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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel " ***

Maud
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Message par Maud Jeu 27 Avr - 7:25

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_40

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 14


Où l’on parle de conceptions imaginaires qui se forment surnaturellement dans l’ imagination
On montre comment elles ne peuvent pas servir à l’âme  de moyen  prochain pour son Union  avec Dieu


Après avoir parlé des représentations que l'âme peut recevoir naturellement en elle-même, et sur lesquelles s'exercent, à l'aide du raisonnement l'imagination et la fantaisie, il convient ici de traiter des perceptions surnaturelles que l'on appelle visions imaginaires. Ces visions, en effet, étant comprises sous le nom d'images, formes et figures, appartiennent également à l'imagination, au même titre que les perceptions naturelles.

Or il faut savoir que sous ce nom de visions imaginaires nous voulons comprendre toutes les choses qui peuvent se représenter surnaturellement à l'imagination sous le nom d'images, formes, figures ou apparences, et cela d'une manière plus parfaite, plus vive que toutes les conceptions qui viennent par la voie connaturelle des sens.

Car toutes les conceptions et formes qui viennent par les cinq sens corporels et se fixent dans l'âme par la voie naturelle peuvent aussi lui venir par la voie surnaturelle et lui être communiquées sans le secours d'aucun sens extérieur.


En effet, ce sens de l'imagination uni à la mémoire est comme une sorte d'archives ou de réservoir pour l'entendement où sont reçues toutes les formes et images intelligibles. Comme un miroir, il les garde en lui-même, après les avoir reçues par la voie des cinq sens, ou, nous le répétons, par la voie surnaturelle; et ainsi il les représente à l'entendement; l'entendement alors les considère et en juge.

Son pouvoir va plus loin; il peut encore composer et former d'autres images semblables à celles qui lui sont fournies là.

Il faut donc savoir que, de même que les cinq sens extérieurs proposent et représentent naturellement les images et formes des objets aux sens intérieurs, de même Dieu peut, nous le répétons, surnaturellement et sans le secours des sens extérieurs, représenter les mêmes images ou les mêmes formes, et de beaucoup plus belles encore et plus parfaites; le démon le peut aussi.

Aussi, à l'aide de ces images, Dieu révèle souvent à l'âme beaucoup de choses. Il lui enseigne une sagesse profonde, comme on le voit à chaque pas dans la sainte Écriture, Isaïe, par exemple, a vu Dieu dans sa gloire sous la forme d'une nuée qui remplissait le Temple, ou des Séraphins qui, de leurs ailes, se couvraient la face et les pieds (Is. VI, 4). Jérémie fut instruit à son tour par le symbole de la verge qui veillait (Jér. I, 11); Daniel, par une foule de visions... (Dan. VII, 10).

le démon, de son côté, cherche à tromper l'âme par des représentations qui sont bonnes en apparence. Nous le voyons, au livre des Rois, lorsqu'il trompa tous les prophètes d'Achab. Il représenta à leur imagination des cornes avec lesquelles, affirmait-il, Achab devait détruire les Assyriens; or c'était là un mensonge (I Rois, XXII, 11). Telles sont, en outre, les visions qu'eut la femme de Pilate, pour qu'on ne condamnât pas Notre-Seigneur Jésus-Christ (Mat. XXVII, 19).

Il y a beaucoup d'autres passages de l'Écriture où l'on voit comment, dans ce miroir de la fantaisie ou imagination, ces visions imaginaires arrivent aux âmes avancées plus fréquemment que les visions extérieures et corporelles. Or nous le répétons, elles ne se différencient pas de celles qui entrent par la voie des sens extérieurs quant à la forme et à la représentation; mais si nous considérons l'effet qu'elles produisent et la perfection qu'elles causent, il y a une grande différence.

Elles sont plus subtiles, et produisent dans l'âme une action plus profonde, parce que, en même temps qu'elles sont surnaturelles, elles sont aussi plus intérieures que les surnaturelles qui viennent par les sens extérieurs.


Cela ne veut pas dire pourtant que certaines de ces visions corporelles extérieures ne produisent pas plus d'effet. Car enfin Dieu fait ses communications comme il lui plaît. Mais nous parlons de ce que ces visions sont par elles-mêmes, parce qu'elles sont plus spirituelles.


Ce sens de l'imagination et de la fantaisie est celui où le démon a coutume de tendre ses pièges de l'ordre naturel ou de l'ordre surnaturel (Ce terme n'est plus employé aujourd'hui par les théologiens quand il s'agit de l'action du démon; il est remplacé par le mot préternaturel).

Il est comme une porte qui donne entrée dans l'âme, et, comme nous l'avons dit, il est pour l'entendement, le port où il vient prendre et laisser ce qui lui convient, comme la place de ses provisions.

Voilà pourquoi Dieu et aussi le démon viennent là pour y apporter les plus belles images naturelles, ainsi que nous l'avons dit, et les présenter à l'entendement. Cependant Dieu a également d'autres moyens d'instruire l'âme, puisqu'il y habite, et qu'il peut produire le même résultat par lui-même et par tout autre moyen.

Je ne m'arrête pas à décrire les marques auxquelles on reconnaît les visions qui viennent de Dieu ou non; telle n'est pas mon intention en ce moment. Je veux seulement montrer que l'entendement doit veiller à ce que les visions bonnes qui viennent de Dieu ne soient pas pour lui un embarras ou un obstacle à l'union de l'âme avec la divine Sagesse, comme aussi à ce que les mauvaises ne le jettent pas dans l'illusion.

Voilà pourquoi je déclare que toutes ces conceptions et visions imaginaires, ou représentations quelconques, qui se présentent sous une forme, figure ou connaissance particulière, qu'elles soient fausses et viennent du démon, ou qu'elles soient véritables et viennent de Dieu, ne doivent pas être pour l'entendement un embarras ou un appât.

L'âme ne doit pas non plus chercher à se les procurer, ou à les retenir afin d'être dégagée, détachée, pure, simple, sans aucune forme ou modalité, comme le requiert l'union divine. La raison, la voici.

Toutes les formes dont nous avons parlé sont représentées, comme nous l'avons vu, sous certaines conceptions d'un ordre restreint; mais la Sagesse divine, à laquelle l'entendement doit s'unir, n'a ni forme, ni mode spécial; elle est sans limite et n'est pas enfermée dans les bornes d'une connaissance distincte et particulière, parce qu'elle est totalement pure et simple.

Or si l'on veut unir ces deux extrêmes, l'âme humaine et la divine Sagesse, il faut nécessairement qu'il y ait entre elles une certaine ressemblance; voilà pourquoi l'âme doit être de son côté pure et simple, non limitée ni liée à quelque connaissance particulière, ni modifiée par des limites de formes, d'apparence ou d'images. Dieu, en effet, ne tombe pas sous le concept de formes ou d'images, ni d'une intelligence particulière; d'un autre côté, l'âme, pour s'unir à Dieu, ne doit pas être assujettie à une forme ou connaissance particulière.

Or, qu'il n'y ait en Dieu aucun rapport avec les formes ou images particulières, c'est ce que l'Écriture nous donne bien à comprendre dans le « Deutéronome »; Vocem verborum ejus audistis, et forman penitus non vidistis: « Vous avez entendu le son de ses paroles, mais vous n'avez point vu la forme de son être (Deut. IV, 12). »

Mais elle ajoute qu'il n'y avait là que ténèbres, nuées et obscurité, c'est-à-dire cette connaissance confuse et obscure dont nous avons parlé et dans laquelle l'âme s'unit à Dieu. Plus loin encore elle dit: Non vidistis aliquam similitudinem in die qua locutus est vobis Dominus in Horeb de medio ignis: « Vous n'avez pas vu quelque ressemblance de Dieu, le jour où le Seigneur vous a parlé au milieu des flammes sur la montagne Horeb (Ibid. IV, 15). »

Or que l'âme ne puisse pas arriver à la hauteur de Dieu, autant que cela est possible ici-bas, par le moyen des figures et des images, c'est encore ce que la sainte Écriture nous dit au livre des « Nombres ».

Dieu, en effet, y reproche à Aaron et Marie d'avoir murmuré contre Moïse, leur frère, et veut leur montrer le haut état d'union et d'intimité avec lui où il l'avait placé.

Aussi leur dit-il: Si quis fuerit inter vos propheta Domini, in visione apparebo ei, vel per somnium loquar ad illum. At non talis servus meus Moyses, qui in omni domo mea fidelissimus est; ore enim ad os loquor ei et palam, et non per oenigmata et figuras Dominum videt: « Si parmi vous il y a quelque prophète du Seigneur, je lui apparaîtrai dans quelque vision ou représentation, ou bien je lui parlerai en songe.

Mais il n'y a personne comme mon serviteur Moïse; il est le plus fidèle qui soit dans toute ma maison; c'est bouche à bouche que je lui parle, et il voit le Seigneur non par le moyen des comparaisons, de figures ou d'images, mais à découvert (Nomb. XII, 6-8 ). »

Ce texte nous fait clairement comprendre que, dans ce haut état d'union par l'amour dont nous nous occupons, Dieu ne se communique pas à l'âme par l'intermédiaire de quelque voile, d'une vision imaginaire, d'une figure ou ressemblance; car il ne doit pas y en avoir; il ne se communique que bouche à bouche, c'est-à-dire que l'essence pure et simple de Dieu, qui est comme sa bouche par l'amour, se communique à l'essence pure et simple de l'âme par sa volonté, qui est comme sa bouche par l'amour.

Aussi, pour arriver à cette union de Dieu si parfaite, l'âme doit veiller à ne s'attacher en rien à ces visions imaginaires, formes, représentations ou connaissances particulières; car elles ne peuvent lui servir de moyen proportionné et prochain pour atteindre un tel but; elles y seraient plutôt un obstacle; voilà pourquoi l'âme doit s'en détacher et s'appliquer à les fuir.

Si parfois elle devait les accepter et estimer, ce serait à cause des avantages et des bons effets que les visions véritables opèrent en elle; et encore dans ce cas elle devrait ne pas les accepter, et il lui est avantageux de les refuser toujours. En effet, le bien que peuvent produire ces visions imaginaires, comme aussi les visions corporelles extérieures dont nous avons parlé, c'est de lui communiquer quelque connaissance nouvelle, un peu plus d'amour et de suavité au service de Dieu.

Or pour produire cet effet, il n'est pas nécessaire que l'âme veuille les accepter, comme nous l'avons déjà dit. Les visions le produisent au moment même où elles sont présentes à l'imagination; elles confèrent et infusent à l'âme les connaissances, l'amour et la suavité qu'il plaît à Dieu.

Cet effet a lieu non seulement d'une façon simultanée, mais d'une façon principale; dans le même temps où elles apparaissent, leur effet est produit passivement dans l'âme, qui ne pourrait l'empêcher alors même qu'elle le voudrait, de même qu'elle a été impuissante à l'acquérir bien qu'elle ait dû travailler à s'y disposer.

Considérons la vitre. Elle ne peut pas empêcher le rayon de soleil de la pénétrer; elle le reçoit passivement dès lors qu'elle lui offre la limpidité requise, sans qu'il y ait d'autre diligence ou d'autre travail. Ainsi en est-il de l'âme.

Elle ne peut pas, alors même qu'elle le voudrait, manquer de recevoir les influences et les communications de ces visions, toute résistance de sa part serait inutile; car les visions infuses surnaturelles s'imposent à la volonté qui résiste, pourvu qu'elle soit humble et pleine d'amour; elles ne trouvent d'obstacle que lorsqu'il y a de l'impureté et de l'imperfection, de même que les taches de la vitre l'empêchent de recevoir la clarté du soleil.

Il s'ensuit clairement que si une âme dégage sa volonté et ses affections des taches causées par ces conceptions, images et figures où sont enveloppées les communications spirituelles dont il a été question, non seulement elle ne se prive pas de ces faveurs et de ces biens, mais elle se dispose au contraire beaucoup mieux à les recevoir avec abondance, clarté, liberté d'esprit et simplicité, quand elle laisse à part ces connaissances, car ce ne sont là que les enveloppes et les voiles qui en recouvrent la partie la plus spirituelle.

Quand l'âme, au contraire, veut s'y complaire, ces visions occupent les sens et l'esprit, de telle sorte qu'elle n'a plus la simplicité et la liberté pour recevoir la faveur surnaturelle; elle est occupée à l'écorce, et par conséquent l'entendement n'a plus la liberté nécessaire pour recevoir le fruit même de cette faveur.

Il suit de là que si l'âme veut alors accepter ces visions et en faire cas, elle se met dans l'embarras et se contente de ce qu'il y a de moins important dans ces visions, c'est-à-dire de tout ce qu'elle peut en saisir ou comprendre, soit comme forme, image ou connaissance particulière. Quant à la partie principale, en effet, ou faveur spirituelle qui lui est infuse, elle est incapable de la saisir ou de la comprendre; elle ne sait ce qu'elle est, elle ne le pourrait dire, parce que c'est une faveur purement spirituelle.

Ce qu'elle parvient seulement à en connaître, nous le répétons, c'est l'accessoire qui s'adapte à sa manière de voir, ou les formes sensibles.

Voilà pourquoi je dis que c'est passivement et sans qu'elle mette en activité son entendement, sans même qu'elle sache s'en servir, que lui sont communiquées ces visions qu'elle ne pourrait ni comprendre ni imaginer. L'âme doit dont toujours se détourner de toutes ces visions qui peuvent frapper sa vue ou son ouïe d'une manière distincte, qui lui sont communiquées par les sens et ne sont pas un fondement ni une sécurité pour la foi.

Elle doit porter son attention sur ce qui ne se voit pas et ne tombe pas sous les sens, mais sur ce qui relève de l'esprit et n'est pas susceptible d'une figure sensible. En un mot, c'est par la foi qu'elle s'élève à l'union; car, nous l'avons dit, la foi est le véritable moyen.

Aussi l'âme tirera-t-elle profit de ces visions dans ce qu'elles ont de substantiel, quand, prenant pour guide la foi, elle saura se détacher complètement de ce qu'il y a en elle de sensible et de ce qui est offert de connaissance particulière, quand enfin elle usera bien du but pour lequel Dieu les confère. Elle doit les rejeter, car, ainsi que nous l'avons dit en parlant des visions corporelles, Dieu ne les donne pas pour que l'âme veuille les rechercher ou s'y attacher.

Mais ici surgit un doute. Le voici. S'il est vrai que Dieu n'accorde pas les visions surnaturelles, pour que l'âme s'applique à les recevoir, à s'y attacher ou à en faire cas, pourquoi les lui donne-t-il? Car elle peut y trouver beaucoup d'erreurs et de dangers; du moins elle est exposée aux inconvénients dont nous parlons et qui sont un obstacle à son avancement; et surtout Dieu ne peut-il pas lui donner et communiquer spirituellement et en substance ce qu'il lui communique d'une manière sensible par les visions et les images sensibles?

Nous répondrons à cette difficulté, car il s'agit d'une question très importante et très nécessaire, à mon avis, tant pour les personnes adonnées à la vie spirituelle que pour les directeurs. On montrera le but ou la fin que Dieu se propose; c'est parce que beaucoup l'ignorent, qu'ils ne savent ni se guider eux-mêmes ni guider les autres vers l'union divine.

Ils s'imaginent, en effet, que, par le fait même que l'on reconnaît que ces visions sont véritables et viennent de Dieu, il faut les admettre et s'y attacher en toute sécurité. Ils ne voient pas que l'âme y trouvera aussi un esprit de propriété, de l'attachement et des embarras comme dans les choses du monde, si elle ne sait pas les rejeter également.

Voilà pourquoi ils croient bon d'accepter les unes et de rejeter les autres; ils se mettent, eux et les autres, dans de grandes difficultés et de grands dangers de ne pouvoir discerner les visions vraies des visions fausses.

Dieu ne leur impose point ce travail; il ne leur prescrit pas non plus d'exposer les âmes pures et simples à ce danger et aux difficultés de ce discernement. Ils ont une doctrine saine et sûre, la foi; c'est par elle qu'ils doivent réaliser des progrès. Pour cela, il est nécessaire de fermer les yeux à tout ce qui vient des sens, ainsi qu'aux connaissances claires d'objets particuliers.

Saint Pierre était absolument certain d'avoir eu une vision de la gloire de Notre-Seigneur Jésus-Christ à sa Transfiguration, et cependant, après l'avoir racontée dans sa seconde Épître canonique, il ne la donne pas comme le principal témoignage de son assurance, et pour recommander sa foi, il ajoute: Et habemus fimiorem propheticum sermonem; cui benefacitis attendentes, quasi lucernae lucenti in caliginoso loco: « Nous avons un témoignage plus sûr » que cette vision du Thabor, « ce sont les paroles des prophètes, auxquelles vous faites bien de vous attacher comme au flambeau qui brille dans un lieu obscur (II Pier.  I. 19) ».

Cette comparaison, si nous y réfléchissons bien, renferme la doctrine que nous enseignons. Quand nous disons qu'il faut suivre la lumière de la foi enseignée par les prophètes comme le flambeau qui brille dans un lieu obscur, nous disons que nous devons nous tenir dans l'obscurité, les yeux fermés à toutes les lumières d'ici-bas, et que, au milieu de cette obscurité, seule la foi, qui elle aussi est obscure, est le flambeau que nous devons suivre.

Si nous voulons nous attacher aux autres lumières ou connaissances claires et particulières, par le fait même nous cessons de nous attacher à la lumière obscure de la foi qui ne nous donne plus sa lumière dans ce lieu obscur dont parle saint Pierre; ce lieu obscur signifie l'entendement qui est le chandelier sur lequel repose le flambeau de la foi; il doit rester dans l'obscurité jusqu'à ce que lui apparaisse dans l'autre vie le jour de la claire vision de Dieu, ou bien dans cette vie celui de sa transformation et union avec Dieu vers qui l'âme s'achemine.

Méditons ….

à  suivre ….Chapitre 15



  Eucharistie    Colombe


_________________
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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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Message par Maud Ven 28 Avr - 7:28

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_41

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 15


Où l’on montre dans quel but et pour quels motifs Dieu confère à l’ âme les biens spirituels par le moyen des sens .
On répond au doute dont il a été question


Il y a beaucoup à dire sur le but et les motifs pour lesquels Dieu confère ces visions. Il veut élever l'âme de sa bassesse jusqu'à cette union avec lui dont parlent tous les livres de spiritualité. Tel est aussi le sujet que nous allons élucider dans ce traité. Mais dans le présent chapitre nous traiterons uniquement de ce qui suffit pour répondre à notre doute qui est ainsi formulé:

Puisque dans ces visions surnaturelles il y a tant de dangers pour l'âme et tant d'obstacles qui l'empêchent  de réaliser des progrès, comme nous l'avons dit, pourquoi Dieu, qui est la Sagesse même, et dont le désir est d'éloigner des âmes toute occasion de chute et toute embûche, leur communique-t-il et leur offre-t-il ces visions?

Pour répondre à cette question, posons d'abord trois principes fondamentaux. Le premier se tire de l'épîte de saint Paul aux Romains. Il y dit: Quae autem sunt, a Deo ordinata sunt: « Ce qui existe a été ordonné par Dieu (Rom. XIII, 1). » Le second est pris au livre de la Sagesse, où l'Esprit-Saint nous dit: Disponit omnia suaviter, comme s'il disait: La sagesse de Dieu, bien qu'elle atteigne d'une fin à l'autre, c'est-à-dire d'une extrémité à l'autre, dispose toutes choses avec suavité (Sag. VIII, 1). Le troisième, qui nous est fourni par les théologiens, est conçu en ces termes: Deus omnia movet secundum modum eorum.

Cela veut dire: « Dieu meut tous les êtres selon le mode de leur nature. »

D'après ces principes fondamentaux, il est clair que pour mouvoir l'âme et l'élever de la profondeur et de l'extrémité de sa bassesse, à l'autre profondeur et extrémité de sa grandeur dans l'union avec lui-même, Dieu doit agir avec ordre, avec suavité et selon la nature de cette même âme.

Or le mode ou le moyen par lequel l'âme se procure les connaissances, n'est autre que celui des formes ou images des choses créées; elle connaît et elle apprend par les sens. Voilà pourquoi quand Dieu veut la conduire à la connaissance suprême, il doit, pour agir avec suavité, commencer par la mouvoir dès l'extrême bassesse des sens et l'élever graduellement selon sa nature jusqu'à l'autre extrémité, celle de la sagesse spirituelle, qui ne tombe plus sous les sens.

Il la soulève donc tout d'abord en l'instruisant par des formes, des images ou des moyens sensibles, et, selon son mode de comprendre, par des voies naturelles ou surnaturelles, par des méditations discursives jusqu'à la souveraine grandeur de son esprit.

Telle est la cause pour laquelle Dieu lui donne des visions, des représentations, des images et autres connaissances sensibles, intelligibles et spirituelles. Cela ne veut pas dire que Dieu ne voudrait pas lui donner immédiatement et dès le premier acte la substance spirituelle elle-même, si les deux extrêmes, l'humain et le divin, le sens et l'esprit, pouvaient par voie ordinaire se joindre et s'unir à la suite d'un seul acte, sans en faire intervenir une foule d'autres qui s'enchaînent avec ordre et suavité et servent de fondements et de disposition pour les autres.

C'est ainsi qu'il en est des agents naturels; les premiers servent aux seconds, les seconds aux troisièmes, et ainsi de suite.

C'est ainsi également que Dieu perfectionne l'homme, selon la nature même de l'homme. Il commence par ce qu'il y a de plus bas et de plus extérieur, afin de l'élever jusqu'au degré le plus haut et le plus intérieur. Il le perfectionne donc tout d'abord dans les sens du corps; il le porte à faire bon usage des objets de l'ordre naturel qui sont parfaits et extérieurs, comme entendre un sermon, assister à la messe, voir des choses saintes; il le porte en outre à mortifier le goût dans le manger, et à mortifier le toucher par les saintes rigueurs de la pénitence.

Lorsque les sens sont quelque peu disposés, il les perfectionne encore d'ordinaire; il leur accorde quelques faveurs surnaturelles et quelques délices pour les affermir davantage dans le bien, et leur offre quelques communications surnaturelles, comme, par exemple, des visions de saints ou de choses saintes et corporelles, des parfums et des paroles très suaves, ou une très grande satisfaction dans le toucher.

Par là les sens se confirment beaucoup dans la vertu et détournent les tendances de leur pente au mal. De plus, les sens corporels intérieurs dont nous avons parlé, l'imagination et la fantaisie, se perfectionnent simultanément et s'habituent au bien par des considérations, méditations ou saints discours, et tout cela contribue à instruire l'esprit.

Lorsque l'âme est ainsi disposée par cet exercice naturel, Dieu a coutume de l'éclairer et de la spiritualiser davantage par quelques visions surnaturelles qui sont celles que nous appelons ici imaginaires et qui, nous l'avons déjà dit, produisent de grands fruits dans l'esprit; car les unes et les autres lui enlèvent graduellement quelque chose de sa grossièreté et le perfectionnent, bien que très lentement.

C'est ainsi que Dieu élève peu à peu l'âme; il la fait passer de degré en degré jusqu'à ce qu'il y a de plus intérieur. Il n'est pas toujours nécessaire que cet ordre progressif du premier au dernier degré soit suivi avec toute l'exactitude dont nous venons de parler. Car parfois Dieu se sert de certains moyens et non des autres, il passe du plus intérieur au moins intérieur, ou il accorde ses faveurs tout à la fois; il agit comme il voit que cela convient pour le bien de l'âme, ou comme il veut la favoriser; mais la voie ordinaire est celle que nous venons de dire.

C'est donc de cette manière que Dieu procède ordinairement pour instruire l'âme et la rendre spirituelle. Il commence par lui communiquer la vie spirituelle par les choses les plus extérieures, les plus palpables, les plus accommodées aux sens; il agit d'après la petitesse de l'âme et son peu de capacité. C'est par l'intermédiaire de cette écorce des choses sensibles, qui en soit sont bonnes, qu'il la meut à produire des actes particuliers, afin qu'à chaque fois elle reçoive de nouvelles communications spirituelles.

Par là elle arrivera à contracter l'habitude de ce qui est spirituel et arrivera à ce qu'il y a de plus substantiel dans cette vie de l'esprit, qui est complètement détachée des sens; mais, comme nous l'avons dit, elle ne peut y arriver que peu à peu, et selon son mode d'agir, par le moyen des sens auxquels elle est toujours liée et attachée.

Voilà pourquoi, à mesure qu'elle se rapproche davantage de la vie de l'esprit dans ses rapports avec Dieu, elle se dépouille et se détache des moyens sensibles qui sont la méditation raisonnée et la méditation imaginaire. Par conséquent, lorsqu'elle sera parvenue à traiter avec Dieu d'une façon parfaitement spirituelle, elle sera nécessairement affranchie de tout ce qui peut tomber sous les sens dans ses rapports avec Dieu.

Ainsi nous voyons que plus une chose s'approche d'un extrême, plus elle s'éloigne de l'autre et lui devient étrangère; et si elle est parfaitement attachée à l'un d'eux, c'est qu'elle est complètement séparée de l'autre. De là cet adage communément admis dans la vie spirituelle: Gustato spiritu, desipit omnis caro:

Une fois que l'âme a goûté les douceurs de l'esprit, tout ce qui vient de la chair lui est insipide, c'est-à-dire qu'elle ne tire ni profit ni goût de ces voies de la chair, ou opérations des sens dans le domaine spirituel.

Cela est évident. Car si la faveur est spirituelle, elle ne tombe déjà plus sous les sens; mais si la faveur est de telle sorte qu'elle peut être saisie par les sens, elle n'est plus purement spirituelle. Plus elle peut-être perçue par les sens et les facultés naturelles, et moins elle est spirituelle et surnaturelle, comme nous l'avons dit.

Voilà pourquoi l'homme adonné à la spiritualité qui est déjà parfait ne fait plus de cas des sens, ne reçoit rien par leur intermédiaire, ne s'en sert plus et n'a plus besoin de s'en servir comme d'un moyen principal dans ses rapports avec Dieu, ainsi qu'il le faisait précédemment avant d'avoir grandi dans la vie spirituelle.

C'est là ce que saint Paul dit aux Corinthiens: Cum essem parvulus, loquebar ut parvulus, sapiebam ut parvulus, cogitabam ut parvulus. Quando autem factus sum vir, evacuavi quae erant parvuli: « Quand je n'étais qu'un petit enfant, je parlais comme un petit enfant, je sentais, je raisonnais comme un petit enfant.

Mais depuis que je suis devenu un homme j'ai abandonné ce qui était de l'enfant (I Cor. XIII, 11). » Comme nous l'avons déjà dit, les choses qui affectent les sens et les connaissances que l'esprit en retire sont des exercices d'enfant.

Aussi l'âme qui veut toujours s'y attacher et ne plus s'en affranchir ne cessera jamais d'être comme un tout petit enfant; elle parlera toujours de Dieu comme un enfant; elle connaîtra Dieu comme un enfant; elle pensera à Dieu comme un enfant. Et parce qu'elle s'attache à l'écorce, aux sens, ce qui est le propre des enfants, elle n'arrivera jamais à la substance de l'esprit, ce qui est le propre de l'homme parfait.

Voilà pourquoi l'âme qui veut grandir ne doit pas rechercher les révélations dont nous avons parlé, alors même que Dieu en serait l'auteur; elle est dans le cas de l'enfant qui doit abandonner le sein maternel pour habituer son palais à une nourriture plus substantielle et plus forte.

Mais, me direz-vous tout de suite: Faudra-t-il donc que l'âme, quand elle est toute petite encore, veuille recevoir ces révélations, mais qu'elle les abandonne lorsqu'elle est déjà plus grande, ainsi qu'il est nécessaire à l'enfant de vouloir prendre le sein pour se sustenter, jusqu'à ce que, étant devenu plus grand, il puisse le laisser? A cela je réponds.

S'il s'agit de la méditation et de l'exercice du discours naturel, où l'âme commence à chercher Dieu, il est vrai que l'âme ne doit pas abandonner ce moyen sensible de se sustenter, elle doit le garder jusqu'au temps et au moment où elle pourra le laisser, c'est-à-dire lorsque Dieu l'introduit dans des rapports avec lui plus spirituels, ou dans la contemplation, comme nous l'avons dit dans le chapitre onzième de ce livre.

Mais quand il s'agit des visions imaginaires ou autres communications surnaturelles qui peuvent tomber sous le sens indépendamment de la volonté de l'homme, je dis que toujours, en tous temps, que l'on soit dans l'état de perfection ou dans un état moins élevé, l'âme ne doit pas les rechercher, alors même qu'elles viendraient à Dieu, et cela pour deux raisons.

Tout d'abord, comme nous l'avons dit, c'est que ces vision produisent passivement leur effet, sans que l'âme puisse l'empêcher, bien qu'elle puisse empêcher et empêche la vision elle-même, ainsi que cela arrive très souvent, et par conséquent ce second effet que la vision devait causer dans l'âme se produit en elle d'une façon plus substantielle par une autre voie.

Car nous le répétons, l'âme ne peut pas empêcher les biens que Dieu veut lui communiquer, à moins que ce ne soit par quelque imperfection ou quelque attache.

Or quand elle renonce à ces visions avec humilité et respect, elle n'apporte ni imperfection ni attache; au contraire, elle montre son désintéressement et son abnégation, et c'est là la meilleure disposition pour arriver à l'union avec Dieu.

En second lieu l'âme l'âme se délivre par là du danger et de la fatigue qu'il y a à discerner quelles sont les bonnes et quelles sont les mauvaises visions, à reconnaître si c'est un ange de lumière ou un ange des ténèbres qui apparaît. Cela ne procure aucun profit, mais fait perdre le temps, crée des embarras pour l'âme, la jette dans l'occasion d'une foule d'imperfections, l'expose à ne plus avancer, l'occupe en choses qui ne sont pas de son état, quand elle devrait se dégager de ces détails de visions et de connaissances particulières, comme nous l'avons dit des visions corporelles et de celle dont nous parlons, et comme il en sera encore question.

Que l'on soit donc bien persuadé de cette vérité: si Notre-Seigneur ne devait pas élever l'âme d'après la nature de cette même âme, comme nous le prétendons ici, il ne lui communiquerait jamais l'abondance de son esprit par ces moyens si étroits de formes, de figures, de connaissances particulières, où il ne lui donne que des miettes pour la sustenter.

Voilà pourquoi David a dit: Mittit crystallum suam sicut buccellas: « Il n'a donné sa sagesse (Ps. CXLVII, 17. P. Silverio ' Envio su sabiduria... ') que par parcelles. » Aussi est-il profondément triste que l'âme, dont la capacité est pour ainsi dire infinie, ne reçoive sa nourriture par les sens qu'en petites quantités, à cause de l'infirmité de son esprit et de son inaptitude sensuelle. C'est pour cela aussi saint Paul avait tant de chagrin de ce peu de disposition et de cette inaptitude à recevoir les dons spirituels.

Il disait en effet, en s'adressant aux Corinthiens: Et ego, fratres, non potui vobis loqui quasi spiritualibus, sed quasi carnalibus. Tamquam parvulis in Christo, lac vobis potum dedi non escam; nondum enim poteratis; sed nec nunc quidem potestis; adhuc enim carnales estis; « Quant à moi, mes frères, lorsque je suis venu vers vous, je n'ai pu vous parler comme à des gens spirituels, mais comme à des gens charnels; car vous ne pouviez pas recevoir encore le langage de l'esprit, et vous ne le pouvez même pas maintenant, puisque vous êtes toujours charnels (I Cor. III, 2) », aussi vous ai-je donné comme à des enfants dans le Christ du lait à boire, et non une nourriture solide à manger.

Il faut donc savoir que l'âme ne doit pas s'arrêter à cette écorce des images et des objets qui lui sont présentés surnaturellement. Telle sera sa conduite d'abord quand il s'agit de ce qui lui vient par les sens extérieurs, comme les entretiens, les paroles qui frappent l'ouïe, les visions de Saints, les spectacles splendides qui frappent la vue, les parfums qui flattent l'odorat, les goûts et les suavités qui charment le palais ou les autres jouissances qui s'adressent au tact, toutes sensations qui découlent ordinairement de l'esprit et qui sont plus ordinaires encore chez les spirituels.

Mais elle ne s'arrêtera pas non plus dans une vision quelconque des sens intérieurs, comme sont les visions imaginaires et intérieures.

Il faut plutôt qu'elle s'en éloigne complètement; elle ne doit s'arrêter qu'à l'esprit bon qui les produit, et s'appliquer à le conserver avec un zèle désintéressé dans tout ce qui touche au service de Dieu, sans s'occuper de ces représentations imaginaires, et sans y rechercher quelque goût sensible. De la sorte on ne retire de ces communications que le fruit que Dieu avait en vue, c'est-à-dire l'esprit de dévotion; il ne le donne pas pour une autre fin principale.

On laisse en même temps ce qu'il ne donnerait pas, si on pouvait, comme nous l'avons dit, recevoir le résultat spirituel sans ces communications qui viennent par les sens.


Méditons…

à suivre …Chapitre 16


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Dim 7 Mai - 7:18

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 16


On parle du tort que peuvent faire aux âmes quelques directeurs spirituels, parce qu’ils ne les conduisent pas ,comme il faut au milieu de ces visions dont nous avons parlé.
On montre en outre comment ces visions , bien qu’elles viennent de Dieu , peuvent jeter l’ illusion.


Dans cette question des visions, nous ne pouvons pas observer la brièveté que nous désirerions, tant la matière est abondante. Aussi, bien que nous ayons dit en substance ce qui est nécessaire pour faire comprendre à l'homme adonné à la spiritualité comment il doit se conduire au milieu de ces visions, et au directeur qui le guide comment il doit le traiter alors, il ne sera pas inutile d'exposer un peu plus cette doctrine. De la sorte nous ferons connaître plus clairement les dommages qui découlent soit pour les âmes spirituelles, soit pour les directeurs, quand ils ajoutent trop de crédulité à ces visions, alors même qu'elles viennent de Dieu.

Le motif qui me porte en ce moment à m'étendre un peu sur ce point, c'est le peu de prudence que j'ai cru remarquer dans quelques maîtres de la vie spirituelle. Ils mettent leur confiance dans ces communications surnaturelles; ils les croient bonnes et venant de Dieu, et en arrivent les uns et les autres à tomber dans de grandes erreurs et à se montrer très incapables. Ils justifient la sentence du Seigneur qui dit: Caecus autem si caeco ducatum praestet, ambo in foveam cadunt: « Si un aveugle conduit un aveugle, ils tombent tous les deux dans la fosse (Mat. XV,14). »

Il ne dit pas qu'ils tomberont mais qu'ils tombent: car il n'est pas nécessaire qu'il y ait chute d'erreur pour qu'ils tombent; le seul fait d'avoir la prétention de se conduire l'un l'autre est déjà une erreur, et ainsi on peut dire qu'au moins en cela seul ils tombent.

Tout d'abord, il y en a quelques-uns qui se conduisent de telle sorte et de telle manière avec les âmes sujettes à ces visions qu'ils les jettent dans l'illusion ou le trouble, ou ne les conduisent point par la voie de l'humilité, ou les aident d'une certaine manière à faire grand cas de ces visions, ce qui est cause qu'elles ne marchent pas dans un esprit de foi pur et parfait. Ils ne les élèvent pas dans la foi, ils ne les fortifient pas dans la foi; ils se livrent à une foule d'entretiens sur ces visions.

Par là ils leur donnent à comprendre qu'ils en font quelque estime, ou même beaucoup de cas; par suite les âmes fond de même: elles restent attachées à ces communications; elles ne se tiennent pas sur le fondement de la foi, ni dans ce vide, ce dénûment, ce détachement de tout qui est indispensable pour prendre le vol sur les hauteurs d'une foi obscure.

