit. Il lui dit :

      « Va en paix, ma fille. Ta foi t’a sauvée. Sois guérie pour toujours. Sois bonne et heureuse. Va ! »

      230.4 Il parle encore quand survient un homme – à mon avis, un serviteur –, qui s’adresse au père. Pendant tout ce temps, ce dernier a gardé une attitude respectueuse mais tourmentée, comme s’il était sur des charbons ardents.

      « Ta fille est morte. Inutile d’importuner davantage le Maître. Elle a rendu l’esprit et déjà les femmes chantent les lamentations. Sa mère m’envoie t’en avertir ; elle te prie de venir sur-le-champ. »

      Le pauvre père pousse un gémissement. Il porte ses mains à son front et le serre en se comprimant les yeux et en se courbant comme s’il avait reçu un coup.

      Jésus, qui paraît ne rien voir et ne rien entendre, attentif comme il l’est à écouter la femme et à lui répondre, se retourne pourtant et pose la main sur les épaules courbées du pauvre père.

      « Homme, je te l’ai dit : aie foi. Ne crains rien. Ta fillette va vivre. Allons auprès d’elle. »

      Et il se met en route en gardant étroitement serré contre lui l’homme anéanti.

      Devant cette douleur et le miracle qui vient de survenir, la foule, intimidée, s’arrête, s’écarte, laisse Jésus et ses apôtres se faufiler, puis, tel un sillage, suit la Grâce qui passe.

      Ils parcourent ainsi une centaine de mètres, peut-être plus – j’ai du mal à calculer –, et pénètrent toujours plus au centre du village.

      230.5 Il y a un grand rassemblement devant une maison de belle apparence ; les gens commentent l’événement à voix haute et sonore, répondant par des cris puissants à des cris plus élevés provenant de la porte ouverte. Ce sont des cris perçants, aigus, sur une note fixe et qui semblent être dirigés par une voix plus stridente qui s’élève toute seule et à laquelle répondent d’abord un groupe de voix plus faibles, puis un autre chœur de voix plus pleines. Cela fait un vacarme à faire mourir les gens en bonne santé !

      Jésus ordonne à ses disciples de rester devant la porte, et il appelle Pierre, Jean et Jacques pour l’accompagner. Il entre avec eux à l’intérieur de la maison, sans cesser de tenir par un bras le père en larmes contre lui. Il semble vouloir lui infuser par cette étreinte la certitude qu’il est là pour le rendre heureux.

      A la vue du chef de famille et du Maître, les… pleureuses – j’aurais plutôt envie de dire les “ hurleuses ” – redoublent leurs cris. Elles battent des mains, font résonner des tambourins, agitent des triangles et accompagnent leurs lamentations de cette… musique.

      « Taisez-vous, intervient Jésus. Il ne faut pas pleurer. La fillette n’est pas morte, elle dort. »

      Les femmes crient d’autant plus fort, certaines se roulent par terre, s’arrachent les cheveux (ou plutôt : elles font semblant) pour bien montrer qu’elle est vraiment morte. Les musiciens et les amis secouent la tête devant les illusions de Jésus. Ils croient qu’il divague.

      Mais Jésus répète un “ Taisez-vous ! ” tellement énergique que le vacarme, sans cesser totalement, devient bourdonnement. Et il s’avance.

      230.6 Il entre dans une petite chambre. Sur le lit repose une fil­lette, morte. Maigre, extrêmement pâle, elle gît, déjà habillée, ses cheveux bruns soigneusement coiffés. Sa mère pleure auprès du petit lit, du côté droit, et embrasse la main couleur de cire de la morte.

      Quant à Jésus… comme il est beau en ce moment ! Comme je l’ai rarement vu ! Il s’approche avec empressement. On dirait qu’il glisse sur le sol, qu’il vole, tant il se hâte vers ce petit lit. Les trois apôtres restent contre la porte qu’ils ferment au nez des curieux. Le père s’arrête au pied du lit.

      Jésus passe à gauche du lit, tend la main gauche et saisit la petite main sans résistance de la morte. La main gauche. J’ai bien vu. C’est la main gauche de Jésus et la main gauche de la petite fille. Il lève le bras droit en amenant sa main ouverte à hauteur de ses épaules, puis l’abaisse comme on le fait pour jurer ou commander. Il dit :

      « Fillette, je te le dis : lève-toi ! » [4]

      Il se passe un instant pendant lequel tous, excepté Jésus et la morte, restent en arrêt. Les apôtres tendent le cou pour mieux voir. Les parents regardent leur enfant d’un air torturé. Juste un instant. Puis un soupir soulève la poitrine de la petite morte. Quelques couleurs reviennent sur le visage de cire et en estom­pent la teinte livide de la mort. Un sourire se dessine sur les lèvres pâles encore avant que ses yeux ne s’ouvrent, comme si la fillette faisait un beau rêve. Jésus tient toujours sa main dans la sienne. L’enfant ouvre doucement les yeux et regarde tout autour d’elle comme si elle venait de se réveiller. Elle voit d’abord le visage de Jésus qui la fixe de ses yeux splendides et qui lui sourit avec une bonté encourageante, et elle répond à son sourire.

      « Lève-toi », répète Jésus.

      Il écarte de la main les préparatifs funèbres éparpillés sur le lit et sur les côtés (fleurs, voiles et tout le reste) et, l’aidant à descendre, il lui fait faire ses premiers pas sans cesser de la tenir par la main.

      « Maintenant, donnez-lui à manger, ordonne-t-il. La voilà guérie. Dieu vous l’a rendue. Remerciez-le et ne parlez à per­sonne de ce qui vient de se passer. Vous, vous savez ce qui lui est arrivé, vous avez cru et vous avez mérité ce miracle. Les autres n’ont pas eu foi. Il est inutile d’essayer de les convaincre. Dieu ne se manifeste pas à ceux qui nient le miracle. Quant à toi, petite fille, sois bonne. Adieu. Paix à cette maison. »

      Il sort et referme la porte derrière lui. La vision cesse.

      230.7 Je vous dirai que les deux moments qui m’ont particulièrement réjouie ont été ceux où Jésus cherche dans la foule qui l’a touché, et surtout quand, debout à côté de la petite morte, il lui prend la main et lui ordonne de se lever. J’ai été pénétrée de paix et d’un sentiment de sécurité. Il n’est pas possible que quelqu’un qui fait preuve de compassion comme lui et qui est puissant ne puisse avoir pitié de nous et vaincre le Mal qui nous donne la mort.

      Pour le moment, Jésus ne fait pas de commentaires, de même qu’il ne dit rien sur d’autres sujets. Il me voit quasiment morte et ne juge pas opportun que j’aille mieux ce soir. Qu’il en soit fait comme il le veut. Je suis déjà suffisamment heureuse de garder en moi cette vision.


[1] Jésus est parti depuis début mars, soit 3 à 4 mois.

[2] Abel de Corozaïn.

[3] Je ne t’ai pas rendu impur : selon le Lévitique 15, 19 et 25.

[4] "Talitha koum". La fillette décrit sa résurrection au EMV 266.
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Dim 1 Mar - 11:06

231. Marthe parle avec Jésus

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 92
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 231


Vision du vendredi 27 juillet 1945

Lundi 29 mai 28
Capharnaüm

231.1 En sueur et couvert de poussière, Jésus rentre dans la maison de Capharnaüm avec Pierre et Jean.

A peine a-t-il mis le pied dans le jardin en direction de la cuisine, que le maître de maison l’appelle familièrement :

« Jésus, cette dame dont je t’ai parlé à Bethsaïde est revenue. Elle vient te chercher. Je lui ai dit de t’attendre et je l’ai conduite là-haut, dans la chambre haute.

– Merci, Thomas, j’y vais tout de suite. S’il vient d’autres personnes, fais-les attendre ici. »

Jésus monte lestement l’escalier sans même enlever son manteau. Sur la terrasse où aboutit l’escalier se trouve Marcelle, la servante de Marthe, immobile.

« Oh ! Notre Maître ! Ma maîtresse est là, à l’intérieur. Elle t’attend depuis tant de jours ! Dit la femme en s’agenouillant pour vénérer Jésus.

– Je le savais. Je vais tout de suite la trouver. Que Dieu te bénisse, Marcelle. »

Jésus lève le rideau qui protège contre la lumière encore violente bien que le crépuscule très avancé enflamme l’air et pa­raisse embraser les maisons blanches de Capharnaüm par la réverbération rouge d’un énorme brasier. Dans la pièce, toute voilée et enveloppée de son manteau, assise près d’une fenêtre, se tient Marthe. Peut-être regarde-t-elle une anse du lac où plonge une avancée d’une colline boisée. Peut-être est-elle seulement perdue dans ses pensées. Elle est sûrement très absorbée, au point qu’elle n’entend pas le léger bruit des pas de Jésus qui s’approche. Et elle sursaute quand il l’appelle.

« Oh ! Maître ! » s’écrie-t-elle ; et elle se jette à genoux, les bras tendus comme pour demander de l’aide, puis elle se penche jusqu’à toucher du front le sol, et elle pleure.

231.2 « Mais pourquoi ? Allons, relève-toi ! Pourquoi ce grand chagrin ? As-tu quelque malheur à m’annoncer ? Oui ? Quoi donc ? Je suis allé à Béthanie, tu le sais ? Oui ? Et j’y ai appris de bonnes nouvelles. Maintenant tu pleures… Qu’est-ce qui est arrivé ? »

Il la force à s’asseoir sur le siège placé contre le mur et s’assied en face d’elle.

« Allons, ôte ton voile et ton manteau, comme je le fais. Tu dois étouffer là-dessous. Et puis je veux voir le visage de cette Marthe troublée pour chasser tous les nuages qui l’assom­brissent. »

Marthe obéit, toujours en larmes, et l’on voit son visage rougi, aux yeux enflés.

« Et alors ? Je vais t’aider. Marie t’a fait appeler. Elle a beaucoup pleuré, elle a voulu en apprendre beaucoup sur moi, et tu as pensé que c’était bon signe, au point que tu as désiré que je vienne accomplir le miracle. Et moi, je suis venu. Alors, maintenant ?…

– Maintenant, plus rien, Maître ! Je me suis trompée. C’est un trop vif espoir qui fait voir ce qui n’est pas… Je t’ai fait venir pour rien… Marie est pire qu’auparavant… Non ! Que dis-je ? C’est une calomnie, je mens. Elle n’est pas pire car elle ne veut plus d’hommes autour d’elle. Elle est différente, mais elle est toujours mauvaise. Elle me semble folle… Je ne la comprends plus. Auparavant, au moins, je la comprenais. Mais maintenant ! Qui peut la comprendre, maintenant ? »

Marthe pleure d’un air désolé.

« Allons, calme-toi et dis-moi ce qu’elle fait. Pourquoi est-elle mauvaise ? Si elle ne veut plus d’hommes autour d’elle, je suppose qu’elle vit retirée dans sa maison. Est-ce bien cela ? Oui ? C’est bien, c’est très bien. Elle a désiré ta présence auprès d’elle, comme pour se défendre de la tentation – je reprends tes propres mots – en empêchant les relations coupables, ou même simplement ce qui pourrait y conduire : c’est un signe de bonne volonté.

– Tu l’affirmes, Maître ? Crois-tu vraiment qu’il en est bien ainsi ?

– Mais bien sûr ! En quoi te semble-t-elle donc mauvaise ? 231.3 Raconte-moi ce qu’elle fait…

– Voilà. »

Marthe, un peu plus rassurée par la certitude de Jésus, parle avec plus d’ordre.

« Voilà. Depuis mon arrivée, Marie n’est plus sortie de la maison et du jardin, pas même pour aller en barque sur le lac. Et sa nourrice m’a dit que, même auparavant, elle ne sortait pour ainsi dire plus. C’est depuis la Pâque qu’elle semble avoir commencé à changer. Cependant, avant ma venue, des personnes venaient encore la voir, et elle ne les renvoyait pas toujours. Parfois, elle donnait l’ordre de ne laisser entrer personne et cela paraissait un ordre qui devait durer. Puis elle en venait à frapper ses serviteurs, prise d’une injuste colère lorsque, accourant au vestibule parce qu’elle avait entendu les voix des visiteurs, elle voyait qu’ils étaient déjà partis. Depuis mon arrivée, elle ne l’a plus fait. Elle m’a dit la première nuit – et c’est pour cela que j’ai tant espéré – : “ Retiens-moi, attache-moi, mais ne me laisse plus sortir, pour que je ne voie personne d’autre que toi et la nourrice. Car je suis une malade et je veux guérir. Mais ceux qui viennent chez moi, ou qui veulent que je me rende chez eux, sont comme des marais qui donnent la fièvre. Ils me rendent de plus en plus malade. Mais ils sont si beaux, en apparence, ils sont si pleins de fleurs et de chansons, avec des fruits d’aspect agréable, que je ne sais résister, car je suis une malheureuse, je suis une malheureuse. Ta sœur est faible, Marthe. Et il y en a qui profitent de ma faiblesse pour me faire commettre des choses infâmes auxquelles une part de moi-même ne consent pas. C’est quelque chose qui me reste de maman, de ma pauvre maman… ” ; et elle pleurait, elle pleurait…

Je me suis donc comportée comme elle le voulait : avec douceur aux heures où elle est plus raisonnable, avec fermeté aux heures où elle me fait penser à un fauve en cage. Elle ne s’est jamais révoltée contre moi. Et même, une fois passés les moments de plus grande tentation, elle vient pleurer à mes pieds, la tête sur mes genoux, et me dit : “ Pardonne-moi ! Pardonne-moi ! ” Et si je lui demande : “ Et de quoi, ma sœur ? Tu ne m’as pas fait souffrir ”, elle me répond : “ Parce que, tout à l’heure, ou hier soir, quand tu m’as dit : ‘ Tu ne sortiras pas d’ici ’, moi, dans mon cœur, je t’ai haïe, maudite et j’ai désiré ta mort. ”

Elle ne te fait pas de la peine, Seigneur ? Mais elle est donc folle ? Son vice l’a rendue folle ? Je pense qu’un amant a dû lui donner un philtre pour s’en faire une esclave de luxure et que cela lui est monté à la tête…

231.4 – Non, il n’y a ni philtre ni folie. C’est autre chose, mais continue.

