CHAPITRE VII
Qu'il faut éviter toute curiosité, et acquiescer humblement à la très sage providence de Dieu.
Mais surtout nous sommes bizarres en ce qui regarde la Providence divine, touchant la diversité des moyens qu'elle nous distribue pour nous tirer à son saint amour, et par son saint amour à la gloire.
Car notre témérité nous presse toujours de rechercher pourquoi Dieu donne plus de moyens aux uns qu'aux autres; pourquoi il ne fit entre les Tyriens et Sidoniens les merveilles qu'il fit en Corozaïn et Bethsaïda, puisqu'ils en eussent si bien fait leur profit; et en somme pourquoi il tire à son amour plutôt l'un que l'autre.
O Théotime! mon ami, jamais, non jamais nous ne devons laisser emporter notre esprit à ce tourbillon de vent follet, ni penser de trouver une meilleure raison de la volonté de Dieu, que sa volonté même, laquelle est souverainement raisonnable, ains la raison de toutes les raisons, la règle de toute bonté, la loi de toute équité.
Et bien que le très saint Esprit parlant en l'Ecriture sainte rende raison en plusieurs endroits de presque tout ce que nous ne saurions désirer, touchant ce que sa providence fait en la conduite des hommes au saint amour et au salut éternel, si est-ce néanmoins qu'en plusieurs occasions il déclare quil ne faut nullement se départir du respect qui est dû à sa volonté, de laquelle nous devons adorer le propos, le décret, le bon plaisir et l'arrêt au bout duquel, comme souverain juge et souverainement équitable, il n'est pas raisonnable qu'elle manifeste ses motifs; ains suffit qu'elle die (parle, ordonne) simplement (et pour cause).
Que si nous devons charitablement, porter tant d'honneur aux décrets des cours souveraines, composées de juges corruptibles de la terre et de terre, que de croire qu'ils n'ont pas été faits sans motifs, quoique nous ne les sachions pas; eh, Seigneur Dieu ! avec quelle révérence amoureuse devons-nous adorer l'équité de votre providence suprême, laquelle est infinie en justice et bonté !
Ainsi, en mille lieux de la sacrée parole nous trouvons la raison pour laquelle Dieu a réprouvé le peuple juif. Parce, disent saint Paul et saint Barnabas, que vous repoussez la parole de Dieu, et que vous vous jugez vous-mêmes indignes de la vie éternelle; voici nous nous tournons devers les Gentils.
Et qui considérera en tranquillité d'esprit le IX e, X e et XI e chapitre de l'épître aux Romains, verra clairement que la volonté de Dieu n'a point rejeté le peuple juif sans raison; mais néanmoins cette raison ne doit point être recherchée par l'esprit humain, qui au contraire est obligé de s'arrêter purement et simplement à révérer le décret divin, l'admirant avec amour comme infiniment juste et équitable, et l'aimant avec admiration comme impénétrable et incompréhensible.
C'est pourquoi ce divin apôtre conclut en cette sorte le long discours qu'il en avait fait : O profondité (profondeur) des richesses de la sagesse et science de Dieu!
Que ses jugements sont incompréhensibles, et ses voies imperceptibles! Qui connaît les pensées du Seigneur? ou qui es été son conseiller ?
Exclamation par laquelle il témoigne que Dieu fait toutes choses avec une grande sagesse, science et raison; mais en telle sorte néanmoins que l'homme n'étant pas entré au divin conseil, duquel les jugements et projets sont infiniment élevés au-dessus de notre capacité, nous devons dévotement adorer ses décrets, comme très équitables, sans en rechercher les motifs, qu'il retient en secret par devers soi afin de tenir notre entendement en respect et humilité par devers nous.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde