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Méditation avec Le Traité de l'Amour de Dieu de St François de Sales

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Message par ami de la Miséricorde Mer 9 Oct - 7:46

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CHAPITRE III
Comme nous nous devons conformer à la divine volonté que l'on appelle signifiée.


La conformité donc de notre coeur à la volonté signifiée de Dieu consiste en ce que nous voulions tout ce que la divine bonté nous signifie être de son intention, croyant selon sa doctrine, espérant selon ses promesses, craignant selon ses menaces, aimant et vivant selon ses ordonnances et avertissements, à quoi tendent les protestations que si souvent nous en faisons ès saintes cérémonies ecclésiastiques.

Car pour cela nous demeurons debout tandis quon lit les levons de l'Évangile, comme prêts à obéir à la sainte signification de la volonté de Dieu, que l'Évangile contient. Pour cela nous baisons le livre à l'endroit de l'Évangile, comme adorant la sainte parole qui déclare la volonté céleste. Pour cela plusieurs saints et saintes portaient sur leurs poitrines anciennement l'Évangile en écrit, comme un épithème (médicament topique) d'amour, ainsi qu'on lit de sainte Cécile; et de fait on trouva celui de saint Matthieu sur le coeur de saint Barnabé trépassé, écrit de sa propre main.

Ensuite de quoi, ès anciens conciles, on mettait au milieu de l'assemblée de tous les évêques un grand trône, et sur icelui le livre des saints Évangiles, qui représentait la personne du Sauveur, roi, docteur, directeur, esprit et unique coeur des conciles et de toute l'Église : tant on honorait la signification de la volonté de Dieu exprimée en ce divin livre. Certes, le grand miroir de l'ordre pastoral, saint Charles, archevêque de Milan, n'étudiait jamais dans l'Écriture sainte, qu'il ne se mit à genoux et tête nue, pour témoigner le respect avec lequel il fallait entendre et lire la volonté de Dieu signifiée.

CHAPITRE IV
De la conformité de notre volonté avec celle que Dieu a de nous sauver.

Dieu nous a signifié en tant de sortes et par tant de moyens qu'il voulait que nous fussions tous sauvés, que nul ne le peut ignorer. A cette intention, il nous a faits à son image et semblance (ressemblance) par la création, et s'est fait à notre image et semblance par l'incarnation; après laquelle il a souffert la mort pour racheter toute la race des hommes et la sauver :

ce qu'il fit avec tant d'amour, que, comme raconte le grand saint Denis, apôtre de la France, il dit un jour au saint homme Carpus qu'il était prêt à pâtir encore une fois pour sauver les hommes, et que cela lui serait agréable, s'il se pouvait faire sans le péché d'aucun homme.

Or, bien que tous ne se sauvent pas, cette volonté néanmoins ne laisse pas d'être une vraie volonté de Dieu, qui agit en nous selon la condition de sa nature et de la nôtre : car sa bonté le porte à nous communiquer libéralement le secours de sa grâce, afin que nous parvenions au bonheur de sa gloire; mais notre nature requiert que sa libéralité nous laisse en liberté de nous en prévaloir pour nous sauver, on de le mépriser pour nous perdre.

J'ai demandé une chose, disait le Prophète, et c'est celle-ci que je requerrai à jamais que je voie la volupté du Seigneur et que je visite son temple. Mais quelle est la volupté de la souveraine bonté, sinon de se répandre et communiquer ses perfections? Ceters, ses délices sont d'être avec les enfants des hommes, pour verser ses grâces sur eux. Rien n'est si agréable et délicieux aux gens libres que de faire leur volonté.

Notre sanctification est la volonté de Dieu, et notre salut son bon plaisir: or, il n'y a nulle différence entre le bon plaisir et la bonne volupté, ni par conséquent donc entre la bonne volupté et la bonne volonté divine; ains la volonté que Dieu a pour le bien des hommes est appelée bonne, parce qu'elle est aimable, propice, favorable, agréable, délicieuse : et comme les Grecs, après saint Paul ont dit; c'est une vraie philanthropie, c'est-à-dire, une bienveillance ou volonté tout amoureuse envers les hommes.

Tout le temple céleste de l'Église triomphante et militante résonne (fait retentir) de toutes parts les cantiques de ce doux amour de Dieu envers nous. Et le corps très sacré du Sauveur, comme un temple très saint de sa divinité, est tout paré de marques et enseignes de cette bienveillance. C'est pourquoi, en visitant le temple divin, nous voyons ces aimables délices que son coeur prend à nous favoriser.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Jeu 10 Oct - 8:00

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CHAPITRE IV
De la conformité de notre volonté avec celle que Dieu a de nous sauver.


 Regardons donc cent fois le jour cette amoureuse volonté de Dieu; et fondant notre volonté dans icelle, écrions (écririons-nous, disons) dévotement: 

O bonté d'infinie douceur, que votre volonté est aimable, que vos faveurs sont désirables ! Vous nous avez créés pour la vie éternelle; et votre poitrine maternelle, enflée des mamelles sacrées d'un amour incomparable, abonde en lait de Miséricorde, soit pour pardonner aux pénitents, soit pour perfectionner les justes. 

Hé ! pourquoi donc ne collons-nous pas nos volontés à la vôtre, comme les petits enfants s'attachent au sein de leur mère, pour sucer le lait de vos éternelles bénédictions?

Théotime, nous devons vouloir notre salut ainsi que Dieu le veut : or, il veut notre salut par manière de désir, et nous le devons aussi incessamment désirer ensuite de son désir. 

Non seulement il veut, mais en effet il nous donne tous les moyens requis pour nous faire parvenir au salut; et nous, ensuite du désir (outre le désir) que nous avons d'être sauvés, nous devons non seulement vouloir, mais en effet accepter toutes les grâces qu'il nous a préparées et qu'il nous offre. 

Il suffit de dire : Je désire d'être sauvé ; mais il ne suffit pas de dire : Je désire embrasser les moyens convenables pour y parvenir; aine il faut d'une résolution absolue, vouloir et embrasser les grâces que Dieu nous départ :  car il faut que notre volonté corresponde à celle de Dieu. Et d'autant quelle nous donne les moyens de nous sauver, nous les devons recevoir comme nous devons désirer le salut, ainsi quelle nous le désire, et parce quelle le désire.

Mais il arrive maintes fois que les moyens de parvenir au salut, considérés en bloc ou en général, sont agréables à notre coeur, et regardés en détail et particulier, ils lui sont effroyables. Car n'avons-nous pas vu le pauvre saint Pierre disposé à recevoir en général toutes sortes de peines, et la mort même, pour suivre son maître? 

et néanmoins quand ce vint au fait et au prendre, pâlir, trembler et renier son maître à la voix d'une simple servante? Chacun pense pouvoir boire le calice de notre Seigneur avec lui; mais quand on nous le présente par effet (en réalité), on s'enfuit, on quitte tout. 

Les choses représentées particulièrement font une impression plus forte, et blessent plus sensiblement l'imagination. 

C'est pourquoi en l'Introduction, nous avons donné par avis qu'après les affections générales on fît des résolutions particulières en la sainte oraison. David acceptait en particulier des afflictions comme un acheminement à sa perfection, quand il chantait en cette sorte : O qu'il m'est bon, Seigneur, que vous m'ayez humilié, afin que j'apprenne vos justifications ! Ainsi furent les apôtres joyeux, ès tribulations, de quoi ils avaient la faveur d'endurer des ignominies pour le nom de leur Sauveur.

CHAPITRE V
De la conformité de notre volonté à celle de Dieu qui nous est signifiée par ses commandements.

 
Le désir que Dieu a de nous faire observer ses commandements est extrême, ainsi que toute l'Écriture témoigne. Et comme le pouvait-il mieux exprimer que par les grandes récompenses qu'il propose aux observateurs de sa loi, et les étranges supplices dont il menace les violateurs d'icelle? C'est pourquoi David exclame : O Seigneur! vous avez ordonné que vos commandements soient trop plus (de la manière la plus complète) observés.

 Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Ven 11 Oct - 1:17

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CHAPITRE V
De la conformité de notre volonté à celle de Dieu qui nous est signifiée par ses commandements.


Or, l'amour de complaisance regardant ce désir divin, veut complaire à Dieu en l'observant: l'amour de bienveillance, qui veut tout soumettre à Dieu, soumet par conséquent nos désirs et use volontés à celle-ci que Dieu nous a signifiée;

et de là provient non seulement l'observation, mais aussi l'amour des commandements que David exalte d'un style extraordinaire au psaume 118, qu'il semble n'avoir fait que pour ce sujet :

Que j'aime votre loi d'un très ardent amour !
C'est tout mon entretien, j'en parle tout le jour.
O Seigneur ! je chéris vos très saints témoignages
Plus que l'or et l'éclat du topaze doré,
Que doux à mon palais sont vos sacrés langages !
Pour moi fade est le miel, s'il leur est comparé.

Mais pour exciter ce saint et salutaire amour des commandements, nous devons contempler leur beauté, laquelle est admirable.

Car comme il y a des oeuvres qui sont mauvaises parce qu'elles sont défendues, et des autres qui sont défendues parce qu'elles sont mauvaises;

aussi y en a-t-il qui sont bonnes parce qu'elles sont commandées, et des autres qui sont commandées parce qu'elles sont bonnes et très utiles; de sorte que toutes sont très bonnes et très aimables, parce que le commandement donne la bonté aux unes qui n'en auraient point autrement, et donne un surcroît de bonté aux autres, qui sans être commandées ne laisseraient pas d'être bonnes.

Nous ne recevons pas le bien en bonne part quand il nous est présenté par une main ennemie. Les Lacédémoniens ne voulurent pas suivre un fort sain et salutaire conseil d'un méchant homme, jusqu'à ce qu'un homme de bien le leur redit.

Au contraire, le présent n'est jamais qu'agréable quand un ami le fait: les plus doux commandements deviennent âpres si un coeur tyran et cruel les impose, et ils deviennent très aimables quand l'amour les ordonne: le service de Jacob lui semblait une royauté, parce qu'il procédait de l'amour.

O que doux et désirable est le joug de la loi céleste qu'un roi si aimable a établie sur nous !

Plusieurs observent les commandements comme on avale les médecines, plus crainte de mourir damnés que pour le plaisir de vivre au gré du Sauveur.

Ains comme il y a des personnes qui, pour agréable que soit un médicament, ont du contre-coeur à le prendre, seulement parce qu'il porte le nom de médicament; aussi y a-t-il des âmes qui ont en horreur les actions commandées, seulement parce qu'elles sont commandées;

et s'est trouvé tel homme, ce dit-on, qui ayant doucement vécu dans la grande ville de Paris lespace de quatre-vingts ans sans en sortir, soudain qu'on lui eut enjoint de par le roi dy demeurer encore le reste de ses jours, il alla dehors voir les champs que de sa vie il navait désirés.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Ven 11 Oct - 22:12

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CHAPITRE V
De la conformité de notre volonté à celle de Dieu qui nous est signifiée par ses commandements.


Au contraire, le coeur amoureux aime les commandements; et plus ils sont de chose difficile, plus il les trouve doux et agréables, parce qu'il complaît plus parfaitement au bien-aimé et lui rend plus d'honneur. Il lance et chante des hymnes dallégresse, quand Dieu lui enseigne ses commandements et justifications. Et comme le pèlerin qui va gaiement chantant en son voyage, ajoute voirement la peine du chant à celle du marcher, et néanmoins en effet par surcroît de peine il se désennuie et allège du travail du chemin; aussi l'amant sacré trouve tant de suavité aux commandements, que rien ne lui donne tant d'haleine et de soulagement en cette vie mortelle que la gracieuse charge des préceptes de son Dieu.

Dont le saint Psalmiste s'écrie : O Seigneur, vos justifications ou commandements me sont des douces chansons en ce lieu de mon pèlerinage.

On dit que les mulets et chevaux chargés de figues (croyance populaire sans doute) succombent incontinent au faix et perdent toutes leurs forces. Plus douces que les figues est la loi du Seigneur; mais l'homme brutal qui s'est rendu comme le cheval et mulet, es quels il n'y a point d'entendement, perd le courage et ne peut trouver des forces pour porter cet aimable faix.

Au contraire, comme une branche d'agnus-castus empêche de lassitude le voyageur qui la porte, aussi la croix, la mortification, le joug, la loi du Sauveur, qui est le vrai agneau chaste, est une charge qui délasse, qui soulage et récrée les coeurs qui aiment sa divine Majesté. On n'a point de travail en ce qui est aimé; on s'il y a du travail, c'est un travail bien-aimé le travail mêlé du saint amour est un certain aigre-doux plus agréable au goût qu'une pure douceur.

Le divin amour nous rend donc ainsi conformes à la volonté de Dieu, et nous fait soigneusement observer ses commandements en qualité de désir absolu de sa majesté à laquelle nous voulons plaire;
si que cette complaisance prévient par sa douce et aimable violence la nécessité d'obéir que la loi nous impose, convertissant cette nécessité en vertu de dilection, et toute la difficulté en délectation.

Agnus castus, gattilier, arbrisseau aromatique auquel on attribuait anciennement des propriétés qui lui faisaient donner ce nom d'agneau chaste.

CHAPITRE VI.
De la conformité de notre volonté à celle que Dieu nous a signifiée par ses conseils.


Le commandement témoigne une volonté fort entière et pressante de celui qui ordonne; mais le conseil ne nous représente qu'une volonté de souhait. Le commandement nous oblige, le conseil nous incite seulement. Le commandement rend coupables les transgresseurs; le conseil rend seulement moins louables ceux qui ne le suivent pas.