– Donc, avec moi, elle est respectueuse et obéissante. Les serviteurs aussi, elle ne les a plus maltraités. Pourtant, après le premier soir, elle n’a plus posé aucune question à ton sujet. Même si je parle de toi, elle détourne la conversation, quitte ensuite à rester des heures et des heures sur le rocher où se trouve le belvédère à regarder le lac, jusqu’à en être éblouie et à me demander, à chaque barque qu’elle voit passer : “ Tu crois que c’est celle des pêcheurs galiléens ? ” Elle ne prononce jamais ton nom ni celui des apôtres, mais je sais qu’elle pense à eux et à toi dans la barque de Pierre. Et je comprends aussi qu’elle pense à toi parce que parfois, le soir, quand nous nous promenons dans le jardin ou quand nous attendons l’heure du repos, moi en cousant, elle les bras croisés, elle me dit : “ C’est donc ainsi qu’il faut vivre d’après la doctrine que tu suis ? ” Et parfois elle pleure, d’autres fois elle part d’un rire sarcastique de folle ou de démoniaque.

D’autres fois encore, elle se détache les cheveux, toujours si artistiquement coiffés, elle en fait deux nattes et enfile un de mes vêtements, puis elle vient se mettre devant moi avec les tresses qui retombent sur les épaules ou ramenées par-devant, avec un col montant, pudique, ressemblant à une fillette avec son habit, sa coiffure et l’expression de son visage, et elle dit encore : “ C’est donc ainsi que devrait devenir Marie ? ” Parfois aussi elle pleure en embrassant ses deux nattes magnifiques, grosses comme le bras et qui tombent jusqu’aux genoux, tout cet or éclatant qui était la gloire de ma mère. A d’autres moments, au contraire, elle pousse cet horrible éclat de rire ou bien elle me dit : “ Mais regarde, voici plutôt ce que je fais, et je quitte le monde ” et elle noue ses tresses autour du cou et les serre jusqu’à en devenir violette comme si elle voulait s’étrangler. D’autres fois encore, on comprend qu’elle sent plus fortement sa… sa chair, alors elle se plaint ou se fait mal. Je l’ai trouvée qui se frappait férocement le sein, la poitrine et se griffait le visage, qui se frappait la tête contre le mur et, si je lui demandais : “ Mais pourquoi fais-tu cela ? ” elle se tournait vers moi, bouleversée, l’air féroce, en me disant : “ Pour me rompre les entrailles et la tête. Les choses nuisibles, maudites, il faut les détruire. Je me détruis. ”

Et, si je parle de la miséricorde divine, de toi – car je parle quand même de toi comme si elle était la plus fidèle de tes disciples, et je te jure que j’ai parfois du dégoût à parler ainsi devant elle –, elle me répond : “ Pour moi, il ne peut y avoir de miséricorde, j’ai dépassé les bornes. ” Elle est prise alors d’une furie de désespoir, elle crie en se frappant jusqu’au sang : “ Mais pourquoi ? Pourquoi ai-je ce monstre qui me déchire, qui ne laisse aucune paix, qui me porte au mal par une voix ensorcelante ? Et il vient s’y unir des voix qui me maudissent, celle de notre père, de maman, les vôtres, parce que toi aussi, et Lazare, vous me maudissez, et Israël me maudit ; ces voix me font devenir folle… ”

Quand elle dit de telles choses, je réponds : “ Pourquoi penses-tu à Israël, qui n’est qu’un peuple, au lieu de penser à Dieu ? Mais puisque tu n’as pas pensé plus tôt à tout fouler aux pieds, pense maintenant à passer par dessus tout et à te soucier d’autre chose que du monde, c’est-à-dire de Dieu, de notre père, de notre mère. Ils ne te maudissent pas si tu changes de vie, mais ils t’ouvrent leurs bras… ” Elle m’écoute alors, songeuse, aussi étonnée que si je lui racontais quelque fable irréelle, et elle pleure… Mais elle ne répond rien. Parfois, au contraire, elle ordonne aux serviteurs de lui apporter des vins et des drogues, elle boit et mange tous ces produits, et elle explique : “ C’est pour ne pas penser. ”

Désormais, depuis qu’elle sait que tu es sur le lac, elle me dit toutes les fois qu’elle s’aperçoit que je viens te trouver : “ Un jour ou l’autre, je viendrai, moi aussi ” et, avec ce rire qui est une insulte pour elle-même, elle achève : “ Ainsi, au moins, le regard de Dieu tombera aussi sur le fumier. ” Mais je ne veux pas qu’elle vienne. Et maintenant, j’attends pour venir que, lassée par la colère, le vin, les larmes, par tout, elle s’endorme d’épuisement. Aujourd’hui encore, je suis partie ainsi de façon à revenir de nuit, avant qu’elle ne se réveille. Voilà ma vie… et maintenant, je n’espère plus… »

Ses pleurs, que n’arrête plus l’effort de tout dire avec ordre, redoublent.

231.5 « Te souviens-tu, Marthe, de ce que je t’ai dit une fois ? “ Marie est une malade. ” Tu ne voulais pas le croire. Maintenant, tu le vois… Tu la prétends folle, elle-même se croit malade de fièvres qui la poussent au péché. Moi, je dis : elle souffre d’une possession démoniaque [1]. C’est toujours une maladie. Ces incohérences, ces furies, ces pleurs, ces désolations, ces élans vers moi, ce sont les phases de son mal qui, arrivé au moment de la guérison, connaît les crises les plus violentes. Tu fais bien d’être bonne avec elle, tu fais bien d’être patiente, tu fais bien de lui parler de moi ! N’éprouve pas de dégoût à prononcer mon nom en sa présence. Pauvre âme de ma Marie ! Et pourtant elle est sortie des mains du Créateur, pas différente des autres, de la tienne, de celle de Lazare, de celles des apôtres et des disciples. Elle aussi, je la compte et je la vois parmi les âmes pour lesquelles je me suis fait chair afin d’être Rédempteur. C’est même pour elle que je suis venu, plus que pour toi, Lazare, les apôtres ou les disciples. Pauvre chère âme de ma Marie qui souffre ! De ma Marie empoisonnée par sept poisons [2] en plus du poison originel et universel ! De ma Marie prisonnière ! Mais laisse-la venir à moi ! Laisse-la respirer ma respiration, entendre ma voix, rencontrer mon regard !… Elle se qualifie de : “ Fumier ”… Ah, pauvre chère âme ! Des sept démons qu’elle a en elle, le moins fort est celui de l’orgueil ! Mais, rien que pour cette raison, elle se sauvera !

231.6 – Mais si en sortant elle trouve quelqu’un qui la ramène au vice ? Elle-même le redoute…

– Et elle le redoutera toujours, maintenant qu’elle en est arrivée à avoir la nausée du vice. Mais n’aie pas peur. Lorsqu’une âme a déjà le désir de venir au bien, qu’elle n’est plus retenue que par l’Ennemi diabolique qui sait qu’il va perdre sa proie, et par l’ennemi personnel du “moi” qui raisonne encore de façon humaine et se juge lui-même de façon humaine, en appliquant à Dieu son jugement pour empêcher l’esprit de dominer le “moi” humain, alors cette âme est déjà forte contre les assauts du vice et des vicieux. Elle a trouvé l’étoile Polaire et ne dévie plus.

Il ne faut plus lui dire non plus : “ Tu n’as pas pensé à Dieu, mais tu penses à Israël ? ” C’est un reproche implicite. Il ne faut pas le faire. Elle sort des flammes, elle n’est que plaies. Il ne faut l’effleurer qu’avec les baumes de la douceur, du pardon, de l’espérance…

Laisse-la libre de venir. Tu dois même lui dire quand tu comptes venir, mais sans ajouter : “ Viens avec moi. ” Et même si tu arrives à comprendre qu’elle vient, toi, ne viens pas. Reviens, attends-la à la maison. Elle te viendra, frappée par la Miséricorde. Car c’est moi qui dois lui enlever la force mauvaise qui maintenant la possède et, pendant un certain temps, elle sera comme saignée à blanc, comme une personne à laquelle le médecin a enlevé les os. Mais ensuite, elle ira mieux. Elle en sera stupéfaite.

Elle aura un grand besoin de caresses et de silence. Assiste-la comme si tu étais pour elle un second ange gardien, sans te faire entendre. Si tu la vois pleurer, laisse-la pleurer. Si tu l’entends se poser des questions, laisse-la faire. Et si tu la vois sourire puis s’assombrir, et puis sourire d’un sourire qui n’est plus le même, le regard changé, le visage changé, ne lui pose pas de questions, ne la gêne pas. Elle souffre davantage maintenant pour remonter que lorsqu’elle est descendue. Et elle doit agir par elle-même, comme elle a agi par elle-même lorsqu’elle est descendue. Elle n’a pas supporté vos regards quand vous la voyiez descendre, parce que dans vos yeux il y avait un reproche. Mais maintenant elle ne peut, dans sa honte finalement réveillée, supporter votre regard. Auparavant, elle était plus forte, parce qu’elle avait en elle Satan qui était son maître, ainsi que la puissance mauvaise qui la conduisait, si bien qu’elle pouvait défier le monde ; elle n’a pas voulu que vous puissiez la voir dans son péché. Maintenant, elle n’a plus Satan pour maître. Il est encore son hôte, mais déjà, par sa volonté, Marie le tient à la gorge. Mais elle ne m’a pas encore, moi, et c’est pour cela qu’elle est trop faible. Elle ne peut même pas supporter la caresse de tes yeux fraternels pour son retour vers son Sauveur. Toute son énergie s’emploie et se dépense à serrer la gorge du septuple démon. Pour tout le reste, elle est sans défense, nue. Mais moi, je la revêtirai et la fortifierai.

231.7 Va en paix, Marthe. Demain, dis-lui avec douceur que je parlerai près du torrent de la Source, ici à Capharnaüm, après le crépuscule. Va en paix ! Va en paix ! Je te bénis. »

Marthe est encore perplexe.

« Ne tombe pas dans l’incrédulité, Marthe, lui dit Jésus qui l’observe.

– Non, Seigneur, mais je réfléchis… Ah, donne-moi quelque chose que je puisse transmettre à Marie pour lui rendre un peu de force… Elle souffre tant… et moi, j’ai si peur qu’elle ne réussisse pas à triompher du démon !

– Tu es une enfant ! Marie nous a, toi et moi. Peux-tu ne pas réussir ? Pourtant, viens et tiens. Donne-moi cette main qui n’a jamais péché, qui a su être douce, miséricordieuse, active, pieuse. Elle a toujours fait des gestes d’amour et de prière. Elle n’est jamais devenue paresseuse. Elle ne s’est jamais corrompue. Voilà, je la tiens dans les miennes pour la rendre plus sainte encore. Lève-la contre le démon, et il ne la supportera pas. Prends aussi cette ceinture qui m’appartient. Ne t’en sépare jamais, et chaque fois que tu la verras, dis-toi : “ Plus forte que cette ceinture de Jésus est la puissance de Jésus et grâce à elle on vient à bout de tout : démons et monstres. Je ne dois pas craindre. [3] ” Es-tu satisfaite, maintenant ? Que ma paix soit avec toi. Pars tranquille. »

Marthe le vénère et sort. Jésus sourit en la voyant reprendre sa place dans le char que Marcelle a fait venir à la porte, pour aller à Magdala.

[1] Cf. Luc 8,2 : "…des femmes qui avaient été guéries de maladies et d’esprits mauvais : Marie, appelée Madeleine, de laquelle étaient sortis sept démons"

[2] Ibid.

[3] Cette promesse est à rapprocher de la légende de la Tarasque, cette bête monstrueuse que sainte Marthe, alors exilée à Tarascon (Bouches-du-Rhône), captura en lui passant sa ceinture autour du cou. On sait que cette « tarasque » devait être en fait un crocodile marin échappé d’un convoi pour le cirque d’Arles, toute proche, alors cité romaine florissante. Le crocodile marin et la représentation de la tarasque évoquent des similitudes déformées par le temps.  


Observation - Une ceinture pour maîtriser la Tarasque

A Capharnaüm, Marthe se désespère des sautes d’humeur de sa sœur Marie-Madeleine. Elle demande à Jésus quelque chose pour l’aider à triompher du démon. « Prends cette ceinture qui m'appartient. Ne t'en sépare jamais, et chaque fois que tu la verras, dis-toi à toi-même : plus forte que cette ceinture de Jésus est la puissance de Jésus et avec elle on vient à bout de tout : démons et monstres. Je ne dois pas craindre » (EMV 231.7). Le mois suivant, Jésus et ses disciples approchent de Césarée Maritime. Marthe se trouve particulièrement apeurée par la présence de petits sauriens. « Moi, je mourrais de peur si je devais en approcher » gémit-elle. Jésus lui répond énigmatiquement : « Nous verrons cela » (EMV 254.4)

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Marthe10

Dans les années 1261-1266 Jacques de Voragine, dans sa Légende dorée (1), rapporte comment sainte Marthe maîtrisa la Tarasque, « un dragon, moitié animal, moitié poisson, plus épais qu'un bœuf, plus long qu'un cheval, avec des dents semblables à des épées et grosses comme des cornes » qui semait la terreur sur les rives du Rhône, dans un marais entre Arles et Avignon. « Marthe, surmontant sa peur, débarrassa les riverains du Rhône, en aval d'Avignon, de la Tarasque, ce dragon à longue queue qui dévorait hommes et bétail ». (…) « Déliant sa ceinture, elle la noua autour de l’encolure du monstre, que ce geste rendit instantanément aussi doux qu’un agneau et qui se laissa docilement conduire jusqu’à la ville, où les habitants le massacrèrent ». Il est aujourd’hui à peu près admis que ce « monstre » devait être un crocodile ramené par des légionnaires romains à Nîmes ou Arles, et qui se serait échappé. Mais depuis des siècles, les commentateurs s'interrogent: « Que peut bien signifier ce geste accompli à l’aide de la ceinture et que cache-t-il ? ». Pour les lecteurs de Maria Valtorta, l’anecdote sibylline qu’elle rapporte fournit une explication très crédible. Par son acte de foi, Marthe a obtenu le miracle !

