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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel " ***

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Message par Maud Mar 28 Mar - 7:50


LA MONTÉE DU CARMEL de Saint Jean de la Croix

(3 livres comprenant chacun plusieurs chapitres )


*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_11

On y traite de la Manière dont l’âme pourra se disposer pour arriver promptement à  son Union avec Dieu
On y donne des avis et des enseignements très utiles à ceux  qui commencent aussi  bien à ceux qui ont déjà réalisé beaucoup de progrès , afin qu’ils sachent se débarrasser de tout ce qui n’est pas spirituel et demeurer dans cette profonde nudité et liberté d’ esprit que requiert l’ Union Divine


Sommaire

Toute la doctrine qui sera exposée dans cette Montée du Carmel se trouve contenue dans les strophes suivantes. Celles-ci montrent comment on arrive jusqu'au sommet de la montagne, c'est-à-dire à l'état élevé de perfection que nous appelons ici l'union de l'âme avec Dieu.

Comme elles doivent servir de fondement à ce que je vais dire, j'ai voulu les réunir ici afin que l'on comprenne et que l'on voie bien la substance du sujet que je vais traiter ainsi que l'exposé que j'en donnerai.

Néanmoins, lorsque je les expliquerai, il conviendra de mettre encore la strophe elle-même dont il sera question, et chacun des vers dont elle se compose, selon que l'exigera le sujet ou l'exposé.


Strophes

Où l’âme chante l’ heureux sort qu’elle a eu de passer par a Nuit obscure de la Foi pure et sa purification pour arriver à l’ Union de l’ Amour

I
Par une nuit profonde,
Étant pleine d'angoisse et enflammée d'amour,
Oh! l'heureux sort!
Je sortis sans être vue,
Tandis que ma demeure était déjà en paix.
II
J'étais dans les ténèbres et en sûreté
Quand je sortis déguisée par l'escalier secret,
Oh! l'heureux sort!
J'étais dans les ténèbres et en cachette,
Tandis que ma demeure était déjà en paix.
III
Dans cette heureuse nuit,
Je me tenais dans le secret, personne ne me voyait,
Et je n'apercevais rien
Pour me guider que la lumière
Qui brûlait dans mon coeur.
IV
Elle me guidait
Plus sûrement que la lumière du midi
Au but où m'attendait
Celui que j'aimais,
Là où nul autre ne se voyait.
V
O nuit qui m'avez guidée!
O nuit plus aimable que l'aurore!
O nuit qui avez uni
L'aimé avec sa bien-aimée
Qui a été transformée en lui!
VI
Sur mon sein orné de fleurs,
Que je gardais tout entier pour lui seul,
Il resta endormi,
Et moi je le caressais
Et avec un éventail de cèdre je le rafraîchissais
VII
Quand le souffle provenant du fort
Soulevait déjà sa chevelure,
De sa douce main
Posée sur mon cou il me blessait,
Et tous mes sens furent suspendus.
VIII
Je restai là et m'oubliai,
Le visage penché sur le Bien-Aimé.
Tout cessa pour moi, et je m'abandonnai à lui,
Je lui confiai tous mes soucis
Et m'oubliai au milieu des lis.

Prologue

Si je devais expliquer et faire comprendre cette nuit obscure par laquelle passent les âmes pour arriver à la divine lumière, à l'union parfaite d'amour de Dieu, autant qu'elles le peuvent en cette vie, il faudrait une science plus éclairée que la mienne et une expérience plus grande.

Elles sont si nombreuses et si profondes les ténèbres et les épreuves tant spirituelles que temporelles par lesquelles ont coutume de passer ces bienheureuses âmes pour pouvoir arriver à cet état de perfection, que ni la science humaine ne suffit pour le comprendre, ni l'expérience pour l'exposer.

Je dis expérience pour l'exposer, car celui-là seul qui passe par cette voie pourra les connaître mais il sera impuissant à les exprimer. Aussi, pour dire quelque chose de cette nuit obscure, je ne me fierai ni à la science, ni à l'expérience, car l'une et l'autre peuvent faillir et induire en erreur.

Mais, tout en n'omettant pas de m'en servir autant que possible, je m'aiderai en tout de la faveur divine, de la saint Écriture, au moins pour ce qu'il y a de plus important et de difficile à comprendre. En suivant sa lumière, nous ne pouvons nous tromper, puisque celui qui y parle est l'Esprit-Saint lui-même.

Et s'il m'arrive de me tromper parce que je n'aurai pas bien compris ce qu'il dit là ou ailleurs, mon intention n'est pas de m'écarter du véritable enseignement et de la doctrine de notre sainte Mère l'Église catholique; d'avance je me conforme et me soumets sans réserve non seulement à sa manière de voir, mais encore à quiconque aura dans ces questions des lumières plus sûres que les miennes.

Ce n'est point parce que je découvre en moi des aptitudes pour une entreprise si haute et si ardue que je me suis déterminé à traiter ce sujet, mais parce que j'ai confiance que Notre-Seigneur m'aidera à subvenir à l'extrême nécessité où se trouvent un grand nombre d'âmes.

Elles ont commencé à marcher dans le chemin de la vertu; Notre-Seigneur voudrait les placer dans la nuit obscure, afin de les amener par là à la divine union; et elles ne vont pas plus loin, soit parce qu'elles ne s'y laissent pas introduire, soit parce qu'elles ne comprennent pas leur état, et qu'elles manquent de guides expérimentés et capables de les conduire au sommet de la perfection.

Aussi est-il vraiment déplorable de voir beaucoup d'âmes à qui Dieu confère des qualités et des faveurs spéciales pour monter plus haut et qui parviendraient au sublime état dont nous parlons, si elles voulaient s'en donner la peine, mais qui restent dans leurs manières vulgaires de traiter avec Dieu; elles manquent de volonté ou de lumière, ou bien il n'y a personne pour les guider et leur enseigner à quitter le sentier des commençants.

Si cependant Notre-Seigneur leur accorde tant de grâces que sans ces moyens et ces secours il les fasse monter, elles arriveront beaucoup plus tard; elles éprouveront plus de difficulté; enfin elles auront moins de mérite, parce qu'elles ne se sont pas remises entre les mains de Dieu et ne l'ont pas laissé les introduire librement dans le chemin pur et véritable qui conduit à l'union.

Sans doute, Dieu, qui les élève, n'a pas besoin de pareils secours. Toutefois, si elles ne se laissent pas porter par lui, elles font moins de chemin parce qu'elles résistent à celui qui les élève; elles méritent moins parce qu'elles ne lui abandonnent pas leur volonté; et par le fait même elles souffrent davantage.

Il y a en effet des âmes qui, au lieu de s'abandonner à Dieu tout en s'aidant elles-mêmes, troublent son action par leur agitation indiscrète ou leur résistance. Elles ressemblent à de petits enfants que leurs mères voudraient porter dans les bras et qui se mettent à trépigner et à pleurer afin de marcher par eux-même, quand ils en sont incapables, ou du moins quand ils ne peuvent faire que des pas d'enfants.

Il faut donc savoir se laisser conduire par Dieu quand Sa majesté veut nous élever. Voilà pourquoi nous donnerons, avec son secours, aux commençants et à ceux qui sont déjà en voie de progrès, des enseignements et des conseils pour qu'ils sachent se comprendre ou du moins se laissent conduire par lui.

Il y a, en effet, des confesseurs et des Pères spirituels qui n'ont point la lumière nécessaire ni l'expérience de ces voies; au lieu de venir en aide à ces âmes, ils ont coutume plutôt de les empêcher d'avancer et de leur être nuisibles; ils ressemblent aux bâtisseurs de Babel qui, au lieu de fournir des matériaux convenables, en apportaient d'autres tout différents, parce qu'ils ne comprenaient plus le langage qu'on leur parlait; aussi l'édifice ne s'élevait pas.

Voilà pourquoi c'est une épreuve très rude et très pénible pour l'âme qui, dans des circonstances analogues, ne comprend pas son état et ne trouve personne qui la comprenne. Il lui arrivera peut-être que Dieu l'élève à la voie très haute d'une contemplation pleine d'obscurité et de sécheresse, et elle se croira perdue.

Au milieu de ces ténèbres, de ces épreuves, angoisses et tentations, elle rencontrera quelqu'un qui lui tiendra le langage des consolateurs de Job. On lui dira que c'est de la mélancolie, du chagrin, ou affaire de nature, ou peut-être le châtiment de quelque faute secrète pour laquelle Dieu l'a délaissée. Généralement, on juge tout de suite que cette âme doit être bien coupable ou qu'elle l'a été, dès lors qu'elle éprouve de pareils tourments.

D'autres lui diront qu'elle recule, puisqu'elle ne trouve plus ni goûts ni consolations comme précédemment dans les choses de Dieu. Aussi la pauvre âme voit redoubler ses souffrances; ou il lui arrivera que sa plus grande peine viendra de la vue de sa propre misère.

Il lui semblera voir plus clair que la lumière du jour qu'elle est remplie de maux et de péchés; c'est là, en effet, la lumière et la connaissance que Dieu lui donne dans cette nuit de contemplation, comme nous le dirons plus loin. Comme elle trouve quelqu'un qui partage sa manière de voir et lui dit qu'elle souffre par sa faute, sa peine et ses angoisses grandissent démesurément et arrivent d'ordinaire à un état pire que la mort. Ce n'est pas assez pour de pareils confesseurs.

Comme ils s'imaginent que cet état est la conséquence de leurs péchés, ils les obligent à repasser leur vie et à faire une foule de confessions générales. C'est les crucifier de nouveau et ne pas comprendre que ce n'est plus le temps d'employer de tels moyens, mais de laisser ces âmes dans l'état de purification où Dieu les a placées, de les consoler, de les encourager à vouloir cette épreuve tout le temps qu'il plaira à Dieu. Jusqu'alors, en effet, il n'y a pas de remède, quoi que fassent ces âmes, et qui que disent leurs confesseurs.

Telle est la question que nous traiterons, avec la grâce de Dieu. Nous montrerons comment l'âme doit se comporter dans cet état, quel doit être le rôle de son confesseur, et quelles sont les marques auxquelles on reconnaîtra si cette épreuve est une purification l'âme; et alors, dans ce cas, s'il s'agit d'une purification des sens ou de celle de l'esprit que nous appelons nuit obscure.

Nous dirons aussi comment on pourra reconnaître que cet état provient de la mélancolie ou d'une autre imperfection des sens ou de l'esprit.

Il peut arriver aussi que certaines âmes ou leurs confesseurs s'imaginent que Dieu les conduit par cette voie de la nuit obscure de la purification de l'esprit, et ce ne sera peut-être que l'une de ces imperfections dont nous avons parlé. D'un autre côté, il y a aussi beaucoup d'âmes qui s'imaginent être dépourvues de l'esprit d'oraison et qui le possèdent à un très haut degré, tandis que d'autres, au contraire, s'imaginent en avoir beaucoup et n'en ont presque point.

Il y en a qui font pitié à voir, tant elles souffrent et se fatiguent, et qui néanmoins reculent; elles recherchent leur avancement dans ce qui, loin de le procurer, ne peut que l'empêcher. Il y en a encore qui, au contraire, sans fatigue ni agitation, réalisent de grands progrès. Il y en a même qui se troublent et s'inquiètent des faveurs et des grâces que Dieu leur accorde pour leur avancement et ne réalisent aucun progrès.

On pourrait énumérer encore beaucoup d'obstacles qui se trouvent dans cette vie et découlent des joies, des peines, des espérances ou des chagrins que l'on éprouve; les uns proviennent de l'esprit de perfection, les autres de l'imperfection.

Telle est la matière dont nous tâcherons, avec l'aide de Dieu, de dire quelques mots. Celui qui lira cet écrit pourra se rendre compte quelque peu de la voie où il se trouve et de celle qu'il doit suivre, s'il a la prétention de parvenir au sommet de cette montagne.

Comme il s'agit ici de la nuit obscure, par laquelle l'âme doit aller à Dieu, que le lecteur ne s'étonne pas de trouver quelque obscurité dans notre enseignement. Mais, à notre avis, ce ne sera qu'au début; car s'il continue sa lecture, il arrivera peu à peu à mieux comprendre ce qu'il a lu tout d'abord; d'ailleurs les diverses parties de cet écrit s'expliquent l'une par l'autre.

Et s'il vient à le relire, nous pensons qu'il le trouvera plus clair et son enseignement plus sûr.

Toutefois, si quelques personnes ne goûtaient pas cette doctrine, il faudrait l'attribuer à mon peu de savoir et à l'imperfection de mon style; car la matière que je traite est bonne en soi et très nécessaire. Mais il me semble que si on l'exposait avec plus de talent et de perfection que je ne le ferai, elle ne serait pas encore goûtée d'un grand nombre.

La raison c'est que l'on n'écrira pas des choses qui soient très faciles à suivre et offrent de l'attrait à ceux qui se plaisent à rechercher Dieu par la voie des douceurs.

Nous donnerons plutôt une doctrine substantielle et solide pour les uns comme pour les autres, à la condition que l'on veuille passer par la nudité d'esprit dont il s'agit dans cet ouvrage.

D'ailleurs, mon intention principale n'est pas de m'adresser à tous en général, mais bien à quelques personnes, aux religieux et religieuses de la réforme de Notre-Dame du Mont Carmel, qui m'ont demandé ce livre. Dieu leur a fait la grâce de les placer dans le sentier de cette montagne; comme ils sont déjà dépouillés complètement des biens de ce monde, ils comprendront mieux cette doctrine de la nudité d'esprit.

A suivre …Chapitre1

http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/JdelaCroix/Carmel/livre1.htm


 Eucharistie    Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Mer 29 Mar - 7:32

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_12

Livre premier ( chapitre 1 et 2)

Où l’on explique ce qu’il faut entendre par «  Nuit Obscure «  et combien il est nécessaire de la traverser pour parvenir à l’ Union Divine

On parle en particulier de la  « Nuit des Sens et des Passions «  ainsi que des dommages qu’ils causent à l’ âme.

CHAPITRE 1

On rappelle la première strophe , on parle des différences qu’il y a entre les  « Nuits «  par lesquelles passent les personnes adonnées à la Spiritualité et qui concernent la partie intérieure et la partie supérieure de l’ homme .

On explique la strophe

Strophe I

Par une nuit profonde,
Étant pleine d'angoisse et enflammée d'amour,
Oh! l'heureux sort!
Je sortis sans être vue,
Tandis que ma demeure était déjà en paix
.

L'âme chante dans cette strophe l'heureux sort et la bonne fortune qu'elle a eu de se dégager de toutes les choses du dehors, des tendances et imperfections qui résident dans la partie sensitive de l'homme par suite du désordre où se trouve sa raison.

Pour comprendre cette doctrine, il faut savoir que l'âme, avant d'arriver à l'état de perfection, doit ordinairement passer tout d'abord par deux sortes principales de nuit que les auteurs spirituels appellent voies purgatives ou purifications, et que nous appelons ici des nuits, parce que, dans les deux cas, l'âme marche pour ainsi dire de nuit et dans l'obscurité.

La première nuit ou purification est celle de la partie sensitive de l'âme dont il est question dans cette strophe et dont il sera parlé dans la première partie de ce livre.

La seconde est celle de la partie spirituelle de l'âme dont parle la seconde strophe et dont nous parlerons dans la seconde partie en montrant le rôle actif de l'âme; quant à son rôle passif, il en sera question dans la troisième et dans la quatrième partie.

Cette première partie est celle des commençants et regarde le temps où Dieu commence à les élever à l'état de contemplation auquel l'esprit participe lui aussi, comme nous le dirons en son temps. La seconde nuit ou purification est celle de ceux qui sont déjà dans la voie du progrès et regarde le temps où Dieu veut les élever à l'état d'union avec lui; c'est une nuit plus profonde que la précédente et une terrible purification, comme nous le dirons plus tard (Ce paragraphe est tiré des Ms. D'Albe-Burgos, Calatayud).

Explication de la strophe :

Voici en résumé ce que l'âme veut dire dans cette strophe. L'âme, aidée de la grâce de Dieu et mue seulement par cet amour pour lui dont elle était tout enflammée, est sortie durant une nuit obscure. Cette nuit est la privation et la purification de toutes les tendances des sens par rapport à toutes les choses extérieures du monde, comme à celles qui réjouissaient sa chair ou plaisaient à sa volonté. Ce travail est le résultat de la purification des sens. Aussi l'âme ajoute qu'elle est sortie, lorsque sa maison était déjà en paix; elle désigne la partie sensitive, alors que toutes ses tendances étaient endormies et calmes en elle, et qu'elle-même était en sûreté à leur endroit. Car elle ne sort pas des peines et des angoisses que fomentent, du fond de leur demeure, les tendances, tant qu'elles ne sont pas elles-mêmes comme mortes et endormies. Voilà pourquoi elle parle de son heureux sort. Elle est sortie sans être vue, c'est-à-dire sans qu'aucune tendance de la chair ou autre ait pu l'empêcher; elle dit encore qu'elle est sortie de nuit, c'est-à-dire pendant que Dieu la privait de toutes ses tendances, ce qui était pour elle une nuit.
Ce fut une heureuse fortune pour elle que Dieu la plaçât dans cette nuit, d'où lui est venu un si grand bien, et où elle n'aurait jamais pu s'introduire d'elle-même. Il n'y a personne d'ailleurs qui soit capable par ses seules forces de se dégager de toutes ses tendances pour aller à Dieu.
Telle est en résumé l'explication de la strophe. Nous allons maintenant en expliquer chaque verset et exposer ce qui convient à notre but. Nous ferons de même pour les autres strophes, comme nous l'avons dit dans le prologue: nous rappellerons d'abord la strophe et son exposé, puis nous parlerons de chaque verset à part.

*****

Chapitre 2

Ce chapitre montre ce que cette  « Nuit obscure » par laquelle l’âme dit qu’elle est passée pour aller à DIEU , et explique quelles en sont les causes .


Par une nuit obscure

Nous pouvons pour trois motifs appeler nuit l'état par lequel passe l'âme pour arriver à l'union divine. Le premier vient du point de départ de l'âme, car elle doit priver peu à peu ses tendances du goût qu'elles éprouvaient dans toutes les choses du monde et le leur refuser; or ce refus, cette absence de toutes jouissances, est comme une nuit pour toutes les tendances et les sens de l'homme.

Le second motif vient du moyen que l'on emploie ou du chemin par lequel l'âme doit passer pour arriver à l'union. Ce moyen est la foi, qui, obscure elle-aussi, est pour l'entendement comme une nuit. Le troisième vient du terme où l'âme tend, c'est-à-dire de Dieu: comme il est incompréhensible et infiniment parfait, on peut bien l'appeler une nuit obscure pour l'âme en cette vie.

Ces trois nuits doivent passer par l'âme, ou plutôt l'âme doit passer par ces nuits avant d'atteindre l'union avec Dieu.

Nous en trouvons une image au livre de Tobie, dans ces trois nuits que, sur ordre de l'ange, le jeune Tobie devait passer avant de s'unir à son épouse (Tob, VI, 18). La première nuit, il devait consumer par le feu le foie du poisson, qui est le symbole du coeur affectionné et attaché aux choses de ce monde; de même, si l'on veut marcher dans cette voie qui mène à Dieu et purifié de tout ce qui est créature.

C'est dans cette purification que l'on met en fuite le démon qui exerce son pouvoir sur l'âme à cause de son attachement aux choses temporelles et corporelles.

L'ange dit à Tobie que dans la seconde nuit il serait admis à partager la société des saints patriarches qui sont nos Pères dans la foi; cela signifie que l'âme en passant par la première nuit, c'est-à-dire en se privant de tous les objets qui flattent les sens, entre immédiatement dans la seconde nuit, où elle reste dans la solitude et la nudité de la foi, qui seule la dirige et qui ne tombe pas sous les sens.

L'ange dit à Tobie que la troisième nuit il obtiendrait la bénédiction, qui signifie Dieu lui-même; à la faveur de la seconde nuit qui figure la foi, il se communique en effet peu à peu à l'âme d'une manière si secrète et si intime qu'il est comme une autre nuit pour elle, car cette communication est beaucoup plus obscure que les autres, comme nous le dirons bientôt.

Une fois passée cette troisième nuit, et achevée cette communication de Dieu à l'esprit qui a lieu ordinairement lorsque l'âme est plongée dans de profondes ténèbres, s'accomplit aussitôt l'union avec l'Épouse c'est-à-dire la Sagesse de Dieu.

L'ange, en effet, a dit à Tobie qu'après la troisième nuit il s'unirait à son épouse dans la crainte de Dieu ce qui signifie que si la crainte est parfaite, l'amour de Dieu est parfait, et c'est alors que s'opère par l'amour la transformation de l'âme en Dieu.

Ces trois parties de la nuit ne sont en somme qu'une nuit, qui a trois parties comme la nuit naturelle. La première, celle des sens, correspond à la première partie de la nuit naturelle, alors que nous finissons par perdre de vue les choses qui nous entourent; la seconde, celle de la foi, correspond au milieu de la nuit, alors que tout est profondément obscur; et la troisième, qui est Dieu, correspond à l'aurore, qui est déjà proche de la lumière du jour.

Pour mieux comprendre cette doctrine, nous parlerons de chacune de ces nuits en particulier.

A suivre …chapitre 3



 Eucharistie    Colombe


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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Empty Re: *** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel " ***

Message par Maud Jeu 30 Mar - 8:20

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_13

Livre premier ( Chapitre 3 )

Ce chapitre expose la première cause de cette «  Nuit obscure «  , qui consiste dans la mortification de nos tendances sous tous les rapports

Par nuit nous entendons ici la mortification du goût sous tous les rapports. De même que la nuit n'est qu'une privation de la lumière et, par suite, de tous les objets qu'elle peut nous montrer, de telle sorte que notre puissance visuelle est dans une obscurité complète et ne voit rien, de même on peut dire que la mortification de nos tendances est une nuit pour l'âme.

Car l'âme en mortifiant ses tendances sous tous les rapports est comme dans les ténèbres et ne voit rien. La puissance visuelle s'exerce par le moyen de la lumière et se nourrit des objets visibles.

Mais quand la lumière disparaît, elle ne les voit plus. Ainsi l'âme qui se sert de ses tendances se nourrit de tous les objets dont ses tendances lui offrent le goût. Si ce goût est éteint, ou mieux, s'il est mortifié, l'âme ne trouve plus d'aliment dans les créatures et, par suite, ses tendances sont dans l'obscurité et sans rien. Prenons un exemple dans chacune de nos puissances.

Quand l'âme se prive de tout ce qui pourrait satisfaire le sens de l'ouïe, elle reste dans l'obscurité et sans rien par rapport à ce sens.

Si elle se prive de tout ce qui pourrait réjouir le sens de la vue, elle reste également dans l'obscurité et sans rien par rapport à ce sens.

Si elle se prive de toute la suavité des parfums qui peuvent affecter le sens de l'odorat, elle sera aussi forcément dans l'obscurité et sans rien par rapport à ce sens.

Si elle se prive du goût que son palais trouverait dans les aliments, elle mortifie ce sens et se trouve dans l'obscurité et sans rien par rapport à ce sens.

Enfin, en se privant de toute délectation et de tous les plaisirs qu'elle pourrait trouver dans le sens du tact, elle se mortifie par rapport à ce sens dans l'obscurité et sans rien par rapport à ce sens.

Ainsi donc l'âme qui aurait repoussé et rejeté le goût de toutes les choses créées, et mortifié toutes ses tendances, serait, nous pouvons le dire, comme dans la nuit et dans l'obscurité; ce ne serait en quelque sorte qu'un vide complet par rapport à tous les objets créés.

La cause de cela, c'est que l'âme selon les philosophes, est, au moment où Dieu l'unit au corps, comme une table rase ou lisse sur laquelle il n'y a rien de peint; et, à part les connaissances qu'elle acquiert peu à peu par les sens, il ne lui en vient naturellement aucune autre d'ailleurs.

Tant qu'elle est dans le corps, elle ressemble à celui qui se trouve dans une prison obscure et qui ne connaît rien, si ce n'est ce qu'il parvient à voir par les fenêtres de sa prison; si ce moyen lui manque, il ne verra absolument rien autrement. Il en est de même de l'âme.

Ôtez-lui ce qu'elle peut apprendre par les sens qui sont comme les fenêtres de sa prison, elle ne peut naturellement rien connaître par un autre moyen. Quand donc elle rejette les connaissances qu'elle peut recevoir par les sens et s'en prive, nous pouvons bien dire qu'elle se trouve comme dans l'obscurité et le vide; car, ainsi qu'il résulte de ce que nous avons vu, la lumière ne peut lui arriver par d'autres voies que celles dont nous avons parlé.

Sans doute elle ne peut pas ne plus exercer les sens de l'ouïe, de la vue, de l'odorat, du goût, du toucher, mais cela n'a pour ainsi dire aucune importance pour elle et ne la trouble pas plus, si elle n'y adhère pas et le rejette, que si elle ne jouissait point de l'ouïe, de la vue...

Tel l'homme qui voudrait fermer les yeux et serait dans l'obscurité comme l'aveugle qui a perdu la faculté de voir. David a dit à ce sujet: « Je suis pauvre et dans les travaux dès ma jeunesse. » (Ps. LXXXVII, 16).

Il s'appelle pauvre, tout riche qu'il est évidemment, parce qu'il n'a aucun attachement aux richesses: voilà pourquoi il était aussi pauvre que s'il n'avait rien possédé en réalité. Si, au contraire, il n'avait rien possédé en fait, sans être pauvre par la volonté, il n'eût pas été vraiment pauvre, car son âme eût été riche et pleine de désirs. Voilà pourquoi nous appelons ce détachement une nuit pour l'âme.

Nous ne nous occupons pas ici de la privation des biens; cette privation n'en détache pas l'âme qui continue à les désirer; nous parlons du détachement de l'âme par rapport à ses tendances vers ces biens et les plaisirs qu'elle y trouve.

C'est ce détachement qui fait l'âme libre et vide de tous les biens qu'elle pourrait posséder. Or les biens de ce monde n'occupent pas l'âme et ne lui nuisent pas, puisqu'ils ne pénètrent pas en elle; ce qui lui est nuisible, c'est l'attachement à ces biens et le désir qu'elle en a.

Cette première sorte de nuit, comme nous le dirons plus loin, concerne la partie sensitive de l'âme; c'est l'une des deux dont nous avons déjà parlé et par lesquelles l'âme doit passer.
Montrons maintenant combien il convient à l'âme de sortir de sa maison par cette nuit profonde des sens pour arriver à l'union avec Dieu.

à suivre ..chapitre 4


Eucharistie Colombe


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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Empty Re: *** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel " ***

Message par Emmanuel Jeu 30 Mar - 10:19

Merci, @Maud, pour ce partage.

Certains ont parfois crainte de lire Saint Jean de la Croix, car celui-ci nous explique le chemin merveilleux de la montée de l'âme vers Dieu. Et cela nous effraie parfois, car Dieu peut se faire exigeant...

Mais il faut rejeter ces craintes, que nous insuffle le Malin.

Quelle beauté, simplicité et pureté découvre-t-on alors dans ces merveilleux écrits.

Amicalement,

Emmanuel
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Message par Maud Jeu 30 Mar - 10:37

Bonjour et Merci @Emmanuel pour ton commentaire sur ce texte d'aujourd'hui   Smile

Tu as écrit


Certains ont parfois crainte de lire Saint Jean de la Croix, car celui-ci nous explique le chemin merveilleux de la montée de l'âme vers Dieu. Et cela nous effraie parfois, car Dieu peut se faire exigeant...

Mais il faut rejeter ces craintes, que nous insuffle le Malin.  
Jésus dans l' Evangile d'aujourd'hui nous enseigne

" Ne crains pas , crois seulement "

La FOI fait fuir le Malin

Combien est difficile l'exigence du Seigneur , mais combien elle peut être douce aux âmes  qui s'approchent de cette divine Lumière qui leur semble encore cachée   sunny

La lecture de ce livre peut aider à la découvrir


Gloire à toi Seigneu

Amicalement


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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Signat12

* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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Maud
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Message par Maud Ven 31 Mar - 7:46

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_14

« La Montée du Carmel »  Livre premier  - Chapitre 4

Où l’on montre combien il est nécessaire que l’ âme passe vraiment par cette ‘’Nuit obscure ‘’, c'est-à-dire par la mortification des sens , pour marcher vers l’ Union divine .
On le prouve par des comparaisons , des images ,et l’ autorité de la Sainte Ecriture .


 Il est nécessaire que l'âme qui veut arriver à l'union divine passe par cette nuit obscure de la mortification de ses tendances et du renoncement à tous les plaisirs des biens sensibles. En voici la cause. Toutes les affections qu'elle porte aux créatures sont devant Dieu comme de pures ténèbres; tant qu'elle y est plongée, elle est incapable d'être pénétrée de la pure et simple lumière de Dieu.

Elle doit donc tout d'abord les rejeter; car la lumière est incompatible avec les ténèbres. Saint Jean dit, en effet, que les ténèbres ne l'ont point reçue: Tenebrae eam non comprehenderunt (Jean, I, 5).

La raison, c'est que, d'après l'enseignement de la philosophie, deux contraires ne peuvent être contenus dans un même sujet. Or, les ténèbres, c'est-à-dire l'affection que l'on porte aux créatures, et la lumière qui est Dieu, sont contraires et il n'y a entre elles ni ressemblance ni rapport, ainsi que l'enseigne saint Paul en s'adressant aux Corinthiens: Quae societas luci ad tenebras?

« Quel rapport y a-t-il entre la lumière et les ténèbres? (II Cor., VI, 14) ».

Il suit de là que la lumière de l'union divine ne peut pas s'établir dans une âme, si tout d'abord ses affections aux créatures n'en ont pas été chassées.

Pour donner plus de clarté à cette doctrine, nous devons savoir que l'affection et l'attachement que l'âme porte à la créature la rend semblable à cette créature, et plus est grande l'affection qu'elle lui porte, plus aussi elle lui est égale et semblable, car l'amour établit la ressemblance entre celui qui aime et l'objet aimé.