Ces inconvénients proviennent de l'attitude et du langage que l'âme découvre dans son directeur sur ce point. Je ne sais comment elle a, en outre, une facilité extrême à estimer ces visions qui sont au-dessus de son pouvoir et à détourner ses regards de l'abîme de la foi. La cause de cette facilité doit venir de ce qu'elle en est toute occupée.

Comme il s'agit de communications qui viennent par les sens et que la nature y est portée, comme de plus elle y trouve de la saveur et est disposée à ces connaissances de choses particulières et sensibles, il lui suffit de voir son confesseur ou toute autre personne leur donner quelque estime ou valeur pour que non seulement elle fasse de même, mais encore pour les désirer avec plus d'ardeur; et sans s'en apercevoir elle se nourrit de ces visions avec plus d'avidité, elle s'y porte davantage et s'en saisit comme d'une proie.

De là découlent au moins une foule d'imperfections. L'âme n'est plus aussi humble; elle songe que cela est quelque chose, qu'elle est l'objet de quelque faveur, que Dieu fait cas d'elle; elle est contente et un peu satisfaite d'elle-même, et cela est contraire à l'humilité. Bientôt, le démon arrive; il augmente secrètement cette disposition sans qu'elle s'en aperçoive; il commence à lui suggérer des pensées de curiosité sur les autres; ont-ils de ces faveurs, ou non? Sont-ce les même, on non? Et cette disposition est contraire à la sainte simplicité et à la solitude intérieure.

Outre ces dommages et celui de ne pas grandir dans la foi si on ne s'écarte pas de ces réflexions, comme aussi outre les inconvénients moins palpables et moins sensibles que ceux dont nous venons de parler, il y en a d'autres dans cette méthode qui sont plus subtils et plus odieux aux regards du Seigneur, parce que l'âme n'est pas détachée de tout. Mais laissons ce sujet pour le moment, nous le reprendrons lorsque nous parlerons du vice de la gourmandise spirituelle et des six autres vices capitaux. Nous donnerons alors, Dieu aidant, beaucoup d'explications sur ces taches subtiles et difficiles à saisir qui souillent l'esprit, parce qu'on ne sait pas diriger l'âme dans le dénûment.

Pour le moment je me contente de montrer quelle est la conduite de certains confesseurs qui ne savent pas bien diriger les âmes. A coup sûr, je voudrais savoir m'expliquer. Je comprends, qu'il est difficile de dire comment l'esprit du disciple se forme d'une manière secrète et intime sur le modèle de son maître spirituel. Je redoute aussi d'aborder cette matière si vaste, parce qu'il semble qu'on ne peut expliquer un point concernant le disciple sans expliquer celui qui concerne le maître. D'ailleurs, comme il s'agit de choses spirituelles, les mêmes phénomènes se manifestent chez l'un et chez l'autre.

Je vais donc réaliser ma promesse. Il me semble, et il en est vraiment de la sorte, que si le père spirituel est porté aux visions, s'il en ressent beaucoup d'impression, s'il y trouve du goût et de l'attrait, il ne pourra manquer d'imprimer à son insu dans l'esprit du disciple ce même goût, ce même attrait, à moins que le disciple ne soit plus avancé que son maître. Mais, le serait-il en effet, il pourra en recevoir de très grands dommages, s'il reste sous sa conduite.


L'inclination que le père spirituel a pour ces visions, et le goût qu'il leur porte, font qu'il les estime d'une certaine manière; s'il n'y veille avec le plus grand soin, il ne pourra manquer d'en donner des marques et de manifester ses propres sentiments au disciple; or si ce dernier a la même inclination d'esprit, il ne pourra, à mon avis, manquer d'avoir comme lui la plus grande estime pour ces visions.

Mais ne nous lançons pas dans un sujet si ardu. Parlons maintenant du confesseur, porté ou non à ces visions, qui n'a pas la prudence nécessaire pour en détourner son disciple et le porter à s'en détacher, mais qui au contraire s'en entretient avec lui, en fait l'objet principal de ses conversations avec lui, comme nous l'avons dit, et lui donne les marques auxquelles on reconnaît les bonnes et les mauvaises visions. Sans doute cette science est bonne; mais il n'y a pas lieu de jeter l'âme dans cette occupation, ce souci, ce danger, à moins de quelque pressante nécessité, comme nous l'avons dit plus haut.

Quand, au contraire, on fait peu de cas de ces visions, quand on les repousse, on évite tous ces inconvénients, et on accomplit ce qu'il faut.

Il y a plus. Lorsque ces directeurs voient que ces âmes ont de telles communications avec Dieu, ils leur demandent de supplier Dieu de leur révéler tel ou tel secret les concernant eux-mêmes ou d'autres; et ces âmes ont la folie de leur obéir, à la pensée qu'il est licite de savoir les choses par cette voie.

Ces directeurs eux-mêmes pensent que, puisque Dieu veut révéler ou dire quelque chose par un moyen surnaturel, comme cela lui plaît et pour le but qu'il se propose, il est aussi permis de le désirer et même de le lui demander. Si parfois Dieu exauce leur demande, ils en prennent l'assurance pour d'autres circonstances; ils s'imaginent que Dieu est content de cela et le veut; mais en réalité, Dieu ne l'a pas pour agréable et ne le veut pas.

Quant à eux, ils agissent souvent et croient selon qu'il leur a été révélé ou répondu. Comme ils sont très affectionnés à cette manière de traiter avec Dieu, ils s'y attachent beaucoup et leur volonté y trouve naturellement son repos. Dès lors leur goût est un goût naturel, et naturellement selon leur manière de comprendre il est satisfait.

Mais dans ce que les âmes disent, il y a très souvent des erreurs, et alors les confesseurs voient que les faits ne sont pas conformes à ce qu'ils avaient compris. Ils s'en étonnent et aussitôt ils se demandent si ces révélations venaient de Dieu ou non, puisque l'événement ne correspond pas à leur manière de voir.

Ils pensaient d'abord deux choses: la première c'est que la révélation venait de Dieu, tant ils y trouvaient plaisir; mais ce contentement peut très bien venir de leur nature qui était portée à ces communications, comme nous l'avons dit. La seconde, c'est que la révélation, venant de Dieu, devait se réaliser comme ils l'avaient imaginé ou pensé. Et c'est là une grande illusion. Car les révélations ou les paroles de Dieu ne se vérifient pas toujours comme les hommes se l'imaginent ou selon le sens des mots.

Voilà pourquoi on ne doit pas s'y fier ni les croire aveuglément, alors même qu'il s'agirait de révélations, de réponses ou de paroles de Dieu. Car seraient-elles certaines et vraies en soi, elles ne le sont pas toujours dans leurs causes ni dans la manière dont nous les comprenons, comme nous le verrons dans le prochain chapitre. Nous dirons également comment Dieu, tout en répondant parfois surnaturellement aux demandes qui lui sont adressées, n'aime pas ce procédé, et comment il montre alors son irritation.


Méditons ….

à suivre…..chapitre 17



  Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Lun 8 Mai - 7:33

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 17



Où l’on montre et l’ on prouve comment les visions et révélations , qui viennent de Dieu sont vraies en soi , peuvent nous jeter dans l’ illusion.
On le prouve par l’ autorité  de la Sainte  Ecriture



Pour deux raisons, avons-nous dit, les visions et les paroles de Dieu, tout en étant véritables et toujours certaines en soi, ne le sont pas toujours par rapport à nous: la première, à cause de notre manière défectueuse de les comprendre; et la seconde, à cause de leurs motifs ou fondements qui sont variables (Les précédentes éditions portaient ici le texte suivant: « que son comminatorias y como condicionales. Si esto no se enmendare o si aquello se hiciere, aunque la locucion en lo que suena sea absoluta; las cuales dos cosas probaremos con algunas autoridades divinas: et la seconde vient de la dépendance qu'elles ont de ce qui les cause, dépendance qui les rend comminatoires et conditionnelles. Aussi faut-il sous-entendre: si on ne s'amende pas de tel vice, ou si telle chose se fait, bien que la parole prise en elle-même soit absolue. Ce sont ces deux motifs que nous allons prouver par l'autorité de la sainte Écriture. »).

Quant à la première raison, il est clair que ces révélations ne sont pas toujours et n'arrivent pas toujours selon notre manière de les comprendre.

La cause, c'est que Dieu, étant un abîme d'immensité et de profondeur, donne ordinairement à ses prophéties, paroles ou révélations d'autres conceptions que les nôtres et un sens bien différent de celui que nous comprenons en général; ces révélations sont en elles-mêmes d'autant plus vraies et plus certaines qu'elles nous le paraissent moins. C'est là ce que nous voyons à chaque pas dans la sainte Écriture. Nous y lisons, en effet, que beaucoup de prophéties et de paroles adressées par Dieu à un grand nombre de personnages de l'antiquité ne se réalisaient pas comme ils l'espéraient, parce qu'ils les comprenaient à leur manière et trop littéralement. C'est ce que nous constaterons avec évidence par l'autorité de la sainte Écriture.

Au livre de la Genèse, Dieu dit à Abraham, après l'avoir amené au pays de Chanaan: « Je te donnerai cette terre (Gen. XV, 7). » Comme cette promesse lui était souvent renouvelée, et qu'Abraham, étant déjà vieux, n'en voyait pas la réalisation, il répliqua un jour à Dieu, qui lui parlait encore dans le même sens: « Mais comment et par quel signe pourrai-je savoir que je dois posséder cette terre? (Ibid. XV, 8 ) » Unde scire possum quod possessurus sum eam? Alors Dieu lui révéla que ce ne serait pas lui personnellement qui la posséderait mais plutôt ses enfants au bout de quatre cents ans. A cette parole Abraham comprit enfin la promesse qui était très vraie en soi; car Dieu, en donnant cette terre à ses enfants par amour pour lui, la lui donnait pour ainsi dire à lui-même.

Mais le patriarche se trompait tout d'abord dans l'interprétation de la promesse; s'il avait agi alors d'après le sens qu'il donnait à la prophétie, il aurait pu se tromper grandement, puisque la promesse ne devait pas se réaliser de son temps; et ceux qui l'auraient vu mourir alors, après lui avoir entendu dire que Dieu la lui avait promise, auraient été troublés dans leur foi et se seraient imaginé que la prophétie était fausse.

Un fait semblable arriva à son petit-fils Jacob, à l'époque où Joseph l'appela en Égypte à cause de la famine qui désolait le pays de Chanaan. Lorsqu'il était en route, Dieu lui apparut et lui dit: Noli timere, descende in Aegiptum. Ego descendam tecum illuc... Et ego inde adducam te revertentem: « Jacob ne crains pas, descends en Égypte; j'y descendrai avec toi, et quand tu sortiras, c'est moi-même qui t'en tirera et serai ton guide (Gen. XLVI, 3-4). » Or l'événement ne se réalisa pas comme ces paroles semblent naturellement l'annoncer. Nous savons, en effet, que le saint vieillard Jacob mourut en Égypte et n'en sortit point vivant.

La promesse devait s'accomplir dans ses enfants, que Dieu retira de l'Égypte beaucoup d'années plus tard et à qui il servit de guide dans le chemin.

On voit donc clairement que quiconque ayant eu connaissance de la promesse de Dieu à Jocob aurait pu regarder comme certain que Jacob, étant entré personnellement et vivant en Égypte par l'ordre de Dieu et sous sa protection, devait aussi personnellement en sortir vivant. C'était en effet de la même manière et dans la même forme que Dieu lui avait annoncé la sortie d'Égypte et le secours qu'il lui assurait. On se serait donc trompé et on aurait été étonné quand, le voyant mourir en Égypte, on aurait vu que la promesse ne se réalisait pas comme on l'espérait.

Aussi, bien que les paroles de Dieu soient très véritables en elles-mêmes, elles peuvent nous occasionner beaucoup d'illusions.

Nous lisons également dans les Juges que toutes les tribus d'Israël se réuniront pour combattre la tribu de Benjamin et la punir d'un certain crime dont elle s'était rendue coupable. Dieu leur ayant donné un chef pour faire cette guerre, les Israélites considérèrent la victoire comme absolument certaine. Mais ils furent battus et perdirent vingt mille des leurs; aussi ils furent tout étonnés et passèrent tout le jour à pleurer devant le Seigneur; ils ne comprenaient pas pourquoi ils avaient été battus après avoir été assurés de la victoire. Ils demandèrent à Dieu s'ils devaient combattre de nouveau; et il leur fut répondu qu'ils devaient de nouveau livrer la bataille contre Benjamin.

Comme ils étaient assurés cette fois de la victoire, ils combattirent avec le plus grand courage, mais ils furent encore vaincus et perdirent dix-huit mille hommes.

Dans la confusion extrême où ils se trouvaient, ils ne savaient plus que faire; ils voyaient que Dieu leur commandait de combattre, et ils étaient toujours défaits, surtout quand ils dépassaient de beaucoup leurs adversaires en nombre et en force, car les soldats de la tribu de Benjamin n'étaient que vingt-cinq mille sept cents, tandis qu'eux-mêmes étaient quatre cent mille. Ils se trompaient donc dans la manière d'interpréter la parole de Dieu, qui pourtant n'était pas trompeuse. Dieu, en effet, ne leur avait pas dit qu'ils seraient vainqueurs, mais qu'ils devaient combattre: et par ces défaites il voulait les punir d'une certaine négligence et de leur présomption en les humiliant.

Quand à la fin, Dieu leur répondu qu'ils vaincraient, ils remportèrent en effet la victoire à force de courage et d'efforts. (Jud. XX, 11) ».

C'est de cette manière et de beaucoup d'autres que les âmes se trompent au sujet des révélations et des paroles de Dieu; elles les prennent trop à la lettre et n'en considèrent que l'écorce. Or, comme on l'a déjà donné à comprendre, le but principal de Dieu dans ces communications est de donner, de communiquer le fruit spirituel qui est renfermé dans ces paroles; et c'est là ce qu'il est très difficile de comprendre; car ce fruit est beaucoup plus abondant que celui de la lettre; il est bien plus extraordinaire et en dépasse toutes les limites.

Voilà pourquoi celui qui veut s'attacher à la lettre de la révélation, à la forme ou à l'image sensible de la vision, ne peut manquer de tomber dans une grande illusion, et de se trouver ensuite tout honteux et couvert de confusion; il s'est laissé guider par les sens, au lieu de se détacher du sensible pour se disposer à recevoir les lumières de l'Esprit de Dieu. Saint Paul l'a dit: Littera enim occidit, spiritus autem vivificat: « La lettre tue, mais l'esprit vivifie (I Cor. III, 6). »

Aussi faut-il dans des cas de ce genre, renoncer à la lettre qui frappe les sens, et demeurer dans l'obscurité de la foi, c'est là l'esprit vivificateur que les sens ne peuvent percevoir.

Un grand nombre des enfants d'Israël n'entendaient qu'à la lettre les paroles et les prophéties de leurs prophètes. Voyant ensuite qu'elles ne se réalisaient pas comme ils l'avaient espéré, ils en faisaient peu de cas et n'y ajoutaient pas foi. Il y eut même parmi eux un diction populaire, qui était pour ainsi dire passé en proverbe et par lequel on se moquait des prophéties.

Isaïe s'en plaint lorsqu'il dit: Quem docebit scientiam? Et quem intelligere faciet auditum? Ablactatos a lacte, avulsos ab uberibus. Quia manda, remanda, manda, remanda, expecta, reexpecta, expecta, reexpecta, modicum ibi, modiucum ibi. In loquela enim labii, et lingua altera loquetur ad populum istum: « A qui Dieu donnera-t-il la science? A qui fera-t-il entendre sa prophétie et sa parole? Ce sera à ceux qui ne se nourrissent plus de lait, et qui ne connaissent plus le sein maternel.

Car tous disent: promets et promets encore, espère et espère encore, espère et promets encore, espère et espère encore, espère et espère encore, un peu ici, et un peu là. Dieu parlera de ses lèvres et dans une autre langue à ce peuple (Is. XXVIII, 9-11). » Par ces paroles Isaïe fait comprendre clairement que les enfants d'Israël se riaient de ses prophéties et lui disaient sa dérision par ce proverbe: Espère et espère encore, montrant par là que les prophéties ne s'accomplissaient jamais. Ils étaient, en effet, attachés au sens littéral, qui n'est que comme le lait pour les enfants, et à leur sens propre, qui est comme le sein dont ils se sont éloignés et qui est en opposition avec la grandeur de la science de l'esprit.

Voilà ce que le prophète dit: « A qui Dieu enseignera-t-il la sagesse de ses prophéties? A qui fera-t-il comprendre sa doctrine, si ce n'est à ceux qui sont déjà sevrés du lait de la lettre et éloignés du sein de leurs propres sens? » car les autres ne comprennent pas les prophéties; ils ne s'attachent qu'au lait de l'écorce et de la lettre et au sein de leurs propres sens. Ils disent en effet: Promets et promets encore; espère et espère encore...

Car Dieu doit leur parler dans un sens qui n'est pas le leur et dans un langage différent du leur. Il ne faut donc point considérer alors notre sens personnel et notre langage; ne savons-nous pas que la parole de Dieu a une signification spirituelle bien différente de notre manière de comprendre et présente des difficultés? Cela est tellement vrai que Jérémie lui-même, tout prophète de Dieu qu'il était, en voyant combien la signification des paroles de Dieu était différente de celle que les hommes leur attribuaient, semble lui aussi, s'y être mépris.

Il prend la défense du peuple et il dit: Heu, heu, heu, Domine Deus, ergone decepisti populum istum et Jérusalem, dicens: Pax erit vobis; et ecce pervenit gladius usque ad animam? « Hélas! Hélas! Hélas! Seigneur Dieu, est-ce que vous n'avez pas trompé ce peuple et la ville de Jérusalem, en leur disant: « Vous aurez la paix! Et le glaive transperce jusqu'à leur âme ? (Jer. IV, 10) » Or, la paix que Dieu leur promettait était celle qui devait s'établir entre lui et l'homme par le moyen du Messie qu'il allait leur envoyer, tandis qu'eux songeaient à une paix temporelle.

Aussi quand ils avaient des guerres et des souffrances, il leur arrivait le contraire de ce qu'ils avaient espéré. Et ils disaient, comme le rapporte encore Jérémie: Expectavimus pacem, et non erat bonum: « Nous avons attendu la paix, et ils ne nous est rien venu de bon (Ibid, VIII, 15). » Il leur était donc impossible de ne pas tomber dans l'illusion, en se guidant uniquement d'après le sens littéral et grammatical de la prophétie.

Et en effet, quel est celui qui ne serait pas confondu et dans l'illusion s'il interprétait à la lettre cette prophétie que David fait du Christ dans tout le psaume LXXI, et surtout quand il dit: Dominabitur a mari usque ad mare, et a flumine usque ad terminos orbis terrarum:

« Il dominera d'une mer à l'autre, et du fleuve (Le Jourdain) jusqu'aux confins de l'univers (Ps. LXXI, 8 ) »; et quand il dit plus loin: Liberabit pauperem a potente, et pauperem cui non erat adjutor: « Il délivrera le pauvre des mains du puissant; il délivrera le pauvre qui était sans soutien ?  (Ps. LXXI, 12) » Et cependant on l'a vu ensuite naître dans l'abaissement, vivre dans la pauvreté, expirer misérablement.

Et non seulement il ne s'est pas emparé temporairement du domaine de la terre durant sa vie, mais il s'est soumis à des  gens vils, jusqu'à ce qu'enfin il soit mort sous le gouvernement de Ponce Pilate. Non seulement il n'a pas délivré ses disciples de la main des puissants de la terre, mais il les a laissés mettre à mort et persécuter pour son nom.

Ces prophéties doivent donc s'entendre de Jésus-Christ dans leur sens spirituel, et ce sens est très véritable. Jésus-Christ, en effet, est le Seigneur non seulement de la terre, mais encore du ciel, puisqu'il est Dieu. Quant aux pauvres qui devaient le suivre, non seulement il devait les racheter et les délivrer de la main et du pouvoir du démon, qui est ce puissant contre lequel ils n'avaient personne pour les aider, mais il devait les faire héritiers du royaume des cieux.

Ainsi donc, Dieu vise dans ses prophéties sur le Christ et ses disciples la partie principale, c'est-à-dire le royaume éternel, et l'éternelle liberté des hommes; les Juifs, au contraire, considérant les prophéties à leur manière dans un sens moins important et dont Dieu fait peu de cas, imaginaient le Christ avec une domination temporelle et une liberté temporelle, toutes choses qui, aux yeux de Dieu, ne méritent le nom ni de royaume ni de liberté; ils s'aveuglaient par la grossière apparence de la lettre; ils n'en comprenaient ni l'esprit ni la vérité, et ils en vinrent à mettre à mort leur Dieu et leur Seigneur, comme le dit saint Paul: Qui enim habitabant Jerusalem et principes ejus, hunc ignorantes, et voces prophetarum, quae per omne sabebatum leguntur, judicantes impleverunt:

« Les habitants de Jérusalem et les principaux de la ville, ne sachant qui il était, et ignorant le sens des prophéties qui se lisent chaque sabbat, les ont accomplies en le condamnant (Act. XIII, 27). »

Cette difficulté de comprendre les paroles de Dieu comme il faut, allait si loin que ses disciples eux-mêmes, qui l'accompagnaient, étaient dans l'illusion. Nous en avons un exemple dans ces deux disciples qui, après sa mort, se rendaient au village d'Emmaüs tristes et découragés et disaient: Nos autem sperabamus quia ipse esset redempturus Israel: « Nous espérions que ce serait lui qui rachèterait Israël (Luc XXIV, 21). » Eux aussi imaginaient une rédemption et une domination temporelle. Or Notre-Seigneur Jésus-Christ leur apparut; il leur reprocha leur folie et leur dureté de coeur à croire aux événements prédits par les prophètes.

Et même à l'époque de son départ pour le ciel, quelques-uns de ses disciples étaient encore dans cette ignorance et, l'interrogeant, lui dirent: Domine, si in tempore hoc restitues regnum Israël: « Seigneur, est-ce maintenant que vous allez rétablir le royaume d'Israël? (Act. I, 6) »

Le Saint-Esprit révèle donc beaucoup de choses auxquelles il attache un sens différent de celui que les hommes comprennent. C'est ce qui arriva lorsqu'il fit dire par Caïphe au sujet du Christ: « Il convient qu'un homme meurt pour que toute la nation ne périsse pas (Jean XVIII, 14). » Or, ces paroles Caïphe ne les disait pas de lui-même. Il leur donnait un sens, et l'Esprit-Saint en avait un tout différent.

Il est donc évident que, même quand les paroles et les révélations viennent de Dieu, nous ne pouvons pas mettre en elles une sécurité absolue, parce que nous pouvons nous tromper souvent et très facilement dans la manière de les comprendre. Toutes, en effet, sont un abîme insondable de profondeur spirituelle. Vouloir les limiter à ce que nous en comprenons et à ce que nos sens peuvent en concevoir, ce n'est pas autre chose que vouloir prendre avec la main l'air et les atomes qui s'y trouvent; or l'air s'échappe de la main, et nous n'étreignons que le vide.

Aussi le maître spirituel doit-il s'appliquer à ce que l'esprit de son disciple ne s'arrête pas à vouloir faire cas de toutes ces connaissances surnaturelles. Ce ne sont là pour l'esprit que des atomes, et son disciple n'aurait que des atomes et ne recevrait rien de spirituel. Il doit le détourner de toutes ces visions et de toutes ces paroles surnaturelles; il le portera à demeurer libre, à s'établir dans l'obscurité de la foi; c'est alors qu'il recevra l'abondance de l'esprit surnaturel, et par conséquent la sagesse et l'intelligence vraie des paroles de Dieu.

Il est impossible, en effet, à l'homme s'il n'est pas spirituel, d'apprécier les choses de Dieu, ni même de les entendre d'une façon raisonnable; et alors il n'est pas spirituel, s'il les juge d'après son propre sens. Aussi, quoiqu'elles lui viennent par les sens, il ne les comprends pas. Saint Paul a dit: Animalis autem homo non percipit ea quae sunt spiritus Dei; stultitia enim est illi, et non potest intelligere quia spiritualiter examinatur. Spritualis autem judicat omnia: « L'homme animal ne perçoit pas les choses qui sont de l'esprit de Dieu; elles lui paraissent une folie, et il ne peut les comprendre parce que c'est spirituellement qu'on peut en juger.

Mais l'homme spirituel juge de tout. (I Cor. II, 14-15) » Par homme animal, on entend ici celui qui use seulement du témoignage des sens; l'homme spirituel est celui qui ne s'attache pas à ses sens et ne les prend pas pour guides. C'est donc une témérité d'oser traiter avec Dieu par cette voie des communications surnaturelles et d'en laisser aux sens la liberté.

Afin de mieux faire comprendre cette doctrine, nous allons donner quelques exemples. Voici un saint qui est très affligé parce qu'il est persécuté par ses ennemis, et Dieu lui dit: Je te délivrerai de tous tes ennemis. Cette prophétie peut être très vraie en soi, et malgré cela le saint peut-être voit ses ennemis l'emporter et il meurt entre leur mains. Et ainsi celui qui aurait entendu cette prophétie dans un sens temporel eût été dans l'erreur, car Dieu peut avoir en vue la vraie et la principale délivrance, la victoire, c'est-à-dire le salut.

L'âme alors possède la délivrance et la victoire contre tous ses ennemis, d'une manière bien plus réelle et plus élevée que si elle en avait été délivrée ici-bas.

Une telle prophétie était donc beaucoup plus réelle et plus féconde en bienfaits que l'homme n'aurait pu l'imaginer, s'il l'avait rapportée à la vie présente. Dieu, en effet, vise toujours dans ses paroles au sens le plus important et le plus avantageux; l'homme, au contraire, peut les entendre à sa manière et dans un sens moins important, et il tombe dans l'erreur.

C'est ce que nous voyons dans cette prophétie que David fit au sujet du Christ: Reges eos in virga ferrea, et tanquam vas figuli confringes eos: « Tu gouverneras les nations avec une verge de fer, et tu les briseras comme un vase d'argile (Ps. II, 9). » Dieu parle ainsi dans le sens de sa souveraineté principale et parfaite, c'est-à-dire de sa royauté éternelle qui, en effet, s'est réalisée, et non de sa royauté moins importante, ou temporelle qui ne s'est pas accomplie durant la vie temporelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Prenons un autre exemple. Voici une âme qui est embrasée du désir de souffrir le martyre. Peut-être que Dieu lui dira: Oui, tu seras martyre, et il la remplit intérieurement d'une grande consolation et de la confiance qu'elle sera martyre; or il peut se faire qu'elle ne meure pas martyre, et cependant la prophétie sera très véritable.

Mais comment ne s'accomplit-elle pas ainsi que l'âme l'attendait? Elle s'accomplira dans le sens principal et essentiel qu'elle renfermait. Dieu lui donnera assez d'amour pour qu'elle mérite la gloire essentielle du martyre; il la fera martyre d'amour, il la fera passer par une suite d'épreuves dont la durée sera plus pénible que la mort, et de la sorte lui conférera véritablement la grâce qu'elle désirait formellement et qu'il lui avait promise.

Le désir formel de l'âme, en effet, n'était point d'endurer ce genre de mort, mais de glorifier Dieu par le martyre et de lui témoigner son amour comme on le fait dans le martyre. Car ce genre de mort en soi n'a aucune valeur, s'il n'est pas accompagné de l'amour de Dieu; et Dieu a d'autres moyens de donner d'une façon beaucoup plu parfaite l'amour, la générosité et le mérite qui sont renfermés dans le martyre.

Aussi, bien qu'elle ne meure pas martyre, elle peut être très satisfaite, car Dieu lui a donné ce qu'elle désirait. De tels désirs, en effet, et autres semblables, quand ils proviennent d'un amour ardent, ne se réalisent peut-être pas de la façon que l'on a pensée et imaginée; mais ils s'accomplissent d'une autre manière qui est bien plus excellente et plus glorieuse pour Dieu qu'on n'aurait su le demander.

Voilà pourquoi David a dit: Desiderium pauperum exaudivit Dominus: « Le Seigneur a exaucé le désir des pauvres (Ps. IX, 17). » La Sagesse divine a dit au livre des Proverbes: Desiderium suum justis dabitur: « Il donnera aux justes l'accomplissement de leurs désirs (Pro. X, 24). » Nous voyons qu'un grand nombre de Saints ont désiré accomplir beaucoup de choses pour Dieu, et cependant leurs désirs ne se sont pas réalisés dans cette vie.

Or il est de foi que Dieu, étant juste et véridique, les a exaucés parfaitement dans l'autre. Et s'il en est vraiment ainsi, il sera vrai également que Dieu leur a promis d'exaucer leurs voeux dès cette vie, bien que ce ne soit pas de la manière qu'ils se l'imaginaient.

C'est de cette manière et de beaucoup d'autres que les paroles et les visions de Dieu peuvent être véritables et certaines, bien que nous nous trompions à leur sujet, car nous ne savons pas comprendre le sens profond et principal que Dieu se propose et qu'il a en vue. Ce qu'il y a donc de mieux et de plus sûr, c'est de porter les âmes à fuir prudemment de telles communications surnaturelles, et de les habituer, comme nous l'avons dit, à rechercher la pureté dans le dénûment spirituel et l'obscurité de la foi; c'est là le chemin qui mène à l'union avec Dieu.

Méditons …

à  suivre …Chapitre 18




Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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Message par Maud Mar 9 Mai - 8:05

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_44

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 18

Où l’on prouve par l’ autorité de la Sainte Ecriture que les Révélations et les Paroles divines , bien que vraies en elles-mêmes , ne sont pas toujours certaines dans leurs propres causes

Il nous faut exposer maintenant la seconde cause pour laquelle les visions et les paroles qui nous viennent de Dieu, bien que toujours vraies en elles-mêmes, ne sont pas toujours certaines par rapport à nous. La raison en vient des causes et des motifs sur lesquels elles se fondent. Souvent, en effet, Dieu dit des choses qui sont fondées sur les créatures ou les effets qu'elles produisent et qui sont variables ou même peuvent faire défaut; il en résulte que les paroles qui reposent sur ce fondement peuvent aussi être variables et ne point se réaliser; quand, en effet, une chose dépend d'une autre, si l'une vient à manquer, l'autre manque aussi.

Supposez que Dieu dise: D'ici à un an j'enverrai tel fléau à ce royaume. La cause qui sert de fondement à cette menace vient d'une certaine offense qui a été commise contre Dieu dans ce royaume.

Or si l'offense vient à cesser ou à se modifier, le châtiment peut lui aussi être suspendu ou se modifier.

Cependant la menace était véritable; elle était fondée sur une faute actuelle; et, si la faute avait duré, la menace eût été exécutée. Ce sont là des menaces ou des révélations que l'on appelle comminatoires ou conditionnelles.

C'est ce qui est arrivé à la ville de Ninive. Dieu commanda au prophète Jonas d'aller de sa part lui annoncer cette menace: Adhuc quadraginta dies, et Ninive subvertetur: « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite (Jonas, III,4). » Cependant cette prophétie ne s'est pas accomplie, parce que la cause pour laquelle elle avait été faite vint à cesser. Les Ninivites, au lieu de persévérer dans leurs péchés, en firent pénitence; sans cela, la menace eût été exécutée.

Au troisième livre des Rois, nous lisons que, le roi Achab ayant commis un grand crime, Dieu lui fit annoncer qu'un grand châtiment allait tomber sur sa personne, sur sa maison et sur son royaume. Or Achab, en signe de repentir, déchire aussitôt ses vêtements, prie en silence, se livre au jeûne, dort sur la dure, se montre triste et humilié. Dieu alors lui fait dire aussitôt par le même prophète: Quia igitur humiliatus est mei causa, non inducam malum in diebus ejus sed in diebus filii sui: « Puisque Achab s'est humilié par amour pour moi, je n'enverrai pas de châtiments durant sa vie, mais sous le règne de son fils (I Rois, XXI, 29). » Par là, nous voyons comment, Achab ayant changé de conduite et modifié ses dispositions, Dieu de son côté modifia la sentence qu'il avait portée.

Nous pouvons donc affirmer ce que nous avons déjà dit: Dieu fait une révélation, ou parle d'une façon très affirmative. Il annonce quelque bien ou quelque mal qui arrivera à cette âme ou à d'autres; mais cette prophétie peut se modifier plus ou moins, ou même elle ne se réalisera point, s'il y a changement ou modification de sentiments dans l'âme ou la cause qui en est l'objet et que Dieu a en vue. La prophétie ne s'accomplira donc pas comme on l'attendait; bien souvent même on en ignorera le motif, qui restera le secret de Dieu.


Il arrive encore souvent que Dieu dit, enseigne et promet, non pour qu'on le comprenne alors ou qu'on le possède, mais pour qu'on le comprenne plus tard, lorsqu'il conviendra d'en avoir l'intelligence ou qu'on en recevra l'effet. Telle a été la conduite de Notre-Seigneur avec ses disciples. Il leur faisait entendre beaucoup de paraboles et de sentences mystérieuses dont ils n'eurent point l'intelligence si ce n'est à l'époque où ils devaient les prêcher, quand ils reçurent le Saint-Esprit, dont Notre-Seigneur Jésus-Christ leur avait dit qu'il leur ferait comprendre tout ce que lui-même leur avait enseigné dans le cours de sa vie.

Saint Jean, parlant de l'entrée de Notre-Seigneur à Jérusalem, dit: Haec non cognoverunt discipuli ejus primum, sed quando glorificatus est Jesus, tunc recordati sunt quia haec erant scripta de eo: « Les disciples ne comprirent pas ce qui se passait alors; mais lorsque Jésus eut été glorifié, ils se rappelèrent la prophétie qui l'avait annoncé (Jean, XII, 16). » Il y a donc bien des choses divines et très particulières qui peuvent se passer dans une âme, et que ni elle ni son directeur ne comprendront, si ce n'est à une certaine époque.

Nous lisons encore au premier livre des Rois que Dieu, irrité contre Héli, prêtre d'Israël, parce qu'il ne punissait pas ses fils de leurs péchés, lui envoya dire par Samuel ces paroles entre autres: Loquens locutus sum ut domus tua et domus patris tui ministraret in conspectu meo usque in sempiternum. Nunc autem dicit Dominus: Absit hoc a me, sed quicumque glorificaverit me, glorificabo eum: « En vérité, je l'ai dit, ta maison et la maison de ton père devaient à jamais remplir devant ma face l'office sacerdotal; mais loin de moi ce projet. Je ne le maintiendrai pas (I Rois II, 30). » Cet office du sacerdoce consistait à rendre gloire et honneur à Dieu; c'est dans ce but que Dieu avait promis au père d'héli que le sacerdoce resterait à jamais dans sa famille, mais c'était à la condition qu'on y fût fidèle. Or Héli manque de zèle pour la gloire de Dieu.

Dieu lui-même lui fait savoir qu'il s'en plaint; qu'il honore plus ses fils que Dieu lui-même en dissimulant leurs péchés pour ne pas les humilier. Et ainsi ne se réalisa donc point la promesse de Dieu, qui devait durer toujours, mais à la condition que les descendants de la maison d'Héli fussent toujours fidèles à servir Dieu avec zèle.

Ainsi donc il ne faut pas croire que les paroles et les révélations qui viennent de Dieu, et sont vraies en soi doivent infailliblement s'accomplir selon la rigueur des termes qui les expriment, surtout quand, d'après la providence de Dieu, elles sont liées aux causes humaines qui, comme nous l'avons dit, peuvent varier, changer ou disparaître. Mais quand est-ce que ces paroles dépendent des causes humaines? Dieu s'en réserve le secret; il ne le révèle pas toujours. Il communique parfois sa parole ou sa révélation, mais il ne dira rien des circonstances où elles devront se réaliser. Telle est la conduite qu'il suivit à l'égard des Ninivites.