Les violateurs des commandements méritent d'être damnés: ceux qui négligent les conseils méritent seulement d'être moins glorifiés. Il y a différence entre commander et recommander. Quand on commande, on use d'autorité pour obliger; quand on recommande, on use d'amitié pour induire et provoquer. Le commandement impose nécessité; le conseil et recommandation nous incite à ce qui est de plus grande utilité.

Au commandement correspond l'obéissance, et la créance au conseil. On suit le conseil afin de plaire, et le commandement pour ne pas déplaire. C'est pourquoi l'amour de complaisance qui nous oblige de plaire au bien-aimé, nous porte par conséquent à la suite de ses conseils; et l'amour de bienveillance qui veut que toutes les volontés et affections lui soient soumises, fait que nous voulons, non seulement ce qu'il ordonne, mais ce qu'il conseille et à quoi il exhorte ; ainsi que l'amour et respect qu'un enfant fidèle porte à son bon père, le fait résoudre de vivre, non seulement selon les commandements qu'il impose, mais encore selon les désirs et inclinations qu'il manifeste.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Dim 13 Oct - 22:06

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CHAPITRE VI
De la conformité de notre volonté à celle que Dieu nous a signifiée par ses conseils.


Le conseil se donne voirement en faveur de celui qu'on conseille, afin qu'il soit parfait. Si tu veux être parfait, dit le Sauveur, va, vends tout ce que tu as et le donne aux pauvres et me suis.

Mais le coeur amoureux ne reçoit pas le conseil pour son utilité, ains pour se conformer au désir de celui qui conseille, et rendre l'hommage qui est dû à sa volonté.

Et partant il ne reçoit les conseils, sinon ainsi que Dieu le veut; et Dieu ne veut pas qu'un chacun observe tous les conseils, ains seulement ceux qui sont convenables selon la diversité des personnes, des temps, des occasions et des forces, ainsi que la charité le requiert; car c'est elle qui, comme reine de toutes les vertus, de tous les commandements, de tous les conseils, et en somme de toutes les lois et de toutes les actions chrétiennes, leur donne à tous et à toutes le rang, l'ordre, le temps et la valeur.

Si ton père ou ta mère ont une vraie nécessité de ton assistance pour vivre, il n'est pas temps alors de pratiquer le conseil de la retraite en un monastère; car la charité t'ordonne que tu ailles en effet exécuter ce commandement d'honorer, servir, aider et secourir ton père ou ta mère.

Tu es un prince par la postérité duquel les sujets de la couronne qui t'appartient doivent être conservés en paix, et assurés contre la tyrannie, sédition et guerre civile : l'occasion donc d'un si grand bien t'oblige de produire en un saint mariage des légitimes successeurs. Ce n'est pas perdre la chasteté, ou au moins c'est la perdre chastement, que de la sacrifier au bien public en faveur de la charité.

As-tu une santé faible, inconstante, qui a besoin de grands supports?

Ne te charge donc pas volontairement de la pauvreté effectuelle; car la charité te le défend.

Non seulement la charité ne permet pas aux pères de famille de tout vendre pour donner aux pauvres, mais leur ordonne d'assembler honnêtement ce qui est requis pour l'éducation et sustentation de la femme, des enfants et serviteurs; comme aussi aux rois et princes d'avoir des trésors qui, provenus d'une juste épargne et non de tyranniques inventions servent comme de salutaires préservatifs contre les ennemis visibles.

Saint Paul ne conseille-t-il pas aux mariés, passé le temps de l'oraison, de retourner au train bien réglé au devoir nuptial ? Les conseils sont tous donnés pour la perfection du peuple chrétien, mais non pas pour celle de chaque chrétien en particulier.

Il y a des circonstances qui les rendent quelquefois impossibles, quelquefois inutiles, quelquefois périlleux, quelquefois nuisibles à quelques-uns, qui est une des intentions pour lesquelles notre Seigneur dit de l'un d'iceux ce qu'il veut -être entendu de tous :

Qui te peut prendre, qu'il le prenne; comme s'il disait, ainsi que saint Jérôme expose: Qui peut gagner et emporter l'honneur de la chasteté comme un prix de réputation, qu'il le prenne car il est exposé à ceux qui courront vaillamment.

Tous donc ne peuvent pas, c'est-à-dire, il n'est pas expédient à tous d'observer tous les conseils, lesquels étant donnés en faveur de la charit, elle sert de règle et de mesure à l'exécution d'iceux.

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Message par ami de la Miséricorde Lun 14 Oct - 21:40

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CHAPITRE VI.
De la conformité de notre volonté à celle que Dieu nous a signifiée par ses conseils.


Quand donc la charité l'ordonne, on tire les moines et religieux des cloîtres pour en faire des cardinaux, des prélats, des curés; voire même on les réduit quelquefois au mariage pour le repos des royaumes, ainsi que j'ai dit ci-dessus.

Que si la charité fait sortir des cloîtres ceux qui par voeu solennel s'y étaient attachés, à plus forte raison, et pour moindre sujet, on peut, par l'autorité de cette même charité, conseiller à plusieurs de demeurer chez eux, garder leurs moyens, se marier, voire de prendre les armes et aller à la guerre, qui est une profession si dangereuse.

Or, quand la charité porte les uns à la pauvreté, et qu'elle en retire les autres, quand elle en pousse les uns au mariage, les autres à la continence; qu'elle enferme l'un dans le cloître, et en fait sortir l'autre, elle n'a pas besoin d'en rendre raison à personne; car elle a la plénitude de la puissance en la loi chrétienne, selon qu'il est écrit La charité peut toutes choses.

Elle a le comble de la prudence, selon qu'il est dit : La charité ne fait rien en vain. Que si quelqu'un veut contester, et lui demander pourquoi elle fait ainsi, elle répondra hardiment : Parce que te Seigneur en a besoin; tout est fait pour la charité, et la charité pour Dieu.

Tout doit servir à la charité, et elle à personne, non pas même à son bien-aimé, duquel elle n'est pas servante, mais épouse.

Pour cela on doit prendre d'elle l'ordre de l'exercice des conseils; car aux uns elle ordonnera la chasteté, et non la pauvreté; aux autres l'obéissance, et non la chasteté; aux autres le jeûne, et non l'aumône; aux autres l'aumône, et non le jeûne; aux autres la solitude, et non la charge pastorale; aux autres la conversation, et non la solitude.

En somme, c'est une eau sacrée par laquelle le jardin de l'Église est fécondé, et bien qu'elle nait qu'une couleur sans couleur, les fleurs néanmoins qu'elle fait croître ne laissent pas d'avoir une chacune sa couleur différente.

Elle fait des martyrs plus vermeils que la rose, des vierges plus blanches que le lis aux uns elle donne le fin violet de la mortification, aux autres le jaune des soucis du mariage; employant diversement les conseils pour la perfection des âmes qui sont si heureuses que de vivre sous sa conduite.

CHAPITRE VII
Que l'amour de la volonté de Dieu signifiée ès commandements nous porte à l'amour des conseils.


O Théotime ! que cette volonté divine est aimable! ô quelle est amiable (douce) et désirable ! ô loi toute d'amour et toute pour l'amour!

Les Hébreux, par le mot de paix, entendent l'assemblage et comble de tous biens, c'est-à-dire, la félicité; et le Psalmiste sécrie : Qu'une paix plantureuse abonde à ceux qui aiment la loi de Dieu, et que nul choppement (action de chopper, heuter en marchant) ne leur arrive.

Comme sil voulait dire: O Seigneur! que de suavité en l(amour de vos sacrés commandements ! toute douceur délicieuse saisit le coeur qui est saisi de la dilection de votre loi.

Certes ce grand roi, qui avait son coeur fait selon le coeur de Dieu, savourait si fort la parfaite excellence des ordonnances divines, qu'il semble que ce soit un amoureux épris de la beauté de cette loi, comme de la chaste épouse et reine de son coeur, ainsi qu'il appert par les continuelles louanges qu'il lui donne.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Mer 16 Oct - 7:26

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CHAPITRE VII
Que l'amour de la volonté de Dieu signifiée ès commandements nous porte à l'amour des conseils.


Quand l'épouse céleste veut exprimer l'infinie suavité des parfums de son divin époux: Votre nom, lui dit-elle, est un onguent répandu; comme si elle disait : Vous êtes si excellemment parfumé, qu'il semble que vous soyez tout parfum, et qu'il soit à propos de vous appeler onguent et parfum, plutôt qu'oint et parfumé.

Ainsi l'âme qui aime Dieu, est tellement transformée en la volonté divine, qu'elle mérite plutôt d'être nommée volonté de Dieu, qu'obéissante ou sujette à la volonté divine ; dont Dieu dit par Isaïe qu'il appellera l'Église chrétienne d'un nom nouveau que la bouche du Seigneur nommera, marquera et gravera dans le coeur de ses fidèles;

puis expliquant ce nom, il dit que ce sera : Ma volonté en icelle; comme s'il disait qu'entre ceux qui ne sont pas chrétiens, un chacun a sa volonté propre au milieu de son coeur; mais parmi les vrais enfants du Sauveur, chacun quittera sa volonté, et il n'y aura plus qu'une volonté maîtresse, régente et universelle, qui animera, gouvernera et dressera toutes les âmes, tous les coeurs et toutes les volontés; et le nom d'honneur des chrétiens ne sera autre chose, sinon la volonté de Dieu en eux :

volonté qui règnera sur toutes les volontés, et les transformera toutes en soi; de sorte que les volontés des chrétiens et la volonté de notre Seigneur ne soient plus qu'une seule volonté.

Ce qui fut parfaitement vérifié en la primitive Église, lorsque, comme dit le glorieux saint Luc, en la multitude des croyants il n'y avait qu'un coeur et qu'une âme :

car il n'entend pas parler du coeur qui fait vivre nos corps, ni de l'âme qui anime ces coeurs d'une vie humaine; mais il parle du coeur qui donne la vie céleste à nos âmes, et de l'âme qui anime nos coeurs de la vie surnaturelle :

coeur et âme très unique des vrais chrétiens, qui n'est autre chose que la volonté de Dieu. La vie, dit le Psalmiste, est en la volonté de Dieu, non seulement parce que notre vie temporelle dépend de la volonté divine, mais aussi d'autant que notre vie spirituelle en l'exécution d'icelle, par laquelle Dieu vit et règne en nous, et nous fait vivre et subsister en lui.

Au contraire, le méchant, dés le siècle, c'est-à-dire toujours, a rompu le joug de la loi de Dieu, et a dit : Je ne servirai point. C'est pourquoi Dieu dit qu'il l'a appelé, dés le ventre de sa mère, transgresseur et rebelle : et parlant au roi de Tyr, il lui reproche qu'il avait mis son coeur comme le coeur de Dieu; car l'esprit révolté veut que son coeur soit maître de soi-même, et que sa propre volonté soit souveraine comme la volonté de Dieu.

Il ne veut pas que la volonté divine règne sur la sienne, ains veut être absolu et sans dépendance quelconque.

O Seigneur éternel, ne le permettez pas, ains faites que jamais ma volonté ne soit faite, mais la vôtre.

Hélas! nous sommes en ce monde, non point pour faire nos volontés, mais celle de votre bonté qui nous y a mis.

Il fut écrit de vous, ô Sauveur de mon âme! que vous fissiez la volonté de votre Père éternel; et par le premier vouloir humain de votre âme, à l'instant de votre conception, vous embrassâtes amoureusement cette loi de la volonté divine, et la mîtes au milieu de votre coeur pour y régner et dominer éternellement.

Eh! qui fera la grâce à mon âme qu'elle n'ait point de volonté que la volonté de Dieu?

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Jeu 17 Oct - 22:50

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CHAPITRE VII
Que l'amour de la volonté de Dieu signifiée ès commandements nous porte à l'amour des conseils.


Or, quand notre amour est extrême à l'endroit de la volonté de Dieu, nous ne nous contentons pas de faire seulement la volonté divine qui nous est signifiée ès commandements, mais nous nous rangeons encore à l'obéissance des conseils, lesquels ne nous sont donnés que pour plus parfaitement observer les commandements, auxquels aussi ils se rapportent, ainsi que dit excellemment saint Thomas.

O combien excellente est l'observation de la défense des injustes voluptés en celui qui a même renoncé aux plus justes et légitimes délices:

ô combien celui-là est éloigné de convoiter le bien d'autrui, qui rejette toutes richesses, et celles mêmes que saintement il pourrait garder! Que celui-ci est bien éloigné de vouloir préférer sa volonté à celle de Dieu, qui, pour faire la volonté de Dieu, s'assujettit à celle d'un homme.

David était un jour en son préside (son camp, sa tente), et la garnison des Philistins en Bethléem. Or il fit un souhait, disant :

O si quelqu'un me donnait à boire de l'eau de la citerne qui est à la porte de Bethléem! Et voilà qu'il n'eut pas plus tôt dit le mot, que trois vaillants chevaliers partent de là, main et tête baissées, traversent l'armée ennemie, vont à la citerne de Bethléem, puisent de l'eau, et l'apportent à David:

lequel voyant le hasard auquel ces gentilshommes s'étaient mis pour contenter son appétit, ne voulut point boire cette eau conquise au péril de leur sang et de leur vie, ains la répandit en oblation au Père éternel.

Eh! voyez, je vous prie, Théotime, quelle ardeur de ces chevaliers au service et contentement de leur maître! ils volent et fendent la presse des ennemis avec mille dangers de se perdre, pour assouvir un seul simple souhait que le roi leur témoigne.