Voilà pourquoi le psalmiste, parlant de ceux qui placent leurs affections dans les idoles, dit: Similes illis fiant qui faciunt ea, et omnes qui confidunt in eis: « Qu'ils leur deviennent semblables ceux qui les font, et tous ceux qui mettent en elles leur confiance (Ps. CXIII, 8 ) ».

Donc, celui qui aime la créature se place au niveau de cette créature, et même plus bas en quelque sorte, car l'amour non seulement rend semblables mais encore assujettit celui qui aime à l'objet aimé. Aussi, quand l'âme aime quelque chose en dehors de Dieu, elle est incapable de la pure union avec Dieu et de sa transformation en lui. La bassesse de la créature est, en effet plus éloignée de la grandeur du Créateur que les ténèbres ne le sont de la lumière.

Toutes les créatures du ciel et de la terre comparées à Dieu ne sont rien, dit Jérémie: Aspexi terram, et ecce vacua erat, et nihil; et coelos, et non erat lux in eis: « J'ai regardé la terre, elle était vide et néant; j'ai considéré les cieux, et ils étaient sans lumière (Jer. IV, 23) ».

Quand il dit qu'il a vu la terre vide, il donne à entendre que toutes les créatures de la terre n'étaient rien, et que la terre elle-même n'était rien; quand il dit qu'il a considéré les cieux et qu'il les a vus sans lumière, il veut dire que toutes les lumières du ciel, comparées à Dieu, ne sont que pures ténèbres.

Par conséquent, si toutes les créatures considérées sous ce rapport ne sont rien, et l'affection qu'on leur porte moins que rien, nous pouvons dire qu'elles sont un obstacle et un empêchement à notre transformation en Dieu. Car les ténèbres ne sont rien, et moins que rien puisqu'elles sont une privation de la vue.

De même que celui qui est dans les ténèbres ne comprend pas la lumière, de même l'âme qui est attachée à la créature ne peut comprendre Dieu; et tant qu'elle n'en sera pas détachée, elle ne pourra pas posséder Dieu ici-bas par la pure transformation de l'amour, ni là-haut dans la claire vision du ciel.

Il faut expliquer davantage cette doctrine. Tout l'être des créatures comparé à l'être infini de Dieu n'est que néant. Dès lors, l'âme qui met son affection dans l'être des créatures est néant, elle aussi, devant Dieu, et même moins que néant; car, ainsi que nous l'avons dit, l'amour rend celui qui aime égal et ressemblant à l'objet aimé; il le met même au-dessous. Aussi cette âme ne pourra nullement s'unir à l'être infini de Dieu, car ce qui n'est pas n'a pas de rapport avec ce qui est.

De même, toute la beauté des créatures comparée à la beauté infinie de Dieu n'est que souveraine laideur, comme le dit Salomon au livre des Proverbes: Fallax gratia et vana est pulchritudo: « Trompeurs sont les charmes et vaine est la beauté (Prov. XXXI, 30) ». Ainsi l'âme qui est attachée à la beauté d'une créature quelconque participe devant Dieu à sa laideur. Voilà pourquoi cette âme qui est laide ne pourra se transformer dans la beauté divine, car la laideur est incompatible avec la beauté.

De même encore, toutes les grâces et les attraits des créatures comparés avec la grâce de Dieu ne sont que disgrâce souveraine et souverain déplaisir. Aussi l'âme qui se laisse prendre aux bonnes grâces et aux attraits des créatures est souverainement disgracieuse et désagréable aux yeux de Dieu; elle n'est pas capable de la grâce infinie de Dieu et de ses attraits, car ce qui est souverainement disgracieux est infiniment distant de Celui qui est la grâce même.

Toute la bonté des créatures du monde comparée à la bonté infinie de Dieu n'est que souveraine malice. Il n'y a de bon que Dieu seul (Luc, XVIII, 19). Aussi l'âme qui s'attache aux biens de ce monde est souverainement mauvaise devant Dieu.

De même que la malice n'est pas capable de comprendre la bonté, de même l'âme dont nous parlons ne pourra s'unir parfaitement à Dieu, qui est souveraine bonté.

Toute la sagesse du monde et l'habileté des hommes comparée à la sagesse infinie de Dieu n'est qu'une pure et souveraine ignorance, comme le dit saint Paul en s'adressant aux Corinthiens: Sapientia enim hujus mundi stultitia est apud Deum:

« La sagesse de ce monde est folie devant Dieu (I Cor. III, 18) ».

Aussi toute âme qui s'appuie sur sa science et son habileté pour arriver à s'unir à la sagesse de Dieu est souverainement ignorante devant Dieu et en restera bien loin, car l'ignorance ne connaît pas ce qu'est la sagesse.

Saint Paul dit que cette sagesse du monde est une folie devant Dieu.

Ceux qui s'imaginent posséder quelque connaissance sont très ignorants, comme le dit le même apôtre: Dicentes enim se esse sapientes, stulti facti sunt: « Ils ont dit qu'ils étaient des sages, et ils sont devenus des insensés (Rom. I, 22) ». Ceux-là possèdent la sagesse de Dieu qui se font petits et ignorants, renoncent à leur science et marchent avec amour dans la voie du service de Dieu. Saint Paul enseigne encore cette sorte de sagesse quand il dit:

« Si quelqu'un croit être sage parmi vous, qu'il se fasse ignorant pour être sage, car la sagesse du monde est folie devant Dieu (I Cor. III 18-19) ».

Aussi l'âme qui veut s'unir à la sagesse de Dieu doit passer par le non-savoir, et non par le savoir.

Toute la souveraineté et la liberté du monde, comparées à la liberté et à la souveraineté de l'esprit de Dieu, ne sont que servitude profonde, angoisse et esclavage.

Aussi l'âme qui est éprise des grandeurs et des dignités ou qui recherche la liberté de ses tendances est regardée et traitée devant Dieu non comme l'enfant libre, mais comme une personne basse, captive de ses passions; elle n'a pas voulu suivre la sainte doctrine du Sauveur, qui nous dit: Celui qui veut être le plus grand sera le plus petit; et celui qui veut être le plus petit sera le plus grand (Luc, XXII, 26).

Voilà pourquoi elle ne pourra pas arriver à la liberté royale de l'esprit, qui s'acquiert dans la divine union, car l'esclavage est absolument incompatible avec la liberté; et celle-ci ne peut habiter un coeur assujetti aux caprices dont il est l'esclave: elle habite le coeur libre, le coeur du fils. Tel est le motif pour lequel Sara dit à son mari Abraham de chasser de la maison l'esclave et son fils, parce que le fils de l'esclave ne devait pas partager l'héritage du fils de la femme libre (Gen., XXI, 10).

Toutes les délices et douceurs que la volonté trouve dans les choses du monde ne sont que peines, tourments et amertumes si on les compare aux délices et aux douceurs de Dieu. Celui qui s'y attache ne mérite devant Dieu que peine extrême, tourment et amertume; aussi ne pourra-t-il pas parvenir aux suavités de l'union avec Dieu.

Toutes les richesses et la gloire des créatures, comparées à la richesse souveraine qui est Dieu, ne sont que pauvreté absolue et misère profonde. L'âme qui s'attache à leur possession est souverainement pauvre et misérable devant Dieu.

Aussi n'arrivera-t-elle pas au bienheureux état de la richesse et de la gloire qui est celui de la transformation en Dieu, car par sa pauvreté et sa misère elle est à une distance infinie de Celui qui est souverainement riche et glorieux.

Aussi la divine Sagesse se plaint de ces mortels qui se dégradent, s'avilissent, se rendent misérables et pauvres parce qu'ils recherchent ce qui est beau, grand et riche aux regards du monde, et Elle leur adresse cette apostrophe dans les Proverbes:

« O hommes, je crie vers vous; ma voix s'adresse aux enfants des hommes.

Comprenez, petits enfants, ce qu'est la sagesse; et vous, insensés, soyez attentifs. Écoutez, car j'ai à vous parler de grandes choses... Avec moi sont les richesses et la gloire, la magnificence et la justice. Les fruits que vous acquérez en me possédant valent plus que l'or et les pierres précieuses, et mes productions plus que l'argent le plus pur. Je marche dans les voies de la justice, dans les sentiers de la prudence, pour enrichir ceux qui m'aiment et remplir leurs trésors (Pro. VII, 4-6, 18-21). »

Par ces paroles, la Sagesse divine s'adresse à tous ceux qui mettent leur coeur et leurs affections dans une créature quelconque d'ici-bas, selon que nous l'avons expliqué. Elle les appelle petits, parce qu'ils se rendent semblables à ce qu'ils aiment et qui est tout petit. C'est pour ce motif qu'elle leur dit d'être prudents et de considérer les grandes choses dont elle traite, et non ce qui est petit comme eux.

Elle leur représente que les grandes richesses et la gloire qu'ils aiment sont avec elle et en elle, et non là où ils s'imaginent. Elle ajoute que l'opulence et la justice sont en elle. Et si les trésors de ce monde leur paraissent précieux, elle les engage à bien considérer que ses trésors sont au-dessus de tout.

Car le fruit qu'on en tire vaut plus que l'or et les pierres précieuses; de même, les effets qui en découlent sont plus estimables que l'argent pur qu'ils ambitionnent et qui est l'image de tous les genres d'affections que l'on peut avoir en cette vie.

Méditons ...

à suivre ... chapitre 5



Eucharistie Colombe


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Message par Maud Sam 1 Avr - 7:41

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_15

 « La Montée du Carmel »  Livre premier  - Chapitre 5

Où l’on traite et continue le même sujet ; On montre l’ autorité et des images tirées de la Sainte Ecriture combien il est nécessaire à l’Âme d’aller à Dieu par cette «  Nuit obscure « de la mortification de nos tendances

Ce que nous avons dit peut nous donner quelque idée de la distance qui sépare tout ce que les créatures sont en elles-mêmes de ce que Dieu est en lui-même. Nous voyons également comment ceux qui s'attachent à quelques-unes d'entre elles sont aussi bien qu'elles éloignés de Dieu, puisque, comme nous le répétons, l'amour rend nos âmes égales et semblables à elles. Saint Augustin l'avait bien compris, quand , s'adressant à Dieu dans ses « Soliloques », il disait: « Infortuné que je suis!

Quand donc ma petitesse et mon imperfection pourront-elles être en rapport avec votre rectitude? Vous êtes essentiellement bon, et moi je suis mauvais; vous êtes miséricordieux, et moi sans miséricorde; vous êtes saint, et moi misérable; vous êtes juste, et moi injuste; vous êtes la lumière, et moi je suis aveugle; vous êtes la vie, et moi la mort; vous êtes le remède, et moi le malade; vous êtes la souveraine vérité, et moi je ne suis que vanité (Solil. Ch. II (Migne, Patr. Lat., t. XL, p. 866)) ».

Ces paroles, le Saint les prononçait pour montrer sa tendance vers les créatures.

C'est donc une ignorance souveraine de la part de l'âme de se croire capable d'arriver à ce haut état de l'union divine, si tout d'abord elle n'a pas détaché ses tendances de tous les biens naturels et surnaturels qui peuvent lui appartenir (...qui peuvent l'arrêter, comme nous le montrerons plus loin ». P. Silverio); il y a, en effet, une distance infinie entre eux et le don qui est fait en cet état de pure transformation en Dieu.

Voilà, pourquoi le Christ, Notre-Seigneur, nous enseigne cette voie du renoncement, lorsqu'il nous dit dans saint Luc: « Celui qui ne renonce pas à tout ce qu'il possède ne peut être mon disciple (Luc. XIV, 33) ».

Voilà qui est clair. La doctrine que le Fils de Dieu est venu enseigner en ce monde est celle du mépris de toutes choses créées, qui nous dispose à recevoir l'Esprit de Dieu. Tant que l'âme ne s'est pas détachée des créatures, elle est incapable de recevoir ce divin Esprit et d'arriver à la pure transformation en lui.

Nous avons une figure de cette vérité au livre de l'« Exode », où il est dit que la Majesté divine n'a pas donné l'aliment céleste, c'est-à-dire la manne, aux enfants d'Israël, tant qu'ils n'avaient pas épuisé la farine qu'ils avaient apportée d'Égypte (Ex. XVI, 3 sv). Cela nous fait comprendre que l'âme doit tout d'abord se détacher de tous les biens créés avant de parvenir à l'union divine, car cette nourriture des anges n'est pas pour le palais qui se plaît encore dans la nourriture des hommes.

Non seulement elle est incapable de recevoir l'Esprit Divin, l'âme qui se nourrit ainsi et cherche de la saveur dans des mets étrangers, mais elle contriste même beaucoup la divine Majesté quand elle recherche l'aliment spirituel sans se contenter de Dieu seul, et en voulant conserver en même temps son affection pour d'autres objets et sa tendance vers eux.

C'est là ce que nous enseigne encore la sainte Écriture. Les Hébreux ne se contentèrent pas de cette nourriture simple qu'était la manne; mais ils désirèrent de la chair et en demandèrent; et le Seigneur s'irrita profondément de les voir allier un aliment si vil et si grossier à un aliment si élevé et si simple que renfermait cependant la saveur et la substance de tous les aliments (Nomb. XI. 4).

Aussi ces viandes étaient encore dans leurs bouches, lorsque, nous dit David, la colère de Dieu fondit sur eux, et le feu du ciel en dévora des milliers (Ps. LXXVII, 31). Il regardait comme indignes de recevoir le pain du ciel ceux qui en voulaient un autre.

Oh! Si les âmes adonnées à la spiritualité savaient de quels biens et de quelle abondance de faveurs spirituelles elles se privent en ne voulant pas se détacher entièrement des bagatelles de ce monde! Comme elles trouveraient dans cette simple nourriture le goût de tous les biens, à la condition de se détacher de toute jouissance sensible! Mais elles ne le trouvent pas parce qu'elles ne veulent pas ce renoncement.

Pourquoi les Israélites n'ont-il pas trouvé le goût de tous les aliments qui était renfermé dans la manne? C'est parce qu'ils ne se contentaient pas d'elle seule. Si donc ils n'y trouvaient pas le goût et la force qu'ils auraient voulus, ce n'est point parce que la manne ne les avait point, mais c'est parce qu'ils désiraient autre chose.

Celui qui veut aimer autre chose avec Dieu montre clairement qu'il fait de Dieu bien peu de cas; il met dans une même balance avec Dieu ce qui, nous l'avons dit, en est infiniment éloigné. L'expérience nous apprend que la volonté, en s'affectionnant à un objet, le met dans son estime au-dessus de tout autre qui serait même bien plus excellent, mais qui ne lui plaît pas autant.

Si elle veut jouir également de l'un et de l'autre, elle fait forcément injure au plus digne, puisqu'elle les met injustement sur le même pied.

Or il n'y a rien qui puisse être égal à Dieu; c'est donc lui faire une grave injure que d'aimer autre chose avec lui ou d'y porter son affection. Et s'il en est ainsi, que serait-ce si l'âme aimait quelque chose au-dessus de Dieu!

Telle est la vérité que Dieu a voulu nous donner à entendre quand il ordonna à Moïse de gravir le sommet de la montagne où il devait lui parler. Non seulement il lui commanda d'y monter seul et de laisser en bas les enfants d'Israël, mais il défendit même que les bêtes de somme fussent dans les pâturages voisins de la montagne (Ex. XXXIV, 3).

Il montre par là que l'âme qui doit parvenir à cette montagne de la perfection pour communiquer avec Dieu, non seulement doit se détacher de toutes les choses créées et les laisser en bas, mais doit aussi se détacher de toutes ses tendances figurées par les bêtes de somme et ne pas les laisser dans les pâturages qui sont en vue de la montagne, c'est-à-dire dans la jouissance d'autres choses qui ne sont pas Dieu.

C'est en lui que tous les désirs sont remplis: c'est l'état de perfection.

Ainsi donc, la voie et le moyen nécessaire pour monter consistent dans un soin habituel que l'on porte à mortifier les tendances. On arrivera d'autant plus vite au sommet que l'on s'empressera davantage à ce détachement. Tant qu'on ne l'a pas obtenu, on ne parviendra pas au sommet, quelles que soient d'ailleurs les vertus que l'on pratique; et on ne les pratique pas parfaitement si l'âme n'est pas dans la nudité, le dépouillement et le détachement de toutes les tendances.

Nous en avons une image très vive dans « la Genèse ». Nous y lisons que le patriarche Jacob voulut aller sur le mont Béthel pour y élever un autel à Dieu et lui offrir un sacrifice. Mais il imposa tout d'abord trois conditions aux gens de sa suite: la première, de rejeter loin d'eux tous les dieux étrangers; la seconde, de se purifier; la troisième, de changer de vêtements (Gen. XXXV 2).

Ces trois conditions nous donnent à comprendre ce que l'âme qui veut gravir cette montagne de la perfection doit accomplir pour y faire d'elle-même un autel où elle offrira à Dieu un sacrifice d'amour pur, de louange et d'adoration profonde.

Avant de monter, elle doit avoir accompli parfaitement les conditions analogues à celles que nous avons rapportées; la première consiste à rejeter tous les dieux étrangers, c'est-à-dire toutes ses affections étrangères et toutes ses attaches; la seconde consiste à se purifier par la nuit obscure des sens des restes provenant de ses tendances: elle doit les mortifier et se repentir sincèrement; enfin la troisième condition nécessaire pour arriver à cette montagne élevée qui consiste dans le changement de vêtements.

Ces vêtements, une fois les deux premières conditions accomplies, Dieu même les remplace par des vêtements nouveaux.

Il dote l'âme d'une nouvelle faculté de connaître et d'aimer Dieu en lui-même; mais tout d'abord il a dégagé sa volonté de tous ses anciens vouloirs et de tous les attraits du vieil homme, il a donc établi l'âme dans de nouvelles connaissances et un abîme de délices; il a relégué bien loin toutes ses autres connaissances et les souvenirs du passé; il a fait cesser tout ce qui restait du vieil homme, c'est-à-dire ses aptitudes naturelles, et a revêtu toutes ses facultés d'une nouvelle aptitude complètement surnaturelle, de telle sorte que ses opérations, d'humaines qu'elles étaient, sont devenues divines.

Voilà ce que l'on obtient dans l'état d'union. L'âme n'y est plus qu'un autel où Dieu reçoit l'adoration, la louange et l'amour, et où il habite seul. Voilà pourquoi il avait prescrit que l'autel sur lequel devaient lui être offerts les sacrifices fût vide à l'intérieur (Ex. XXVII, 8 ). Il voulait faire comprendre à l'âme qu'il la veut dégagée de toutes les choses créées, pour être digne de servir d'autel à Sa Majesté.

Il ne permettait pas non plus qu'il y eût sur cet autel un feu étranger, ni que son propre feu vînt jamais à s'éteindre. Aussi, parce que Nadab et Abiud, fils du grand prêtre Aaron, lui offrirent un feu étranger, il en fut irrité et les frappa subitement de mort devant l'autel même (Lévit. X, 1).

Nous devons comprendre par là que l'âme, pour être un autel digne de Dieu, ne doit pas laisser le feu de la charité s'éteindre en elle, ni consentir au mélange d'un amour étranger. Dieu ne consent à aucun alliage de la créature avec lui. Voici en effet ce que nous lisons au premier livre des Rois.

Les Philistins avaient placé l'arche d'alliance dans le temple où était leur idole; or, tous les matins, on trouvait cette idole renversée par terre; et à la fin ils la trouvèrent brisée (I Rois V. 2-4). Le seul désir que Dieu admette et veuille là où il est, est celui de garder sa loi en toute perfection et de porter la Croix du Christ sur nos épaules.

La sainte Écriture ne nous dit pas que Dieu ait ordonné de placer, dans l'arche où était la manne, autre chose que le livre de la Loi (Deut. XXXI, 26) et la verge d'Aaron, image de la Croix (Nomb. XVII, 10).

Car l'âme, dont l'unique ambition sera de garder parfaitement la loi du Seigneur et de porter la Croix de Jésus-Christ, sera l'arche véritable qui renfermera en soi la véritable manne, c'est-à-dire Dieu lui-même.

Méditons ..

A suivre …Chapitre 6

 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Lun 3 Avr - 7:56

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_16


 La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 6

Où l’on parle de deux principaux dommages causés à l’ âme par  ses tendances ; l’un est privatif l’autre est positif.
On le prouve par l’ autorité de la Sainte Ecriture


Il est bon de donner un exposé plus clair et plus détaillé de ce que nous avons dit. Nous allons donc montrer comment nos tendances causent à l'âme deux dommages principaux. Le premier la prive de l'Esprit de Dieu; l'autre la fatigue, la tourmente, l'obscurcit, la souille, l'affaiblit.

C'est là ce qu'enseigne Jérémie par ces paroles: « Mon peuple a fait deux maux: il m'a abandonné, moi qui suis la source d'eau vive, et il s'est creusé des citernes qui ne peuvent contenir l'eau (Jér. II, 13)

. » Ces deux maux sont causés par un seul acte de la tendance naturelle. Il est clair, en effet, que l'âme qui s'affectionne à une créature tombe, par le fait même, plus bas que la créature; plus elle s'y attache, et moins elle est capable de s'unir à Dieu.

Deux contraires ne peuvent pas exister à la fois dans le même sujet; or l'amour de Dieu et l'amour de la créature sont deux contraires; ils ne peuvent exister en même temps dans une âme.

Quel rapport y a-t-il entre la créature et le Créateur? Entre le sensible et le spirituel? Entre le visible et l'invisible? Entre le temporel et l'éternel? Entre l'aliment céleste, pur et spirituel, et la nourriture grossière des sens?

Entre le dénûment du Christ et l'attachement à un objet quelconque?

Dans l'ordre naturel des choses, une forme ne peut s'introduire dans un sujet si elle n'en a pas tout d'abord chassé la forme contraire; car celle-ci, tant qu'elle dure, lui est un obstacle; il y a incompatibilité entre les deux; de même, tant que l'âme est assujettie à l'esprit sensible et animal, elle est incapable de recevoir l'esprit purement spirituel.

Aussi Notre-Seigneur a dit dans saint Matthieu: « Il n'est pas juste de prendre le pain des enfants pour le donner aux chiens (Mat. XV, 26) »; et dans un autre endroit: « Veillez à ne pas donner aux chiens ce qui est saint (Mat. VII, 6). »

Dans ces textes, Notre-Seigneur Jésus-Christ appelle enfants de Dieu ceux qui renoncent à toutes leurs tendances vers les créatures, pour se disposer à recevoir purement l'Esprit de Dieu; et il compare à des chiens ceux qui veulent trouver pour leurs tendances un aliment dans les créatures. Aux enfants il est donné de manger avec leur père et à sa table, c'est-à-dire à se nourrir de son esprit; tandis que les miettes qui tombent de la table sont pour les chiens.

Il faut savoir ici que toutes les créatures ne sont que des miettes qui sont tombées de la table de Dieu.

C'est donc à bon droit que l'on appelle chien celui qui cherche son aliment dans les créatures; on lui enlève le pain des enfants, parce qu'il ne veut pas s'élever au-dessus des créatures, qui ne sont que de vraies miettes, jusqu'à la table de l'Esprit incréé de son Père. Aussi ils sont justement comme des chiens toujours affamés, car les miettes servent plutôt à exciter leur faim qu'à l'apaiser.

David dit d'eux: « Ils souffriront de la faim comme des chiens, et rôderont autour de la cité; et s'ils ne sont pas rassasiés, ils murmureront (Ps. LVIII, 15-16). »

Tel est le propre de celui qui est esclave de ses tendances; il est toujours mécontent et inquiet comme un famélique. Or quel rapport peut-on établir entre la faim que provoquent toutes les créatures, et le rassasiement que donne l'Esprit de Dieu?

Tant que l'âme n'aura pas rejeté cette faim du créé, elle ne pourra recevoir le rassasiement de l'incréé. Ainsi qu'il a déjà été dit, deux contraires, comme le sont la faim et le rassasiement, ne peuvent pas se rencontrer à la fois dans le même sujet.

Ce qui précède montre comment Dieu fait plus en quelque sorte quand il purifie et dégage une âme de ces oppositions à son esprit que quand il la tire du néant; les dérèglements de ses tendances et de ses affections sont plus opposés à l'action divine et lui résistent plus que le néant.

Ce néant, en effet, ne résiste pas à Sa Majesté, comme le fait la tendance de la créature.
Nous en avons dit assez sur le premier dommage principal causé à l'âme par ses tendances, en résistant à l'Esprit de Dieu; d'ailleurs nous en avions déjà parlé longuement plus haut.

Parlons maintenant du second dommage qu'elles produisent. Il se manifeste de beaucoup de manières; car les tendances de l'âme la fatiguent, la troublent, l'obscurcissent, la souillent et l'affaiblissent. Nous traiterons de ces cinq effets en particulier.

Tout d'abord, il est clair que ces tendances lassent et fatiguent l'âme. Elles ressemblent à de petits enfants inquiets et mécontents, qui ne cessent de demander tantôt une chose, tantôt une autre à leur mère, et ne sont jamais satisfaits. De même que se lasse et se fatigue celui qui creuse la terre avec le désir d'y trouver un trésor, ainsi se lasse et se fatigue l'âme qui veut acquérir ce que réclament ses tendances; alors même qu'elle réussit enfin à l'obtenir, elle se fatigue toujours, car elle n'est jamais satisfaisante.

En définitive, elle n'a creusé que des citernes crevassées qui ne peuvent contenir l'eau pour étancher la soif.

Aussi Isaïe a dit: « Après s'être lassé et fatigué, il a encore soif et son âme est toujours altérée (Is. XXXIX, 8 ) ».

Cette âme se lasse et se fatigue à cause de ses tendances; elle est comme le malade qui a la fièvre: à chaque instant sa soif augmente, il ne se trouve bien que lorsque la fièvre l'a quitté.
Comme il est dit au livre de Job: « Après s'être bien rassasié, il se trouve déchiré, étouffé, et toutes les douleurs fondent sur lui (Job XX, 22) ».

L'âme est fatiguée et affligée par ses tendances, qui la blessent, la secouent et la troublent comme le sont les flots sous l'action des vents. Comme eux, elle est bouleversée sans pouvoir trouver nulle part un moment de repos.

Isaïe dit en parlant de ces âmes: « Les impies sont comme une mer agitée qui ne peut se calmer (Is. LVII, 20) »; et celui-là est méchant qui ne surmonte pas ses tendances.

Elle se lasse et fatigue, l'âme qui veut satisfaire ses penchants; elle ressemble à celui qui, poussé par la faim, ouvre la bouche pour se rassasier de vent; et, au lieu de se rassasier, il se dessèche davantage, parce que le vent n'est pas son aliment.

Aussi Jérémie a dit « Dans l'ardeur de ses désirs, elle a aspiré le vent dans ses affections (Jér. II, 24) ». Et voulant aussitôt après expliquer la sécheresse où elle se trouve, il lui donne cet avis: « Préserve ton pied de la nudité, et ton gosier de la soif (Jér. II, 25) », c'est-à-dire: préserve ta volonté de l'accomplissement d'un désir qui ne lui causerait que plus d'aridité.

L'amoureux s'est lassé et fatigué, car, le jour où il comptait réaliser ses voeux, il voit s'évanouir ses espérances; de même se lasse et se fatigue l'âme qui cède à ses tendances et les réalise, car tout lui cause un vide plus grand et une faim plus cruelle.

Comme on le dit vulgairement, nos tendances sont comme le feu: jetez-y du bois, il grandit; mais à peine l'a-t-il consumé, qu'il s'éteint nécessairement. Or les tendances sont encore dans une condition pire sous ce rapport.

Car le feu s'éteint dès que le bois est consumé, tandis que nos tendances ne diminuent pas quand on a travaillé à les réaliser et que leur objet s'évanouit; bien loin de diminuer, à l'exemple du feu qui a consumé son aliment, elles tombent dans la défaillance et la fatigue, car leur faim s'est accrue et par ailleurs leur aliment a diminué.

Isaïe dit à ce propos: « Il ira à droite, et il aura faim; il mangera à gauche, et il ne sera point rassasié (Is. IX, 20) ».

Ceux-là, en effet, qui ne mortifient pas leurs tendances, quand ils marchent dans la voie de Dieu, qui est leur droite, sont justement torturés par la faim, parce qu'ils ne méritent pas le rassasiement de l'Esprit de suavité. Lorsqu'ils mangent à gauche, c'est-à-dire lorsqu'ils se laissent aller à la jouissance de quelque créature, ils ne se rassasient nullement, et c'est justice; car ils laissent de côté ce qui seul peut les satisfaire, et ils se nourrissent de ce qui augmente leur faim.

Il est donc clair que les tendances sont pour l'âme une cause de lassitude et de fatigue.

Méditons ..


A suivre …chapitre 7


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Mar 4 Avr - 7:12

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_17

La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 7

Où l’on montre comment l’âme est tourmentée par ses tendances .
On le prouve aussi par  des comparaisons et l’ autorité de la Sainte Ecriture


Il y a un second genre de mal positif que les tendances causent à l'âme: elles la tourmentent et l'affligent; elles la rendent semblable à celui qui est attaché par des liens à un objet et qui n'a pas de repos tant qu'il n'en est pas délivré.

David dit à ce propos: « Les liens de mes péchés, c'est-à-dire mes tendances, m'ont enserré de toutes parts (Ps. CXVIII, 61). »

Si celui qui s'étend tout nu sur des épines ou des pointes aiguës est tourmenté et affligé, il en est de même de l'âme quand elle s'appuie sur ses tendances; celles-ci, en effet la blessent, la chagrinent, s'attachent à elle et la torturent.

C'est là ce que dit David: « Ils m'ont circonvenu comme des abeilles qui m'ont piqué de leurs dards et m'ont embrasé comme le feu embrase les épines (Ps. CXVIII, 12). » Car nos tendances, qui sont de véritables épines, activent le feu de nos angoisses et de nos tourments.

De même que le laboureur qui a en vue la moisson, pique et tourmente le boeuf attaché à la charrue, ainsi la concupiscence afflige l'âme par ses tendances dans le but d'obtenir ce qu'elle veut.

Nous en avons un exemple bien frappant dans ce désir qu'avait Dalila de savoir quel était le secret de la force extraordinaire de Samson. La sainte Écriture nous raconte qu'elle en était tellement fatiguée et tourmentée qu'elle tomba dans une défaillance pour ainsi dire mortelle (Jug. XVI, 16).