Il leur annonce d'une manière absolue qu'au bout de quarante jours leur ville sera détruite (Jon. III, 4).

D'autres fois il manifeste les circonstances de la prophétie; c'est ce qu'il fit quand il dit à Roboam: « Si tu gardes mes commandements comme mon serviteur David, je serai aussi avec toi comme avec lui: j'élèverai ta maison comme j'ai élevé la sienne (I Rois, XI, 38). »

Mais qu'il manifeste ou non les conditions de ces prophéties, on ne doit pas s'imaginer avoir l'intelligence de ces prophéties; il n'est pas possible non plus de comprendre les vérités cachées dans la parole de Dieu ni les sens multiples qu'elle peut avoir. Lui est au-dessus de tous les cieux, et il parle des profondeurs de l'éternité; et nous, nous ne sommes pas des aveugles vivant sur cette terre; nous ne comprenons que les choses de la chair et du temps. Voilà ce que le Sage a compris; il a dit: Deus enim in caelo, et tu super terram, idcirco sint pauci sermones tui: « Dieu est au ciel, et toi, tu es sur la terre; voilà pourquoi tu dois veiller à parler peu (Eccl. V, 1). »

On me dira peut-être: Mais si nous ne devons pas comprendre ces révélations, ni nous en occuper, pourquoi Dieu nous les communique-t-il? Nous l'avons dit déjà, chaque révélation est comprise au temps fixé par celui qui l'a faite; elle sera comprise de celui à qui il voudra en donner l'intelligence, et alors on en verra la convenance, car Dieu ne fait rien sans motif, et en dehors de la vérité. Il faut donc bien se persuader que l'on n'arrivera jamais à comprendre et à saisir les divers sens renfermés dans les paroles et les révélations divines; se baser sur leurs apparences, c'est s'exposer à beaucoup d'erreurs et de déceptions.

Voilà ce que savaient très bien les prophètes qui annonçaient la parole de Dieu. L'accomplissement de leur mission leur attirait les plus grandes épreuves de la part du peuple.

Car, ainsi que nous l'avons dit, beaucoup de Juifs ne voyaient pas les prophéties se réaliser selon le sens des paroles qu'ils entendaient, et ils en tiraient un motif pour tourner en dérision les prophètes et se moquer d'eux.

Jérémie en vint même jusqu'à dire: « Ils se moquent de moi tout le long du jour; tous me tournent en dérision et me méprisent, parce qu'il y a déjà longtemps que je crie contre leur malice et que j'annonce leur destruction; la parole de Dieu est devenue pour moi un sujet constant d'opprobres et de railleries. Ainsi ai-je dit: Je ne veux plus me souvenir des paroles de Dieu, je ne veux plus parler en son nom (Jer. XX, 7-9) ».

Ces paroles nous montrent que si le prophète parle avec résignation et nous peint la faiblesse de l'homme qui ne comprend pas les voies et les secrets de Dieu, il donne bien à comprendre également quelle différence il y a entre l'accomplissement des paroles divines et le sens qu'on leur donne communément.

C'est pour ce motif que les saints prophètes passaient pour des séducteurs; ils avaient tant à souffrir à l'occasion de leurs prophéties, que le même Jérémie a dit dans un autre endroit: Formido et laqueus facta est nobis vaticinatio et contritio: « La prophétie est devenue pour nous une frayeur, un piège et une affliction (Lament. III, 47). »

C'est pour ce motif que Jonas fuyait quand Dieu l'envoyait prêcher la destruction de Ninive. Il savait que l'homme comprend diversement les paroles de Dieu et leurs causes. Aussi, afin de n'être pas tourné en dérision si la prophétie ne s'accomplissait pas, il fuyait pour ne point prophétiser. Il attendit donc en dehors de la ville les quarante jours qu'il avait prédits, pour voir si la prophétie s'accomplissait. Voyant qu'elle ne s'accomplissait pas, il tomba dans une si profonde tristesse qu'il dit à Dieu: Obsecro, Domine, numquid non hoc est verbum meum, cum adhuc essem in terra mea? Propter hoc praeoccupavi ut fugerem in Tharsis:

« Je vous le demande, Seigneur, n'est-ce pas là ce que je disais lorsque j'étais dans mon pays? Voilà ce que j'avais prévu, et c'est pour cela que je fuyais vers Tarse (Jonas, IV, 2). »

Et le saint, en proie à son chagrin, demanda à Dieu de le retirer du monde.

Pourquoi donc nous étonner si, parmi les prophéties ou les révélations que Dieu fait aux âmes, il y en a qui ne se réalisent pas dans le sens où on les comprend? Dieu affirme par exemple à une âme ou lui révèle qu'elle ou une autre recevra telle récompense ou sera châtiée; cette prophétie est fondée sur certains actes par lesquels cette âme ou une autre procurent la gloire de Dieu ou l'offensent; mais si ces âmes persévèrent dans cet état, la prophétie, nous le répétons, se réalisera; il n'est pas certain, toutefois qu'elle s'accomplisse à la lettre, parce qu'il n'est pas certain que ces âmes garderont les mêmes dispositions. Aussi ne faut-il jamais s'assurer ni affirmer que l'on comprend bien la prophétie.

La foi seule est notre guide.


Méditons …

à suivre …Chapitre 19




 Eucharistie    Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Mer 10 Mai - 7:38

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 19

On montre que Dieu , tout en répondant à ce qu’on lui demande parfois , n’aime pas qu’on traite de cette manière avec lui .
On prouve que s’il répond par condescendance , il se montre souvent irrité .


Certaines personnes adonnées à la spiritualité approuvent, nous l'avons dit, la curiosité qui porte des âmes à avoir quelques connaissances par la voie surnaturelle; elles s'imaginent que si Dieu répond parfois à leurs suppliques, c'est que ce moyen est bon et que Dieu l'a pour agréable. Sans doute Dieu leur répond; mais ce moyen n'est pas bon et Dieu ne l'a pas pour agréable; au contraire, il le désapprouve; bien plus, il en est fâché et irrité très souvent. En voici la raison. Il n'est permis à aucune créature de sortir des bornes naturelles que Dieu lui a fixées pour se diriger.

Or il a donné à l'homme des lois naturelles et raisonnables; l'homme n'a donc pas le droit de vouloir en sortir; il ne doit pas non plus chercher à vérifier ou connaître certaines choses par une voie surnaturelle. Ce serait sortir des lois naturelles, et par conséquent ce n'est pas licite.
Dieu ne peut pas l'approuver; il en est plutôt offensé, comme il l'est de tout ce qui est illicite. Le roi Achab le savait bien. Isaïe lui dit cependant de la part de Dieu qu'il devait demander quelque miracle; mais il refusa; il dit au contraire; Non petam et non tentabo Dominum: « Je n'en demanderai pas et je ne tenterai pas le Seigneur (Is. VII, 12). » C'est tenter Dieu, en effet, que de vouloir traiter avec lui par des voies extraordinaires, comme sont les voies surnaturelles.

Vous me direz: Mais s'il en est de la sorte, si Dieu ne l'a pas pour agréable, pourquoi répond-il dans certaines circonstances? A cela je dis tout d'abord que c'est quelquefois le démon qui répond. Mais quand c'est Dieu, il agit ainsi par condescendance pour la faiblesse de l'âme qui veut marcher par cette voie. Il veut l'empêcher de se décourager, de retourner en arrière, de s'imaginer qu'il est mécontent d'elle et de tomber dans une trop grande tentation.

Il a encore d'autres fins connues de lui seul, et basées sur la faiblesse de cette âme; il juge donc convenable de lui répondre et de se montrer condescendant.

Il agit également de cette sorte à l'égard de beaucoup d'âmes faibles et jeunes encore. Il leur donne des attraits et des douceurs très sensibles à son service, comme nous l'avons dit. Cette condescendance ne prouve pas qu'il aime et approuve qu'on traite avec lui de cette manière et par cette voie. Nous l'avons dit déjà, Dieu donne à chaque âme selon les dispositions où elle se trouve. Il est comme la source où chacun puise selon la capacité du vaisseau qu'il porte, et parfois il laisse puiser en lui par des canaux extraordinaires.

Il ne s'ensuit pas pour cela qu'il soit licite de se servir de ces moyens; c'est à Dieu seul qu'il appartient de donner l'eau de la source, puisqu'il est le maître, quand il veut, à qui il veut et pour le but qu'il se propose, sans que la créature y ait aucun droit.

Nous disons donc de nouveau: Si Dieu daigne parfois condescendre aux désirs et aux prières de certaines âmes, c'est parce qu'elles sont bonnes et simples. Il ne veut pas manquer de les secourir pour ne pas les attrister. Mais cela ne veut pas dire qu'il approuve leur procédé.
Voici une comparaison qui fera mieux comprendre cette vérité. Un père de famille a sur sa table des aliments nombreux et variés, tous meilleurs les uns que les autres.

Un de ses enfants lui demande de prendre de tel mets; ce n'est pas le meilleur, mais c'est le premier qui se présente à son regard, et il lui plaît de prendre de celui-là plutôt que d'un autre.

Le père comprend que s'il lui donnait à manger du meilleur mets, il ne le prendrait pas, parce qu'il ne veut que celui qu'il demande et aucun autre: il le laisse faire avec regret, pour que cet enfant ne reste pas sans manger et plongé dans la tristesse.

Telle est la conduite que tint le Seigneur avec les enfants d'Israël qui lui demandèrent un roi. Il le leur donna à contre-coeur, parce que ce n'était pas un avantage pour eux. Il dit donc à Samuel: Audi vocem populi... non enim te objecerunt, sed me, ne regnem super eos: « Écoutez la voix de ce peuple; donne-leur le roi qu'ils te demandent. Ce n'est pas toi qu'ils ont rejeté, mais moi, afin que je ne règne pas sur eux (I Rois, VIII, 7). »

C'est ainsi que Dieu se montre condescendant à l'égard de certaines âmes. Il leur accorde ce qui n'est pas le meilleur pour elles, parce qu'elles ne veulent pas ou ne savent pas marcher par une autre voie. Quand parfois elles obtiennent des tendresses ou des suavités spirituelles ou sensibles, comme nous l'avons dit, Dieu les leur accorde parce qu'elles ne sont pas préparées à cette nourriture forte et solide qui se trouve dans les souffrances et la croix de son Fils qu'il voudrait les voir désirer au-dessus de tout.

Cependant, je regarde comme plus préjudiciable à l'âme la recherche de certaines connaissances par voie surnaturelle, que celle de certaines douceurs spirituelles sensibles. Je ne vois pas en effet comment l'âme qui les recherche peut être exempte de faute, au moins vénielle, malgré toutes ses bonnes intentions et toute sa perfection. J'en dis autant du directeur qui lui commandait ou la laisserait libre d'agir ainsi. Il n'y a pas, en effet, la moindre nécessité d'agir ainsi. Nous avons la raison naturelle, la loi, la doctrine de l'Évangile, qui sont très suffisantes pour nous guider; il n'y a pas de difficultés ni d'obstacles qu'on ne puisse surmonter par ces moyens ou auxquels on ne puisse remédier selon le bon plaisir de Dieu et le bien des âmes.

Cela est tellement vrai, il est tellement nécessaire que nous nous servions de la raison et des enseignements de l'Évangile, que si on venait, conformément ou non à nos vues, nous proposer certaines communications par une voie surnaturelle, nous ne devrions les recevoir que si elles étaient bien conformes à la raison et à l'enseignement de l'Évangile.

Dans ce cas on les accepterait non parce qu'elles viennent par révélation, mais parce qu'elles sont conformes à la raison, et on laisserait de côté tout sentiment relatif à la révélation. Même dans ce cas, il faut considérer et examiner le cas avec beaucoup plus de soin que s'il n'y avait pas eu de révélation, car le démon propose souvent des choses véritables et futures, qui sont conformes à la raison, dans le but de nous séduire. Il résulte de là qu'au milieu de nos nécessités, de nos travaux et de nos difficultés, nous n'avons pas de fondements meilleurs et plus sûrs que l'oraison, et l'espérance que Dieu nous aidera par les moyens qu'il jugera convenables.

Tel est le conseil qui nous est donné par la sainte Écriture. Nous y lisons que le roi Josaphat, étant tombé dans l'affliction la plus profonde parce qu'il se trouvait entouré d'une foule d'ennemis, se mit en oraison et dit à Dieu: Cum ignoremus quid agere debeamus, hoc solum habemus residui, ut oculos nostros dirigamus ad te: « Quand les moyens font défaut et que la raison ne voit comment elle pourra surmonter les difficultés, nous n'avons plus qu'à lever les yeux vers vous (II Paral. XX, 12) », pour que vous daigniez suppléer à notre impuissance comme il vous sera le plus agréable.

Bien que Dieu réponde aussi parfois à une telle prétention, il s'en montre aussi quelquefois irrité. Ce que nous avons dit suffirait à le prouver, mais il ne sera pas inutile de le montrer encore par quelque autorités de la sainte Écriture.

Il nous est dit au premier livre des Rois que Saül désirait que le prophète Samuel, qui était déjà mort, vînt lui parler, et le prophète en effet lui apparut. Cependant Dieu manifesta son mécontentement; le prophète Samuel lui en fit aussitôt le reproche et lui dit: Quare inquietasti me, ut suscitarer? : « Pourquoi êtres-vous venu troubler mon repos et m'obliger à ressusciter ? (I Rois, XXVIII, 3; 15) »

Nous savons, en outre, que Dieu, tout en répondant aux enfants d'Israël qui réclamaient des viandes, ne manqua pas d'être fort irrité contre eux, puisqu'il leur envoya aussitôt le feu du ciel pour les châtier, comme on le lit au livre des Nombres, et comme le raconte David en ces termes: Adhuc escae eorum erant in ore ipsorum, et ira Dei ascendit super eos: « Les viandes qu'ils avaient demandées étaient encore dans leurs bouches quand la colère de Dieu fondit sur eux (Ps. LXXVII, 30-31). »

Nous lisons aussi au livre des Nombres que Dieu ne manqua pas de se fâcher contre le prophète Balaam parce qu'il était allé trouver les Madianites à l'appel de leur roi Balac. Or Dieu lui avait dit qu'il pouvait y aller, parce qu'il l'avait désiré et demandé. Et cependant, lorsqu'il était déjà en chemin, l'ange du Seigneur lui apparut l'épée à la main et, le menaçant de mort, il lui dit: Perversa est via tua, mihique contraria: « La voie que tu suis est mauvaise, et elle est contraire à ma volonté (Nomb. XXII, 20). » C'est pour ce motif qu'il voulait le frapper de mort.

Ces exemples et beaucoup d'autres nous montrent comment Dieu condescend aux désirs des âmes, bien qu'il en soit irrité. On pourrait multiplier les témoignages et les exemples que Dieu nous donne de cette assertion dans la sainte Écriture. Mais ce serait superflu, puisqu'il s'agit d'une vérité aussi manifeste.

J'ajoute seulement qu'il est très dangereux, et beaucoup plus dangereux même que je ne saurais le dire, que de vouloir traiter avec Dieu par de tels moyens. Quant à celui qui s'y attache, il ne peut manquer de se tromper beaucoup et de tomber souvent dans une confusion extrême. Celui qui en aura fait cas me comprendra par sa propre expérience.

D'ailleurs, outre la difficulté qu'il y a à ne pas se tromper dans l'intelligence des paroles et des visions qui viennent de Dieu, il y en a ordinairement beaucoup parmi elles qui viennent du démon. D'une façon générale, le démon imite les procédés et les rapports de Dieu avec l'âme; il singe si bien ces communications, pour s'insinuer près d'elle, comme le loup ravisseur revêtu de la peau de brebis qui entre dans le troupeau, qu'on a peine à le reconnaître. Il dit, en effet, beaucoup de choses qui sont vraies et conformes à la raison, ou qui se réalisent.

Il est donc très facile de s'y tromper; on se persuade que, puisque ces révélations se sont vérifiées, ce qui est annoncé se vérifiera encore et par conséquent ne peut venir que de Dieu.

On ignore, en effet, qu'il est très facile au démon, vu la lumière naturelle si grande dont il est doué, de connaître dans leurs causes, soit en totalité, soit en partie, les événements passés ou futurs; aussi réussit-il très souvent à prédire l'avenir. Dès lors que le démon a une intelligence très vive, il peut très facilement prédire que tel effet découlera de telle cause, bien qu'il se trompe parfois, parce que toutes les causes dépendent de la volonté de Dieu. Prenons un exemple.

Le démon prévoit, par la disposition de la terre, de l'air et du soleil, et de leur mouvement, qu'à telle époque la peste éclatera, que dans telle région elle exercera plus de ravages, et dans telle autre moins. Voilà donc la peste connue dans sa cause.

Qu'y a-t-il d'étonnant à ce que le démon le révèle à une âme et lui dise que d'ici à un an, ou à six mois, la peste va éclater? Et la prophétie se vérifiera; et ce sera une prophétie du démon.

Il peut de même connaître les tremblements de terre. Il voit que la terre amasse de l'air dans ses cavités, et il dit: A telle époque il y aura un tremblement de terre. Or ce n'est là qu'une connaissance naturelle. Il suffit, pour l'avoir, de posséder son âme à l'abri des passions, comme le dit Boëce: Si vis claro lumine cernere verum, gaudia pelle, timorem spemque fugato, ne dolor adsit: « Si tu veux à l'aide de la clarté naturelle connaître le vrai, chasse loin de toi la joie et la crainte, l'espérance et la douleur (Ed. Migne, T. LXXV, p. 122). »

On peut aussi connaître les événements surnaturels dans leurs causes par la providence divine, qui est infiniment juste et pourvoit d'une façon absolument certaine à ce qu'exigent les causes bonnes ou mauvaises posées par les enfants des hommes.

On peut savoir clairement par la voie ordinaire que telle ou telle personne, telle ou telle ville, ou un sujet quelconque, arrivera à telle ou telle nécessité, tel ou tel état de malice; que Dieu, d'après le cours ordinaire de sa justice et de sa providence, doit intervenir d'une manière qui convienne et soit conforme à la cause, châtier ou récompenser comme le réclame la cause. Et alors on peut dire: A telle époque Dieu vous accordera telle faveur ou agira de telle sorte à votre égard, ou tel événement vous arrivera.

C'est là ce que sainte Judith fit entendre à Holopherne. Pour lui persuader que les enfants d'Israël devaient nécessairement être détruits, elle lui raconta tout d'abord les nombreux péchés qu'ils avaient commis et leur mauvaise conduite. Elle lui dit ensuite Ego quoniam haec faciunt, certum est quod in perditionem dabuntur, ce qui signifie: « Puisqu'ils se rendent coupables de telles fautes, il est certain qu'ils seront détruits (Jud. XI, 12). » Ceci nous montre que le châtiment est connu dans sa cause.

C'est comme si l'on disait: Il est certain que des péchés de cette sorte doivent provoquer tels châtiments de Dieu qui est infiniment juste. La Sagesse divine s'exprime de même: « Chacun est puni par où il a péché (Sag. XI, 17). » Or le démon peut avoir cette connaissance, non seulement par son intelligence naturelle, mais encore par son expérience; car il a vu Dieu produire ces effets; il peut donc les annoncer à l'avance et parfois même les annoncer avec certitude.

Le saint homme Tobie connut dans sa cause le châtiment qui menaçait la ville de Ninive. Voilà pourquoi il prévint son fils qu'à l'heure où lui et sa mère mourraient il devait sortir de cette ville, parce qu'elle serait détruite. Video enim quia iniquitas ejus finem dabit ei. Comme s'il avait dit: Je vois clairement que sa malice doit être la cause de son châtiment, et ce châtiment sera sa fin et sa destruction complète (Tob. XIV, 13).

Or cet événement, le démon et Tobie pouvaient le prévoir, non seulement par l'iniquité de la ville, mais encore par leur expérience. Ils voyaient en effet que cette ville commettait les crimes pour lesquels Dieu avait déjà détruit le monde par le déluge ainsi que les Sodomites qui périrent dans le feu. Cependant j'ajoute que Tobbie avait connu l'événement par l'Esprit-Saint.

Le démon peut connaître en outre que naturellement Pierre ne peut pas vivre plus de tant d'années, et le prédire à l'avance; ainsi en est-il de beaucoup d'autres événements. Il y a pour cela mille moyens qu'on n'en finirait plus d'exposer. On ne saurait même commencer à en parler, tant ils sont compliqués et subtils; son but est de nous tromper. Nous ne pouvons nous en préserver qu'en fuyant toutes les révélations, visions et paroles surnaturelles. C'est donc à bon endroit que  Dieu se fâche contre celui qui s'y complaît.

Il voit que c'est de la témérité que de s'engager dans une voie où il y a tant de dangers, de présomption, de curiosité, d'orgueil, et où se rencontrent la source et le fondement de la vaine gloire, le mépris des choses de Dieu et enfin la cause d'une foule de maux où un grand nombre sont tombés.

Ces âmes en viennent à irriter tellement Dieu, qu'il les laisse à dessein tomber dans l'erreur, l'illusion, l'aveuglement d'esprit, et abandonner les règles ordinaires de la vie pour se livrer à leurs fantaisies et à leurs caprices.

C'est là ce qu'a dit le prophète Isaïe: Dominus miscuit in medio ejus spiritum vertiginis: « Le Seigneur a répandu au milieu d'eux l'esprit de vertige (Is. XIX, 14) », de trouble et de confusion, ce qui signifie, dans le langage ordinaire, un esprit qui comprend tout au rebours. Or cette parole d'Isaïe convient parfaitement à notre sujet: il s'adresse, en effet, à ceux qui voulaient connaître l'avenir par des visions surnaturelles. Voilà pourquoi il dit que Dieu leur a donné un esprit qui leur fait comprendre les choses au rebours.

Ce n'est pas que Dieu l'ait voulu réellement ainsi et leur ait donné positivement cet esprit d'erreur; ce sont eux plutôt qui ont voulu s'immiscer dans des mystères qu'ils ne pouvaient naturellement pas comprendre.

Dans son indignation, il les a laissés s'égarer; il ne leur a pas donné sa lumière pour les éclairer dans une voie où il ne voulait pas qu'ils s'engagent. Le prophète en disant que Dieu leur a donné cet esprit d'erreur, veut dire qu'il a agi d'une manière privative. C'est de cette sorte que Dieu est cause de ce mal; il est cause privative, qui consiste à priver de sa lumière et de sa faveur, d'où il suit infailliblement qu'on tombe dans l'erreur.

C'est ainsi que Dieu permet au démon d'aveugler et de tromper un grand nombre d'âmes à cause de leurs péchés et de leur présomption; le démon réussit à capter leur crédulité; on le prend pour un bon esprit. Cela est tellement vrai que, malgré tous les efforts qui sont faits pour les désabuser, on ne saurait les tirer de leur illusion. Dieu permet qu'ils soient imbus de cet esprit qui consiste à comprendre les choses à rebours.

C'est là ce qui est arrivé, comme nous le lisons, aux prophètes du roi Achab. Dieu les a laissés se tromper par l'esprit de mensonge, et avait donné pouvoir sur eux au démon quand il lui a dit: Decipies et praevalebis; egredere, et fac ita: « Tu les tromperas et tu prévaudras contre eux, va et agis ainsi (I Rois, XXII, 22). » Or le démon arriva si bien à tromper les prophètes et le roi qu'ils ne voulurent pas écouter le prophète Michée, qui, lui, annonçait la vérité et leur disait des choses tout opposées à celles des autres.

Or cela venait de ce que Dieu les avait laissés tomber dans l'aveuglement, à cause de leur attachement à leur volonté propre; ils voulaient que les événements leur arrivent et que Dieu leur réponde conformément à leurs attraits et à leurs désirs. C'était un moyen et une disposition qui devait nécessairement porter Dieu à les laisser formellement dans l'aveuglement et l'illusion.

C'est là ce que dit Ezéchiel quand il parle contre celui qui, entraîné par l'esprit d'ambition et de curiosité, veut connaître les événements par des moyens surnaturels: « Lorsque cet homme s'adressera au prophète pour m'interroger par son intermédiaire, moi le Seigneur, je lui répondrai directement, je prendrai mon visage irrité contre lui, et si le prophète se trompe dans sa réponse, c'est moi le Seigneur, qui aurai trompé le prophète (Ez. XIV, 7-9) ». Il faut entendre cette parole dans ce sens que Dieu ne donne pas sa faveur, et que par suite on tombe dans l'illusion.

C'est là ce que veut dire cette parole: Moi le Seigneur, je lui répondrai par moi-même dans ma colère. Dieu alors retire de cette âme sa grâce et sa faveur; il suit de là nécessairement qu'elle tombera dans l'erreur; elle n'a pas le secours de Dieu. Voilà pourquoi le démon s'empresse de répondre à son désir et à son attrait; il fait ce qu'elle souhaite; et elle en reçoit des réponses et des communications qui correspondent à sa volonté; elle tombe dans une profonde illusion (Le P. Siverion donne ici quelques lignes que le P. Gérard n'a pas conservées dans son texte:

« Il semble que nous nous sommes quelque peu égarés du projet indiqué en tête de ce chapitre, qui était de prouver comment Dieu, même s'il répond, se plaint quelquefois. Mais si l'on regarde bien, tout ce que nous avons dit... »).

Tout ce que nous avons dit tendait à prouver le sujet que nous avions en vue. Tout y montre que Dieu voit avec déplaisir que l'âme recherche les ténèbres, je veux dire les visions, car elle donne prise par là à toutes les illusions où elle tombe.


Méditons …

à suivre .… chapitre 20




   Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Jeu 11 Mai - 7:38

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 20


On répond à un doute et on montre comment sous la Loi Nouvelle il n’est pas permis , comme sous la Loi ancienne , d’interroger Dieu par voie surnaturelle .
Cette question très intéressante pour l’ intelligence des Mystères de notre Sainte Foi , est prouvée par un texte de Saint Paul qui s’applique à notre sujet .


Les doutes qui surgissent autour de nous, ne nous permettent pas d'avancer aussi rapidement que nous le voudrions. Car si nous les soulevons, nous sommes nécessairement obligés de les dissiper, afin que la vérité de la doctrine demeure dans toute sa simplicité et toute sa force. D'ailleurs, il y a un bien dans ces doutes; car s'ils ralentissent quelque peu notre marche en avant, ils nous servent aussi à donner à notre sujet plus de développement doctrinal et plus de lumière; il en sera ainsi du doute dont il est question.

Dans le chapitre précédent, nous avons vu qu'il est contre la volonté de Dieu de rechercher des connaissances particulières par la voie surnaturelle des vision, paroles, etc. Nous avons vu, d'autre part, dans le même chapitre, et d'après les témoignages de la sainte Écriture que nous y avons rapportés, que des rapports de cette sorte avec Dieu étaient permis sous la Loi ancienne. Non seulement ils étaient permis, mais ils étaient même commandés; et quand les enfants d'Israël ne lui obéissaient pas sur ce point, Dieu le leur reprochait.

C'est ce que l'on voit dans Isaïe, où Dieu leur reprocha vivement de ne l'avoir pas consulté quand ils pensaient descendre en Égypte, et leur dit Qui ambulatis ut descendatis in Aegyptum, et os meum non interrogatis: « Vous ne m'avez pas demandé tout d'abord ce qui convenait (Is. XXX, 2). »

Nous lisons de même dans Josué que, les mêmes enfants d'Israël ayant été trompés par les Gabaonites, l'Esprit leur rappelle leur faute en ces termes: Susceperunt igitur de cibariis eorum, et os Domini non interrogaverunt: « Ils ont reçu de leurs vivres, et ils n'ont pas consulté le Seigneur (Jos. IX, 14). »

Nous voyons encore dans la sainte Écriture que Moïse consultait souvent le Seigneur. Le roi David et tous les rois d'Israël faisaient de même quand une guerre ou quelque difficulté surgissait; telle était aussi la coutume des prêtres et des prophètes de la Loi ancienne. Dieu leur répondait; il s'entretenait avec eux; il ne se fâchait pas; cette manière d'agir avec lui était agréable à ses yeux; si on ne l'eût pas suivie, c'eût été une faute, voilà la vérité.
Pourquoi donc maintenant sous la Loi nouvelle, sous la Loi de grâce, ne serait-il plus permis de faire comme alors?

A cette question il faut répondre: La cause principale pour laquelle étaient permises sous la Loi ancienne les demandes que l'on adressait à Dieu et pour laquelle il convenait aux prophètes et aux prêtres de désirer des visions et des révélations divines, c'est que la foi n'était pas encore fondée ni la loi évangélique établie.

Il fallait que l'on s'adressât à Dieu directement et que Dieu répondît, par des paroles, des visions ou des révélations, par des figures ou des images, ou enfin par beaucoup d'autres manières de nous faire connaître la vérité. Toutes ses réponses, en effet, paroles, oeuvres ou révélations, avaient pour but les mystères de la foi, la concernaient ou s'y rapportaient. Or, les choses de la foi ne viennent pas de l'homme; elles viennent de la bouche de Dieu; il les a exprimées lui-même par sa bouche.

Il fallait donc, comme nous l'avons dit, les demander à la bouche même de Dieu. Voilà pourquoi il blâmait les enfants d'Israël qui ne le consultaient pas pour avoir son avis et diriger les faits et les événements vers la foi qu'ils n'avaient pas encore, parce qu'elle n'était pas fondée.

Mais aujourd'hui que la foi est fondée sur le Christ et que la loi évangélique est manifestée dans cette ère de la grâce qu'il nous a donnée, il n'y a plus de motif pour que nous l'interrogions comme avant, ni pour qu'il nous parle ou nous réponde comme alors. Dès lors qu'il nous a donné son Fils, qui est sa Parole, il n'a pas d'autre parole à nous donner. Il nous a tout dit à la fois et d'un seul coup en cette seule Parole; il n'a donc plus à nous parler. Tel est le sens de ce texte par lequel saint Paul veut engager les Hébreux à se séparer de ces anciennes pratiques et manières de traiter avec Dieu qui étaient en usage sous la loi de Moïse et à jeter les yeux sur le Christ seulement: Multifariam multisque modis olim Deus loquens patribus in prophetis; novissime diebus istis locutus est nobis in Filio:

« Ce que Dieu, dit-il, a révélé à nos pères en divers temps et de diverses manières par l'intermédiaire des prophètes, il l'a dit maintenant et tout à la fois en ces derniers jours par son Fils (Heb. I, 1-2). »

L'Apôtre nous donne à entendre par là que Dieu s'est fait comme muet; il n'a plus rien à dire; car ce qu'il disait par parties aux prophètes, il l'a dit tout entier dans son Fils, en nous donnant ce tout qu'est son Fils.

Voilà pourquoi celui qui voudrait maintenant l'interroger, ou désirerait une vision ou une révélation, non seulement ferait une folie, mais ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ, sans chercher autre chose ou quelque nouveauté. Dieu pourrait en effet lui répondre de la sorte:

Si je t'ai déjà tout dit dans ma parole, qui est mon Fils, je n'ai maintenant plus rien à te révéler ou à te répondre qui soit plus que lui. Fixe ton regard uniquement sur lui; c'est en lui que j'ai tout déposé, paroles et révélations; en lui tu trouveras même plus que tu ne demandes et que tu ne désires. Tu me demandes des paroles, des révélations ou des visions, en un mot des choses particulières; mais si tu fixes les yeux sur lui, tu trouveras tout cela d'une façon complète, parce qu'il est toute ma parole, toute ma réponse, toute ma vision, toute ma révélation. Or, je te l'ai déjà dit, répondu, manifesté, révélé, quand je te l'ai donné pour frère, pour maître, pour compagnon, pour rançon, pour récompense.

Le jour où je suis descendu avec mon Esprit sur lui au Thabor, j'ai dit: Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi bene complacui, ipsum audite:

« Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances; écoutez-le (Mat. XVII, 5). »

Depuis lors, j'ai laissé de côté toutes ces sortes d'enseignements et toutes ces réponses, et je les lui ai remises; écoutez-le, parce que je n'ai plus de foi à vous révéler, ni plus de vérités à vous manifester.

Quand précédemment je parlais, c'était pour vous promettre le Christ; quand on m'adressait des questions, c'était des questions qui regardaient la demande et l'espérance du Christ où l'on devait trouver tous les biens, comme le donne à entendre toute la doctrine des Évangélistes et des Apôtres.

Mais maintenant si quelqu'un vient m'interroger comme on le faisait alors et me demande quelque vision ou quelque révélation, c'est en quelque sorte me demander encore le Christ ou me demander plus de foi que je n'en ai donné: de la sorte, il offenserait profondément mon Fils bien-aimé, parce que non seulement il montrerait par là qu'il n'a pas foi en lui, mais encore il l'obligerait une autre fois à s'incarner, à recommencer sa vie et à mourir. Vous ne trouverez rien de quoi me demander, ni de quoi satisfaire vos désirs de révélations et de visions. Regardez-y bien. Vous trouverez que j'ai fait et donné par lui beaucoup plus que ce que vous demandez.

Si vous désirez que je vous réponde par quelques paroles de consolation, considérez comment mon Fils m'a obéi et a été affligé par amour pour moi, et vous entendrez par combien de paroles il vous répondra.

Voulez-vous que Dieu vous explique certains événements mystérieux, ou certaines choses cachées: fixez seulement les yeux sur lui, et vous y trouverez les mystères les plus profonds, les trésors de la sagesse et des merveilles divines qui sont renfermées en lui, comme l'Apôtre le dit: In quo sunt omnes thesauri sapientiae et scientiae absconditi: « En lui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science de Dieu (Col. II, 3). » Ces trésors de sagesse seront pour vous beaucoup plus profonds, plus doux et plus utiles que tout ce que vous désirez savoir.

Voilà pourquoi l'Apôtre se glorifiait en ces termes: « Je n'ai pas donné à entendre que je savais autre chose que Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié (I Cor. II, 2). » : Non enim judicavi me scire aliquid inter vos nisi Jesum Christum, et hunc crucifixum.

Si vous voulez encore d'autres visions ou révélations divines ou corporelles, regardez toujours dans son Humanité, et vous trouverez dans cette Humanité beaucoup plus que vous ne pensez, parce que l'apôtre saint Paul dit encore: In ipso inhabitat omnis plenitudo Divinitatis corporaliter: « En lui habite corporellement la plénitude de la Divinité (Col. II, 9). »


Il ne convient donc pas d'adresser à Dieu des demandes de cette sorte; il n'est pas nécessaire qu'il parle encore, car en achevant de nous révéler toute la foi dans son Christ, il n'y a plus d'autre objet de la foi à révéler, et il n'y en aura jamais.

Celui qui voudrait recevoir encore par la voie surnaturelle certaines communications surnaturelles semblerait accuser Dieu de ne pas nous avoir donné en son Fils tout ce qui nous était nécessaire, comme nous l'avons dit. Supposé même qu'il agisse ainsi tout en ayant la foi, et en croyant ses enseignements, il manifeste un esprit de curiosité et l'imperfection de sa foi.

Ce n'est donc point de cette curiosité qu'il faut attendre un enseignement doctrinal ou une communication par voie surnaturelle.

A l'heure où le Christ expira sur la Croix, et dit: Consummatum est: « Tout est consommé (Jean, XIX, 30) », non seulement ont pris fin toutes ces communications surnaturelles, mais encore toutes les cérémonies et tous les rites de la Loi ancienne.

Ainsi donc nous devons nous guider en tout d'après la doctrine du Christ Notre-Seigneur, fait Homme pour nous, de son Église, de ses ministres qui nous parlent d'une manière humaine et visible. Par cette voie nous trouverons le remède à nos ignorances et à nos faiblesses spirituelles; par cette voie nous trouverons des secours abondants pour tous nos besoins. Tout ce qui sort de cette voie ou s'en écarte, non seulement est de la curiosité, mais encore une grande présomption. On ne doit rien croire de ce qui vient par voie surnaturelle, si ce n'est, je le répète, l'enseignement de Jésus-Christ fait Homme, et celui de ses ministres qui sont hommes aussi.