(1) J. de Voragine, La Légende dorée, édition de 1902, 3eme partie, p 307, article consacré à Marthe.

https://valtorta.fr/deuxieme-annee-vie-publique-de-jesus/marthe-parle-avec-jesus.html

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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Lun 2 Mar - 9:19

232. Guérison des deux aveugles et d’un muet possédé.

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 93
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 232


Vision du samedi 28 juillet 1945

Lundi 29 mai 28
Capharnaüm

      232.1 Après cela, Jésus descend dans la cuisine et, voyant que Jean va se rendre à la fontaine, il préfère l’accompagner au lieu de rester dans la cuisine chaude et enfumée, laissant Pierre aux prises avec des poissons que viennent de lui apporter les mousses de Zébédée pour le repas du Maître et des apôtres.

      Ils ne vont pas à la source qui se trouve au bout du village, mais à la fontaine de la place, où arrive certainement l’eau de cette belle source abondante qui jaillit sur la pente de la colline, près du lac. Sur la place, c’est la foule habituelle des villages de Palestine, le soir : les femmes y viennent avec leurs amphores, les enfants y jouent, les hommes s’entretiennent d’affaires ou… des potins du village. On y voit aussi, entourés de serviteurs ou de clients, les pharisiens qui regagnent leurs riches demeures. Les gens s’é­cartent avec respect pour les laisser passer, quitte ensuite, à peine sont-ils plus loin, à les maudire de tout cœur en racontant leurs dernières injustices et leurs usures.

      232.2 Dans un coin de la place, Matthieu discute avec ses vieux amis, ce qui fait dire au pharisien Urie, avec mépris et à haute voix :

      « Ah, ces fameuses conversions ! Le lien au péché demeure, cela se voit aux amitiés qui durent. Ha ! Ha ! »

      Ce à quoi Matthieu se retourne vivement pour répondre :

      « Elles durent pour les convertir !

      – Ce n’est pas nécessaire ! Ton Maître suffit à la tâche. Toi, tiens-toi loin d’eux, que la maladie ne te reprenne pas, en admettant que tu sois réellement guéri…»

      Matthieu rougit sous l’effort de ne pas lui dire ses quatre vérités, mais il se borne à rétorquer :

      « Ne crains pas et n’espère pas.

      – Quoi ?

      – Ne crains pas que je redevienne Lévi le publicain et n’espère pas que je t’imite pour perdre ces âmes. Je vous laisse, à tes amis et à toi, les séparations et les mépris. Moi, j’imite mon Maître et je fréquente les pécheurs pour les amener à la grâce. »

      Urie voudrait répliquer, mais l’autre pharisien, le vieil Eli, survient et dit :

      « Mon ami, ne souille pas ta pureté et ne contamine pas ta bouche. Viens avec moi. »

      Il prend Urie par le bras et l’emmène chez lui.

      232.3 Pendant ce temps, la foule, composée surtout d’enfants, s’est groupée autour de Jésus. Parmi les enfants, il y a Jeanne et Tobie, ceux qui, il y a longtemps déjà, s’étaient disputés pour des figues [1]. De leurs petites mains, ils tripotent le grand corps de Jésus pour attirer son attention et disent :

      « Ecoute ! Ecoute ! Aujourd’hui, nous avons été gentils, tu sais ? Nous n’avons jamais pleuré. Nous ne nous sommes jamais chamaillés, par amour pour toi. Tu nous donnes un baiser ?

      – Vous avez donc été gentils, et par amour pour moi ! Quelle joie vous me donnez ! Voilà votre baiser. Et soyez encore meilleurs demain. »

      Il y a aussi Jacques, le petit qui, chaque sabbat, portait à Jésus la bourse de Matthieu [2]. Il dit :

      « Lévi ne me donne plus rien pour les pauvres du Seigneur, mais, moi, j’ai mis de côté toutes les piécettes qu’on me donne quand je suis gentil, et je te les donne. Tu les donneras aux pauvres pour mon grand-père ?

      – Bien sûr. Qu’est-ce qu’a ton grand-père ?

      – Il ne peut plus marcher. Il est très vieux et ses jambes ne le portent plus.

      – Cela te fait de la peine ?

      – Oui, parce qu’il était mon maître quand on marchait dans la campagne. Il me disait plein de choses. Il me faisait aimer le Seigneur. Même maintenant, il me parle de Job et me montre les étoiles du ciel, mais de son siège… C’était plus beau avant !

      – Je viendrai voir ton grand-père demain. Tu es content ? »

      Et Jacques est remplacé par Benjamin, pas celui de Magdala, mais celui de Capharnaüm, rencontré dans une vision d’il y a longtemps [3]. Arrivé sur la place en même temps que sa mère, il lui lâche la main dès qu’il aperçoit Jésus et se lance avec un cri qui ressemble à un gazouillis d’hirondelle au milieu de cette petite cohue ; une fois arrivé devant Jésus, il l’embrasse aux genoux en réclamant :

      « Moi aussi, moi aussi je veux une caresse ! »

      232.4 A ce moment, Simon le pharisien passe. Il s’incline solennellement devant Jésus, qui lui rend sa salutation. Le pharisien s’arrête tandis que la foule, comme intimidée, s’écarte. Il dit avec un léger sourire :

      « Et à moi, tu ne ferais pas une caresse ?

      – A tous ceux qui me le demandent. Je me réjouis avec toi, Simon, de ton excellente santé. On m’avait dit à Jérusalem que tu avais été quelque peu malade.

      – Oui, bien malade. J’ai désiré te voir pour guérir.

      – Croyais-tu que je pouvais te guérir ?

      – Je n’en ai jamais douté. Mais j’ai dû guérir par moi-même parce que tu t’es absenté longtemps. Où es-tu allé ?

      – Jusqu’aux confins d’Israël. C’est ainsi que j’ai occupé les jours entre Pâque et Pentecôte.

      – Est-ce que tu as eu beaucoup de succès ? J’ai appris ce qui s’est passé avec les lépreux d’Hinnom et de Siloan. C’est magnifique [4]. Tu as fait cela seulement ? Non, sûrement pas. Mais cela se sait par le prêtre Jean. Ceux qui n’ont pas de préventions croient en toi et sont bienheureux.

      – Et ceux qui ne croient pas à cause de leurs préventions ? Qu’en est-il d’eux, sage Simon ? »

      Le pharisien se trouble un peu. Il est pris entre le désir de ne pas condamner ses trop nombreux amis qui ont de telles préventions contre Jésus, et celui de mériter ses compliments. Mais il surmonte ce trouble et répond :

      « Ceux qui refusent de croire en toi malgré les preuves que tu donnes sont condamnés.

      – Je désirerais que personne ne le soit…

      – Toi, oui. Nous ne répondons pas à la bonté dont tu fais preuve à notre égard. Trop nombreux sont ceux qui ne te méritent pas… Jésus, je souhaiterais que tu sois mon hôte demain…

      – Demain, cela m’est impossible. Disons dans deux jours. Acceptes-tu ?

      – Toujours. J’aurai… des amis… et il te faudra les excuser si…

      – Oui, oui. Je viendrai avec Jean.

      – Avec lui seul ?

      – Les autres ont d’autres missions. Les voilà qui reviennent de la campagne. Paix à toi, Simon.

      – Que Dieu soit avec toi, Jésus. »

      Le pharisien s’en va, et Jésus rejoint les apôtres.

      232.5 Ils rentrent à la maison pour le repas.

      Mais pendant qu’ils mangent du poisson grillé, ils sont rejoints par des aveugles qui avaient déjà imploré Jésus en route. Ils répètent :

      « Jésus, Fils de David, aie pitié de nous !

      – Partez donc ! Il vous a dit : “demain”, alors venez demain ! Laissez-le manger, leur lance Simon-Pierre sur un ton de reproche.

      – Non, Simon, ne les chasse pas. Une telle constance mérite récom­pense. Vous deux, avancez » dit-il aux aveugles, qui entrent en tâtant de leur bâton le sol et les murs.

      « Croyez-vous que je puisse vous rendre la vue ?

      – Oh oui ! Seigneur ! Nous sommes venus parce que nous en sommes certains. »

      Jésus se lève de table, s’approche d’eux, mets le bout du doigt sur les paupières aveugles, lève la tête, prie et dit :

      « Qu’il vous soit fait selon votre foi. »

      Il retire ses mains, et les paupières immobiles se lèvent car, chez l’un la lumière atteint de nouveau les pupilles revenues à la vie et, chez l’autre, les paupières se dessillent et, là où il y avait une suture, apparue certainement à la suite d’ulcères mal soignés, voilà que le bord des paupières se reforme sans défaut, et que celles-ci se lèvent et se baissent comme des ailes qui battent.

      Les deux hommes tombent à genoux.

      « Relevez-vous et allez. Et veillez bien à ce que personne ne sache ce que j’ai fait pour vous. Portez la nouvelle de la grâce que vous avez reçue à vos villes, à votre parenté, à vos amis. Ici, ce n’est pas nécessaire ni bon pour votre âme. Gardez-la pure de toute lésion à sa foi de la même manière que, maintenant que vous savez ce qu’est un œil, vous le préserverez des lésions pour ne pas redevenir aveugle. »

      232.6 Le dîner s’achève. Ils montent sur la terrasse où ils trouvent quelque fraîcheur. Le lac tout entier brille sous le quartier de lune.

      Jésus s’assied sur le rebord du muret et s’abstrait dans la contemplation de cette mer aux vagues argentées. Les autres parlent à mi-voix pour ne pas le déranger. Mais ils le regardent avec fascination.

      Et qu’il est beau, en effet ! Tout auréolé par la lune qui éclaire son visage sévère et serein en même temps – ce qui permet d’en étudier les moindres détails –, il se tient la tête légèrement renversée, appuyée contre le sarment rêche de la vigne qui monte de là pour s’étendre ensuite sur la terrasse. Ses yeux allongés, d’un bleu que la nuit rend presque couleur onyx, semblent déverser des ondes de paix sur toutes choses. Parfois, ils se lèvent vers le ciel serein parsemé d’étoiles, à d’autres moments, ils s’abaissent sur les collines et, plus bas, sur le lac, ou encore ils fixent un point indéterminé et ils semblent sourire à leur propre vision. Ses cheveux ondulent un peu sous une brise légère. Une jambe suspendue à peu de distance du sol, l’autre appuyée par terre, il reste ainsi, assis de biais, les mains abandonnées sur sa poitrine ; son vêtement blanc paraît intensifier sa blancheur, le rendre argenté sous la lumière de la lune, tandis que ses longues mains semblent accentuer leur teinte de vieil ivoire et leur beauté virile bien qu’elles soient effilées. Son visage aussi, avec son front haut, son nez droit, l’ovale fin des joues que prolonge sa barbe blonde cuivrée, semble prendre, sous la lumière de la lune, la même teinte de vieil ivoire en perdant la nuance rosée que, de jour, on remarque en haut des joues.

      « Tu es fatigué, Maître ?

      – Non.

      – Tu me parais pâle et pensif…

      – Je réfléchissais. Mais je ne crois pas être plus pâle que d’habitude.

      232.7 Venez ici… La lumière de la lune vous rend tous pâles, vous aussi. Demain, vous irez à Corazeïn. Vous y trouverez peut-être des disciples. Parlez-leur. Mais veillez à être de retour demain en fin de journée. Je prêcherai au bord du torrent.

      – Que c’est beau ! Nous préviendrons les habitants de Corazeïn. En rentrant, aujourd’hui, nous avons rencontré Marthe et Marcelle. Elles sont venues ici ? demande André.

      – Oui.

      – A Magdala, on parlait beaucoup de Marie, qui ne sort plus et ne donne plus de fêtes. Nous nous sommes reposés chez la femme de la dernière fois. Benjamin m’a dit que, quand il a envie de faire le méchant, il pense à toi et…

      – … et à moi, dis-le aussi, Jacques [5], ajoute Judas.

      – Il ne m’a rien dit de tel.

      – Mais il l’a sous-entendu : “ Je ne veux pas être beau et méchant, moi ! ”, disait-il en me regardant de travers. Il ne peut me souffrir.

      – Ce sont des antipathies sans importance, Judas, intervient Jésus. N’y pense plus.

      – Oui, Maître, mais c’est ennuyeux que…

      232.8 – Le Maître est-il ici ? crie une voix qui vient de la route.

      – Oui. Mais que voulez-vous encore ? Malgré sa longueur, la journée ne vous suffit pas [6] ? Est-ce que c’est une heure pour troubler de pauvres pèlerins ? Revenez demain ! Ordonne Pierre.