Les tendances tourmentent d'autant plus l'âme qu'elles sont plus vives; aussi l'infortunée subit autant de tourments qu'elle a de tendances; plus ses tendances sont nombreuses, plus nombreux aussi sont ses tourments.

C'est ainsi que se réalise en elle, même dès cette vie, ce que l'Apocalypse dit de Babylone: « Plus elle s'est glorifiée et plus elle a vécu dans les délices, plus aussi vous devez lui donner de tourments et d'angoisses (Apoc. XVIII, 7). »

Voyez quel est le tourment de celui qui est tombé aux mains de ses ennemis. Eh bien! Tel est le tourment et telle est l'affliction de l'âme qui se laisse entraîner par ses tendances.
Nous en avons une image au livre des Juges. Nous y lisons que le vaillant Samson était fort, jouissait de la liberté et était Juge en Israël. Mais il tombe au pouvoir de ses ennemis qui lui enlèvent sa force, lui crèvent les yeux, l'obligent à tourner une meule de moulin, et ainsi l'affligent et le torturent à l'envi.

Tel est le sort de l'âme chez qui les tendances sont vivantes et victorieuses; elles commencent par l'affaiblir et l'aveugler, comme nous allons le dire bientôt, puis elles l'affligent et la tourmentent en l'attachant à la meule de la concupiscence; les liens qui l'attachent de la sorte sont ceux même de ses tendances.

Or Dieu a pitié de ces âmes qui, au prix de tant de fatigues et à si grands frais, cherchent à satisfaire la faim et la soif de leurs tendances dans les créatures. Il leur dit par la voix d'Isaïe: « Vous tous qui avez soif, venez à la source; et vous tous qui avez l'argent de la volonté propre, hâtez-vous de me faire vos achats et mangez, venez et achetez de mon vin et de mon lait, c'est-à-dire la paix et les douceurs spirituelles, sans me donner l'argent de votre propre volonté, ni même m'en donner l'intérêt, ni me payer par quelques travaux, comme vous le faites pour vos tendances.

Pourquoi donnez-vous l'argent de votre propre volonté pour ce qui n'est pas du pain, je veux dire l'Esprit de Dieu? Pourquoi prenez-vous de la peine pour satisfaire vos tendances avec ce qui ne peut les rassasier?

Venez, croyez-moi; vous aurez à manger le bien que vous désirez et votre âme aura des mets succulents pour se délecter (Is LV, 1-2

Ce passage n'est pas le texte pur de l'écrivain sacré, mais un commentaire de ce texte). » Or cette délectation indique que l'âme a rejeté la satisfaction que donnent toutes les créatures, car la créature tourmente, et l'Esprit de Dieu vivifie.

Ainsi Notre-Seigneur nous appelle et nous dit dans saint Matthieu: « Venez à moi, vous tous qui êtes tourmentés et qui êtes accablés par le poids de vos soucis et de vos tendances; sortez-en, venez à moi, et je vous soulagerai; vous trouverez pour vos âmes le repos (Mat. XI, 28) » dont vous privent vos tendances qui sont une très lourde charge, comme le dit David: « Elles se sont appesanties sur moi comme un lourd fardeau (Ps. XXXVII, 5). »

Méditons….

A suivre ....chapitre 8


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Message par Maud Mer 5 Avr - 7:42

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La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 8

Où l’on montre comment les tendances obscurcissent l’ âme.
On le prouve par des comparaisons et l’ autorité de la Sainte Ecriture


Il y a un troisième mal causé par nos tendances à l'âme. Elles aveuglent l'âme et obscurcissent la raison. De même que les vapeurs obscurcissent l'air et interceptent les rayons du soleil, ou qu'un miroir terni ne peut reproduire nettement l'objet qui lui est présenté, ou qu'une eau bourbeuse ne peut reproduire les traits de celui qui s'y regarde, de même l'âme qui cède à ses tendances a son intelligence obscurcie; elle ne laisse pas le soleil de la raison naturelle ni le soleil surnaturel de la sagesse de Dieu l'investir et l'éclairer.

Aussi le prophète royal a dit à ce propos: « Mes iniquités m'ont environné, et je n'ai pu voir la lumière (Ps. XXXIX, 13). » Par cela même que l'intelligence est obscurcie, la volonté est affaiblie et la mémoire est engourdie, en un mot le désordre s'est introduit dans les opérations de l'âme; car ces puissances dépendent dans leurs opérations de l'entendement: si l'entendement est aveuglé, les autres puissances ne peuvent être que dans le trouble et dans le désordre.

Aussi David a-t-il dit: « Mon âme est dans un trouble profond (Ps. VI, 4) », ce qui revient à dire que ses puissances sont dans le désordre.

Et, en effet, comme nous l'avons dit, l'entendement est aussi incapable de recevoir l'illumination de la sagesse de Dieu que l'air chargé de ténèbres l'est de recevoir la lumière du soleil. La volonté est aussi impuissante à aimer Dieu d'un amour pur que le miroir terni à réfléchir l'objet présent; la mémoire obscurcie par les ténèbres de ses tendances est encore moins apte à se pénétrer avec sérénité du souvenir de Dieu; pas plus que l'eau vaseuse ne peut rendre avec netteté les traits de celui qui s'y regarde.

De plus, les tendances aveuglent et obscurcissent l'âme, parce que les tendances, comme telles, sont aveugles; par elles-mêmes elles ne comprennent rien, et la raison est toujours leur guide assuré. Aussi chaque fois que l'âme se laisse entraîner par ses tendances, elle s'aveugle; elle ressemble à celui qui voit et se laisse guider par celui qui ne voit pas: c'est absolument comme s'ils étaient aveugles tous les deux, et alors se réalise exactement ce que Notre-Seigneur dit dans saint Matthieu:

« Si un aveugle conduit un autre aveugle, ils tombent tous les deux dans la fosse (Mat. XV, 4). »

Il sert de peu au petit papillon d'avoir des yeux, puisqu'il se laisse charmer par la beauté qui l'attire pour le consumer. Nous pouvons dire encore que celui qui se complaît dans ses tendances ressemble au poisson qui, ébloui par la lumière qu'on lui présente, ne voit pas les pièges que lui ont tendus les pêcheurs.

C'est ce que David fait très bien comprendre, quand il dit de pareilles âmes: « La lumière a frappé leurs yeux, et elles n'ont plus vu le soleil (Ps. LVII, 9). »

Nos tendances sont comme le feu dont la chaleur échauffe et la lumière fascine. Telle est leur action: elles enflamment la concupiscence et éblouissent si bien l'entendement qu'il ne voit plus la lumière qui lui est propre. Le motif pour lequel l'éblouissement a lieu, c'est que l'on met devant les yeux une lumière qui leur est étrangère, la puissance visuelle s'y attache et ne voit plus l'autre.

De même les tendances; elles se mettent si près de l'âme et s'imposent tellement à son regard, que la pauvre âme s'y arrête et s'en nourrit; la lumière de la saine raison a été écartée, et l'âme ne la reverra pas, tant que l'éblouissement produit par ses tendances n'aura pas disparu.

Aussi faut-il déplorer amèrement l'ignorance de certaines personnes; elles se chargent de pénitences et de pratiques, mais sans règle et sans autre ordre que celui de leur propre volonté. Elles y mettent leur confiance et s'imaginent que cette voie seule, sans la mortification de leurs autres tendances, suffira pour les acheminer à l'union de la divine Sagesse.

Or il n'en sera pas ainsi tant qu'elles n'apportent pas toute leur diligence à mortifier toutes les autres tendances. Si elles y apportaient la moitié seulement de pareils efforts avec le soin voulu, elles profiteraient plus en un mois que par tous les autres exercices en plusieurs années.

Il est nécessaire de travailler la terre pour qu'elle porte des fruits; sans cela elle ne produit que de mauvaises herbes; de même la mortification de nos tendances est nécessaire pour le progrès de l'âme. Sans cela, je ne crains pas de le dire, elle n'acquerra pas de perfection et ne grandira pas dans la connaissance de Dieu et d'elle-même; tout ce qu'elle pourra faire ne produira pas plus que la semence qui est jetée sur une terre non labourée.

Par conséquent, l'âme restera dans les ténèbres et l'impuissance tant qu'elle n'aura pas mortifié ses tendances. Celles-ci sont pour l'âme ce que la cataracte ou un corps étranger est pour l'oeil: ils empêchent la vue jusqu'à ce qu'on les enlève.

David a été frappé de l'aveuglement de ces âmes et des obstacles que leurs tendances opposent à la lumière de la vérité; il a vu combien Dieu en est irrité et il leur a adressé ces paroles: « Avant que vos épines, c'est-à-dire vos tendances, ne grandissent et se fortifient comme d'épais buissons, qui interceptent la vue de Dieu, le Seigneur se conduira avec vous comme avec les vivants; il coupe souvent le fil de leur vie au milieu de son cours, et il les engloutit dans sa colère (Ps. LVII, 10) ».

Quand les tendances de l'âme sont encore vivantes et l'empêchent de comprendre la vérité surnaturelle, Dieu la frappe en cette vie et il la châtie dans l'autre vie en la vouant à l'expiation.

Il est dit encore qu'il les consumera dans sa colère, parce que la souffrance endurée par l'âme lorsqu'elle se mortifie est un châtiment des ravages causés par ses tendances (Dans les éditions précédentes le texte était le suivant:

« Dieu consumera dans sa colère ceux dont les tendances toujours vives empêchent de le connaître, ou bien il les châtie dans l'autre vie par les peines ou l'expiation du Purgatoire, ou il les châtie ici-bas soit par des souffrances et des épreuves pour les détacher de leurs tendances, soit par la mortification elle-même de leurs tendances.

Il fait ainsi disparaître cette fausse lumière qui s'interpose entre lui et nous, qui nous éblouit et nous empêche de le connaître. La vue de l'entendement s'éclaircit alors, et les dommages occasionnés par nos tendances réparés. »).

Oh! Si les hommes savaient de quel prix est cette lumière divine dont les prive l'aveuglement causé par leurs tendances et leurs attraits! S'ils savaient dans combien de maux et de dangers ils tombent chaque jour, en ne les mortifiant pas chaque jour! Il ne faut pas se prévaloir de la belle intelligence et des autres dons que l'on a reçus de Dieu pour s'imaginer que leurs attraits et leurs tendances ne produiront pas l'aveuglement ou l'obscurcissement, et ne les feront pas tomber peu à peu dans un état pire.

Et, en effet, qui aurait pu croire qu'un homme aussi accompli, aussi sage et aussi riche des dons de Dieu que l'était Salomon devait en venir à un tel degré d'aveuglement et de faiblesse de volonté qu'il élèverait des autels à une foule d'idoles et les adorerait, bien qu'il fût déjà vieux (III Rois, XI, 4)?

Et pour faire une telle chute, qu'a-t-il fallu? Il a suffi de l'affection qu'il portait à des femmes étrangères, et de sa négligence à mortifier ses tendances et les satisfactions de son coeur. Il reconnaît lui-même au livre de l'Ecclésiaste qu'il n'a rien refusé à son coeur (Eccl. II, 10).

Sans doute, dans le principe il se conduisit avec prudence, mais il se laissa tellement entraîner par ses tendances parce qu'il ne les mortifiait pas, qu'elles finirent par obscurcir peu à peu et par aveugler son entendement: il en arriva à ce point qu'il éteignit complètement cette grande lumière, cette sagesse que Dieu lui avait donnée; et c'est ainsi que dans sa vieillesse il abandonna le Seigneur.

Or quand les tendances exercèrent tant d'empire sur un homme qui connaissait à fond la distance qu'il y a entre le bien et le mal, quelle influence n'auront-elles pas sur nous, pauvres ignorants, si nous négligeons de les mortifier? Aussi, comme le Seigneur s'adressant à Jonas l'a dit des Ninivites:

« Nous ne savons pas distinguer la main droite de la main gauche (Jonas, IV, 11). »

A chaque pas, nous prenons le mal pour le bien, et le bien pour le mal; voilà ce dont nous sommes capables par nous-mêmes. Que sera-ce donc si nos tendances viennent s'ajouter aux ténèbres de notre nature? Il nous arrivera ce que dit Isaïe:

« Nous avons longé la muraille, comme le font les aveugles, et nous avons marché à tâtons comme si nous n'avions point d'yeux; notre aveuglement est arrivé à tel point qu'en plein midi nous nous heurtons comme si nous étions dans les ténèbres (Is. LIX, 10) ».
Celui, en effet, qui est aveuglé par ses tendances a ceci de particulier que, tout en se trouvant en pleine lumière de la vérité et de son devoir, il ne voit pas plus que s'il était dans les plus profondes ténèbres.


Méditons …


A suivre …Chapitre 9


  Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Jeu 6 Avr - 7:21

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La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 9

Où l’on traite de la manière dont les tendances souillent l’ âme.
On le prouve par l’ autorité de la Sainte Ecriture.


Le quatrième dommage que les tendances causent à l'âme consiste à la souiller et tacher; c'est ce que dit « l'Ecclésiastique » par cette parole: « Celui qui touche la poix en est souillé (Eccl. XIII, 1). » Or celui-là touche la poix qui se complaît dans quelque créature.

Il faut noter que le Sage, par cette parole, compare les créatures à de la poix; car il y a plus de différences entre l'excellence de l'âme et toutes les créatures les plus riches qu'il n'y en a entre les plus purs diamants ou l'or fin et la poix.

Mettez de l'or ou un diamant dans la poix bouillante, ils en seront aussitôt souillés et enduits selon le degré plus ou moins grand de chaleur de la poix. Ainsi l'âme qui se porte vers quelque créature en contracte la souillure et la tache.

Il y a plus de différence entre l'âme et les autres créatures corporelles qu'entre une liqueur très limpide et une eau fangeuse. De même que cette liqueur serait toute troublée si on la mêlait à la fange, de même l'âme qui s'attache à la créature se souille, se rend semblable à elle.

De même que les coups de pinceau imbibés de suie enlaidiraient le visage le plus beau et le plus parfait, de même les tendances désordonnées souillent et tachent l'âme qui en soi est une image de Dieu si belle et si parfaite.

Aussi Jérémie, déplorant la dégradation et la laideur que ses tendances désordonnées lui ont causées, parle d'abord de sa beauté et ensuite de sa laideur en ces termes: « Ses cheveux étaient plus blancs que la neige, plus resplendissants que le lait, plus éclatants que l'ivoire antique, plus beaux que le saphir.

Mais leur aspect a changé; ils sont devenus plus noirs que le charbon, et on ne les a plus reconnus sur les places publiques (Lament. IV, 7). » Les cheveux signifient ici les affections et les pensées de l'âme; quand elles sont dans l'ordre établi par Dieu, c'est-à-dire soumises à Dieu lui-même, elles sont plus blanches que la neige, plus pures que le lait, plus dorées que l'ivoire antique, plus belles que le saphir.

Ces quatre qualités représentent toutes sortes de beautés et l'excellence de toutes les créatures corporelles; et au-dessus d'elles se trouvent la beauté et l'excellence de l'âme et de ses opérations, voilà pourquoi elle est comparée aux Nazaréens ou aux cheveux dont nous avons parlé; si les opérations de l'âme sont désordonnées et tournées vers un but opposé à la loi de Dieu, c'est-à-dire si elle est absorbée par les créatures, elle a, dit Jérémie, une face plus noire que le charbon.

C'est ce mal, sans parler d'un autre plus grand encore que causent à la beauté de l'âme ses tendances désordonnées vers les choses du siècle. Cela est tellement vrai que si nous devions traiter expressément de la laideur et de la souillure où elles la réduisent, nous aurions beau nous représenter les toiles d'araignées, les reptiles, les cadavres, tout ce qu'il y a ici-bas d'immonde et de repoussant, nous ne trouverions aucun terme de comparaison.

Sans doute, l'âme viciée par ses tendances n'en reste pas moins, quant à son être naturel, aussi parfaite que Dieu l'a créée, mais dans son être moral elle est devenue abominable, souillée, pleine de ténèbres, remplie de tous les maux que nous venons de décrire et de beaucoup d'autres encore.

Il y a plus, n'aurait-elle qu'une seule tendance désordonnée, comme nous le dirons plus loin, et alors même qu'il ne s'agirait pas d'un péché mortel, cela suffirait pour la rendre tellement obscure, souillée et laide, qu'il lui serait absolument impossible de contracter quelque union avec Dieu (Les éditions anciennes mettaient: « contracter l'union parfaite avec Dieu »).

Elle n'y parviendra pas tant qu'elle ne se sera pas mortifiée.

Quelle ne sera pas, par conséquent, la laideur de l'âme qui est complètement entraînée par toutes ses passions et livrée à toutes ses tendances?

Combien ne sera-t-elle pas éloignée de la pureté de Dieu?

Les paroles ne sauraient expliquer, ni même la raison comprendre, la variété des impuretés que la variété des tendances cause à l'âme. Si on pouvait le dire et le faire comprendre, on serait étonné et touché de compassion en voyant comment chacune d'elles, selon sa qualité et son degré d'intensité, y met son empreinte et sa couche de souillure et de laideur, comme aussi il peut y avoir sous un seul aspect seulement tant de différences de souillures et dans chaque degré de souillure.

L'âme du juste possède une seule perfection: la rectitude; elle est comblée de dons innombrables qui sont du plus haut prix, et d'une foule de vertus splendides; et cependant chacune d'elles diffère de l'autre, et a sa grâce spéciale, selon les affections diverses qui la portent vers Dieu; ainsi l'âme entraînée par des tendances diverses vers les créatures se couvre avec elles d'une variété innombrable de souillures et de laideurs.

Cette variété de souillures est parfaitement figurée dans Ezéchiel. Il nous dit que Dieu lui montra, représentées sur le pourtour des murs de l'intérieur du Temple, toutes les sortes de reptiles qui rampent sur la terre ainsi que toutes les abominations des animaux impurs. Dieu dit alors à son Prophète:

« Fils de l'homme, n'as-tu pas vu les abominations que commet chacun d'eux dans le secret de sa demeure? »

Dieu commanda ensuite au prophète de pénétrer plus loin afin d'y voir des abominations plus grandes encore. Et le prophète raconte qu'il vit là des femmes assises pleurant Adonis, le dieu de leurs amours.

Le Seigneur commanda encore au prophète d'avancer afin d'y voir des abominations plus grandes que les précédentes, et le prophète nous dit qu'il vit là vingt-cinq vieillards qui tournaient le dos au Temple (Ex. VIII, 10, 14, 16).

Les différents reptiles et animaux impurs qui étaient représentés dans la première partie du Temple figurent les pensées et les idées que l'esprit se fait des choses basses de la terre et de toutes les créatures et qui, telles qu'elles sont, se peignent dans l'âme quand elle en embrasse son entendement qui est son premier appartement.

Les femmes qui se trouvaient plus à l'intérieur du Temple où elles pleuraient leur dieu Adonis figurent les tendances qui sont dans la seconde puissance de l'âme, c'est-à-dire la volonté, et qui gémissent pour ainsi dire parce qu'elles désirent ce que convoite la volonté, c'est-à-dire les reptiles déjà représentés dans l'entendement.

Les hommes que le prophète a vus dans la troisième partie du Temple figurent les représentations et les images des créatures que conserve et repasse en elle-même la mémoire, troisième puissance de l'âme.

Ces représentations tournent le dos au Temple; cela veut dire que l'âme qui par ses puissances se porte pleinement et parfaitement à quelque objet terrestre, a, on peut bien le dire, le dos tourné au temple de Dieu, c'est-à-dire à la droite raison qui n'admet pas qu'une créature soit opposée à Dieu.

Ce que nous avons dit jusqu'à présent suffit pour nous donner quelque idée du désordre causé dans l'âme par ses tendances.

Si nous devions traiter en particulier de la laideur la plus minime que causent dans l'âme les imperfections et leurs variétés, de celle plus grande que causent les péchés véniels avec leurs nombreuses variétés, et enfin de celle que causent les tendances aux péchés mortels qui rendent l'âme totalement hideuse, nous n'en finirions plus; l'intelligence des anges même est incapable de le comprendre.

Ce que je dis, et je le maintiens, c'est que toute tendance, si minime que soit l'imperfection vers laquelle elle se porte, est une tache et une souillure pour l'âme.

Méditons …

A suivre …Chapitre 10


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Message par Maud Ven 7 Avr - 7:34

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La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 10

Où l’on montre comment les tendances attiédissent et affaiblissent l’ âme dans l’ exercice de la Vertu.
On le prouve par des comparaisons et l’ autorité de la Sainte Ecriture .


Le cinquième dommage que les tendances causent à l'âme consiste à l'affaiblir et attiédir de telle sorte qu'elle n'a pas la force de suivre le sentier de la vertu et d'y persévérer. Par le fait même que la force de ses tendances se divise vers plusieurs objets, elle devient moins puissante que si elle était concentrée toute entière vers un seul; plus elle se divise, plus elle s'affaiblit pour chaque objet; aussi les philosophes disent que la force qui est une à plus de puissance que celle qui est divisée.

Voilà pourquoi si la tendance de la volonté se porte vers quelque chose en dehors de la vertu, il est clair qu'elle deviendra plus faible pour pratiquer la vertu elle-même. L'âme qui éparpille sa volonté en objets frivoles est comme l'eau qui, trouvant une issue pour couler en bas, ne peut remonter et par suite n'est plus utile.
C'est pourquoi le patriarche Jacob, comparant son fils Ruben à une eau répandue parce qu'il avait donné libre cours à ses tendances en commettant un certain péché, a dit:

« Vous vous êtes répandu comme l'eau, vous ne croîtrez point (Gen. LIX, 4) ».

C'est comme s'il avait dit: Parce que vous vous êtes répandu comme l'eau en suivant vos tendances, vous ne croîtrez pas en vertu.

De même que l'eau bouillante qui n'est pas renfermée perd facilement sa chaleur, et que les essences aromatiques qui sont exposées à l'air perdent peu à peu leur arôme et la force de leurs parfums, de même l'âme qui ne concentre pas ses tendances dans la seule affection de Dieu perd son ardeur et sa vigueur pour la pratique de la vertu.

David avait compris cette vérité quand s'adressant à Dieu, il lui dit: « Je conserverai ma force pour vous (Ps. LVIII, 10) », c'est-à-dire: Je concentrerai la force de mes tendances pour vous seul.

Les tendances affaiblissent encore la force de l'âme parce qu'elles sont pour elle ce que sont pour l'arbre les jeunes pousses et les rejetons qui, naissant tout autour, lui dérobent la sève et l'empêchent de produire des fruits abondants. C'est de ces âmes que Dieu parle lorsqu'il dit: « Malheur aux femmes qui seront enceintes ou nourrices dans ces jours-là (Mat. XXIV, 19). » Ainsi en est-il de nos tendances.

Si on ne les mortifie pas, elles enlèveront peu à peu sa force à l'âme, et elles grandiront pour sa perte, comme les rejetons pour celle de l'arbre. Aussi Notre-Seigneur nous recommande dans l'Évangile d'avoir les reins ceints (Luc, XII, 35), c'est-à-dire d'avoir les tendances mortifiées.

Les tendances ressemblent encore aux sangsues qui ne cessent de sucer le sang des veines. C'est ainsi que les appelle le Sage quand il dit: Les sangsues, c'est-à-dire les tendances, sont comme des enfants; elles répètent toujours: Donne, donne! (Pro. XXX, 15).

Il est donc clair que les tendances ne procurent à l'âme aucun bien; elles lui ôtent plutôt celui qu'elle avait; quand on ne les mortifie pas, elles n'ont pas de repos qu'elles n'aient réalisé ce que font les petits de la vipère, qui grandissent peu à peu dans son sein, la rongent et lui donnent la mort tandis qu'eux-mêmes sont pleins de vie à ses côtés. Les tendances, quand elles ne sont pas mortifiées, en arrivent également à tuer la vie divine de l'âme; et elles seules vivent parce que l'âme ne les a pas détruites.

Voilà pourquoi « l'Ecclésiastique » a dit: « Ôtez de moi la concupiscence de la chair (Eccl. XXIII, 6) ».

Mais alors même que les tendances n'arriveraient pas à cette extrémité, c'est une chose digne de pitié que de voir dans quel état elles mettent la pauvre âme, et combien elles la rendent insupportable à elle-même, inutile au prochain, paresseuse et languissante au service de Dieu. Elles lui causent plus de lourdeur et de tristesse dans le chemin de la vertu qu'une humeur maligne n'occasionne de langueurs et de difficultés à la marche d'un infirme ou de dégoût pour sa nourriture.

Ce qui ordinairement empêche beaucoup d'âmes d'avoir du zèle et de l'ardeur pour la pratique de la vertu, c'est qu'elles ont encore des tendances et des affections qui ne sont pas pures ni selon Dieu.

Méditons …

A suivre ..Chapitre 11


  Eucharistie     Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Sam 8 Avr - 7:32

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_21

La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 11

Où l’on montre et où l’ on prouve qu’il est nécessaire pour arriver à l’ Union divine que l’ âme ait mortifié toutes ses tendances , si petites qu’elles soient.

l y a longtemps, ce me semble, que le lecteur désire me demander si, pour arriver à ce haut état de perfection, il est absolument nécessaire de commencer tout d'abord par la mortification complète de toutes nos tendances petites et grandes, ou s'il ne suffirait pas d'en mortifier quelques-unes et de laisser les autres, celles du moins qui paraîtraient de peu d'importance. Il semble dur, en effet, et très difficile d'arriver à une telle pureté et à un tel dépouillement, que l'on n'ait plus de volonté ni d'affection pour quoi que ce soit.

A cette question nous répondons tout d'abord que sans doute nos tendances ne sont pas aussi préjudiciables les unes que les autres, et ne nuisent pas au même degré. Je parle des tendances volontaires, car les tendances naturelles n'empêchent que très peu l'union divine, ou même ne l'empêchent pas quand on n'y consent pas et qu'elles ne sont que des premiers mouvements. J'appelle tendances de la nature et de premiers mouvements toutes celles où la volonté, éclairée par la raison, n'a eu aucune part ni avant ni après les actes.

Il est impossible de les faire disparaître et de les mortifier complètement en cette vie. Alors même qu'elles ne seraient pas mortifiées d'une façon absolue, elles ne constituent pas un obstacle à l'union divine. Elles peuvent fort bien exister dans notre nature, tandis que l'âme, dans sa partie raisonnable, en sera complètement maîtresse.

Il peut même arriver parfois que l'âme soit par sa volonté élevée à une haute union de quiétude, tandis que les tendances se manifestent dans la partie sensitive; l'âme qui est en oraison n'en est nullement troublée dans sa partie supérieure.

Quant aux tendances volontaires, qu'il s'agisse des plus graves qui portent aux péchés mortels, ou des moins graves qui portent aux péchés véniels, ou de celles moindres encore qui portent aux imperfections, si petites qu'elles soient, il faut les faire disparaître complètement; sans quoi l'âme est incapable d'arriver à l'union parfaite avec Dieu. En voici la raison.

L'état de cette divine union consiste en ce que la volonté de l'âme est complètement en la volonté divine; il n'y a plus rien en elle qui soit opposé à la volonté divine; aussi elle ne se meurt en tout et pour tout que d'après la volonté divine. Voilà pourquoi nous disons que, dans cet état les deux volontés, celle de l'âme et celle de Dieu, n'en font plus qu'une, et que cette volonté de Dieu est bien celle de l'âme.

Or si l'âme s'attache à quelque imperfection que Dieu ne veut pas, elle n'est pas encore arrivée à avoir une seule volonté avec celle de Dieu. Elle voudrait, en effet, une chose que Dieu ne voudrait pas. Il est donc clair que, pour s'unir à Dieu par l'amour et par la volonté, l'âme doit maîtriser toutes ses tendances volontaires, si petites qu'elles soient.

Il ne faut pas qu'elle donne jamais sciemment ou avec advertance son consentement à une imperfection, mais qu'elle ait assez de possession d'elle-même et de liberté pour le refuser dès qu'elle en est prévenue. Je dis avec advertance, parce que sans qu'elle le remarque ou le comprenne, ou que cela dépende entièrement de sa bonne volonté, elle tombera souvent dans les imperfections, des péchés véniels ou ces tendances naturelles dont nous avons parlé. Il est écrit de ces fautes qui ne sont pas absolument volontaires, que le juste tombera sept fois le jour et se relèvera (Pro. XXIV, 16).

Quant à nos tendances volontaires, il suffit, je le répète, qu'il y en ait même vers des choses très minimes, pour empêcher l'union divine; je parle de l'habitude qui n'a pas été mortifiée, et non de quelques actes concernant des objets différents qui ne procèdent pas d'une habitude déterminée et produisent moins d'inconvénients. L'âme cependant doit s'appliquer à les faire disparaître eux aussi, parce qu'ils procèdent également d'une habitude imparfaite.

S'il s'agit de certaines habitudes d'imperfections volontaires que l'on n'achève jamais de surmonter, non seulement elles empêchent l'union divine, mais encore le progrès dans la perfection.

Ces imperfections habituelles sont, par exemple, la coutume de parler beaucoup, une petite attache, dont on ne veut jamais se défaire, à un objet quelconque, une personne, un vêtement, un livre, une cellule, tel genre de nourriture, certains petits entretiens, certains petits désirs de chercher de la sensualité, de savoir, d'entendre, ou choses semblables.

Une seule de ces imperfections, si l'âme y est attachée ou en a l'habitude, lui cause autant de dommage pour son avancement et son progrès dans la vertu que si elle tombait chaque jour dans une foule d'imperfections et de péchés véniels, qui ne procéderaient pas de l'habitude d'une passion vicieuse.

Elles lui sont moins nuisibles que ses attaches à un objet quelconque. Tant qu'elles les aura, elle ne pourra, si petite que soit l'imperfection, réaliser de progrès. Qu'importe que l'oiseau soit retenu par un fil léger ou une corde? Le fil qui le retient a beau être léger, l'oiseau y reste attaché comme à la corde, et tant qu'il ne l'aura pas rompu, il ne pourra voler.

Sans doute ce fil léger est plus facile à rompre; mais si facile à rompre que soit ce fil, l'oiseau ne peut, tant qu'il ne l'a pas rompu, prendre son essor.

Ainsi en est-il de l'âme qui est attachée à un objet quelconque. Quelle que soit sa vertu, elle n'arrivera pas à la liberté de l'union divine. Nos tendances et nos attaches ont la même propriété que la remora possède, dit-on, sur le navire: bien que ce soit un poisson très petit, s'il parvient à s'attacher au navire, il l'arrête et l'empêche de naviguer et d'arriver au port.

C'est une pitié de voir certaines âmes; elles sont comme de riches navires, chargées de bonnes oeuvres et d'exercices spirituels, de vertus et de faveurs divines, mais elles n'ont pas le courage d'en finir avec un petit attrait, une légère attache ou affection, ce qui est tout un; aussi ne progresseront-elles pas; elles n'arriveront pas au port de la perfection.

Et cependant que leur fallait-il pour cela? Il suffisait d'un bon coup d'aile pour achever de rompre le fil d'attache ou enlever cette remora à leurs tendances.

Dieu les a déjà aidées à briser d'autres liens beaucoup plus forts des affections qu'elles portaient au péché et aux vanités. Aussi est-il vraiment déplorable de voir que pour une attache à un enfantillage que Dieu leur a laissé à vaincre par amour pour lui et qui n'est qu'un simple fil, un léger duvet, elles cessent d'avancer et n'arriveront jamais à ce bien incomparable de l'union avec Dieu. Il y a pire encore.

Non seulement elles n'avancent pas, mais cette attache les fait aller à reculons, elles perdent ce qu'elles avaient acquis durant tant de temps et au prix des plus grandes fatigues. C'est une vérité bien connue: si l'on n'avance pas dans ce chemin spirituel en remportant des victoires, on recule; si l'on ne gagne pas, on perd.

C'est ce que Notre-Seigneur a voulu nous signifier quand il a dit: « Celui qui n'est pas avec moi est contre moi (Mat. XII, 30). » Celui qui n'a pas soin de réparer la petite fente d'un vase verra toute sa liqueur s'en échapper. « L'Ecclésiastique » nous donne cet enseignement: « Celui qui méprise les petites choses tombera peu à peu dans les grandes (Eccl. XIX, 1). » Il nous dit de plus: « Une seule étincelle suffit pour allumer un grand feu (Ibid. XI, 34) ». De même une imperfection suffit pour en attirer une autre, et celle-ci d'autres encore. On ne verra jamais une âme qui a négligé de vaincre une tendance, qui n'en ait beaucoup d'autres provenant de la même faiblesse et imperfection qu'elle devait surmonter.

Nous l'avons vu. Beaucoup de personnes favorisées de Dieu étaient parvenues à un très haut détachement et à une très grande liberté spirituelle; et par cela seul qu'elles ont commencé à se laisser aller à quelque petite attache, à un peu d'affection, sous prétexte de bien, de conversation et d'amitié, ont perdu peu à peu l'esprit de ferveur, le goût des choses de Dieu et l'amour de la solitude; elles ont perdu leur allégresse et leur constance dans les exercices spirituels; elles ne se sont point arrêtées qu'elles n'eussent tout perdu. Et pourquoi? Uniquement parce qu'elles n'ont pas dès le début mortifié le plaisir sensible, ni gardé leur coeur pour Dieu seul.

Dans ce chemin il faut toujours marcher si l'on veut arriver. Cela veut dire qu'il faut toujours mortifier nos désirs, sans jamais les favoriser; si l'on ne se défait de tous, on n'atteindra jamais le terme. Le bois ne se transforme pas en feu s'il lui manque un seul degré de chaleur pour cela; de même l'âme ne se transformera pas parfaitement en Dieu tant qu'elle aura une seule imperfection, serait-elle quelque chose de moindre qu'une tendance volontaire (Il s'agit ici d'actes qui ne sont pas pleinement délibérés), comme nous l'expliquerons dans la Nuit de la foi.

L'âme n'a qu'une volonté. Si elle l'engage ou l'applique à quelque chose de créé, elle perd sa liberté, sa force, son détachement et sa pureté, toutes choses qui sont requises pour arriver à la transformation en Dieu. Il nous est dit à ce propos au livre des Juges: « Un ange est venu et a dit aux enfants d'Israël que, puisqu'ils n'avaient pas exterminés ces ennemis, mais avaient au contraire fait alliance avec eux, on les laisserait au milieu d'eux comme ennemis, afin qu'ils fussent pour eux une occasion de chute et de ruine (Jug. II, 3). »

C'est justement que Dieu en agit ainsi avec certaines âmes; il les a retirées des dangers du monde, il a mis à mort leurs péchés, qui étaient comme des géants, et vaincu la multitude de leurs ennemis, c'est-à-dire les occasions dangereuses où elles étaient dans le monde, et toutes ces faveurs n'avaient d'autre but que de les introduire avec plus de liberté dans cette terre promise de l'union divine.

Malgré cela ces âmes se sont liées d'amitié et ont contracté des alliances avec ce petit peuple de leurs imperfections, qu'elles n'arrivent jamais à mortifier complètement; elles vivent dans la négligence et la tiédeur.

Aussi Sa Majesté en est irritée et les laisse s'abandonner à leurs tendances qui chaque jour vont de mal en pis.

Le livre de Josué nous fournit également une figure de cette vérité: Au moment où les Israélites allaient entrer en possession de la Terre promise, Dieu leur commanda de détruire si bien tout ce qu'il y avait dans la ville de Jéricho qu'ils ne devaient pas y laisser âme qui vive, ni homme, ni femme, ni enfant, ni vieillard, et de mettre à mort tous les animaux; quant au butin, on ne devait ni le prendre ni même le désirer (Jos. VI, 21).

Cela nous donne à comprendre que, pour entrer dans la divine union, ce qui est dans l'âme, que ce soit peu ou beaucoup, petit ou grand, doit tout d'abord mourir, et que l'âme n'en conserve aucun désir, et en soit tellement détachée qu'elle soit comme une étrangère pour tout.

C'est ce que nous enseigne saint Paul quand il dit aux Corinthiens: « Je vous le dis, mes frères, le temps est court; ce qui nous reste à faire et ce qui convient, c'est que ceux qui ont des femmes soient comme s'ils n'en avaient pas; que ceux qui pleurent la perte des biens de ce monde soient comme s'ils ne pleuraient pas; que ceux qui se réjouissent soient comme s'ils ne se réjouissaient pas; ceux qui achètent, comme s'ils n'en usaient pas (I Cor. VII, 29) ».

Voilà ce que nous dit l'Apôtre. Il nous enseigne combien l'âme doit être libre de toute attache pour s'élever à Dieu.

Méditons….

A suivre …Chapitre 12



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Message par Maud Dim 9 Avr - 7:15

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La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 12

Où l’on montre combien il faut répondre à une autre question .
On indique quelles sont les tendances  qui suffisent pour causer  à l’ âme les dommages dont nous avons parlé.


Nous pourrions nous étendre sur cette matière de la Nuit des sens. Nous verrions qu'il y a beaucoup à dire sur les dommages qui proviennent de nos tendances, non seulement sous les rapports dont nous avons parlé, mais encore sous un grand nombre d'autres. Toutefois, ce que nous avons dit suffit pour le but que nous nous proposons.

Il semble, en effet, que nous avons suffisamment expliqué pourquoi la mortification de nos tendances s'appelle une nuit, et combien il convient d'entrer dans cette nuit pour s'élever à Dieu. Mais, avant de montrer comment l'âme doit y entrer, et afin de terminer cette partie de notre étude, il reste à éclaircir un doute qui pourrait se présenter au lecteur sur ce que nous avons dit.

Tout d'abord on peut se demander si une tendance quelconque suffit pour produire et causer dans l'âme les deux maux dont nous avons parlé, à savoir, un mal privatif, qui nous prive de la grâce de Dieu, et l'autre positif, qui produit cinq dommages principaux que nous avons exposés.

On peut se demander, en second lieu, si une tendance, quelque petite qu'elle soit et de quelque sorte qu'on la suppose, est suffisante pour produire ces cinq dommages à la fois, ou bien si les unes en produisent un et les autres un autre: par exemple, celle-ci le tourment, celle-là la fatigue, ou les ténèbres...

Je réponds à la première question. Le dommage privatif, qui consiste dans la privation de Dieu, vient seulement des tendances volontaires qui ont pour objet le péché mortel; ce sont elles qui le causent et le produisent totalement. Elles privent, en effet, l'âme de la grâce en cette vie, et dans l'autre elles la privent de la gloire céleste ou possession de Dieu.

A la seconde question je réponds: Qu'il s'agisse de péché mortel, ou de péché véniel volontaire, ou d'imperfection, chacune de nos tendances est suffisante pour causer tous les dommages positifs réunis. Bien qu'ils soient privatifs d'une certaine manière, nous les appelons positifs parce qu'ils correspondent à la pente de l'âme vers la créature, tandis que les dommages privatifs correspondent à son éloignement de Dieu.

Mais il y a une différence entre les tendances: celles qui ont pour objet le péché mortel causent d'une façon complète l'aveuglement, le tourment, la souillure, la faiblesse...

Celles qui ont pour objet les péchés véniels ou l'imperfection évidente ne produisent pas ces maux dans ce degré absolu; elles ne privent pas l'âme de la grâce, ce qui la mettrait sous leur empire, car la mort de l'âme leur donne la vie.

Elles produisent néanmoins quelque chose de ces maux, dans un degré moindre, et en proportion de leur lâcheté et de leur tiédeur; aussi plus une tendance a atténué la ferveur de la grâce, et plus elle lui cause d'aveuglement et d'impureté.

Notons cependant que si chaque tendance produit tous ces préjudices que nous appelons positifs, elle en cause un d'une manière directe et principale et, les autres par voie de conséquence. Si la tendance sensuelle produit tous ces préjudices à la fois, il n'en est pas moins vrai que son effet propre et immédiat est de souiller l'âme et le corps.

La tendance de l'avarice les produits également tous, mais elle engendre le chagrin d'une manière directe et immédiate. La passion de la vaine gloire, elle aussi, les produit tous, mais elle apporte immédiatement et directement l'aveuglement et les ténèbres.

Ainsi la gourmandise engendre tous ces préjudices, mais son effet principal c'est la tiédeur dans la pratique de la vertu, et ainsi nous pouvons raisonner des autres tendances.

Or, si tout acte volontaire d'une de nos tendances engendre tous ces effets réunis, c'est qu'il est directement contraire aux actes de la vertu opposée. Un acte de vertu, en effet, produit et engendre en même temps la suavité, la paix, la consolation, la lumière, la pureté et la force; et la tendance déréglée cause le tourment, la fatigue, la lassitude, l'aveuglement et la faiblesse.

La pratique d'une vertu fait grandir toutes les autres; et de même un seul vice suffit pour faire grandir tous les autres et leurs effets. Tous ces préjudices ne se manifestent pas au moment même où la passion exerce son activité, car son attrait nous aveugle, mais, soit avant soit après, ses tristes effets se font sentir.

Cette vérité est bien figurée par ce livret que l'ange, nous est-il raconté dans « l'Apocalypse », donna à manger à saint Jean, qui le trouva doux au palais, mais très aigre pour son estomac (Apoc. X, 9).

La passion, au moment où elle s'exerce, est pleine de douceur et paraît bonne; c'est ensuite que l'âme ressent son amertume et ses tristes effets. Celui qui se laisse entraîner par elle pourra très bien en juger. Je n'ignore pas cependant qu'il y a des personnes tellement aveugles et insensibles qu'elles n'éprouvent point cette amertume. Elles ne songent pas à aller vers Dieu et, par suite, ne se préoccupent pas des obstacles qui les en séparent.

Je ne traiterai pas ici des autres tendances de la nature qui ne sont pas volontaires, ni des pensées qui ne sont que des premiers mouvements, ni des autres tentations auxquelles on ne consent pas, car tout cela ne cause aucun des préjudices dont il a été question. Sans doute l'âme qui les éprouve pourra s'imaginer que la passion et le trouble où elle se trouve alors la souillent et l'obscurcissent; mais il n'en est rien; ce sont des effets tout contraires qui en résultent.

En leur résistant, elle acquiert plus de force, de pureté, de lumière, de consolations, ainsi que beaucoup d'autres biens, comme Notre-Seigneur l'a enseigné à saint Paul en ces termes:
« La vertu se perfectionne dans la faiblesse (II Cor. XII, 9). »

Quant aux tendances volontaires, elles engendrent tous les maux dont nous avons parlé et beaucoup d'autres encore. Aussi les maîtres de la vie spirituelle doivent-ils mettre leur principale sollicitude à mortifier immédiatement toutes les tendances de leurs disciples, en les privant de la satisfaction de leurs désirs; et en les délivrant de toutes les misères dont nous avons parlé.

Méditons…

A suivre …Chapitre 13



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Message par Maud Lun 10 Avr - 7:21

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La Montée du Carmel – Livre premier – Chapitre 13

Où l’on traite de la conduite que doit tenir l’ âme pour enter dans cette ‘’ Nuit des Sens ‘’

Il reste maintenant à donner quelques avis pour que l'âme puisse et sache entrer dans cette Nuit des sens. Pour cela il faut savoir que l'âme y entre ordinairement de deux manières: l'une est active, et l'autre passive. L'active comprend ce que l'âme (Les éditions précédentes ajoutaient ici ce membre de phrase: « ayudada de la gracia, aidée de la grâce » ) peut faire et fait en réalité par elle-même pour y entrer.

Nous allons nous en occuper tout de suite dans les avis qui vont suivre. La passive comprend ce que l'âme ne fait pas par elle-même ni par sa propre industrie, mais ce que Dieu fait en elle (Les éditions précédentes ajoutaient ici ces mots: « con mas particulares auxilios, avec des secours plus particuliers » ), et alors elle est comme passive ( « ... consintiendo libremente, tout en donnant librement son consentement » ).

Nous en traiterons dans le second Livre, lorsque nous parlerons des commençants. Comme nous nous occuperons alors, avec la grâce de Dieu, de donner de nombreux avis aux commençants à cause d'une foule d'imperfections où ils tombent ordinairement dans ce chemin, nous nous abstiendrons maintenant de leur en fournir beaucoup.

D'ailleurs ce n'est pas précisément le lieu de leur en parler, puisque nous ne nous occupons maintenant que de savoir quels sont les motifs pour lesquels on appelle Nuit cette voie qui mène à l'union divine, ce qu'est cette Nuit elle-même et de combien de parties elle se compose.

Néanmoins, pour ne pas paraître trop bref et ne pas priver les âmes de tout le profit désirable en ne leur donnant pas tout de suite quelques moyens ou avis propres à ceux qui marchent dans cette Nuit de leurs tendances, j'ai tenu à leur fournir ici la méthode abrégée qui va suivre. Je ferai de même à la fin des deux autres parties ou causes de cette Nuit que je me propose de traiter sans retard avec l'aide de Dieu.

Ces avis qui suivent et qui concernent la manière de vaincre nos tendances sont, il est vrai, brefs et en petit nombre, mais, selon moi, ils sont aussi profitables et efficaces qu'ils sont concis. Voilà pourquoi celui qui voudra sincèrement les mettre en pratique n'a plus besoin d'en avoir d'autres. Ceux-ci, en effet, embrassent tous les autres réunis.

Tout d'abord il faut avoir le désir habituel d'imiter le Christ en tout, de se conformer à sa vie qu'il faut bien considérer afin de savoir l'imiter et d'agir en tout comme lui même l'aurait fait.

En second lieu, si l'on veut bien se conformer à cet avis, et s'il s'offre aux sens quelque plaisir qui ne soit purement pour l'honneur et la gloire de Dieu, il faut se mortifier et se renoncer par amour pour Jésus-Christ, qui, durant sa vie sur la terre, n'a jamais eu d'autre goût ni d'autre désir que de faire la volonté de son Père; c'est là ce qu'il appelait sa nourriture et son aliment.

Voici un exemple: s'il se présente une occasion d'entendre avec plaisir des choses qui n'intéressent pas le service de Dieu, je refuserai d'y chercher mon plaisir et même de les entendre.

Si j'éprouve du plaisir à regarder des choses qui ne me portent pas directement vers Dieu, je ne rechercherai point ce plaisir et je ne regarderai même pas ces objets.

Il en sera de même pour les conversations, ou toutes les autres satisfactions qui se présenteraient. Nous devons donc mortifier tous nos sens, quand nous le pouvons bonnement, et si nous ne le pouvons pas, il suffit de ne pas se complaire dans l'attrait naturel que l'on éprouve et de le désavouer.

De la sorte, on arrive bientôt à rendre les sens mortifiés et à renoncer à ses goûts; on vit comme dans la nuit, et, en peu de temps, on peut réaliser de grands progrès.

Si nous voulons mortifier et apaiser les quatre passions de notre nature: la joie, l'espérance, la crainte et la douleur, puisque de leur concorde et pacification découlent les biens dont nous avons parlé et beaucoup d'autres encore, il faut employer ce qui est un remède total à tous ces maux, la source du vrai mérite et des grandes vertus.

Que l'âme donc s'applique sans cesse non à ce qui est plus facile, mais à ce qui est plus difficile;

Non à ce qui plaît, mais à ce qui déplaît;

Non à ce qui console, mais à ce qui est un sujet de désolation;

Non à ce qui est repos, mais à ce qui donne du travail;

Non à ce qui est plus, mais à ce qui est moins;

Non à vouloir quelque chose, mais à ne rien vouloir;


Non à rechercher ce qu'il y a de meilleur dans les choses, mais ce qu'il y a de pire, et à désirer entrer pour l'amour du Christ dans un dénûment total, un parfait détachement et une pauvreté absolue par rapport à tout ce qu'il y a en ce monde. Il faut embrasser ces pratiques de tout coeur et s'appliquer à y assujettir la volonté.

Celui qui s'y soumet avec amour, intelligence et discrétion, ne tardera pas à trouver beaucoup de délices et de consolations.

Il suffit de se conformer fidèlement à ces pratiques pour entrer dans la Nuit des sens. Néanmoins, pour donner de plus amples explications, nous parlerons d'une autre sorte de pratiques qui apprennent à mortifier la concupiscence de la Chair, la concupiscence des yeux et la superbe de la vie, trois choses, au dire de saint Jean (Jean, II, 16), qui occupent le monde et d'où procèdent toutes les autres tendances.

La première consiste à travailler au mépris de soi et à désirer que les autres nous méprisent; cette pratique est contre la concupiscence de la chair.

La seconde consiste à parler de soi-même avec mépris et à travailler à ce que les autres en parlent de même; cette pratique est contre la concupiscence des yeux.

La troisième consiste à avoir de bas sentiments de soi, à se mépriser et à désirer que les autres fassent de même; et cette pratique est contre la superbe de la vie.

Pour terminer ces avis et ces règles de conduite dont nous venons de parler, il nous semble bon de rapporter ici les vers que nous avons placés à l'image de la Montagne représentée au commencement de ce livre. Ils renferment la doctrine nécessaire pour gravir cette montagne qui symbolise l'union parfaite avec Dieu.

Mais s'ils s'adressent à la partie spirituelle et intérieure de l'âme, ils enseignent également à mortifier l'esprit d'imperfection de sa partie sensuelle et extérieure, comme l'indiquent les deux chemins placés de chaque côté de notre image qui figure la montagne de la perfection.

C'est dans ce dernier sens que nous les prenons ici.

Dans la seconde partie de cette Nuit nous les examinerons dans le sens spirituel.

Voici ces avis:

1.Pour arriver à goûter tout, veillez à n'avoir goût pour rien.
2.Pour arriver à savoir tout, veillez à ne rien savoir de rien.
3.Pour arriver à posséder tout, veillez à ne posséder quoi que ce soit.
4.Pour arriver à être tout, veillez à n'être rien en rien.
5.Pour arriver à ce que vous ne goûtez pas, vous devez passer par ce que vous ne goûtez pas.
6.Pour arriver à ce que vous ne savez pas, vous devez passer par où vous ne savez pas.
7.Pour arriver à ce que vous ne possédez pas, vous devez passer par où vous ne possédez pas.
8.Pour arriver à ce que vous n'êtes pas, vous devez passer par ce que vous n'êtes pas.


Moyen de ne pas empêcher le tout

1.Quand vous voulez vous arrêter à quelque chose, vous cessez de vous abandonner au tout.
2.Car pour venir du tout au tout, il faut se renoncer du tout au tout.
3.Et quand vous viendrez à avoir tout, il faut l'avoir sans rien vouloir.
4.Car si vous voulez avoir quelque chose en tout, vous n'avez pas purement en Dieu votre trésor.


C'est dans ce dénûment que l'esprit trouve sa paix et son repos. Comme il ne désire rien, rien d'en haut ne le fatigue, rien d'en bas ne l'opprime, car il est dans le centre de son humilité; si au contraire il désire quelque chose, c'est cela même qui est pour lui fatigue et tourment.

Méditons …

A suivre …Chapitre 14 et 15



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Message par Maud Mar 11 Avr - 7:37

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La Montée du Carmel –Livre premier - Chapitre 14

Où l’on explique le second vers de la strophe

Étant pleine d'angoisse et enflammée d'amour.

Nous avons déjà expliqué le premier verset de cette strophe qui traite de la Nuit des sens; nous avons dit ce qu'il faut entendre par Nuit des sens, et pour quel motif on l'appelle nuit; nous avons montré également quel ordre et quelle conduite il faut suivre pour y entrer activement.

L'ordre logique demande maintenant que nous parlions de ses propriétés et de ses effets, qui sont admirables; ils sont contenus dans les vers suivants de la strophe. Je les signalerai brièvement afin de les expliquer, comme je l'ai promis dans le prologue; puis je passerai immédiatement au second Livre, qui traite de l'autre partie de cette Nuit, c'est-à-dire de la Nuit de l'esprit.

L'âme dit donc: « Étant pleine d'angoisse et enflammée d'amour », je passai et entrai dans la Nuit obscure des sens pour arriver à l'union avec le Bien-Aimé. En effet, pour surmonter toutes les tendances et mortifier l'attrait de toutes les créatures vers lesquelles la volonté est ordinairement attirée par son amour et son affection dans le but d'en jouir, il lui faut les ardeurs plus vives d'un amour plus profond: celui de son Époux.

Quand elle met en lui sa joie et sa force, elle trouve assez de courage et de générosité pour rejeter et surmonter aisément tous les autres amours. Non seulement il faut, pour triompher de la force de ses tendances, avoir l'amour de son Époux, mais cet amour doit être enflammé et plein d'angoisses.

Il arrive, en effet, comme l'expérience le prouve, que notre nature se porte ou est attirée si violemment vers les choses sensibles que, si sa partie spirituelle n'a pas un amour plus fort vers les choses surnaturelles, elle ne pourra secouer le joug de la nature et des sens, ni entrer dans la Nuit obscure des sens, ni avoir le courage de rester dans la nuit par rapport à toutes les choses créées, ou d'en priver toutes ses tendances.

Qui dira ces angoisses multiples et si variées de l'amour qui animent les âmes au commencement de ce chemin de l'union?

Qui dira leur empressement et leurs industries pour quitter cette demeure de leur propre volonté et entrer dans la nuit de la mortification des sens? Qui dira combien ces angoisses d'amour pour leur Époux leur font paraître faciles, doux même et savoureux tous les travaux et dangers de cette Nuit?

Ce n'est pas le lieu d'en parler; d'ailleurs on ne saurait les exprimer.

Mieux vaut les éprouver et les contempler que les décrire. Aussi nous allons passer à l'explication des autres vers dans le chapitre suivant

****

Chapitre 15

Où l’on explique les actes vers la strophe

Oh! l'heureux sort!
Je sortis sans être vue,
Tandis que ma demeure était déjà en paix.


L'âme se sert d'une métaphore pour montrer le triste état de captivité où elle était; aussi elle regarde comme un heureux sort d'en avoir été délivrée sans qu'aucun de ses geôliers l'en empêchât. Par suite en effet du péché originel, l'âme est vraiment captive dans ce corps mortel, et y est assujettie à ses passions et aux tendances de sa nature.

Une fois délivrée de leur tyrannie, elle proclame l'heureux sort qu'elle a de sortir sans être vue, c'est-à-dire sans en être empêchée ni retardée. Mais ce qui lui avait servi, c'est de sortir par une Nuit obscure, c'est-à-dire qu'elle avait renoncé à tous ses attraits et mortifié toutes ses tendances, comme nous l'avons dit.

Cette réflexion: « tandis que ma demeure était déjà en paix », signifie que la partie sensitive, ou demeure de toutes les tendances, était en paix, parce qu'elle les avait déjà domptées et endormies.

Et, en effet, tant que nos tendances ne sont pas endormies par la mortification des sens et que les sens ne sont pas en paix et n'ont pas cessé leur guerre à l'esprit, l'âme ne parviendra pas à cette véritable liberté qui lui permettrait de jouir de l'union avec son Bien-Aimé.

Méditons …

A suivre …Livre Deuxième –seconde strophe



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Mer 12 Avr - 7:31

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Strophe 2

Où l’on traite du moyen de parvenir immédiatement à l’ Union divine, c'est-à-dire de la Foi , et de la seconde partie de cette nuit que nous avons appelée  «  Nuit de l’ Esprit «  qui est dans cette Seconde Strophe

" J'étais dans les ténèbres et en sûreté,
Quand je sortis déguisée par l'escalier secret.
Oh! l'heureux sort!
J'étais dans les ténèbres et en cachette,
Quand ma demeure était déjà en paix ".


Explication de la Strophe

Dans cette seconde strophe l'âme chante l'heureux sort qu'elle a eu de pratiquer le dénûment de l'esprit par rapport à toutes ses imperfections spirituelles et tendances égoïstes dans les choses spirituelles. Son sort a été d'autant plus heureux qu'il y avait plus de difficulté pour pacifier cette partie spirituelle de sa demeure et entrer dans ces ténèbres intérieures qui consistent dans le détachement spirituel par rapport à toutes les choses sensuelles et spirituelles; car l'âme n'a alors d'autre appui que la foi pure pour aller à Dieu.

Aussi cette voie s'appelle escalier secret, et en effet tous les degrés et articles de la foi que l'âme suit sont secrets et cachés aux sens et à l'entendement.

Voilà pourquoi l'âme est dans les ténèbres par rapport à la lumière naturelle des sens et de l'entendement; elle passe au-delà des limites de la nature et de la raison pour gravir ce divin escalier de la foi; par là elle arrive et pénètre jusqu'aux profondeurs de Dieu.
Elle dit qu'elle était déguisée, parce que la foi qui l'a guidée dans son ascension lui a fait changer sa forme et sa manière d'être naturelle pour revêtir une forme divine. C'est grâce à cette transformation qu'elle n'a pas été reconnue ni retenue par les choses de la nature et de la raison ou par le démon.

Aucun de ces trois ennemis ne peut lui nuire si elle marche par ce chemin de la foi. Il y a plus: l'âme alors est tellement cachée, protégée, et étrangère à tous les artifices du démon, qu'elle s'avance véritablement, comme le dit la strophe dans les ténèbres et en cachette, c'est-à-dire par rapport au démon, à qui la lumière de la foi est plus funeste que les plus épaisses ténèbres.

Nous pouvons donc le dire, l'âme qui se guide par la lumière de la foi est cachée au démon et à l'abri de ses coups, comme nous le montrerons plus clairement dans la suite.

Aussi chante-t-elle elle-même qu'elle est sortie dans les ténèbres et en sûreté. Celui qui a l'heureux sort de suivre le chemin obscur de la foi, et la choisit pour l'accompagner, lui pauvre aveugle, s'élève au-dessus de ses représentation naturelles et des raisonnements pour avancer en toute sécurité, comme nous l'avons dit.


L'âme ajoute qu'elle est sortie par cette nuit de l'esprit;
quand sa demeure était déjà en paix,
c'est-à-dire quand sa partie raisonnable et spirituelle était déjà pacifiée.

Lorsque l'âme, en effet, est sortie de sa demeure et est arrivée à l'union divine, c'est qu'elle tient dans la paix toutes les puissances naturelles, et sa partie spirituelle domine l'activité et l'inquiétude de ses sens. Elle ne dit donc pas qu'elle est sortie avec anxiété, comme dans la première Nuit des sens. Pourquoi? Parce que pour entrer dans la Nuit des sens et se dépouiller du sensible, il fallait qu'elle eût éprouvé les angoisses de l'amour sensible. Mais pour achever de pacifier la demeure de son esprit, il ne lui faut que fixer ses facultés, tous ses attraits et ses tendances spirituelles dans la foi pure.

Cela fait, elle s'unit avec le Bien-Aimé par une union pleine de simplicité et la pureté d'amour et de ressemblance.

Il faut remarquer, en outre, que dans la première strophe où elle parle de la partie sensitive, l'âme dit qu'elle est sortie par une nuit obscure; mais ici où elle parle de la partie spirituelle, elle dit qu'elle est sortie dans les ténèbres; au milieu de la nuit, si grande que soit l'obscurité, on y voit encore un peu; mais quand l'obscurité est complète, on ne voit plus rien. Ainsi dans la nuit des sens il y a encore une certaine lumière, car l'entendement et la raison ne sont pas frappés de cécité.

Mais la nuit de l'esprit, qui est la foi, prive de toute lumière et l'entendement et les sens.

Aussi l'âme qui est dans cette nuit dit qu'elle s'avançait dans les ténèbres et en sûreté, ce qu'elle ne disait pas dans la nuit des sens.

Moins l'âme agit en vertu de ses aptitudes personnelles, plus sa marche est sûre, car plus elle agit par la foi. C'est là ce que nous expliquerons longuement dans ce livre, où nous parlerons de choses très importantes pour la véritable spiritualité.

Il est vrai qu'elles offrent quelque obscurité, mais elles s'enchaînent si bien les unes aux autres qu'elles s'éclairent mutuellement et que, à mon avis, on les comprendra très bien.

Méditons …

A suivre …Chapitre 1


 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Jeu 13 Avr - 7:34

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 1

Où l’on commence à parler de la seconde partie , ou de la cause de cette  « Nuit » qui est la « Foi « .
On prouve par deux raisons qu’elle est plus obscure que la première et la troisième .