Cela est tellement vrai que saint Paul a dit: Sed licet... Angelus de caelo evangelizet vobis, praeter quam quod evangelizavimus vobis, anathema sit:

« Si quelque ange du ciel venait vous évangéliser autrement que nous, hommes, nous vous avons évangélisé, qu'il soit maudit et excommunié (Gal. I, 8 ). »

Il est donc vrai que nous devons toujours nous en tenir à ce que le Christ nous a enseigné. Tout le reste n'est rien; et nous ne devons pas le croire s'il n'est pas conforme à son enseignement. Il travaille donc inutilement celui qui veut aujourd'hui traiter avec Dieu comme on le faisait sous l'ancienne Loi. D'ailleurs, même alors il n'était pas permis au premier venu d'adresser des demandes à Dieu; Dieu, de son côté, ne répondait pas à tout le monde, mais seulement aux prêtres et aux prophètes; c'est de leur bouche que le peuple devait connaître sa loi et ses enseignements. Et si quelqu'un voulait savoir de Dieu quelque chose, il le demandait par l'intermédiaire du prêtre ou du prophète, et non directement par lui-même.

Si parfois David a demandé directement quelque chose à Dieu, c'est qu'il était prophète; or, même alors, il ne le faisait pas sans revêtir l'habit sacerdotal, comme on le voit dans le livre des Rois, où il dit au prêtre Abimélec: Applica ad me ephod: « Donnez-moi l'éphod (I Rois, XXIII, 9). » Et l'éphod était un des ornements les plus importants du pontife, et ce n'était qu'après s'en être revêtu qu'il consultait Dieu. D'autres fois encore, David consultait Dieu par l'intermédiaire de Nathan et des autres prophètes.

C'est donc sur la parole des prophètes et des pontifes que l'on devait croire comme venant de Dieu les révélations qui étaient faites, et non point sur le jugement personnel. Ce que Dieu disait alors n'avait donc ni force ni autorité et ne pouvait inspirer une créance absolue tant qu'il n'était pas sanctionné par les pontifes et les prophètes.

Dieu, en effet, aime tant à voir l'homme gouverné et dirigé par un autre homme semblable à lui, et selon la raison naturelle, qu'il veut absolument que ce qu'il nous communique surnaturellement nous ne le donnions à comprendre, ou nous n'y donnions entière créance, ou n'ait de force et de sécurité en nous, qu'après avoir passé par ce canal humain de la bouche de l'homme. Chaque fois qu'il dit ou révèle quelque chose à l'âme il le fait en inclinant cette âme à s'en rapporter à qui il convient. Jusqu'alors, il n'a pas coutume de lui donner une pleine assurance sur la révélation; il veut que l'homme la reçoive d'un autre homme semblable à lui.

C'est précisément ce qui est arrivé au capitaine Gédéon, comme nous le lisons au livre des Juges. Dieu lui avait répété souvent qu'il triompherait des Madianites; et il restait toujours dans le doute et dans la crainte; or il garda cette faiblesse jusqu'au jour  où il apprit de la bouche des hommes ce que Dieu lui avait annoncé directement. Aussi arriva-t-il que Dieu, pour dissiper ses craintes, lui dit: Surge et descende in castra... et cum audieris quid loquantur, tunc confortabuntur manus tuae et securior ad castra descendes:

« Lève-toi et va au camp des ennemis... lorsque tu auras entendu leurs paroles, tes bras deviendront plus forts pour accomplir ce que je t'ai dit et tu descendras avec plus de sécurité pour combattre (Jug. VII, 9-11). »

L'événement justifia cette prédiction. Ayant entendu un Madianite raconter à un autre comment il avait rêvé que Gédéon les mettrait en déroute, celui-ci sentit son courage se ranimer et, plein de joie, commença le combat. Cet exemple nous montre que Dieu ne voulut pas lui donner directement une complète assurance; il ne la lui donna par voie surnaturelle que lorsqu'elle eut été confirmée par voie naturelle.

Ce qui arriva à ce sujet à Moïse est encore bien plus frappant. Dieu lui avait commandé d'aller délivrer les enfants d'Israël; il avait fortement motivé cet ordre; il l'avait même confirmé par le prodige en changeant sa verge en serpent comme aussi en couvrant et en guérissant subitement sa main de la lèpre. Néanmoins Moïse restait si hésitant, irrésolu et timide, que Dieu se fâcha, et encore il ne parvient pas à cette foi inébranlable qui était nécessaire dans ce cas; il fallut que Dieu relevât son courage en lui donnant son frère Aaron. Il lui dit en effet: Aaron frater tuus Levites scio quod eloquens sit; ecce ipse egreditur in occursum tuum, vidensque laetabitur corde. Loquere ad eum et pone verba mea in ore ejus, et ego ero in ore tuo et in ore illius: « Je sais que ton frère Aaron, le lévite, est un homme éloquent; voici qu'il vient à ta rencontre et ton coeur tressaillira de joie.

Parle-lui, fais-lui connaître mes ordres, et moi je serai sur tes lèvres et sur les siennes, afin que vous vous encouragiez mutuellement (Ex. IV, 14). » Et entendant ces paroles, Moïse reprit aussitôt courage et confiance à la pensée d'être soutenu par les conseils de son frère. C'est, en effet, le propre d'une âme vraiment humble de ne pas oser traiter seule à seul avec Dieu, et de ne trouver de sécurité que dans la direction et le conseil de son semblable. Dieu, d'ailleurs, le veut ainsi; car là où les âmes s'unissent pour rechercher la vérité, il se trouve lui aussi pour la leur manifester et les en convaincre par des raisons naturelles. C'est ainsi, comme il l'affirme, qu'il devait agir avec Moïse et Aaron, en dirigeant les lèvres de l'un et de l'autre. Voilà pourquoi il a dit aussi dans l'Évangile: Ubi enim sunt duo vel tres congregati in nomine meo, ibi sum in medio eorum:

« Là où deux ou trois sont réunis pour examiner ce qui concerne davantage l'honneur et la gloire de mon nom, je suis au milieu d'eux (Mat. XVIII, 20) », c'est-à-dire pour les éclairer, et confirmer dans leurs coeurs les vérités divines.

Notons bien que Dieu ne dit pas: là où un seul se trouvera, je me trouverai, moi aussi; mais il dit: là où il y en aura au moins deux; il veut nous faire comprendre qu'il ne veut pas que personne adhère de lui-même aux communications qu'il croit recevoir de Dieu, s'y attache ou s'y appuie sans le conseil et la direction de l'Église ou de ses ministres.

Celui qui est seul n'a pas Dieu avec lui pour l'éclairer et pour affermir la vérité dans son coeur; il est sans force et sans ardeur pour la vérité.

Voilà pourquoi « l'Ecclésiaste » renchérit encore sur ce que nous disons, dans ce texte: Vae soli, quia cum ceciderit, non habet sublevantem se. Et si dormierint duo, fovebuntur mutuo: unum, quomodo calefiet? Et si quisquam praevaluerit contra unum, duo resistunt ei: Malheur à celui qui est seul! Car, s'il vient à tomber, il n'a personne pour le relever. Si deux dorment ensemble, ils se réchaufferont mutuellement (Eccl. IV, 10-12), c'est-à-dire par le feu de la charité de Dieu qui est au milieu d'eux. Comment un seul pourrait-il se réchauffer?

C'est-à-dire comment pourrait-il n'être pas froid dans les choses de Dieu? Et si quelqu'un peut avoir l'avantage et prévaloir sur un homme seul, c'est-à-dire si le démon prévaut contre ceux qui veulent se diriger par eux-mêmes dans les choses de Dieu, deux réunis lui résisteront, c'est-à-dire le disciple et le maître qui s'unissent pour connaître la vérité et s'y conformer. L'homme, tant qu'il est seul, se sent ordinairement faible et sans force au regard de la vérité, alors même qu'il l'aurait reçue de Dieu. Cela est tellement vrai que saint Paul, qui depuis longtemps prêchait l'Évangile qu'il disait avoir appris, non de l'homme, mais de Dieu, n'eut pas de repos jusqu'au jour où il en conféra avec saint Pierre et les Apôtres. Il disait en effet: Ne forte in vacuum currerem aut cucurrissem:

« C'est de peur que je ne vienne à courir ou que je n'eusse déjà couru en vain (Gal. II, 2). »

Il ne se regardait pas comme rassuré, tant qu'il n'avait pas reçu d'un homme la sécurité. Voilà donc, ô Paul, une chose digne d'admiration: celui qui vous a révélé l'Évangile que vous prêchiez ne pouvait-il donc pas, par lui-même, vous tranquilliser contre les fautes que vous auriez pu commettre dans la prédication de la vérité?

De là, il suit clairement que l'on ne saurait se fier aux communications que Dieu nous révèle, tant que l'on ne suit pas l'ordre dont nous parlons. Supposons une personne qui en a la certitude, comme saint Paul l'avait au sujet de l'Évangile, puisqu'il avait déjà commencé à le prêcher, supposons en outre que la révélation vient de Dieu, on peut néanmoins se tromper à son sujet ou dans ce qui s'y rattache. Dieu, en effet, tout en découvrant une chose, ne manifeste pas toujours l'autre; très souvent même il dit une chose, mais il n'indique pas le moyen de l'exécuter.

Ordinairement, en effet, tout ce qui peut s'accomplir par l'industrie de l'homme ou ses conseils, il ne le fait pas lui-même, il n'en parle pas, malgré les rapports intimes et prolongés qu'il a eus avec une âme. Saint Paul le savait très bien: car, ainsi que nous l'avons dit, malgré la certitude où il était que Dieu lui avait révélé l'Évangile, il alla en conférer avec les Apôtres.
Cette vérité est très évidente dans « l'Exode » où nous voyons que Dieu, qui s'entretenait si familièrement avec Moïse, ne lui a jamais donné par lui-même le conseil de Jéthro son beau-père, c'est-à-dire qu'il devait se choisir d'autres juges pour l'aider dans ses fonctions, afin que le peuple ne fût pas obligé de l'attendre du matin jusqu'au soir (Ex. XVIII, 21-22).

Ce conseil Dieu l'approuva; mais il ne l'avait pas révélé lui-même à Moïse, car c'était une mesure et un conseil que la raison humaine pouvait découvrir. Ainsi en est-il de toutes les particularités qui dans les visions et communications de Dieu sont à la portée de la prudence et de la sagesse de l'homme. Dieu n'a pas coutume de les révéler; il veut, au contraire, que l'on profite toujours de ce moyen dans toute la mesure du possible.

C'est par là qu'il faut les régler toutes, sauf les vérités de foi; celles-ci, en effet, sont supérieures à toute intelligence, à toute raison, bien qu'elles ne leur soient point contraires. Si donc une personne est certaine que Dieu et les Saints s'entretiennent souvent avec elle d'une manière intime, elle ne doit pas s'imaginer qu'ils vont par le fait même lui dire ou manifester les fautes qu'elle commet sur certains points quand elle peut les connaître par une autre voie.

On ne doit donc jamais être dans une assurance complète. Nous lisons aux Actes des Apôtres que saint Pierre, bien que prince de l'Église, et instruit directement par Dieu, se trompait en maintenant une certaine cérémonie chez les Gentils; et cependant Dieu gardait le silence; enfin Paul le reprit comme il le raconte lui-même en ces termes: Sed cum vidissem quod non recte ambularent ad veritam Evangelii, dixi Caephae coram omnibus: Si tu cum Judaeus sis, gentiliter vivis, et non judaice, quomodo Gentes coegis judaizare?:

« Quand je vis que les disciples ne marchaient pas avec droiture et d'une manière conforme à la vérité de l'Évangile, je dis à Pierre devant tout le monde: Si vous, qui êtes Juif d'origine, vous vivez à la manière des Gentils, et non à celle des Juifs, comment usez-vous de ruse pour contraindre les Gentils à se conformer au judaïsme? (Gal. II, 14) »
Or Dieu n'a pas montré par lui-même cette faute à Pierre; cette simulation était du domaine de la raison, et Pierre pouvait le connaître par la voie de la raison.

Au jour du jugement, Dieu punira beaucoup de fautes et de péchés d'un grand nombre d'âmes avec lesquelles il avait eu des rapports intimes et auxquelles il avait accordé des lumières spéciales et de la vertu; mettant leur confiance dans cette familiarité qu'elles avaient avec Dieu et dans les faveurs qu'elles en recevaient, elles ont négligé leurs devoirs qu'elles connaissaient bien.

Aussi, comme le dit Notre-Seigneur Jésus Christ dans l'Évangile, ces âmes seront alors remplies d'étonnement et diront: Domine, Domine, nonne in nomine tuo prophetavimus, et in nomine tuo daemonia ejecimus, et in nomine tuo vitutes multas fecimus? « Seigneur, Seigneur, est-ce que nous n'avons pas annoncé en votre nom les prophéties que vous nous avez communiquées? Est-ce que nous n'avons pas encore en votre nom chassé et repoussé les démons? Est-ce que nous n'avons pas en votre nom opéré beaucoup de miracles et de prodiges? » Et Notre-Seigneur dit qu'il leur répondra en ces termes: Et tunc confitebor illis quia nunquam novi vos; discedite a me omnes qui operamini iniquitatem: « Retirez-vous de moi, ouvriers d'iniquité; je ne vous ai jamais connus (Mat. VII, 22-23). »

De ce nombre était Balaam et d'autres semblables. Dieu leur parlait et leur accordait des faveurs, et néanmoins ils restaient pécheurs. Le Seigneur adressera aussi des réprimandes aux élus ses amis, avec lesquels il avait traité avec familiarité sur la terre; il leur reprochera leurs fautes et leurs négligences dont il ne devait pas nécessairement les prévenir par lui-même, puisque sa loi et la raison naturelle qu'il leur avait données leur suffisaient.

Pour terminer ce sujet, je dis, conformément à ce qui précède, que quelque communication que reçoive une âme et de quelque manière que ce soit, par voie surnaturelle, elle doit l'exposer tout de suite avec clarté, précision, perfection, simplicité et en toute vérité à son directeur spirituel. Il lui semblera peut-être qu'il n'y a pas de motif d'en rendre compte à son directeur, ou de perdre le temps à lui en parler, puisque, comme nous l'avons dit, quand l'âme les repousse et n'en fait pas cas, ou ne les admet pas, elle est en sûreté, surtout quand il s'agit de visions, révélations ou autres communications surnaturelles qui ou bien sont claires ou bien n'offrent pas d'intérêt; néanmoins, il est très nécessaire d'en parler au directeur alors même qu'on ne le croirait pas utile, et cela pour trois motifs.

Le premier, c'est que, comme nous l'avons dit, Dieu communique beaucoup de choses dont l'effet, la force, la lumière, la sécurité ne se font pas sentir complètement à l'âme, tant qu'elle ne s'en est pas, je le répète, entretenue avec celui que Dieu lui-même a voulu et établi comme son juge spirituel. A lui appartient le pouvoir de la lier ou délier, d'approuver ou de désapprouver ce qui se passe en elle, comme nous l'avons montré déjà par l'autorité de l'Écriture. L'expérience de tous les jours en est la preuve. Nous voyons, en effet, des âmes humbles qui sont favorisées de ces communications surnaturelles.

Or c'est après en avoir parlé à qui de droit qu'elles demeurent toutes satisfaites, pleines de force, de lumière et de sécurité; quelques-unes, qui, avant d'en avoir parlé à leur directeur, les avaient regardées avec indifférence ou comme une chose étrangère, les considèrent  alors comme un don qui leur est fait de nouveau.

Le second motif, c'est que l'âme a ordinairement besoin de recevoir un enseignement sur les choses qui se passent en elle, afin que dans cette voie où elle se trouve elle pratique le dénûment et la pauvreté spirituelle de la Nuit obscure. Si elle est privée de cet enseignement, et si même elle repousse les communications surnaturelles, elle tombera peu à peu et sans s'en apercevoir dans l'ignorance des voies spirituelles et s'accoutumera à la voie des sens, où se passent en partie ces communications particulières.

Le troisième motif, c'est pour que l'âme demeure dans l'humilité, la dépendance et la mortification. Il convient qu'elle rende compte de toutes ces communications à son directeur, alors même qu'elle n'en ferait aucun cas et les regarderait comme non avenues. Certaines personnes, en effet, éprouvent une vive répugnance à cette ouverture; il leur semble que ce n'est rien, et ne savent ce qu'en pensera leur directeur auquel elles en parleront; c'est là une marque de peu d'humilité. Voilà pourquoi il faut que ces personnes s'assujettissent à les dire.

D'autres personnes éprouvent une grande confusion à les exposer, dans la crainte qu'on ne découvre en elles des faveurs qui les fassent passer pour saintes, ou pour d'autres motifs encore; voilà pourquoi elles ne croient pas devoir en parler; d'ailleurs elles n'en font pas cas; or c'est précisément pour ce fait même qu'il convient qu'elles sachent se mortifier et parler, jusqu'à ce que par l'humiliation elles arrivent à être humbles, simples, ouvertes, disposées à parler au directeur, et qu'ensuite elles aillent à lui sans difficulté.

Il nous faut donner ici un avertissement au sujet de ce que nous avons dit. Nous avons montré une grande rigueur pour que les âmes repoussent ces communications surnaturelles, et pour que les confesseurs ne favorisent point qu'elles aient des entretiens sur ces matières; mais par ailleurs les directeurs spirituels se tromperaient s'ils témoignaient à ce sujet du dégoût, de l'éloignement, du mépris; ce serait pour ces âmes l'occasion de se replier sur elles-mêmes; on fermerait la porte à l'ouverture de conscience dont elles ont besoin, et elles n'oseraient plus leur rien manifester et seraient exposées à une foule d'inconvénients.

Nous le répétons, ces communications surnaturelles sont un moyen; et puisqu'elles sont un moyen ou une voie par où Dieu les mène, il n'y a pas lieu de le dédaigner; il ne faut ni s'en étonner, ni s'en scandaliser. Il faut plutôt agir avec beaucoup de bonté et de calme, encourager ces âmes, leur faciliter l'ouverture de conscience, et au besoin la leur imposer par un précepte, car elles éprouvent parfois une difficulté très grande à s'y résigner.

Le directeur s'appliquera à les conduire dans la voie de la foi; il leur enseignera simplement à détourner les regards de toutes ces manifestations surnaturelles, il leur montrera comment on en détache les tendances et l'esprit pour réaliser des progrès; enfin il leur donnera à entendre que devant Dieu une seule action, un seul acte de volonté fait par charité a plus de prix que toutes les visions, révélations ou communications qui peuvent venir du Ciel, car en ces choses il n'y a ni mérite, ni démérite.

Il leur exposera en outre comment beaucoup d'âmes qui ne jouissent d'aucune  de ces manifestations sont incomparablement plus parfaites que d'autres qui en sont largement favorisées.


Méditons ….

à suivre …Chapitre 21



Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Ven 12 Mai - 7:29

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 21

Où l’ on commence à parler des connaissances de l entendement qui sont purement spirituelles .
On en décrit la nature


La doctrine que nous avons donnée sur les connaissances de l'entendement qui nous viennent par la voie des sens est très laconique, vu ce qu'il y aurait à dire. Néanmoins, je n'ai pas voulu m'étendre davantage sur ce sujet, car, pour atteindre le but que je me propose ici, qui est d'en détacher l'entendement et de l'introduire dans la Nuit de la foi, je comprends même que j'ai été trop long.

Nous allons donc parler maintenant des quatre genres de connaissances purement spirituelles de l'entendement, qui sont, avons-nous dit au chapitre IX, les visions, les révélations, les paroles et les sentiments spirituels.

Nous les appelons purement spirituelles, car, à la différence des connaissances corporelles et imaginaires, elles ne se communiquent pas à l'entendement par la voie des sens corporels; mais sans qu'il y ait une intervention quelconque d'un sens corporel extérieur ou intérieur, elles s'offrent à l'entendement clairement et distinctement par voie surnaturelle d'une manière passive, sans que l'âme pose un acte quelconque ou agisse personnellement et se conduise d'une manière active et comme par elle-même.

Il faut donc savoir, pour parler dans un sens large et général, que ces quatre connaissances peuvent toutes s'appeler visions de l'âme; car lorsqu'on parle de l'âme, comprendre et voir sont une seule et même chose. Dès lors, en effet, que ces quatre connaissances sont du domaine intelligible et appartiennent à l'entendement, elles sont aussi visibles spirituellement.

L'intelligence qui s'en forme dans l'entendement peut s'appeler vision intellectuelle. Tous les objets des autres sens qui peuvent être perçus par la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût, le tact, sont du domaine de l'entendement en tant qu'ils sont vrais ou faux; et si tout ce que voient les yeux du corps leur cause une vision corporelle, tout ce qui est intelligible aux yeux spirituels de l'âme ou à l'entendement lui cause une vision spirituelle.

Car, nous le répétons, pour lui, comprendre et voir sont une même chose. Ainsi donc ces quatre connaissances, nous pouvons, pour parler d'une manière générale, les appeler des visions; tandis que nous ne pouvons nous exprimer ainsi quand il s'agit des autres sens, car l'objet de l'un n'est pas le même que l'objet de l'autre.

Mais comme ces connaissances se présentent à l'âme sous une forme analogue à celle qui frappe les autres sens, il en résulte, pour employer le langage propre et spécifique, que nous appelons visions ce que l'entendement perçoit sous forme de vue, car il peut voir les choses spirituelles, comme les yeux du corps voient les choses corporelles.

Ce qu'il perçoit comme s'il l'apprenait ou comme s'il s'agissait d'une chose nouvelle, à l'instar de l'ouïe qui entend des choses qu'il n'avait jamais entendues, nous l'appelons révélations; ce qu'il connaît comme en l'entendant, nous l'appelons locution; ce qu'il connaît enfin d'une manière analogue à celle des autres sens, comme, par exemple, une odeur suave et spirituelle, un goût spirituel, un plaisir spirituel que l'âme peut goûter surnaturellement, nous l'appelons sentiment spirituel.

De toutes ces conceptions, comme nous l'avons dit, l'entendement tire une connaissance ou vision spirituelle, qui est indépendante de toute représentation, forme, image, figure imaginaire ou représentation naturelle; toutes ces communications se produisent dans l'âme immédiatement par une voie surnaturelle, par un moyen surnaturel.

Or on agira à leur égard comme nous avons dit qu'il faut faire à l'égard des connaissances corporelles et imaginaires; il convient d'en détacher l'entendement et de le diriger et conduire par leur moyen à travers la nuit spirituelle de la foi jusqu'à l'union divine et substantielle de l'amour de Dieu. Sans cela sa marche serait embarrassée et entravée dans ce chemin d'isolement et de détachement qui lui est nécessaire en tout.

Sans doute ces connaissances sont plus nobles, plus utiles et beaucoup plus sûres que les connaissances corporelles et imaginaires; comme elles sont déjà intérieures et purement spirituelles, le démon y a moins de prise; l'âme les reçoit d'une manière plus pure et plus subtile, sans aucun travail de sa part ni de l'imagination, ou du moins sans coopération active.

Néanmoins, si l'entendement n'avait soin de se surveiller, il pourrait encore trouver des obstacles sur ce chemin et tomber dans une foule d'erreurs.

Nous pourrions d'une certaine manière terminer en même temps ces quatre sortes de connaissances. Ce serait de donner pour toutes à la fois le conseil que nous donnons pour toutes les autres, de ne point les rechercher et de ne point les accepter. Néanmoins, afin de mieux éclairer la route à suivre, et comme il y a certaines choses spéciales à dire sur chacune d'elles, il est bon d'en parler séparément. Nous commencerons donc par les premières, qui sont les visions spirituelles ou intellectuelles.

Méditons …

à suivre ….Chapitre 22



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Sam 13 Mai - 7:17

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 22


Où l’ on traite de deux sortes de visions spirituelles qui viennent par la Voie surnaturelle

Nous allons parler maintenant d'une manière spéciale des visions spirituelles qui se forment dans l'entendement sans l'intermédiaire d'un sens corporel quelconque. Ces visions sont de deux sortes: il y a les visions des substances corporelles, et les visions des substances simples et immatérielles.

Les premières concernent toutes les choses matérielles qu'il y a au ciel et sur la terre; l'âme peut les voir, tout en étant dans son corps, par le moyen d'une certaine lumière surnaturelle qui lui vient de Dieu et lui permet de voir les choses absentes du ciel et de la terre.

C'est ce que saint Jean a vu, comme nous le lisons dans « l'Apocalypse » (Apoc. XXI, q. s. v.), où il nous fait la description et nous raconte la beauté de la Jérusalem céleste dont il a eu la vision. On lit également que saint Benoît a été favorisé d'une vision spirituelle où le monde tout entier lui a été dévoilé.

Cette vision, dit saint Thomas dans ses Quodlibet (Quodlibet I), consistait dans une lumière qui, comme nous l'avons dit, lui venait d'en haut.

Les autres visions des substances immatérielles ne peuvent avoir lieu, même avec le secours de cette lumière dérivée de Dieu, dont nous parlons; il faut alors une lumière plus élevée que l'on appelle la lumière de gloire. Ces visions des substances immatérielles, comme l'être de Dieu, les anges et les âmes, ne sont  pas proprement de cette vie et ne peuvent avoir lieu tant que nous sommes dans un corps mortel. Car si Dieu voulait les communiquer à l'âme selon leur mode d'être essentiel, l'âme quitterait son corps et cesserait sa vie mortelle d'ici-bas.

Voilà pourquoi Dieu dit à Moïse qui lui demandait de voir son Essence: Non videbit me homo et vivet: « L'homme ne peut pas me voir sans cesser de vivre (Ex. XXXIII, 20). » Aussi les enfants d'Israël, à la pensée qu'ils devaient voir Dieu ou qu'ils l'avaient vu, lui ou un ange, craignaient de mourir, comme on le voit au livre de l'Exode où, remplis de terreur, ils dirent à Moïse: Non loquatur nobis Dominus, ne forte moriamur (Ex. XX, 19).

C'est comme s'ils avaient dit: Que Dieu ne se communique pas à nous d'une façon manifeste. Nous lisons également au livre des Juges, que Manué, père de Samson, qui avait vu l'essence d'un ange sous la figure d'un jeune homme de la plus grande beauté, dit à sa femme qui avait eu la même vision: Morte moriemur, quia vidimus Dominus:

« Nous allons mourir, puisque nous avons vu le Seigneur (Jug. XIII, 22). »

Ainsi donc des visions de cette sorte ne sont pas compatibles avec notre existence sur la terre, si ce n'est très rarement et en passant, et encore Dieu doit-il alors veiller à soutenir les conditions de la vie naturelle, puisqu'il en retire totalement l'esprit et que l'âme n'anime plus le corps.

C'est pour cela que saint Paul, ayant eu des visions de cette sorte et vu, au troisième ciel, des substances simples, s'écrie: Sive in corpore nescio, sive extra corpus nescio, Deus scit: C'est-à-dire: J'ai été élevé à ces visions, et il ajoute que quand il en fut favorisé, il ne sait pas s'il était dans son corps ou non, mais que Dieu le sait (II Cor. XII, 2).

Cela nous montre clairement que l'Apôtre a subi dans sa vie naturelle une transformation merveilleuse dont le mode à Dieu pour auteur.

De même, quand Dieu, comme on le croit, communiqua à Moïse la vision de son essence, il lui dit, comme on nous le raconte, qu'il allait le mettre dans le creux du rocher, que là il le protégerait, le couvrirait de sa droite et le soutiendrait pour l'empêcher de mourir lorsque sa gloire viendrait à passer (Ex. XXXIII, 22-23). Ce passage rapide de la gloire de Dieu signifie la vision transitoire qu'il donne de lui-même à Moïse, pendant qu'il le couvre de sa droite pour lui conserver la vie naturelle.

Mais ces visions si substantielles qui furent accordées à saint Paul, à Moïse et à Élie qui se couvrit le visage au souffle suave de Dieu, bien que ce fût transitoire, sont très rares; elle n'arrivent presque jamais, et ne sont accordées qu'à un très petit nombre. Dieu ne les réserve qu'à ceux qui sont des sources de son esprit dans l'Église et embrasés du zèle de sa loi, comme le furent les trois personnages dont nous venons de parler.

Bien que, d'après les lois ordinaires, l'entendement ne puisse pas avoir ces visions des substances spirituelles d'une manière claire et évidente ici-bas, elles peuvent cependant être senties dans la substance de l'âme moyennant une connaissance pleine d'amour qui est accompagnée de touches divines et d'une ineffable union. Cette faveur se rattache aux sentiments spirituels dont nous parlerons plus tard, avec l'aide de Dieu.

Notre but est de conduire l'âme à l'union divine, à l'union avec l'essence divine; nous en parlerons lorsque nous traiterons de l'intelligence mystique, de la connaissance confuse et obscure de Dieu dont nous avons encore à parler.

Nous verrons là comment, à l'aide de cette connaissance amoureuse et obscure, l'âme s'unit à Dieu dans un degré sublime et vraiment divin; car cette connaissance obscure et amoureuse, qui n'est autre que la foi, est d'une certaine manière ici-bas par rapport à l'union divine comme la lumière de gloire est dans l'autre vie par rapport à la claire vision de Dieu.

Aussi allons-nous parler maintenant des visions des substances corporelles qui sont communiquées spirituellement à l'âme et ressemblent aux visions corporelles. De même en effet que les yeux du corps voient les objets corporels à l'aide de la lumière naturelle, de même l'entendement, éclairé de cette lumière surnaturelle dont il a été question, voit intérieurement ces mêmes objets naturels, et d'autres encore s'il plaît à Dieu.

Toutefois il y a une différence dans le degré et le mode de vision, car les visions spirituelles et intellectuelles sont plus claires et plus subtiles que les visions corporelles.

Lorsque Dieu veut accorder à l'âme une faveur de cette sorte, il lui communique cette lumière surnaturelle dont nous parlons, à l'aide de laquelle elle voit avec la plus grande facilité et clarté ce que Dieu veut lui montrer soit du ciel, soit de la terre; et alors, que l'objet soit absent ou présent, il n'y a point d'obstacle pour elle.

On dirait parfois que c'est comme si, une porte s'ouvrant, une lumière splendide apparaissait, semblable à un éclair qui, au milieu d'une nuit profonde, manifeste subitement les objets d'une manière claire et distincte, pour les laisser tout de suite dans leur obscurité, bien que leurs formes et leurs images restent gravées dans l'imagination.

Tel est le phénomène qui se produit dans l'âme d'une manière beaucoup plus parfaite.

Car ces visions s'impriment parfois si profondément dans son esprit à l'aide de ce flambeau, que chaque fois qu'elle y revient avec la lumière de Dieu, elle les voit en elles-mêmes, comme la première fois. L'âme est comme un miroir, où, chaque fois qu'elle y regarde, elle voit les images qui y sont représentées. Ces visions sont de telle sorte que les images des choses que l'âme a vues une fois ne s'effacent jamais, bien que parfois elles apparaissent plus éloignées.

Voici les effets qu'elles produisent dans l'âme. Elles lui donnent la quiétude, la lumière, une joie qui semble propre à l'état de gloire, la suavité, l'amour, l'humilité, l'attrait vers Dieu, l'élévation de l'esprit en Dieu; ces effets sont plus ou moins profonds; parfois ils sont plus marqués dans une vertu que dans une autre, selon l'esprit avec lequel on les reçoit et selon le bon plaisir de Dieu.

Le démon peut lui aussi produire et contrefaire ces visions dans l'âme. Il se sert de quelque lumière naturelle et de l'imagination; par une suggestion naturelle il éclaire l'esprit sur les objets présents ou éloignés.

Aussi, pour expliquer ce passage où saint Matthieu raconte que le démon montra au Christ tous ces royaumes du monde et leur gloire: ostendit ei omnia regna mundi (Mat. IV, 8 ), plusieurs docteurs assurent qu'il le fit par suggestion spirituelle (St Thomas IIIe q. 41, a. 2, ad. 3 m. et Abul. in IV Mat.).

Il n'était pas possible, en effet, qu'il donnât à des yeux corporels un spectacle aussi étendu et montrât tous les royaumes du monde et leur gloire. Toutefois il y a une très grande différence entre les visions qui viennent du démon et celles qui ont Dieu pour auteur.

Les effets produits par les visions démoniaques dans l'âme ne ressemblent nullement à ceux des visions qui viennent de Dieu; celles-là engendrent l'aridité dans les rapports de l'âme avec Dieu, la portent à s'estimer, lui suggèrent de faire quelque cas de ces visions; elles ne produisent nullement la douceur de l'humilité et l'amour de Dieu. De plus, les objets de ces visions ne se gravent pas dans l'âme avec la clarté des autres.

Loin d'avoir de la durée, elles s'effacent promptement, excepté le cas où l'âme leur accorde une grande estime, car alors l'affection qu'elle leur porte fait naturellement qu'elle en garde le souvenir; mais c'est un souvenir très aride qui ne produit nullement cet amour et cette humilité qui découlent du souvenir des visions divines.

Ces visions, dès lors qu'elles ont pour objet des créatures avec lesquelles Dieu n'a aucune ressemblance, aucune proportion ou communication essentielle, ne peuvent être pour l'entendement un moyen prochain de l'union essentielle avec Dieu.

Aussi convient-il à l'âme de se tenir à leur égard d'une manière négative, comme à l'égard de celles dont nous avons parlé, si elle veut progresser avec le moyen prochain qui est celui de la foi. Elle doit donc se garder de faire comme une réserve ou un trésor de toutes ces formes de visions qui demeurent imprimées en elle, ne point chercher à s'y attacher.

Si elle s'arrête à ces formes et images de personnages qui sont gravées dans son imagination, elle y trouvera un obstacle et n'ira pas à Dieu par la voie du renoncement absolu; si, au contraire, ces formes se reproduisaient toujours en elle, l'âme n'en recevrait pas un grand dommage si elle n'en faisait aucun cas.

Sains doute le souvenir de ces visions excite dans l'âme quelque amour de Dieu et la porte à la contemplation; mais ce qui la stimule surtout et l'élève, c'est que, sans connaître le mode et la source de son avancement, elle marche dans la voie obscure de la foi pure et du détachement de toutes ces visions. Il arrive de la sorte que l'âme est toute embrasée d'un amour très pur pour Dieu et qu'elle en ignore la source et le motif.

La raison en est que plus sa foi s'est enracinée et développée par ce dénûment, ces ténèbres et ce détachement de tout, en un mot par cette pauvreté spirituelle, plus aussi s'est enraciné et développé en elle l'amour de Dieu. Ainsi donc, plus l'âme s'applique à demeurer dans la nuit et le néant par rapport à toutes les choses extérieures et intérieures qui peuvent lui être communiquées, plus aussi elle avance dans la foi et par conséquent dans l'espérance et dans la charité, vu que ces trois vertus théologales marchent unies.

Parfois cet amour n'est pas compris et l'âme ne le sent pas. D'ailleurs il n'a pas son siège dans les sens et ne produit pas de suavité; il réside dans l'âme et se manifeste par sa force; il suscite plus de courage et d'ardeur que précédemment; parfois cependant il rejaillit sur la partie sensible par des effets pleins de tendresse et de douceur.

Ainsi donc, pour arriver à cet amour, à cette allégresse, à cette joie que de semblables visions produisent et causent, il convient que l'âme ait assez de force et de mortification pour vouloir demeurer dans le dénûment et la nuit à leur égard; de la sorte elle établit cet amour et cette joie sur ce qu'elle ne voit pas et ne sent pas, et qu'elle ne peut ni voir ni sentir en cette vie, c'est-à-dire sur Dieu qui est incompréhensible et au-dessus de tout.