Le Sauveur étant en ce monde déclara sa volonté en plusieurs choses par manière de commandement, et en plusieurs autres il la signifia seulement par manière de souhait : car il loua fort la chasteté, la pauvreté, l'obéissance et résignation parfaite, l'abnégation de la propre volonté, la viduité, le jeûne, la prière ordinaire; et ce quil dit de la chasteté, que qui en pourrait emporter le prix, qu'il le prit, il l'a ainsi dit de tous les autres conseils.

A ce souhait, les plus vaillants chrétiens se sont mis à la course; et forçant toutes les répugnances, convoitises et difficultés, ont atteint à la sainte perfection, se rangeant à l'étroite observance des désirs de leur roi, obtenant par ce moyen la couronne de gloire.

Certes, ainsi que témoigne le divin Psalmiste, Dieu n'exauce pas seulement l'oraison de ses fidèles, ains il exauce même encore le seul désir d'iceux, et la seule préparation qu'ils font en leurs coeurs pour prier tant il est favorable et propice à faire la volonté de ceux qui l'aiment.

Et pourquoi donc réciproquement ne serons-nous si jaloux de suivre la sacrée volonté de notre Seigneur, que nous fassions non seulement ce qu'il commande, mais encore ce qu'il témoigne d'agréer et souhaiter?

Les âmes nobles n'ont pas besoin d'un plus fort motif pour embrasser un dessein, que de savoir que le bien-aimé le désire. Mon âme, dit l'une d'icelles, s'est écoulée soudain que mon ami a parlé.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Sam 19 Oct - 10:02

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CHAPITRE VIII
Que le mépris des conseils évangéliques est un grand péché.


Les paroles par lesquelles notre Seigneur nous exhorte de tendre et prétendre à la perfection, sont si fortes et pressantes, que nous ne saurions dissimuler l'obligation que nous avons de nous engager à ce dessein.

Soyez saints, dit-il, parce que je suis saint . Qui est saint, qu'il soit encore davantage sanctifié, et qui est juste, qu'il soit encore plus justifié. Soyez parfaits, ainsi que votre Père céleste est parfait.

Pour cela, le grand saint Bernard écrivant au glorieux saint Guarin, abbé dAux (Notre-Dame des Alpes, monastère du diocèse de Genève, fondé en 1133.), duquel la vie et les miracles ont tant rendu de bonne odeur en ce diocèse: L'homme juste, dit-il, ne dit jamais: C'est assez; il a toujours faim et soif de la justice.

Certes, Théotime, quant aux biens temporels, rien ne suffit à celui auquel ce qui suffit ne suffit pas : car qu'est-ce qui peut suffire à un coeur auquel la suffisance n'est pas suffisante? Mais quant aux biens spirituels, celui n'en a pas ce qui lui suffit (pour celui-là nen a pas. La construction de la phrase est évidemment tourmentée.), auquel il suffit d'avoir ce qui lui suffit; et la suffisance n'est pas suffisante, parce que la vraie suffisance ès choses divines consiste en partie au désir de l'affluence.

Dieu, au commencement du monde, commanda à la terre de germer l'herbe verdoyante faisant sa semence, et tout arbre fruitier faisant son fruit, un chacun selon son espèce, qui sùt aussi sa semence en soi-même.

Et ne voyons-nous pas par expérience que les plantes et fruits n'ont pas leur juste croissance et maturité, que quand elles portent leurs graines et pépins, qui leur servent de géniture (famille, enfants) pour la production de plantes et d'arbres de pareille sorte? Jamais vertus n'ont leur juste stature et suffisance, qu'elles ne produisent eu nous des désirs de faire progrès, qui, comme semences spirituelles, servent à la production de nouveaux
degrés de vertus.

Et me semble que la terre de notre coeur a commandement de germer les plantes des vertus qui portent les fruits des saintes oeuvres, une chacune selon son genre, et qui ait les semences des désirs et desseins de toujours multiplier et avancer en perfection. Et la vertu qui n'a point la graine ou le pépin de ces désirs, elle n'est pas en sa suffisance et maturité. « O donc, dit saint Bernard au fainéant, tu ne veux pas t'avancer en la perfection?

Non. Et tu ne veux pas non plus empirer? Non de vrai. Et quoi donc tu ne veux être ni pire ni meilleur? Hélas ! pauvre homme, tu veux être ce qui ne peut être.

Rien voirement (à la vérité, à vrai dire) n'est stable ni ferme en ce monde; mais de l'homme il en est dit encore plus particulièrement que jamais il ne demeure en un état. Il faut donc ou qu'il savance, ou qu'il retourne en arrière. »Or, je ne dis pas, non plus que saint Bernard, que ce soit péché de ne pratiquer pas les conseils. Non certes, Théotime : car c'est la propre différence du commandement au conseil, que le commandement nous oblige sous peine de péché et le conseil nous invite sans peine de péché.

Néanmoins je dis bien que c'est un grand péché de mépriser la prétention à la perfection chrétienne, et encore plus de mépriser la semonce par laquelle notre Seigneur nous y appelle: mais c'est une impiété insupportable de mépriser les conseils et moyens d'y parvenir que notre Seigneur nous marque. C'est une hérésie de dire que notre Seigneur ne nous a pas bien conseillés,et un blasphème de dire à Dieu : Retire-toi de nous, nous ne voulons pas la science de tes voies.

Mais c'est une irrévérence horrible contre celui qui avec tant damour et de suavité nous invite à la perfection, de dire : Je ne veux pas être saint ni parfait, ni avoir plus de part en votre bienveillance, ni suivre les conseils que vous me donnez pour faire progrès en icelle.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Dim 20 Oct - 0:41

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CHAPITRE VIII
Que le mépris des conseils évangéliques est un grand péché.


On peut bien, sans pécher, ne suivre pas les conseils, pour l'affection que l'on a ailleurs: comme, par exemple, on peut bien ne vendre pas ce que l'on a, et ne le donner pas aux pauvres, parce qu'on n'a pas le courage de faire un si grand renoncement.

On peut bien aussi se marier, parce qu'on aime une femme, on qu'on n'a pas assez de force en l'âme pour entreprendre la guerre qu'il faut faire à la chair.

Mais de faire profession de ne vouloir point suivre les conseils, ni aucun d'iceux, cela ne se peut faire sans mépris de celui qui les donne.

De ne suivre pas le conseil de virginité, afin de se marier, cela n'est pas malfait; mais de se marier pour préférer le mariage à la chasteté, comme font les hérétiques, c'est un grand mépris ou du conseiller ou du conseil.

Boire du vin contre l'avis du médecin, quand on est vaincu de la soif ou de la fantaisie d'en boire, ce n'est pas proprement mépriser le médecin ni son avis, mais dire : Je ne veux point suivre l'avis du médecin; il faut que cela provienne d'une mauvaise estime qu'on a de lui.

Or, quant aux hommes, on peut souvent mépriser leur conseil, et ne mépriser pas ceux qui le donnent, parce me ce n'est pas mépriser un homme, d'estimer qu'il ait erré.

Mais quant à Dieu, rejeter son conseil et le mépriser, cela ne peut provenir que de l'estime que l'on fait qu'il n'a pas bien conseillé ce qui ne peut être pensé que par esprit de blasphème; comme si Dieu n'était pas assez sage pour savoir, ou assez bon pour vouloir bien conseiller.

Et c'en est de même des conseils de l'Église, laquelle, à raison de la continuelle assistance du Saint-Esprit, qui l'enseigne et conduit en toute vérité, ne peut jamais donner de mauvais avis.

CHAPITRE IX.
Suite de discours commencé. Comme chacun doit aimer, quoique non pas pratiquer, tous les conseils évangéliques; et comme néanmoins chacun doit pratiquer ce qu'il peut.


Encore que tous les conseils ne puissent, ni doivent être pratiqués par chaque chrétien en particulier, si est-ce qu'un chacun est obligé de les aimer tous, parce qu'ils sont tous très bons.

Si vous avez la migraine, et que l'odeur du muse vous nuise, laisserez-vous pour cela d'avouer que cette senteur soit bonne et agréable? Si une robe d'or ne vous est pas advenante, direz-vous qu'elle ne vaut rien? Si une bague n'est pas pour votre doigt, la jetterez-vous pour cela dans la boue?

Louez donc, Théotime, et aimez chèrement tous les conseils que Dieu a donnés aux hommes. O que béni soit à jamais l'ange du grand conseil, avec tous les avis qu'il donne, et les exhortations qu'il fait aux humains !

Le coeur est réjoui par les onguents et bonnes senteurs, dit Salomon, et par les bons conseils de l'ami, l'âme est adoucie. Mais de quel ami et de quels conseils parlons-nous?

O Dieu! c'est de l'ami des amis, et ses conseils sont plus aimables que le miel ! L'ami, c'est le Sauveur; ses conseils sont pour le salut.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Lun 21 Oct - 11:23

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CHAPITRE IX.
Suite de discours commencé. Comme chacun doit aimer, quoique non pas pratiquer, tous les conseils évangéliques; et comme néanmoins chacun doit pratiquer ce qu'il peut.


Réjouissons-nous, Théotime, quand nous verrons des personnes entreprendre la suite des conseils que nous ne pouvons ou ne devons pas observer : prions pour eux, bénissons-les, favorisons-les et les aidons; car la charité nous oblige de n'aimer pas seulement ce qui est bon pour nous, mais d'aimer encore ce qui est bon pour le prochain.

Nous témoignerons assez d'aimer tous les conseils, quand nous observerons dévotement ceux qui nous seront convenables; car tout ainsi que celui qui croit un article de foi d'autant que Dieu la révélé par sa parole annoncée et déclaré par l'Eglise, ne saurait mécroire (refuser de croire) les autres; et celui qui observe un commandement pour le vrai amour de Dieu, est tout prêt à observer les autres quand l'occasion s'en présentera;

de même celui qui aime et estime un conseil évangélique, parce que Dieu la donné, il ne peut qu'il n'estime consécutivement tous les autres, puisqu'ils sont aussi de Dieu.

Or, nous pouvons aisément en pratiquer plusieurs, quoique non pas tous ensemble ; car Dieu en a donné plusieurs, afin que chacun en puisse observer quelques-uns, et il n'y a jour que nous n'en ayons quelque occasion.

La charité requiert-elle que, pour secourir votre père ou votre mère vous demeuriez chez eux conservez néanmoins l'amour et l'affection à Votre retraite, ne tenez votre coeur au logis paternel qu'autant qu'il faut pour y faire ce que la charité vous ordonne.

N'est-il pas expédient, à cause de votre qualité, que vous gardiez la parfaite chasteté; gardez-en donc au moins ce que, sans faire tort à la charité, vous en pourrez garder.

Qui ne peut faire le tout, qu'il fasse quelque partie. Vous n'êtes pas obligé de rechercher celui qui vous a offensé, car c'est à lui de revenir à soi, et venir à vous pour vous donner satisfaction, puisqu'il vous a prévenu par injure et outrage; mais allez néanmoins, Théotime, faites ce que le Sauveur vous conseille, prévenez-le au bien, rendez-lui bien pour mal, jetez sur sa tête et sur son coeur un brasier ardent de témoignages de charité qui le brûle tout, et le force de vous aimer.

Vous n'êtes pas obligé par la rigueur de la loi de donner à tous les pauvres que vous rencontrez, ains seulement à ceux qui en ont très grand besoin; mais ne laissez pas pour cela, suivant le conseil du Sauveur, de donner volontiers à tous les indigents que vous trouverez, autant que votre condition et que les véritables nécessités de vos affaires vous le permettront.

Vous n'êtes pas obligé de faire aucun voeu, mais faites-en pourtant quelques-uns qui seront jugés propres par votre père spirituel pour, votre avancement eu l'amour divin.

Vous pouvez librement user du vin dans les termes de ta bienséance; mais, selon le conseil de saint Paul à Timothée, n'en prend que ce qu'il faut pour soulager votre estomac.

Il y a divers degrés de perfection ès conseils: de prêter aux pauvres, hors la très grande nécessité, c'est le premier degré du conseil de l'aumône, et c'est un degré plus haut de leur donner, plus haut encore de donner tout, et enfin encore plus haut de donner sa personne, en la vouant au service des pauvres.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Lun 21 Oct - 23:17

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CHAPITRE IX.
Suite de discours commencé. Comme chacun doit aimer, quoique non pas pratiquer, tous les conseils évangéliques; et comme néanmoins chacun doit pratiquer ce qu'il peut.


L'hospitalité, hors l'extrême nécessité, est un conseil : recevoir l'étranger est le premier degré d'icelui; mais aller sur les avenues des chemins pour les semondre (exhoter, reprendre), comme faisait Abraham, c'est un degré plus haut, et encore plus de se loger ès lieux périlleux, pour retirer, aider et servir les passants : en quoi excella ce grand saint Bernard de Menthon, originaire de ce diocèse, lequel, étant issu d'une maison fort illustre, habita plusieurs années entre les jougs (sommets, quelquefois chaman de montagnes) et cimes de nos Alpes, y assembla plusieurs compagnons, pour attendre, loger, secourir, délivrer des dangers de la tourmente les voyageurs et passants, qui mourraient souvent entre les orages, les neiges et froidures, sans les hôpitaux que ce grand ami de Dieu établit et fonda ès deux monts, qui pour cela sont appelés de son nom, Grand-Saint-Bernard, au diocèse de Sion, et Petit-Saint-Bernard, en celui de Tarentaise.