Nous allons parler maintenant de la seconde partie de cette nuit qui est la foi. Elle est, comme nous l'avons dit, le moyen admirable que nous avons pour parvenir à notre fin qui est Dieu; et Dieu étant naturellement pour l'âme la cause ou la troisième partie de cette nuit, la foi qui se trouve au milieu est comparée au milieu de la nuit.

Nous pouvons donc dire que pour l'âme cette nuit est plus obscure que la première, et d'une certaine manière plus obscure aussi que la troisième.

La première, ou la nuit des sens, est comparée au crépuscule, c'est-à-dire au moment où tous les objets matériels se dérobent à la vue; voilà pourquoi elle n'est pas aussi éloignée de la lumière que le milieu de la nuit.

La troisième partie ou l'aurore, étant déjà proche de la lumière du jour, n'est pas aussi obscure que l'est le milieu de la nuit: car elle précède immédiatement le rayonnement et l'éclat de la lumière du jour, et elle est comparée à Dieu même.

A la vérité, si nous nous mettons au point de vue naturel, Dieu est pour l'âme comme une nuit aussi obscure que la foi. Néanmoins, lorsque l'âme a traversé ces trois sortes de nuit, Dieu l'éclaire surnaturellement des rayons de sa lumière, et d'une manière plus élevée, transcendante et expérimentale.

C'est le commencement de l'union parfaite, qui a lieu une fois qu'elle a passé la troisième nuit; aussi on peut dire qu'elle est moins obscure que la seconde nuit; mais elle est également plus obscure que la première, car celle-ci a rapport à la partie inférieure de l'homme, celle des sens, qui par conséquent est plus extérieure.

La seconde nuit, celle de la foi, a rapport à la partie supérieure de l'homme ou partie raisonnable; elle est par conséquent plus intérieure et plus obscure dès lors qu'elle prive l'âme de la lumière de la raison ou, pour mieux m'exprimer, qu'elle l'aveugle.

C'est donc à bon droit qu'elle est comparée au milieu de la nuit, parce que c'est la partie la plus centrale et la plus obscure de la nuit.

Nous allons maintenant prouver comment cette seconde partie où la foi est une nuit pour l'esprit, comme la première en est une pour les sens.

Nous dirons ensuite les obstacles que la foi rencontre et la part d'activité qu'elle doit elle même mettre en oeuvre pour y entrer.

Quant à son état passif, c'est-à-dire à ce que Dieu opère sans son concours pour l'y introduire, nous en parlerons dans le troisième livre, quand nous aurons traité de l'état passif de la première nuit dans le second livre, comme nous l'avons dit et promis

Méditons ..

A suivre …Chapitre 2



 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Ven 14 Avr - 7:35

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 2

Comment la Foi est une «  Nuit obscure «  pour l’ âme

La foi, disent les théologiens, est une habitude de l'âme, certaine et obscure en même temps. Elle est obscure parce qu'elle nous fait croire des vérités révélées par Dieu même, qui sont au-dessus de toute lumière naturelle et excèdent incomparablement la portée de tout entendement humain. De là vient que cette lumière de la foi est pour l'âme comme une obscurité profonde, parce que le plus absorbe le moins et lui est supérieur.

La lumière du soleil éclipse toutes les autres lumières, celles-ci ne paraissent plus quand celle-là brille et s'impose à notre puissance visuelle; aussi son éclat, au lieu de favoriser la vue, éblouit plutôt parce qu'il est excessif et trop disproportionné avec la puissance visuelle.

Ainsi en est-il de la foi: sa lumière, par son excès, opprime et éblouit la lumière de notre entendement; de lui même il ne s'étend qu'à la science purement naturelle, bien qu'il ait une aptitude pour l'acte surnaturel quand il plaira à Notre-Seigneur de l'y élever. Il ne peut donc rien savoir de lui-même, si ce n'est par la voie naturelle: c'est là la seule connaissance qu'il obtient par les seuls sens; mais pour cela il lui faut les images et figures des objets présents par eux-mêmes ou leur ressemblance; sans cela il n'aurait aucune connaissance, car, disent les philosophes:

« Ab objecto et potentia paritur notitia: De l'objet présent et de la faculté naît la connaissance. »

Voilà pourquoi si on racontait à quelqu'un des choses dont il n'aurait jamais entendu parler, et dont il n'aurait jamais vu la ressemblance, il n'en aura pas plus d'idée que si on ne lui avait jamais rien dit. Si par exemple on racontait à quelqu'un qu'il y a, dans une certaine île, un animal qu'il n'a jamais vu, et si on ne lui signale pas quelque trait de ressemblance de cet animal avec d'autres animaux qu'il a vus, il n'en aurait pas plus de connaissance ni d'idée qu'auparavant, malgré tout ce qu'on pourrait lui en dire.

Voici encore un autre exemple qui fera mieux comprendre ma pensée. Si vous vous adressez à un aveugle-né, qui par conséquent n'a jamais vu de couleurs, et si vous lui dites comment est la couleur blanche et la couleur jaune, vous aurez beau lui donner des explications, il ne vous comprendra nullement, parce qu'il n'a jamais vu ces couleurs ni quelque chose de semblable qui lui permette d'en juger.

Tout ce qu'il retiendra, ce sera le nom de ces couleurs, parce qu'il peut le percevoir par l'ouïe; quant à leur forme ou leur figure, il lui sera impossible de s'en former une idée, parce qu'il ne l'a jamais vue.

Ces comparaisons nous représentent, quoique d'une manière imparfaite, ce que la foi est pour l'âme. Elle nous dit des choses que nous n'avons jamais vues ni comprises, soit en elles-mêmes, soit dans des objets qui leur ressembleraient, puisqu'il n'y en a pas. Nous ne pouvons donc en avoir aucune lumière par notre science naturelle, car ce qu'elle nous dit n'a aucun rapport avec nos sens. Nous les connaissons par l'ouïe; nous croyons ce qu'on nous enseigne et nous y soumettons aveuglément notre lumière naturelle. Car, comme le dit saint Paul, « la foi vient de l'audition, et l'audition de la parole du Christ (Rom. X, 17) ».

C'est comme s'il disait: La foi n'est pas une science qui s'acquiert par un sens quelconque; elle n'est que l'acquiescement de l'âme à ce qui lui vient par l'ouïe.

Il y a plus: la foi dépasse de beaucoup ce que les exemples précédents nous ont donné à comprendre. Non seulement elle ne produit ni l'évidence ni la science, mais, je le répète, elle excède et dépasse toutes les connaissances et toutes les sciences, afin qu'on puisse bien juger d'elle dans la contemplation parfaite. Les autres sciences s'acquièrent avec la lumière de l'entendement, celle de la foi s'acquiert sans cette lumière; il faut même faire le sacrifice de cette lumière particulière pour ne point perdre celle de la foi. Isaïe a dit en effet:

Si non credideritis, non intelligetis: « Si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas. (Is. VI, 3) »
Il est donc clair que la foi est une nuit obscure pour l'âme, et c'est ainsi qu'elle l'éclaire, et plus elle la plonge dans les ténèbres, plus elle lui donne sa lumière. C'est en l'aveuglant au point de vue naturel qu'elle lui donne sa lumière, selon la parole d'Isaïe:

Si vous ne croyez pas, c'est-à-dire, si vous n'êtes pas dans les ténèbres, vous ne comprendrez pas; cela veut dire: vous n'aurez pas la lumière ni la connaissance élevée et surnaturelle de la vérité.

C'est ainsi que nous voyons une figure de la foi dans cette nuée qui séparait les enfants d'Isarël des Égyptiens au moment d'entrer dans la mer Rouge et dont la sainte Écriture nous dit: « C'était une nuée ténébreuse, mais elle éclairait cependant la nuit (Ex. XIV, 20). »

Phénomène admirable! Tout en étant ténébreuse, elle éclairait la nuit! Cela nous signifie la foi qui est une nuée obscure et ténébreuse pour l'âme (qui est elle-même nuit, puisque en présence de la foi elle est privée de sa lumière naturelle et aveuglée); mais la foi éclaire avec ses ténèbres les ténèbres de l'âme; il convenait que le maître qui est la foi fût en rapport avec le disciple qui est l'âme.

Car l'homme qui est dans les ténèbres ne pouvait être convenablement éclairé que par d'autres ténèbres, comme nous l'enseigne le Psalmiste en ces termes:

« Le jour annonce la parole au jour, et la nuit transmet la science à la nuit (Ps. XVIII, 3). »

Pour parler plus clairement, cela veut dire que le jour c'est Dieu lui-même dans la bienheureuse patrie où il est comme un jour pour les anges et les saints, qui à leur tour deviennent jours aussi dans le reflet de la divine lumière. Il leur dit et communique la divine parole, qui est sont Fils, afin qu'ils le connaissent et en jouissent.

La nuit, c'est la foi dans l'Église militante où il fait encore nuit. Elle communique la science à l'Église, et par suite à chaque âme qui est nuit elle aussi, puisqu'elle ne jouit pas de la vision béatifique de l'éternelle sagesse, et qu'en présence de la foi, elle est privée de sa lumière naturelle.

De là il faut déduire que la foi qui est une nuit obscure éclaire l'âme qui est dans l'obscurité, et c'est ainsi que se vérifie ce que David dit à ce propos: Et nox illuminatio mea in déliciis meis: « La nuit sera ma lumière au milieu de mes délices (Ps. CXXXVIII, 11) », ce qui équivaut à dire: Dans les délices de ma pure contemplation et de mon union avec Dieu, la nuit de la foi sera mon guide.

Cela nous fait comprendre clairement que l'âme doit être dans les ténèbres (au point de vue naturel) pour avoir la lumière qui la guidera dans cette voie de l'union avec Dieu.

Méditons …

A suivre …Chapitre 3



 
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Message par Maud Sam 15 Avr - 7:22

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 3


Ce Chapitre montre d’ une façon générale comment l’ âme , autant que cela dépend d’elle , doit se  tenir  dans les Ténèbres de la FOI pour être bien guidée  jusqu’à la plus haute contemplation

On commence à comprendre un peu, je crois, comment la foi est une nuit obscure pour l'âme, et comment l'âme doit être sous le rapport de sa lumière naturelle, dans l'obscurité, pour se laisser guider par la foi au terme élevé de l'union. Mais pour qu'elle sache se conduire alors, il convient d'expliquer maintenant un peu dans le détail cette obscurité de l'âme, et cet abîme de la foi où elle pénètre. Aussi ce chapitre sera-t-il consacré à en parler d'une façon générale et, ensuite, Dieu aidant, nous verrons quelle doit être sa conduite pour ne pas s'égarer, ni contrarier l'action d'un guide tel que la foi.

Je dis donc que, pour se laisser guider sûrement par la foi à cet état de contemplation, l'âme non seulement doit se tenir dans l'obscurité dans cette partie d'elle-même qui a rapport avec les créatures et le temporel, c'est-à-dire sa partie sensitive et inférieure, comme nous l'avons déjà dit, mais aussi dans cette partie qui a rapport à Dieu et aux choses spirituelles, c'est-à-dire sa partie raisonnable et supérieure dont nous nous occupons maintenant.

Pour arriver à la transformation surnaturelle, il est clair que l'âme doit être dans les ténèbres et se soustraire à tout ce qui concerne sa vie naturelle tant sensitive que raisonnable. Le mot surnaturel signifie ce qui est au-dessus de la nature; par conséquent ce qui est naturel est en bas.

Mais, comme la transformation en Dieu ne dépend ni des sens ni de l'habileté humaine, l'âme doit se dépouiller complètement et volontairement de tout ce qu'elle peut contenir d'affection aux choses d'en haut ou d'en bas; elle le fera dans toute la mesure où cela dépend d'elle; et alors qui empêchera Dieu d'agir en toute liberté dans cette âme soumise, dépouillée, anéantie?

Le dépouillement devra être complet et s'étendre à tout ce qu'elle pourrait contenir. Voilà pourquoi, alors même qu'elle acquerrait peu à peu des faveurs surnaturelles, elle devrait toujours veiller à se considérer comme si elle en était dénuée, à se tenir dans les ténèbres comme l'aveugle, en s'appuyant sur la foi obscure, qui est sa lumière et son guide, et nullement sur ce qu'elle peut entendre, goûter, sentir ou imaginer, car tout cela n'est que ténèbres capables de l'égarer ou de la retarder; mais la foi est au-dessus de nos connaissances, de nos goûts, de nos sentiments et de nos imaginations.

Si elle ne devient pas aveugle par rapport à ces choses, et cela d'une façon totale, elle n'arrivera jamais à ce bien surnaturel que nous enseigne la foi.

Celui qui n'est pas complètement aveugle ne se laisse pas conduire  facilement par son guide. Pour peu qu'il y voie, il s'imagine qu'il vaut mieux prendre le premier chemin qui se présente parce qu'il n'en voit pas de meilleur: aussi il risque d'égarer son guide qui voit mieux que lui; car enfin il peut commander plus que son guide.

Il en est de même de l'âme. Si elle s'appuie sur quelqu'une de ses connaissances ou quelqu'un de ses goûts et de ses sentiments pour Dieu, quelque excellents d'ailleurs qu'ils soient, ce sera toujours peu de chose et bien peu proportionné à ce qu'est Dieu; on se trompe facilement en suivant un tel chemin et l'on retarde la marche en avant, parce que l'âme ne se conforme pas aveuglément à la foi qui est son vrai guide.

C'est là ce que saint Paul veut nous dire par ces termes: Credere enim oportet accendentum ad Deum quia est: « Celui qui veut s'approcher de Dieu doit croire qu'il est (Heb. XI, 6). »

C'est comme s'il disait: Que celui qui aspire à s'unir à Dieu ne s'appuie pas sur ses connaissances, qu'il ne s'attache pas à ses goûts, ni à ses sentiments, ni à son imagination, mais qu'il croie que Dieu est, ce qui ne peut être saisi ni par l'entendement, ni par ses tendances, ni par l'imagination, ni par un sens quelconque, ni être connu ici-bas tel qu'il est, car tout ce qu'il peut y avoir de plus élevé sur cette terre dans nos sentiments, dans nos connaissances, dans nos attraits, est à une distance infinie de ce que Dieu est en lui-même, et de ce que sera pour nous la pure possession de Dieu. Isaïe et saint Paul ont dit:

Neque oculus vidit, neque auris audivit, nec in cor hominis ascendit quae praeparavit Deus iis qui diligunt illum:

« Ce que Dieu a préparé à ceux qui l'aiment, l'oeil de l'homme ne l'a point vu, son oreille ne l'a point entendu son coeur ne l'a point goûté, et son intelligence ne saurait le concevoir (Le Saint ne cite littéralement que saint Paul. –  Isaïe, LXIV,4, dit: Oculus non vidit, Deus, absque te quae praeparasti expectantibus te.

–  Saint Paul (I ad Cor., II, 9) dit comme nous le marquons dans le texte.) ».
–  L'âme aura beau prétendre s'unir parfaitement ici-bas par la grâce à Celui à qui elle doit être unie dans la gloire du ciel; saint Paul nous dit ici: l'oeil de l'homme ne l'a point vu, son oreille ne l'a point entendu, son coeur de chair ne l'a point goûté.

Il est donc clair que, pour arriver ici-bas à s'unir parfaitement à lui par la grâce et l'amour, l'âme doit être dans l'obscurité par rapport à tout ce que l'oeil peut voir, l'ouïe entendre, l'imagination représenter et le coeur percevoir. Elle se met donc dans un grand embarras, quand, pour arriver à cet état élevé d'union avec Dieu, elle s'attache à quelque pensée, à un goût ou imagination, à son jugement, à ses désirs, à sa manière d'agir ou à toute oeuvre ou chose personnelle, et qu'elle ne sait pas s'en délivrer et dépouiller complètement. Nous l'avons déjà dit: le terme où elle tend est au-dessus de tout cela et dépasse tout ce qu'elle pourrait connaître et goûter de plus sublime.

Voilà pourquoi, passant par-dessus tout, elle doit s'appliquer à ne rien savoir.

Aussi dans cette voie, quitter son chemin, c'est trouver le chemin véritable, ou mieux, passer au terme et laisser le moyen, c'est pénétrer dans le terme qui est sans mesure, je veux dire en Dieu lui-même. Car l'âme qui arrive à cet état n'a plus ni modes ni manières d'agir qui lui soient propres; elle ne s'y attache pas et ne peut s'y attacher. Je veux dire qu'elle ne s'attache plus à ses manières d'entendre, de goûter et de sentir, bien qu'elle les possède toutes; elle est comme celui qui, n'ayant rien, possède tout éminemment.

Elle a le courage de franchir les limites naturelles de ses facultés intérieures et extérieures, aussi entre-t-elle pleinement dans le surnaturel qui n'a ni limite ni mesure, mais qui renferme tout en substance.

Pour en arriver là, il faut sortir de l'état naturel, sortir de soi, s'éloigner de ce qui est bas pour arriver à ce qui dépasse toutes les hauteurs. Aussi, se transportant au-delà de tout ce qu'elle peut savoir ou comprendre spirituellement et naturellement, elle doit désirer ardemment parvenir à ce qu'elle ne peut connaître en cette vie ni goûter dans son coeur. Elle laisse derrière elle tout ce qu'elle goûte et ressent ou peut goûter et ressentir ici-bas dans sa partie spirituelle et sensitive, et brûle d'arriver à ce qui surpasse tout sentiment et toute joie.

Si elle veut demeurer libre et dégagée de toute créature pour parvenir à un tel but, elle ne doit point s'éprendre des impressions qu'elle recevra dans sa partie spirituelle et sensitive, comme nous le dirons bientôt, lorsque nous traiterons ce point en particulier; et elle n'en fera aucun cas.

Plus elle pense à ce qu'elle entend, à ce qu'elle goûte ou imagine, plus elle l'estime, que ce soit spirituel ou non; et plus par conséquent elle enlève de son estime pour le souverain Bien, plus aussi elle retarde sa marche vers lui.

Au contraire, moins elle se préoccupe de tout ce qu'elle peut avoir, si précieux que ce soit, et plus elle s'approche du souverain Bien et lui réserve son estime; plus aussi par conséquent elle s'en rapproche.

Marchant ainsi dans la nuit, elle s'avance à grands pas vers l'union avec Dieu par la foi, qui, tout obscure qu'elle est, lui donne son admirable lumière. Il est évident que si elle voulait voir Dieu par ses forces naturelles, elle tomberait dans un aveuglement plus profond que celui qui ouvre les yeux pour contempler la splendeur du soleil.

Voilà pourquoi celui qui suit ce chemin ne verra la lumière qu'en aveuglant ses puissances, comme Notre-Seigneur nous l'enseigne dans l'Évangile en ces termes: In judicium ego in hunc mundum veni, ut qui non vident, videant, et qui vident, caeci fiant: « Je suis venu en ce monde afin que par un juste jugement ceux qui ne voient pas, voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles (Jean, IX, 39). »

Ces paroles doivent s'entendre à la lettre de ce chemin spirituel dont nous parlons. Il faut donc savoir que l'âme qui est dans les ténèbres, et s'aveugle par rapport à toutes ses lumières propres et naturelles, sera éclairée surnaturellement. Celle au contraire qui voudra s'appuyer sur quelque lumière personnelle se mettra dans les ténèbres toujours plus profondes et se retardera dans le chemin de l'union.

Pour procéder avec plus de clarté, il me semble nécessaire d'expliquer dans le chapitre suivant ce que nous entendons par cette union de l'âme avec Dieu dont nous nous entretenons. Ce point, une fois bien compris, donnera une lumière très vive sur les questions dont nous aurons à parler désormais; il me semble que c'est bien le moment de traiter cette question, et ce ne sera pas inutile, quoique nous devions interrompre le fil de notre discours, dès lors que nous donnerons par là plus de lumière à notre sujet lui-même.

Ce chapitre sera donc comme une sorte de parenthèse.

Et immédiatement après nous reviendrons à parler des trois puissances de l'âme considérées dans leurs rapports avec les trois vertus théologales, dans cette seconde nuit spirituelle.


Méditons …

à suivre…Chapitre 4




 Eucharistie    Colombe


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Message par Maud Lun 17 Avr - 8:10

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 4

Où l’on explique par une comparaison ce que c’est  l’ Union de l’ âme avec Dieu

Ce qui précède nous a déjà donné quelque idée de ce qu'il faut entendre ici par l'union de l'âme avec Dieu, et nous aidera à comprendre mieux ce que nous devons dire. Mon  but, en ce moment, n'est pas d'en expliquer les diverses parties; je n'en finirai plus si j'entreprenais d'exposer quelle est l'union de l'entendement, ou de la volonté, ou de la mémoire, ou encore l'union transitoire ou permanente de ces puissances, ou quelle est la totale union, soit transitoire, soit permanente; je parlerai d'ailleurs, à chaque pas, tantôt de l'une, tantôt de l'autre. Mais, pour le moment cela importe peu pour faire comprendre ma pensée.

Mieux vaudra l'exposer à l'endroit voulu, quand je traiterai le sujet et que nous présenterons un exemple vivant à l'appui de la théorie; on comprendra mieux alors et on saisira mieux les détails, et on pourra mieux en juger. Je ne veux, pour le moment, parler que de l'union totale et permanente, selon la substance de l'âme et ses puissances et quant à l'habitude obscure de l'union, parce que quant à l'acte nous le dirons ensuite avec l'aide de Dieu; nous verrons comment nous n'avons et nous ne pouvons avoir d'union permanente dans nos puissances sur cette terre, mais seulement une union transitoire.

Et d'abord pour comprendre quelle est cette union dont nous parlons, il faut savoir que Dieu se trouve dans chaque âme, serait-ce celle du plus grand pécheur du monde, qu'il y demeure, et qu'il l'assiste substantiellement. Cette sorte d'union existe toujours entre Dieu et toutes les créatures, puisqu'il leur conserve l'être qu'elles possèdent; et s'il ne leur était pas présent de cette manière-là, elles tomberaient dans le néant, et cesseraient d'exister.

Quand donc nous parlons de l'union de l'âme avec Dieu, nous n'avons pas en vue cette union qui existe en fait avec toutes les créatures, mais l'union de l'âme avec Dieu et sa transformation en lui par amour, qui n'existe pas toujours, mais seulement quand il y a ressemblance par amour; voilà pourquoi cette union s'appelle union de ressemblance. Celle-là s'appelle union substantielle, essentielle ou naturelle; celle-ci au contraire s'appelle surnaturelle; elle a lieu quand les deux volontés, celle de l'âme et celle de Dieu, sont d'accord entre elles et que l'une n'a rien qui répugne l'autre.

Quand donc l'âme rejette complètement ce qui en elle répugne ou n'est pas conforme à la volonté de Dieu, elle est transformée en Dieu par amour.

Ce dépouillement doit s'entendre non seulement des actes qui répugnent à Dieu, mais encore des tendances habituelles; aussi l'âme doit-elle repousser non seulement les actes volontaires des imperfections, mais elle doit réduire à néant les tendances de toutes ses imperfections. Toutes les créatures, toutes leurs actions, leurs habiletés, ne peuvent atteindre Dieu ni s'élever jusqu'à lui; aussi l'âme doit-elle se dépouiller de tout créé, de ses actions et habiletés, c'est-à-dire de sa manière de juger, de goûter, de sentir; c'est dégagée de tout ce qui n'est pas semblable ou conforme à Dieu, qu'elle arrive à recevoir sa ressemblance avec Dieu; il n'y a plus rien en elle qui ne soit la volonté de Dieu, et elle est transformée en lui.

Sans doute, comme nous l'avons dit, Dieu est toujours présent dans l'âme pour lui donner et lui conserver son être naturel par la vertu de sa puissance, mais il ne lui communique pas toujours l'être surnaturel.

Celui-ci ne se donne que par l'amour et la grâce, et toutes les âmes ne sont pas en état de grâce; celles qui y sont ne la possèdent pas au même degré: les unes ont moins d'amour, les autres en ont plus.

Une âme est d'autant plus unie à Dieu qu'elle est plus élevée en amour, ou qu'elle conforme mieux sa volonté avec celle de Dieu. Celle dont la volonté est totalement conforme et semblable à celle de Dieu est aussi celle qui est totalement unie à Dieu et transformée surnaturellement en Lui.

D'où il suit, comme nous l'avons dit, que plus l'âme se tourne vers la créature ou ses qualités personnelles par attrait et par affection, moins elle a de disposition à l'union divine, parce qu'elle ne donne pas entièrement à Dieu le moyen de la transformer surnaturellement. L'âme n'a besoin que de se dépouiller de ces oppositions et dissemblances naturelles pour que Dieu, qui communique  déjà naturellement à elle par la nature, se communique à elle surnaturellement par la grâce. C'est là ce que saint Jean a voulu nous faire comprendre quand il a dit: Qui non ex sanguinibus, neque ex voluntate carnis, neque ex voluntate viri, sed ex Deo nati sunt (Jean, I, 13).

C'est comme s'il avait dit: il a donné le pouvoir de devenir ses enfants, c'est-à-dire de pouvoir être transformés en lui, seulement à ceux qui ne sont pas nés du sang, ni des dispositions naturelles et corporelles, ni de la volonté de la chair, c'est-à-dire de la liberté, ou de la capacité ou aptitude naturelle, ni surtout de la volonté de l'homme; et par là on entend toutes les manières humaines de juger et de comprendre d'après la raison seule; à aucun de ces derniers, il n'a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu parfaits, mais à ceux qui sont nés de Dieu, c'est-à-dire à ceux qui ont pris une nouvelle naissance dans la grâce, après être morts tout d'abord à tout ce qui constitue le vieil homme, s'élèvent au-dessus d'eux-mêmes jusqu'au surnaturel, en recevant de Dieu cette régénération et filiation qui surpasse tout ce que l'on peut concevoir .

Aussi saint Jean dit ailleurs: Nisi quis renatus fuerit ex aqua et Spiritus Sancto, non potest introire in regnum Dei (Jean III, 5).

Cela veut dire: Celui qui ne reçoit pas de l'Esprit-Saint une nouvelle naissance ne pourra pas voir le royaume de Dieu, qui est l'état de perfection.

Recevoir parfaitement du Saint-Esprit une nouvelle naissance ici-bas, c'est posséder une âme très semblable à Dieu par la pureté, sans qu'il y ait le plus petit mélange d'imperfection; c'est ainsi que peut s'accomplir la pure transformation de l'âme en Dieu; elle participe à la nature de Dieu par son union avec lui, bien que cette union ne soit pas essentielle.

Prenons une comparaison pour jeter plus de jour sur cette vérité. Voici le rayon du soleil qui donne sur une vitre; or si la vitre a quelques taches ou quelques nuages, il ne peut l'éclairer ni la faire briller aussi complètement que si elle était purifiée de toutes taches et bien limpide; il l'éclairera même d'autant moins qu'elle sera moins dépouillée des voiles qui la recouvrent. Ce ne sera pas la faute du rayon, mais celle de la vitre. Si la vitre, en effet, était tout entière pure et limpide, le rayon l'éclairerait et la pénétrerait si bien qu'elle lui serait semblable et donnerait la même clarté.

Sans soute la vitre, tout en ressemblant au rayon, conserve toujours sa propre nature, bien distincte du rayon, cependant nous pouvons dire qu'elle est rayon ou lumière par participation

.
Ainsi en est-il de l'âme. Elle est toujours, au point de vue naturel, investie de la lumière divine de l'être infini. Cette lumière même demeure en elle, comme nous l'avons dit. Or si l'âme se met dans les dispositions voulues, c'est-à-dire si elle se purifie de toutes les taches ou souillures formées par les créatures, si par conséquent elle met sa volonté en accord parfait avec celle de Dieu, car l'amour que l'on a pour Dieu consiste à se dépouiller de tout ce qui n'est pas lui, l'âme devient immédiatement toute illuminé et transformée en Dieu.

Dieu lui communique si bien son être surnaturel qu'elle semble Dieu lui-même; selle possède ce que Dieu possède; l'union provenant de cette souveraine faveur est telle que toutes les choses de l'âme ne font qu'un avec les choses de Dieu, l'âme paraît être Dieu plutôt qu'âme; elle est Dieu par participation.

Sans doute, elle conserve son être naturel, aussi distinct de Dieu qu'auparavant malgré sa transformation, comme la vitre est distincte du rayon tout en étant éclairée par lui.
De là il suit clairement que le moyen pour l'âme de parvenir à l'union divine, comme nous l'avons dit, ne consiste pas dans ses pensées, dans ses goûts, dans ses sentiments, ou son imagination qui cherche à se représenter Dieu d'après un mode naturel ou dans un procédé quelconque, mais il consiste dans la pureté et l'amour, c'est-à-dire dans le dépouillement et l'abnégation de tout en vue de Dieu seul.

Mais comme il ne peut y avoir de transformation parfaite s'il n'y a pas une pureté parfaite, l'illumination et l'union de l'âme avec Dieu seront plus ou moins grandes et en rapport avec sa pureté. Or, cette union, je le répète, ne sera pas absolument parfaite, tant que l'âme ne sera pas complètement purifiée et limpide.

Voici une autre comparaison qui fera bien comprendre cette vérité. Représentez-vous un tableau achevé, renfermant une foule des détails les plus parfaits, et rehaussé des émaux les plus délicats et les plus fins; quelques-uns même sont tellement parfaits qu'on ne peut guère en apprécier la finesse et l'excellence.

Or supposez quelqu'un qui a une vue peu claire et imparfaite, il n'y découvrira que peu de beautés et de perfections; celui qui l'aura meilleure, en découvrira davantage; et enfin celui dont la puissance sera plus excellente, les verra encore mieux; car dans ce tableau il y a tant à voir, que, malgré tout ce qu'on a pu y admirer de merveilleux, il y aura toujours beaucoup plus à contempler.

Ainsi, pouvons-nous le dire, en est-il des âmes lorsqu'elles sont éclairées par Dieu et transformées en lui.

Sans doute une âme arrive à l'union d'après le degré plus ou moins grand de ses aptitudes, et ce degré n'est pas le même pour toutes. Il dépend de la grâce que Dieu accorde à chacune; et il est semblable à celui des saints qui voient Dieu dans le ciel. Les uns le voient d'une manière plus parfaite que les autres; mais tous le voient; tous sont contents et heureux, parce que leur capacité dépend des mérites plus ou moins grands qu'ils ont acquis durant leur vie mortelle.