      – C’est que nous avons avec nous un muet qui est possédé. Et, pendant le trajet, il nous a échappé trois fois. Sans cela, nous serions arrivés plus tôt. Soyez gentils ! Dans un moment, quand la lune sera haute, il hurlera fort et épouvantera le village. Voyez comme il s’agite déjà ! »

      Jésus se penche du haut du muret après avoir traversé toute la terrasse. Les apôtres l’imitent. Une chaîne de visages courbés sur une foule de gens qui lèvent la tête vers ceux qui se penchent. Au milieu, avec des gestes saccadés et des grondements d’ours ou de loup enchaîné, il y a un homme avec les poignets bien attachés pour l’empêcher de s’enfuir. Il mugit en se démenant avec des mouvements de bête et comme s’il cherchait je ne sais quoi par terre. Mais quand il lève les yeux et rencontre le regard de Jésus, il pousse un hurlement bestial, inarticulé, un vrai rugissement, et il tente de s’enfuir. La foule – presque tous les adultes de Capharnaüm – prend peur et s’écarte.

      « Viens, pour l’amour de Dieu ! Cela le reprend comme avant…

      – J’arrive tout de suite. »

      Jésus descend rapidement et se met en face du malheureux, qui est plus agité que jamais.

      « Sors de lui. Je le veux ! »

      Le hurlement se brise en un seul mot :

      « Paix !

      – Oui, paix. Sois en paix, maintenant que te voilà délivré. »

      La foule émerveillée crie à la vue de ce brusque passage de la furie au calme, de la possession à la délivrance, du mutisme à la parole.

      232.9 « Comment avez-vous su que j’étais ici ?

      – On nous a dit, à Nazareth : “ Il est à Capharnaüm. ” A Capharnaüm, cela nous a été confirmé par deux hommes qui avaient eu les yeux guéris par toi, dans cette maison.

      – C’est vrai ! C’est vrai ! Ils nous l’ont dit à nous aussi » crient plusieurs.

      Et ils commentent :

      « On n’a jamais vu de telles choses en Israël.

      – Sans l’aide de Belzébuth, il n’aurait rien pu faire », ricanent les pharisiens de Capharnaüm.

      Mais Simon n’est pas avec eux.

      « Aide ou pas aide, me voilà guéri, et les aveugles aussi. Vous, vous ne pouvez pas le faire malgré vos grandes prières » réplique le muet possédé qui a été guéri.

      Et il baise le vêtement de Jésus qui, sans répondre aux pharisiens, se borne à congédier la foule de son “ Que la paix soit avec vous ”. Il retient le miraculé et ceux qui l’accompagnent pour leur offrir un abri dans la chambre du haut, afin qu’ils puissent se reposer jusqu’à l’aube.

[1] Cf. EMV 97.1.

[2] Cf. EMV 98.11.

[3] Cf. EMV 352.4.

[4] Cf. EMV 199.4/5.

[5] Cf. EMV 184.7. Le jeune Benjamin, qui n’a pas sa langue dans sa poche, a fait publiquement des réflexions sur Judas.

[6] Nous sommes presqu'en juin.
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mar 3 Mar - 8:28

233. La parabole de la brebis perdue

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 94
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 233


Vision du samedi 12 août 1944

Mardi 30 mai 28
Capharnaüm

 233.1 Jésus parle à la foule. Monté sur un talus planté d’arbres, le long d’un torrent, il s’adresse à une foule nombreuse éparpillée dans un champ dont le blé est fauché et qui présente l’aspect désolant des chaumes brûlés par le soleil.

      C’est le soir. Le crépuscule descend, mais déjà la lune monte. C’est une belle et claire soirée d’un début d’été. Des troupeaux rentrent au bercail et le tintement des sonnailles se mêle au chant perçant des grillons ou des cigales, un grand : cri-cri-cri…

      Jésus s’inspire des troupeaux qui passent. Il dit :

      « Votre Père est comme un berger attentif. Que fait le bon pasteur ? Il cherche, pour ses brebis, d’excellents pâturages, où il n’y a pas de ciguë ni de plantes dangereuses, mais des bons trèfles, des herbes odorantes et des chicorées amères mais bonnes pour la santé. Il cherche une place où l’on trouve, en plus de la nourriture, de la fraîcheur, un ruisseau aux eaux limpides, des arbres qui donnent de l’ombre, où il n’y a pas d’aspics au milieu de la verdure. Il ne se soucie pas de trouver des pâturages plus gras parce qu’il sait qu’ils cachent facilement des couleuvres aux aguets et des herbes nuisibles : il donne la préférence aux pâturages de montagne où la rosée rend l’herbe pure et fraîche, mais que le soleil débarrasse des reptiles, là où l’on trouve un bon air que remue le vent et qui n’est pas lourd et malsain comme celui de la plaine. Le bon pasteur observe ses brebis une à une. Il les soigne si elles sont malades, les panse si elles sont blessées. Il élève la voix contre celle qui se rendrait malade par gloutonnerie, et à celle qui prendrait du mal à rester dans un coin trop humide ou trop au soleil, il dit d’aller dans un meilleur endroit. Si l’une ne veut pas manger, il lui cherche des herbes acidulées et aromatiques capables de réveiller son appétit et les lui présente de sa main en lui parlant comme à une personne amie.

      C’est ainsi que se comporte le bon Père qui est aux Cieux avec ses enfants qui errent sur la terre. Son amour est la houlette qui les rassemble, sa voix leur sert de guide, ses pâturages c’est sa Loi, son bercail le Ciel.

      233.2 Mais voilà qu’une brebis le quitte. Comme il l’aimait ! Elle était jeune, pure, candide comme une nuée légère dans un ciel d’avril. Le berger la regardait avec beaucoup d’amour en pensant à tout le bien qu’il pouvait lui faire et à tout l’amour qu’il pourrait en recevoir. Or voilà qu’elle l’abandonne.

      Le long du chemin qui borde le pâturage, un tentateur est passé. Il ne porte pas de casaque austère, mais un habit aux mille couleurs. Il ne porte pas la ceinture de peau avec la hache et le couteau suspendus, mais une ceinture d’or d’où pendent des sonnailles au son argentin, mélodieux comme la voix du rossignol, ainsi que des ampoules d’essences enivrantes… Il n’a pas le bourdon avec lequel le bon pasteur rassemble et défend les brebis, et si le bourdon ne suffit pas, il est prêt à les défendre avec sa hache ou son couteau, et même au péril de sa vie. Mais ce tentateur qui passe tient un encensoir tout brillant de pierres précieuses d’où s’élève une fumée qui est à la fois puanteur et parfum, qui étourdit comme éblouissent les facettes des bijoux – oh ! Combien faux ! Il marche en chantant et laisse tomber des poignées d’un sel qui brille sur le chemin obscur…

      Quatre-vingt-dix-neuf brebis le regardent sans bouger.

      La centième, la plus jeune et la plus chère, fait un bond et disparaît derrière le tentateur. Le berger a beau l’appeler, elle ne revient pas. Elle court plus vite que le vent rejoindre celui qui est passé et, pour soutenir ses forces dans sa course, elle goûte ce sel qui pénètre en elle et la brûle d’un délire étrange qui la pousse à chercher les eaux noires et vertes dans l’obscurité des forêts. Et, à la suite du tentateur, elle s’enfonce dans les forêts, y pénètre, monte et descend… et elle tombe, une, deux, trois fois. Et une, deux, trois fois, elle sent des reptiles visqueux lui étreindre le cou ; poussée par la soif, elle boit des eaux souillées et, par faim, elle mord des herbes qui brillent d’une bave dégoûtante.

      233.3 Que fait pendant ce temps le bon pasteur ? Il enferme en lieu sûr les quatre-vingt-dix-neuf brebis fidèles, puis se met en route, et ne s’arrête pas jusqu’à ce qu’il trouve des traces de la brebis perdue. Puisqu’elle ne revient pas à lui, qui confie au vent ses appels, il va vers elle. Il l’aperçoit de loin, enivrée et enlacée par les reptiles, tellement ivre qu’elle n’éprouve aucune nostalgie pour le visage qui l’aime, et elle se moque de lui. Et il la revoit, coupable d’être entrée comme une voleuse dans la demeure d’autrui, tellement coupable qu’elle n’ose plus le regarder… Pourtant, le pasteur ne se lasse pas… et il marche. Il la cherche sans relâche, la suit, la harcèle. Il pleure sur les traces de l’égarée : lambeaux de toison (lambeaux d’âme) ; traces de sang (délits de toutes sortes) ; ordures (témoignages de sa luxure). Il marche et la rejoint.

      Ah ! Je t’ai trouvée, ma bien-aimée ! Je t’ai rejointe ! Que de chemin j’ai fait pour toi, pour te ramener au bercail ! N’incline pas ta tête souillée. Ton péché est enseveli dans mon cœur. Personne, excepté moi qui t’aime, ne le connaîtra. Je te défendrai contre les critiques d’autrui, je te couvrirai de ma personne pour te servir de bouclier contre les pierres des accusateurs. Viens. Tu es blessée ? Ah ! Montre-moi tes blessures. Je les connais, mais je veux que tu me les montres, avec la confiance que tu avais quand tu étais pure et quand tu me regardais, moi, ton pasteur et ton dieu, d’un œil innocent. Les voilà. Elles portent toutes un nom. Ah ! Comme elles sont profondes ! Qui te les a faites, ces blessures si profondes au fond du cœur ? Le Tentateur, je le sais. C’est lui qui n’a ni bourdon ni hache, mais qui blesse plus profondément par sa morsure empoisonnée et, après lui, ce sont les faux bijoux de son encensoir, qui t’ont séduite par leur éclat… mais qui étaient un soufre infernal qui se produisait à la lumière pour te brûler le cœur. Regarde combien de blessures, combien de toison déchirée, combien de sang, combien de ronces !

      233.4 Ah ! Pauvre petite âme trompée ! Mais dis-moi : si je te pardonne, tu m’aimeras encore ? Dis-moi : si je te tends les bras, tu t’y jetteras ? Dis-moi : as-tu soif d’un amour plein de bonté ? Alors viens, et reviens à la vie. Reviens dans les saints pâturages. Tu pleures. Tes larmes mêlées aux miennes lavent les traces de ton péché et moi, pour te nourrir, puisque tu es épuisée par le mal qui t’a brûlée, je m’ouvre la poitrine, je m’ouvre les veines et je te dis : “ Nourris-toi, mais vis ! ”

      Viens que je te prenne dans mes bras. Nous avancerons plus rapidement vers des pâturages saints et sûrs. Tu oublieras tout de cette heure de désespoir et tes quatre-vingt-dix-neuf sœurs, les bonnes, se réjouiront de ton retour. Je te le dis, ma brebis perdue, que j’ai cherchée en venant de si loin, que j’ai retrouvée, que j’ai sauvée, qu’on fait une plus grande fête parmi les bons pour une brebis perdue qui revient que pour les quatre-vingt-dix-neuf justes qui ne se sont pas éloignées du bercail. »

      233.5 Jésus ne s’est jamais retourné pour regarder vers le chemin qui se trouve derrière lui et par lequel est arrivée, dans la pénombre du soir, Marie de Magdala, encore très élégante, mais habillée du moins, et couverte d’un voile foncé qui dissimule ses traits et ses formes. Mais, quand Jésus en arrive à ces mots : « Je t’ai trouvée, ma bien-aimée », Marie passe la main sous son voile et pleure doucement et sans arrêt. Les gens ne la voient pas car elle est au-delà du talus qui borde le chemin. Il n’y a pour la voir que la lune désormais haute, et l’âme de Jésus…

      … Qui me dit : « Le commentaire se trouve dans la vision, mais je t’en reparlerai. Pour le moment, repose-toi, c’est l’heure. Je te bénis, ma fidèle Maria. »

Anayel
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Mer 4 Mar - 9:04

234. Commentaire sur la conversion de Marie-Madeleine

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 95
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 234


Catéchèse du dimanche 13 août 1944.

234.1 Jésus dit :

« Depuis janvier, depuis le moment où je t’ai fait voir le repas pris chez Simon le pharisien, celui qui te guide et toi avez désiré en savoir davantage sur Marie-Madeleine et sur ce que je lui ai dit. Sept mois plus tard, je vous découvre ces pages du passé pour vous satisfaire et pour donner une règle de conduite à ceux qui doivent savoir se pencher sur ces âmes lépreuses, ainsi qu’une parole qui invite ces malheureux qui suffoquent dans leur tombeau de vice à en sortir.

234.2 Dieu est bon. Avec tout le monde. Il n’utilise pas les mêmes mesures que les hommes. Il ne fait pas de différence entre péché et péché mortel. Tout péché, quel qu’il soit, l’afflige. Le repentir le rend joyeux et prêt à pardonner. La résistance à la grâce le rend inexorablement sévère, car la Justice ne peut pardonner à l’impénitent qui meurt dans cet état malgré toutes les aides qu’il a eues pour se convertir.

Mais, dans les conversions ratées, il y en a, sinon la moitié, du moins quatre sur dix qui ont pour cause première la négligence des personnes chargées des conversions, un zèle mal compris et menteur qui n’est qu’un voile posé sur un réel égoïsme et de l’orgueil qui leur permet de rester bien tranquille à l’abri sans descendre dans la lie pour en arracher un cœur. “ Moi, je suis pur, je suis digne de respect. Je ne vais pas là où il y a de la pourriture et où l’on peut me manquer de respect. ” Mais celui qui parle ainsi n’a-t-il pas lu l’Evangile, où il est dit que le Fils de Dieu est allé convertir les publicains et les prostituées, et pas seulement les honnêtes gens de l’ancienne Loi ? Ne pense-t-il pas que l’orgueil est une impureté de l’âme, que le manque de charité est une impureté du cœur ? Tu seras vilipendé ? Je l’ai été avant toi, et bien davantage, or j’étais le Fils de Dieu. Tu devras mettre ton vêtement au contact de choses impures ? Et moi, n’ai-je pas touché ces impuretés de mes mains, pour que je puisse les remettre sur pied et leur dire : “ Marche sur ce nouveau chemin ” ?

Avez-vous oublié ce que j’ai dit à vos premiers prédécesseurs ? “ En toute ville ou village où vous entrerez, renseignez-vous pour savoir si quelqu’un le mérite, et demeurez auprès de lui. [1] ” Cela afin que le monde ne jase pas. Le monde est trop facilement disposé à voir le mal en tout. Mais j’ai ajouté : “ En entrant dans ces maisons – ‘ maisons ’ ai-je dit, et pas ‘ maison ’ – saluez en disant : ‘ Paix à cette maison. ’ Si la maison en est digne, la paix ira reposer sur elle, mais si elle ne l’est pas, elle reviendra sur vous. ” Cela pour vous enseigner que, jusqu’à la preuve certaine de l’impénitence, vous devez avoir à l’égard de tous le même cœur. Et j’ai complété cet enseignement en ajoutant : “ Mais si on ne vous accueille pas et qu’on n’écoute pas vos paroles, au sortir de ces maisons et de ces villes, secouez la poussière qui est restée attachée à vos semelles. ” Sur les bons, que la bonté aimée avec constance transforme pour ainsi dire en un bloc poli de cristal, la fornication n’est que poussière, de la poussière qu’il suffit de secouer ou sur laquelle il suffit de souffler pour qu’elle s’envole sans laisser de séquelle.

Soyez vraiment bons, d’un seul bloc avec la bonté éternelle au centre, et aucune corruption ne pourra monter vous souiller plus haut que les semelles qui s’appuient sur le sol. L’âme est tellement au-dessus ! L’âme de l’homme bon ne fait qu’un avec Dieu. L’âme est au Ciel. La poussière et la boue ne l’atteignent pas, même si elles sont lancées avec hargne contre l’âme de l’apôtre. La boue peut bien atteindre la chair, vous blesser matériellement et moralement en vous persécutant parce que le Mal hait le bien, ou en vous offensant. Mais qu’est-ce que cela fait ? N’ai-je pas été offensé, moi ? N’ai-je pas été blessé ? Mais est-ce que ces coups et ces paroles obscènes ont fait impression sur mon âme, est-ce qu’elle en a été troublée ? Non. Comme un crachat sur un miroir, comme un caillou lancé contre la pulpe juteuse d’un fruit, ils ont glissé sans y pénétrer, ou bien, s’ils y ont pénétré, c’est en surface seulement, sans atteindre le germe renfermé dans le noyau ; au contraire, la germination en a été favorisée, car il est plus facile pour le germe de sortir d’une masse entrouverte que si elle était intacte. C’est en mourant que le grain germe et que l’apôtre devient fécond. En mourant matériellement parfois, en mourant presque quotidiennement, au sens métaphorique du mot, car le moi humain n’en est que brisé. Or ce n’est pas la mort : c’est la Vie. C’est le triomphe de l’esprit sur la mort de l’humanité.

234.3 Marie-Madeleine est venue à moi par un caprice de femme oisive qui ne sait comment occuper ses heures de loisir. La voix limpide et sévère de la vérité a résonné à ses oreilles assourdies par les mensonges obséquieux de ceux qui la berçaient par des hymnes à la sensualité pour la tenir en esclavage. La vérité n’a pas peur d’être raillée et incomprise, car elle parle en regardant Dieu. Et tel un carillon de jour de fête, toutes les voix se sont fondues dans la Parole, les voix habituées à résonner dans les Cieux, dans le libre azur de l’air, en se propageant par vaux et par monts, dans les plaines et sur les lacs, pour rappeler les gloires du Seigneur et ses festivités.

Ne vous souvenez-vous pas du carillon de fête qui, en temps de paix, rendait si gai le jour consacré au Seigneur ? La grosse cloche, de son battant, produisait le premier son au nom de la Loi divine. Elle disait : “ Je parle au nom de Dieu, Juge et Roi. ” Mais ensuite les plus petites arpégeaient “ qui est bon, miséricordieux et patient ” jusqu’à ce que la cloche la plus argentine ajoute d’une voix angélique : “ Son amour pousse au pardon et à la compassion pour vous enseigner que le pardon est plus utile que la rancœur, et la compassion que l’inflexibilité. Venez à Celui qui pardonne, ayez foi en Celui qui compatit. ”

Moi aussi, après avoir rappelé la Loi, piétinée par la pécheresse, j’ai fait chanter l’espérance du pardon. Comme une bande soyeuse verte et bleue, je l’ai secouée parmi les teintes noires pour y mettre ses paroles réconfortantes. Le pardon ! C’est une rosée sur la brûlure du coupable. La rosée n’a rien à voir avec la grêle qui frappe comme une flèche, blesse, rebondit et s’en va sans pénétrer, en détruisant les fleurs. La rosée descend avec une telle légèreté que la plus délicate des fleurs ne la sent pas se poser sur ses pétales de soie. Mais ensuite, elle en absorbe la fraîcheur et se restaure. Elle se pose près des racines, sur la terre brûlée et la pénètre… C’est une humidité de larmes, de pleurs d’étoiles, les pleurs aimants d’une nourrice sur ses enfants assoiffés, et qui descend les restaurer en même temps que le lait doux et nourrissant. Ah ! Le mystère des éléments qui agissent même quand l’homme se repose ou pèche ! Le pardon est comme cette rosée : il amène non seulement la pureté, mais aussi des sucs vitaux qu’il prend, non aux éléments, mais aux foyers divins.

Puis, après la promesse de pardon, la Sagesse parle et dit ce qui est licite et ce qui ne l’est pas, rappelle et secoue. Ce n’est pas par dureté, mais par souci éternel de sauver. Que de fois votre cœur de silex ne se rend-il pas encore plus impénétrable et plus tranchant envers l’Amour qui se penche sur vous ! Que de fois vous vous enfuyez alors qu’il vous parle ! Que de fois vous le tournez en dérision ! Que de fois vous le haïssez… Si l’Amour vous traitait comme vous le traitez, malheur à vos âmes ! Mais vous le voyez au contraire : il est l’infatigable Marcheur qui va à votre recherche. Il vient vous rejoindre quand bien même vous vous enfouissez dans de sordides tanières.

234.4 Pourquoi ai-je voulu entrer dans cette maison ? Pourquoi n’y ai-je pas accompli le miracle ? [2] Pour enseigner aux apôtres comment agir, en défiant les préventions et les critiques pour accomplir un devoir si élevé qu’il échappe à ces réalités du monde.

Pourquoi ai-je tenu ce langage à Judas ? Les apôtres avaient un tempérament encore très humain. Tous les chrétiens en sont là, y compris les saints de la terre, bien qu’à un moindre degré. Il en survit quelque chose jusque chez les personnes parfaites. Mais les apôtres n’en étaient pas encore là : leur manière de penser était pénétrée de sentiments humains. J’avais beau les élever, le poids de leur humanité les tirait vers le bas. Pour les aider à moins retomber, je devais mettre, sur le chemin de la montée, des choses capables d’arrêter leur descente de façon qu’ils s’appuient sur elles pour méditer et se reposer, pour s’élever ensuite plus haut que la fois précédente : des événements capables de les persuader que j’étais Dieu, comme les introspections d’âmes, la victoire sur les éléments, les miracles, la transfiguration, la résurrection, les ubiquités. Je me trouvai sur le chemin d’Emmaüs en même temps qu’au Cénacle, et l’heure de ces deux présences, confrontée entre les apôtres et les disciples, fut l’une des raisons qui les frappa le plus, les arracha à leurs liens et les lança sur la voie du Christ. [3]

Plus que pour Judas – ce membre couvait déjà la mort en lui –, je parlais pour les onze autres. Je devais nécessairement faire briller à leurs yeux le fait que j’étais Dieu, non par orgueil, mais parce que c’était nécessaire pour leur formation. J’étais Dieu et Maître. Ces mots indiquaient qui j’étais. Je me suis révélé par une puissance qui dépassait l’humain et j’enseignais une perfection : ne pas avoir de conversation mauvaise même en notre for intérieur. Car Dieu voit, et Dieu doit voir un for intérieur pur pour pouvoir y venir et y établir sa demeure.

Pourquoi n’ai-je pas accompli de miracle dans cette maison ? Pour faire comprendre à tous que la présence de Dieu exige une ambiance pure, par respect pour la grandeur de sa majesté. Pour parler – sans remuer les lèvres, mais avec une parole d’autant plus pénétrante – à l’âme de la pécheresse et lui dire : “ Tu vois, malheureuse ? Tu es tellement souillée que tout, autour de toi, en est souillé, à tel point que Dieu ne peut y agir. Tu es plus souillée que cet homme, car tu renouvelles la faute d’Eve et tu offres le fruit à Adam, en le tentant et en le détournant du Devoir. Tu es ministre de Satan. ”

Néanmoins, pourquoi est-ce que je refuse qu’elle soit traitée de “ satan ” par la mère folle de douleur ? [4] Parce qu’aucune raison ne saurait justifier l’insulte et la haine. La première nécessité qui s’impose et la première condition pour avoir Dieu avec nous, c’est de ne pas éprouver de rancœur et de savoir pardonner. La deuxième nécessité, c’est de savoir reconnaître que nous aussi – ou nos proches –, nous sommes coupables : il ne suffit pas de voir seulement les fautes des autres. La troisième nécessité, c’est de savoir rester reconnaissants et fidèles, après avoir obtenu une grâce, par justice envers l’Eternel. Malheureux ceux qui, après une grâce, sont pires que des chiens et ne se souviennent pas de leur bienfaiteur : un chien lui-même s’en souvient !

234.5 Je n’ai pas adressé le moindre mot à Marie-Madeleine. Comme si elle avait été une statue, je l’ai regardée un instant, puis je l’ai quittée des yeux. Je suis revenu aux “ vivants ” que je voulais sauver. Matière morte comme une statue de marbre, et plus encore, je l’ai enveloppée d’une négligence apparente. Mais se n’ai rien dit et rien fait qui n’ait pour principal but sa pauvre âme que je voulais racheter. Et mes derniers mots : “ Moi, je n’insulte pas : n’insulte donc pas. Prie pour les pécheurs. Rien de plus ” sont allés, tels une guirlande de fleurs que l’on forme, se souder à ce que j’avais dit sur la montagne : “ Le pardon est plus utile que la rancœur et la compassion que l’inflexibilité. ” [5] Ces mots l’ont enfermée, la pauvre malheureuse, dans un cercle velouté, frais, parfumé de bonté, en lui faisant sentir combien la sujétion aimante de Dieu est différente de l’esclavage féroce de Satan, combien le parfum céleste est suave par rapport à la puanteur de la faute, et combien il est reposant d’être aimé saintement plutôt que d’être possédé sataniquement.

Voyez combien le Seigneur est mesuré dans ses volontés : il n’exige pas des conversions foudroyantes. Il ne prétend pas à l’absolu d’un cœur. Il sait attendre. Il sait se contenter. Et pendant qu’il attend que la femme perdue retrouve le chemin, que cette femme hors d’elle retrouve la raison, il se contente de ce que peut lui donner la mère bouleversée. Je ne lui demande rien d’autre que : “ Peux-tu pardonner ? ” Combien d’autres choses j’aurais eu à lui demander pour la rendre digne du miracle, si j’avais jugé selon les critères des hommes ! Mais c’est divinement que je mesure vos forces. Pour cette pauvre mère accablée, c’était déjà beaucoup d’arriver à pardonner. Et, à ce moment précis, c’est tout ce que je lui demande. Plus tard, après lui avoir rendu son fils, je lui dis : “ Sois sainte et rends sainte ta maisonnée. ” Mais tant qu’elle est écrasée sous la douleur, je ne lui demande que de pardonner à la coupable. On ne doit pas tout exiger de celui qui, peu avant, était dans le néant des ténèbres. Cette mère allait venir plus tard à la lumière totale et, avec elle, l’épouse et les enfants. Mais sur le moment, à ses yeux aveuglés par les larmes, il fallait faire arriver le premier crépuscule de la lumière : le pardon, cette aube du jour de Dieu.

234.6 De tous ceux qui étaient présents – je ne compte pas Judas, je parle des gens accueillis à cet endroit, pas de mes disciples –, un seul n’allait pas venir à la lumière. De telles défaites accom­pagnent les victoires de l’apostolat. Il y a toujours quelqu’un pour qui l’apôtre peine en vain. Mais elles ne doivent pas faire perdre courage. L’apôtre ne doit pas prétendre tout obtenir. Des forces adverses de tous noms s’opposent à lui ; comme les tentacules d’une pieuvre, elles rattrapent la proie qui leur avait échappé. Le mérite de l’apôtre reste le même. Malheureux l’apôtre qui prétend : “ Je sais que, là, je ne pourrai pas convertir, donc je n’y vais pas. ” Un tel apôtre n’aurait guère de valeur. Il faut y aller, même si seul un sur mille sera sauvé. La journée de l’apôtre sera aussi féconde pour un seul que pour mille. En effet, il aura fait tout son possible, et c’est cela que Dieu récompense. Il faut aussi penser que, là où l’apôtre ne peut obtenir de conversions parce que la personne à convertir est trop prisonnière de Satan et les forces de l’apôtres trop insuffisantes pour l’effort requis, Dieu peut intervenir. Et alors ? qui est plus grand que Dieu ? [6]

234.7 Une autre chose que l’apôtre doit absolument pratiquer, c’est l’amour, l’amour manifeste. Pas seulement l’amour secret du cœur de ses frères, qui suffit pour les frères bons. Mais l’apôtre est un ouvrier de Dieu et il ne doit pas se borner à prier, il doit agir. Qu’il agisse donc avec amour, avec un grand amour. La sévérité paralyse le travail de l’apôtre et le mouvement des âmes vers la Lumière. Pas de sévérité, mais de l’amour. L’amour, c’est le vêtement d’amiante que les flammes des mauvaises passions ne peuvent attaquer. L’amour vous comble d’essences protectrices qui empêchent la pourriture humano-satanique de pénétrer en vous. Pour conquérir une âme, il faut savoir aimer. Pour conquérir une âme, il faut savoir l’amener à aimer. A aimer le bien en repoussant ses pauvres amours peccamineux.

Je voulais l’âme de Marie. Et comme pour toi, petit Jean, je ne me suis pas borné à parler du haut de ma chaire de Maître. J’en suis descendu pour la chercher sur les chemins du péché. Je l’ai suivie et persécutée de mon amour. Douce persécution ! Je suis entré, moi la Pureté, là où elle était, elle qui était l’impureté. Je n’ai pas eu peur du scandale, ni pour moi ni pour les autres. Le scandale ne pouvait entrer en moi, car j’étais la Miséricorde, or celle-ci pleure sur les fautes, mais ne s’en scandalise pas. Malheureux le pasteur qui se scandalise et se retranche derrière ce paravent pour abandonner une âme ! Ne savez-vous pas que les âmes se relèvent plus facilement que les corps, et que la parole de compassion et d’amour qui dit : “ Ma sœur, relève-toi, pour ton bien ” opère souvent des miracles ? Je ne craignais pas le scandale d’autrui. Aux yeux de Dieu, mon action était justifiée. Et les bons la comprenaient. Le regard malveillant où fermente la malice qui se dégage d’un intérieur corrompu n’a aucune valeur. Il trouve des fautes même en Dieu. Il ne voit de parfait que lui-même. Je ne m’en souciais donc pas.

234.8 Voici les trois phases du salut d’une âme :

Etre d’une grande intégrité pour pouvoir parler sans crainte d’être réduit au silence. Parler à toute une foule, de façon à ce que notre parole apostolique qui s’adresse aux assemblées groupées autour de la barque mystique s’étende, comme des cercles dans l’eau, toujours plus loin, jusqu’aux rivages boueux où sont couchés ceux qui stagnent dans la fange et ne se soucient guère de connaître la vérité. C’est là le premier travail à faire pour briser la croûte de la glèbe et la préparer à recevoir la semence. C’est le plus sévère pour celui qui l’accomplit comme pour celui qui le reçoit, car la parole, telle le soc tranchant, doit blesser pour ouvrir. Et, en vérité, je vous dis que le cœur d’un apôtre plein de bonté est meurtri de devoir agir comme cela. Mais cette douleur est féconde, elle aussi. C’est par le sang et les pleurs de l’apôtre que la glèbe inculte devient fertile.

Deuxième qualité : œuvrer même là où tout autre qui comprendrait mal sa mission s’enfuirait ; se briser sous l’effort d’arracher l’ivraie, le chiendent et les épines pour mettre à nu le terrain labouré et faire briller sur lui, tel un soleil, la puissance de Dieu et sa bonté ; et en même temps, se montrer, en qualité de juge et de médecin, à la fois sévère et compatissant, en s’arrêtant pour attendre, pour laisser aux âmes le temps de surmonter la crise, de réfléchir et de prendre une décision.

Troisième point : dès que l’âme qui s’est repentie dans le silence, en pleurant et en méditant sur ses erreurs, ose venir timidement vers l’apôtre, craignant d’être chassée, il faut que ce dernier ait un cœur plus grand que la mer, plus doux que le cœur d’une maman, plus aimant que le cœur d’un époux, et qu’il l’ouvre tout grand pour en laisser s’échapper des flots de tendresse. Si vous avez Dieu en vous – Dieu qui est Amour –, vous trouverez aisément les mots d’amour qu’il faut dire aux âmes. Dieu parlera en vous et par vous ; comme du miel qui suinte d’un rayon, comme un baume qui coule d’une ampoule, l’amour atteindra les lèvres brûlées et dégoûtées, les âmes blessées, et il sera soulagement et remède.

234.9 Faites en sorte que les pécheurs vous aiment, vous les docteurs des âmes. Faites en sorte qu’ils goûtent la saveur de l’amour céleste et en deviennent avides au point de ne plus chercher d’autre nourriture. Faites en sorte qu’elles trouvent dans votre douceur un tel soulagement qu’elles le recherchent pour toutes leurs blessures. Il faut que votre charité écarte d’eux toute crainte car, comme le dit l’épître de ce jour : “ La crainte suppose un châtiment, or celui qui craint n’est pas parfait en amour. ” [7] Mais celui qui fait craindre ne l’est pas non plus. Ne dites pas : “ Qu’as-tu fait là ? ”, ni “ Va-t-en ” ou “ Tu ne peux pas goûter à l’amour bon ”. Dites plutôt, en mon nom : “ Aime et je te pardonne ”, “ Viens, les bras de Jésus te sont ouverts ”, ou encore “ Savoure ce pain angélique et cette Parole et oublie la poix infernale et le mépris de Satan ”. Faites-vous bêtes de somme pour les faiblesses des autres. L’apôtre doit porter son fardeau et celui d’autrui, en même temps que ses propres croix et celles d’autrui. Et, quand vous venez à moi, chargés des brebis blessées, rassurez-les, ces brebis errantes, par ces mots : “ Tout est oublié à partir de maintenant ”, et “ N’aie pas peur du sauveur. Il est venu du Ciel pour toi, tout exprès pour toi. Je ne suis que le pont pour te conduire à lui, qui t’attend, de l’autre côté du canal de l’absolution pénitentielle, pour te mener à ses saints pâturages, qui commencent ici sur terre, mais continuent ensuite dans les Cieux avec une beauté éternelle qui rassasie et réjouit.

234.10 Voilà le commentaire. Il vous concerne peu, vous les brebis fidèles au bon Pasteur. Mais pour toi, ma petite épouse, il servira à accroître ta confiance, pour le père il servira de lumière plus grande dans sa lumière de juge, et pour beaucoup ce sera une incitation à venir au bien. Mais il sera la rosée dont j’ai parlé, qui pénètre, nourrit et fait refleurir les fleurs flétries. Levez la tête. Le ciel est en haut.

Va en paix, Maria. Le Seigneur est avec toi.»

[1] Cf. Matthieu 10,11-14Marc 6,10-11Luc 10,5-6 – Voir aussi EMV 265.

[2] Cf. EMV 183, la scène du meurtre de l’amant de Marie de Magdala.

[3] Cf. EMV 625.

[4] EMV 183.

[5] Cf. EMV 174.

[6] Psaume 76 (Hébreu 77),14 – "Dieu, ton chemin n’est que sainteté ! Quel dieu est aussi grand que Dieu ?"

[7] Première lettre de Jean 4,18.


Observation - Quand Jésus évoque l’amiante

Alors qu’il commente la conversion de Marie Madeleine, Jésus explique à Maria Valtorta : « L'amour c'est le vêtement d'amiante que les flammes des mauvaises passions ne peuvent attaquer » (EMV 234.7). Donnée pour notre temps, cette comparaison nous apparaît limpide. Mais on peut remarquer qu’elle aurait été tout aussi compréhensible, il y a deux mille ans, pour les contemporains du Christ…

Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Commen10
Tissu d’amiante, résistant au feu

En effet, l’amiante est un matériau antique qui était déjà connu plusieurs siècles avant Jésus Christ. Pausonias (Description de l’Attique) décrit une lampe fabriquée au 4e siècle avant J.-C. par Callimachos, et qui sur l’Acropole brûlait jour et nuit. Sa mèche était faite de « lin de Carpasie », « le seul lin que le feu ne dévore pas ». Au premier siècle Pline l’Ancien le nomme d’abord linum vivum, puis asbestinon (non éteint). Dioscoride utilise le mot amiantos (litt. « qui ne se souille pas ») justement à cause des serviettes qu’on nettoyait alors par le feu ! Strabon quant à lui observe que les esclaves qui tissent des étoffes à base d’amiante contractent des maladies respiratoires mortelles ! A l’époque, l’amiante servait à confectionner des serviettes, nappes et vêtements qu’on nettoyait simplement en les jetant au feu après usage. L’amiante était également utilisé pour confectionner des mèches éternelles de lampe à huile et des bandages lors de la crémation des corps, pour ne pas mélanger les cendres du défunt à celles du bucher. Au Moyen Age Charlemagne posséda lui-même des nappes en amiante et étonna ses invités de marque en les jetant au feu pour les nettoyer.

(1) Pline, Histoire Naturelle Livre 19, 19 et 19,20.

(2) Dioscoride Livre 5, 138.
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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Jeu 5 Mar - 21:06

235. Marie confie son retour au bercail à sa sœur Marthe

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 96
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 235


Vision du dimanche 29 juillet 1945 (Sainte Marthe)

Mercredi 31 mai 28
Capharnaüm

  235.1 Jésus est sur le point de monter dans la barque. C’est une claire aurore d’été qui effeuille les roses sur le crêpe de soie du lac, quand survient Marthe avec sa servante.

      « Oh, Maître ! Ecoute-moi, pour l’amour de Dieu. »

      Jésus redescend sur la rive et dit aux apôtres :

      « Allez m’attendre près du torrent. Entre-temps, préparez tout pour la mission vers Magedan. La Décapole aussi attend la parole. Allez. »

      Et pendant qu’ils détachent la barque et prennent le large, Jésus marche à côté de Marthe, respectueusement suivie par Marcelle.

      Ils s’éloignent ainsi du village en cheminant sur la rive qui, juste après une bande de sable où déjà se mêlent de rares herbes sauvages, se couvre de végétation et quitte le terrain plat pour grimper à l’assaut des pentes qui se mirent dans le lac.

      235.2 Quand ils ont atteint un endroit solitaire, Jésus dit en souriant :

      « Que veux-tu me dire ?

      – Oh, Maître… cette nuit, peu après la fin de la seconde veille, Marie est revenue à la maison. Ah, mais j’oubliais de te dire qu’elle m’avait demandé à sexte, pendant le repas : “ Te déplairait-il de me prêter l’un de tes habits et un manteau ? Ils seront un peu courts, mais je laisserai le vêtement dénoué et je rallongerai le manteau… ” Je lui ai dit : “ Prends ce que tu veux, ma sœur ” ; mon cœur battait très fort parce que, auparavant, dans le jardin, j’avais dit à Marcelle : “ Au crépuscule, il nous faut être à Capharnaüm car le Maître s’adresse à la foule ce soir ”, et j’avais vu Marie sursauter, changer de couleur, ne plus tenir en place ; elle allait et venait seule comme une âme en peine, agitée, sur le point de décider… et ne sachant pas encore quoi accepter et quoi repousser.

      Après le repas, elle est allée dans ma chambre et a pris le vêtement le plus foncé que j’avais, le plus modeste, elle l’a essayé et a prié la nourrice de défaire tout l’ourlet parce que l’habit était trop court. Elle avait essayé de le faire elle-même, mais avait reconnu en pleurant : “ Je ne sais plus coudre, j’ai oublié tout ce qui est utile et bon… ” et elle m’a jeté les bras autour du cou en me disant : “ Prie pour moi. ” Elle est sortie seule, au crépuscule… Comme j’ai prié pour qu’elle ne rencontre personne qui l’empêche de venir ici, pour qu’elle comprenne ta parole, pour qu’elle réussisse à étrangler définitivement le monstre qui la tient en esclavage… Regarde : j’ai ajouté à ma ceinture ta ceinture bien serrée sous l’autre [1], et quand je sentais la pression du cuir dur sur ma taille qui n’est pas habituée aux ceintures si rigides, je disais : “ Lui, il est plus fort que tout. ”

      Après quoi, Marcelle et moi avons vite fait pour venir en char. Je ne sais si tu nous as vues dans la foule… Mais quelle douleur, quelle épine dans le cœur, en ne voyant pas Marie ! Je pensais : “ Elle a changé d’avis, elle est rentrée à la maison. Ou bien… ou bien elle s’est enfuie, ne pouvant plus résister à mon autorité, qu’elle avait réclamée. ” Je t’écoutais et je pleurais sous mon voile. Ces paroles paraissaient faites pour elle… et elle ne les entendait pas ! C’est ce que je pensais, puisque je ne la voyais pas. Je suis rentrée à la maison découragée. C’est vrai : je t’ai désobéi parce que tu m’avais dit : “ Si elle vient, attends-la à la maison. ” Mais considère mon cœur, Maître ! C’était ma sœur qui venait vers toi ! Est-ce que je pouvais ne pas être là pour la voir près de toi ? D’ailleurs, tu m’avais dit : “ Elle sera brisée. ” Je voulais être auprès d’elle, tout de suite, pour la soutenir…

      J’étais agenouillée en larmes et en prière dans ma chambre et la seconde veille était finie depuis longtemps quand elle est rentrée. Si doucement que je ne l’ai entendue que lorsqu’elle est tombée sur moi, me serrant étroitement dans ses bras et disant : “ Tout ce que tu dis est vrai, ma sœur bénie. C’est même beaucoup plus que tu ne dis. Sa miséricorde est beaucoup plus grande. Oh, ma Marthe ! Tu n’as plus besoin de me retenir ! Tu ne me verras plus être cynique ou désespérée ! Tu ne m’entendras plus dire : ‘ Pour ne pas penser ! ’ Maintenant je veux penser, je sais à quoi penser : à la bonté faite chair. Tu as prié, ma sœur, tu as sûrement prié pour moi. Mais tu as déjà ta victoire en main. Ta Marie qui ne veut plus pécher, qui renaît maintenant, la voilà. Regarde-la bien en face, car c’est une nouvelle Marie au visage lavé par les larmes de l’espérance et du repentir. Tu peux m’embrasser, ma sœur pure. Il n’y a plus de traces d’amour honteux sur mon visage. Il a dit qu’il aime mon âme, car c’est à elle et d’elle qu’il parlait. La brebis perdue, c’était moi. Il a dit – écoute si je dis bien, tu connais la manière de parler du Sauveur – … ” et elle m’a répété parfaitement ta parabole [2].