Visiter les malades qui ne sont pas en extrême nécessité, c'est une louable charité; les servir est encore meilleur; mais se dédier à leur service, c'est l'excellence de ce conseil, que les clercs de la Visitation des infirmes exercent par leur propre institut; et plusieurs dames en divers lieux, à l'imitation de ce grand saint Samson, gentilhomme et médecin romain, qui, en la ville de Constantinople, où il fut prêtre, se dédia tout à fait, avec une admirable charité, au service des malades, en un hôpital qu'il y commença, et que l'empereur Justinien éleva et paracheva; à l'imitation des saintes Catherine de Sienne et de Gênes, de sainte Elisabeth de Hongrie, et des glorieux amis de Dieu, saint François et le bienheureux lgnace de Loyola, qui, au commencement de leurs ordres, firent cet exercice avec ardeur et utilité spirituelle incomparable.

Les vertus ont donc une certaine étendue de perfection, et, pour l'ordinaire, nous ne sommes pas obligés de les pratiquer en l'extrémité de leur excellence: il suffit d'entrer si avant en l'exercice d'icelles, qu'en effet on y soit.

Mais de passer outre, et s'avancer en la perfection, c'est un conseil; les actes héroïques des vertus n'étant pas pour l'ordinaire commandés, ains seulement conseillés. Que si, en quelque occasion, nous nous trouvons obligés de les exercer, cela arrive pour des occurrences rares et extraordinaires, qui les rendent nécessaires à la conservation de la grâce de Dieu.

Le bienheureux portier de la prison de Sébaste, voyant l'un des quarante qui étaient lors martyrisés perdre le courage et la couronne du martyre, se mit en sa place, sans que personne le poursuivit, et fut ainsi le quarantième de ces glorieux et triomphants soldats de notre Seigneur.

Saint Adauctus, voyant que l'on conduisait saint Félix au martyre: Et moi, dit-il, sans être pressé de personne, je suis aussi bien chrétien que celui-ci, adorant le même Sauveur; puis baisant saint Félix, s'achemina avec lui au martyre, et eut la tête tranchée. Mille des anciens martyrs en firent de même; et pouvant également éviter et subir le martyre sans pécher, ils choisirent de le subir généreusement plutôt que de l'éviter loisiblement (comme ils en avaient le loisir).

En ceux-ci donc le martyre fut un acte héroïque de la force et constance qu'un saint excès d'amour leur donna. Mais quand il est force d'endurer le martyre, ou renoncer à la foi, le martyre ne laisse pas d'être martyre, et un excellent acte d'amour et de force; néanmoins je ne sais s'il le faut nommer acte héroïque, n'étant pas choisi par aucun excès d'amour, ains par la nécessité de la loi, qui en ce cas le commande.

Or, en la pratique des actes héroïques de la vertu consiste la parfaite imitation du Sauveur, qui, comme dit le grand saint Thomas, eut dès linstant de sa conception toutes les vertus en un degré héroïque; et certes, je dirais volontiers plus qu'héroïque, puisqu'il n'était pas simplement plus qu'homme, mais infiniment plus qu'homme, c'est-à-dire, vrai Dieu.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Mar 22 Oct - 23:08

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CHAPITRE X
Comme il se faut conformer à la volonté divine qui nous est signifiée par les inspirations; et premièrement, de la variété des moyens par lesquels Dieu nous inspire.


Les rayons du soleil éclairent en échauffant, et échauffent en éclairant. L'inspiration est nu rayon céleste qui porte dans nos coeurs une lumière chaleureuse, par laquelle il nous fait voir le bien, et nous échauffe au pourchas (recherche ardente) d'icelui.

Tout ce qui a une vie sur terre s'engourdit au froid de l'hiver; mais au retour de la chaleur vitale du printemps tout reprend son mouvement. Les animaux terrestres courent plus vilement, les oiseaux volent plus hautement et chantent plus gaiement, et les plantes poussent leurs feuilles et leurs fleurs très agréablement.

Sans l'inspiration, nos âmes vivraient paresseuses, percluses et inutiles; mais à l'arrivée des divins rayons de l'inspiration, nous sentons une lumière mêlée d'une chaleur vivifiante, laquelle éclaire notre entendement, réveille et anime notre volonté, lui donnant la force de vouloir et faire le bien appartenant au salut éternel. Dieu ayant formé le corps humain du limon de la terre, ainsi que dit Moïse, il inspira en icelui la respiration de vie,

et il fut fait en âme vivante, c'est-à-dire en âme qui donnait vie, mouvement et opération au corps; et ce même Dieu éternel souffle et pousse les inspirations de la vie surnaturelle en nos âmes, afin que, comme dit le grand Apôtre, elles soient faites en esprit vivifiant, c'est-à-dire, en esprit qui nous fasse vivre, mouvoir, sentir et ouvrer les oeuvres de la grâce; en sorte que celui qui nous a donné l'être, nous donne aussi l'opération.

L'haleine de l'homme échauffe les choses esquelles elle entre, témoin l'enfant de la Sunamite, sur la bouche duquel le prophète Elisée ayant mis la sienne, et haléné sur icelui, sa chair s'échauffa; et l'expérience est toute manifeste.

Mais quant au souffle de Dieu, non seulement il échauffe, ains il éclaire parfaitement, d'autant que l'esprit divin est une lumière infinie, duquel le souffle vital est appelé inspiration; d'autant que par icelui cette suprême bonté halène et inspire en nous les désirs et intentions de son coeur.

Or, les moyens d'inspirer dont elle use sont infinis. Saint Antoine, saint François, saint Anselme et mille autres, recevaient souvent des inspirations par la vue des créatures. Le moyen ordinaire, c'est la prédication; mais quelquefois ceux auxquels la parole ne profite pas, sont instruits par la tribulation, selon le dire du prophète :

L'affliction donnera intelligence à l'ouïe, c'est-à-dire, ceux qui par l'ouïe des menaces célestes sur les méchants ne se corrigent pas, apprendront la vérité par l'événement et les effets, et deviendront sages sentant l'affliction.

Sainte Marie Égyptienne fut inspirée par la vue d'une image de Notre-Dame; saint Antoine oyant l'évangile qu'on lit à la messe; saint Augustin, oyant le récit de la vie de saint Antoine; le duc de Gandie, voyant limpératrice morte; saint Pacôme, voyant un exemple de charité;

le bienheureux Ignace de Loyola, lisant la vie des saints; saint Cyprien (ce nest pas le grand évêque de Carthage, ains un autre qui fut laïc, mais glorieux martyr) fut touché voyant le diable confesser son impuissance sur ceux qui se confient en Dieu.

Lorsque j'étais jeune, à Paris, deux écoliers, dont l'un était hérétique, passant la nuit au faubourg Saint-Jacques en une débauche, ouïrent sonner les matines des chartreux ; et l'hérétique demandant à l'autre à quelle occasion on sonnait, il lui fit entendre avec quelle dévotion on célébrait les offices sacrés en ce saint monastère.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Jeu 24 Oct - 7:55

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CHAPITRE X
 
Comme il se faut conformer à la volonté divine qui nous est signifiée par les inspirations; et premièrement, de la variété des moyens par lesquels Dieu nous inspire
.
 
O Dieu, dit-il, que l'exercice de ces religieux est différent du nôtre ! ils font celui des anges, et nous celui des bêtes brutes;
 
et voulant voir par expérience, le jour suivant, ce qu'il avait appris par le récit de son compagnon, il trouva ces pères dans leurs formes (stalles de choeur), rangés comme des statues de marbre en une suite de niches immobiles, à toute autre action qu'à celle de la psalmodie, qu'ils faisaient avec une attention et dévotion vraiment angélique, selon la coutume de ce saint ordre;
 
si que ce pauvre jeune homme, tout ravi d'admiration, demeura pris en la consolation extrême qu'il eut de voir Dieu si bien adoré parmi les catholiques, et se résolut, comme il fit par après, de se ranger dans le giron de lEglise, vraie et unique épouse de Celui qui l'avait visité de son inspiration, dans l'infâme litière de l'abomination en laquelle il était.
 
O que bienheureux sont ceux qui tiennent leurs coeurs ouverts aux saintes inspirations! car jamais ils ne manquent de celles qui leur sont nécessaires pour bien et dévotement vivre en leurs conditions, et pour saintement exercer les charges de leurs professions.
 
Car comme Dieu donne, par l'entremise de la nature, à chaque animal les instincts qui lui sont requis pour sa conservation et pour l'exercice de ses propriétés naturelles; aussi, si nous ne résistons pas à la grâce de Dieu, il donne à chacun de nous les inspirations nécessaires pour vivre, opérer, et nous conserver en la vie spirituelle.
 
Hé! Seigneur, disait le fidèle Eliézer, voici que je suis près de cette fontaine d'eau; et les filles de cette cité sortiront pour puiser de l'eau.
 
La jeune fille donc à laquelle je dirai: Penchez votre cruche, afin que je boive, et eue répondra : Buvez, ains je donnerai encore à boire à vos chameaux; c'est celle-là que vous avez préparée pour votre serviteur Isaïe.
 
Théotime, Éliézer ne se laisse entendre de désirer de l'eau que pour sa personne; mais la belle Rébecca, obéissant à l'inspiration que Dieu et sa débonnaireté lui donnaient, s'offre d'abreuver encore les chameaux.
 
Pour cela elle fut rendue épouse du saint Isaac, belle-fille du grand Abraham, et grandmère du Sauveur.
 
Les âmes certes qui ne se contentent pas de faire ce que par les commandements et conseils le divin époux requiert d'elles, mais sont promptes à suivre les sacrées inspirations, ce sont celles que le Père éternel a préparées pour être épouses de son Fils bien-aimé.
 
Et quant à son Eliézer, parce qu'il ne peut autrement discerner entre les filles de Haran, ville de Nachor, celle qui était destinée au fils de son maître, Dieu la lui fait connaître par inspiration.
 
Quand nous ne savons que faire, et que l'assistance humaine nous manque en nos perplexités, Dieu alors nous inspire.
 
Et si nous sommes humblement obéissants, il ne permet point que nous errions. Or, je ne dis rien de plus de ces inspirations nécessaires, pour en avoir souvent parié en cet oeuvre, et encore en l' Introduction à la vie dévote.
 
Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Jeu 24 Oct - 22:57

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CHAPITRE XI
De l'union de notre volonté à celle de Dieu ès inspirations qui sont données pour la pratique extraordinaire des vertus et de la persévérance en la vocation, première marque de  l'inspiration.

 
Il y a des inspirations qui tendent seulement  à une extraordinaire perfection des exercices ordinaires de la vie chrétienne. La charité envers les pauvres malades est un exercice ordinaire des vrais chrétiens, mais exercice ordinaire qui fut pratiqué en perfection extraordinaire par saint François et sainte Catherine de Sienne, quand ils léchaient et suçaient les ulcères des lépreux et chancreux; et par le glorieux saint Louis, quand il servait à genoux et tête nue les malades, dont un abbé de Cîteaux demeura tout éperdu d'admiration, le voyant en cette posture manier et agencer un misérable ulcéré de plaies horribles et chancreuses.
 
Comme encore c'était une pratique bien extraordinaire de ce saint monarque de servir à table les pauvres les plus vils et abjects, et manger les restes de leurs potages. Saint Jérôme, recevant en son hôpital de Bethléem les pèlerins d'Europe qui fuyaient la persécution des Goths, ne leur l'avait pas seulement les pieds, mais s'abaissait jusque-là que de laver encore et de frotter les jambes de leurs chameaux;
 
à l'exemple de Rébecca dont nous parlions naguères, qui non seulement puisa de l'eau pour Eliézer, mais aussi pour ses chameaux.
 
Saint François ne fut pas seulement extrême en la pratique de la pauvreté, comme chacun sait, mais il le fut encore en celle de la simplicité. Il racheta tut agneau, de peur qu'on ne le tuât, parce qu'il représentait Notre-Seigneur. Il portait respect presque à toutes créatures, en contemplation de leur Créateur, par une non accoutumée, mais très prudente simplicité.
 
Telles fois il s'est amusé à retirer les vermisseaux du chemin, afin que quelqu'un ne les foulât au passage, se ressouvenant que son Sauveur s'était parangonné (comparé) au vermisseau, Il appelait les créatures ses frères et soeurs, par certaine considération admirable que le saint amour lui suggérait.
 
Saint Alexis, seigneur de très noble extraction, pratiqua excellemment l'abjection de soi-même, demeurant dix-sept ans inconnu chez son propre père à Rome en qualité de pauvre pèlerin. Toutes ces inspirations furent, pour des exercices ordinaires, pratiquées néanmoins en perfection extraordinaire. Or, en cette sorte d'inspiration, il faut observer les règles que nous avons données pour les désirs en notre Introduction.
 
Il ne faut pas vouloir suivre plusieurs exercices à la fois et tout à coup; car souvent l'ennemi tâche de nous faire entreprendre et commencer plusieurs desseins, afin qu'accablés de trop de besogne nous n'achevions rien et laissions tout imparfait.
 
Quelquefois mêmement, il nous suggère la volonté d'entreprendre, de commencer quelque excellente besogne, laquelle il prévoit que nous n'accomplirons pas, pour nous détourner d'en poursuivre une moins excellente que nous eussions aisément achevée; car il ne se soucie point qu'on fasse force desseins et commencements, pourvu qu'on n'achève rien.
 
Il ne veut pas empêcher, non plus que Pharaon, que les mystiques femmes d'Israël, c'est-à-dire les âmes chrétiennes, enfantent des mâles, pourvu qu'avant qu'ils croissent on les tue. Au contraire, dit le grand saint Jérôme, entre les chrétiens, on n'a pas tant dégard au commencement qu'à la fin.
 
Il ne faut pas tant avaler de viande qu'on ne puisse faire la digestion de ce que l'on en prend. L'esprit séducteur nous arrête au commencement et nous fait contenter du printemps fleuri : mais l'esprit divin ne nous fait regarder le commencement que pour parvenir à la fin, et ne nous fait réjouir des fleurs du printemps que pour la prétention de jouir des fruits de l'été et de l'automne.
 