Voilà pourquoi nous devons aller à lui par le détachement de tout. Sans cela, et supposé même que l'âme ait assez d'habileté,  d'humilité et de force pour que le démon ne puisse, à l'occasion de ces visions, la tromper et la faire tomber dans quelque présomption, comme il a coutume de le faire, il ne permettra pas à l'âme de progresser, parce qu'il s'opposera à la nudité spirituelle, à la pauvreté d'esprit, au détachement de la foi, toutes choses qui sont requises, comme nous l'avons dit, pour l'union de l'âme avec Dieu.

Mais comme la doctrine concernant ces visions intellectuelles est la même que celle des visions et appréhensions surnaturelles des sens que nous avons exposée aux chapitres XIX et XX, nous ne nous attarderons pas davantage ici à les expliquer.

Méditons ….

à suivre …Chapitre 23




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Message par Maud Mar 16 Mai - 9:17

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_49

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 23


Où l’on traite des révélations .
On dit ce qu’elles sont et on expose une distinction.


L'ordre que nous suivons nous amène à parler maintenant de la seconde sorte de connaissances spirituelles que nous avons appelées déjà révélations, et dont quelques-unes appartiennent proprement à l'esprit de prophétie.

Et tout d'abord il faut savoir que la révélation n'est pas autre chose que la découverte de quelque vérité cachée, ou la manifestation de quelque secret ou mystère.

Ainsi par exemple, Dieu fait comprendre à l'âme une chose; il lui manifeste une vérité; il lui découvre certaines de ses oeuvres passées, présentes ou futures.

Cela posé, nous pouvons dire qu'il y a deux sortes de révélations. Les unes consistent dans la manifestation de certaines vérités à l'entendement; et on les appelle proprement des connaissances ou des vues intellectuelles; les autres consistent dans la manifestation de secrets, et celles-ci s'appellent proprement, et à plus juste titre que les autres, des révélations; les premières, en effet, ne peuvent pas, à rigoureusement parler, s'appeler des révélations, parce qu'elles consistent dans la connaissance de la vérité dépouillée de tous ses accidents, que Dieu donne à l'âme sur les choses temporelles ou spirituelles d'une manière claire et manifeste.

J'ai voulu en traiter sous le nom de révélation, d'abord parce qu'il a beaucoup de rapprochement et de rapport avec elles et ensuite pour ne point multiplier les divisions.

Cela dit, nous pouvons fort bien distinguer maintenant les révélations en deux genres de connaissances; nous les appelleront les unes connaissances intellectuelles, et les autres manifestations des secrets et des mystères de Dieu.

Nous en parlerons en deux chapitres le plus brièvement possible; et nous commencerons par les connaissances intellectuelles.

Méditons ..

à suivre …Chapitre 24



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Mer 17 Mai - 8:36

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 24


Où l’ on parle des connaissances des vérités perçues en elles- mêmes par l’ entendement .
On dit qu’elles sont de deux sortes et l’ on explique la conduite de l’ âme à leur égard
.


Pour parler convenablement de cette connaissance des vérités en elles-mêmes qui est perçue par l'entendement, il faut que Dieu me prenne la main et dirige ma plume. Vous saurez, en effet, cher lecteur, que toute parole est impuissante à dire ce qu'elles sont en elles-mêmes par rapport à l'âme. D'ailleurs mon intention n'est pas d'en parler ici d'une manière explicite. Mon but est seulement de montrer comment l'âme doit s'ingénier pour s'en servir et tendre à l'union divine. Qu'on me permette donc d'en parler brièvement et de dire en peu de mots ce qui utile à mon but.

Ce genre de visions, ou pour mieux dire, de connaissances des vérités en elles-mêmes est très différent de celui dont nous venons de parler au chapitre XXII. Il ne ressemble pas à la vue que l'entendement a des choses temporelles, je veux dire corporelles; il consiste à comprendre et à voir avec l'entendement les vérités de Dieu ou des créatures, et d'une manière qui surpasse ce qui a été, ce qui est et ce qui sera, et cela est très conforme à l'esprit de prophétie dont nous parlerons peut-être plus tard. Il faut donc remarquer que ce genre de connaissances se divise en deux catégories:

les unes ont pour objet le Créateur, les autres les créatures, ainsi que nous l'avons dit.

Les unes et les autres sont pleines de délices pour l'âme, mais les délices causées par celles qui ont Dieu pour objet sont telles qu'on ne sait à quoi les comparer; aucune expression, aucun terme ne pourrait en donner une idée; ces connaissances étant des connaissances de Dieu lui-même, les délices qu'elle produisent sont aussi les délices de Dieu lui-même.

Comme nous l'enseigne David: Non est qui similis sit tibi:

« Il n'y a rien qui soit semblable à vous, ô mon Dieu (Ps. XXXIX, 6). »

Ces connaissances ayant Dieu pour objet, sont en effet accordées directement; elles donnent le sentiment le plus profond de quelque attribut de Dieu, de sa toute-puissance, ou de sa force, ou de sa bonté, ou de sa douceur; chaque fois qu'il se fait sentir à l'âme, il y grave ce qu'elle éprouve.

Comme il s'agit ici de la pure contemplation, l'âme voit clairement qu'il n'y a aucun moyen de pouvoir en dire quelque chose, si ce n'est en quelques termes généraux que lui arrache l'abondance des délices et du bonheur qu'elle éprouve alors, mais qui sont impuissants à faire comprendre ce qu'elle a goûté et ressenti.

Aussi David, après avoir éprouvé quelque chose de cette faveur, n'en parle qu'en termes vagues et généraux: Judicia Domini vera, justificata in semetipsa Desiderabilia super aurum et lapidem pretiosum multum, et dulciora super mel et favum: « Les jugements que nous nous formons de Dieu, c'est-à-dire les vertus et les attributs que nous reconnaissons en Dieu, sont vrais et se manifestent par eux-mêmes; ils sont plus désirables que l'or et que les pierres les plus précieuses, ils sont plus doux que le miel le plus pur (Ps. XVIII, 10-11). »

Moïse, comme nous le lisons, ayant été élevé à une très haute connaissance de Dieu lui donna une fois de lui-même lorsqu'il passa devant lui, n'exprima cet état que par ces termes généraux dont nous avons parlé; aussi, élevé à cette connaissance, il se prosterna au moment où le Seigneur passait et s'écria: Dominator, Domine Deus, misericors et clemens, et multae miserationis ac verax. Qui custodis misericordiam in millia: « Dominateur, Seigneur Dieu, miséricordieux et clément, patient et plein de miséricorde, et véritable, qui gardez à des milliers de créatures les miséricordes que vous avez promises (Ex. XXXIV, 6-7). »

Par là nous voyons que, dans l'impuissance d'exprimer ce qu'il avait connu de Dieu dans cette seule connaissance, il le dit et le répète par toutes ces expressions générales. Si parfois l'âme élevée à ces hautes connaissances fait entendre des paroles , elle voit bien qu'elle n'a rien dit de ce qu'elle a éprouvé; elle comprend qu'il n'y a aucune parole qui soit capable de l'exprimer.

De même, saint Paul, favorisé de cette haute connaissance de Dieu, ne se préoccupe pas d'en parler; il dit seulement qu'il n'est pas permis à l'homme de traiter ce sujet (II Cor. XII, 4).

Ces connaissances divines, ou connaissances qui ont Dieu pour objet, ne sont jamais restreintes à des choses particulières. Dès lors qu'elles regardent le principe souverain, on n'en peut rien dire de particulier; j'excepte le cas où on le pourrait d'une certaine manière quand il s'agit de quelque vérité concernant un objet inférieur à Dieu que l'on connaîtrait alors en même temps; mais s'il s'agit des connaissances divines elles-mêmes, cela est absolument impossible.

Or ces hautes connaissances pleines d'amour ne peuvent être accordées qu'à l'âme parvenue à l'union avec Dieu; car elles sont cette union même; cette union consiste à les posséder par une certaine touche qui se fait de l'âme à la divinité; et ainsi c'est Dieu lui-même qui est alors senti et goûté; cette union n'est pas claire et manifeste comme dans la gloire; mais la touche de cette connaissance et suavité est si élevée et si profonde qu'elle pénètre la substance de l'âme.

Le démon est impuissant à s'immiscer dans une pareille faveur ou à produire quelque chose de semblable, puisque rien n'en approche et ne saurait lui être comparé; il ne peut non plus infuser de pareilles jouissances et de pareils délices.

Ces connaissances ont le goût de l'essence divine et de la vie éternelle, et le démon n'a pas le pouvoir de singer une faveur si élevée. Il pourrait cependant en simuler quelque apparence en représentant à l'âme certaines grandeurs ou majestés qui l'impressionneraient vivement, en cherchant à lui persuader que c'est là une faveur de Dieu, mais son intervention n'entre pas dans la substance de l'âme, ne la renouvelle pas et ne l'enflamme pas subitement d'amour comme le font les connaissances de Dieu.

Il y a, en effet, certaines connaissances, certaines touches surnaturelles que Dieu produit dans la substance de l'âme, et celles-là l'enrichissent de telle sorte, que non seulement une seule d'entre elles suffit pour la délivrer complètement de toutes les imperfections dont elle n'avait pu se corriger dans tout le cours de sa vie, mais pour la combler de biens et de vertus célestes. Ces touches divines sont si pleines de saveurs et de délices intimes que, pour une seule d'entre elles, l'âme se trouverait bien payée de tous les travaux de la vie, si nombreux qu'ils fussent.

Elle demeure en outre animée d'un tel courage et d'une telle ardeur de souffrir beaucoup pour Dieu que ce lui est un tourment particulier de voir le peu qu'elle souffre.

De si hautes connaissances ne peuvent pas parvenir à l'âme par quelque comparaison ou imagination de sa part, comme nous l'avons dit. Ces connaissances dépassent de pareils moyens, et Dieu les produit dans l'âme sans qu'elle y concoure par son habileté. Aussi est-ce parfois quand elle y pense le moins et qu'elle est le plus éloignée d'y prétendre qu'elle a coutume de recevoir ces touches célestes que lui impriment certains souvenirs ineffables de Dieu.

Parfois ces souvenirs se réveillent subitement en elle à la seule pensée de choses même de très minime importance; ils se font sentir avec tant d'efficacité que parfois ce n'est pas seulement l'âme mais le corps qui en tressaille de joie.

D'autres fois ils se font sentir quand l'esprit se trouve dans un calme profond: il n'y a pas de tressaillement, mais un sentiment élevé d'allégresse et un rafraîchissement pour l'esprit.

D'autres fois ces faveurs arrivent à l'occasion d'une parole de la sainte Écriture que l'on a dite ou entendue, ou à l'occasion de tout autre chose, mais elles n'ont pas toujours la même efficacité et ne se font pas sentir avec la même puissance; souvent en effet elles sont très faibles, mais, si faibles qu'elles soient, une seule de ces réminiscences ou de ces touches divines est plus précieuse pour l'âme qu'un grand nombre de connaissances ou de considérations sur les créatures et les oeuvres de Dieu.

Comme ces connaissances sont données à l'âme à l'improviste, ainsi que nous l'avons dit, et sans le concours de sa volonté, elle n'a rien à faire soit pour les vouloir soit pour les refuser. Elle n'a qu'à se tenir humble, et à être détachée à leur égard; Dieu fera son oeuvre quand il voudra et comme il voudra.

Je ne dis pas cependant qu'il faille se conduire négativement à l'égard de ces connaissances, comme à l'égard des autres connaissances; car, nous l'avons dit, elles font partie de l'union divine vers laquelle nous conduisons l'âme. C'est dans ce but que nous lui enseignons à se dépouiller et à se détacher de toutes les autres connaissances; et le moyen que nous devons employer pour les obtenir de Dieu, c'est d'être humble, de souffrir par amour pour Dieu avec patience et d'être désintéressé par rapport à toute récompense.

Ces faveurs, en effet, ne s'accordent pas à l'âme qui n'est pas détachée; elles proviennent de l'amour tout particulier de Dieu parce que l'âme lui porte à lui-même un amour absolument désintéressé.

C'est là ce que le Seigneur a voulu signifier quand il nous dit dans saint Jean: Qui autem diligit me, diligetur a Patre meo, et ego diligam eum et minifestabo ei meipsum:

« Celui qui m'aime sera aimé de mon Père, je l'aimerai et je me manifesterai moi-même à lui (Jean, XIV, 21). »

Ces paroles renferment les connaissances et les touches dont nous parlons, et par lesquelles Dieu se manifeste à l'âme qui s'approche de lui et qui l'aime véritablement.

La seconde espèce de connaissances, de visions, ou de vérités intérieures, est très différente de celles dont nous venons de parler, parce qu'elle se rapporte à des objets inférieurs à Dieu. Elle regarde la connaissance de la vérité des choses en soi, des faits et des événements qui se passent parmi les hommes. Cette connaissance est de telle sorte que les vérités connues alors se gravent d'une manière admirable dans le plus intime de l'âme sans le concours d'une parole étrangère.

Viendrait-on à lui dire le contraire, elle ne pourrait, malgré ses efforts, y donner son assentiment intérieur, parce que son esprit voit alors, outre cette connaissance, quelque chose qu'il lui représente en même temps. Elle le voit pour ainsi dire dans toute sa clarté. Cette vue, avons-nous dit, appartient à l'esprit de prophétie, ou à ce don que saint Paul appelle le don de discernement des esprits (I Cor. XII, 10).

Cependant, bien que l'âme regarde cette connaissance comme absolument certaine et vraie, ainsi que nous l'avons dit, et ne puisse pas ne pas avoir cette persuasion intime qu'elle reçoit passivement, elle ne doit pas pour cela manquer d'ajouter foi à son maître spirituel et de soumettre sa raison à ce qu'il lui dira et commandera, alors même que ce serait complètement opposé à ce qu'elle éprouve.

De la sorte elle marche dans le sentier de foi qui la conduira à l'union divine; tel est le but où elle doit tendre plus par la foi que par le raisonnement.

Nous avons de cette double connaissance des témoignages très clairs dans la sainte Écriture. Le Sage, parlant de la connaissance particulière que l'on peut avoir des choses, dit ces paroles: « Dieu m'a donné la science vraie des choses; il a voulu que je connaisse la disposition du globe terrestre et la vertu des éléments, le commencement, la fin et le milieu des temps, ainsi que les changements de saisons, le cours de l'année, la disposition des étoiles, la nature des animaux, les moeurs des bêtes sauvages, la force des vents, les pensées des hommes, la diversité des plantes et des arbres et la propriété de leurs racines, en un mot j'ai appris tout ce qu'il y a de caché et d'inconnu; et je l'ai appris, parce que la Sagesse, qui est l'auteur de toutes les choses créées, me l'a fait connaître (Sag. VII, 21). »

Sans doute cette connaissance de toutes choses dont parle ici le Sage et que Dieu lui donna était infuse et générale, mais cette citation prouve suffisamment la réalité de toutes les connaissances particulières que Dieu infuse, quand il lui plaît, par voie surnaturelle. Il ne donne pas la science générale et habituelle de ces objets, comme il le fit pour Salomon, mais il découvre peu à peu, de temps en temps, certaines vérités au sujet de ces choses créées dont le Sage vient de nous parler. Il est  vrai cependant que Dieu accorde à beaucoup d'âmes des habitudes infuses par rapport à une foule de choses, bien que ces habitudes ne soient jamais aussi générales qu'elles ne l'étaient chez Salomon.

Ces habitudes varient selon la diversité des dons que Dieu accorde et que saint Paul énumère; parmi ces dons il place la sagesse, la science, la foi, la prophétie, l'intelligence des langues, l'interprétation des paroles (I Cor. XII, 8 sv.). Toutes ces connaissances sont des habitudes infuses que Dieu donne gratuitement à qui il veut, d'une manière naturelle ou surnaturelle; il l'a fait d'une manière naturelle à Balaam et à d'autres prophètes idolâtres ainsi qu'à beaucoup de sibylles à qui il a conféré le don de prophétie; il l'a fait d'une manière surnaturelle aux saints Apôtres et Prophètes et à d'autres Saints.

Mais outre ces habitudes ou grâces gratuites qui sont accordées, nous disons qu'il y a des personnes parfaites, ou du moins qui font des progrès dans la perfection, et qui reçoivent très ordinairement des illustrations et des connaissances sur les choses présentes ou absentes. Cette faveur leur vient par une lumière qui se communique à leur esprit déjà éclairé et purifié. Nous pouvons bien appliquer ici cette parole des Proverbes: Quomodo in aquis resplendent vultus prospicientium, sic corda hominum manifesta sunt prudentibus:

« Comme on voit se refléter dans l'eau le visage et la forme de ceux qui s'y regardent, ainsi le coeur de l'homme se montre à celui qui est prudent (Pro. XXVII, 19) », c'est-à-dire à celui qui possède déjà la sagesse des Saints que la sainte Écriture appelle prudence.

De plus, ces esprits ainsi purifiés connaissent parfois d'autres vérités: ce n'est pas cependant toujours quand ils le veulent; car cela est le partage seulement des âmes qui en ont l'habitude infuse, et encore ne l'ont-elles pas toujours en tout, puisque ces faveurs dépendent du bon plaisir de Dieu.

Néanmoins nous devons savoir que ceux dont l'esprit est complètement purifié peuvent les uns plus que les autres, mais, avec la plus grande facilité et comme naturellement, connaître ce qu'il y a dans le coeur ou les pensées intimes, les inclinations et les qualités des autres. Ils le connaissent par des indices extérieurs, même très minimes; comme les paroles, les mouvements et autres signes. De même que le démon a ce pouvoir, parce qu'il est esprit, de même aussi l'homme spirituel le possède selon cette parole de l'Apôtre: Spiritualis autem judicat omnia: « L'homme spirituel juge de tout (I Cor. II, 15). »

Il dit encore: Spiritus omnia scrutatur, etiam profunda Dei: « L'esprit pénètre tout, jusqu'aux profondeurs de Dieu (Ibid. II, 10). »

Sans doute les personnes spirituelles ne peuvent pas naturellement connaître les pensées, ni le fond des coeurs, mais, aidées de la lumière surnaturelle, elles peuvent le découvrir dans les indices extérieurs. Elles peuvent, il est vrai, se tromper souvent en suivant ces indices, mais ordinairement elles sont dans le vrai. Toutefois il ne faut pas se fier à ce moyen de connaissance, car le démon s'y insinue d'une manière spéciale et avec beaucoup de subtilité, comme nous le dirons bientôt.

Voilà pourquoi on doit renoncer à ces connaissances et illustrations.

Quant aux faits et aux événements qui se passent parmi les hommes, le spirituel peut aussi en avoir connaissance, alors même qu'ils seraient éloignés. Nous en avons un exemple au quatrième livre des Rois. Giezi, serviteur d'Élisée, voulait lui cacher l'argent qu'il avait reçu de Naaman le Syrien. Mais Élisée lui dit: Nonne cor meum in praesenti erat, quando reversus est homo de curru suo in occursum tui? « Est-ce que par hasard mon coeur n'était pas présent quand Naaman revînt de son char à ta rencontre? ((IV Vulg.) II Rois, V, 26). »

Cela se passait spirituellement. Le prophète avait tout vu en esprit, comme s'il avait été présent de corps.

Nous en avons dans le même livre un autre exemple du même prophète. Élisée savait tout ce que le roi de Syrie traitait dans le secret avec ses princes, et il le révélait au roi d'Israël. Aussi les conseils du roi de Syrie demeuraient sans effet; et, voyant que tout se savait, il dit à ses conseillers: Quare non indicatis mihi, quis proditor mei sit apud regem Israel? « Pourquoi ne m'avez-vous pas révélé quel est celui d'entre vous qui me trahit près du roi d'Israël? (Ibid. VI, 11) »

Et alors un de ses serviteurs répondit: Nequaquam, Domine mi rex, sed Eliseus propheta qui est in Israel, indicat regi Israel omnia verba quaecumque locutus fueris in conclavi tuo: « Non, Seigneur mon Roi, il n'en est pas ainsi: c'est le prophète Élisée qui est en Israël et qui découvre au roi tout ce que vous dites dans le secret de votre conseil (Ibid, VI, 12). »

Ce double mode de connaissance des choses est encore comme les autres communiqué à l'âme passivement, sans le moindre concours de sa part. Il arrive en effet que l'âme, étant parfois fort loin de pensées de cette sorte et à une grande distance, reçoit la connaissance profonde de ce qu'elle entend ou de ce qu'elle lit, et le comprend beaucoup mieux que par le son des paroles; quelquefois même elle ne comprend pas ces paroles, comme par exemple si elle sont en latin et qu'elle l'ignore, et malgré cela elle en a une parfaite intelligence.

Si je parlais des artifices que le démon peut employer et emploie réellement dans ces sortes de connaissances et de communications, il y aurait beaucoup à dire, car ils sont très nombreux et très subtils. Il peut en effet, en usant de suggestion et en se servant des sens corporels, représenter à l'âme une foule de connaissances intellectuelles, et les graver si bien qu'elles semblent résolument véritables.

Si l'âme n'est pas humble et défiante d'elle-même, le démon lui fera croire certainement mille mensonges. Les suggestions, en effet, sont parfois très fortes, surtout quand l'âme participe encore à la faiblesse des sens; il y grave les connaissances avec tant de force, de persuasion et de poids, que l'âme a besoin alors de beaucoup de prières et d'énergie pour les repousser.

Il a coutume parfois de représenter les péchés d'autrui, le mauvais état des consciences, ou la perversité des âmes; et il le fait avec fausseté dans une lumière abondante. Son but unique est de ternir la réputation du prochain, et d'inspirer le désir de découvrir ce mal, sous le beau prétexte qu'il faut recommander ces âmes à Dieu, mais en réalité il cherche par là à ce que le péché se commette.

Sans doute Dieu représente quelquefois à de saintes âmes les nécessités du prochain, pour qu'on prie pour lui ou qu'on y porte remède. Ainsi par exemple, nous lisons qu'il découvrit à Jérémie la faiblesse du prophète Baruch pour qu'il lui montrât la conduite à suivre (Jér. XLV, 3). Mais très souvent c'est le démon qui, contre toute vérité, manifeste les défauts du prochain; il cherche à détruire sa réputation, à faire commettre des péchés et à jeter dans les angoisses, comme l'expérience nous l'apprend. D'autres fois il donne un grand poids à d'autres connaissances et il en inspire la conviction.

Toutes ces connaissances, qu'elles viennent de Dieu ou non, sont d'un très faible secours à l'âme qui voudrait s'en servir pour aller à Dieu. Au contraire, si elle ne veille pas à s'en détacher, non seulement ces connaissances la troubleront, mais lui porteront un grand tort et la feront tomber dans une foule d'erreurs. Car tous les dangers et tous les inconvénients qui peuvent se trouver dans les communications surnaturelles dont nous avons parlé jusqu'à présent peuvent se trouver ici; il y en a même de plus nombreux. Voilà pourquoi je n'ajoute qu'un mot.

Il faut veiller avec le plus grand soin à renoncer à de pareilles connaissances et s'appliquer à monter vers Dieu par le non-savoir, rendre toujours compte de son état au confesseur ou directeur spirituel, et s'en tenir constamment à ses conseils. Quant à lui, qu'il porte rapidement l'âme à s'affranchir de ces connaissances et à ne leur accorder aucune importance, car elles ne servent pas dans le chemin de l'union à Dieu, et, je le répète, comme ces choses sont reçues passivement dans l'âme, leur effet voulu par Dieu est toujours produit en elle, sans qu'elle y concoure.

Voilà pourquoi il me paraît inutile de parler de l'effet que produisent les connaissances véritables ou les connaissances fausses; ce serait une peine superflue et on n'en finirait plus: on ne saurait d'ailleurs exposer cette doctrine en peu de mots.

Car, comme ces connaissances sont très nombreuses et variées, leurs effets le sont également. Sans doute les connaissances bonnes produisent des effets qui sont bons et conduisent au bien, tandis que les connaissances mauvaises produisent des effets qui sont mauvais et conduisent au mal. Mais quand je dis ce qu'il faut les repousser toutes, j'ai dit ce qu'il faut pour qu'on évite de tomber dans l'erreur.

Méditons ….

à suivre …Chapitre 25



Eucharistie Colombe


_________________
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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Empty Re: *** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel " ***

Message par Maud Jeu 18 Mai - 8:09

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_51


La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 25


Où l’ on parle de second genre de révélations , ou des manifestations des secrets et mystères cachés
On montre comment elles peuvent servir à  l’union divine ou l’ empêcher, et comment le Démon peut ici tromper les âmes.


Le second genre de révélations, avons-nous dit, consiste dans la manifestation des secrets et des mystères cachés. Il peut être de deux sortes. La première concerne ce que Dieu est en lui-même, et elle renferme la révélation du mystère de la Très Sainte Trinité et de l'Unité de Dieu. La seconde concerne ce que Dieu est dans ses oeuvres, et elle renferme les autres articles de notre sainte foi catholique et toutes les propositions vraies qui peuvent en découler explicitement.

Les propositions renferment et comprennent un grand nombre de révélations des prophètes, de promesses et de menaces divines ainsi que des éléments touchant la foi qui devaient ou doivent arriver. On peut en outre y ramener beaucoup d'autres cas particuliers que Dieu révèle ordinairement soit sur l'univers en général, soit en particulier sur un royaume, une province, un état, une famille ou une personne déterminée.

Nos saintes Lettres nous fournissent de nombreux exemples de cette double révélation. On en rencontre spécialement dans tous les Prophètes. C'est là un fait tellement clair et obvie que je ne veux pas m'y arrêter. J'ajoute que ces révélations ne se font pas seulement par la parole; Dieu les exprime sous une foule de formes et de moyens: parfois il n'emploie que des paroles; et parfois il ne se sert que de signes, ou de figures, ou d'images, ou de similitudes; parfois il use en même temps de paroles et de symboles: c'est ce que nous voyons dans les Prophètes et spécialement dans l'Apocalypse.

Là nous trouvons non seulement tous les genres de révélations dont nous avons parlé, mais encore tous les divers modes que nous venons d'énumérer.

Or ces révélations qui appartiennent à la seconde catégorie, Dieu les accorde encore de nos jours à qui bon lui semble. Il a coutume de révéler à certaines personnes le temps qu'elles ont à vivre, les travaux qu'elles endureront, ce qui doit arriver à telle ou telle personne ou se passer dans tel ou tel royaume, et... Il découvre même des vérités renfermées dans les mystères de la foi et en donne à l'esprit l'intelligence; cependant ce n'est pas là ce qu'on appelle proprement une révélation puisqu'il s'agit d'une vérité déjà révélée, mais c'est plutôt une manifestation ou une exposition d'un dogme déjà connu.

Quant aux révélations de ce genre, elles se prêtent beaucoup à l'action du démon. Comme elles se font ordinairement par des paroles, des figures, des symboles, etc..., le démon peut très facilement en former de semblables; et il le peut beaucoup plus que quand elles se font seulement à l'esprit. Mais qu'il s'agisse de la première ou de la seconde catégorie, si la révélation vient à toucher notre foi ou nous apporter un enseignement nouveau et différent de celui que nous avons reçu, nous ne devons en aucune manière y donner notre consentement, alors même que nous aurions l'évidence qu'il nous est donné par un Ange du Ciel.

Telle est la recommandation de saint Paul: Sed licet nos, aut Angelus de caelo evangelizet vobis praeterquam quod evangelizavimus vobis, anathema sit: « Si nous vous annoncions, nous, ou un Ange du ciel, un autre évangile que celui que nous vous avons prêché, qu'il soit anathème (Gal. I, 8 ). »

Dès lors qu'il n'y a plus d'autres articles à révéler concernant la substance de notre foi que ceux qui l'ont déjà été à l'Église, non seulement nous ne devons pas accepter une nouveauté qui serait communiquée, mais il est prudent de veiller encore avec soin à rejeter les variations qui y seraient contenues.

Il convient pour la pureté de l'âme qu'elle reste dans la foi. Viendrait-on à manifester encore des vérités déjà révélées, il ne faudrait pas les croire pour ce motif qu'on nous les montre alors, mais parce qu'elles sont déjà suffisamment manifestées à l'Église, fermer les yeux de l'entendement à leur égard, s'attacher avec simplicité à la doctrine de l'Église et à la foi qu'elle professe et qui, comme le proclame saint Paul, nous vient par l'ouïe: Fides ex auditum (Rom. X, 17).

Qu'elle n'accorde pas facilement crédit et n'applique pas son entendement à ces vérités de la foi qui sont révélées de nouveau, alors même qu'elles lui paraîtraient plus conformes à la raison et plus vraies, si elle ne veut pas s'exposer à l'erreur. Le démon, en effet, pour nous tromper peu à peu et nous suggérer ses mensonges, commence par donner l'appât des vérités et de certaines choses très vraisemblables, par là il rassure l'âme et aussitôt après il la fait tomber dans l'erreur.

Il agit comme l'ouvrier qui coud le cuir avec du crin: il fait d'abord pénétrer le crin raide, et à la suite le crin souple qui sans lui n'aurait pu être introduit.

Qu'on y veille dont avec soin. Alors même qu'il serait vrai qu'il n'y a aucun danger de tomber dans de telles illusions, il convient souverainement à l'âme de ne pas chercher à avoir l'intelligence claire des choses de la foi, afin de conserver pur et entier le crédit que mérite la foi, et de se diriger, par la nuit obscure de l'entendement à la divine lumière de l'union. Il est extrêmement important de s'attacher aveuglément aux prophéties antiques, chaque fois qu'il se présente quelque nouvelle révélation.

Aussi l'apôtre saint Pierre, après avoir vu d'une certaine manière la gloire du Fils de Dieu sur la montagne du Thabor, nous dit néanmoins dans sa 2è épître canonique: Habemus firmiorem propheticum semonem; cui benefacitis attendentes:

Bien que la vision de Notre-Seigneur Jésus-Christ que nous avons eue sur la montagne soit très vraie, « nous avons cependant un témoignage plus assuré et plus certain: c'est celui de la parole prophétique qui nous est révélée; attachez-vous-y et vous ferez bien (II Pier. I, 19). »

S'il convient vraiment, pour les motifs indiqués, de fermer les yeux sur des propositions ou révélations nouvelles qui concerneraient la foi, à plus forte raison est-il nécessaire de ne donner ni consentement ni crédit aux autres révélations qui s'en éloigneraient; car le démon y prend ordinairement une si large part que je regarde comme impossible que l'on ne soit pas trompé dans le plus grand nombre d'entre elles, si l'on n'a pas la précaution de les rejeter, vu leur apparence de vérité et la conviction qu'il inspire.

Il les enveloppe, en effet, de si belles apparences et de tant de motifs de crédibilité, il les grave si profondément dans les sens et l'imagination, qu'il ne semble y avoir aucun doute à ce que les choses soient ainsi; l'âme y adhère et s'y affectionne, de telle sorte que, si elle n'a pas d'humilité, il sera difficile de la tirer de là et de lui faire croire le contraire.

Voilà pourquoi l'âme pure et simple, prudente et humble, doit employer toutes ses forces et toute sa diligence à repousser et à rejeter les révélations et les visions comme des tentations très dangereuses, puisque pour tendre à l'union d'amour non seulement il n'est pas nécessaire de les rechercher, mais il faut les repousser. C'est là ce que Salomon nous a donné à entendre par ces paroles: Quid necesse est homini majora se quaerere?: « Quelle nécessité y a-t-il pour l'homme de rechercher ce qui est au-dessus de ses aptitudes naturelles? (Eccl. VII, 1) »

C'est comme s'il avait dit: Pour être parfait, l'homme n'a pas besoin d'aspirer aux choses surnaturelles par des voies surnaturelles et extraordinaires qui sont au-dessus de sa capacité.

Quant aux objections qui pourraient être faites contre cette doctrine, il y a déjà été répondu aux chapitres XIXe et Xxe de ce Livre. Aussi j'y renvoie le lecteur, et je termine le sujet des révélations. Il suffit d'ailleurs à l'âme de savoir qu'il lui convient de s'en tenir prudemment à l'écart, si elle veut s'avancer pure et exempte d'erreur dans la nuit de la foi pour parvenir à l'union divine.


Méditons …

à suivre …Chapitre 26




  Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Ven 19 Mai - 7:39

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_52

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 26

Où l’ on traite des paroles intérieures qui sont communiquées surnaturellement à l’ Esprit .
On montre combien de sortes il y en a.
 

Le lecteur doit toujours se rappeler l'intention et la fin que je me suis proposés en écrivant ce livre; mon but a été de diriger l'âme au milieu de toutes les connaissances naturelles et surnaturelles, de la tenir à l'abri des illusions et des difficultés dans la pureté de la foi pour parvenir à l'union divine.

Il comprendra alors pourquoi, si je ne me suis pas étendu davantage sur les connaissances de l'âme et de la doctrine dont je m'occupe, et si je ne descends pas dans tous les détails et toutes les divisions que la raison peut-être exigerait, je ne suis pas cependant incomplet sur ce sujet.

Car il me semble que j'ai donné sur toute cette matière assez d'avis, de lumière et d'enseignement pour que l'âme sache se conduire avec prudence dans tous les cas intérieurs et extérieurs et continuer sa marche. Telle est la cause pour laquelle j'ai traité si brièvement les connaissances prophétiques, comme je l'ai fait d'ailleurs pour d'autres.

Il y aurait beaucoup plus à dire sur chacune d'elles, et si l'on devait traiter de leurs différences, de leurs modes et de la manière dont elles peuvent se produire, il me semble que l'on n'en finirait plus de les connaître.

Aussi me suis-je contenté de donner ce qui, d'après moi, en constitue la doctrine et la substance, et j'y ai ajouté les précautions qu'il faut suivre alors comme dans toutes les circonstances analogues qui peuvent se présenter.

J'agirai de même en traitant du troisième genre de connaissances que j'ai appelées paroles surnaturelles et qui peuvent se produire dans l'esprit des personnes spirituelles sans le concours des sens corporels. Bien qu'elles soient nombreuses et variées, je trouve qu'elles peuvent se ramener toutes à trois catégories, qu'on appelle paroles successives, paroles formelles et paroles substantielles.

Les paroles successives sont certaines paroles ou certains raisonnements que l'esprit a coutume de former et de produire en lui-même lorsqu'il est recueilli.

Les paroles formelles sont certaines paroles distinctes et précises que l'esprit ne produit pas par lui-même mais reçoit d'une tierce personne, qu'il soit recueilli ou non.

Les paroles substantielles sont d'autres paroles qui se produisent d'une façon précise dans l'esprit, qu'il soit recueilli ou non, et qui produisent et causent dans la substance de l'âme cette substance et vertu qu'elles signifient.

Nous allons traiter successivement de chacune de ces paroles.

Méditons ….

à suivre …Chapitre 27



Eucharistie Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Sam 20 Mai - 7:48

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 27



Où l’ on traite de la première catégorie de paroles que l’ Esprit  forme parfois au-dedans de lui-même, lorsque il est recueilli .
On en montre la cause ainsi que les avantages et inconvénients qui peuvent en résulter.



Ces paroles successives se produisent toujours lorsque l'esprit est recueilli et profondément plongé dans quelque considération. Lui-même discute sur la matière qui le captive, passe d'une pensée à l'autre, forme des paroles et des raisonnements très justes avec une si grande facilité et précision qu'il y découvre des choses qui lui étaient inconnues; il lui semble bien qu'il n'en est point l'auteur, mais que c'est une autre personne qui forme ces raisonnements dans son intérieur, qui répond ou qui enseigne.