      Elle est si intelligente, Marie ! Bien plus que moi ! Elle sait se rappeler. Ainsi, je t’ai entendu deux fois. Si, dans ta bouche, ces paroles étaient saintes et adorables, dans la sienne, elles étaient pour moi saintes, adorables et aimables car c’était la bouche d’une sœur qui les prononçait, de ma sœur retrouvée, revenue au bercail familial. Nous sommes restées embrassées, assises sur la natte du sol, comme lorsque nous étions petites et que nous restions ainsi dans la chambre de maman ou bien près du métier où elle tissait ou brodait ses splendides étoffes. Nous sommes restées ainsi, nous n’étions plus séparées par le péché et il me semblait que maman aussi était présente spirituellement. Nous avons pleuré sans douleur et même avec tant de paix ! Nous nous embrassions, tout heureuses… Et puis Marie, fatiguée par le chemin qu’elle avait fait à pied, par tant d’émotions, s’est endormie dans mes bras et, avec l’aide de la nourrice, je l’ai couchée sur mon lit… et je l’ai quittée pour accourir ici… »

      Marthe, radieuse, baise les mains de Jésus.

      235.3 « Je te dis, moi aussi, ce que t’a confié Marie : “ Tu as ta victoire en main. ” Va et sois heureuse. Va en paix. Aie une conduite toute de douceur et de prudence avec celle qui vient de renaître. Adieu, Marthe. Fais-le savoir à Lazare, qui là-bas se tourmente.

      – Oui, Maître. Mais Marie, quand viendra-t-elle avec nous, les disciples ? »

      Jésus sourit et dit :

      « Le Créateur a fait la création en six jours, et le septième, il s’est reposé.

      – Je comprends. Il faut faire preuve de patience…

      – Patience, oui. Ne pas soupirer. C’est une vertu, cela aussi. La paix soit avec vous, femmes. Nous nous reverrons bientôt. »

      Jésus les quitte alors pour aller vers le lac où la barque attend près de la rive.

      235.4 Jésus dit :

      « Vous placerez ici la vision du repas dans la maison du pharisien Simon, reçue le 21 janvier 1944. »

[1] Cf. EMV 231.7.

[2] Cf. La parabole de la brebis perdue, EMV 233.  


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ÉTQMÉR de M.V. Re: Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10

Message par Anayel Ven 6 Mar - 22:12

236. Onction de la pécheresse. Le repas chez Simon le pharisien et l’absolution de Marie de Magdala

Ancienne édition : Tome 4, chapitre 97-98-99.
Nouvelle édition : Tome 4, chapitre 236.


Vision du vendredi 21 janvier 1944

Mercredi 31 mai 28
Capharnaüm

 236.1 En guise de réconfort devant ma souffrance complexe et pour me faire oublier les méchancetés des hommes, mon Jésus m’accorde une bien douce contemplation.

      Je vois une salle très riche. Un riche lampadaire à becs multiples est suspendu au milieu et il est tout allumé. Aux murs, de très beaux tapis, des sièges ornés de marqueterie et incrustés d’ivoire et de lames précieuses, et aussi des meubles très beaux.

      Au milieu, une grande table carrée, mais formée de quatre tables ainsi réunies Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Ch236-10. La table est certainement disposée de cette manière pour les nombreux convives (tous des hommes) et elle est couverte de belles nappes et de riche vaisselle. Il y a de nombreuses amphores et des coupes précieuses et les serviteurs se déplacent tout autour, apportant des plats et versant des vins. Au milieu du carré, il n’y a personne. Je vois le beau dallage, sur lequel se reflète la lumière du lampadaire à huile. A l’extérieur, en revanche, il y a de nombreux lits-sièges tous occupés par des convives.

      Il me semble me trouver dans l’angle à moitié obscur situé au fond de la salle, près d’une porte grande ouverte sur l’extérieur, mais en même temps fermée par un lourd tapis ou une tapisserie qui pend de son architrave.

      Du côté le plus éloigné de la porte Partage de "l'Évangile tel qu'il m'a été révélé" de Maria Valtorta, tomes 1 à 10 - Page 9 Ch236-11, c’est-à-dire là où il y a les deux signes, se trouve le maître de maison avec les invités de marque. C’est un homme âgé, revêtu d’une ample tunique blanche serrée à la taille par une ceinture brodée. L’habit a aussi au cou, au bord des manches et du vêtement lui-même, des bandes de broderies appliquées comme si c’étaient des rubans brodés ou des galons, si on préfère les appeler ainsi. Mais la figure de ce petit vieux ne me plaît pas. C’est un visage méchant, froid, orgueilleux et avide.

      A l’opposé, en face de lui, se trouve mon Jésus. Je le vois de côté, je pourrais même dire par derrière. Il porte son vêtement blanc habituel, des sandales, les cheveux séparés en deux sur le front et longs comme toujours.

      Je remarque que lui et tous les convives ne sont pas allongés comme je croyais qu’on l’était sur ces lits-sièges, c’est-à-dire perpendiculairement à la table, mais parallèlement. Dans la vision des noces de Cana, je n’avais pas fait très attention à ce détail, j’avais vu qu’ils mangeaient appuyés sur le coude gauche, mais il me semblait qu’ils n’étaient pas vraiment couchés parce que les lits étaient moins luxueux et beaucoup plus courts. Ceux-ci sont de vrais lits, ils ressemblent aux divans modernes, à la mode turque.

      Jésus a Jean pour voisin et, comme Jésus s’appuie sur le coude gauche (comme tout le monde), il en résulte que Jean se trouve encastré entre la table et le corps du Seigneur, arrivant avec son coude gauche à l’aine du Maître, de manière à ne pas le gêner pour manger et à lui permettre aussi, s’il le veut, de s’appuyer confidentiellement sur sa poitrine.

      Il n’y a pas de femmes. Tout le monde parle, et le maître de maison s’adresse de temps en temps à Jésus avec une familiarité pleine d’affectation et une condescendance manifeste. Il est clair qu’il veut lui montrer, ainsi qu’à toutes les personnes présentes, qu’il lui a fait un grand honneur de l’inviter dans sa riche maison, lui, ce pauvre prophète que l’on juge quelque peu exalté…

      Je vois Jésus répondre avec courtoisie, paisiblement [1]. Il sourit de son léger sourire à ceux qui l’interrogent, mais il sourit d’un sourire lumineux si c’est Jean qui lui parle ou simplement le regarde.

      236.2 Je vois se soulever la riche tapisserie qui couvre l’embrasure de la porte et entrer une femme jeune, très belle, richement vêtue et soigneusement coiffée. Sa chevelure blonde très épaisse forme sur sa tête un véritable ornement de mèches artistement tressées. Elle semble porter un casque d’or tout en relief, tellement cette chevelure est fournie et brillante. Elle porte un vêtement dont je dirais qu’il est très excentrique et compliqué si je le compare à celui que j’ai toujours vu à la Vierge Marie. Des boucles sur les épaules, des bijoux pour retenir les froncis en haut de la poitrine, des chaînettes d’or pour souligner la poitrine, une ceinture avec des boucles d’or et des pierres précieuses. C’est un vêtement provocant qui fait ressortir les formes de son très beau corps. Sur sa tête, un voile si léger… qu’il ne voile rien. Ce n’est qu’une parure, c’est tout. Aux pieds, de très riches sandales avec des boucles d’or, des sandales de cuir rouge avec des brides entrelacées aux chevilles.

      Tous, sauf Jésus, se retournent pour la regarder. Jean l’observe un instant, puis il se tourne vers Jésus. Les autres la fixent avec une visible et mauvaise gourmandise. Mais la femme n’a pas un regard pour eux et ne se soucie pas du murmure qui s’est élevé à son entrée et des clins d’œil de tous les convives, excepté Jésus et le disciple. Jésus fait semblant de ne s’apercevoir de rien et continue de parler en terminant la conversation qu’il avait engagée avec le maître de maison.

      La femme se dirige vers Jésus et s’agenouille près des pieds du Maître. Elle pose par terre un petit vase en forme d’amphore très ventrue, enlève de sa tête son voile en détachant l’épingle précieuse qui le retenait fixé aux cheveux, retire les bagues de ses doigts et pose le tout sur le lit-siège près des pieds de Jésus. Elle prend ensuite les pieds de Jésus entre ses mains, d’abord celui de droite, puis celui de gauche et en délace les sandales, les dépose sur le sol, puis elle lui embrasse les pieds en sanglotant et y appuie son front, elle les caresse et ses larmes tombent comme une pluie qui brille à la lumière du lampadaire et qui arrose la peau de ces pieds adorables.

      236.3 Jésus tourne lentement la tête, à peine, et son regard bleu sombre se pose un instant sur la tête inclinée. Un regard qui absout. Puis il regarde de nouveau vers le centre de la pièce. Il la laisse libre de s’épancher.

      Mais les autres, non. Ils plaisantent entre eux, font des clins d’œil, ricanent. Et le pharisien s’assied un moment pour mieux voir ; son regard exprime désir, contrariété, ironie. C’est, de sa part, de la convoitise pour la femme, ce sentiment est évident. D’un autre côté, il est mécontent qu’elle soit entrée si librement, ce qui pourrait faire penser aux autres que cette femme est… une habituée de la maison. Il adresse enfin un coup d’œil moqueur à Jésus…

      Mais la femme ne fait attention à rien. Elle continue à verser des larmes abondantes, sans un cri. Seulement de grosses larmes et de rares sanglots. Puis elle dénoue ses cheveux en en retirant les épingles d’or qui tenaient en place sa coiffure compliquée et elle pose aussi ces épingles près des bagues et de la grosse épingle qui maintenait le voile. Les écheveaux d’or se déroulent sur les épaules. Elle les prend à deux mains, les ramène sur sa poitrine et les passe sur les pieds mouillés de Jésus, jusqu’à ce qu’ils soient secs. Puis elle plonge les doigts dans le petit vase et en retire une pommade légèrement jaune et très odorante. Un parfum qui tient du lys et de la tubéreuse se répand dans toute la salle. La femme y puise largement, elle étend, elle enduit, embrasse et caresse.

      Jésus, de temps en temps, la regarde avec une affectueuse pitié. Jean, qui s’est retourné avec étonnement en entendant les sanglots, ne peut détourner les yeux du groupe de Jésus et de la femme. Il regarde alternativement l’un et l’autre. Le visage du pharisien est de plus en plus hargneux.

      236.4 J’entends ici les paroles bien connues de l’Evangile [2] et je les entends dites sur un ton et accompagnées d’un regard qui font baisser la tête au vieillard haineux.

      J’entends les paroles d’absolution adressées à la femme qui s’en va en laissant ses bijoux aux pieds de Jésus. Elle a enroulé son voile autour de sa tête en y enserrant le mieux possible sa chevelure défaite. Jésus, en lui disant : « Va en paix », lui pose un instant la main sur sa tête inclinée, mais avec une extrême douceur.

[1] Cf. certains détails de la conversation sont rapportés en EMV 236.8.

[2] Cf. Luc, 7,39-50

Paroles de Jésus dans Luc, 7, 39-50 :
.


Enseignement de Jésus

Catéchèse du vendredi 21 janvier 1944.

      236.5 Jésus me dit maintenant :

      « Ce qui a fait baisser la tête au pharisien et à ses amis, et ce que l’Evangile ne rapporte pas, ce sont les paroles que mon esprit, par mon regard, ont dardées et enfoncées dans cette âme sèche et avide. J’ai répondu avec beaucoup plus de force que je ne l’aurais fait par des mots, car rien ne m’était caché des pensées des hommes. Et il m’a compris dans mon langage muet qui était encore plus lourd de reproche que ne l’auraient été mes paroles.

      Je lui ai dit : “ Non, ne fais pas d’insinuations malveillantes pour te justifier à tes propres yeux. Moi, je n’ai pas ta passion vicieuse. Cette femme ne vient pas à moi poussée par la sensualité. Je ne suis pas comme toi et tes semblables. Elle vient à moi parce que mon regard et ma parole, entendue par pur hasard, ont éclairé son âme, là où la luxure avait installé les ténèbres. Et elle vient parce qu’elle veut vaincre la sensualité et elle comprend, la pauvre créature, qu’à elle seule, elle n’y arriverait jamais. C’est l’esprit qu’elle aime en moi, rien que l’esprit qu’elle sent surnaturellement bon. Après tout le mal qu’elle a reçu de vous tous, qui avez exploité sa faiblesse pour vos vices, en la payant ensuite par les coups de fouet du mépris, elle vient à moi parce qu’elle se rend compte qu’elle a trouvé le bien, la joie, la paix, qu’elle avait inutilement cherchés dans les magnificences du monde. Pharisien hypocrite, guéris-toi de cette lèpre de l’âme, sache avoir une juste vision des choses. Quitte l’orgueil de ton esprit et la luxure de ta chair. Ce sont des lèpres plus fétides que les lèpres corporelles. De cette dernière, mon toucher peut vous guérir parce que vous faites appel à moi pour elle, mais de la lèpre de l’esprit non : car vous ne voulez pas en guérir parce qu’elle vous plaît. Elle, elle le veut. C’est pourquoi je la purifie, je l’affranchis des chaînes de son esclavage. La pécheresse est morte. Elle est là, dans ces ornements qu’elle a honte de m’offrir pour que je les sanctifie en les consacrant à mes besoins et à ceux de mes disciples, pour les pauvres que je secours grâce au superflu d’autrui : car moi, le Maître de l’univers, je ne possède rien maintenant que je suis le Sauveur de l’homme.