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Message par ami de la Miséricorde Ven 25 Oct - 23:34

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CHAPITRE XI
De l'union de notre volonté à celle de Dieu ès inspirations qui sont données pour la pratique extraordinaire des vertus et de la persévérance en la vocation, première marque de l'inspiration.


Le grand saint Thomas est d'opinion qu'il n'est pas expédient de beaucoup consulter et longuement délibérer sur l'inclination que l'on a d'entrer dans une bonne et bien formée religion; et il a raison : car la religion étant conseillée par notre Seigneur en l'Evangile, qu'est-il besoin de beaucoup de consultations?

Il suffit d'en faire une bonne avec quelque peu de personnes qui soient bien prudentes et capables de telle affaire, et que nous puissent aider à prendre une courte et solide résolution.

Mais dès que nous avons délibéré et résolu, et en ce sujet, et en tout autre qui regarde le service de Dieu, il faut être fermes et invariables, sans se laisser nullement ébranler par aucune sorte d'apparence de plus grand bien, car bien souvent, dit le glorieux saint Bernard, le malin esprit nous donne le change, et, pour nous détourner d'achever un bien, il nous en propose un autre qui semble meilleur, lequel, après que nous avons commencé, pour nous divertir de le parfaire, il en présente un troisième se contentant que nous fassions plusieurs commencements, pourvu que nous ne fassions point de fine.

Il ne faut pas même passer dune religion en une autre, sans des motifs grandement considérables, dit saint Thomas après l'abbé Nestorius rapporté par Cassian.

J'emprunte au grand saint Anselme, écrivant à Lauzon, une belle similitude. Comme un arbrisseau souvent transplanté ne saurait prendre racine ni par conséquent venir à sa perfection, et rendre le fruit désiré; ainsi l'âme qui transplante son coeur de dessein en dessein ne saurait profiter, ni prendre la juste croissance de sa perfection, puisque la perfection ne consiste pas en commencements, mais en accomplissements.

Les animaux sacrés d'Ezéchiel allaient où l'impétuosité de l'esprit les portait, et ne se retournaient point en marchant, mais un chacun, s'avançait cheminant devant sa face.

Il faut aller où l'inspiration nous pousse, et ne point se revirer ni retourner en arrière, ains marcher du côté où Dieu a contourné notre face, sans changer de visée.

Qui est en bon chemin, qu'il se sauve. Il arrive que l'on quitte quelquefois le bien pour chercher le mieux, et que laissant l'un on ne trouve pas l'autre. Mieux vaut la possession d'un petit trésor trouvé que la prétention d'un plus grand qu'il faut aller chercher.

L'inspiration est suspecte qui nous pousse à quitter un vrai bien que nous avons présent, pour en pourchasser un meilleur à venir.

Un jeune homme portugais, nommé François Bassus, était admirable, non seulement en l'éloquence divine, mais en la pratique des vertus, sous la discipline du bienheureux Philippe Nérius, en sa congrégation de l'Oratoire de Rome.

Or, il crut d'être inspiré de quitter cette sainte société pour se rendre en une religion formelle (un ordre religieux proprement dit), et enfin se résolut à cela.

Mais le bienheureux Philippe, assistant à sa réception en l'ordre de Saint-Dominique, pleurait amèrement; dont étant interrogé par François-Marie Tauruse, qui depuis fut archevêque de Sienne et cardinal, pourquoi il jetait des larmes: Je déplore, dit-il, la perte de tant de vertus. Et de fait, ce jeune homme si excellemment sage et dévot en la congrégation, sitôt qu'il fut en la religion, devint tellement inconstant et volage, qu'agité de divers désirs de nouveautés et changements, il donna par après de grands et fâcheux scandales.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Dim 27 Oct - 0:10

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CHAPITRE XI
De l'union de notre volonté à celle de Dieu ès inspirations qui sont données pour la pratique extraordinaire des vertus et de la persévérance en la vocation, première marque de l'inspiration.


Si l'oiseleur va droit au nid de la perdrix, elle se présentera à lui et contrefera l'errénée (plutôt érénée pour éreintée) et boiteuse, et se lançant comme pour faire grand vol, se laissera tout à coup tomber, comme si elle n'en pouvait plus, afin que le chasseur s'amusant après elle, et croyant qu'il la pourra aisément prendre, soit diverti de rencontrer ses petits hors du nid; puis comme il la quelque temps suivie, et qu'il cuide l'attraper, elle prend l'air et s'échappe.

Ainsi notre ennemi voyant un homme qui, inspiré de Dieu, entreprend une profession et manière de vivre propre à son avancement en l'amour céleste, il lui persuade de prendre une autre voie de plus grande perfection en apparence, et l'ayant dévoyé de son premier chemin, il lui rend petit à petit impossible la suite du second, et lui en propose un troisième, afin que l'occupant en la recherche continuelle de divers et nouveaux moyens pour se perfectionner, il l'empêche d'en employer aucun, et par conséquent de parvenir à la fin pour laquelle il les cherche, qui est la perfection.

Les jeunes chiens à tous rencontres quittent la meute et tirent au change; mais les vieux, qui sont sages, ne prennent jamais le change, ains suivent toujours les erres (traces et routes d'un cerf) sur lesquelles ils sont.

Qu'un chacun donc ayant trouvé la très sainte volonté de Dieu en sa vocation, demeure saintement et amoureusement en icelle, y pratiquant les exercices convenables selon l'ordre de ta discrétion, et avec le zèle de la perfection.

CHAPITRE XII
De l'union de la volonté humaine à celle de Dieu ès inspirations qui sont contre les lois ordinaires, et de la paix et douceur de coeur, seconde marque de l'inspiration.


Il se faut donc comporter ainsi, Théotime, ès inspirations qui ne sont extraordinaires que d'autant quelles nous incitent à pratiquer avec une extraordinaire ferveur et perfection les exercices ordinaires du chrétien.

Mais il y a d'autres inspirations que l'on appelle extraordinaires, non seulement parce qu'elles font avancer L'âme au delà du train ordinaire, mais aussi parce qu'elles la portent à des actions contraires aux lois, règles et coutumes communes de la très sainte Église, et qui partant sont plus admirables quimitables.

La sainte demoiselle que les historiens appellent Eusèbe l'étrangère, quitta Rome, sa patrie, et s'habillant en garçon avec deux autres filles, s'embarqua pour aller outre mer, et passa en Alexandrie, et de là en lîle de Cô (cos), où se voyant en assurance, elle reprit les habits de son sexe, et se remettant sur mer, elle alla au pays de Carie, en la ville de Mylassa, où le grand Paul qui l'avait trouvée en Cô, et l'avait prise sous sa conduite spirituelle, la mena, et où par après étant devenu évêque, il la gouverna si saintement qu'elle dressa un monastère, et s'employa au service de l'Église en l'office qu'en ce temps-là on appelait de diacresse (diaconesse), avec tant de charité, quelle mourut enfin toute sainte, et fut reconnue pour telle par une grande multitude de miracles que Dieu fit par ses reliques et intercessions.

De s'habiller des habits du sexe duquel on n'est pas, et s'exposer ainsi déguisé au voyage avec des hommes, cela est non seulement au delà, mais contraire aux règles ordinaires de la modestie chrétienne.

Un jeune homme donna un coup de pied à sa mère, et touché de vive repentance s'en vint confesser à saint Antoine de Padoue, qui, pour lui imprimer plus vivement en l'âme l'horreur de son péché, lui dit entrautres choses : Mon enfant, le pied qui a servi d'instrument à votre malice, pour un si grand forfait, mériterait d'être coupé :
ce que le garçon prit si à coeur, quétant de retour chez sa mère, ravi du sentiment de sa contrition, il se coupa le pied. Les paroles du saint n'eussent pas eu cette force selon leur portée ordinaire, si Dieu n'y eût ajouté son inspiration, mais inspiration si extraordinaire qu'on croirait que ce fut plutôt une tentation, si le miracle de la réunion de ce pied coupé, fait par la bénédiction du saint, ne l'eût autorisée.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Lun 28 Oct - 0:21

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CHAPITRE XII
De l'union de la volonté humaine à celle de Dieu ès inspirations qui sont contre les lois ordinaires, et de la paix et douceur de coeur, seconde marque de l'inspiration.


Saint Paul, premier ermite, saint Antoine, sainte Marie Égyptiaque, ne se sont pas abîmés en ces vastes solitudes, privés d'ouïr la messe, de communier et de se confesser, et privés, jeunes gens qu'ils étaient encore, de conduite et de toute assistance, sans une forte inspiration.

Le grand Siméon Stylite fit une vie quhomme du monde n'eût pu penser ni entreprendre sans l'instinct et l'assistance céleste. Saint Jean, évêque, surnommé le Silentiaire, quittant son évêché à l'insu de tout son clergé, alla passer le reste de ses jours au monastère de Laura, sans qu'on pût oncques avoir de ses nouvelles :

cela n'était-ce pas contre les règles de la très sainte résidence? Et le grand saint Paulin, qui se vendit pour racheter l'enfant d'une pauvre veuve, comme le pouvait-il faire selon les lois ordinaires, puisqu'il n'était pas sien, ains à son église et au public par la consécration épiscopale?

Ces filles et femmes qui, poursuivies pour leur beauté, défigurèrent leurs visages par des blessures volontaires, afin de garder leur chasteté sous la faveur d'une sainte laideur, ne faisaient-elles pas chose, ce semble, défendue?

Or, une des meilleures marques de la bonté de toutes les inspirations, et particulièrement des extraordinaires, c'est la paix et la tranquillité du coeur qui les reçoit; car l'esprit divin est voirement violent, mais d'une violence douce, suave et paisible.

Il vient comme un vent impétueux et comme un foudre céleste, mais il ne renverse point les apôtres, il ne les trouble point : la frayeur qu'ils reçoivent de son bruit est momentanée, et se trouve soudain suivie d'une douce assurance.

C'est pourquoi ce feu s'assied sur un chacun d'iceux , comme y prenant et donnant son sacré repos; et comme le Sauveur est appelé paisible ou pacifique Salomon, aussi son épouse est appelée Sulamite, tranquille et fille de paix et la voix, c'est-à-dire l'inspiration de l'époux, ne l'agite rit la trouble nullement, ains l'attire si suavement
qu'il la fait doucement fondre, et comme écouler son âme en lui :

Mon âme, dit-elle, s'est fondue, quand mon bien-aimé a parlé. Et bien qu'elle soit belliqueuse et guerrière, si est-ce que (toujours est-il que) tout ensemble elle est tellement paisible, qu'emmi les armées et batailles, elle continue les accords d'une mélodie nonpareille.

Que verrez-vous, dit-elle, en la Sulamite, sinon les choeurs des armées ? Ses armées sont des choeurs, c'est-à-dire des accords de chantres; et ses chantres sont des armées, parce que les armes de l'Église et de l'âme dévote ne sont autre chose que les oraisons, les hymnes, les cantiques et les psaumes.

Ainsi les serviteurs de Dieu qui ont eu les plus hautes et relevées inspirations, ont été les plus doux et paisibles de l'univers Abraham, Isaac et Jacob. Moïse est qualifié le plus débonnaire dentre tous les hommes; David est recommandé par sa mansuétude.

Au contraire, l'esprit malin est turbulent, âpre, remuant; et ceux qui suivent sus suggestions infernales, cuidant que ce soient inspirations célestes, sont ordinairement connaissables, parce qu'ils sont inquiets, têtus, fiers, entrepreneurs et remueurs d'affaires, qui, sous le prétexte de zèle, renversent tout sens dessus dessous, censurent tout le monda, tancent un chacun, blâment toutes choses: gens sans conduite, sans condescendance, qui ne supportent rien, exerçant les passions de l'amour-propre sous le nom de la jalousie de l'honneur divin.

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Message par ami de la Miséricorde Lun 28 Oct - 23:41

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CHAPITRE XII
De l'union de la volonté humaine à celle de Dieu ès inspirations qui sont contre les lois ordinaires, et de la paix et douceur de coeur, seconde marque de l'inspiration.


Saint Paul, premier ermite, saint Antoine, sainte Marie Égyptiaque, ne se sont pas abîmés en ces vastes solitudes, privés d'ouïr la messe, de communier et de se confesser, et privés, jeunes gens qu'ils étaient encore, de conduite et de toute assistance, sans une forte inspiration.

Le grand Siméon Stylite fit une vie quhomme du monde n'eût pu penser ni entreprendre sans l'instinct et l'assistance céleste. Saint Jean, évêque, surnommé le Silentiaire, quittant son évêché à l'insu de tout son clergé, alla passer le reste de ses jours au monastère de Laura, sans qu'on pût oncques avoir de ses nouvelles :

cela n'était-ce pas contre les règles de la très sainte résidence? Et le grand saint Paulin, qui se vendit pour racheter l'enfant d'une pauvre veuve, comme le pouvait-il faire selon les lois ordinaires, puisqu'il n'était pas sien, ains à son église et au public par la consécration épiscopale?

Ces filles et femmes qui, poursuivies pour leur beauté, défigurèrent leurs visages par des blessures volontaires, afin de garder leur chasteté sous la faveur d'une sainte laideur, ne faisaient-elles pas chose, ce semble, défendue?

Or, une des meilleures marques de la bonté de toutes les inspirations, et particulièrement des extraordinaires, c'est la paix et la tranquillité du coeur qui les reçoit; car l'esprit divin est voirement violent, mais d'une violence douce, suave et paisible. Il vient comme un vent impétueux et comme un foudre céleste, mais il ne renverse point les apôtres, il ne les trouble point : la frayeur qu'ils reçoivent de son bruit est momentanée, et se trouve soudain suivie d'une douce assurance.

