LETTRE DE FRANCOIS-MICHEL DEBROISE A LA COMMISSION DOCTRINALE
Je vous prie de transmettre ma lettre au rédacteur de la note « bref avertissement au sujet de la diffusion de l’Évangile tel qu’il m’a été révélé de Maria Valtorta ».
En effet, spécialiste de cette mystique, auteur de plusieurs livres sur elle et son œuvre, dont trois écrits avec Mgr René Laurentin ; webmestre d’un site qui lui est consacré (www.maria-valtorta.org), j’entends publier ma lettre, non pas par souhait d’une polémique qui a déjà atteint son paroxysme sur des sujets autrement graves, mais parce qu’il faut répondre à la vague d’incompréhension et d’indignation soulevée par votre note qui, sur le fond comme sur la forme, interroge sur de nombreux points. Les documents que votre note entend révéler sont intégralement publiés depuis 16 ans sur mon site consulté, à ce jour, par près de 4 millions d’internautes. Le devoir de vérité pour le discernement de tous, le nécessitait. C’est une évidence pour moi.
Mais si leur publication, au vu et au su de tous, n’a pas empêché le développement exponentiel du lectorat de Maria Valtorta que vous constatez et dont vous vous inquiétez, ce n’est pas parce que les fidèles et les clercs qui les ont consultés avant d’adhérer à la lecture de l’œuvre, seraient des naïfs ou des rebelles qu’il faudrait faire rentrer dans les rangs à coup de fouet d’une condamnation, mais parce que ces internautes ont appliqué le discernement requis par l’Écriture et le Magistère. Pour cela, ils ont consulté l’ensemble du dossier, une précaution que je ne retrouve pas dans l’avertissement que vous avez publié.
Le devoir de vérité (CEC § 2475 et suivants) s’impose à tous : aux fidèles, donc à moi, mais aussi et surtout aux pasteurs notamment quand ils revêtent l’habit de l’autorité.
Votre note respecte-t-elle ce devoir de vérité ? Jugez par vous-même.
Le lecteur de votre avertissement comprend-il que l’Index est aboli en droit et en conséquence ou pense-t-il, qu’il est toujours en vigueur ? S’il retient cette dernière proposition, comme le démontre 99% des réactions à votre avertissement – certaines pour se réjouir de l’opprobre, mais beaucoup plus pour s’en offusquer - c’est qu’il y a une atteinte au devoir de vérité, par omission.
Le lecteur qui cherche à prendre en compte l’avertissement moral qui subsiste à l’abolition – et vous avez raison - sait-il les raisons pour lesquelles l’Œuvre a été condamnée ou les imagine-t-il faute de le savoir ? S’il s’engage sur la seconde voie, c’est qu’il y a offense, par omission, au devoir de vérité car la suspicion remplace alors l’information.
Imagine-t-il qu’il s’agit d’une condamnation doctrinale puisque le titre de votre commission l’induit ? Les censeurs de 1960 n’en ont trouvé aucune dans leur article, et ce n’est pas faute de les avoir cherchées. Bien au contraire, ils signalent que Jésus « est toujours prêt à se proclamer Messie et Fils de Dieu et à faire des exposés de théologie dans les termes mêmes qu’emploierait un professeur de nos jours » ; que la Vierge Marie est « prête à donner des leçons d’une théologie mariale mise à jour selon les plus récentes études des spécialistes actuels en la matière » et enfin que l’Œuvre contient un « si grand étalage de connaissances théologiques ». C’est écrit noir sur blanc. Voilà donc un bon livre conforme à la meilleure théologie de l’avis même des censeurs !
Imagine-t-il que la condamnation vise la mauvaise romance de cette vie de Jésus comme l’indique le titre de l’Osservatore romano ? Mais le Saint-Office n’est pas une agence littéraire. Heureusement d’ailleurs car quand l’Index condamne « Les misérables » de Victor Hugo ou « Les trois mousquetaires » d’Alexandre Dumas en oubliant de condamner « Mein Kampft » d’Hitler ou « Das kapital » de K. Marx, on se doit de faire profil bas sur ce terrain.
Non, l’Œuvre n’a été mise à l’Index pour aucun de ces motifs, mais pour un simple défaut d’imprimatur (Canon 1385, 1 n.2 C.I.C. 1917) qu’elle avait pourtant obtenu et qui fut combattu en sous-main comme le rappelle le communiqué de la Fondation Héritière. Cela c’est le motif officiel, mais officieusement parce que certains membres du Saint-Office, en contradiction avec le Pape, n’aimaient pas les révélations privées et manifestations mystiques qui s'exprimaient par sainte Faustine, saint Padre Pio, Yvonne-Aimée de Malestroit … ou Maria Valtorta.
Le lecteur sait-il qui sont ces « personnages illustres » qui ont officiellement soutenu l’Œuvre de Maria Valtorta et que le censeur du Saint-Office taxe de naïveté ? Non ? Alors il y a omission, là encore.
Ce n’est rien moins que le confesseur de Pie XII, Recteur de l’Institut biblique pontifical qui ne trouve rien à redire sur l’exégèse.
Ce n’est rien moins que le doyen de la faculté pontificale du Latran qui reconnaît que l’Œuvre de Maria Valtorta est « préternaturelle » c’est-à-dire qu’elle ne peut être attribuée à l’homme et que rien, dans ces écrits, ne s’oppose à la Foi.
C’est enfin Mgr Carinci, un familier de Pie XII qui par deux fois, fera spécialement le voyage de Rome pour rencontrer Maria Valtorta. C’est lui qui écrira son remerciement « au Seigneur » pour nous avoir donné par Maria Valtorta, une œuvre « si élevée doctrinalement et spirituellement ».
C’est lui qui, avec d’autres, atteste dans sa correspondance, du soutien de Pie XII à l’Œuvre. Par sa fonction, il a eu à superviser 200 procès de béatification et 62 en canonisation, dont celui de Pie X dont il était un proche.
Qu’on me pardonne, mais ces « personnalités illustres » sont donc, pour moi et pour les lecteurs de Maria Valtorta, d’un calibre qui surpasse toutes les tentatives de discrédit auxquels certains se risquent de temps en temps, ici ou là.
« Si leur résolution ou leur entreprise vient des hommes, dit Gamaliel, elle tombera. Mais si elle vient de Dieu, vous ne pourrez pas les faire tomber » (Actes 5, 38-39). Force est de constater qu’en plus de soixante-ans et sa traduction en 28 langues opérant les fruits de conversions, de vocations et de retours à Dieu, l’œuvre de Maria Valtorta n’est pas sur le point de disparaître
Votre avertissement vitupère, dans sa première partie, sur les prêtres qui accompagnent les lecteurs de Maria Valtorta, et dans sa dernière partie vilipende ceux qui n’ont pas une démarche d’Église. La cohérence de tout et son contraire m’échappe. Je ne suis pas le seul. Mais j’accepte mes limites.
Par contre vous évoquez une notion un peu absconse sur le piétisme individuel. Cette charge vise-t-elle mon engagement comme laïc en responsabilité pendant 18 ans (trois fois le maximum statutaire) dans une paroisse des banlieues populaires, en plus d’un engagement professionnel de 60h/semaine parfois, et de ma vie familiale et personnelle ?
C’est une bonne occasion de vérifier – et de m’en avertir - si j’ai trahi mon mandat d’Église, ne serait-ce qu’en pratiquant un prosélytisme coupable (CIC 1983, § 218).
Vous souhaitant bonne réception de ma brève réponse à un bref avertissement,
Avec mes sentiments respectueux.
François-Michel Debroise