Aussi, de même que nous rencontrons sur la terre certaines âmes qui jouissent d'une égale paix et tranquillité dans leur état de perfection et que chacune d'elles est satisfaite, cependant l'une d'elles peut être beaucoup plus élevée que les autres dans son union avec Dieu; mais toutes sont également satisfaites, parce que la capacité de chacune d'elles est remplie.

Quant à l'âme qui n'arrive pas à une pureté conforme à la capacité que Dieu lui a donnée, elle ne parviendra jamais à la satisfaction véritable; elle n'a pas encore opéré dans ses puissances le dépouillement et le vide qui sont exigés pour la pure union avec Dieu.


Méditons …

à suivre …Chapitre 5




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Message par Maud Mar 18 Avr - 7:49

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La Montée du Carmel  - Livre deuxième – Chapitre 5

Où l’on montre comment ce sont les trois Vertus théologales qui doivent perfectionner les trois puissances de l’ âme, et comment elles y établissent le vide et les ténèbres.



Nous allons traiter maintenant du moyen d'introduire les trois puissances de l'âme, l'entendement, la mémoire et la volonté, dans la nuit obscure spirituelle qui mène à l'union divine.

Mais il faut tout d'abord montrer, dans ce chapitre, comment les trois vertus théologales, la foi, l'espérance et la charité, qui ont rapport aux trois facultés susdites comme étant leur propre objet surnaturel et par lesquelles l'âme s'unit à Dieu dans ses puissances, font, chacune dans la puissance qui lui correspond, le même vide et la même obscurité: la foi dans l'entendement, l'espérance dans la mémoire, et la charité dans la volonté.

Nous verrons ensuite comment l'entendement doit se perfectionner dans les ténèbres de la foi, la mémoire par le vide de l'espérance, et la volonté par la privation et le dénûment de toute affection pour s'unir à Dieu.

Cela fait, on verra clairement combien il est nécessaire à l'âme, pour qu'elle marche avec sécurité dans ce chemin spirituel, de passer par cette nuit obscure en s'appuyant sur ces trois vertus qui la dégagent de toutes les choses créées et la mettent dans la nuit à leur sujet. Nous l'avons déjà dit, l'âme ne s'unit pas à Dieu sur cette terre par ce qu'elle peut entendre, goûter, imaginer ou sentir de quelque manière que ce soit, mais seulement par la foi qui correspond à l'entendement, par l'espérance qui correspond à la mémoire, et par la charité qui correspond à la volonté.

Ces trois vertus font, nous l'avons dit, le vide dans nos puissances: la foi fait le vide dans l'entendement pour l'obscurcir et l'empêcher de comprendre; l'espérance opère dans la mémoire pour la priver de la possession de tout objet créé; et la charité fait le vide dans la volonté pour la dépouiller de toute affection et de tout attrait à ce qui n'est pas Dieu. La foi, nous le savons en effet, nous parle de choses que nous ne pouvons comprendre à l'aide de la raison et de la lumière naturelle.

Aussi saint Paul a dit: Est autem fides sperandarum substantia rerum, argumentum non apparentium (Heb. XI, 1). La foi est la substance des choses que nous espérons, et bien que l'entendement y adhère avec fermeté et certitude, elles ne sont pas dans le champ de celles qu'il découvre, parce que, s'il les découvrait, ce ne serait plus la foi.

Car bien que la foi donne la certitude à l'entendement, elle ne lui rend pas l'objet manifeste, elle le laisse au contraire dans l'obscurité.

Quant à l'espérance, il n'y a pas de doute qu'elle ne mette aussi la mémoire dans le vide et les ténèbres par rapport aux choses de la terre et du ciel; car l'espérance se porte toujours vers les objets qu'elle ne possède pas et si elle les possédait, ce ne serait plus l'espérance.

Aussi saint Paul dit-il: Spes autem quae videtur, non est spes; nam quod videt quis, quid sperat? « L'espérance d'un bien qui se voit n'est plus l'espérance, car ce que l'on voit, ce que l'on possède, comment l'espère-t-on? (Rom. VIII, 24) » Cette vertu fait donc aussi le vide dans la mémoire, car elle a pour objet ce que l'on ne possède pas et non ce que l'on possède.

La charité à son tour fait dans la volonté le vide par rapport à toutes les choses créées, puisqu'elle nous oblige à aimer Dieu au-dessus de tout. Cela n'a lieu qu'en arrachant notre affection à toutes les créatures pour la reporter complètement sur Dieu.

Voilà pourquoi Notre-Seigneur Jésus-Christ nous dit dans saint Luc: Qui non renuntiat omnibus quae possidet, non potest meus esse discipulus: « Celui qui ne renonce pas à toutes les choses qu'il possède par la volonté, ne peut être mon disciple (Luc, XIV, 33). » C'est ainsi que ces trois vertus théologales mettent l'âme dans l'obscurité et le vide par rapport à toutes les choses créées.

Il est bon de rappeler ici cette parabole que notre Rédempteur nous donne dans saint Luc, d'un ami qui devait aller au milieu de la nuit demander trois pains à son ami (Luc, XI, 5). Ces trois pains signifient les trois vertus théologales; or il nous dit que l'ami demanda les trois pains au milieu de la nuit: cela signifie que c'est par l'obscurité et par la nuit où elle mettra ses puissances que l'âme doit acquérir ces trois vertus et s'y perfectionner.

Au chapitre VIè d'Isaïe nous lisons que les deux séraphins que le prophète vit de chaque côté du trône de Dieu avaient chacun six ailes. Avec deux d'entre elles ils se couvraient les pieds, ce qui signifie l'aveuglement et l'abnégation où il faut mettre les affections de la volonté par rapport à tout le créé pour la porter vers Dieu; avec deux autres ailes, ils se couvraient le visage, pour signifier les ténèbres de l'entendement en présence de Dieu; et enfin avec les deux autres ils volaient, ce qui signifie le vol de l'espérance qui se dirige vers les biens qu'elle ne possède pas, et s'élève au-dessus de tout ce que l'on peut posséder ici-bas et là-haut en dehors de Dieu.

Les trois puissances de l'âme doivent donc tendre à ces trois vertus, et chacune d'elles à sa vertu respective; il faut les mettre dans le dénûment et l'obscurité par rapport à tout ce qui serait étranger à ces vertus.

Telle est la nuit spirituelle que nous avons appelée active parce que l'âme fait ce qui dépend d'elle pour y pénétrer. Aussi, de même que nous avons, en parlant de la nuit des sens, montré le moyen de dégager les puissances sensitives de leur attrait pour les objets sensibles, afin que l'âme sorte de ses limites naturelles et arrive à la vie de foi, de même, avec l'aide de Dieu, nous donnerons dans cette nuit spirituelle le moyen de dégager et de purifier les puissances spirituelles de tout ce qui n'est pas Dieu et de les établir dans la nuit de ces trois vertus, qui, je le répète, sont le moyen et la disposition nécessaire pour l'union de l'âme avec Dieu.

Par là elle sera dans une sécurité complète contre les artifices du démon, contre la puissance de l'amour-propre et ses ramifications si subtiles qu'elles jettent d'ordinaire dans l'illusion les âmes adonnées à la spiritualité et les retardent dans leur marche.

Elles ne savent pas, en effet, se dépouiller de tout créé et se diriger d'après ces trois vertus. Aussi n'arrivent-elles jamais à acquérir la substance même du bien spirituel et sa pureté; elles ne marchent pas par un chemin aussi direct et aussi court qu'elles le pourraient.

Il faut observer que maintenant je m'adresse d'une manière spéciale à ceux qui ont commencé à entrer dans l'état de contemplation. Car pour ceux qui débutent, il faut traiter ce point un peu plus au long, comme nous le verrons lorsque nous nous occuperons de leurs dispositions.

Méditons …

A suivre …Chapitre 6



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Message par Maud Mer 19 Avr - 7:38

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La Montée du Carmel – Livre deuxième  - Chapitre 6

Où l’on montre comment est étroite la Voie qui mène à la Vie, et quels doivent être le dénûment et le détachement de ceux qui ont à la suivre .
On commence à parler de la  ‘’Nuit de l’ Entendement ‘’


Pour traiter maintenant du dénûment et de la pureté des trois puissances de l'âme, il faudrait plus de science et plus de lumière que je n'en ai. Il s'agit, en effet, de bien faire comprendre aux personnes adonnées à la spiritualité combien est étroit ce chemin qui, au dire de Notre-Seigneur, mène à la vie; une fois bien persuadées de cette vérité, elles ne s'étonneraient plus du vide et du dénûment où nous devons laisser les puissances de l'âme durant cette nuit de l'esprit dont nous nous occupons.

Voilà pourquoi il faut bien considérer les paroles de Notre-Seigneur qui sont rapportées dans saint Matthieu sur ce chemin et que nous allons appliquer à cette nuit obscure et à ce chemin élevé de la perfection.

Voici ces paroles: Quam angusta porta et arcta via est, quae ducit ad vitam, et pauci sunt qui inveniunt eam! : « Combien est étroite la porte et resserrée la voie qui mène à la vie! Et qu'il y en a peu qui la trouvent! (Mat. VII, 14) ». Il faut bien noter qu'à l'autorité de cette parole s'ajoute l'exclamation emphatique exprimée par la particule combien.

C'est comme si Notre-Seigneur avait dit: En vérité elle est très étroite cette voie, et beaucoup plus même que vous ne pensez. Il faut remarquer en outre qu'il dit tout d'abord que la porte est étroite; il nous fait entendre par là que pour entrer par cette porte qui est le Christ, et le commencement du chemin, l'âme doit avant tout mortifier sa volonté et la dépouiller de toutes les choses sensuelles et temporelles, et aimer Dieu au-dessus de tout.

Cette opération s'accomplit dans la nuit des sens dont nous avons parlé.
Il ajoute aussitôt: il est resserré le chemin, c'est-à-dire celui de la perfection, pour nous faire comprendre que celui qui marche par ce chemin de la perfection, non seulement doit entrer par la porte étroite en se séparant de tout ce qui est sensible, mais il faut en outre se mortifier, se détacher, se purifier dans la partie spirituelle.

Ce qu'il dit de la porte étroite, nous pouvons le rapporter à la partie sensitive de l'homme, et ce qu'il dit du chemin qui est resserré, nous pouvons l'entendre de la partie spirituelle ou raisonnable.

Quand il ajoute qu'il y en a peu à trouver ce chemin, nous devons en remarquer la cause: c'est qu'il y en a bien peu qui sachent et veuillent entrer dans cet extrême dénûment et ce vide de l'esprit qui est nécessaire.

Ce chemin de la haute Montagne de la perfection est escarpé, il est étroit; il ne veut que des voyageurs qui n'ont aucune charge dans la partie inférieure, et aucune gêne dans la partie supérieure.

Puisque l'on n'a d'autre but que de rechercher Dieu et de le posséder, c'est vers Dieu seul que l'on doit tendre.

On le voit clairement, non seulement l'âme doit être débarrassée de toute affection vers les créatures, mais elle doit être dégagée et détachée de tout obstacle qui lui viendrait de sa partie spirituelle. Aussi Notre-Seigneur, pour nous enseigner ce chemin, nous expose dans saint Marc une doctrine admirable qui est d'autant moins mise en pratique par les personnes spirituelles qu'elle leur est plus nécessaire.

Elle est, en effet, si nécessaire et convient si bien à notre sujet que je la rapporterai ici et en donnerai le sens vrai et spirituel. Voici cette doctrine: Si quis vult me sequi, deneget semetipsum; et tollat crucem suam et sequatur me. Qui enim voluerit animam suam salvam facere, perdet eam; qui autem perdiderit animam suam propter me... salvam faciet eam: « Si quelqu'un veut suivre mon chemin, qu'il se renonce, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive.

Parce que celui qui veut sauver son âme la perdra, et celui qui la perdra par amour pour moi... la sauvera. (Marc VIII, 34-35) »

Oh! Que ne puis-je en ce moment faire comprendre, pratiquer et goûter ce que renferme cette doctrine si profonde de Notre-Seigneur! Il nous dit de nous renoncer, pour que les personnes adonnées à la spiritualité voient combien la conduite qu'il leur convient d'avoir dans ce chemin est différente de celle que beaucoup s'imaginent.

Les uns se figurent qu'il leur suffit de garder une certaine solitude et d'opérer quelques réformes dans leur vie; d'autres se contentent de quelques exercices de vertus; ils persévèrent dans l'oraison, s'adonnent à la mortification; mais ils n'arrivent pas au dénûment, à  cette pauvreté, à cette abnégation, à cette pureté spirituelle – ce qui est tout un – que nous demande ici Notre-Seigneur.

Car ils cherchent encore à entretenir leur nature dans les consolations et les sentiments spirituels, au lieu de se renoncer et de se dépouiller en tout par amour pour Dieu. Ils pensent qu'il suffit de la retirer des biens du monde, sans la jeter dans l'annihilation et la tenir à l'abri de toute propriété spirituelle.

Il résulte de là que si se présente l'occasion d'accomplir un acte de vertu solide et parfait, qui consiste dans le renoncement absolu à toute suavité au service de Dieu, dans la sécheresse, le dégoût, les travaux, en un mot tout ce qui constitue la croix purement spirituelle, le dénûment et la pauvreté d'esprit du Sauveur, ces personnes s'en détournent comme de la mort.

Ce qu'elles cherchent uniquement, ce sont les douceurs au service de Dieu, ses communications suaves et pleines d'attraits; cela n'est pas le renoncement à soi-même, ni la nudité d'esprit, mais plutôt la gourmandise spirituelle.

Par là, elles se rendent ennemies de la croix du Christ; car l'âme vraiment spirituelle cherche en Dieu ce qu'il y a d'insipide plutôt que ce qu'il y a de savoureux pour sa nature; elle se porte vers la souffrance plutôt que vers les consolations, plutôt vers la privation de tout bien par amour pour Dieu, qu'à la possession d'un bien quelconque; vers les aridités et les afflictions, plutôt que vers les suaves communications.

Elle sait que de la sorte elle suit le Christ et renonce à elle-même, tandis que si on agit différemment on se recherche peut-être soi-même en Dieu, ce qui est très contraire à l'amour: car se rechercher soi-même  en Dieu, c'est rechercher les joies et les délices de Dieu; au contraire, rechercher Dieu pour lui-même, ce n'est pas seulement vouloir manquer de tout par amour pour Dieu, mais c'est, par amour pour le Christ, choisir tout ce qu'il y a de plus insipide soit de la part de Dieu, soit de la part du monde, et c'est en cela que consiste le véritable amour de Dieu.

Oh! Qui pourrait faire comprendre jusqu'à quel degré Notre-Seigneur veut que ce renoncement parvienne! Il faut certainement qu'il soit comme une mort, un anéantissement volontaire par rapport à tout ce qui est du temps, de la nature et de l'esprit: et là est la source de tous les biens, comme Notre-Seigneur le déclare par ces paroles:

Celui qui voudra sauver son âme, la perdra, c'est-à-dire celui qui voudra posséder ou rechercher quelque chose pour lui-même, le perdra. Mais celui qui perdra son âme par amour pour moi, la trouvera (Jean, XII, 25), c'est-à-dire celui qui par amour pour le Christ renonce à tout ce que sa volonté peut désirer ou goûter, et choisit de préférence ce qui se rapproche le plus de la Croix (ce que Notre-Seigneur appelle, dans saint Jean, haïr son âme), celui-là la trouvera.

Tel est l'enseignement que le Sauveur donné à ces deux disciples qui lui demandaient d'être assis à sa droite et à sa gauche: il ne leur donne aucun espoir de parvenir à la gloire qu'ils convoitent; il leur offre le calice qu'il doit boire lui-même comme un bien plus précieux et plus sûr ici-bas que toutes les jouissances (Mat. XX, 22). Ce calice c'est la mort à la nature que l'on dépouille et mortifie afin de pouvoir marcher par ce chemin étroit, en tout ce qui concerne la partie sensitive, comme nous l'avons dit, et en tout ce qui concerne l'esprit, comme nous le dirons maintenant, c'est-à-dire ses pensées, ses goûts, ses sentiments spirituels.

De la sorte, l'âme est dégagée sous les deux rapports, mais même sous le second rapport, le spirituel, elle ne trouve plus d'obstacle à suivre le chemin étroit car, ainsi que le dit le Sauveur, il n'y a plus que le renoncement avec la Croix qui est le bâton sur lequel elle s'appuie et avec lequel sa marche devient merveilleusement facile et aisée.

Aussi Notre-Seigneur a dit dans saint Matthieu: « Mon joug est suave et mon fardeau léger (Mat. XI, 30) », c'est-à-dire ma Croix est douce à porter.

Si l'homme, en effet, se détermine à prendre ce joug et à porter cette Croix, s'il se décide résolument à vouloir trouver et supporter par amour pour Dieu toutes sortes de travaux, il trouvera en tous une facilité et une suavité merveilleuse pour suivre ce chemin, dès lors qu'il est dénué de tout et ne désire rien. Mais s'il prétend avoir la moindre propriété dans une chose qui ait rapport à Dieu ou à la créature, il n'est pas dans le dénûment et le renoncement absolu; dès lors il ne peut entrer dans le sentier étroit ni le gravir.

Voilà pourquoi je voudrai convaincre les personnes adonnées à la spiritualité que ce chemin qui mène à Dieu ne consiste pas dans la multiplicité des considérations, ni dans les méthodes, les exercices ou les goûts, bien que cela soit, d'une certaine manière, nécessaire aux commençants; mais dans une seule chose indispensable, celle de savoir se renoncer véritablement à l'intérieur et à l'extérieur, et de se dévouer à la souffrance par amour pour le Christ et à la mort complète de soi-même. En étant fidèle à cet exercice, on acquiert tous les autres biens.

Si on le néglige, quand il est le fondement et la racine des vertus, et si l'on prend d'autres moyens, on ne s'attache qu'à ce qui est accessoire et l'on n'avance pas, alors même que l'on serait favorisé des plus hautes lumières et que l'on serait en communication avec les anges. On ne réalise de progrès qu'en imitant le Christ; il est la voie, la vérité, la vie; personne ne va au Père si ce n'est par lui, comme il le proclame lui-même.

Il dit aussi ailleurs: « Je suis la porte; si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé (Jean XIV, 6; X, 9) ». Voilà pourquoi je ne regarde pas comme bon l'esprit qui veut marcher par la voix douce et facile ou refuse d'imiter le Christ.

J'ai dit que le Christ est la voie et que cette voie est la mort à notre nature tant spirituelle que sensible. Je veux l'expliquer maintenant à l'exemple du Christ, qui est notre modèle et notre lumière.

Tout d'abord, il est certain qu'il mourut aux sens d'une manière morale pendant sa vie et d'une manière naturelle à la fin de sa vie. Comme il l'affirme, il n'a pas eu, dans le cours de sa vie, où reposer sa tête (Mat. VIII, 20). A sa mort ce fut de même; il est certain qu'alors il fut aussi abandonné et comme anéanti dans son âme. Son Père le laissa sans aucune consolation et sans nul secours; il l'abandonna à la sécheresse la plus profonde; voilà pourquoi il ne put s'empêcher de s'écrier à la Croix:

Deus meus, Deus meus, ut quid dereliquisti me? « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné? (Mat. XXVII, 46) »

Ce fut l'abandon le plus grand et le plus sensible qu'il eût jamais éprouvé dans sa vie. Mais c'est alors aussi qu'il opérait la plus grande oeuvre de sa vie, celle qui surpassait tous les miracles et les prodiges qu'il avait jamais accomplis sur la terre et au ciel, je veux dire la réconciliation du genre humain et son union à Dieu par la grâce.

Cette oeuvre s'accomplissait au temps et au moment où le Sauveur était le plus complètement anéanti. Il l'était, en effet, dans sa réputation vis-à-vis des hommes, qui, le voyant expirer sur le bois de la Croix, non seulement ne lui donnaient pas la moindre marque d'estime, mais l'accablaient de leurs moqueries; il l'était dans sa nature, puisque par elle il s'anéantissait dans la mort; il l'était vis-à-vis de son Père, qui, loin de lui accorder un secours, une consolation, le délaissa et l'obligea à payer intégralement la dette de l'homme pour le réconcilier à Dieu.

Il resta ainsi comme détruit et réduit à néant.

Voilà pourquoi David, parlant en son nom, a dit: Ad nihilum redactus sum et nescivi (Ps. LXXII, 22; « J'ai été réduit au néant, et je l'ignorais »).

L'homme spirituel doit comprendre par là le mystère de la porte et du chemin, c'est-à-dire du Christ par qui il faut passer pour s'unir à Dieu; il doit savoir que plus il s'anéantira par amour pour Dieu, dans ses deux parties sensitive et spirituelle, plus aussi il s'unira à Dieu et plus son oeuvre sera grande.

Quand il arrivera à ce degré où il sera réduit à rien, et dans la suprême humiliation, son âme alors achèvera son union spirituelle avec Dieu. C'est là l'état le plus glorieux et le plus élevé auquel on puisse parvenir en cette vie.

L'union ne consiste donc point dans les jouissances, dans les consolations, dans les sentiments spirituels, mais dans la mort réelle de la Croix au point de vue sensitif et spirituel, intérieur et extérieur.

Je ne veux par parler plus longuement de ce sujet, malgré mon désir de le continuer, car je vois que Jésus-Christ est très peu connu de ceux qui se croient ses amis. On les voit, en effet, rechercher en lui les douceurs et les consolations et s'aimer beaucoup eux-même, au lieu de rechercher ses amertumes et ses anéantissements, ce qui serait la marque de l'amour qu'ils lui portent; je dis cela de ceux qui se croient ses amis.

Quant à ceux qui vivent loin de lui et sont séparés de lui, à ces grands, à ces savants, à ces potentats, et aux autres qui vivent au milieu du monde, préoccupés de satisfaire leurs ambitions et leurs désirs de grandeurs, comment pourrions-nous dire qu'ils connaissent le Christ?

Leur fin, si bonne qu'elle soit, sera remplie d'amertume. Il n'est pas question d'eux dans cet écrit; mais au jour du jugement il en sera parlé.

Car c'est à eux tout d'abord qu'il convenait d'adresser cette parole de Dieu, puisque leur science et leur haute situation les mettaient en évidence.

Nous nous adresserons maintenant à l'homme spirituel, et en particulier à celui que Dieu a daigné élever à l'état de contemplation. Je l'ai déjà dit, c'est avec lui que je m'entretiens.

Nous verrons comment il doit se diriger vers Dieu par la foi, en purifiant son entendement de tout ce qui lui serait contraire, et en se mortifiant pour passer par la porte étroite de la contemplation obscure.

Méditons….

A suivre ….Chapitre 7


Eucharistie   Colombe


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Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Jeu 20 Avr - 7:24

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La Montée du Carmel – Livre deuxième  - Chapitre 7

Ce Chapitre montre d’une manière générale comment nulle créature ni connaissance intellectuelle ne peuvent êre un moyen prochain  à l’ Union avec Dieu


La foi est le moyen propre et proportionné à l'union de l'âme avec Dieu. Avant d'en parler, il convient de prouver comment il n'y a rien dans les objets créés, ni dans nos pensées, qui puisse servir à l'entendement de moyen propre pour s'unir à Dieu, et comment tout ce à quoi l'entendement peut atteindre ne peut que lui créer des obstacles au lieu de l'aider, s'il veut s'y attacher.

Dans le présent chapitre, nous prouverons cette vérité d'une façon générale, et ensuite nous parlerons dans le détail de toutes les connaissances que l'entendement peut acquérir par le moyen de ses sens intérieurs et extérieurs, ainsi que des dommages ou inconvénients qui peuvent en résulter s'il ne s'attache au moyen véritable, celui de la foi.

Il faut savoir, d'après une règle de philosophie, que tout moyen doit être proportionné à sa fin, c'est-à-dire doit avoir avec elle la convenance et les rapports qui suffisent à obtenir le but qu'on poursuit. Voici un exemple. Si quelqu'un veut aller à la ville, il doit nécessairement passer par le chemin qui y conduit, car ce chemin est le moyen qui le met en rapport avec la ville.

Autre exemple. Vous voulez allumer du bois; mais il est nécessaire que la chaleur, qui est le moyen, dispose le bois par autant de degrés qu'il en faut pour le rendre peu à peu semblable au feu. Si l'on voulait allumer le bois par un autre moyen que celui qui lui est propre, par exemple avec l'air, l'eau, la terre, on n'y pourrait jamais réussir, comme on n'arriverait jamais à la ville si l'on ne prenait le chemin qui y conduit.

De même, pour que l'entendement puisse s'unir à Dieu, autant qu'il le peut ici-bas, il doit nécessairement prendre le moyen propre à cette union, celui qui le rapproche le plus de Dieu par la ressemblance.

Or nous devons remarquer que, parmi toutes les créatures supérieures et inférieures, il n'y en a aucune qui soit un moyen prochain d'union à Dieu ou qui ait de la ressemblance avec son être. Sans doute, comme disent les théologiens, toutes les créatures ont un certain rapport avec Dieu et retracent plus ou moins quelques vestiges de son être, selon le degré de perfection de leur nature; mais entre Dieu et elles il n'y a aucun rapport, aucune ressemblance essentielle.

Au contraire, la distance qu'il y a entre Dieu et elles est infinie; voilà pourquoi l'entendement ne peut pas s'unir parfaitement à Dieu par le moyen des créatures, tant du ciel que de la terre, parce qu'il n'y a pas une ressemblance suffisante.

David, parlant des créatures célestes, a dit: « Seigneur, il n'y a personne de semblable à vous parmi les dieux (Ps. LXXXV, Cool »; entendant par dieux les saints anges et les âmes saintes. Il dit ailleurs: Deus, in sancto via tua; quis Deus magnus sicut Deus noster? « Ô Dieu, votre voie est une voie de sainteté; où y a-t-il un Dieu comme notre Dieu? (Ps. LXXVI, 14) »

C'est comme s'il disait: La voie pour aller à vous, ô Dieu, est une voie sainte, c'est-à-dire une voie de pure foi. Car où trouver un Dieu aussi grand?

C'est-à-dire où trouver un ange d'une nature aussi élevée? Ou un saint aussi rempli de gloire et aussi grand, qui soit une voie convenable et proportionnée pour aller à vous? Le même prophète, parlant en même temps des choses terrestres et célestes, a dit: « Très haut est le Seigneur, et il voit les choses d'en bas; c'est de loin qu'il connaît les choses élevées (Ps. CXXXVII, 6) ».

Comme s'il disait: Étant très élevé dans son être, il voit que toutes les choses de la terre sont bien basses comparées à sa nature sublime; quant aux choses élevées, ou créatures célestes, il les voit et connaît comme étant très éloignées de lui. En définitive, toutes les créatures ne peuvent servir de moyen proportionné pour que l'entendement s'approche parfaitement de Dieu.

De même, tout ce que l'imagination peut produire et l'entendement concevoir ne saurait être un moyen prochain pour l'union avec Dieu. Nous mettant au point de vue naturel, l'entendement est incapable de concevoir autre chose que ce qui tombe sous les formes ou figures qui nous viennent par les sens du corps; or ces choses comme nous l'avons déjà dit, ne peuvent non plus servir de moyen pour l'union et, par suite, notre intelligence naturelle y est également impuissante.

Si nous parlons de notre intelligence surnaturelle, autant qu'on peut l'avoir en cette vie, nous devons savoir que notre entendement, tant qu'il est dans la prison du corps, n'a ni disposition ni capacité pour recevoir la claire connaissance de Dieu, car cette connaissance n'est pas de la condition présente; il faut mourir ou en être privé.

Aussi, quant Moïse demanda à Dieu cette claire connaissance, il lui fut répondu en ces termes qu'il ne pourrait l'avoir: « Aucun homme ne me verra et vivra (Ex. XXXIII, 20) ».

Voilà pourquoi saint Jean dit: « Personne n'a jamais vu Dieu (Jean, I, 18). » Saint Paul et Isaïe disent: « L'oeil ne l'a point vu, l'oreille ne l'a point entendu, et le coeur de l'homme ne l'a point pressenti. (Act. VII, 32). »

Tel est le motif pour lequel Moïse n'osait regarder le buisson ardent, où Dieu manifestait sa présence. Il savait que, malgré le profond sentiment de respect qui l'animait pour Dieu, son entendement était incapable de contempler Dieu comme il convenait.

Il est raconté d'Élie qu'étant au sommet de la montagne, il se couvrit le visage en présence de Dieu (III Rois, XIX, 13); cela signifie qu'il mettait son entendement dans les ténèbres, parce qu'il n'osait pas employer un moyen si bas pour contempler un objet si élevé. Il comprenait parfaitement que tout ce qu'il pouvait considérer ou comprendre était très éloigné et très différent de Dieu.

Il n'y a donc aucune connaissance ni conception surnaturelle qui puisse, dans notre condition mortelle, servir de moyen prochain pour cette haute union d'amour de l'âme avec Dieu. Tout ce que l'entendement peut connaître, tout ce que la volonté peut goûter, tout ce que l'imagination peut inventer, n'a, nous le répétons, de ressemblance ni de proportion avec Dieu.

C'est ce que le prophète Isaïe nous donne admirablement à entendre quand il nous dit: « A quoi avez-vous pu comparer Dieu? Quelle image ferez-vous qui lui ressemble? Est-ce que par hasard celui qui travaille le fer pourrait vous en fabriquer une image? Ou celui qui travaille l'or vous en faire une statue en or, ou celui qui travaille l'argent vous le représenter avec des lames d'argent ? (Is. XL, 18-19) «

Par l'ouvrier sur le fer, on désigne l'entendement dont l'office est de former les connaissances et de les dépouiller du fer des images représentatives et imaginatives. Par l'ouvrier sur l'or, on désigne la volonté dont le propre est de recevoir la figure et la forme des délices que lui cause son amour.

Par l'ouvrier sur l'argent, qui, avons-nous dit, est incapable de représenter Dieu avec les lames d'argent, on entend la mémoire et l'imagination, dont on peut dire à bon droit que leurs connaissances et leurs fictions sont semblables à des lames d'argent.