C'est pourquoi ce feu s'assied sur un chacun d'iceux , comme y prenant et donnant son sacré repos; et comme le Sauveur est appelé paisible ou pacifique Salomon, aussi son épouse est appelée Sulamite, tranquille et fille de paix et la voix, c'est-à-dire l'inspiration de l'époux, ne l'agite rit la trouble nullement, ains l'attire si suavement qu'il la fait doucement fondre, et comme écouler son âme en lui :

Mon âme, dit-elle, s'est fondue, quand mon bien-aimé a parlé. Et bien qu'elle soit belliqueuse et guerrière, si est-ce que (toujours est-il que) tout ensemble elle est tellement paisible, qu'emmi les armées et batailles, elle continue les accords d'une mélodie nonpareille.

Que verrez-vous, dit-elle, en la Sulamite, sinon les choeurs des armées ? Ses armées sont des choeurs, c'est-à-dire des accords de chantres; et ses chantres sont des armées, parce que les armes de l'Église et de l'âme dévote ne sont autre chose que les oraisons, les hymnes, les cantiques et les psaumes.

Ainsi les serviteurs de Dieu qui ont eu les plus hautes et relevées inspirations, ont été les plus doux et paisibles de l'univers Abraham, Isaac et Jacob. Moïse est qualifié le plus débonnaire dentre tous les hommes; David est recommandé par sa mansuétude.

Au contraire, l'esprit malin est turbulent, âpre, remuant; et ceux qui suivent sus suggestions infernales, cuidant que ce soient inspirations célestes, sont ordinairement connaissables, parce qu'ils sont inquiets, têtus, fiers, entrepreneurs et remueurs d'affaires, qui, sous le prétexte de zèle, renversent tout sens dessus dessous, censurent tout le monda, tancent un chacun, blâment toutes choses: gens sans conduite, sans condescendance, qui ne supportent rien, exerçant les passions de l'amour-propre sous le nom de la jalousie de l'honneur divin.

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Message par ami de la Miséricorde Mer 30 Oct - 0:06

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CHAPITRE XIII
Troisième marque de l'inspiration, qui est la sainte obéissance à l'Eglise et aux supérieurs.


Mais voyez, Théotime, je vous prie, comme ces anciens et saints anachorètes, un leur assemblée générale, ne trouvent point de marque plus assurée de l'inspiration céleste eu un sujet si extraordinaire, comme fut la vie de ce grand Stylite, que de le voir simple, doux et maniable sous les lais de la très sainte obéissance :

aussi Dieu, bénissant la soumission du ce grand homme, lui donna la grâce de persévérer trente ans entiers sur une colonne haute de trente-six coudées après avoir déjà été sept ans sur les autres colonnes de six, de douze et de vingt pieds de hauteur, et ayant auparavant été dix ans sur une petite pointe de rocher au lieu appelé la Mandre (montagne de Syrie, placée, disent les historiens, près du bourg de Télanisse.)

Ainsi cet oiseau de paradis, vivant en l'air sans toucher terre, fut un spectacle d'amour pour les anges, et d'admiration pour les humains. Tout est assuré en l'obéissance, tout est suspect hors de l'obéissance.

Quand Dieu jette des inspirations dans un coeur, la première qu'il répand c'est celle de l'obéissance. Mais y eut-il jamais une pieuse illustre et sensible inspiration que celle qui fut donnée au glorieux saint Paul? Or, le chef principal d'icelle fat qu'il allât en la cité, en laquelle il apprendrait par la bouche d'Ananie ce qu'il avait à faire; et cet Ananie, homme grandement célèbre, était, comme dit saint Dorotisée, évêque de Damas.

Quiconque dit qu'il est inspiré, et refuse d'obéir aux supérieurs et suivre leurs avis, il est un imposteur.

Tous les prophètes et prédicateurs qui ont été inspirés de Dieu, ont toujours aimé, l'Eglise, toujours adhéré à sa doctrine, toujours aussi été approuvés par icelle, et nont jamais rien annoncé si fortement que cette vérité:

que les lèvres du prêtre gardaient la science, et qu'on devait requérir la loi de sa bouche. De sorte que les missions extraordinaires sont des illusions diaboliques, et non des inspirations célestes, si elles ne sont reconnues et approuvées par les pasteurs, qui sont de la mission ordinaire;

car ainsi saccordent Moïse et les prophètes. Saint Français, saint Dominique, et les autres pères des ordres religieux, vinrent au service des âmes par une inspiration extraordinaire, mais ils se soumirent d'autant plus humblement et cordialement à la sacrée hiérarchie de l'Église.

En somme, les trois meilleures et plus assurées marques des légitimes inspirations sont la persévérance, contre l'inconstance et légèreté; ta paix et douceur du coeur, contre les inquiétudes et empressements, l'humble obéissance ; contre l'opiniâtreté et bizarrerie.

Et pour conclure tout ce que nous avons dit de l'union de notre volonté à celle de Dieu qu'on appelle signifiée, presque toutes les herbes qui ont les fleurs jaunes, et même la chicorée sauvage qui les a bleues, les tournent toujours du côté du soleil, et suivent ainsi son contour ; mais l'héliotropium (tournesol) ne contourne pas seulement ses fleurs, ains encore toutes.

Ses feuilles à la suite de ce grand luminaire; de même tous les élus tournent la fleur de leur coeur, qui est l'obéissance aux commandements du côté de la volonté divine; mais les lImes vivement éprises du saint amour ne regardent pas seulement cette divine bonté par l'obéissance aux commandements, ains aussi par l'union de toutes leurs affections, suivant le contour de ce divin soleil en tout ce qu'il leur commande, conseille et inspire, sans réserve ni exception quelconque dont elles peuvent dire avec le sacré Psalmiste:

Seigneur, vous avez empoigné ma main droite et m'avez conduit en votre volonté, et m'avez recueilli avec beaucoup de gloire. J'ai du faire comme un cheval envers vous, et je suis toujours avec vous; car comme un cheval bien dressé se manie aisément, doucement et justement, en toutes façons, par l'écuyer qui le monte, aussi l'âme amante est si souple à la volonté de Dieu, quil en fait tout ce quil veut.

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Message par ami de la Miséricorde Mer 30 Oct - 23:06

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CHAPITRE XIV
Briève méthode pour connaître la volonté de Dieu.


Saint Basile dit que la volonté de Dieu nous est témoignée par ses ordonnances ou commandements, et que lors il n'y a rien à délibérer; car il faut faire simplement ce qui est ordonné: mais que pour le reste il est en notre liberté de choisir à notre gré ce que bon nous semblera, bien qu'il ne faille pas faire tout ce qui est loisible, ains seulement ce qui est expédient; et qu'enfin, pour bien discerner ce qui est convenable, il faut ouïr l'avis du sage père spirituel.

Mais, Théotime, je vous avertis d'une tentation ennuyeuse qui arrive maintes fois aux âmes qui ont un grand désir de suivre en toutes choses ce qui est plus selon la volonté de Dieu; car l'ennemi en toutes occurrences, les met en doute si c'est la volonté de Dieu qu'elles fassent une chose plutôt qu'une autre ; comme, par exemple, si c'est la volonté de Dieu qu'elles mangent avec l'ami, ou qu'elles ne mangent pas, qu'elles prennent des habits gris ou noirs, qu'elles jeûnent le vendredi ou le samedi, qu'elles aillent à la récréation ou qu'elles s'en abstiennent, en quoi elles consument beaucoup de temps;

et tandis qu'elles s'occupent et embarrassent à vouloir discerner ce qui est meilleur, elles perdent inutilement le loisir de faire plusieurs biens, desquels l'exécution serait plus à la gloire de Dieu, que ne saurait être le discernement du bien et du mieux auquel elles se sont amusées.

On n'a pas accoutumé de peser la menue monnaie, ains seulement les pièces d'importance. Le trafic (commerce en général) serait trop ennuyeux et mangerait trop de temps s'il fallait peser les sols, les liards, les deniers et les pites (petite monnaie de cuivre, frappée à Poitiers, lat. Pictavum, valant le quart d'un denier.)
Ainsi ne doit-on pas peser toutes sortes de menues actions pour savoir si elles valent mieux que les autres.
Il y a même bien de la superstition à vouloir faire cet examen: car à quel propos mettra-t-on en difficulté s'il est mieux d'ouïr la messe en une église qu'en une autre, de filer que de coudre, de donner l'aumône à un homme qu'à une femme?

Ce n'est pas bien servir un maître d'employer autant de temps à considérer ce quil faut faire, comme à faire ce qui est requis. Il faut mesurer notre attention à l'importance de ce que nous entreprenons: ce serait un soin déréglé de prendre autant de peine à délibérer pour faire un voyage d'une journée, comme pour celui de trois ou quatre cents, lieues.

Le chois de la vocation, le dessein de quelque affaire de longue conséquence, de quelque oeuvre de longue haleine, ou de quelque dépense bien grande, le changement de séjour, l'élection des conversations, et telles semblables choses, méritent qu'on pense sérieusement ce qui est plus selon la volonté divine. Mais ès menues actions journalières, esquelles même la faute n'est ni de conséquence, ni irréparable, qu'est-il besoin de faire l'embesogné (fort occupé à une besogne), l'attentif et l'empêché à faire des importunes consultations?

A quel propos me mettrai-je en dépense pour apprendre si Dieu aime mieux que je dise le rosaire ou l'office de Notre-Dame, puisqu'il ne saurait y avoir tant de différence entre l'un et l'autre qu'il faille pour cela taire une grande enquête? que j'aille plutôt à l'hôpital visiter les malades qu'à vêpres, que j'aille plutôt au sermon qu'en une église où il y a indulgence ?

Il n'y a rien pour l'ordinaire de si apparemment remarquable en l'un plus qu'en l'autre, qu'il faille pour cela entrer en grande délibération. Il faut aller tout à la bonne foi et sans subtilité on telles occurrences; et, comme dit saint Basile, faire librement ce que bon nous semblera, pour ne point lasser notre esprit, perdre le temps, et nous mettre en danger d'inquiétude, scrupule et superstition. Or, j'entends toujours quand il n'y a pas grande disproportion entre une oeuvre et l'autre, et qu'il ne se rencontre point de circonstance considérable d'une part plus que de l'autre.

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Message par ami de la Miséricorde Jeu 31 Oct - 22:14

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CHAPITRE XIV
Briève méthode pour connaître la volonté de Dieu.


Es choses mêmes de conséquence, il faut être bien humble, et ne point penser de trouver la volonté de Dieu à force d'examen et de subtilité de discours.

Mais après avoir demandé la lumière du Saint-Esprit, appliqué notre considération à la recherche de son bon plaisir, pris le conseil de notre directeur, et, s'il y échoit, de deux ou trois autres personnes spirituelles, il se faut résoudre et déterminer au nom de Dieu, et ne faut plus par après révoquer en doute notre choix, mais le cultiver et soutenir dévotement, paisiblement et constamment.

Et bien que les difficultés, tentations et diversités d'événements qui se rencontrent au progrès de l'exécution de notre dessein, nous pourraient donner quelque défiance d'avoir bien choisi, il faut néanmoins demeurer fermes, et ne point regarder tout cela, ains considérer que si nous eussions fait un autre choix, nous eussions peut-être trouvé cent fois pis:

outre que nous ne savons pas si Dieu veut que nous soyons exercés en la consolation ou en la tribulation, en la paix ou en la guerre.

La résolution étant saintement prise, il ne faut jamais douter de la sainteté de l'xécution : car, s'il ne tient à nous, elle ne peut manquer; faire autrement, c'est une marque d'un grand amour-propre ou d'enfance, faiblesse ou niaiserie d'esprit.

LIVRE NEUVIÈME
DE L'AMOUR DE SOUMISSION, PAR LEQUEL NOTRE VOLONTÉ S'UNIT AU BON PLAISIR DE DIEU.

CHAPITRE PREMIER.
De l'union de notre volonté avec la volonté divine qu'on appelle volonté de bon plaisir.


Rien ne se fait, hormis le péché, que par la volonté de Dieu, qu'on appelle volonté absolue et de bon plaisir, que personne ne peut empêcher, et laquelle ne nous est point connue que parles effets, qui, étant arrivés, nous manifestent que Dieu les a voulus et desseignés (marqués dans ses desseins).

1° Considérons en bloc, Théotime, tout ce qui a été, qui est, et qui sera; et tout ravis d'étonnement, nous serons contraints d'exclamer, à l'imitation du Psalmiste :

O Seigneur, je vous louerai, parce que vous êtes excessivement magnifié; vos oeuvres sont merveilleuses, et mon âme le reconnaît trop plus (au delà du nécessaire).

Votre science est admirable au-dessus de moi, elle prévaut, et je ne puis y atteindre . Et de là nous passerons à la très sainte complaisance, nous réjouissant de quoi Dieu est si infini en sagesse, puissance et bonté, qui sont les trois propriétés divines, desquelles l'univers n'est qu'un petit essai et comme une montre.

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Message par ami de la Miséricorde Sam 2 Nov - 8:03

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CHAPITRE PREMIER.
De l'union de notre volonté avec la volonté divine qu'on appelle volonté de bon plaisir.


2° Voyons les hommes et les anges, et toute cette variété de natures, de qualités, conditions, facultés, affections, passions, grâces et privilèges que la suprême Providence a établie en la multitude innombrable de ces intelligences célestes et des personnes humaines, esquelles est si admirablement exercée la justice et Miséricorde Divine; et nous ne pourrons nous contenir de chanter avec une joie pleine de respect et de crainte amoureuse

J'ai pour objet de mon cantique
La justice et le jugement;
Je vous consacre ma musique,
O Dieu tout juste et tout clément !