Et, en vérité, il a bien raison de le penser ainsi, car il raisonne avec lui-même et se répond, comme s'il se trouvait avec une autre personne, et il en est bien ainsi d'une certaine manière. Bien que ce soit le même esprit qui agisse comme instrument, l'Esprit-Saint l'aide souvent à produire et à former ces pensées, ces paroles et ces raisonnements pleins de vérités. Il se les dit donc à lui-même, comme s'il se trouvait avec une tierce personne. L'entendement est alors uni à la vérité qu'il considère et profondément recueilli.

L'Esprit-Saint lui est uni par cette vérité, comme il l'est d'ailleurs à toute vérité.

De là vient que l'entendement, communiquant de cette sorte avec le Saint-Esprit moyennant cette vérité, forme successivement dans son intérieur les autres vérités qui sont en rapport avec celle qu'il considérait; mais c'est l'Esprit-Saint, son maître, qui lui ouvre la porte et lui communique sa lumière. Telle est l'une des manières dont il se sert pour instruire l'âme.

C'est ainsi que l'entendement éclairé et enseigné par ce maître comprend ces vérités et en même temps forme de lui-même ces paroles sur des vérités qui lui viennent d'autre part. Les paroles de la Genèse trouvent bien ici leur application:

« C'est la voix de Jacob, mais ce sont les mains d'Ésaü (Gén. XXVII, 22). » L'âme qui en est là ne pourra jamais se persuader que ces mots et ces paroles ne lui viennent pas d'une tierce personne, car elle ne sait pas avec quelle facilité l'entendement peut de lui-même former des paroles sur les pensées et vérités qui lui sont communiquées par une tierce personne.

Il est certain qu'il n'y a en soi aucune illusion dans cette communication faite à l'entendement, et dans cette illustration dont il est éclairé; mais il peut y en avoir, et il y en a souvent dans les paroles formelles et les raisonnements que l'entendement forme alors.

Cette lumière qui parfois lui est donnée est très subtile et très spirituelle; aussi l'entendement n'arrive-t-il pas à s'en faire une idée exacte, et c'est lui, comme nous l'avons dit, qui forme de lui-même ses raisonnements; de là vient que très souvent il en forme de faux, tandis que d'autres seront vraisemblables ou défectueux.

Comme au début il a déjà commencé à saisir le fil de la vérité, et qu'aussitôt après il y ajoute de lui-même son habileté ou plutôt la grossièreté de ses basses conceptions, il peut facilement varier selon les dispositions de sa capacité, et tout cela se passe comme si une troisième personne lui parlait.

J'ai connu une personne qui formait ces paroles successives. Or, au milieu de quelques paroles très vraies et substantielles qui regardaient le Très Saint Sacrement de l'Eucharistie, il y en avait d'autres qui étaient une hérésie manifeste.

Ce qui se passe de nos jours est quelque chose d'effrayant. Une âme quelconque est-elle déjà parvenue à quatre maravédis de méditation, et entend-elle quelques-unes de ces paroles intérieures au milieu de son recueillement, qu'aussitôt elle baptise le tout comme venant de Dieu; elle suppose qu'il en est ainsi, et elle répète: « Dieu m'a dit ceci.

Dieu m'a répondu cela ». Or il n'en est rien; comme nous l'avons remarqué, ce sont ces âmes qui le plus souvent se parlent ainsi à elles-mêmes.

De plus, le désir que ces âmes ont de ces paroles et l'affection qu'elles y portent intérieurement les amènent à se donner à elles-mêmes ces réponses, et elles s'imaginent que c'est Dieu qui leur répond et leur parle.

Aussi elles tombent dans de grandes extravagances si elles ne mettent pas un frein sérieux à ces tendances, et si leur directeur ne leur impose pas un renoncement absolu à ces sortes de discours.

Elles en retireront plus de bavardage et d'impureté d'âme que d'humilité et de mortification spirituelle; elle s'imagineront que ça été là une grande faveur et que Dieu a  parlé, tandis qu'il n'y aura eu presque rien, ou rien du tout, ou même moins que rien.

Car ce qui n'engendre ni humilité, ni charité, ni mortification, ni sainte simplicité, ni silence..., que peut-il être?

J'ajoute donc que ces paroles peuvent détourner beaucoup d'âmes de sa marche vers l'union divine, parce qu'elles l'éloignent beaucoup, si elle en fait cas, de l'abîme de la foi, où l'entendement doit rester dans l'obscurité, afin de s'avancer par amour dans la nuit de la foi, et non par des raisonnements nombreux.

On me dira peut-être: Pourquoi l'entendement doit-il se priver de ces vérités, puisque, comme nous l'avons dit, l'Esprit de Dieu les donne pour éclairer l'entendement, et qu'ainsi il ne peut être mauvais de s'en occuper? A cela je réponds que l'Esprit-Saint éclaire l'entendement qui est recueilli, et qu'il l'éclaire dans la mesure de ce recueillement, mais comme l'entendement ne peut trouver un autre recueillement plus parfait que celui qu'il puise dans la foi, l'Esprit-Saint ne l'éclairera jamais mieux que dans la voie de la foi.

Plus une âme est pure, plus elle est appliquée à vivre de la foi avec perfection, plus aussi elle reçoit la charité infuse de Dieu; or plus elle possède la charité, plus l'Esprit-Saint l'éclaire et lui communique ses dons: de telle sorte que la charité est la cause de ses dons et le moyen par lequel il les communique.

Sans doute, il est vrai que l'Esprit-Saint donne quelque lumière dans ces illustrations qu'il communique à l'âme sur certaines vérités, mais celle de la foi est très différente, sans qu'on puisse le comprendre clairement; la qualité de cette lumière est comme l'or le plus fin par rapport au métal le plus vil, et son abondance est comme celle de la mer comparée à la goutte d'eau.

Dans le premier cas l'âme reçoit la science d'une, de deux ou de trois vérités...; dans le second cas c'est la sagesse de Dieu qui lui est communiquée d'une manière générale, ou mieux, c'est le Fils de Dieu qui se communique lui-même à l'âme par la foi.

Vous me direz encore que toutes ces connaissances sont bonnes et que l'une n'empêche pas l'autre. Je réponds qu'elles sont un très grand inconvénient pour l'âme quand elle en fais quelque cas. Car elle s'occupe de choses claires et de peu d'importance, qui suffisent pour empêcher les communications qui se font dans l'abîme de la foi où Dieu l'instruit d'une manière secrète et surnaturelle, l'enrichit de vertu et de dons, sans même qu'elle puisse le comprendre.

Le fruit que ces communications successives doivent produire ne provient pas de ce que l'entendement s'y applique expressément; cette application aurait au contraire pour résultat d'éloigner ces connaissances selon cette parole de la Sagesse au livre des Cantiques: « Détournez de moi vos yeux, car ils me font prendre mon vol (Cant. VI, 4) », c'est-à-dire à aller loin de vous et à me retirer sur les hauteurs.

Mais elle doit agir purement et simplement, sans forcer son entendement à considérer ce qui lui est communiqué surnaturellement, et appliquer sa  volonté à aimer Dieu.

C'est par l'amour, en effet, que ces dons se communiquent; et ainsi ils se communiquent avec beaucoup plus d'abondance qu'auparavant.

Mais si, quand elle reçoit passivement ces faveurs surnaturelles, l'âme fait intervenir d'une manière active l'habileté naturelle de son entendement ou de quelque autre faculté, elle montre son inaptitude et son incapacité, et forcément elle doit modifier ces connaissances à sa manière et par suite en changer la nature; il en résulte qu'elle se trompera, formera des raisonnements personnels qui n'auront point la réalité ni l'apparence du surnaturel, mais seront au contraire très naturels, très erronés et très vils.

Il y a cependant certains entendements très vifs et très subtils qui, étant recueillis dans la considération de quelque vérité, discourent naturellement avec la plus grande facilité sur des pensées, s'expriment en paroles et en raisonnements pleins de sentiments, et s'imaginent ni plus ni moins que tout cela est de Dieu; mais il n'en est rien; c'est leur entendement qui, aidé de sa lumière naturelle, et quelque peu dégagé des opérations des sens, peut, sans un secours surnaturel, produire ce résultat et de plus grands encore. Les faits de ce genre sont nombreux.

Beaucoup d'âmes sont dans l'illusion sur ce point. Elles s'imaginent qu'elles sont élevées à une très haute oraison et qu'elles sont favorisées de communications intimes avec Dieu. Elles écrivent même ou font écrire ce qui se passe en elles. Et il arrive que tout cela n'est rien, qu'il n'y a pas la substance de la moindre vertu et ne sert qu'à entretenir la vaine complaisance.

Que ces âmes apprennent donc à ne faire aucun cas de ces paroles successives, mais à fixer la volonté dans un amour fort et humble, à agir et à souffrir comme le Fils de Dieu durant sa vie mortelle, à se mortifier en tout.

C'est là le chemin qui conduit à tous les biens spirituels, et non la multiplicité des discours intérieurs.

Il faut ajouter que le démon s'insinue souvent dans ce genre de paroles intérieures successives, surtout quand l'âme y a quelque inclination ou affection. Au moment où elle commence à se recueillir, le démon a coutume de lui offrir de nombreux sujets de digression; il présente à l'entendement, par ses suggestions, des pensées ou des paroles pour la faire tomber en la trompant très habilement avec toutes les apparences du vrai.

Telle est l'une des manières par lesquelles il se communique à ceux qui ont fait avec lui quelque pacte tacite ou formel. Il agit de la sorte avec certains hérétiques, et surtout avec les hérésiarques; il remplit leur entendement de pensées et de raisons très subtiles, fausses, ayant les apparences du vrai mais erronées.

De ce que nous venons de dire il s'ensuit que ces paroles successives qui sont communiquées à l'entendement peuvent provenir de trois causes, c'est-à-dire de l'Esprit divin qui le meut et l'éclaire, ou de la lumière naturelle de l'entendement, ou enfin du démon qui peut lui parler par suggestion.

Quant à dire maintenant quels sont les signes et les marques qui nous feront connaître que ces paroles procèdent de cette cause plutôt que de telle autre, il serait assez difficile de le préciser d'une manière complète; on peut cependant indiquer des signes généraux. Ainsi, par exemple, lorsque l'âme qui reçoit ces paroles et ces pensées est portée en même temps à aimer Dieu et s'embrase pour lui d'un amour plein d'humilité et de respect, c'est un signe que l'Esprit de Dieu passe par là; car il n'accorde jamais quelques faveurs sans qu'elles soient revêtues de ce caractère.

Lorsque ces paroles ne procèdent que de l'activité et de la lumière de l'entendement, c'est l'entendement seul qui produit tout ce travail, mais sans les vertus dont nous venons de parler, bien que la volonté puisse être portée d'une manière naturelle à aimer Dieu quand elle est instruite et éclairée sur la vérité.

Cependant, une fois la méditation passée, la volonté reste alors dans l'aridité, sans être pour cela portée à la vanité ou au mal, à moins que le démon ne la tente de nouveau sur ce point; mais cela ne se produit pas lorsque ces paroles viennent de l'Esprit-Saint. Car alors la volonté reste ordinairement pleine d'affection pour Dieu et portée au bien. Parfois néanmoins, la volonté se trouvera dans l'aridité, quoique la communication ait eu le Saint-Esprit pour auteur, Dieu le permettant ainsi pour le plus grand bien de l'âme.

D'autres fois encore, l'âme sentira faiblement ces opérations ou ces mouvements vers ces vertus, bien que ce qu'elle a éprouvé soit bon. Voilà pourquoi, je le répète, il est quelquefois difficile de connaître la différence qu'il y a entre les unes et les autres de ces paroles, vu la diversité des effets qu'elles produisent. Toutefois les effets dont nous venons de parler sont les plus ordinaires, bien qu'ils se manifestent avec plus ou moins d'abondance.

Les communications qui viennent du démon sont parfois elles-mêmes difficiles à reconnaître. Sans doute, elles laissent ordinairement la volonté dans la sécheresse par rapport à l'amour de Dieu et inclinent l'esprit à la vanité, à l'estime et à la complaisance de soi; mais parfois aussi elles engendrent une fausse humilité, et une ferveur pleine d'affection, qui repose sur l'amour-propre, et qui n'est que difficilement comprise, à moins que la personne ne soit très spirituelle.

Le démon agit de la sorte pour se dissimuler; il sait d'ailleurs très bien provoquer parfois des larmes au sujet des sentiments qu'il excite, afin d'arriver peu à peu par là à suggérer à l'âme les affections qui lui plaisent. Il ne néglige rien pour porter sans cesse la volonté à estimer ces communications intérieures, à en faire un très grand cas et à s'y attacher, afin que l'âme s'occupe non de ce qui est la vertu elle-même, mais de ce qui est une occasion de perdre celle qu'elle avait.

Il faut donc nécessairement se conduire avec prudence à l'égard de toutes ces paroles, pour n'être point trompé et ne pas s'exposer à des inquiétudes multiples. Il faut de plus n'en faire aucun cas, et ne s'appliquer qu'à une seule science, celle qui consiste à se diriger vers Dieu avec toute l'énergie de la volonté et à accomplir avec perfection sa loi et ses saints conseils. Telle est la sagesse des Saints.

Contentons-nous de connaître les mystères et les vérités avec simplicité et droiture comme l'Église nous les propose. Cela suffit pour embraser le coeur du plus grand amour, sans que nous allions nous jeter dans des recherches profondes et curieuses où, à moins d'un miracle, on est exposé au danger. Aussi saint Paul nous dit à ce sujet: « Il ne nous convient pas de savoir plus qu'il ne faut (Rom. XII, 3). »

Ce que nous venons de dire suffit pour expliquer ce sujet des paroles successives.

Méditons…

à suivre …Chapitre 28



  Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Dim 21 Mai - 7:51

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 28

Où l’ on traite des paroles intérieures qui se produisent formellement dans l’esprit ‘une manière surnaturelle .
On montre les dommages qu’elles peuvent causer et on indique les précautions qu’il faut prendre pour qu’elles ne se jettent pas dans l’ erreur.


La seconde catégorie de paroles intérieures renferme les paroles formelles. Elles se produisent parfois dans l'esprit, recueilli ou non, et par voie surnaturelle sans le concours d'aucun sens. Je les appelle formelles, parce qu'il semble formellement à l'esprit qu'elles lui sont adressées par une tierce personne, et qu'il n'y contribue en rien. Elles sont très différentes de celles dont nous venons de parler. Or cette différence vient non seulement de ce que l'esprit ne fait rien pour les produire, comme cela arrive dans les autres, mais je le répète, de ce qu'elles lui viennent parfois quand il n'est pas recueilli, et même très éloigné d'y songer; or il en est tout autrement pour les paroles de la première catégorie, ou paroles successives, qui se rapportent toujours à la vérité qu'on considère.

Ces paroles sont parfois très formelles; d'autres fois elles le sont moins; très souvent elles sont comme des pensées qui sont communiquées à l'esprit sous la forme d'une réponse ou autrement, comme si on lui parlait; quelquefois ce n'est qu'un mot, d'autres fois il y en a deux ou davantage; ou encore ce sont des paroles successives comme les précédentes, car elles ont coutume de durer, elles instruisent l'âme et discutent avec elle, sans que l'esprit y prenne part, et tout se passe comme si une personne s'entretenait avec une autre. Nous en avons un exemple dans Daniel qui nous dit, que « l'Ange parlait en lui (Dan. IX, 22). » C'était là un langage formel et successif qui avait la forme d'un raisonnement et qui instruisait Daniel, car l'Ange lui avait dit aussi qu'il était venu là pour l'instruire.

Ces paroles, quand elles ne sont que formelles, produisent peu d'effet dans l'âme; car ordinairement elles n'ont d'autre but que de lui donner un enseignement ou de l'éclairer sur quelque point; aussi, pour produire ce résultat, il n'est pas nécessaire que leur efficacité dépasse le but auquel elles sont destinées. Or ce but, quand les paroles sont de Dieu, est toujours atteint dans l'âme; car elles lui confèrent la promptitude à accomplir ce qui lui est commandé et la clarté sur ce qui lui est enseigné. Sans doute elles ne lui enlèvent pas toujours la répugnance et la difficulté; au contraire; elles l'augmentent en général. Dieu le dispose ainsi pour que l'âme s'instruise davantage et grandisse dans l'humilité, en un mot il agit pour son bien.

Dieu lui laisse ordinairement cette répugnance quand il lui commande des actes qui ont de l'éclat ou peuvent l'élever à quelque dignité, tandis que pour les choses inférieures et basses il lui inspire de la facilité et de l'empressement. Ainsi nous lisons dans « l'Exode » que Dieu prescrivit à Moïse d'aller trouver Pharaon et de délivrer son peuple, mais que Moïse éprouva une très grande répugnance à obéir (Ex. III, 10).

Il fallut que Dieu renouvelât trois fois son commandement et lui donnât des signes évidents de sa volonté. Et encore tout cela était insuffisant, jusqu'à ce qu'il lui donnât son frère Aaron qui devait l'accompagner et partager avec lui l'honneur de l'entreprise.

Il en arrive tout autrement lorsque les paroles et les communications viennent du démon. Il inspire de la facilité et de l'empressement pour les actions qui ont de l'éclat et de l'importance; mais il n'inspire que de la répugnance pour les choses humbles. Dieu, au contraire, cela est certain, a tant en horreur les âmes qui recherchent les dignités que, même quand il leur commande de les accepter et les leur impose, il ne veut pas qu'elles s'empressent d'obéir ou qu'elles aient le désir de commander.

Cette promptitude que Dieu inspire généralement par ces paroles formelles les différencie encore des paroles successives; celles-ci n'exercent pas une impression aussi puissante sur l'esprit, et ne suggèrent pas autant de promptitude; car les premières sont plus formelles ou plus explicites, et l'entendement y met moins du sien. Cela néanmoins n'empêche pas que certaines paroles successives produisent parfois plus d'effet, à cause de l'abondance de communication que l'Esprit divin fait à l'esprit humain; mais ce mode de communication est différent de l'autre sous beaucoup de rapports.

Lorsque l'âme entend ces paroles formelles, elle ne doute pas si c'est elle qui les profère; elle voit très bien le contraire, surtout quand elle est très éloignée de songer à ce qui lui est dit; et quand même elle aurait eu quelque pensée de ce genre, elle reconnaît clairement et distinctement que ces paroles viennent d'une autre source.

Or l'âme ne doit faire aucun cas de ces paroles formelles et les traiter comme les paroles successives. Sans quoi ce serait d'abord occuper l'esprit de ce qui n'est pas le moyen légitime ni prochain de l'union avec Dieu, comme l'est la foi, et de plus ce serait s'exposer à être très facilement trompé par le démon. Il arrive parfois, en effet, que l'on a de la peine à découvrir quelles sont les paroles qui viennent du bon Esprit, et quelles sont celles qui viennent de l'esprit mauvais. Comme ces paroles formelles, je le répète, ne produisent pas beaucoup d'effet, on peut à peine les distinguer, d'autant plus que celles du démon sont parfois plus efficaces chez les âmes imparfaites que celles du bon esprit chez les personnes spirituelles.

Mais qu'elles soient du bon ou du mauvais esprit, il n'y a pas à se presser d'exécuter ce qu'elles disent, ni à en faire cas. Néanmoins, on doit les exposer à un confesseur expérimenté, ou à une personne prudente et entendue pour qu'elle donne son avis et voie la conduite à tenir; et l'âme, d'après son conseil, se tiendra dans l'abnégation et le renoncement complet par rapport à ces paroles.

Si l'on ne trouve pas cette personne expérimentée, il est préférable de prendre ce que les paroles ont de substantiel et de sûr, sans d'ailleurs en faire cas, et de n'en parler à qui que ce soit. Car on pourrait très facilement rencontrer certaines personnes qui causeraient la perte de l'âme plutôt que son bien. Ce n'est pas le premier venu qui est capable de diriger les âmes; et dans une question de si haute importance, réussir ou se tromper peut avoir les plus graves conséquences.

Il faut bien remarquer, en outre, que l'âme ne doit d'elle-même rien faire ni accepter de ce que ces paroles lui disent, sans de mûres réflexions et un conseil autorisé. Car on est exposé dans cette matière à des illusions tellement subtiles et étranges que, à mon avis, l'âme qui ne sera pas ennemie de paroles de cette sorte ne pourra manquer de tomber très souvent dans des illusions plus ou moins profondes.

Comme aux chapitres 17, 18, 19 et 20 de ce livre, j'ai déjà parlé de ces illusions et dangers, ainsi que des précautions à prendre pour les éviter, j'y renvoie le lecteur, et je ne m'étends pas davantage ici sur ce sujet. Je dis seulement que la doctrine fondamentale sur ce sujet et la plus sûre, c'est de ne faire aucun cas de ces paroles malgré leurs apparences (L'édition du P. Gerardo suppose que le Saint a voulu dire « aunque mas BUENO parezca: quelque bonnes qu'elles paraissent »), et de nous guider en tout d'après les lumières de la raison et les enseignements que l'Église nous a donnés et nous donne chaque jour.

Méditons….


à suivre …Chapitre 29




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Message par Maud Lun 22 Mai - 7:47

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Saint_56

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 29


Où l’on traite des paroles substantielles qui sont communiquées intérieurement à l’ Esprit.
On montre la différence qu’il y a entre ces paroles et les paroles formelles , le profit qu’elles procurent , l’ abnégation et le respect où l’ âme doit se tenir à leur égard.


La troisième catégorie de paroles intérieures, avons-nous dit, comprend les paroles substantielles; bien qu'elles soient formelles comme les précédentes, puisqu'elles se gravent dans l'âme d'une manière très distincte, elles en diffèrent parce qu'elles produisent un effet vif et profond, ce qui n'existe pas pour les paroles qui ne sont que formelles. S'il est vrai de dire que toute parole substantielle est formelle, il ne s'ensuit pas que toute parole formelle soit substantielle, mais seulement celle-là qui, comme nous l'avons dit déjà, imprime substantiellement dans l'âme ce qu'elle signifie.

Il en serait ainsi, par exemple, si Notre-Seigneur disait formellement à une âme: « Sois bonne », et qu'immédiatement elle fût essentiellement bonne. Ou encore s'il lui disait: « Aime-moi », et qu'aussitôt elle possédât et sentît en elle-même la substance de l'amour, c'est-à-dire le véritable amour de Dieu; ou encore si, la voyant en proie à une crainte excessive, il lui disait: « Ne crains pas », et qu'elle se sentît tout à coup pleine d'énergie et en paix.

Car la parole de Dieu, comme dit le Sage, est pleine de puissance (Eccl. VIII. 4). Elle produit substantiellement dans l'âme ce qu'elle signifie. C'est là ce qu'indique David dans le Psaume: « Le Seigneur donnera à sa voix une vertu pleine de force (Ps. LXVII, 34). » C'est ce qu'il fit pour Abraham quand il lui dit: « Marche en ma présence et sois parfait (Ge. XVII, 1). » Et aussitôt Abraham fut parfait, et ne cessa de se tenir plein de respect sous le regard de Dieu. Telle est la puissance que Notre-Seigneur, d'après le saint Évangile, manifesta dans ses paroles; il ne disait qu'un mot et aussitôt il guérissait les malades et ressuscitait les morts.

C'est de cette sorte que sont les paroles substantielles qu'il adresse à certaines âmes. Elles sont d'une telle importance et d'un si haut prix qu'elles communiquent à l'âme la vie, la vertu et un bien incomparable. Parfois même une seule de ces paroles lui procure plus de bien que tout ce qu'elle a pu acquérir de méritoire dans toute sa vie.

Lorsque l'âme entend une parole de ce genre, elle n'a rien à faire par elle-même, ni à désirer, ni à refuser, ni à rejeter, ni à craindre. Elle n'a pas à se préoccuper d'accomplir ce qu'elles signifient. Car Dieu n'adresse jamais à l'âme ces paroles substantielles pour qu'elle les mette en oeuvre, mais pour les réaliser lui-même dans cette âme; et c'est là ce qui les différencie des paroles formelles et des paroles successives. Je dis que l'âme n'a pas à vouloir ou non ici, car son consentement n'est pas nécessaire pour que Dieu agisse, comme sa résistance ne suffirait pas à empêcher l'effet que Dieu produit. Mais elle doit se résigner et se tenir dans l'humilité.

L'âme n'a pas à rejeter ces faveurs, car leur effet est déjà substantiellement gravé en elle, et il est enrichi de biens divins; car elle le reçoit passivement, et n'y contribue en rien. Elle n'a pas non plus à craindre quelque illusion. Car ni l'entendement ni le démon ne peuvent intervenir ici; ce malin esprit n'arrivera jamais à produire passivement dans une âme quelconque un effet substantiel de manière à graver en elle l'effet habituel de sa parole. J'excepte le cas où elle se serait donnée à lui par un pacte volontaire et où la possédant en maître, il y imprimerait non des effets de bien mais des effets pleins de malice.

Dès lors que cette âme lui est unie par une perversité volontaire, il est très facile au démon d'imprimer en elle les effets des paroles pleines de perversité. L'expérience nous montre encore qu'il agit même sur les âmes bonnes par des suggestions nombreuses et puissantes et produit en elles d'étranges effets; mais quand les âmes sont mauvaises, il est capable de consommer le mal en elles.

Quant à imprimer dans l'âme par ses paroles des effets qui soient assimilés à ces bons effets dont nous avons parlé, il en est incapable. Car il n'y a pas de comparaison possible entre ses paroles et celles de Dieu; toutes ne sont rien à côté de celles de Dieu, et leur effet n'est rien à côté de l'effet produit par celles de Dieu. Voilà pourquoi Dieu nous dit par Jérémie « Quelle comparaison y a-t-il entre la paille et le blé? Est-ce que mes paroles ne sont pas comme le feu, ou comme le marteau qui brise les pierres? (Jer. XXIII, 28-29) »

Ces paroles substantielles servent donc beaucoup à l'union de l'âme avec Dieu. Plus elles sont intérieures et plus elles sont substantielles, et par suite plus elles apportent de bien. Heureuse l'âme à qui Dieu les adresse! « Parlez, Seigneur, parce que votre serviteur écoute (Rois, III, 10) ».

Méditons…

à suivre …Chapitre 30




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Message par Maud Mar 23 Mai - 7:11

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 30


Où l’ on traite des connaissances que l’ entendement reçoit par voie surnaturelle .
On en explore la cause , ainsi que l’ attitude que l‘ âme doit tenir pour ne pas y trouver un obstacle à son union avec Dieu.


Il nous faut traiter maintenant de la quatrième et dernière catégorie des connaissances intellectuelles. Ces connaissances, avons-nous dit, peuvent être communiquées à l'entendement par les sentiments spirituels qui se manifestent très souvent d'une manière surnaturelle à l'homme intérieur. Nous les classons parmi les connaissances distinctes de celles de l'entendement.

Ces sentiments spirituels distincts peuvent être de deux sortes. La première comprend les sentiments qui résident dans l'affection de la volonté; la seconde, les sentiments qui résident dans la substance de l'âme (Les éditions antérieures disaient:

« La seconde comprend les sentiments qui, tout en étant dans la volonté, sont si intenses, si élevés, si profonds et si intérieurs, qu'ils semblent ne pas la toucher, mais se produire dans la substance même de l'âme ».

Cette phrase est ajoutée, comme le prouve l'autorité des manuscrits et ce qu'ils disent immédiatement, ce qui d'ailleurs sera répété un peu plus loin. Édition P. Gerardo). L'une et l'autre peuvent renfermer une grande variété.


Les premiers sentiments, quand ils viennent de Dieu, sont très élevés; mais les seconds, qui résident dans la substance de l'âme, les surpassent et produisent les plus grands biens et les plus grands avantages.

Ni l'âme ni son guide ne peuvent savoir ni comprendre la cause d'où elles procèdent, ni par quelles voies ni pour quelles oeuvres Dieu accorde de pareilles faveurs; car elles ne dépendent nullement des oeuvres que l'âme accomplit, ni des considérations qu'elle fait, bien que ces oeuvres et ces considérations soient de bonnes dispositions pour les recevoir. Dieu les donne à qui il veut, comme il veut et pour le but qu'il veut.

Une personne aura pratiqué beaucoup de bonnes oeuvres, et Dieu ne lui donnera pas de ces touches; une autre aura fait beaucoup moins, et elle recevra des touches très élevées et en très grande abondance. Il n'est donc pas nécessaire que l'âme soit actuellement occupée de choses spirituelles pour que Dieu lui donne de ces touches qui provoquent les sentiments dont nous parlons; cependant, si elle en était occupée, elle serait bien mieux préparée à recevoir ces faveurs. Mais le plus souvent ces faveurs lui sont accordées au moment où elle y pense le moins.

Or parmi ces touches divines, il y en a qui sont bien caractérisées mais qui passent promptement, et il y en a d'autres qui ne sont pas aussi distinctes et qui durent plus longtemps.

Ces sentiments, tels que nous les comprenons ici, n'appartiennent pas seulement à l'entendement, mais à la volonté. Aussi mon intention n'est pas d'en traiter maintenant d'une façon expresse. Je me réserve de le faire lorsque dans le troisième Livre je traiterai de la nuit de la volonté et de la purification qu'elle doit apporter dans ses affections. Mais comme bien souvent,  et même la plupart du temps, ils procurent à l'entendement une connaissance, une notice ou une lumière, il convient d'en faire mention ici sous ce rapport seulement.

Nous devons donc savoir que de tous ces sentiments, aussi bien ceux de la volonté que ceux de la substance de l'âme, bien qu'ils soient durables et successifs, rejaillit, je le répète, sur l'entendement une impression de connaissance et de lumière. Cette impression est ordinairement une touche très élevée de Dieu et pleine de suavité pour l'entendement; on  ne saurait l'exprimer, non plus que le sentiment qui en et la source. Ces connaissances sont tantôt d'une sorte, tantôt d'une autre; elles sont parfois plus élevées et plus claires, parfois elles le sont moins; cela dépend des touches de Dieu, qui causent les sentiments d'où elles procèdent et de la qualité de ces sentiments.

Il n'est pas nécessaire ici de multiplier les paroles pour donner un avis et pour porter, au milieu de ces connaissances, l'entendement à se tenir dans la foi s'il veut parvenir à l'union avec Dieu. Car dès lors que les sentiments dont nous avons parlé se produisent d'une manière passive dans l'âme, sans qu'elle contribue en rien pour les recevoir, de même les connaissances qui en résultent sont reçues passivement dans l'entendement que les philosophes appellent intellect passible, sans qu'il fasse rien personnellement dans ce but.

Aussi afin d'éviter toute erreur qui proviendrait de son intervention et serait un obstacle à ces faveurs, il ne doit y rien faire, garder une attitude passive, et ne pas y intervenir par ses aptitudes naturelles.

Car, comme nous l'avons dit en traitant des paroles successives, l'entendement pourrait très facilement, avec son activité, troubler et dissiper ces connaissances si délicates qui sont des lumières surnaturelles pleines de délices, que par sa nature il ne peut comprendre, mais qu'il peut seulement recevoir.

Voilà pourquoi il ne doit pas chercher à se les procurer, ni avoir même le désir de les recevoir. De la sorte, il n'en formera pas d'autres qui seraient de son propre fond; de plus, il ne s'exposera pas à ce que le démon vienne à son tour lui suggérer d'autres connaissances et formes; car le démon s'entend très bien à en former par l'influence des sens corporels, lorsque l'âme les recherche par l'intermédiaire des sentiments dont nous avons parlé.

L'âme doit donc se tenir dans le détachement et l'humilité et garder une attitude passive; c'est passivement qu'elle reçoit de Dieu ces faveurs. Dieu les lui communique quand il le juge bon, dès lors qu'il la trouve humble et détachée de tout. Si elle agit de la sorte, elle ne mettra pas obstacle aux avantages que ces connaissances procurent pour l'union divine et qui sont très grands, car toutes ces connaissances sont des touches de l'union divine qui s'accomplit d'une manière passive dans l'âme.

(Toutes les éditions antérieures à celles de P. Gerardo,  1912 plaçaient ici un long paragraphe qui ne se trouve pas dans les principaux manuscrits. Nous le donnons cependant en note. Le P. Silverio attribue ce paragraphe au P. Jérôme de Saint-Joseph.

« Nous avons parlé, dans ce livre, du renoncement absolu et de la contemplation passive; nous avons montré que l'âme doit se laisser conduire par Dieu dans l'oubli de tout le créé et le détachement de toute image ou figure, s'arrêter avec une vue simple sur la vérité suprême.

Or toute cette doctrine s'applique non seulement à cet acte de contemplation très parfaite dont la quiétude sublime et complètement surnaturelle est empêchée encore par les filles de Jérusalem, c'est-à-dire par les pieux discours et les méditations, si on voulait en user alors, mais aussi à tout le temps durant lequel Notre-Seigneur communique à l'âme cette attention simple, générale et pleine d'amour dont nous avons parlé, ou durant lequel l'âme, aidée de la grâce, s'y applique elle-même.

Car alors elle doit toujours veiller à garder le calme de l'esprit, sans s'occuper d'autres formes, images ou connaissances particulières, à moins que ce ne soit d'une manière tout à fait transitoire, et sans les rechercher, positivement, et qu'on y porte un amour suave dans le but de s'embraser de plus en plus de charité.

Mais, en dehors de cet état, l'âme doit, dans tous ses exercices, tous ses actes et toutes ses oeuvres, s'aider de pieux souvenirs et de saintes méditations, qui soient de nature à augmenter sa dévotion et à procurer son avancement, et surtout considérer la vie, la Passion et la mort de Notre-Seigneur Jésus-Christ, afin d'y conformer ses actions, ses exercices et sa vie. »)

Terminons là ce traité des connaissances surnaturelles de l'entendement et de la manière dont il doit les considérer pour marcher par le chemin de la foi à l'union divine. Il me semble en avoir dit assez pour que l'âme, quelles que soient les connaissances qui lui adviennent, trouve la doctrine et les précautions qui lui sont nécessaires dans l'enseignement que nous avons donné sur les diverses sortes de connaissances.

Et supposé le cas qui ne paraîtrait pas compris dans l'une des quatre catégories dont il a été parlé, il me semble néanmoins qu'il n'y en a pas un seul que l'on ne puisse ramener à l'une d'elles. On pourra donc trouver la lumière et les conseils dans ce qui a été exposé pour des circonstances semblables.

Cela dit, nous allons passer au troisième Livre, où, avec l'aide de Dieu, nous parlerons de la purification spirituelle intérieure de la volonté, par rapport à ses affections intérieures, que nous appelons ici la nuit active (Les anciennes éditions ajoutaient ici le paragraphe suivant:

« Je vous prie donc, sage lecteur, de me prêter une attention bienveillante et soutenue. Car sans cette condition tout enseignement, si élevé et si parfait qu'il soit, ne procurerait pas le profit qu'il contient, et on n'en aurait pas l'estime qu'il mérite; à plus forte raison en serait-il de la sorte, à cause de mon style qui est si souvent fort défectueux. »).

Méditons ….

à suivre … Livre troisième … Sommaire



  Eucharistie    Colombe


_________________
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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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Message par Maud Mer 24 Mai - 7:25

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 La Montée du Carmel – Livre Troisième – Sommaire


Où l’on traite de la Purification et de la Nuit active de la mémoire et de la volonté .
On enseigne la conduite que l’ âme  doit tenir à l’ égard  des actes de ces deux puissances pour arriver à l’ Union avec Dieu par la perfection de l’ Espérance et de la Charité


Nous avons déjà montré comment l'entendement, première puissance de l'âme, doit se diriger dans toutes les connaissances qu'il acquiert, d'après les lumières de la foi, qui est la première des vertus théologales, afin qu'il puisse s'unir à Dieu par la pureté de cette vertu.

Il nous reste maintenant à accomplir le même travail en parlant des deux autres puissances de l'âme, qui sont la mémoire et la volonté, afin que, purifiées elles aussi dans leurs rapports avec leurs connaissances respectives, l'âme arrive à s'unir à Dieu par une espérance et une clarté parfaite.