Tout cela revient à dire que ni l'entendement ne pourra avec ses connaissances comprendre quelque chose de semblable à Dieu, ni la volonté ne pourra goûter des délices et suavités comparables à celles de Dieu, ni la mémoire ne pourra mettre dans son imagination des connaissances et des images qui en approchent. Il est donc clair qu'aucune de ces connaissances ne saurait donner à l'entendement le moyen immédiat d'aller à Dieu.

Pour approcher de Dieu, il doit plutôt faire abnégation de ses lumières que chercher à s'en servir, se mettre dans l'obscurité et les ténèbres qu'ouvrir les yeux afin d'arriver au rayon divin.

Voilà pourquoi la contemplation, à l'aide de laquelle l'entendement reçoit la lumière divine, s'appelle théologie mystique, c'est-à-dire sagesse cachée de Dieu, parce qu'elle est cachée à l'entendement lui-même qui la reçoit. Saint Denys l'appelle rayon de ténèbres. Le prophète Baruch a dit d'elle: « Il n'est personne qui connaisse la route de la sagesse et qui puisse en découvrir les sentiers (Bar. III, 23). » Aussi l'entendement, pour s'unir à Dieu, doit se dépouiller de toutes les lumières qu'il peut acquérir par lui-même.

Aristote nous dit que les yeux des chauves-souris en présence du soleil sont complètement aveuglés; or il en est de même de notre entendement: quand il se trouve en présence de cette très haute lumière divine, il est complètement aveuglé; il ajoute même que plus les choses de Dieu sont élevées et lumineuses en elle- mêmes, plus elles sont inconnues et obscures pour nous. C'est là aussi ce que l'Apôtre assure quand il dit: Ce qu'il y a de plus élevé en Dieu est ce qui est moins connu des hommes.

Nous n'en finirions plus sur ce sujet, si nous voulions rapporter toutes les autorités et toutes les raisons par lesquelles on prouve clairement qu'il n'y a aucune chose créée, ni aucune pensée humaine, qui puisse aider l'entendement à s'élever jusqu'à ce haut Seigneur.

Il faut savoir, au contraire, que si l'entendement veut profiter de toutes les choses créées, ou de quelques-unes d'entre elles comme d'un moyen prochain à l'union divine, il y trouvera non seulement un obstacle pour gravir cette haute montagne, mais encore l'occasion de tomber dans une foule d'erreurs et d'illusions.

Méditons …

à suivre …Chapitre 8



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Message par Maud Ven 21 Avr - 7:20

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 8

Comment la Foi est pour l’ entendement le moyen propre et proportionné qui conduit l’âme à l’ Union divine de l’ Amour.

D'après ce qui précède, l'entendement doit, pour se préparer à l'union divine, être dégagé et purifié de tout ce qui peut lui venir par les sens, dépouillé de tout ce qu'il pourrait connaître clairement, placé dans un calme profond, exempt de toute activité naturelle, en un mot établi dans la foi. Elle seule est le moyen prochain et proportionné pour l'union de l'âme à Dieu, car la ressemblance qu'il y a entre elle et Dieu est si grande qu'il n'y a pas d'autre différence qu'entre voir Dieu et croire en Dieu.

Dieu est infini, elle nous le propose infini; Dieu est Trinité en personnes et Unité en nature, et c'est ainsi que la foi nous le propose.

Dieu est ténèbres pour notre entendement. La foi est le seul moyen par lequel Dieu se manifeste à l'âme dans cette divine lumière qui surpasse tout entendement.
Aussi plus une âme a de foi, plus elle est unie à Dieu.

Telle est la vérité qu'exprimait saint Paul dans le texte déjà cité: « Celui qui veut s'unir à Dieu doit commencer par croire qu'il est (Heb. XI, 6) », c'est-à-dire par cheminer vers lui par la foi. L'entendement doit donc être dans les ténèbres et l'obscurité, pour se conduire uniquement par la foi, car c'est à la faveur de ces ténèbres qu'il s'unit à Dieu, et c'est dans l'obscurité de la foi que Dieu se trouve caché.

David dit de même: « L'obscurité était sous ses pieds; il s'est élevé au-dessus des chérubins, et il a volé sur les ailes des vents. Il a pris les ténèbres pour sa retraite; autour de lui il a placé comme une tente l'eau ténébreuse des nuées du ciel (Ps. XVII, 10). »

Or cette obscurité qu'il a placée sous ses pieds, ces ténèbres qu'il a choisies pour retraite, cette nuée ténébreuse qui l'entoure comme une tente, tout cela indique l'obscurité de la foi où il se trouve renfermé. Quand on dit qu'il s'élève au-dessus des chérubins et qu'il vole sur les ailes des vents, on donne à entendre qu'il plane au-dessus de tout entendement.

Les chérubins, en effet, signifient les esprits qui voient et qui contemplent; les ailes des vents signifient les connaissances subtiles et élevées, ainsi que les conceptions des esprits.

Comme l'Être divin les domine toutes, il n'est aucune créature qui par elle-même puisse l'atteindre.

Nous avons une figure de cette vérité dans la sainte Écriture. Quand Salomon eut achevé de bâtir le Temple Dieu y descendit dans une nuée et remplit le lieu saint d'une telle obscurité que les enfants d'Israël ne pouvaient rien voir. Salomon dit alors: « Le Seigneur a promis de demeurer dans la nuée (I Rois VIII, 12). » C'est également au milieu de la nuée où il se dérobait que Dieu apparut à Moïse sur la montagne.

Toutes les fois que Dieu a fait des apparitions solennelles, il s'est montré dans la nuée, comme on le voit encore au livre de Job, qui nous raconte que Dieu lui parla au sein d'une nuée obscure (Job, XXXVIII, 1; XL, 1).

Ces ténèbres signifient toutes l'obscurité de la foi sous laquelle s'enveloppe la Divinité pour se communiquer à l'âme.

Cette obscurité cessera lorsque, comme dit saint Paul, sera achevé ce qui est imparfait, quand les ténèbres de la foi disparaîtront, et que viendra ce qui est parfait (I Cor. XIII, 10), c'est-à-dire la lumière de Dieu. Nous avons une image de cette vérité dans l'armée de Gédéon.

Tous les soldats portaient des torches enflammées à la main, et ils ne les voyaient pas parce qu'ils les tenaient cachées dans des vases; mais dès que les vases furent brisés, la lumière apparut.

Ainsi en est-il de la foi, dont ces vases sont la figure. Elle contient en elle-même la divine lumière, c'est-à-dire la vérité essentielle qui est Dieu; mais dès que le vase de la foi sera brisé au terme de cette vie mortelle, alors apparaîtra la lumière et la gloire de la Divinité qu'elle renferme en soi.

Il est donc clair que l'âme qui veut sur cette terre s'unir à Dieu et s'entretenir immédiatement avec lui doit nécessairement entrer dans ces ténèbres où Dieu avait promis à Salomon de demeurer; elle doit se tenir près de ce nuage ténébreux où il daigna révéler ses secrets à Job; elle doit porter dans ses mains les vases mystérieux de Gédéon.

Cela signifie qu'il faut agir à la lumière obscure de la foi, dans l'union à Dieu par amour, et quand le vase de cette vie qui recouvre la lumière de la foi sera brisé, on verra Dieu face à face dans la gloire.

Il me reste maintenant à parler en détail des diverses connaissances et conceptions que l'entendement peut acquérir ainsi que des obstacles et des dommages qu'elles peuvent engendrer dans ce chemin de la foi.

Nous dirons, en outre, comment l'âme doit se conduire alors pour que ces connaissances, qui viennent des sens ou de l'esprit, lui soient profitables et non nuisibles.

Méditons …

à suivre …. Chapitre 9


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Message par Maud Sam 22 Avr - 7:34

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 9

Où l’ on marque quelle distinction il y a  entre les diverses  conceptions et connaissances  de l’ entendement


Ayant à traiter en particulier du profit ou du dommage que les conceptions et connaissances de l'entendement peuvent causer à l'âme par rapport à la foi, qui est, comme nous l'avons dit, le moyen qui dispose à l'union divine, il est nécessaire d'établir ici quelle distinction il y a entre toutes ces connaissances naturelles et surnaturelles qu'il peut acquérir.

Nous en traiterons ensuite avec ordre et séparément, de façon à diriger l'entendement au milieu de cette obscurité et de cette nuit de la foi. Cette distinction va se faire avec brièveté.
Il faut savoir qu'il y a deux voies par lesquelles l'entendement reçoit ses connaissances et ses conceptions: l'une est naturelle, et l'autre surnaturelle.

La naturelle embrasse tout ce que l'entendement est capable de comprendre, soit par les sens du corps, soit par ses propres ressources.

La surnaturelle contient tout ce qu'il comprend au-dessus de sa capacité et aptitude naturelle; et ces connaissances surnaturelles sont ou corporelles ou spirituelles. Les corporelles sont de deux sortes: les unes lui viennent par la voie des sens corporels extérieurs, les autres par la voie des sens corporels intérieurs, avec tout ce que l'imagination peut saisir, imaginer et inventer. Les spirituelles sont aussi de deux sortes: les unes sont distinctes et particulières, les autres, confuses, obscures et générales.

Parmi les connaissances distinctes et particulières il y a quatre sortes de connaissances particulières qui se communiquent à l'esprit sans l'intermédiaire d'aucun sens corporel: ce sont les visions, les révélations, les paroles et les sentiments spirituels. La connaissance obscure et générale n'a qu'une seule espèce c'est la contemplation obtenue par la foi, et c'est en elle que nous devons placer l'âme, en l'y acheminant par toutes les autres connaissances.

Nous commencerons par lui parler des premières, et lui indiquerons comment elle doit s'en dégager.

Méditons …

à suivre …Chapitre 10


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Message par Maud Dim 23 Avr - 7:06

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 10

De l’obstacle et du dommage provenant des connaissances que l’ entendement reçoit surnaturellement par les sens corporels extérieurs de la conduite de l’ âme à leur égard.

Les premières connaissances dont nous avons parlé dans le chapitre précédent sont celles que l'entendement acquiert par la voie naturelle. Nous en avons déjà parlé au Livre premier, où se trouve tracée la route à suivre dans la nuit des sens; nous n'en dirons rien ici, puisque les enseignements donnés alors sur ce point pour diriger l'âme sont suffisants.

Dans le présent chapitre, nous parlerons seulement des connaissances et conceptions qui viennent surnaturellement par la voie des sens corporels extérieurs: la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût et le tact. Les personnes adonnées à la spiritualité peuvent avoir dans tous leurs sens et ont souvent des représentations qui leur viennent d'une manière surnaturelle. Ainsi la vue perçoit des figures et des personnages de l'autre vie, des saints, et des anges bons ou mauvais, certaines  lumières ou splendeurs extraordinaires. L'ouïe perçoit des paroles extraordinaires prononcées par des personnages qu'on voit ou par d'autres qu'on ne voit pas.

L'odorat perçoit parfois des parfums très suaves d'une façon sensible, sans qu'on en connaisse la provenance.

Le goût perçoit les saveurs les plus exquises, et le tact éprouve tant de jouissance en certaines circonstances que le bonheur semble pénétrer jusqu'à la moelle des os  rajeunir le corps et le plonger au milieu des délices. Cette faveur ressemble à l'autre qu'on appelle l'onction de l'esprit, qui vient, en effet, de l'esprit et se répand dans tous les membres des âmes pures. Cette suavité des sens est très ordinaire chez les personnes adonnées à la spiritualité, car elle provient de l'affection et de la dévotion sensible de l'esprit, mais elle est plus ou moins grande dans chaque âme.

Or il faut savoir que si tous ces effets qui peuvent se produire dans les sens corporels ont Dieu pour auteur, on ne doit jamais les regarder avec sécurité et les accepter; il faut plutôt les fuir complètement, sans même chercher à examiner s'ils procèdent du bon ou du mauvais principe. D'ailleurs, plus ils sont extérieurs et corporels, moins il est certain qu'ils viennent de Dieu. Il est plus naturel que Dieu se communique  à l'esprit, et c'est ce qu'il fait ordinairement. Cette voie est plus sûre et plus avantageuse pour l'âme que celle des sens, où il y a ordinairement beaucoup de dangers et d'illusions.

En effet, dans ces sortes de faveurs le sens corporel se fait juge et appréciateur des choses spirituelles, en s'imaginant qu'elles sont comme il les éprouve; et cependant il y a autant de différence entre les unes et les autres qu'entre le corps et l'âme, ou entre la sensualité et la raison. Le sens corporel est aussi ignorant des choses raisonnables, je veux dire spirituelles, que la bête de somme l'est des choses raisonnables; il l'est même davantage.

Il se trompe donc beaucoup celui qui estime ces sortes de faveurs, et il se met dans un très grand danger de tomber dans l'illusion; du moins il mettra en lui un empêchement absolu à devenir vraiment spirituel. Toutes ces faveurs corporelles dont nous avons parlé n'ont aucun rapport avec les choses spirituelles; voilà pourquoi il faut toujours craindre qu'elles ne viennent du démon plutôt que de Dieu. Le démon, en effet, a plus de prise sur la partie qui est extérieure et corporelle, et il lui est plus facile de tromper sur ce point que dans la partie plus intérieure.

J'ajoute que plus ces formes et ces manifestations corporelles sont extérieures, et moins elles profitent à l'âme et à l'esprit, à cause de la distance et de la disproportion énorme qu'il y a entre ce qui est corporel et ce qui est spirituel. Lors même  qu'elles produiraient quelque bon effet spirituel, comme cela arrive toujours quand elles ont Dieu pour auteur, cet effet cependant est toujours bien moindre que si ces mêmes manifestations étaient plus spirituelles et intérieures. Aussi, elles engendrent plus aisément l'occasion de tomber dans l'erreur, la présomption et la vanité.

Comme elles sont si palpables et si matérielles, elles émeuvent profondément les sens, et il semble à l'âme qu'elles sont d'autant plus précieuses qu'elles sont plus sensibles; elle les suit et abandonne le guide sûr de la foi: elle s'imagine que cette lumière est le guide et le moyen qui la fera parvenir au but désiré, à l'union divine; elle s'éloigne d'autant plus du moyen et de la lumière de la foi, qu'elle fait plus de cas de pareilles manifestations.

Il y a plus. Quand l'âme se voit l'objet de telles manifestations extraordinaires, elle en conçoit très souvent une certaine satisfaction d'elle-même et s'imagine être quelque chose devant Dieu.

Or cela est contre l'humilité. Le démon, en outre, sait très bien lui suggérer une secrète satisfaction d'elle-même, mais qui parfois est très manifeste: voilà pourquoi il produit parfois ces effets dans les sens; il montre à l'oeil des figures de saints et des splendeurs merveilleuses; il fait entendre à l'ouïe des paroles très flatteuses; il fait sentir des parfums très suaves; il flatte le palais de douceurs exquises, et le tact de grandes délices. Son but par là est de tromper les âmes et de les entraîner dans une foule de maux.

Ainsi faut-il toujours repousser ces représentations et ces communications sensibles. Supposé que quelques-une viennent de Dieu, on ne lui fait pas injure en les repoussant et en ne les voulant pas, et on ne manque pas pour cela de recevoir l'effet et le fruit que Dieu se proposait de produire dans l'âme par leur moyen. La raison est la suivante. La vision corporelle, ou la communication extraordinaire, affecte un sens quelconque, ou même les sens intérieurs.

Si ce phénomène vient de Dieu, il produit, à l'instant où il se manifeste et se sent, son premier effet dans l'esprit; l'âme n'a même pas le temps de délibérer pour le vouloir ou pour le rejeter. De même que Dieu produit ces phénomènes surnaturels sans que l'âme y ait apporté tant soit peu de concours ou d'aptitude, de même c'est sans aucune coopération de sa part qu'il produit l'effet qu'il a eu en vue par ce moyen.

C'est une chose qui s'accomplit et se réalise passivement dans l'esprit; il ne s'agit pas de vouloir ou non, pour que la chose soit ou ne soit pas. De même que si on jetait du feu sur quelqu'un dont le corps est nu, il lui servirait de rien de ne pas vouloir être brûlé; le feu aura forcément son effet. Ainsi en est-il des visions et des représentations qui viennent de Dieu: elles produisent leur effet premièrement et principalement dans l'âme avant de les produire dans le corps, alors même que l'âme ne les voudrait pas.

Ainsi encore les représentations qui viennent du démon, sans que l'âme y consente, produisent en elle le trouble et la sécheresse, la présomption et la vanité spirituelle, mais elles n'ont pas autant d'efficacité pour le mal que celles de Dieu pour le bien. Celles qui viennent du démon peuvent seulement susciter des premiers mouvements dans la volonté, mais non aller au-delà si elle résiste; l'inquiétude qu'elles apportent n'est pas de longue durée si par son peu de vigilance et de courage l'âme ne lui permet de durer davantage.

Quant aux manifestations qui viennent de Dieu, elles pénètrent intimement l'âme, elles inclinent la volonté à aimer, elles produisent leur effet; et voudrait-elle y résister, qu'elle ne le pourrait, pas plus que la vitre ne peut s'opposer au rayon du soleil qui l'illumine.

Voilà pourquoi l'âme ne doit jamais avoir la prétention de se complaire dans ces manifestations, alors même, je le répète, quelles viendraient de Dieu. Car si elle s'y complaît, il en résulte six inconvénients:

Tout d'abord, la perfection de la foi qui doit régir l'âme est amoindrie, et c'est déroger grandement à ses lois que d'adhérer aux manifestations extraordinaires qui se produisent dans les sens; comme nous l'avons dit, la foi est au-dessus de tous les sens. Voilà pourquoi l'âme qui ne ferme pas les yeux à tout ce qui lui vient par les sens s'éloigne du moyen qui la conduisait à l'union divine.

Secondement, ces communications sont un obstacle pour l'esprit si on ne les rejette pas, car l'âme s'y arrête et l'esprit ne prend pas son essor vers l'invisible. C'est là l'un des motifs pour lesquels Notre-Seigneur déclara à ses disciples qu'il leur convenait d'être privés de sa présence pour que le Saint-Esprit vînt en eux.

C'est pour cette raison également qu'i ne permit pas à Madeleine de toucher ses pieds après sa résurrection; il voulait l'affermir davantage dans la foi.

Troisièmement, l'âme apporte peu à peu un sentiment de propriété à ces communications; elle ne marche pas dans la voie du renoncement et du dénûment spirituel.

Quatrièmement, l'âme perd insensiblement l'effet spirituel que ces communications causent dans son intérieur; elle s'attache à ce qu'elles ont de sensible, à ce qu'il y a de moins important, et par conséquent, elle ne reçoit pas aussi abondamment qu'elle le pourrait l'effet spirituel qui est le but de ces communications, car cet effet se produit et se conserve d'autant plus que l'on renonce davantage aux choses sensibles qui sont si éloignées de ce qui est purement spirituel.

Cinquièmement, elle perd peu à peu les faveurs de Dieu, parce qu'elle y apporte l'esprit de propriété et n'en profite pas comme il faut. Or les recevoir avec esprit de propriété et ne pas les mettre à profit, c'est vouloir s'en rendre maître, tandis que Dieu ne les accorde pas pour qu'on les recherche; et jamais on ne doit croire qu'elles sont de Dieu. (Au lieu de mettre: nunca, jamais, les anciennes éditions mettaient facilmente: on ne doit pas croire facilement qu'elles viennent de Dieu. – Il est certain que le mot facilmente donne à la phrase un sens qui semble plus conforme à la doctrine générale du Saint et même à ce qu'il nous dit à la fin de ce chapitre.

Néanmoins le mot jamais peut très bien être entendu dans ce sens que l'âme par elle-même, par son jugement propre, ne doit jamais croire que ces faveurs sont de Dieu; ce qui ne l'empêchera pas d'en avoir la certitude morale après avoir consulté un directeur prudent et éclairé.)

Sixièmement. Quand l'âme recherche ces communications, elle ouvre la porte au démon, qui la trompera dans des communications semblables qu'il sait très bien simuler et travestir et faire paraître comme venant de Dieu. Car il peut, comme nous le dit l'Apôtre, se transfigurer en ange de lumière (II Cor. XI, 14).

Il convient donc à l'âme de les repousser les yeux fermés, sans examiner d'où elles proviennent. Sans cela elle se prêtera si bien à celles du démon et lui donnera à lui-même tant de prise que, loin de recevoir celles de Dieu, elle recevrait celles du démon, et celles-ci deviendraient si nombreuses que, celles de Dieu venant à cesser, tout ce qui se passerait alors ne serait que l'oeuvre du démon, sans que Dieu y fût pour rien. C'est ce qui est arrivé à beaucoup d'âmes imprudentes et ignorantes.

Elles se comportaient avec tant de sécurité au milieu de ces manifestations, qu'il a été très difficile de ramener un grand nombre d'elles à chercher Dieu dans la pureté de la foi. Beaucoup d'entre elles n'ont même pu être ramenées dans la bonne voie, car les illusions du démon avaient produit en elles de profondes racines.

Il est donc sage de fermer la porte à toutes ces manifestations et de les rejeter toutes (Les éditions précédentes, au lieu du mot negar, mettaient le mot temer: les craindre toutes). Si elles sont mauvaise, on repousse, par le fait même, les pièges du démon; si elles sont bonnes, on écarte les obstacles à la foi, et ainsi on recueille le fruit qu'elles doivent produire. De même que Dieu enlève peu à peu les bonnes parce qu'on s'y complaît, qu'on y apporte un esprit de propriété et qu'on n'en profite pas comme il le faudrait, de même le démon insinue les siennes et les multiplie, parce que l'âme lui en donne l'occasion et la facilité. Quand l'âme les rejette et y est opposée, le démon, voyant qu'il ne peut plus lui nuire, cesse peu à peu son action.

Dieu, au contraire, donne à l'âme humble et détachée de tout, des faveurs toujours plus nombreuses et plus élevées. Il la place et établit sur beaucoup de choses, comme le serviteur qui a été fidèle en de petites choses: Quia super pauca fuisti fidelis, super multa te constituam (Mat. XXV, 21).

Si l'âme est fidèle et détachée, le Seigneur ne s'arrêtera pas à de pareilles faveurs; il élèvera l'âme de degré en degré jusqu'à l'union divine, jusqu'à la transformation en lui. Il l'éprouve et l'élève peu à peu. Il lui donne tout d'abord des faveurs très extérieures et d'un ordre infime, sensible et conforme à son peu de perfection. Si elle se conduit comme elle le doit, si elle prend cette première nourriture avec sobriété, pour en retirer la force et la substance, il lui offrira un aliment plus abondant et plus exquis.

Si elle remporte la victoire sur le démon dans ce premier état, elle passera au second; si elle remporte encore la victoire dans le second, elle montera au troisième, et, avançant toujours, elle franchira les sept demeures, qui sont les sept degrés de l'amour, jusqu'à ce que l'Époux l'introduise dans le cellier où se trouve le vin de la charité parfaite.

Heureuse l'âme qui saura combattre cette bête de l'Apocalypse aux sept têtes qui sont opposées aux sept degrés de l'amour, en faisant la guerre à chacun d'eux et en luttant contre l'âme dans chacune des sept demeures où elle s'exerce à acquérir chaque degré d'amour de Dieu! A coup sûr, si elle est fidèle à combattre dans chacun de ces degrés et remporte la victoire, elle méritera de passer de degré en degré, ou d'une demeure à une autre, jusqu'à la dernière, après avoir coupé à la bête les sept têtes avec lesquelles elle lui livrait les plus furieux combats.

Saint Jean dit même qu'il lui a été permis de faire la guerre aux Saints (Apoc. XIII, 7), et de pouvoir les vaincre dans chacun des sept degrés d'amour, en y mettant toutes les armes et munitions nécessaires.

Il est donc très fâcheux de voir un grand nombre de personnes qui, après avoir commencé le combat de la vie spirituelle contre la bête, ne sont pas encore capables de lui trancher la première tête par le renoncement à toutes les choses sensuelles du monde. Il est très fâcheux encore de constater que quelques-uns, après avoir pratiqué ce renoncement et coupé à la bête la première tête, ne lui coupent pas la seconde, en renonçant aux visions sensibles dont nous nous occupons actuellement.

Ce qui est plus triste encore, c'est que quelques-uns, après avoir réussi à couper à la bête non seulement la première et la seconde tête, mais même la troisième, en mortifiant leurs sens intérieurs, après avoir dépassé l'état de simple méditation et être parvenus plus loin encore, se laissent, au moment où ils allaient entrer dans la pureté de l'esprit, vaincre par la bête qui se relève de nouveau contre eux, recouvre toutes ses têtes jusqu'à la première et rend leur état pire qu'il n'était avant leur chute, car la bête prend alors avec elle sept autres esprits plus mauvais encore.

L'homme spirituel doit donc repousser toutes ces représentations et ces jouissances corporelles qui ont lieu dans les sens extérieurs, s'il veut trancher la première et la seconde tête de la bête; il entrera dans la première et la seconde demeure de l'amour par une foi vive; il ne se préoccupera et ne s'embarrassera pas de ce qui est accordé aux sens, car c'est là ce qui déroge le plus à la foi.

Il est donc clair que ces visions et représentations sensibles ne sauraient être  un moyen pour parvenir à l'union divine. Elles n'ont aucune proportion avec Dieu; et c'est là une des raisons pour lesquelles Notre-Seigneur Jésus-Christ ne voulait pas être touché par Madeleine et l'apôtre saint Thomas. Aussi le démon est-il très satisfait quand il rencontre une âme qui désire des révélations ou s'y porte. Il a alors une occasion facile de lui suggérer ses erreurs et de la détourner de la foi autant qu'il le pourra.

Car, ainsi que je l'ai dit, cette âme qui désire les révélations se met dans une disposition très contraire à la foi et s'attire beaucoup de tentations et de dangers.

Si je me suis étendu quelque peu sur ces visions extérieures, c'est dans le but de donner quelque lumière sur les autres manifestations dont nous allons nous occuper maintenant. Il y aurait tant à dire sur ce point, que je n'en finirais plus. Et c'est vraiment en dire trop peu, à mon avis, que de se contenter seulement d'ajouter qu'il faut bien veiller à ne jamais admettre ces communications, si ce n'est dans quelques cas, fort rares d'ailleurs, après les avoir soumises à l'examen d'un homme qui se recommande par la doctrine, la piété et l'expérience.

Or même dans ce cas, il ne faut jamais les désirer.

Méditons …

A suivre …Chapitre 11



Eucharistie Colombe


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*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Signat12

* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
 *

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Message par Maud Lun 24 Avr - 10:55

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_37

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 11

Où l’on traite des visions imaginaires et naturelles .
On dit qu’elles sont et l’ on prouve comment elles ne peuvent  être un moyen convenable pour parvenir à l’ Union divine .
On montre enfin les dommages qu’il y a à ne pas savoir s’en dégager à temps



Avant de parler des visions imaginaires qui ont coutume de se présenter surnaturellement aux ses intérieurs, qui sont l'imagination et la fantaisie, il convient, pour procéder avec ordre, de parler ici des perceptions naturelles de ce même sens intérieur corporel. Nous procéderons ainsi du moins au plus, de ce qui est plus extérieur à ce qui est plus intérieur, et nous arriverons ainsi jusqu'au recueillement intime où l'âme s'unit à Dieu.

Nous avons parlé du détachement de l'âme par rapport aux communications naturelles des objets extérieurs et par conséquent des forces naturelles de nos tendances: tel a été l'objet du premier livre, où nous avons traité de la Nuit des sens. Aussitôt après, nous avons commencé à parler en particulier du détachement de l'âme par rapport aux communications extérieures surnaturelles, qui se produisent dans les sens extérieurs, comme nous venons de le voir dans le chapitre précédent; notre but dans ce second livre est d'introduire l'âme dans la nuit de l'esprit.

Or l'objet qui se présente à nous tout d'abord, c'est le sens intérieur corporel, c'est-à-dire l'imagination et la fantaisie. Nous devons également dépouiller ce sens de toutes les formes et conceptions imaginaires qu'il peut naturellement avoir; nous devons prouver, en outre, comment il est impossible à l'âme d'arriver à l'union divine tant qu'elle ne cessera pas d'agir d'après ces connaissances, car elles ne peuvent lui servir de moyen proportionné et immédiat pour l'amener à l'union.

Il faut donc savoir que les sens dont nous nous occupons ici en particulier sont les deux sens corporels intérieurs, qu'on appelle l'imagination et la fantaisie. Ils sont ordonnés l'un à l'autre et se prêtent un mutuel concours.

L'un produit une sorte de raisonnement imparfait, l'autre forme l'image conforme à l'objet représenté. Mais pour le but que nous nous proposons, parler de l'un c'est parler de l'autre. Aussi, quand nous ne les nommerons pas en particulier, il est convenu que ce que nous dirons de l'un s'entend aussi de l'autre, et que nous parlons indifféremment des deux.

Cela posé, nous disons que tout ce que les sens peuvent recevoir ou fabriquer s'appelle imagination ou fantaisie; ce sont des formes qui, sous l'image ou la figure d'un corps, se représentent aux sens. Ces formes peuvent être de deux sortes.

Les unes sont surnaturelles; elles n'ont pas besoin du concours des sens pour être représentées et sont représentées en eux passivement; nous les appelons visions imaginaires qui viennent par la voie surnaturelle, nous en parlerons plus tard. Les autres sont naturelles; ce sont celles que les sens peuvent produire à l'aide de leur activité personnelle par des formes, figures ou images.

C'est à ces deux puissances que se réfère la méditation, qui est un acte discursif aidé par les images, formes et figures qui sont fabriquées et formées dans les sens. Il en est ainsi quand nous nous représentons Notre-Seigneur Jésus-Christ crucifié, attaché à la colonne ou souffrant dans une autre scène de sa Passion, quand nous considérons Dieu assis sur son trône et environné d'une grande majesté, ou encore quand nous nous imaginons la gloire du ciel comme une lumière incomparable, ou quoi que ce soit d'humain ou de divin.


Or l'âme doit rejeter toutes ces imaginations ou représentations et demeurer dans l'obscurité par rapport à ce sens intérieur si elle veut parvenir à l'union divine.

Elle n'ont en effet aucune proportion, aucun rapport immédiat avec Dieu, et n'ont pas plus de puissance que les représentations corporelles qui proviennent des cinq sens extérieurs. La raison, la voici: l'imagination ne peut rien produire ou représenter en dehors de ce que les sens extérieurs, par exemple la vue, l'ouïe..., ont expérimenté.