Théotime, nous devons avoir une extrême complaisance de voir comme Dieu exerce sa Miséricorde par tant de diverses faveurs qu'il distribue aux anges et aux hommes, au ciel et en la terre, et comme il pratique sa justice par une infinie variété de peines et châtiments: car sa ,justice et sa Miséricorde sont également aimables et admirables en elles-mêmes, puisque l'une et lautre ne sont autre chose qu'une même très unique bonté et divinité.

Mais d'autant que les effets de sa justice nous sont âpres et pleins damertume, il les
adoucit toujours par le mélange de ceux de sa Miséricorde, et fait quemmi (parmi) les eaux du déluge de sa juste indignation, l'olive verdoyante soit conservée, et que l'âme dévote, comme une chaste colombe, l'y puisse enfle trouver, si toutefois elle veut bien amoureusement méditer à la façon des colombes.

Ainsi la mort, les afflictions, les sueurs, les travaux dont notre vie abonde, qui, par la juste ordonnance de Dieu, sont les peines du péché, sont aussi, par sa douce Miséricorde, des échelons pour monter an ciel, des moyens pour profiter en la grâce et des mérites pour obtenir la gloire.

Bienheureuse sont la pauvreté, la faim, la soif, la tristesse, la maladie, a mort, la persécution : car ce sont voirement (certainement) des équitables punitions de nos fautes, mais punitions tellement tempérées, et, comme parlent les médecins, tellement aromatisées de la suavité, débonnaireté et clémence divine, que leur amertume est très aimable.

Chose étrange, mais véritable, Théotime ! si les damnés n'étaient aveuglés de leur obstination et de la haine qu'ils ont contre Dieu, ils trouveraient de la consolation en leurs peines et verraient la Miséricorde Divine admirablement mêlée avec les flammes qui les brûlent éternellement. Si que (tellement que) les saints, considérant, d'une part, les tourments des damnés si horribles et effroyables, ils eu louent la justice divine, et s'écrient :

Vous êtes juste, ô Dieu ! vous êtes équitable
La justice à jamais règne en vos jugements.

Mais voyant d'autre part que ces peines, quoique éternelles et incompréhensibles, sont toutefois moindres de beaucoup que les coulpes et crimes pour lesquels elles sont infligées, ravis de l'infinie Miséricorde de Dieu: O Seigneur, diront-ils, que vous êtes bon! puisque, au plus fort de votre ire, vous ne pouvez contenir le torrent de vos Miséricordes, qu'elles n'écoulent leurs eaux dans les impiteuses flammes de l'enfer.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Dim 3 Nov - 7:52

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CHAPITRE PREMIER.
De l'union de notre volonté avec la volonté divine qu'on appelle volonté de bon plaisir.


Vous n'avez oublié la bonté de votre âme,
Non pas même jetant les damnés dans la flamme
De l'enfer éternel, emmi votre fureur,
Vous n'avez su garder votre sainte douceur;
De répandre les traits de sa compassion
Emmi les justes coups de la punition.

3° Venons par après à nous-mêmes en particulier, et voyons une quantité de biens intérieurs et extérieurs, comme aussi un nombre très grand de peines intérieures et extérieures que la Providence divine nous a préparées selon sa très sainte justice et Miséricorde;

et comme ouvrant les bras de notre consentement, embrassons tout cela très amoureusement, acquiesçant à sa très sainte volonté, et chantant à Dieu, par manière d'un hymne d'éternel acquiescement :

Votre volonté soit faite en la terre comme au ciel. Oui, Seigneur, votre volonté soit faite en la terre, où nous n'avons point de plaisir sans mélange de quelque douleur, point de rose sans épines, point de jour sans la suite d'une nuit, point de printemps sans qu'il soit précédé de l'hiver, en la terre, Seigneur, où les consolations sont rares, et les travaux innombrables.

O Dieu! néanmoins que votre volonté soit faite, non seulement en l'exécution de vos commandements, conseils et inspirations qui doivent être pratiqués par nous, mais aussi en la souffrance des afflictions et peines qui doivent être reçues en nous, afin que votre volonté fasse par nous, pour nous, en nous et de nous, tout ce qu'il lui plaira.

CHAPITRE II
Que l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu se fait principalement ès tribulations.



Les peines, considérées en elles-mêmes, ne peuvent être aimées; mais regardées en leur origine, c'est-à-dire, en la providence et volonté divine qui les ordonnent, et sont infiniment aimables.

Voyez la verge de Moise en terre, c'est un serpent effroyable: voyez-la en la main de Moise, c'est une baguette de merveilles. Voyez les tribulations en elles-mêmes, elles sont affreuses: voyez-les en la volonté de Dieu, elles sont des amours et des délices.

Combien de fois nous est-il arrivé d'avoir à contre-coeur les remèdes et médicaments tandis que le médecin ou l'apothicaire les présentait, et que nous étant offerts par quelque main bien-aimée, l'amour surmontant l'horreur, nous les recevions avec joie!

Certes, ou l'amour ôte l'âpreté du travail, ou il rend le sentiment aimable. On dit qu'en Béotie il y a un fleuve dans lequel les poissons paraissent tout d'or :

mais ôtez-les de ces eaux qui sont le lieu de leur origine, ils ont la couleur naturelle des autres poissons. Les afflictions sont comme cela. Si nous les regardons hors de la volonté de Dieu, elles ont leur amertume naturelle; mais qui les considère en ce bon plaisir éternel, elles sont toutes d'or, aimables et précieuses plaies qu'il ne se peut dire.

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Message par ami de la Miséricorde Dim 3 Nov - 23:41

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CHAPITRE II
Que l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu se fait principalement ès tribulations.


Si le grand Abraham eût vu la nécessité de tuer son fils hors la volonté de Dieu, pensez, Théotime, combien de peines et de convulsions de coeur il eût souffertes: mais la voyant dans le bon plaisir de Dieu, elle lui est toute d'or, et il l'embrasse tendrement.

Si les martyrs eussent vu leurs tourments hors ce bon plaisir, comment eussent-ils pu chanter entre les fers et les flammes? Le coeur vraiment amoureux aime le bon plaisir, non seulement ès consolations, mais aussi ès afflictions; ains il l'aime plus en la croix ès peines et travaux, parce que c'est la principale vertu de l'amour de faire souffrir l'amant pour la chose aimée.

Les stoïciens, particulièrement le bon Épictète, colloquaient toute leur philosophie à s'abstenir et soutenir, à se déporter (se désister) et supporter, à s'abstenir et se déporter des plaisirs, voluptés et honneurs terrestres, à soutenir et supporter les injures, travaux et incommodités.

Mais la doctrine chrétienne, qui est la seule vraie philosophie, a trois principes sur lesquels elle établit tout son exercice: l'abnégation de soi-même, qui est bien plus que de s'abstenir des plaisirs; porter sa croix, qui est bien plus que de la supporter; suivre notre Seigneur, non seulement en ce qui est de renoncer à soi-même et porter sa croix, mais aussi en ce qui est de la pratique de toutes sortes de bonnes oeuvres.

Mais toutefois on ne témoigne point tant l'amour en l'abnégation ni en l'action, comme on fait eu la passion. Certes, le Saint-Esprit marque en l'Écriture sainte le plus haut point de l'amour de notre Seigneur envers nous eu la mort et passion qui a soufferte pour nous.

1° Aimer la volonté de Dieu, ès consolations, c'est un bon amour, quand en vérité on aime la volonté de Dieu, et non pas la consolation en laquelle elle est ; néanmoins c'est un amour sans contradiction, sans répugnance, et sans effort: car qui n'aimerait une si digne volonté en un sujet si agréable?

2° Aimer la volonté divine eu ses commandements, conseils et inspirations, c'est un second degré d'amour, plus parfait : car il nous porte à renoncer et quitter notre propre volonté, et nous fait abstenir et déporter de plusieurs voluptés, mais non pas de toutes.

3° Aimer les souffrances et afflictions pour l'amour de Dieu, c'est le haut point de la très sainte charité : car en cela il n'y a rien d'aimable que la seule volonté divine; il y a une grande contradiction de la part de notre nature : et non seulement on quitte toutes les voluptés, mais on embrasse les tourments et travaux.

Le malin ennemi savait bien que c'était le dernier affinement de l'amour, quand après avoir oui de la bouche de Dieu que Job était juste, droiturier (qui suit le droit chemin), craignant Dieu, fuyant le péché et terme en linnocence, il estima tout cela peu de chose, en comparaison de la souffrance des afflictions par lesquelles il fit le dernier et le plus grand essai de l'amour de ce grand serviteur de Dieu;

et pour les rendre extrêmes, il les composa de la perte de tous ses biens et de tous ses enfants, de l'abandonnement de tous ses amis, d'une arrogante contradiction de ses plus grands confédérés (alliés) et de sa femme, mais contradiction pleine de mépris, moqueries et reproches, à quoi il ajouta l'assemblage de presque toutes les maladies humaines, notamment une plaie universelle, cruelle, infecte, horrible.

Source : Livres-mystiques.com

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Message par ami de la Miséricorde Mar 5 Nov - 0:08

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CHAPITRE II
Que l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu se fait principalement ès tribulations.


Or, voilà toutefois le grand Job, comme roi des misérables de la terre, assis sur un fumier, comme sur le trône de la misère, paré de plaies, d'ulcères, de pourriture, comme de vêtements royaux assortissants à la qualité de sa royauté; avec une si grande abjection et anéantissement, que s'il n'eût parlé, on ne pouvait discerner si Job était un homme réduit en fumier, ou si le fumier était une pourriture en forme d'homme.

Or le voilà, dis-je, le grand Job qui s'écrie : Si nous avons reçu des biens de la main de Dieu, pourquoi n'en recevrons-nous pas aussi bien les maux ? O Dieu, que cette parole est de grand amour ! Il pense, Théotime, que c'est de la main de Dieu qu'il a reçu les biens, témoignant qu'il n'avait pas tant estimé les biens parce qu'ils étaient biens, comme parce qu'ils provenaient de la main du Seigneur.

Ce qu'étant ainsi, il conclut que donc il faut supporter amoureusement les adversités, puisqu'elles procèdent de la même main du Seigneur, également aimable lorsqu'elle distribue les afflictions, comme quand elle donne les consolations.

Les biens sont volontiers reçus de tous; mais de recevoir les maux, il n'appartient qu'à l'amour parfait, qui les aime d'autant plus, qu'ils ne sont aimables que pour le respect de la main qui les donne.

Le voyageur qui a peur de faillir le droit chemin, marchant en doute, va regardant çà et là le pays où il est, et s'amuse presque à chaque bout de champ à considérer s'il ne se fourvoie point. Mais celui qui est assuré de sa route, va gaiement, hardiment et vitement. Ainsi certes, l'amour voulant aller à la volonté de Dieu parmi les consolations, il va toujours en crainte, de peur de prendre le change et qu'en lieu d'aimer le bon plaisir de Dieu, il n'aime le plaisir propre qui est en la consolation.

Mais l'amour qui tire chemin devers la volonté de Dieu en l'affliction, il marche en assurance : car l'affliction n'étant nullement aimable en elle-même, il est bien aisé de ne l'aimer que pour le respect de la main qui la donne. Les chiens sont à tous coups en défaut au printemps, et n'ont quasi nul sentiment, parce que les herbes et fleurs poussent alors si fortement leur senteur, qu'elle outrepasse celle du cerf ou du lièvre. Parmi le printemps des consolations, l'amour n'a presque nulle reconnaissance du bon plaisir de Dieu, parce que le plaisir sensible de la consolation jette tant d'attraits dedans le coeur, qu'il en est diverti de l'attention qu'il devrait avoir à la volonté de Dieu. Notre-Seigneur ayant donné le choix à sainte Catherine de Sienne d'une couronne d'or et d'une couronne d'épines, elle choisit celle-ci, comme plus conforme à l'amour. C'est une marque assurée de l'amour, dit la bienheureuse Angèle de Foligny, que de vouloir souffrir, et le grand Apôtre s'écrie qu'il ne se glorifie qu'en la croix, en l'infirmité, en la persécution.

CHAPITRE III
De l'union de notre volonté au bon plaisir divin, ès afflictions spirituelles, par la résignation.


L'amour de la croix nous fait entreprendre des afflictions volontaires, comme, par exemple, les jeûnes, veilles, cilices et autres macérations de la chair, et nous fait renoncer aux plaisirs, honneurs et richesses, et l'amour en ces exercices est tout agréable au bien-aimé. Toutefois il l'est encore davantage quand nous recevons avec patience, doucement et agréablement les peines, tourments et tribulations, en considération de la volonté divine qui nous les envoie. Mais l'amour est alors en son excellence quand nous ne recevons pas seulement avec douceur et patience les afflictions, nias nous les chérissons, nous les aimons et les caressons à cause du bon plaisir divin duquel elles procèdent.

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Message par ami de la Miséricorde Mer 6 Nov - 7:31

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CHAPITRE III
De l'union de notre volonté au bon plaisir divin, ès afflictions spirituelles, par la résignation.

Or, entre tous les essais de l'amour parfait, celui qui se fait par l'acquiescement de l'esprit aux tribulations spirituelles, est sans doute le plus fin et le plus relevé. La bienheureuse Angèle de Foligny fait une admirable description des peines intérieures, esquelles quelquefois elle s'était trouvée, disant que son âme était en tourment, comme un homme qui, pieds et mains liés, serait pendu par le col, et ne serait pourtant pas étranger mais demeurerait en cet état entre mort et vif, sans espérance de secours, ne pouvant ni se soutenir de ses pieds, ni s'aider de ses mains, ni crier de la bouche, ni même soupirer ou plaindre.