C'est ce que nous ferons brièvement dans ce troisième Livre. Ayant déjà établi que l'entendement est le réservoir de tous les objets de ces puissances, nous avons par le fait même accompli une grande partie de la tâche que nous nous proposons.

Il ne sera donc pas nécessaire de nous étendre aussi longuement sur ces deux puissances que sur la première. Il n'est pas possible en effet que l'homme adonné à la spiritualité, qui a bien formé son entendement à suivre les enseignements de la foi dont nous avons parlé, n'instruise pas en même temps les deux autres puissances dans la pratique des deux autres vertus d'espérance et de charité; car les opérations des unes dépendent des opérations de autre.

Cependant, pour nous conformer à notre plan et pour mieux donner à comprendre ce sujet, il faut en parler d'une manière précise et déterminée.

Nous parlerons donc ici des appréhensions propres de chacune de ces facultés, et tout d'abord de celles de la mémoire. J'en ferai les distinctions qui seront suffisantes pour le but que je me propose.

Or ces distinctions nous pouvons les tirer des objets mêmes de la mémoire, qui sont au nombre de trois, à savoir: naturels, surnaturels imaginaires, et spirituels; d'après ces trois objets, il y a aussi trois sortes de connaissances pour la mémoire: les naturelles, les surnaturelles imaginaires et les spirituelles. Avec l'aide de Dieu, nous en traiterons ici, et nous commencerons par les connaissances naturelles qui proviennent d'objets plus extérieurs.

Nous traiterons ensuite des affections de la volonté, et ainsi nous terminerons ce troisième livre de la Nuit active de l'esprit.

Méditons ….

à suivre …  Chapitre 1



Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Jeu 25 Mai - 7:24

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 La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 1


Où l’ on traite des connaissances naturelles de la mémoire.
On montre comment elle doit s’ en détacher pour que l’ âme puisse s’unir à Dieu par cette  puissance .



Il est nécessaire au lecteur de ne point perdre de vue dans chacun de ces livres le but que nous nous proposons. Sans cela bien des doutes pourraient lui venir en lisant soit ce que nous venons de dire de l'entendement, soit ce que nous dirons à présent de la mémoire et ensuite de la volonté. En voyant comment nous réduisons à néant les puissances à l'égard de leurs opérations respectives, il lui semblera peut être qu'au lieu d'élever l'édifice de la vie spirituelle, nous le détruisons. Et cela serait vrai si nous ne nous adressions qu'à des commençants, car il leur convient de se préparer encore par des méditations discursives et des raisonnements.

Mais notre but en ce moment est d'enseigner le moyen de franchir ce degré pour arriver par la contemplation à l'union divine; voilà pourquoi tous ces moyens et tous ces exercices sensibles des puissances doivent être abandonnés et mis dans le silence, afin que Dieu opère par lui-même dans l'âme l'union avec lui. I

l faut donc débarrasser les puissances, les dépouiller, les priver de leur droit naturel et de leurs opérations; c'est par là qu'elles seront disposées à recevoir des grâces infuses et des lumières surnaturelles. Leur capacité naturelle ne saurait les aider à accomplir un acte si élevé, elle y serait plutôt un obstacle; les puissances doivent donc la perdre de vue. S'il est vrai, comme il l'est en réalité, que l'âme doit arriver peu à peu à connaître Dieu plutôt parce qu'il n'est pas que parce qu'il est, il s'ensuit nécessairement que, pour aller à lui, elle doit procéder par le renoncement, le détachement complet et absolu de toutes ses connaissances naturelles et surnaturelles.

Tel est le sujet dont nous allons nous occuper maintenant en parlant de la mémoire; nous la tirerons des limites et des bornes de sa nature, nous l'élèverons au-dessus d'elle-même, c'est-à-dire au-dessus de toute connaissance distincte, de toute possession sensible, pour la placer dans la souveraine espérance en Dieu qui est l'Être incompréhensible.

Je commence donc par les connaissances naturelles. Je dis que ces connaissances naturelles de la mémoire sont toutes celles qu'elle peut former des objets à l'aide des cinq sens corporels: l'ouïe, la vue, l'odorat, le goût et le tact, ainsi que toutes les autres de ce genre qu'elle pourrait fabriquer et imaginer. Or elle doit se dépouiller et se défaire de toutes ces connaissances et imaginations, travailler même à en perdre le souvenir, de telle sorte qu'elle n'en garde aucune impression ni aucune trace et soit dans le dénûment absolu, comme si rien ne s'était passé en elle, dans l'oubli et l'abstraction de tout. La mémoire ne peut faire moins que de s'annihiler par rapport à toutes ces formes, si elle doit s'unir à Dieu.

Car l'amour avec Dieu ne saurait exister, tant qu'elle ne sera pas complètement séparée de toutes les formes qui ne sont pas Dieu. Dieu en effet, comme nous l'avons dit dans le nuit de l'entendement, n'est pas renfermé dans quelque forme ou représentation distincte. Or si, comme l'enseigne notre Rédempteur, « on ne peut servir deux maîtres à la fois (Mat. VI, 24) », la mémoire ne saurait être parfaitement unie à Dieu, si elle est encore unie à des formes et à des représentations distinctes.

Mais Dieu n'a ni forme ni image qui puissent être comprises par la mémoire; il s'ensuit donc que quand l'âme est unie à Dieu, comme le prouve l'expérience de chaque jour, elle est comme si elle n'avait ni forme ni figure, l'imagination n'agit plus, et la mémoire enivrée du souverain bien est dans l'oubli de tout et ne se souvenant de rien. Cette divine union, en effet, opère le vide dans l'imagination, qu'elle purifie de toutes les formes et connaissances pour l'élever à un état surnaturel.

C'est quelque chose d'extraordinaire que ce qui se passe alors parfois. Il arrive en effet quelquefois, quand Dieu accorde ces touches d'union à la mémoire, qu'il se produit tout à coup dans le cerveau, à cette partie où elle a son siège, un tressaillement si sensible qu'il semble que l'on s'évanouit, que l'on perd absolument le jugement et l'usage des sens. Cet effet est plus ou moins grand, selon la puissance de la touche divine.

Mais alors, je le répète, la mémoire est dégagée et purifiée de toutes ses connaissances; elle est comme hors d'elle-même, et parfois si oublieuse d'elle-même qu'elle doit faire un grand effort pour se rappeler quelque chose. Cet oubli de la mémoire et cette suspension de l'imagination sont tels quelquefois, par suite de l'union de la mémoire avec Dieu, qu'il s'écoule beaucoup de temps sans qu'on s'en aperçoive et sans qu'on sache ce qui s'est passé.

Et comme l'imagination est parfois suspendue alors, viendrait-on à faire ce qui devrait lui causer de la souffrance, elle ne le sent point, parce que sans imagination il n'y a pas de sentiment; elle ne songe même pas, puisqu'il n'y a pas de pensée.

Aussi, pour que Dieu vienne produire ces touches d'union, il convient à l'âme de purifier la mémoire, comme nous l'avons dit, de toutes les connaissances sensibles. Mais nous devons remarquer que ces suspensions dont il vient d'être parlé n'existent plus ainsi chez les parfaits, car ils sont arrivés à l'union parfaite, et ces suspensions n'ont lieu que dans les commencements de l'union.

Vous me direz peut-être: Tout cela est bon, mais ce qui en découle, c'est qu'on détruit l'usage naturel et le cours régulier des puissances; c'est que, de plus, l'homme devient semblable à la bête, oublieux de tout, et ce qui est pire encore, il ne raisonne plus et ne songe plus aux exigences et aux opérations de la nature. Or Dieu ne détruit pas la nature; au contraire, il la perfectionne; mais d'après vos principes il s'ensuit nécessairement que vous la détruisez, car l'homme ne se souvient plus des principes de la moralité et de la raison pour agir, ni de sa nature pour les mettre en pratique; car il ne peut se souvenir de rien de tout cela, dès lors qu'il se dégage de toutes les connaissances et perceptions qui sont les moyens de réminiscences.

A cette objection je réponds qu'il en est vraiment ainsi. Plus la mémoire s'unit à Dieu, et plus les connaissances distinctes qu'elle avait s'affaiblissent, jusqu'à ce qu'elles se perdent complètement. Cela a lieu quand par sa perfection elle est parvenue à l'état même de l'union. Au début de l'union, quand le travail de l'union se fait, il ne peut manquer d'y avoir un grand oubli de toutes choses, puisque leurs formes et leurs perfections s'effacent peu à peu de la mémoire.

Aussi fait-on beaucoup de fautes dans les rapports extérieurs que l'on a avec le prochain; on ne se souvient plus de manger ou de boire; on oublie si l'on a fait une chose ou non, si on l'a vue ou non, si on a dit une parole ou non; la mémoire est absorbée en Dieu. Mais quand l'âme a déjà l'habitude de l'union, ce qui est pour elle le souverain bien, elle n'a plus d'oublis de ce genre dans ce qui concerne sa vie morale et naturelle.

Au contraire, elle manifeste une perfection supérieure dans toutes les actions qui sont convenables ou nécessaires, bien que ces actions ne proviennent plus des connaissances et des perceptions de la mémoire; car, je le répète, quand il y a l'habitude de l'union, ce qui est déjà un état surnaturel, la mémoire et les autres puissances perdent complètement leurs opérations naturelles; elles sont élevées de leur être naturel à celui de Dieu qui est surnaturel. La mémoire, étant donc ainsi transformée en Dieu, ne peut plus recevoir l'impression des formes et des connaissances naturelles. Dans cet état, toutes les opérations de la mémoire et des autres puissances sont divines. Dieu, en effet, les possède, comme un Maître absolu, par suite de leur transformation en lui; c'est lui qui les meut et leur commande divinement, selon son Esprit et sa volonté et cela s'accomplit de telle sorte que les opérations de Dieu et de ces puissances de l'âme ne sont pas distinctes, et que celles de l'âme sont celles de Dieu.

Ce sont donc des opérations divines, en tant que « celui qui s'unit à Dieu ne fait qu'un Esprit avec lui (I Cor. VI, 17) ».

De là il résulte que les opérations de l'âme qui est dans l'union proviennent du Saint-Esprit et par conséquent sont divines. Il en résulte encore que les oeuvres de ces âmes sont les seules qui soient convenables et conformes à la raison, sans être jamais défectueuses; car l'Esprit de Dieu leur donne à connaître ce qu'elles doivent connaître, et les laisse ignorer ce qu'elles doivent ignorer, ou se rappeler ce dont elles doivent se souvenir à l'aide de représentations ou non, ou bien oublier ce qu'il faut oublier, ou aimer ce qu'elles doivent aimer, et ne pas aimer ce qui n'est pas en Dieu. Ainsi donc tous les premiers mouvements des puissances de ces âmes sont divins.

Il ne faut donc pas s'étonner si les mouvements et les opérations de ces puissances sont divins, dès lors qu'ils sont transformés dans l'être de Dieu.

Je veux apporter quelques exemples de ces opérations. En voici un. Une personne demande à une autre qui est en état de la recommander à Dieu. Or cette dernière ne conserve dans sa mémoire aucune impression, aucune connaissance de ce qui lui a été demandé. Mais, s'il convient de la recommander à Dieu, et si Dieu veut agréer la prière qui lui sera faite, il agira sur la volonté de cette personne, et lui inspirera le désir de faire ce qui lui a été demandé. Si Dieu ne veut pas de cette prière, l'âme aura beau s'efforcer de la faire, elle n'y réussira pas, elle n'en aura même pas le désir. Parfois même Dieu lui suggérera de prier pour d'autres qu'elle ne connaît point ou dont elle n'a jamais entendu parler.

Cela vient de ce que c'est Dieu seul, comme je l'ai dit, qui meut de pareilles âmes à accomplir les oeuvres qui sont conformes à sa volonté ou à ses desseins, sans qu'elles puissent se porter à d'autres; voilà pourquoi les oeuvres et les prières de ces âmes sont toujours couronnées de succès.

Telles étaient celles de l'auguste Mère de Dieu. Dès le premier instant de son existence, elle fut élevée à cet état suprême. Elle n'eut jamais dans son âme l'impression quelconque d'une créature qui pût la détourner de Dieu; elle ne se dirigea jamais d'après une impression de cette sorte, et l'Esprit-Saint fut son guide.

Voici un autre exemple. Une personne doit à tel moment fixé s'occuper d'une affaire nécessaire. Elle n'en a aucun souvenir qui lui vienne par la voie d'une forme imaginaire; mais, sans qu'elle sache comment, sa mémoire recevra cette motion dont nous avons parlé au moment et de la manière qu'il convient pour agir avec succès. L'Esprit-Saint lui donne ses lumières non seulement dans ces circonstances, amis encore dans une foule d'autres faits ou d'événements qui arrivent ou arriveront, alors même qu'elle en serait éloignée.

Ces connaissances, qui parfois lui viennent par la voie des formes intellectuelles, lui sont très souvent communiquées sans aucune forme sensible; l'âme elle-même ignore comment elle les a reçues; mais elles lui sont données par la Sagesse divine; car, les âmes de cette sorte s'exercent à ne savoir comprendre par leurs puissances naturelles aucune des choses qui seraient pour elles un obstacle à l'union; aussi elles en viennent généralement, comme nous l'avons dit à l'occasion de la montagne figurée au commencement de ce livre, à tout connaître, selon que le dit le Sage: « L'auteur de toutes choses, la Sagesse, m'a tout appris (Sag. VII, 21) ».

Mais, me direz-vous peut-être, il est impossible à l'âme de dégager sa mémoire et de la dépouiller si bien des images et représentations qu'elle puisse arriver à un état si élevé. Il y a, en effet, ici deux difficultés qui sont au-dessus des forces et de la capacité de l'homme: la première qui est de se dépouiller de sa nature et de ses aptitudes naturelles, ce qui ne saurait se réaliser; et la seconde, qui est encore plus ardue, est d'atteindre le surnaturel et de s'unir à lui. En réalité, il est impossible d'arriver à ce résultat avec les seules forces de la nature.

Il est certain que c'est Dieu qui doit élever l'âme à cet état surnaturel. Quant à l'âme, elle doit ne rien négliger pour s'y disposer, et cela, elle le peut naturellement, surtout avec les secours que Dieu lui donne progressivement. Voilà pourquoi, au fur et à mesure qu'elle avance dans le renoncement et ce détachement de toutes formes sensibles, Dieu lui donne une plus grande possession de l'union. Or ce résultat, s'opère en elle passivement, comme nous le dirons, s'il plaît à Dieu, lorsque nous traiterons de la Nuit passive de l'âme.

Et ainsi, c'est quand Dieu le jugera bon et selon la disposition où l'âme sera parvenue qu'il lui donnera l'union parfaite par mode d'habitude.

Quant à ces divins effets que produit l'union lorsqu'elle est parfaite, tant du côté de l'entendement que du côté de la mémoire et de la volonté, nous n'en parlerons pas dans cette nuit et purification active; car elle seule ne suffit pas pour faire l'union divine. Nous en reparlerons dans la nuit passive par laquelle s'opère l'union de l'âme à Dieu. Je ne traiterai donc maintenant que du moyen nécessaire pour que la mémoire se dispose activement, et autant que cela dépend d'elle, à entrer dans cette nuit ou purification active.

Ce moyen consiste en ce que l'âme adonnée à la vie spirituelle observe bien l'avis suivant: Tout ce qui frappera la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût ou le tact, elle veillera à ne pas s'y attacher et à n'en rien conserver dans sa mémoire; elle s'appliquera à l'oublier tout de suite, et y travaillera même, s'il le faut, avec ce zèle que l'on met à se rappeler d'autres souvenirs. Elle ne doit laisser dans sa mémoire aucun connaissance ou impression des choses d'ici-bas, qu'elle considérera comme si elles n'existaient pas; sa mémoire en sera absolument dégagée et libérée; elle ne s'arrêtera à aucune considération, soit d'en haut, soit d'en bas; qu'elle se conduise comme si cette faculté de la mémoire n'existait pas, et la laisse librement se perdre dans l'oubli, comme une chose qui trouble si elle ne disparaît pas.

Car tout ce qui est naturel est plutôt un obstacle qu'un recours, si l'on veut s'en servir dans ce qui est surnaturel.


[(Les éditions antérieures donnaient ici le paragraphe suivant tout différent des Ms. c, A, B,  C,  D, P: « Qu'elle laisse passer ces connaissances et s'établisse dans un saint oubli à leur égard; qu'elle n'y réfléchisse pas, si ce n'est quand il le faudra pour de bonnes pensées et de pieuses méditations. Toutefois cette application à oublier et à rejeter les connaissances et les souvenirs ne s'entend jamais du Christ et de son Humanité. Si parfois l'âme élevée à une très haute contemplation et à la vue simple de la Divinité ne se souvient pas de la sainte Humanité du Christ, cela provient de ce que Dieu a, par un moyen spécial élevé l'âme à cette connaissance comme confuse mais très surnaturelle. Mais s'appliquer, de propos délibéré, à l'oublier, voilà ce qui ne convient sous aucun rapport.

Car la vue et la méditation amoureuse de cette sainte Humanité est une aide pour toutes sortes de biens, et par elle l'âme monte plus facilement et au plus haut degré de l'union. Il est clair que si toutes les choses visibles et corporelles doivent être laissées dans l'oubli, parce qu'elles sont un obstacle, il ne faut pas considérer comme tel Celui qui s'est fait homme pour nous guérir de nos maux, Celui qui est la vérité, la porte, la voie, le guide qui mène à tous les biens. »

« Cela supposé, l'âme doit s'appliquer à faire abstraction de tout le reste et à l'oublier, de telle sorte que, autant que possible, il n'y ait plus dans sa mémoire une connaissance ou un souvenir quelconque des choses créées et les considère comme n'existant même pas; que la mémoire en soit libérée et dégagée pour aller à Dieu, et qu'ainsi elle soit comme perdue dans un saint oubli. »

Que ce texte ne soit pas le texte original du docteur mystique, cela, à mon avis, ne fait aucun doute pour ces trois raisons très fortes: la première, c'est qu'on ne le trouve pas dans les cinq manuscrits que nous citons; la deuxième, parce que l'on ne  trouve pas, dans ces manuscrits ni plusieurs autres, trois petits paragraphes où l'on enseigne la même doctrine, comme on peut le voir au chapitre précédent, au chapitre XIV de ce livre et au chapitre X du livre premier de la Nuit obscure; la troisième, parce que l'enchaînement du texte des Manuscrits est plus parfait.

Le motif pour lequel on a introduit ce paragraphe ainsi que les autres est, à mon avis, celui de montrer comment saint Jean de la Croix ne partageait pas l'opinion de certains mystiques d'après lesquels l'âme, arrivée à la contemplation, doit éloigner de sa mémoire tout ce qui est corporel, et même la très Sainte Humanité de Notre-Seigneur Jésus-Christ; mystiques qui avaient déjà été victorieusement réfutés par sainte Thérèse (Vie, ch. 22 et Château de l'âme, Dem. 6E, ch.7).

Certainement le Saint pensait ainsi. Mais, pour le prouver, il n'y avait pas de nécessité our celui qui édita ses oeuvres de recourir à de telles fictions. La dévotion toute particulière que le Saint avait pour l'Humanité du Christ, le souvenir constant qu'il gardait de la Passion, bien qu'il fût déjà arrivé à la plus haute contemplation, sont une preuve plus que suffisante pour réfuter d'une façon péremptoire ces mystiques outrés et montrer qu'il n'était pas de leur bord. L'auteur de l'interpolation a quelque excuse. Son but était de fournir des textes comme preuves, et vraisemblablement il ignorait encore ceux que nous connaissons. On peut voir dans le Senteciaro les Sentences 1er, 2e, 74e et 78e, etc.; dans les Dictamenes de espiritu la règle 11e, qui dit littéralement:

« Il disait (le saint) que deux choses servent d'ailes à l'âme pour s'élever à l'union à Dieu: la compassion affective à la Passion de Jésus-Christ et l'amour du prochain. » (Homenaje a S. Juan de la Cruz, p. 195, et au tome 3e de la présente édition.)

Si l'on désire des preuves plus claires et qui touchent directement cette question, on peut les voir dans le traité intitulé: Espinas de espiritus et dans le Conocimiento oscuro de Dios, qui sont, l'un et l'autre, du docteur mystique, comme nous le prouverons.

D'ailleurs, le Saint n'était pas obligé de traiter ce point de théologie mystique, et il y en a beaucoup d'autres dont il n'a pas parlé. Voilà pourquoi nous répondrons à ceux qui n'admettent pas l'authenticité de ces deux derniers traités que, d'après nous le Saint s'en occupe d'une manière toute spéciale dans son livre intitulé Reglas para conocer el buen y mal espiritu, qui s'est perdu.)]

Si les doutes et les objections dont il a été parlé au sujet de l'entendement venait à se produire encore, et si l'on disait que l'entendement ne fait rien alors et perd son temps, que l'âme se prive des biens spirituels qu'elle peut recevoir en s'aidant de la mémoire, nous disons que nous avons déjà donné alors une réponse à toutes ces difficultés et que nous en traiterons de nouveau dans la Nuit passive. Ainsi il n'y a pas de motif pour nous y arrêter en ce moment.

Il faut remarquer toutefois que si, durant quelque temps, l'âme ne constate pas le progrès produit par cette suspension de toutes les connaissances et de tous souvenirs, elle ne doit pas pour cela se décourager. Dieu ne manquera pas de la soutenir à temps; et quand il s'agit d'acquérir un bien aussi grand, il est souverainement convenable de supporter sa peine et de souffrir avec patience et confiance en Dieu.

Sans doute, et c'est là un fait certain, à peine trouvera-t-on une âme qui soit mue par Dieu en tout et toujours, et qui lui soit si constamment unie que sans l'intermédiaire d'aucune forme ses facultés soient toujours mues divinement; cependant il y a des âmes qui très ordinairement sont mues par Dieu; ce ne sont pas elles qui se meuvent, mais c'est Dieu lui-même qui les dirige, selon cette parole de saint Paul:

« Les enfants de Dieu », c'est-à-dire ceux qui sont transformés en Dieu et unis à lui, « sont mus par l'Esprit de Dieu (Rom. VIII, 14) », qui pousse leurs facultés à accomplir des oeuvres divines. Il ne faut pas s'étonner que leurs oeuvres soient divines, dès lors que l'union de l'âme avec Dieu est une union divine.

Méditons …

à suivre …Chapitre 2


Eucharistie Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Ven 26 Mai - 7:21

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 2

Où l’ on parle de trois sortes de dommages qui sont causés à l’ âme, quand elle ne fait pas la « Nuit » en elle  en rejetant de sa mémoire toutes les connaissances et toutes les considérations .
On parle du premier


L'homme adonné à la spiritualité est exposé à trois sortes de dommages ou inconvénients, lorsqu'il veut user encore des connaissances et des discours naturels de la mémoire pour aller à Dieu ou pour accomplir un autre but. Deux de ces inconvénients sont positifs, et le troisième est privatif. Le premier résulte du contact avec les choses du monde, le second vient du démon; le troisième, qui est privatif, est un obstacle, un trouble qu'ils produisent et causent dans l'âme pour empêcher son union avec Dieu.

Le premier inconvénient, qui résulte du contact avec les choses du monde, est d'être exposé à toutes sortes de dangers par suite des connaissances et des discours de la mémoire; ce sont des faussetés, des imperfections, des convoitises, des jugements, des pertes de temps, et beaucoup d'autres choses encore qui produisent dans l'âme une foule de souillures. Or il est clair que l'on tombera nécessairement dans une foule de faussetés, si l'on donne prise à ces connaissances et à ces discours; car très souvent le vrai paraîtra faux, et au contraire ce qui est certain paraîtra douteux; c'est à peine si nous pouvons connaître à fond une seule vérité. Or l'âme se préserve de toutes ces erreurs en fermant les yeux de la mémoire à tout discours et à toute connaissance.

On tombe à chaque pas dans des imperfections si on occupe la mémoire de ce que l'on a entendu, vu, senti, touché ou goûté; chaque objet lui procure quelque impression d'amour, de douleur, de crainte, de haine, de vaine espérance, de fausse joie, ou de vaine gloire, etc... Toutes ces impressions sont au moins des imperfections, et parfois même des péchés véniels manifestes: toutes choses qui troublent la pureté parfaite de l'âme et sa très simple union avec Dieu.

Il est clair, en outre, que de là proviennent des désirs frivoles, car ils naissent tout naturellement de ces connaissances et de ces discours de la mémoire; d'ailleurs le fait seul de vouloir posséder ces connaissances et de s'y entretenir est déjà une tendance de la convoitise.

On voit très bien encore que les jugements téméraires seront sans nombre: la mémoire, en effet, ne peut manquer de s'occuper du bien ou du mal d'autrui; or bien souvent ce qui est mal lui paraît bon, et ce qui est bon lui semble mal. Or personne, à mon avis, ne pourra se préserver de tous ces inconvénients si la mémoire n'est pas tenue dans la nuit la plus profonde par rapport à toutes ces choses.

Vous me direz peut-être que l'homme pourra surmonter toutes ces difficultés, à mesure qu'elles se présenteront; pour moi, il ne le pourra pas d'une manière complète, s'il fait cas des connaissances que lui fournit la mémoire; car ces connaissances engendrent mille imperfections; quelques-unes même sont si subtiles, si cachées, que, sans qu'on s'en aperçoive elles s'attachent d'elles-mêmes à l'âme, comme la poix à celui qui la touche, et le meilleur moyen de remporter la victoire, c'est que la mémoire en finisse une bonne fois avec toutes les connaissances qui sont en elle.

Vous m'objecterez encore que par cette méthode on prive l'âme d'une foule de bonnes pensées et de considérations qui lui attireraient les faveurs de Dieu. A cela je réponds qu'il ne faut point rejeter ce qui se rapporte purement à Dieu et peut favoriser cette connaissance confuse, universelle, pure et simple de Dieu. Ce qu'il faut rejeter, ce sont les images, formes, figures ou ressemblances des créatures.

Et puisque nous parlons de purification qui prépare aux faveurs divines, la meilleure est la pureté de l'âme; elle consiste dans le détachement de toute affection aux créatures, aux choses du temps et au souvenir volontaire qu'on en garde, car cette affection, à mon avis, ne peut manquer de s'attacher fortement à l'âme, à cause de l'imperfection que ses puissances apportent d'elles-mêmes dans leurs opérations.

Aussi n'y a-t-il rien de mieux que de s'appliquer à les réduire au silence et à ne plus dire un mot, mais à laisser la parole à Dieu.

Car, ainsi que nous l'avons dit, si l'âme veut arriver à l'état d'union, l'âme doit perdre de vue ses opérations naturelles; elle y parvient quand, selon la parole du prophète, elle entre avec toutes ses puissances dans la solitude (Osée, II, 3), et que Dieu parle à son coeur.

Vous répliquerez peut-être, et vous direz que l'âme n'acquerra aucun bien si la mémoire ne considère pas les choses de Dieu et n'en discourt pas, et que, de plus, elle sera exposée à mille distractions et faiblesses. Je réponds que si la mémoire rejette à la fois tous les souvenirs d'ici ou de là, il lui est impossible d'être sujette à un mal quelconque, aux distractions, aux autres divagations ou vices, car ces misères n'arrivent jamais que par suite des extravagances de la mémoire; or il n'y a pas alors d'entrée pour elles dans cette faculté, ni rien qui les y introduise. Cela arriverait cependant si, tout en fermant la porte aux considérations et aux discours sur les choses d'en haut, on l'ouvrait sur les choses d'en-bas.

Mais ici nous fermons la porte à toutes les choses qui peuvent être un obstacle à l'union divine ou procurer des distractions à la mémoire; nous voulons que cette faculté reste dans le silence, se taise, et prête seulement l'oreille de l'esprit pour écouter Dieu à qui elle dit par la voix du prophète: « Parlez, Seigneur, car votre serviteur écoute (Rois, III – Vulgate – , 10). » Telles devaient être les dispositions de l'Épouse des Cantiques, puisque son Époux divin disait: « Ma soeur est un jardin fermé, une fontaine scellée (Cant. IV, 12) », c'est-à-dire que nulle créature ne peut y pénétrer.

Que l'âme reste donc fermée ainsi, et demeure sans préoccupation ni chagrin. Celui qui entra corporellement dans le cénacle où étaient ses disciples, bien que les portes fussent fermées, et qui leur donna sa paix, tandis qu'eux-mêmes ignoraient et ne pouvaient imaginer que cela fût possible, entrera aussi spirituellement dans l'âme sans qu'elle-même en sache le moment ou y coopère, et cela alors qu'elle aura fermé les portes de ses trois connaissances: mémoire, entendement et volonté, à toutes les connaissances.

Il remplira de paix ses puissances, et répandra sur elle-même, comme dit le prophète, un fleuve de paix pour dissiper les défiances et les incertitudes, les troubles et les ténèbres qui lui faisaient craindre d'être perdue. Utinam attendisses mandata mea: facta fuisset sicut flumen pax tua (Is. XLVIII, 18).

Que l'âme donc ne se lasse point de crier et d'espérer dans le dénûment et le détachement complet; car celui qui est son Bien ne tarde pas.


Méditons …


à suivre ….Chapitre 3


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Message par Maud Sam 27 Mai - 7:10

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 3


Ce chapitre parle du second dommage , de celui que le Démon  peut causer à l’ âme par le moyen des connaissances naturelles de la mémoire.

Le second dommage positif peut venir à l'âme des connaissances de la mémoire a pour auteur le démon, qui s'insinue très facilement par ce moyen. Il peut, en effet, susciter des formes, connaissances ou discours et ainsi porter l'âme à l'orgueil, à l'avarice, à l'envie, à la colère, etc...; il peut lui suggérer une haine injuste, un amour vain, et la tromper de beaucoup de manières.

De plus, il a pour habitude d'imprimer si bien ses suggestions et de les fixer de telle sorte dans l'imagination que le faux paraît vrai, et le vrai paraît faux.

En somme, la plupart des illusions ou des maux causés par le démon proviennent des connaissances et des discours qu'il représente à la mémoire. Mais que cette faculté s'en détache et les anéantisse dans un oubli complet, elle ferme totalement la porte à tous ces dangers du démon, elle se délivre de toutes ces tentations, et c'est là un grand bien.

Le démon, en effet, ne peut rien dans l'âme, si ce n'est par les opérations de ses puissances, surtout par le moyen des connaissances et des représentations imaginaires, parce que c'est d'elles que dépendent presque toutes les opérations des autres puissances. Par conséquent, si la mémoire s'en détache, le démon ne peut plus rien car il ne trouve rien à quoi il puisse s'attacher; et, tout moyen lui faisant défaut, il ne peut rien.

Je voudrais que les personnes adonnées à la spiritualité en arrivent à bien comprendre quels ravages les démons causent dans les âmes par le moyen de la mémoire quand elle veulent s'en servir. Que de tristesses, que d'afflictions, que de vaines joies il leur inspire au sujet de leurs pensées sur Dieu et sur les choses du monde! Que de souillures il laisse enracinées dans leur esprit en les détournant avec force du vrai recueillement qui consiste à appliquer l'âme tout entière, avec ses puissances, au seul bien, le bien incompréhensible, et à l'éloigner de toutes les choses sensibles, parce qu'elles ne sont pas ce bien!

Aussi, alors même que ce détachement ne produirait pas un avantage aussi précieux que celui de placer l'âme en Dieu, il suffit déjà qu'il la mette à l'abri d'une foule de peines, d'afflictions et de tristesses, sans parler des imperfections et des péchés dont il la préserve, pour le regarder comme un très grand bien.

Méditons …


à suivre …Chapitre 4


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Message par Maud Dim 28 Mai - 7:28

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 4

Du troisième dommage causé à l’ âme par les connaissances particulières et naturelles de la mémoire.

Le troisième dommage causé à l'âme par les connaissances naturelles de la mémoire est négatif. Il peut en effet empêcher le bien moral et priver du bien spirituel. Et d'abord, pour montrer comment ces connaissances empêchent le bien moral dans l'âme, il faut savoir que ce bien moral consiste à réprimer les passions et à mettre un frein aux tendances désordonnées; et de là résultent dans l'âme la tranquillité, la paix et le repos, les vertus morales, toutes choses qui constituent le bien moral.

Ces freins et ces rênes, l'âme ne les possède pas en réalité si elle ne se tient pas dans l'oubli et à l'écart par rapport à tout ce qui engendre ses affections; car, il ne lui vient jamais de trouble si ce n'est des connaissances que lui suggère la mémoire. En effet, si toutes les choses d'ici-bas sont mises dans l'oubli, il n'y a plus rien qui puisse troubler sa paix, ou exciter ses tendances, car, ainsi que le dit l'adage: ce que l'oeil ne voit pas, le coeur ne le désire pas.
Cette vérité est confirmée par une expérience de tous les instants.

En effet, nous voyons que toutes les fois que l'âme se met à penser à une chose, elle en est impressionnée et remuée plus ou moins, selon la connaissance qu'elle en a. En reçoit-elle une impression pénible et fâcheuse? Elle en conçoit de la tristesse ou de la haine. Son impression est-elle agréable? Elle sera dans la joie et désirera cet objet.

Voilà pourquoi ce changement d'impressions doit nécessairement produire en elle des troubles. Elle passe de la joie à la tristesse, de la haine à l'amour; elle ne peut jamais persévérer dans le même état, ce qui serait un effet de la tranquillité morale, à moins de se tenir dans l'oubli de toutes les choses créées. Il est donc clair que les connaissances de la mémoire sont un grand obstacle au bien des vertus morales.

De tout ce que nous avons dit, il résulte encore clairement que la mémoire qui n'est pas complètement détachée est un obstacle pour le bien mystique et spirituel. Car l'âme qui est dans le trouble et qui ne possède pas le fondement du bien moral n'est pas capable, comme telle, des biens spirituels qui ne s'impriment que dans l'âme où règne le calme et la paix.

De plus, si l'âme tient compte des connaissances de mémoire, si elle en fait cas et s'en occupe, comment, puisqu'elle ne peut être attentive qu'à une chose à la fois, lui serait-il loisible de s'occuper des choses incompréhensibles, c'est-à-dire de Dieu? Pour que l'âme aille à Dieu, ainsi que nous l'avons toujours dit, elle doit procéder par la non-compréhension plutôt que par la compréhension; elle doit échanger ce qui est variable et compréhensible pour ce que est immuable et incompréhensible.

Méditons …

à suivre ….Chapitre 5



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Message par Maud Lun 29 Mai - 7:14

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 5


Des avantages que l’ âme trouve  dans l’ oubli et l’ abnégation  de toutes les pensées et connaissances qu’elle peut naturellement tirer de la mémoire.

D'après ce que nous avons dit des dommages causés à l'âme par les connaissances de la mémoire, nous pouvons présumer les avantages qui leur sont opposés et qui proviennent de ce qu'on les oublie et qu'on en fait l'abnégation. Car, au dire des philosophes, la science d'un contraire sert à la connaissance d'un autre contraire.

Et tout d'abord on jouit de la tranquillité et de la paix de l'esprit; on n'est plus exposé au trouble et à l'agitation qui naissent des pensées et des connaissances de la mémoire; et par conséquent on possède la pureté de conscience et de l'âme, ce qui est un bien supérieur. L'âme est alors très bien disposée pour acquérir la sagesse humaine et la sagesse divine, comme aussi pour pratiquer les vertus.

En second lieu, on se délivre d'un grand nombre de suggestions, de tentations et d'impulsions qui ont le démon pour auteur et qu'il suggère par le moyen des pensées et des connaissances de la mémoire pour faire tomber l'âme dans une foule d'impuretés et de péchés, comme nous l'avons dit, et comme l'enseigne David: « Ils ont pensé, et ils ont trouvé l'iniquité (Ps. LXXVII, 8 ). » Voilà pourquoi, si l'on fait abnégation de toutes ces pensées, le démon n'a plus le moyen naturel de tourmenter l'esprit.

En troisième lieu, l'âme, par suite de cet oubli et de cette abnégation de toute connaissances, possède en elle la disposition nécessaire pour être dirigée et instruite par l'Esprit-Saint, car le Sage a dit: Auferet se a cogitationibus quae sunt sine intellectu: « Il s'éloigne des pensées qui ne sont pas raisonnables (Sag. I, 5). » Et ne retirerait-il d'autre avantage par cet oubli et cette abnégation que de se délivrer des peines et des troubles qui lui viennent de la mémoire, que ce serait déjà un grand avantage et un bien immense pour lui.

Car les peines et les troubles qui proviennent des événements fâcheux et des adversités ne servent de rien pour les améliorer; ils les aggravent au contraire et portent tort à l'âme elle-même.

Aussi David a-t-il dit: « En vérité, c'est en vain que tout homme se laisse aller au trouble (Ps. XXXVIII, 7). » Il est clair, en effet, qu'il est toujours inutile de se troubler, car jamais le trouble n'a été d'un profit quelconque.

Voilà pourquoi, alors même que tout disparaît ou que tout s'écroule, que tous les événements arrivent au rebours de nos desseins ou nous sont défavorables, il est inutile de se troubler; car, bien loin de remédier au mal, on ne ferait que l'augmenter. Il faut tout supporter avec égalité d'humeur, tranquillité et paix; cette disposition non seulement procure à l'âme beaucoup de biens, mais elle aide même à mieux comprendre les adversités, à en juger et à y apporter le remède convenable.

Salomon, qui connaissait fort bien ces inconvénients et ces avantages, a dit: Cognovi quoid non esset melius, nisi laetari, et facere bene in vita sua: « J'ai reconnu qu'il n'y avait rien de mieux pour l'homme que de se réjouir et de faire le bien dans le cours de sa vie (Eccl. III, 12). » Par là, il nous montre que, dans toutes les adversités, si fâcheuses qu'elles soient, nous devons plutôt nous réjouir que nous troubler, afin de ne point perdre un bien supérieur à toutes les prospérités, c'est-à-dire la tranquillité de l'esprit et la paix de l'âme que l'on garde également dans toutes les circonstances , heureuses ou malheureuses.

Cette sérénité, l'homme ne la perdrait jamais, si non seulement il mettait dans l'oubli les connaissances qui lui viennent de la mémoire et rejetait ses propres pensées, mais encore s'il évitait, dans la mesure du possible, d'entendre, de voir et de converser avec le prochain.

Mais notre nature est très fragile et très facile à entraîner; aussi, malgré ses bonnes habitudes, c'est à grand'peine qu'elle évitera de ne point tomber dans les troubles et les agitations d'esprit qui viennent des connaissances fournies par la mémoire, tandis qu'en les tenant dans l'oubli elle jouissait de la tranquillité et de la paix. Voilà pourquoi Jérémie a dit: « Je me suis rappelé mes souvenirs, et mon âme va défaillir de douleur (Lament. III, 20). »

Méditons …


à suivre …Chapitre 6


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Message par Maud Mar 30 Mai - 7:04

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 6


Où l’ on parle de la seconde sorte de connaissances de la mémoire, c'est-à-dire des connaissances imaginaires et surnaturelles.

En traitant de la première sorte de circonstances naturelles, nous avons donné une doctrine qui s'applique également aux connaissances imaginaires qui sont aussi naturelles. Mais il convenait de faire cette division pour les autres connaissances que la mémoire conserve en elle-même et qui sont surnaturelles, comme les visions, révélations, locutions, sentiments qui nous viennent par voie surnaturelle. Or ces faits, quand ils se sont produits dans l'âme, laissent ordinairement dans la mémoire et l'imagination une image, une forme, une représentation qui est parfois très vive et très profonde.

A ce propos, il est nécessaire de prévenir que la mémoire ne doit pas s'embarrasser de ces connaissances; car elles lui seraient un obstacle qui l'empêcherait de s'unir à Dieu dans la pureté et la perfection de l'espérance.

Je dis donc que, pour obtenir cette fin et ce bien, l'âme ne doit jamais faire de réflexion sur ces connaissances claires et distinctes qui lui ont été communiquées par la voie surnaturelle pour en conserver la forme, la figure ou l'image. Il ne faut d'ailleurs jamais perdre de vue ce principe, que plus l'on s'attache à quelque connaissance naturelle ou surnaturelle qui soit distincte et claire, moins on a d'aptitude et de disposition pour entrer dans l'abîme de la foi où toutes les autres connaissances sont absorbées.

Car, ainsi que nous l'avons démontré, aucune forme, aucune connaissance surnaturelle communiquée à la mémoire n'est Dieu ou n'a de proportion avec Dieu et, par suite ne peut servir de moyen prochain pour nous unir à lui.

L'âme doit donc se dégager de tout ce qui n'est pas Dieu pour s'unir à Dieu; voilà pourquoi la mémoire, elle aussi, doit se débarrasser de toutes les connaissances ou images afin de s'unir à Dieu par le moyen d'une espérance pure et mystérieuse. Toute possession, en effet, est opposée à l'espérance; et cette vertu, dit saint Paul, a pour objet « ce que l'on ne possède pas (Heb. XI, 1) ». Aussi, plus la mémoire se dépouille, et plus elle acquiert d'espérance; par suite, plus elle a d'espérance, et plus elle est unie à Dieu. Car plus une âme espère en Dieu, plus elle obtient de lui.

Or je le répète, son espérance grandit en proportion de son renoncement; c'est quand elle est parfaitement dépouillée de tout qu'elle jouit parfaitement de la possession de Dieu et est unie à Dieu. Mais ils sont nombreux ceux qui ne veulent pas se priver des jouissances et des douceurs que la mémoire leur fournit par ses connaissances; voilà pourquoi ils n'arrivent point à posséder complètement le souverain Bien ni à goûter ses délices.

Car celui qui ne renonce pas à tout ce qu'il possède ne peut être le disciple du Christ (Luc, XIV, 33).

Méditons …

à suivre …Chapitre 7


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Message par Maud Mer 31 Mai - 7:12

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 7

Dommages que la Connaissance des choses surnaturelles peut causer à l’âme, si elle y réfléchit .
On les énumère et on parle du Premier


L'homme adonné à la spiritualité s'expose à cinq sortes de dommages, s'il s'arrête ou réfléchit à ces connaissances ou à ces images qui lui sont communiquées par la voie surnaturelle.

Le premier, c'est qu'il se trompe très souvent, en prenant une chose pour une autre.
Le second, c'est qu'il est dans le danger et l'occasion de tomber dans quelque présomption ou vanité.
Le troisième, c'est qu'il donne largement prise au démon, qui le trompera par le moyen de ces connaissances.
Le quatrième, c'est qu'il empêche l'union avec Dieu par l'espérance.
Le cinquième, c'est qu'il juge ordinairement de Dieu d'une manière grossière.


Quand au premier inconvénient, il est clair que si l'homme adonné à la spiritualité s'arrête et réfléchit aux connaissances et images dont nous avons parlé, il se trompera très souvent dans son jugement. Comme personne, en effet, ne peut connaître à fond les choses qui se passent naturellement dans son imagination, ni en porter un jugement sûr et certain, à plus forte raison ne le pourra-t-il pas au sujet des choses surnaturelles qui dépassent notre capacité et se présentent rarement.

Aussi il s'imaginera très souvent que ces choses viennent de Dieu, quand elles ne seront que le produit de son imagination.

D'autres fois il se figurera que ces choses viennent de Dieu quand elles viennent du démon, ou les attribuera au démon quand elles sont de Dieu.

Plus souvent encore il conservera très vif le souvenir du bien ou du mal d'autrui ou du sien propre, ou d'autres connaissances; il regardera ces connaissances comme très certaines et très vraies, tandis que, au contraire, elles ne seront qu'une très grande fausseté. D'autres qui sont vraies, il les réputera fausses, bien que ce jugement me paraisse plus sûr, parce qu'il découle ordinairement de l'humilité.

Mais supposé qu'on ne se trompe pas sur la chose elle même, on peut se tromper sur sa quantité ou qualité ou sur l'estime qu'on doit en faire, et s'imaginer, par exemple, que ce qui est petit est grand, ou que ce qui est grand est petit.

Quant à ce qui regarde la qualité, on la confondra; l'imagination les prendra pour tel ou tel objet, et il n'en sera pas ainsi, et, comme le dit Isaïe, « on prendra les ténèbres pour la lumière, et la lumière pour les ténèbres, l'amertume pour la douceur, et la douceur pour l'amertume (Is. V, 20) ». Mais enfin, si l'on rencontre juste une fois, il serait bien étonnant que l'on ne se trompe pas une autre fois; supposé même que l'on ne veuille pas porter un jugement sur un fait, il suffit déjà qu'on en fasse quelque cas, pour y apporter au moins passivement quelque attache et en subir quelque dommage du genre de ce premier dont nous parlons ou de l'un des quatre dont il va être question immédiatement.

L'homme adonné à la vie spirituelle devra donc, s'il veut ne point tomber dans l'inconvénient de se tromper, ne pas appliquer son jugement pour savoir ce que peut être ce qu'il éprouve et ce qu'il sent, quelle est la nature de telle ou telle vision, connaissance ou représentation; il ne doit pas désirer le savoir, ni en faire grand cas, si ce n'est seulement pour en parler à son directeur qui lui enseignera à dégager sa mémoire de toutes ces connaissances. (Les éditions précédentes mettaient ici la variante suivante: « ou ce qui dans certains cas convient le mieux au dénûment ». Ed. P. Gerardo).

Car tout ce qu'elles peuvent être par elles-mêmes ne saurait l'aider autant à aimer Dieu que le plus petit acte de foi vive et d'espérance, que l'on fait dans le dépouillement et l'abnégation de toutes ces connaissances.

Méditons ….

à suivre….Chapitre 7



 Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Jeu 1 Juin - 7:18

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 La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 8


Du second degré de dommages , ou du danger de tomber dans la propre estime et la vaine présomption

Les connaissances surnaturelles de la mémoire dont nous avons parlé sont, en outre, pour les personnes adonnées à la spiritualité, une grande occasion de tomber dans quelque présomption ou vanité, si elles en font quelque cas ou quelque estime. De même, en effet, qu'il n'est pas exposé à tomber dans ce vice celui qui n'a rien de cela, puisqu'il n'a pas en lui de fondement à la présomption, de même au contraire, celui qui reçoit de pareilles connaissances est exposé à croire qu'il est déjà quelque chose, dès lors qu'il est favorisé de ces communications surnaturelles.

Sans doute il peut les attribuer à Dieu, lui en rendre grâces et se considérer comme indigne de les recevoir; néanmoins ces faveurs laissent ordinairement dans l'esprit une certaine satisfaction cachée, une estime de ces faveurs et de soi-même; il en résulte pour lui, sans qu'il s'en aperçoive, beaucoup d'orgueil spirituel. C'est ce qu'il constate clairement dans la répugnance et l'éloignement qu'il éprouve à l'égard de qui n'approuve pas son esprit, ou n'estime pas ces faveurs qu'il reçoit, ou encore au chagrin qu'il ressent quand on pense ou qu'on dit que d'autres personnes reçoivent les mêmes faveurs ou de plus grandes.

Tous ces sentiments viennent d'une secrète estime de soi-même et de l'orgueil; on ne comprend pas qu'on est peut-être profondément plongé dans ce défaut, on s'imagine qu'une certaine connaissance de notre misère suffit, tout en gardant une secrète estime et complaisance de soi-même et tout en préférant les talents et les biens dont on jouit à ceux du prochain. On ressemble au pharisien qui rendait grâces à Dieu de n'être pas comme les autres, de posséder telles et telles vertus et qui, plein de présomption, se complaisait ainsi en lui-même (Luc. XVIII, 11-12).

Sans doute les personnes dont nous parlons ne s'expriment pas formellement comme lui, mais elles sont animées habituellement des mêmes sentiments. Quelques-unes même en arrivent à cet excès d'orgueil, qu'elles sont pires que des démons.

Aperçoivent-elles en elles quelques connaissances ou sentiments de dévotion ou de joie qui leur semblent venir de Dieu, qu'elles sont pleines de satisfaction; elles s'imaginent qu'elles sont très rapprochées de Dieu, et que ceux qui n'ont pas les mêmes faveurs sont bien au-dessous d'elles; aussi elles les méprisent, comme le pharisien méprisait le publicain.

Pour fuir ce fléau qui est en abomination devant Dieu, il faut considérer deux choses. La première, c'est que la vertu ne consiste pas dans les connaissances que l'on a de Dieu ni dans les sentiments que l'on éprouve à son égard, si élevés qu'ils soient, ni en rien de semblable que l'on sent en soi-même; elle consiste, au contraire, dans ce qui est insensible, c'est-à-dire dans une humilité profonde, dans le mépris de soi et de tout ce qui est à nous, mépris sincère et profond, qui fait que l'on est heureux quand les autres ont les mêmes sentiments sur nous et que l'on veut n'être compté pour rien dans leur affection.

La seconde chose à considérer, c'est que toutes les visions, révélations, sentiments célestes et tout ce que l'on voudra imaginer de plus élevé, ne vaut pas le plus petit acte d'humilité, car l'humilité produit les mêmes effets que la charité; elle n'a point d'attache à ses propres intérêts et ne les recherche pas; elle ne pense mal que d'elle-même, et ne songe pas à son bien mais à celui des autres.

Pour tous ces motifs, il convient donc de ne pas attacher d'importance à ces connaissances surnaturelles, mais de s'appliquer à les oublier pour conserver la liberté d'esprit.

Méditons…

à suivre …Chapitre 9


 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Ven 2 Juin - 7:09

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 9

Du troisième dommage qui est causé à l’ âme par le Démon quand on tient compte des représentations imaginaires de la Mémoire

De tout ce qui a été dit, on voit clairement à quels dommages le démon expose l'âme quand elle suit la voie de ces connaissances surnaturelles. Il peut lui représenter dans la mémoire et l'imagination une foule de connaissances ou d'idées fausses qui semblent bonnes et vraies. Il les imprime par ses suggestions dans l'esprit et dans les sens avec beaucoup d'efficacité et de certitude.

L'âme se persuade même qu'il ne peut en être autrement que ce qui lui est alors représenté. Comme le démon en effet se transforme en ange de lumière, il lui semble qu'elle possède la lumière vraie.

Le démon peut, en outre, la tenter de bien des manières dans les connaissances vraies qui viennent de Dieu; il porte vers elles d'une façon désordonnée les tendances ou les affections soit de l'esprit, soit des sens; car si l'âme se complaît dans ces connaissances, il est très facile au démon d'augmenter en elle ces tendances et ces affections et de la faire tomber dans le vice de la gourmandise spirituelle et dans d'autres défauts.

Pour mieux réussir, il a coutume de suggérer et d'insinuer des goûts, des saveurs et des complaisances sensibles dans les choses même qui regardent Dieu, afin que l'âme, éblouie et fascinée par ces goûts sensibles, en soit aveuglée, s'y attache plus qu'à aimer Dieu, ou du moins diminue son application à aimer Dieu, fait plus de cas de ces communications que de l'abnégation et du dénûment qu'il y a dans la foi, l'espérance et la charité.

Aussi la porte-t-il peu à peu dans la voie de l'erreur et il lui fait croire ses mensonges avec la plus grande facilité. Une fois, en effet, que l'âme est aveuglée, ce qui est faux ne lui paraît plus faux, ce qui est mauvais ne lui paraît plus mauvais, car les ténèbres lui semblent la lumière, et la lumière les ténèbres; voilà pourquoi elle tombe dans toutes sortes de folies au sujet de ce qui est naturel, moral ou spirituel, et alors se vérifie l'adage: Le vin s'est changé en vinaigre.

Tout cela provient de ce qu'elle n'a pas, dès le début, repoussé le plaisir qu'elle goûtait dans les communications surnaturelles. Ce plaisir, au début, était peu de chose et ne se présentait pas comme un grand mal; aussi l'âme ne s'en défiait-elle pas beaucoup: elle le laissait subsister et grandir, comme le grain de sénevé qui devient un grand arbre, car, ainsi qu'on le dit, une petite erreur dans le principe devient grande à la fin.

Voilà pourquoi, afin d'éviter ce grand danger qui peut venir du démon, il convient beaucoup à l'âme de repousser les attraits qu'apportent ces connaissances surnaturelles, car il est très certain qu'elle s'aveuglerait peu à peu et ferait une chute. En effet, indépendamment du démon, les goûts, les délices et les suavités portent par leur nature à affaiblir l'âme et à l'aveugler.

C'est ce que David veut nous faire comprendre quand il dit: « Peut-être que les ténèbres m'aveugleront au milieu de mes plaisirs, et je prendrai la nuit pour la lumière (Ps. CLXXXVIII, 11). »

Méditons ….

à suivre …. Chapitre 10



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Sam 3 Juin - 6:57

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 La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 10

Du quatrième dommage que les connaissances  surnaturelles et distinctes  de la mémoire peuvent causer à l’ âme et qui consiste à empêcher l’ Union.

Il n'y a pas grand'chose à dire sur ce quatrième dommage, vu tout ce dont nous avons déjà parlé à chaque page de ce troisième Livre.

Nous avons prouvé, en effet, comment l'âme, pour s'unir à Dieu par l'espérance, doit renoncer à toutes les connaissances qu'elle possède dans sa mémoire; car, pour que l'espérance en Dieu soit parfaite, la mémoire ne doit rien posséder qui ne soit Dieu lui-même.

Comme nous l'avons montré encore, aucune des formes, figures, images ou représentations, soit célestes ou terrestres, soit naturelles ou surnaturelles, qui lui sont communiquées, n'est Dieu ou semblable à Dieu.

C'est ce que David nous enseigne en ces termes: « Seigneur, parmi les dieux, il n'y en a aucun qui soit semblable à vous (Ps. LXXXV, Cool. »

Aussi quand la mémoire veut en faire quelque cas, elle met une entrave à son union avec Dieu, d'abord parce qu'elle se crée un embarras, et ensuite parce que plus elle possède de ces connaissances, et moins elle a d'espérance.

Il est donc nécessaire qu'elle soit dépouillée des formes et des connaissances distinctes des choses surnaturelles, et les oublie pour ne pas empêcher son union à Dieu par une parfaite espérance.


Méditons ….


à suivre …. Chapitre 11



  Eucharistie     Colombe

*
Je m'absente pour une semaine , je posterai  le prochain chapitre, Dimanche 11 Juin



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Message par Maud Dim 11 Juin - 7:25

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La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 11



Du cinquième dommage que peuvent causer à l’ âme les formes et les connaissances  imaginaires surnaturelles , et qui consiste à juger de Dieu d’une manière basse et impropre



 Le cinquième dommage qui suit n'est pas moins grave que les précédents. Il consiste à vouloir retenir dans la partie imaginative de la mémoire les formes et les images des choses qui lui sont communiquées surnaturellement, et cela spécialement dans le but de s'en servir comme d'un moyen pour s'unir à Dieu. Il est très facile, en effet, de juger de l'être et de la grandeur de Dieu d'une manière moins digne et moins profonde que celle qui convient à son incompréhensibilité.

Sans doute, la raison et le jugement ne lui disent pas expressément que Dieu est semblable à quelqu'une de ces images, mais l'estime que l'âme porte à ces images fait qu'elle n'a pas cette connaissance profonde et ces sentiments élevés de la foi dont les enseignements nous révèlent un Dieu incomparable et incompréhensible...

Or non seulement l'âme enlève ici à Dieu toute l'estime qu'elle donne à la créature, mais elle se fait naturellement en elle-même par l'estime qu'elle accorde à ces connaissances une certaine comparaison entre elles et Dieu, et cette comparaison ne la laisse pas concevoir de Dieu une idée et une estime aussi relevée qu'il faudrait.

Car, ainsi que nous l'avons dit, toutes les créatures de la terre et du ciel, toutes les connaissances et images distinctes soit naturelles soit surnaturelles qui peuvent être communiquées aux puissances de l'âme, quelque élevées qu'on puisse les avoir ici-bas, n'ont de rapport ni de comparaison avec l'être de Dieu: Dieu, en effet, n'est contenu ni dans un genre ni dans une espèce, comme l'est la créature, ainsi que s'expriment les théologiens.

L'âme en cette vie n'est capable de recevoir d'une manière claire et distincte que ce qui est renfermé dans un genre ou dans une espèce. Aussi saint Jean a dit: « Personne n'a vu Dieu (Jean, I, 18) »: Deum nemo vidit unquam, et Isaïe, que « l'homme ne saurait concevoir comment Dieu est (Is. LXIV, 4; I Cor. II, 9) ». Et Dieu a dit à Moïse que « personne ne pouvait le voir en cette vie (Ex. XXXIII, 20) ». Voilà pourquoi celui qui surcharge sa mémoire et les autres puissances de l'âme de ce qu'elles peuvent comprendre est incapable d'avoir sur Dieu les idées et les sentiments qu'il faudrait. Voici une comparaison simple.

Il est clair que plus on jette les regards sur les serviteurs du roi ou plus on leur accorde d'estime et de respect, et moins on accorde d'attention ou d'égard au roi lui-même. Si l'on n'a pas cette intention formelle et explicite dans l'esprit, on la montre toutefois dans la pratique. Et, en effet, plus on accorde d'attention aux serviteurs, plus on en retranche à leur maître. On n'a donc pas alors des sentiments très élevés du roi, puisque les serviteurs semblent être quelque chose en présence de leur seigneur.

Ainsi en est-il de l'âme dans ses rapports avec Dieu, quand elle fait cas des souvenirs dont nous avons parlé. Sans doute cette comparaison est très grossière, car, ainsi que nous l'avons dit, Dieu est un être tout autre que toutes les créatures et leur est infiniment supérieur. Voilà pourquoi il faut les perdre de vue et ne porter aucune attention au souvenir de quelqu'une d'entre elles, afin de pouvoir tourner les yeux vers Dieu avec une foi et une espérance parfaites.

Aussi ceux qui non seulement en font cas, mais s'imaginent que Dieu ressemble à ces images ou pourront s'unir à lui par ce moyen, sont dans une erreur profonde; ils perdront peu à peu la lumière de la foi, qui est le moyen par lequel l'entendement s'unit à Dieu, et n'atteindront pas la hauteur de l'espérance qui, nous le répétons, est le moyen par lequel la mémoire s'unit à Dieu, à la condition d'être dégagée de toutes les conceptions imaginaires.

Méditons ….

à suivre …Chapitre 12



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Lun 12 Juin - 7:09

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 La Montée du Carmel – Livre Troisième – Chapitre 12


Des avantages que l’ âme trouve à se dégager de toutes les représentations imaginaires



L'âme trouve des avantages à dégager la mémoire de toutes les représentations imaginaires. C'est ce que montre avec évidence ce que nous venons de dire des cinq inconvénients où elle tombe quand elle garde comme aussi quand elle veut conserver l'impression des connaissances naturelles. Mais il y a encore d'autres avantages précieux où elle trouve le repos et la quiétude de l'esprit.

Sans parler de la paix dont elle jouit naturellement quand elle est dégagée des images et des représentations, elle est encore dégagée du souci de savoir si ces représentations sont bonnes ou mauvaises, ou comment elle devrait se comporter vis-à-vis des unes ou des autres; en outre, elle n'a plus à travailler ni à employer du temps avec les maîtres de la vie spirituelle pour examiner si elles sont bonnes ou mauvaises ni si elles sont de cette sorte ou de telle autre; d'ailleurs elle n'a pas besoin de le savoir, dès lors qu'elle ne doit en faire aucun cas.

Aussi le temps et les efforts qu'elle y aurait employés pour s'en rendre compte, elle peut les employer à des exercices meilleurs et plus utiles, comme celui de diriger la volonté vers Dieu, de poursuivre avec soin le dénûment et la pauvreté tant de l'esprit que des sens. Or ce dénûment consiste dans la privation volontaire et généreuse de toute consolation ou appréhension qui serve d'appui intérieur ou extérieur.

On y arrive facilement quand on veut se dégager de toutes ces images et qu'on en prend le moyen; c'est alors qu'on obtient l'avantage si grand qu'il y a à s'approcher de Dieu, qui n'est ni une forme, ni une image, ni une figure, et cela dans la proportion où l'on s'éloignera de toutes les formes, figures ou représentations imaginaires.

Mais quelqu'un me dira peut-être: Pourquoi donc les auteurs spirituels en grand nombre donnent-ils aux âmes le conseil de profiter avec soin des communications et des sentiments dont Dieu les favorise, pourquoi les engagent-ils à désirer les recevoir de lui pour avoir de quoi lui rendre, puisque, s'il ne nous donne tout d'abord, nous n'aurons rien à lui donner?

Saint Paul ne dit-il pas en effet: Spiritum nolite extinguere: « Veillez à ne pas éteindre la lumière de l'esprit (Thess. V, 19) »? L'Époux ne dit-il pas à l'Épouse: Pone me ut signaculum super cor tuum, ut signaculum super brachium tuum: « Placez-moi comme un sceau sur votre coeur, comme un sceau sur votre bras (Cant. VIII, 6) »? Or il y a là quelque connaissance. Or d'après l'enseignement donné plus haut, non seulement il ne faudrait point rechercher ces connaissances; il faudrait, au contraire, les repousser et s'en dégager, alors même que Dieu les enverrait.

Mais il est clair que si Dieu les envoie, il les envoie pour un bien et elles auront un bon effet. Pourquoi repousserions-nous avec dédain ces perles précieuses? N'y aurait-il pas une sorte d'orgueil à refuser les faveurs de Dieu, comme si sans leur concours et par nous-mêmes nous pouvions quelque chose?

Pour répondre à cette objection, il faut se rappeler ce que nous avons dit au chapitre XV et au chapitre XVI du second Livre, où se trouve en grande partie la solution.

Nous avons dit là, en effet, que le bien procuré à l'âme par les connaissances surnaturelles, quand elles viennent de Dieu, se produit passivement en elle au même instant où il est senti, et sans que ses puissances aient fait quelque chose d'elles-mêmes. Aussi n'est-il pas nécessaire que la volonté fasse l'acte d'admettre ces connaissances.

Comme nous l'avons dit, en outre, si l'âme veut agir alors avec le concours de ses puissances, sa coopération basse et naturelle empêcherait l'oeuvre surnaturelle que Dieu accomplit alors par le moyen de ces connaissances et ne serait d'aucun profit. De même que l'esprit de ces connaissances imaginaires se produit en l'âme passivement, de même l'âme doit se tenir passivement à leur égard, sans interposer en rien son action, soit à l'intérieur, soit à l'extérieur.

De la sorte elle garde les sentiments qui conviennent à Dieu, dès lors qu'elle ne les compromet pas par sa manière d'agir grossière. De la sorte elle n'éteint pas la lumière de l'esprit, puisqu'elle ne recherche pas une autre ligne de conduite que celle voulue par Dieu. Elle y serait opposée si, quand elle reçoit passivement l'Esprit, comme cela a lieu dans ces manifestations, elle voulait alors se conduire activement, agir avec l'entendement, ou s'ingérer de quelque manière en ces faveurs. Cela est très clair. Si, en effet, l'âme veut alors agir par force, son action ne sera que naturelle, car d'elle-même elle ne peut rien de plus; elle ne se meut pas aux oeuvres surnaturelles et ne saurait y atteindre, si Dieu lui-même ne la meut et ne l'élève.

Par conséquent si l'âme veut alors agir par elle-même, elle empêchera forcément, autant que cela dépend d'elle, par son activité l'action passive que Dieu lui communiquait, c'est-à-dire son Esprit; elle restera dans le domaine de son activité personnelle, qui est grossière et d'une autre sorte que celle qui lui est communiquée par Dieu, vu que celle de Dieu est passive et surnaturelle, et que celle de l'âme est active et naturelle; voilà ce qui serait éteindre l'esprit.

Il est clair, en outre, que cette manière d'agir est plus grossière. En effet, les facultés de l'âme ne peuvent pas par elles-mêmes faire réflexion et agir si ce n'est sur quelque forme, figure ou image. Or ce n'est là que l'écorce et l'accessoire qui voilent la substance et l'esprit.

Cette substance ou cet esprit ne s'unit aux puissances de l'âme, dans cette véritable intelligence et cet amour dont nous parlons, que quand a déjà cessé le travail des puissances; car le but et la fin de cette opération pour l'âme est d'arriver à posséder la substance connue et aimée de ces formes.

Aussi entre l'état actif et l'état passif il y a la même différence et le même avantage qu'en ce qui se fait et ce qui est déjà fait, ou qu'entre le but vers lequel on tend et celui où l'on est déjà parvenu. Voilà pourquoi si l'âme veut employer activement ses puissances dans ces connaissances surnaturelles, où, nous le répétons, elle en reçoit passivement de Dieu l'esprit, ce ne sera rien moins que laisser ce qui est déjà fait pour le faire de nouveau; elle ne jouirait pas de ce qui est fait, et par son activité y mettrait obstacle.

Comme nous l'avons dit, ses puissances ne peuvent pas, par elles-mêmes, arriver au bien spirituel que Dieu répand sans leur concours dans l'âme.

L'âme donc travaillerait directement à éteindre les lumières de cet esprit que Dieu infuse par ces connaissances imaginaires, si elle en faisait cas. Elle doit par conséquent s'en dégager et se tenir à leur égard dans une attitude passive et négative, comme nous l'avons dit. Dieu alors meut lui-même l'âme à un état qu'elle ne pourrait et ne saurait atteindre.

De là cette parole du prophète: Super custodiam meam stabo et figam gradum super munitionem; et contemplabor ut videam quid dicatur mihi: « Je me tiendrai debout sur mes gardes; je m'arrêterai d'un pied ferme sur le rempart, et je serai attentif à ce qui me sera dit (Hab, II, 1). »

C'est comme s'il disait: Je serai debout pour surveiller mes puissances; je ne leur permettrai pas de faire un pas en avant et d'agir; de la sorte je pourrai être attentif à ce qui me sera dit, c'est-à-dire, j'écouterai et je goûterai ce qui me sera communiqué surnaturellement.

Quand au texte de l'Époux que l'on a objecté, il doit s'entendre de l'amour qu'il porte à l'Épouse et dont le propre est de les assimiler l'un à l'autre dans ce qu'ils ont de meilleur. Voilà pourquoi il lui dit: Pone me ut signaculum super cor tuum.

L'Époux  demande à l'Épouse de le « placer sur son coeur (Cant. VIII, 6) » comme un signe où toutes les flèches du carquois de l'amour iront frapper, c'est-à-dire où aboutiront toutes les oeuvres et tous les motifs d'amour; il faut que toutes ses oeuvres aboutissent à ce but qui leur est fixé et que toutes soient pour lui; c'est ainsi que l'âme ressemblera à l'Époux par les oeuvres et les mouvements de l'amour, jusqu'au point de se transformer en lui.

L'Époux dit encore à l'Épouse qu'elle doit le placer comme un signe sur son bras, car le bras symbolise l'exercice de l'amour dans lequel le Bien-Aimé se nourrit et prend ses délices.

Aussi, tout ce que l'âme doit faire à l'égard de ces connaissances qui lui viennent d'en haut, qu'elles soient imaginaires ou d'une autre sorte, et qu'il s'agisse de visions et locutions, ou de sentiments et révélations, c'est de ne tenir aucun compte de la lettre ou de l'écorce, c'est-à-dire de ce qui est alors signifié, représenté ou donné à comprendre, mais de veiller seulement à conserver l'amour de Dieu que ces faveurs impriment intérieurement dans l'âme.

De la sorte l'âme doit tenir compte des sentiments, je ne dis pas de la saveur, de la suavité, des figures, mais des sentiments d'amour qui lui sont causés. Et quand il s'agit uniquement de ce but, l'âme peut bien se rappeler parfois le souvenir de cette image ou de cette connaissance qui lui a causé l'amour, afin de fournir encore à l'esprit des motifs d'amour.

Sans doute ce souvenir ne produit plus un effet aussi profond que ne le fut celui où la faveur elle-même a été accordée la première fois, mais il renouvelle néanmoins l'amour, il élève l'âme vers Dieu, surtout quand il porte sur certaines images, figures ou impressions surnaturelles qui d'ordinaire se gravent et s'impriment si bien dans l'âme qu'elles durent très longtemps et que quelques-unes même ne s'effacent jamais.

Celles qui se gravent ainsi dans l'âme produisent, presque chaque fois qu'on se les rappelle, de divins effets d'amour, de suavité, de lumière... plus ou moins profonds; c'est d'ailleurs dans ce but que ces souvenirs se sont gravés ainsi dans l'âme. C'est donc là une grande grâce que Dieu accorde; car on possède en soi une source de biens surnaturels.

Les représentations qui produisent ces effets sont profondément gravées dans cette partie de l'âme qu'on appelle la mémoire intelligible. Elles diffèrent de ces autres formes et images qui se conservent dans l'imagination. Aussi l'âme n'a-t-elle pas besoin de recourir à cette dernière faculté pour se les rappeler; elle voit qu'elle les a en soi, comme on voit l'image dans un miroir. Quand une âme possède en elle-même d'une manière formelle ces représentations, elle peut fort bien se les rappeler pour produire l'amour dont je parle, car elles ne la gêneront pas dans l'union d'amour par la foi.

L'âme ne doit pas se laisser séduire par ces représentations, mais s'en servir et s'en dégager tout de suite pour grandir dans l'amour. Et alors elle y trouvera un secours.

Il est difficile de discerner quand ces représentations sont gravées dans l'âme et quand elles le sont dans l'imagination. Celles de l'imagination, en effet, sont ordinairement très fréquentes, car certaines personnes ont coutume d'avoir dans l'imagination et fantaisie des visions imaginaires, et elles se les représentent très fréquemment de la même manière.

Cela vient ou de l'activité de leur imagination qui leur présente cette vision dès qu'elles y pensent et la reproduit sous la même forme, ou de l'action du démon qui la leur communique, ou de l'opération même de Dieu qui cependant ne grave rien dans l'âme d'une manière formelle. On les reconnaît cependant à leurs effets. Celles qui sont naturelles ou qui ont le démon pour auteur, malgré tout le souvenir que l'on peut en avoir, ne produisent aucun bon effet, ni aucune rénovation spirituelle dans l'âme; elle ne les considère même que d'une manière froide.

Néanmoins celles qui sont bonnes produisent encore, lorsque l'on s'en souvient, quelques bons effets, semblables à celui qu'elles ont produit la première fois. Quant aux représentations formelles qui se gravent dans l'âme, elles produisent presque toujours quelque bon effet, quand on y pense.

Celui qui en a l'expérience pourra facilement discerner les unes d'avec les autres, car la différence qu'il y a entre elles sera très claire pour lui. Je dis seulement que celles qui se gravent formellement dans l'âme et d'une manière durable sont plus rares. Mais qu'il s'agisse des unes ou des autres, il est bon que l'âme s'applique à ne rien comprendre, si ce n'est Dieu lui-même, qui est l'objet de notre foi et de notre espérance.
Quant à l'objection d'après laquelle il semblerait qu'il y a de l'orgueil à repousser ces représentations si elles sont bonnes, j'affirme, moi, au contraire, que c'est là une acte d'humilité. Il est prudent, en effet, de s'en servir de la meilleure manière possible, comme nous l'avons indiqué, et de suivre la voie la plus sûre.

Méditons ….

à suivre …. Chapitre 13



  Eucharistie    Colombe


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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** - Page 2 Signat12

* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

Ste Thérèse de l' Enfant Jésus et de la Sainte Face
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