Elle est là, dans ce parfum répandu sur mes pieds, humilié comme ses cheveux, sur cette partie du corps que tu as négligé de rafraîchir de l’eau de ton puits après tout le chemin que j’ai fait pour t’apporter la lumière, à toi aussi. La pécheresse est morte. Et Marie est revenue à la vie, redevenue belle comme une fillette pure par sa vive douleur, par la sincérité de son amour. Elle s’est lavée dans ses larmes. En vérité je te dis, pharisien, qu’entre celui qui m’aime dans sa jeunesse pure et celle-ci qui m’aime avec le sincère regret d’un cœur qui renaît à la grâce, moi je ne fais pas de différence : je confie à la repentie comme à l’homme pur la charge de comprendre ma pensée comme nul autre, et celle de rendre à mon Corps les derniers honneurs et le premier salut (je ne compte pas le salut particulier de ma Mère) quand je serai ressuscité. ”

      236.6 Voilà ce que je voulais dire par mon regard au pharisien. Mais à toi, je te fais remarquer une autre chose, pour ta joie et celle d’un grand nombre.

      A Béthanie aussi, Marie réitéra le geste qui marqua l’aube de sa rédemption. Il y a des gestes personnels qui se répètent et qui trahissent une personne comme son style, des gestes uniques. Mais, comme de juste, à Béthanie le geste est moins humilié et plus confiant dans sa respectueuse adoration.

      Marie a fait beaucoup de chemin depuis l’aube de sa rédemption. Beaucoup. L’amour l’a entraînée comme un vent rapide vers les hauteurs et en avant. L’amour l’a brûlée comme un bûcher, détruisant en elle la chair impure, et rendant maître souverain en elle une âme purifiée. Et Marie, différente dans sa dignité de femme retrouvée, comme différente dans son vêtement – désormais aussi simple que celui de ma Mère –, dans sa coiffure, dans son regard, dans sa contenance, dans sa parole, Marie toute renouvelée a une nouvelle manière de m’honorer par le même geste. Elle prend le dernier de ses vases de parfum, mis en réserve pour moi, et me le répand sur les pieds et sur la tête, sans pleurer, avec un regard que rendent joyeux l’amour et la certitude d’être pardonnée et sauvée. Marie peut bien me faire cette onction et me toucher la tête, maintenant, le repentir et l’amour l’ont purifiée du feu des séraphins, et elle est un séraphin.

      236.7 Dis-le-toi à toi aussi, Maria, ma petite “ voix ”, dis-le aux âmes. Va, dis-le aux âmes qui n’osent venir à moi parce qu’elles se sentent coupables. Il est beaucoup, beaucoup, beaucoup pardonné à ceux qui aiment beaucoup. A ceux qui m’aiment beaucoup. Vous ne savez pas, pauvres âmes, combien le Sauveur vous aime ! Ne craignez rien de moi. Venez avec confiance, avec courage. Je vous ouvre mon cœur et mes bras.

      Souvenez-vous-en toujours : “ Je ne fais aucune différence entre celui qui m’aime avec une pureté intacte et celui qui m’aime avec le sincère regret d’un cœur qui renaît à la grâce. ” Je suis le Sauveur. Souvenez-vous-en toujours.

      Va en paix. Je te bénis. »

Observations de Maria Valtorta

Catéchèse du samedi 22 janvier 1944.


       236.8 Je n’ai cessé de repenser, aujourd’hui, à la dictée de Jésus d’hier soir, et à ce que je voyais et comprenais sans même qu’il en ait parlé.

       J’ajoute incidemment que les conversations des convives – du moins celles que je comprenais, c’est-à-dire celles qui s’adressaient particulièrement à Jésus – portaient sur des événements quotidiens : les Romains, leurs oppositions à la Loi, puis sur la mission de Jésus comme Maître d’une nouvelle école. Mais on devinait que, sous une apparente bienveillance, c’étaient des questions retorses et spécieuses destinées à le mettre dans l’embarras ; mais cela n’était guère aisé car, en quelques mots, Jésus opposait à toute remarque une réponse juste et décisive.

       Comme on lui demandait par exemple de quelle école ou secte particulière il s’était fait le nouveau maître, il répondit simplement :

       « De l’école de Dieu. C’est lui que je suis par sa sainte Loi, et c’est de lui que je me soucie en faisant en sorte que, pour ces petits – ce disant, il regardait Jean avec amour et, en lui, tous les hommes au cœur droit –, elle soit complètement rénovée dans son essence pour redevenir telle qu’elle était lorsque le Seigneur l’a promulguée au Sinaï. Je ramène les hommes à la lumière de Dieu. »

       A une autre question sur l’abus de César qui s’était rendu maître de la Palestine, il a répondu :

       « César est ce qu’il est parce que Dieu l’a voulu. Souviens-toi du prophète Isaïe : sous l’effet d’une inspiration divine, n’a-t-il pas appelé Assur le “ bâton ” de sa colère [1] ? La verge qui punit le peuple qui s’est trop éloigné de Dieu et a la feinte pour vêtement et pour esprit ? Et ne dit-il pas que, après s’en être servi pour châtier, il le brisera parce qu’il aura abusé de sa tâche en devenant trop orgueilleux et trop féroce ? »

       Ce sont là les deux réponses qui m’ont le plus frappée.

       236.9 Ce soir, plus tard, Jésus me dit en souriant :

       « Je devrais t’appeler comme Daniel. Tu es celle qui a soif et qui m’es chère parce que tu as un grand désir de ton Dieu. Et je pourrais continuer à dire de toi ce que mon ange dit à Daniel : “ Ne crains pas car, du premier jour où tu as appliqué ton cœur à comprendre et à te mortifier devant la face de Dieu, tes prières ont été exaucées et c’est à cause d’elles que je suis venu. [2] ” Mais ici, ce n’est plus l’ange qui parle, mais moi, Jésus.

       Je viens toujours, Maria, lorsqu’on “ applique son cœur à comprendre ”. Je ne suis pas un Dieu dur et sévère. Je suis la Miséricorde vivante et je viens plus rapidement que la pensée vers celui qui se tourne vers moi.

       236.10 Même pour la pauvre Marie de Magdala, tellement plongée dans le péché, je suis venu rapidement, avec mon esprit, dès que j’ai senti poindre en elle le désir de comprendre : de comprendre la lumière de Dieu et son état de ténèbres. Et, pour elle, je me suis fait Lumière.

       Je m’adressais à beaucoup de monde ce jour-là, mais en réalité je m’adressais à elle seule. Je ne voyais qu’elle qui s’était approchée, poussée par la fougue d’une âme qui se révoltait contre la chair qui la tenait en esclavage. Je ne voyais qu’elle avec son pauvre visage en détresse, son sourire forcé qui cachait, sous une apparence trompeuse d’assurance et de joie qui était un défi au monde et à elle-même, une immense peine intérieure. Je ne voyais qu’elle, bien plus enserrée dans les ronces que la brebis perdue de la parabole, elle qui se noyait dans le dégoût de sa vie ramené à la surface comme ces vagues profondes qui remontent l’eau du fond.

       Je n’ai rien dit de particulier, ni abordé un sujet indiqué pour elle, qui était une pécheresse notoire, pour ne pas l’humilier et la contraindre à s’enfuir, à rougir d’elle-même ou à venir. Je l’ai laissée tranquille. J’ai laissé mes paroles et mon regard descendre en elle et y agir pour faire de cette impulsion d’un moment sa gloire future de sainte. Je me suis servi d’une de mes plus douces paraboles : un rayon de lumière et de bonté répandu précisément pour elle.

       236.11 Et ce soir-là, alors que je mettais le pied dans la maison du riche orgueilleux chez qui ma parole, étouffée par son orgueil pharisaïque, ne pouvait avoir de l’effet pour devenir gloire future, je savais qu’elle allait venir après avoir tant pleuré dans la pièce où elle avait péché et que, à la lumière de ses larmes, son avenir était déjà décidé.

       En la voyant entrer, les hommes rongés par la luxure ont tressailli dans leur chair et des insinuations leur sont venues à l’esprit. Tous l’ont désirée, à l’exception des deux hommes “ purs ” du banquet : Jean et moi. Tous ont cru que sa venue était due à l’un de ces probables caprices qui, telle une vraie possession démoniaque, la jetaient dans des aventures imprévues. Mais Satan était désormais vaincu. Quand ils se rendirent compte qu’elle ne se tournait pas vers eux, tous pensèrent avec envie qu’elle venait pour moi. L’homme salit toujours les choses les plus pures quand il est seulement homme de chair et de sang. Seuls les purs voient juste, parce que le péché ne vient pas troubler leurs pensées.

       236.12 Mais il ne faut pas s’effrayer de ce que l’homme ne comprenne pas, Maria. Dieu comprend, et cela suffit pour le Ciel. La gloire qui vient des hommes n’augmente en rien la gloire qui est le sort des élus au Paradis. Souviens-t’en toujours.

       Les bonnes actions de la pauvre Marie de Magdala ont toujours été mal jugées. Ses mauvaises actions ne l’ont pas été, parce qu’il s’agissait de bouchées de luxure offertes à la faim insatiable des vicieux. Elle fut critiquée et mal jugée à Capharnaüm, chez le pharisien, critiquée et accablée de reproches à Béthanie, chez elle [3]. Mais Jean, qui dit une grande parole, donne la clé de cette dernière critique : “ Judas… parce qu’il était voleur. ” Moi, je dis : “ Le pharisien et ses amis parce qu’ils étaient vicieux. ” Tu vois ? L’avidité des sens, l’avidité de l’argent haussent la voix pour critiquer une bonne action. Les bons chrétiens ne critiquent pas. Jamais. Ils comprennent.

       Mais, je le répète, peu importent les critiques du monde. Ce qui importe, c’est le jugement de Dieu.

----Le Texte suivant n’apparaît que dans l’ancienne édition de 1985----

[Et je te prépare à l'enseignement de demain. Marque le chapitre 12ème de Daniel avec les paroles qui lui furent dites par mon ange lumineux : "Ne crains pas. La paix est avec toi, rends-toi courageux et sois fort [4]", et toi sache toujours répondre: "Parle, ô mon Seigneur, car tu m'as revigorée"        

Jésus me dit ensuite :

"Quand je te vois ainsi attentive à mes enseignements, tu me sembles une écolière diligente et affectionnée à son maître qui pour elle est tout le "connaissable". Quand d'autre part tu découvres par toi-même des détails nouveaux, tu fais des observations (et cela au cours des visions) tu me fais penser à un bon petit que son père tient par sa menotte en le conduisant devant ce qu'il veut que son enfant voit pour devenir plus intelligent, mais qui, en même temps, n'intervient pas pour donner à son petit la joie de découvrir quelque chose de nouveau et de se sentir grandir par lui-même en fait de pensée.

Pour faire cela tu dois être toujours libre des soucis humains. Toujours plus libre. Tu dois avoir toujours plus d'assurance pour marcher à l'aise dans les sentiers de la contemplation et toujours plus tranquille et confiante en Moi qui te tiens par la main. Un père ne le laisse pas voir, mais par mille détours que l'amour lui inspire, il arrive à ce que son enfant voie telle chose que lui veut que son enfant voie. Oh ! Moi, je suis le plus aimant des pères et le plus patient des maîtres pour mes petits et, quand je peux en tenir un par la main, docile et attentif, je suis heureux. Heureux d'être Maître et Père. Il est si difficile que mes créatures mettent avec confiance leur main dans ma main pour être conduites, instruites par Moi et pour me dire : "Je t'aime par dessus toute chose et avec tout moi-même !" À celles-là, peu nombreuses qui sont ainsi toutes "miennes", sans réserve, Moi j'ouvre les trésors des révélations et des contemplations et je me donne sans réserve.        

C'est pourquoi, Maria, puisque je vous choisis pour faire connaître ma Divinité, dans ses différentes manifestations, à ceux qui ont besoin d'être réveillés et amenés à entrevoir Dieu, souviens-toi d'être tout à fait scrupuleuse pour répéter ce que tu vois. Même une bagatelle a de la valeur et elle n'est pas à toi, mais à Moi. Aussi, il ne t'est pas permis de l'escamoter. Ce serait malhonnête et égoïste. Rappelle-toi que tu es la citerne d'eau divine ou l'eau se déverse pour que tous y aient accès [5]. Pour les dictées, tu es arrivée à la plus fidèle fidélité. Dans les contemplations, tu observes avec beaucoup d'attention, mais dans la hâte d'écrire, et à cause de ton état particulier de santé et de l'ambiance où tu te trouves, il t'arrive d'omettre quelque détail. Il faut l'éviter, mets-les au bas des pages mais indique-les tous. Ce n'est pas un reproche mais un doux conseil de ton Maître.      

Il y a quelques jours tu m'as dit. "Que les hommes t'aiment un peu plus par mon entremise, cela justifie toute ma fatigue et toute ma vie et j'en suis bien récompensée. Même s'il n'y avait qu'un seul homme qui revienne à Toi par l'intermédiaire de ta petite 'violette cachée' [6], elle serait heureuse". Plus tu seras attentive et exacte, et plus grand sera le nombre de ceux qui viennent à Moi et plus grande ta félicité spirituelle présente et ta future félicité éternelle.

Va en paix. Ton Seigneur est avec toi."

[1] Isaïe 10,5-12.

[2] Daniel 10,12.

[3] Onction de Béthanie : EMV 586.7 et Jean 12, 6 - Matthieu 26, 6-13.

[4] Daniel 12, 13.

[5] Allusion à la parabole de la citerne d'eau dans le désert, dans les Cahiers de 1943.

[6] Allusion à la vision symbolique rapportée dans la dictée inaugurale des "Cahiers".

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