Il est ainsi, Théotime. L'âme est quelquefois tellement pressée d'afflictions intérieures, que toutes ses facultés et puissances en sont accablées par la privation de tout ce qui la peut alléger, et par l'appréhension et impression de tout ce qui la peut attrister. Si qu'à l'imitation de son Sauveur, elle commence à s'ennuyer, à craindre, à s'épouvanter, puis à s'attrister; d'une tristesse pareille à celle des mourants, dont elle peut bien dire :

Mon âme est triste jusques à la mort ; et du consentement de tout son intérieur elle désire, demande et supplie que, s'il est possible, ce calice soit éloigné d'elle, ne lui restant plus que la fine suprême pointe de lesprit, laquelle, attachée au coeur et bon plaisir de Dieu, dit par un très simple acquiescement:

O Père éternel, mais toutefois ma volonté ne soit pas faite, ains la vôtre. Et c'est l'importance que l'âme fait cette résignation parmi tant de troubles, entre tant de contradictions et répugnances, qu'elle ne s'aperçoit presque pas de la faire;

au moins lui était-il advis que c'est si languidement (faiblement, non chalamment), que ce ne soit pas de bon coeur, ni comme il est convenable, puisque ce qui se passe alors pour le bon plaisir divin, se fait non seulement sans plaisir et contentement, mais contre tout le plaisir et contentement de tout le reste du coeur, auquel l'amour permet bien de se plaindre, au moins de ce qu'il ne se peut pas plaindre, et de dire toutes les lamentations de Job et de Jérémie, mais à la charge que toujours le sacré acquiescement se fasse dans le fond de l'âme, en la suprême et plus délicate pointe de l'esprit, et cet acquiescement n'est pas tendre ni doux, ni presque pas sensible, bien qu'il soit véritable, fort, indomptable et très amoureux, et semble qu'il soit retiré au fin bout de l'esprit comme dans le donjon de la forteresse où il demeure courageux, quoique tout le reste soit pris et pressé de tristesse.

Et plus l'amour en cet état est dénué de tout secours, abandonné de toute l'assistance des vertus et facultés de laine, plus il en est estimable de garder si constamment sa fidélité.

Cette union et conformité au bon plaisir divin se fait ou par la sainte résignation, ou par la très sainte indifférence. Or, la résignation se pratique par manière d'effort et de soumission: on voudrait bien vivre au lieu de mourir: néanmoins, puisque c'est le bon plaisir de Dieu qu'on meure, on acquiesce. On voudrait vivre, s'il plaisait à Dieu; et, de plus, on voudrait qu'il plût à Dieu de faire vivre. On meurt de bon coeur, mais on vivrait encore plus volontiers; on passe d'assez bonne volonté, mais on demeurerait encore plus affectionément. Job en ses travaux fait l'acte de résignation :

Si nous avons reçu les biens, dit-il, de la main de Dieu, pourquoi ne soutiendrions-nous les peines et travaux qu'il nous envoie ? Voyez, Théotime, qu'il parle de soutenir, supporter, endurer. Comme il a plu au Seigneur, ainsi a-t-il été tait : le nom du Seigneur soit béni ! Ce sont des paroles de résignation et acceptation, par manière de souffrance et de patience.

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Message par ami de la Miséricorde Mer 6 Nov - 23:22

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CHAPITRE IV
De l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu, par l'indifférence.


La résignation préfère la volonté de Dieu à toutes choses ; mais elle ne laisse pas d'aimer beaucoup d'autres choses outre la volonté de Dieu. Or, l'indifférence est au-dessus de la résignation, car elle n'aime rien, sinon pour l'amour de la volonté de Dieu. 

Certes le coeur le plus indifférent du monde peut être touché de quelque affection, tandis, qu'il ne sait encore pas où est la volonté de Dieu. Eliézer étant arrivé à la fontaine de Haran, vit bien la vierge Rébecca, et la trouva sans doute trop plus belle (excessivement belle) et agréable ; mais pourtant il demeura en indifférence jusqu'à ce que, par le signe que Dieu lui avait inspiré, il connût que la volonté divine l'avait préparée au fils de son maître; car alors il lui donna les pendants d'oreilles et les bracelets d'or. 

Au contraire, si Jacob n'eût aimé en Rachel que l'alliance de Laban, à laquelle son père Isaac l'avait obligé, il eût autant aimé Lia que Rachel, puisque l'une et l'autre étaient également filles de Laban; et par conséquent la volonté de son père eût été aussi bien accomplie eu l'une comme en l'autre. 

Mais parce que, outre la volonté de son père, il voulait satisfaire à son goût particulier, amorcé de la beauté et gentillesse de Rachel, il se fâcha d'épouser Lia, et l'a prit à contre-coeur par résignation.

Le coeur indifférent n'est pas comme cela : car sachant que la tribulation , quoiqu'elle soit l'aide comme une autre Lia, ne laisse pas d'être fille, et fille bien-aimée du bon plaisir divin, il l'aime autant que la consolation, laquelle néanmoins en elle-même est plus agréable; ains il aime encore plus la tribulation, parce qu'il ne voit rien d'aimable en elle que la marque de la volonté de Dieu. Si je ne veux que l'eau pure, que m'importe-t-il qu'elle me soit apportée dans un vase d'or ou dans un verre, puisqu'aussi bien ne prendrai-je que l'eau? 

Ains je l'aimerai mieux dans le verre: parce qu'il n'a point d'autre couleur que celle de l'eau même, laquelle j'y vois aussi beaucoup mieux. Quimporte-t-il que la volonté de Dieu me soit présentée en la tribulation ou en la consolation, puisqu'en l'une et en l'autre je ne veux ni ne cherche autre chose que la volonté divine, laquelle y parait d'autant mieux qu'il n'y a point d'autre beauté en icelle que celle de ce très saint bon plaisir éternel.

Héroïque, ains plus qu'héroïque l'indifférence de l'incomparable saint Paul: Je suis pressé, dit-il aux Philippiens, de deux côtés, ayant désir d'être délivré de ce corps, et d'être avec Jésus-Christ, chose trop meilleure; mais aussi de demeurer en cette vie pour vous. En quoi il fut imité par le grand évêque saint Martin, qui, parvenu à la fin de sa vie, pressé d'un extrême désir d'aller à son Dieu, ne laissa pas pourtant de témoigner qu'il demeurerait aussi volontiers antre les travaux de sa charge, pour le bien de son cher troupeau, comme si après avoir chanté ce cantique:

Que vos pavillons souhaitables,
O Dieu des armées redoutables !
Hélas ! à bon droit sont aimés !
Mon âme fond dardeur extrême,
Et mes sens se pâment de même
Après vos parvis réclamés;
Mon coeur bondit, ma chair ravie
Saute après vous, Dieu de la vie;

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Message par ami de la Miséricorde Ven 8 Nov - 0:30

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CHAPITRE IV
De l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu, par l'indifférence.


Il vînt par après faire cette exclamation : O Seigneur! néanmoins, si je suis encore requis au service du salut de votre peuple, je ne refuse point le travail: votre volonté soit faite. Admirable indifférence de l'Apôtre ! admirable celle de cet homme apostolique ! Ils voient le paradis ouvert pour eux, ils voient mille travaux en terre, l'un et l'autre leur est indiffèrent au choix, et il n'y a que la volonté de Dieu qui puisse donner le contrepoids à leurs coeurs.

Le paradis n'est point plus aimable que les misères de ce monde, si le bon plaisir divin est également là et ici. Les travaux leur sont un paradis, si la volonté divine se trouve en iceux ; et le paradis un travail, si la volonté de Dieu n'y est pas. Car, comme dit David, ils ne demandent ni au ciel ni en la terre que de voir le bon plaisir de Dieu accompli. O Seigneur ! qu'y a-t-il au ciel pour moi, ou que veux-je en terre, sinon vous ?

Le coeur indifférent est comme une boule de cire entre les mains de son Dieu, pour recevoir semblablement toutes les impressions du bon plaisir éternel : un coeur sans choix, également disposé à tout, sans aucun autre objet de sa volonté que la volonté de son Dieu, qui ne met point son amour ès choses que Dieu veut, ains en la volonté de Dieu qui les veut.

C'est pourquoi, quand la volonté de Dieu est en plusieurs choses, il choisit, à quelque prix que ce soit, celle où il y en a plus. Le bon plaisir de Dieu est au mariage et en la virginité: mais parce qu'il est plus en la virginité, le coeur indifférent choisit la virginité, quand elle lui devrait coûter la vie, comme elle fit à la chère fille spirituelle de saint Paul, sainte Thècle, à sainte Cécile, à sainte Agathe et mille autres.

La volonté de Dieu est au service du pauvre et du riche, mais un peu plus en celui du pauvre; le coeur indifférent choisira ce parti. La volonté de Dieu est en la modestie exercée entre les consolations, et en la patience pratiquée entre les tribulations; l'indifférent préfère celle-ci, car il y a plus de la volonté de Dieu.

En somme, le bon plaisir de Dieu est le souverain objet de l'âme indifférente; partout où elle le voit, elle court a l'odeur de ses parfums, et cherche toujours l'endroit où il y en a plus, sans considération d'aucune autre chose.

Il est conduit par la divine volonté comme par un lien très aimable; et partout où elle va il la suit: il aimerait mieux l'enfer avec la volonté de Dieu, que le paradis sans la volonté de Dieu.

Oui même il préférerait l'enfer au paradis, s'il savait qu'en celui-ci il y eût un peu plus du bon plaisir divin qu'en celui-ci : en sorte que si, par imagination de chose impossible, il savait que sa damnation fût un peu plus agréable à Dieu que sa salvation (son salut) , il quitterait sa salvation et courrait à sa damnation.

CHAPITRE V
Que la sainte indifférence s'étend à toutes choses.


L'indifférence se doit pratiquer ès choses qui regardent la vie naturelle, comme la santé, la maladie, la beauté, la laideur, la faiblesse, la force ; ès choses de la vie civile, pour les honneurs, rangs, richesses; ès variétés de la vie spirituelle, comme sécheresses, consolations, goûts, aridités; ès actions, ès souffrances, et en somme en toutes sortes d'évènements.

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Message par ami de la Miséricorde Ven 8 Nov - 0:31

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CHAPITRE IV
De l'union de notre volonté au bon plaisir de Dieu, par l'indifférence.


Il vînt par après faire cette exclamation : O Seigneur! néanmoins, si je suis encore requis au service du salut de votre peuple, je ne refuse point le travail: votre volonté soit faite. Admirable indifférence de l'Apôtre ! admirable celle de cet homme apostolique ! Ils voient le paradis ouvert pour eux, ils voient mille travaux en terre, l'un et l'autre leur est indiffèrent au choix, et il n'y a que la volonté de Dieu qui puisse donner le contrepoids à leurs coeurs.

Le paradis n'est point plus aimable que les misères de ce monde, si le bon plaisir divin est également là et ici. Les travaux leur sont un paradis, si la volonté divine se trouve en iceux ; et le paradis un travail, si la volonté de Dieu n'y est pas. Car, comme dit David, ils ne demandent ni au ciel ni en la terre que de voir le bon plaisir de Dieu accompli. O Seigneur ! qu'y a-t-il au ciel pour moi, ou que veux-je en terre, sinon vous ?

Le coeur indifférent est comme une boule de cire entre les mains de son Dieu, pour recevoir semblablement toutes les impressions du bon plaisir éternel : un coeur sans choix, également disposé à tout, sans aucun autre objet de sa volonté que la volonté de son Dieu, qui ne met point son amour ès choses que Dieu veut, ains en la volonté de Dieu qui les veut.

C'est pourquoi, quand la volonté de Dieu est en plusieurs choses, il choisit, à quelque prix que ce soit, celle où il y en a plus. Le bon plaisir de Dieu est au mariage et en la virginité: mais parce qu'il est plus en la virginité, le coeur indifférent choisit la virginité, quand elle lui devrait coûter la vie, comme elle fit à la chère fille spirituelle de saint Paul, sainte Thècle, à sainte Cécile, à sainte Agathe et mille autres.

La volonté de Dieu est au service du pauvre et du riche, mais un peu plus en celui du pauvre; le coeur indifférent choisira ce parti. La volonté de Dieu est en la modestie exercée entre les consolations, et en la patience pratiquée entre les tribulations; l'indifférent préfère celle-ci, car il y a plus de la volonté de Dieu.

En somme, le bon plaisir de Dieu est le souverain objet de l'âme indifférente; partout où elle le voit, elle court a l'odeur de ses parfums, et cherche toujours l'endroit où il y en a plus, sans considération d'aucune autre chose.

Il est conduit par la divine volonté comme par un lien très aimable; et partout où elle va il la suit: il aimerait mieux l'enfer avec la volonté de Dieu, que le paradis sans la volonté de Dieu.

Oui même il préférerait l'enfer au paradis, s'il savait qu'en celui-ci il y eût un peu plus du bon plaisir divin qu'en celui-ci : en sorte que si, par imagination de chose impossible, il savait que sa damnation fût un peu plus agréable à Dieu que sa salvation (son salut) , il quitterait sa salvation et courrait à sa damnation.

CHAPITRE V
Que la sainte indifférence s'étend à toutes choses.


L'indifférence se doit pratiquer ès choses qui regardent la vie naturelle, comme la santé, la maladie, la beauté, la laideur, la faiblesse, la force ; ès choses de la vie civile, pour les honneurs, rangs, richesses; ès variétés de la vie spirituelle, comme sécheresses, consolations, goûts, aridités; ès actions, ès souffrances, et en somme en toutes sortes d'évènements.

Source : Livres-mystiques.com

Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde
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