Tout au plus peut-elle former une ressemblance des choses vues, entendues ou senties, et encore cette ressemblance ne s'élève pas à une entité plus grande et plus importante que celle reçue par les sens. On a beau, en effet, imaginer des palais de diamants ou des montagnes d'or, parce que l'on aura vu de l'or et des diamants, tout cela est en réalité inférieur à l'essence d'un peu d'or et de diamant, malgré la quantité et la splendeur de la chose imaginée.

Et comme toutes les choses créées, ainsi que nous l'avons dit, ne peuvent avoir la moindre proportion avec l'être de Dieu, il s'ensuit que toutes les images qu'on en formera ne peuvent servir de moyen proche à l'union divine; nous le répétons, elles seraient plutôt un obstacle.

Ceux donc qui se représentent Dieu sous quelqu'une de ces images, ou celle d'un feu dévorant, d'une lumière éclatante ou de quelque autre forme, et qui croient par là acquérir quelque ressemblance avec lui, s'en éloignent au contraire beaucoup. Sans doute les commençants ont besoin de ces considérations, de ces représentations, et de ces sortes de méditations pour enflammer peu à peu leur amour et donner à l'âme un aliment par le moyen des sens, comme nous le dirons dans la suite.

Elles leur servent donc comme d'un moyen éloigné de s'unir à Dieu; c'est par là que passent d'ordinaire les âmes pour arriver au terme et à la demeure du repos spirituel. Mais elles doivent se contenter d'y passer et veiller à ne pas s'y fixer, parce qu'alors elles n'arriveraient jamais au terme qui n'a aucun rapport avec ces moyens éloignés et n'a rien à voir avec eux.

Ces moyens sont comme les degrés de l'escalier: ils n'ont rien qui ressemble au terme, à la demeure qui est au sommet; ils ne sont que des moyens pour y monter; si celui qui monte ne les laisse pas derrière lui, les uns après les autres jusqu'au dernier, il n'arrivera pas, il ne parviendra pas à cette demeure où il n'y a plus à monter et où tout est paisible. De même, l'âme qui, dès cette vie veut parvenir à l'union avec Celui qui est notre repos souverain et notre Bien suprême, doit passer par tous les degrés des considérations, des représentations et des connaissances, et s'en défaire, car elles n'ont aucune ressemblance ou proportion avec le terme avec lequel elles conduisent, c'est-à-dire avec Dieu.

Aussi saint Paul dit-il dans les Actes des Apôtres

« Non debemus aestimare auro, aut argento, aut lapidi sculputurae artis, et cogitationis hominis, Divinum esse similie: Nous ne devons pas penser que l'Être divin est semblable à l'or, à l'argent ou à la pierre précieuse bien travaillée, ou à l'imagination de l'homme (Act. XVII, 2). »

Voilà pourquoi beaucoup de personnes qui sont adonnées à la spiritualité se trompent étrangement.

Elles se sont exercées à s'approcher de Dieu par le moyen des images, des représentations et des méditations, comme il convient à des commençants; or Dieu veut les appeler à des biens plus élevés qui sont intérieurs et invisibles; dans ce but, il les prive du goût et de la saveur qu'elles trouvaient dans la méditation discursive; et elles n'en finissent plus; elles n'ont ni courage ni savoir-faire pour se dégager de ces manières grossières et palpables auxquelles elles sont habituées; elles travaillent même à les conserver; elles veulent comme précédemment se servir encore des considérations et de la méditation, et s'imaginent qu'il en doit être toujours ainsi.

Cette méthode leur donne beaucoup de peine, mais leur procure très peu de suavité et même ne leur en procure aucune; par là, au contraire, elles augmentent d'autant plus la sécheresse, la fatigue et l'inquiétude, qu'elles recherchent davantage la suavité première qu'il n'y a plus espoir de recouvrer.

Comme nous l'avons dit, l'âme ne goûte plus cette nourriture si sensible; il lui en faut une autre plus délicate, plus intérieure, moins sensible, qui ne consiste plus dans le travail de l'imagination mais dans le repos et la quiétude, et cette nourriture est plus spirituelle. Plus l'âme, en effet, se spiritualise, plus elle diminue les actes particuliers de ses puissances. Elle se concentre dans un seul acte général et pur, et alors ses puissances abandonnent la voie qui l'avait amenée à cet état.

C'est ainsi que cessent de marcher et s'arrêtent les pieds à la fin de la course; car si le voyageur devait toujours marcher, il n'arriverait jamais. Si tout n'était que moyen, où et quand jouirait-on de la fin et du terme?

C'est donc une chose digne de pitié d'en voir un grand nombre qui, voulant le repos et le calme de la quiétude intérieure pour y goûter la paix et s'y nourrir de Dieu, troublent leur âme, la ramènent dehors à ce qui est plus extérieur, l'obligent à recommencer sans motif le chemin déjà parcouru, quittent ce but, ce terme où elle se reposait déjà, et reprennent le chemin des considérations qui l'y avaient amenée.

Ce n'est pas sans dégoût et sans répugnance qu'elle s'y résigne. Elle préférerait rester dans cette paix inexprimable comme dans son centre; et elle gémit comme cet homme qui, à force de travail, est parvenu au lieu de son repos et qu'on oblige à reprendre le travail.

Malheureusement ces personnes ne comprennent pas le mystère de cette nouveauté; elles s'imaginent qu'elles sont dans l'oisiveté et qu'elles ne font rien; elles ne consentent pas à laisser leur âme tranquille, elles s'efforcent de la conduire toujours dans la voie des considérations et de la méditation discursive.

Elles ne font que tomber dans une sécheresse plus grande, et c'est en vain qu'elles s'efforcent de trouver de la suavité dans un aliment qui n'en a plus pour elles. On peut bien leur appliquer le proverbe: Plus il gèle, plus l'on souffre du froid.

Plus elles persévèrent dans cette conduite, et plus leur état empire, parce qu'elles sortent leur âme de la paix de l'esprit; elles laissent le plus pour le moins; elles recommencent le chemin déjà parcouru et veulent refaire ce qui était déjà fait.

A ces personnes il faut dire qu'elles apprennent à garder la quiétude de l'esprit dans une considération et contemplation pleine d'amour pour Dieu, et à ne se préoccuper ni de leur imagination ni de ce qu'elle fait. C'est ici, nous le répétons, que les puissances de l'âme sont dans le repos; elles n'agissent pas; si parfois elles montrent quelque activité, ce n'est pas avec effort, ni à l'aide de discours préparés, mais avec la suavité de l'amour et sous l'impulsion de Dieu plutôt que de leur propre habileté, comme nous le verrons plus loin.

Pour le moment, ce que nous avons dit suffit pour montrer comment il convient et comment il est nécessaire à ceux qui veulent progresser, de savoir se détacher à temps de toutes ces méthodes, sortes d'oraison ou représentations imaginaires, et lorsque le demande et le requiert le progrès de l'état où ils se trouvent.

Afin que l'on comprenne l'époque, le moment opportun, nous donnerons quelques signes; l'homme adonné à la spiritualité qui les découvrira en soi comprendra que le moment et l'heure ont sonné où il peut librement se servir du moyen indiqué et cesser de marcher par la voie du raisonnement et du travail de l'imagination. (Les anciennes éditions commençaient ici le chapitre XIII. Le P. Silverio fait de même).

Pour que cette doctrine ne reste pas confuse, il convient de montrer à quel temps, à quelle époque, l'homme, adonné à la spiritualité, doit abandonner l'oraison discursive qu'il fait au moyen des représentations, images, formes et figures dont nous avons parlé; car il ne doit les abandonner ni plus tôt, ni plus tard que ne le demandent les dispositions de son âme. S'il convient de les quitter à temps pour qu'elles n'empêchent pas l'âme d'aller à Dieu, il est également nécessaire de ne pas abandonner avant le temps la méditation imaginaire, sous peine de retourner en arrière.

Sans doute, les opérations de ces puissances ne sont pas un moyen proche d'union à Dieu pour ceux qui sont déjà avancés, elles servent cependant aux commençants de moyens éloignés pour disposer et préparer leur esprit par les sens aux choses spirituelles; elles servent également à écarter en passant toutes les autres formes ou images grossières, matérielles, mondaines, naturelles.

Nous donnerons donc ici quelques signes ou marques que l'homme adonné à la spiritualité doit découvrir en soi pour juger s'il convient ou non de laisser ces formes à un moment donné.
Les signes que l'homme adonné à la spiritualité doit découvrir en soi pour abandonner la méditation discursive sont au nombre de trois.

Premier signe. L'âme découvre qu'il lui est désormais impossible de méditer et de se servir de l'imagination; elle n'y puise aucun goût comme précédemment. Elle trouve, au contraire, de la sécheresse dans ce qui auparavant captivait habituellement ses sens et lui procurait de la suavité. Mais tant qu'elle y trouvera du goût et qu'elle pourra se servir de la méditation discursive, elle ne doit pas s'en éloigner, et elle y restera jusqu'à ce que son âme soit placée dans la paix et la quiétude dont nous parlerons quand il sera question du troisième signe.
Second signe.

L'âme n'éprouve aucune envie d'appliquer son imagination et ses sens à d'autres objets particuliers, soit extérieurs, soit intérieurs. Je ne dis pas qu'elle doive constater alors que son imagination ne va plus ici ou là, car cette faculté a coutume d'être vagabonde, même quand l'âme jouit d'un profond recueillement; mais je dis qu'il s'agit du moment où l'âme n'a plus envie d'appliquer à dessein son imagination sur ces objets.

Troisième signe. Ce troisième signe est le plus certain. L'âme se plaît à se trouver seule avec Dieu, à le regarder avec amour sans s'occuper d'aucune considération particulière; elle jouit de la paix intérieure, du calme, et du repos; elle ne produit aucun acte des puissances ni de la mémoire, ni de l'intelligence, ni de la volonté; je parle d'actes au moins raisonnés qui passent d'une idée à une autre; elle a seulement cette connaissance ou attention générale et amoureuse dont nous avons parlé, mais sans avoir l'intelligence particulière d'un autre objet.


L'âme adonnée à la spiritualité doit reconnaître en elle au moins ces trois signes réunis pour se décider en toute sécurité à abandonner l'état de méditation discursive et sensitive et entrer dans celui de contemplation et de pur esprit. Il ne lui suffit pas d'avoir le premier seul, sans le second.

Car il pourrait se faire que l'impuissance de se représenter et de méditer les choses de Dieu comme précédemment vînt de ses distractions ou de son peu de recueillement. Il faut donc qu'elle découvre en elle le second signe, c'est-à-dire qu'elle n'éprouve aucune envie, aucun désir de s'occuper d'autres choses étrangères: quand, en effet, l'impuissance de fixer l'imagination et les sens dans les choses de Dieu procède de la distraction ou de la tiédeur, l'âme éprouve aussitôt le désir et l'envie de s'occuper d'autres choses différentes, et trouve des prétextes pour abandonner l'oraison.

Il ne suffit pas, non plus, de découvrir en soi le premier et le second signe, il faut avoir simultanément le troisième. Si, en effet, l'âme constate qu'elle ne peut discourir sur les choses de Dieu ni y penser et que, de plus, elle n'a pas envie de s'occuper de choses différentes, cet état pourrait procéder de la mélancolie ou de quelque autre humeur provenant de la tête ou du coeur; cette humeur, en effet, cause ordinairement dans nos sens une sorte d'enivrement ou suspension des facultés, de telle sorte que l'on ne pense à rien; on ne songe qu'à goûter les charmes de cet assoupissement.

Pour se prémunir de pareille illusion, l'âme doit constater qu'elle possède le troisième signe, qui consiste dans la connaissance et l'attention amoureuse de Dieu qui, comme nous l'avons dit, lui communiquent la paix.

Il est vrai que, dans les commencements de cet état, on ne s'aperçoit presque pas de cette connaissance amoureuse, et cela pour deux raisons: la première, parce que, dans les débuts, cette connaissance amoureuse est ordinairement très subtile et délicate et presque insensible; la seconde, parce que l'âme, ayant été habituée à l'autre exercice, celui de la méditation qui est totalement sensible, ne comprend pas ou presque pas cette connaissance insensible, nouvelle pour elle et purement spirituelle.

Cela lui arrive surtout lorsque, par suite de cette ignorance, elle ne garde pas le repos et s'efforce de continuer son premier état qui était plus sensible; aussi, bien qu'elle se trouve dans une paix intérieure pleine d'amour, plus abondante, elle n'arrive pas à s'en rendre compte et à en jouir.

Toutefois, plus elle s'habituera à se tenir dans le calme, plus aussi elle le sentira et plus elle goûtera cette connaissance générale et amoureuse de Dieu; elle s'y plaira plus que dans toutes les choses créées, parce qu'elle y trouvera la paix et le repos, la saveur et les délices, sans qu'il lui en coûte de fatigue.

Pour donner plus de clarté à cette pensée, nous en exposerons au chapitre suivant les causes ou les motifs, et nous verrons ainsi que les trois signes dont nous avons parlé sont nécessaires pour passer à l'état de contemplation surnaturelle.

Méditons …

à suivre …Chapitre 12



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Message par Maud Mar 25 Avr - 7:32

*** Livre de St Jean de la Croix : " La Montée du Carmel  " *** Saint_38

La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 12

On prouve la convenance des signes dont il a été question , et on montre la nécessité pour l’ âme de les constater en elle-même pour monter plus haut

Il faut savoir, au sujet du premier signe dont nous avons parlé, que l'âme adonnée à la spiritualité qui doit entrer dans la voie de l'esprit, c'est-à-dire la contemplation, doit abandonner la voie imaginaire ou de méditation sensible, lorsqu'elle n'y trouve plus aucun goût et qu'elle est dans l'impossibilité de discourir. Il y a à cela deux raisons, qui n'en forment pour ainsi dire qu'une seule.

La première, c'est que l'âme a déjà reçu d'une certaine manière tout le bien spirituel qu'elle devait trouver dans les choses de Dieu par la voie de la méditation et du raisonnement.

La marque consiste en ce qu'elle ne peut plus comme précédemment ni méditer, ni faire de raisonnement, ni y trouver du goût ou de la suavité; car elle n'était pas encore arrivée jusqu'alors à l'esprit qu'il y avait là pour elle. D'ordinaire, en effet, chaque fois que l'âme reçoit quelque nouveau bien spirituel, elle le goûte au moins spirituellement et dans le moyen qui le lui communique et lui est utile; sans cela, ce serait une merveille qu'il lui fût de quelque utilité. Elle ne trouve pas dans sa cause cet attrait et cette saveur qu'elle éprouve lorsqu'elle le reçoit. Et alors se vérifie l'axiome des philosophes: Quod sapit, nutrit: ce qui a de la saveur fortifie et donne de l'embonpoint.

Aussi Job a-t-il dit: Numquid... poterit comedi insulsum, quod non est sale conditum? « Est-ce que l'on peut manger ce qui est fade et nullement assaisonné de sel? (Job, VI, 6) ».
Telle est la cause pour laquelle l'âme ne peut plus méditer ni discourir comme précédemment: le peu de goût que l'esprit y trouve et le peu de fruit qu'il en tire.

Le second motif vient de ce que l'âme possède déjà l'esprit de la méditation substantiellement et habituellement. Il faut savoir que la fin de la méditation et du discours dans les choses de Dieu est d'arriver à quelque connaissance et amour de Dieu; or chaque fois que l'âme produit ce fruit par la méditation, elle accomplit un acte, et de même que, dans tous les genres la multiplicité des actes finit par engendrer dans l'âme l'habitude, de même les actes multipliés de ces connaissances pleines d'amour de Dieu que l'âme a produits arrivent à en former l'habitude.

Dieu a coutume, de son côté, de produire ce résultat en beaucoup d'âmes, sans l'intermédiaire de ces actes, ou du moins d'un grand nombre d'entre eux; il les met tout de suite dans la contemplation et dans l'amour.

Ainsi ce que précédemment l'âme obtenait parfois à l'aide de la méditation sur des connaissances particulières est, comme nous l'avons dit, devenu par l'usage une habitude et s'est changé en une connaissance amoureuse de Dieu qui est générale, sans rien de distinct ni de particulier comme avant. Aussi, dès que l'âme se met en oraison, elle ressemble à celui qui a l'eau à sa portée; il se désaltère avec plaisir sans qu'il lui en coûte le moindre travail et qu'il soit nécessaire d'amener l'eau spirituelle par les moyens précédents, c'est-à-dire les raisonnements, les représentations et les images. Dès qu'elle se met en présence de Dieu, elle possède la connaissance de Dieu confuse, amoureuse, pleine de paix et de calme, et boit les eaux de la sagesse, de l'amour et de la suavité.

Voilà pourquoi elle éprouve beaucoup de peine et de répugnance lorsqu'on veut que, dans cet état de paix, elle s'applique à la méditation et aux connaissances particulières. Il lui arrive comme à l'enfant que l'on force à abandonner le sein où il prend le lait qui y est déjà amené, pour l'obliger à l'y attirer par la pression et le mouvement des mains. Il ressemble encore à celui qui, goûtant d'un fruit après en avoir ôté l'écorce, se voit obligé de le laisser pour recommencer à lui enlever la même écorce, qui n'existe plus; et ainsi il ne pourrait plus savourer le fruit qu'il avait en main. Ne serait-il pas semblable à celui qui abandonne la proie qu'il possède, pour courir après celle qu'il ne possède pas?

Telle est la conduite d'un grand nombre d'âmes qui commencent à entrer dans cet état. Elles s'imaginent que toute leur occupation doit consister à raisonner et à se représenter quelques particularités des choses de Dieu par des figures et des images, quand c'est là l'écorce de la vie spirituelle. Elles n'y trouvent point cette quiétude pleine d'amour substantielle à laquelle elles aspirent; elles ne comprennent rien à ce qui se passe; elles se croient perdues et se figurent perdre le temps; et alors elles recherchent de nouveau l'écorce de la vie spirituelle, c'est-à-dire les raisonnements; mais elles ne la trouvent plus, parce que cette écorce a disparu; et ainsi elles ne jouissent point du fruit en lui-même de la contemplation, ni même de son écorce qui est la méditation.

Alors elles se troublent à la pensée qu'elles vont à reculons et qu'elles se perdent. Et, en vérité, elles se perdent, mais ce n'est pas de la manière qu'elles pensent.

Elles se perdent en effet, par rapport à leurs propres sens et à leur première manière de sentir et de comprendre les choses; car par là elles gagnent le fruit spirituel qu'on est en train de leur donner; et moins elles comprennent ce qui se passe, plus elles entrent dans la nuit de l'esprit dont il est question dans ce livre et par laquelle elles doivent passer pour s'unir à Dieu, qui surpasse toute connaissance.

Il y a peu à dire du second signe. On voit avec évidence qu'il est impossible à l'âme de goûter alors les imaginations étrangères et mondaines, dès lors qu'elle ne goûte pas les choses de Dieu qui sont plus conformes à son état, et cela pour les motifs dont nous avons parlé. Toutefois, ainsi que nous l'avons dit, l'imagination a coutume, au milieu de ce recueillement, d'aller et de venir, elle se laisse à sa mobilité naturelle, sans que l'âme s'y plaise ou y consente; elle en éprouve plutôt de la peine en se voyant troublée dans sa paix et sa tranquillité.

Il convient et il est nécessaire, pour pouvoir abandonner la méditation, d'avoir le troisième signe dont nous avons parlé et qui consiste dans une connaissance et vue générale ou amoureuse de Dieu. Toutefois il ne semble pas nécessaire d'insister ici, dès lors que nous en avons déjà parlé un peu à l'occasion du premier signe, et que nous en traiterons expressément lorsqu'il sera question de cette connaissance générale et confuse, c'est-à-dire après que nous aurons achevé tout ce qui concerne les conceptions particulières de l'entendement.

Pour le moment, nous donnerons une seule raison qui montre avec évidence comment le contemplatif doit, dans le cas où il lui faut abandonner la voie de la méditation et du raisonnement, avoir nécessairement cette connaissance ou vue amoureuse de Dieu d'une façon générale; car si l'âme n'avait pas alors cette connaissance et cette présence de Dieu, il s'ensuivrait qu'elle ne ferait rien et qu'elle n'aurait rien: et, en effet, après avoir abandonné la méditation qui l'aide à discourir par ses puissances sensitives, s'il lui manque aussi la contemplation, ou connaissance générale dont nous avons parlé et où elle tient en activité ses puissances spirituelles, la mémoire, l'entendement et la volonté, qui sont déjà unies dans cette connaissance toute faite et possédée, elle serait nécessairement privée de tout exercice par rapport à Dieu; car l'âme ne peut agir, ni recevoir, ni conserver ce qu'elle a acquis, si ce n'est par la voie de ces deux puissances sensitives et spirituelles.

Par le moyen des puissances sensitives, nous l'avons vu, elle peut discourir, chercher, acquérir la connaissance des choses; par le moyen des puissances spirituelles elle peut se réjouir dans l'objet de ces connaissances déjà reçues, sans que ses puissances exercent encore leur travail, leur recherche, ou leur raisonnement.

Ainsi donc, la différence qu'il y a entre l'exercice des puissances dans l'un  et l'autre état, est celle qui existe entre travailler à une oeuvre et jouir de l'oeuvre faite, ou encore entre recevoir et profiter de ce que l'on a reçu, ou entre se fatiguer à suivre un chemin et se reposer au terme de ce chemin, ou, si l'on veut, entre préparer un mets et manger et savourer le mets déjà préparé et mastiqué.

Si l'âme n'est nullement occupée sous aucun de ces deux rapports, si elle n'agit pas à l'aide de ses puissances sensitives dans la méditation ou le raisonnement, ou à l'aide de ses puissances spirituelles dans la contemplation et connaissance simple dont nous avons parlé et dans laquelle elle jouit d'un bien reçu et acquis, en un mot, si elle ne se sert nullement de ses puissances, on ne voit pas où ni comment on pourrait dire qu'elle est occupée. Il est donc nécessaire pour elle de posséder cette connaissance générale avant d'abandonner la voie de méditation ou de raisonnement.

Il faut savoir ici que cette connaissance générale dont nous parlons est parfois très subtile et très délicate, surtout quand elle est plus pure, plus simple, plus parfaite, plus spirituelle, plus intérieure; aussi l'âme, tout en s'en occupant, ne la voit pas et ne la sent pas. Cela arrive surtout, nous le répétons, quand cette connaissance est en soi plus lumineuse, plus pure, plus simple et plus parfaite; et elle l'est d'autant plus que l'âme qui la reçoit est plus pure et plus dégagée des autres notions et connaissances particulières où pouvaient avoir prise l'entendement et le sens.

Aussi l'âme manquant des connaissances qui sont fournies par l'entendement et le sens selon leur capacité habituelle, ne les sent plus; elle n'a plus sa sensibilité accoutumée.

C'est là le motif pour lequel, bien que cette connaissance soit plus pure, plus simple, plus parfaite, elle est moins sentie de l'entendement et lui paraît plus obscure. Au contraire, quand elle se trouve dans un entendement moins pur et moins simple, elle lui paraît plus claire et plus importante; parce qu'elle est alors investie, mélangée, enveloppée de quelques formes intelligibles, il est plus facile à l'entendement et aux sens de s'y arrêter.

Une comparaison fera mieux comprendre cette pensée. Voici un rayon de soleil qui entre par la fenêtre d'un appartement; or plus ce rayon est rempli d'atomes et de grains de poussières, plus aussi il est palpable, sensible et perceptible au sens de la vue. Mais il est évident que ce rayon est aussi moins pur, moins lumineux, moins simple, moins parfait, dès lors qu'il est rempli de tant de grains de poussière et d'atomes.

Nous voyons, en outre, que plus le rayon est pur et dégagé de cette poussière et de ces atomes, moins il est palpable, et plus il paraît obscur à l'oeil matériel; plus il est pur, et plus il paraît obscur et insaisissable. Si ce rayon était complètement pur et dégagé de tous ces atomes et de toute cette poussière même la plus subtile, il serait alors tout à fait obscur et imperceptible pour l'oeil, qui n'y trouverait plus rien des objets visibles; l'oeil n'aurait plus d'objets visibles où s'arrêter, parce que la lumière n'est pas l'objet de la vue, mais un moyen de voir l'objet visible.

Aussi, quand il n'y a point d'objets sur lesquels la lumière ou le rayon puissent se refléter, on ne voit ni cette lumière, ni ce rayon.

Si un rayon, par exemple, entre par une fenêtre et sort par l'autre sans rencontrer quelque objet qui fasse corps, il semble bien qu'on ne verra rien. Et cependant le rayon serait en soi plus pur et plus limpide que quand il est tout enveloppé d'atomes visibles et qu'il se voit et se fait sentir plus lumineux.

Ainsi en est-il de la lumière spirituelle par rapport à l'entendement, qui est la vue de l'âme. Cette connaissance générale, cette lumière surnaturelle dont nous parlons, se communique avec tant de pureté et de simplicité, et dans un dégagement et éloignement si complet de toutes formes intelligibles qui sont les objets propres de l'entendement, que l'entendement ne la sent pas, ne la voit pas.

Parfois même, au contraire, quand cette connaissance est plus pure, elle aveugle l'entendement, parce qu'elle le prive de ses lumières habituelles, de ses représentations ou images, et alors il se rend bien compte des ténèbres où il se trouve.

Mais quand cette lumière divine ne se communique pas à l'âme avec tant de force, elle ne sent pas les ténèbres, elle ne voit pas la lumière; elle ne perçoit rien de ses connaissances d'ici-bas et de là-haut ;(Les anciennes éditions donnaient à cette phrase un sens tout différent: « Tambien esta divina luz embiste con tanta fuerza en el alma...

Quand cette divine lumière se communique à l'âme avec beaucoup de force. » Le texte nouveau dit: « no embiste: Quand cette divine lumière ne se communique pas avec tant de force. »

Ce texte, conforme aux manuscrits, est d'ailleurs en rapport parfait avec la doctrine de l'auteur. –

Le P. Silverio donne également ce texte: no embiste.) aussi elle se trouve parfois comme dans un oubli si profond qu'elle ne sait ensuite ni où elle était, ni ce qu'elle a fait: la notion du temps semble avoir disparu pour elle. Il peut donc arriver et il arrive que l'âme passe de longues heures dans cet oubli et, quand elle revient à elle-même, il lui semble que cet oubli n'a duré qu'un moment, ou un rien de temps.

La cause de cet oubli vient de la pureté et de la simplicité de la connaissance dont nous avons parlé. Et comme cette connaissance est pure et limpide, elle fait que l'âme à laquelle elle se communique est simple, pure, limpide, dégagée de toutes les conceptions ou images des sens et de la mémoire par lesquelles elle agissait dans le temps, et elle laisse l'âme dans l'oubli et en dehors de la notion du temps.

Cette oraison, si longtemps qu'elle dure, nous le répétons, semble de très courte durée à l'âme, car elle a été unie à Dieu par son intelligence dégagée de tout créé et par suite indépendante du temps; telle est l'oraison dont il est dit qu'elle pénètre les cieux, parce qu'elle n'est pas dans le temps.

Elle pénètre les cieux, parce que l'âme alors est unie à Dieu par son intelligence devenue céleste; aussi cette connaissance laisse-t-elle dans l'âme, quand elle revient à elle-même, les effets qu'elle y a produits sans qu'elle s'en aperçoive et qui sont l'élévation de l'esprit à l'intelligence céleste des choses de Dieu, le détachement et l'éloignement de toutes les choses de la terre, de leurs formes, figures et jusqu'à leur souvenir.

C'est là ce que David affirme lui être arrivé quand, revenu à lui-même après un semblable oubli, il a dit: Vigilavi et factus sum sicut solitarius in tecto: « A mon réveil, je me suis trouvé comme le passereau solitaire sur le toit (Ps. CI, 8 ). » Il se dit solitaire, parce qu'il est étranger à toutes les choses de la terre, et en est dégagé.

Il habite sur le toit, parce que son esprit est élevé très haut. Aussi l'âme est-elle comme une personne qui ignore toutes les choses de la terre; elle ne connaît que Dieu, et ne sait même pas comment elle le connaît.

L'Épouse déclare, au livre des Cantiques, un des effets produits en elle par ce sommeil ou cet oubli, c'est-à-dire l'absence de connaissance, quand elle dit, au moment où elle recevait cette faveur: « Nescivi: je ne savais (Cant. VI, 11) » d'où me venait cette faveur. Bien qu'il semble alors à l'âme qui reçoit cette connaissance qu'elle ne fait rien, qu'elle n'est occupée à rien, parce qu'elle n'agit point à l'aide de ses sens et de ses puissances, elle ne doit pas s'imaginer qu'elle se perd; loin de là.

Sans doute, l'harmonie des puissances de l'âme est suspendue, mais son intelligence est dans l'état dont nous avons parlé.

Voilà pourquoi l'Épouse des Cantiques se répondit à elle-même dans sa sagesse pour résoudre cette difficulté: Ego dormio, et cor meum vigilat: « Bien que je dorme » selon mon état naturel, en cessant d'agir, « cependant mon coeur veille (Ibid. V, 2) », parce qu'il est élevé surnaturellement à une connaissance surnaturelle.

La preuve à laquelle on peut reconnaître que l'âme est occupée à cette connaissance secrète consiste en ce qu'elle ne goûte aucun plaisir dans les objets créés inférieurs ou supérieurs.
Il ne faut cependant s'imaginer que cette connaissance, étant ce que nous avons dit, doive nécessairement causer cet oubli. Cela arrive seulement quand Dieu éloigne spécialement l'âme de l'exercice de toutes ses puissances naturelles et spirituelles.

Ce phénomène est même le moins fréquent, parce que ce n'est pas toujours que cette connaissance occupe l'âme tout entière. Pour que cette connaissance suffise dans le cas dont nous parlons, il suffit que l'entendement soit dégagé de toute connaissance particulière, soit de l'ordre temporel, soit de l'ordre spirituel, et n'ait aucun désir de s'occuper des objets créés, comme nous l'avons dit, parce que c'est le signe que l'âme est alors occupée.

Ce signe doit exister pour comprendre que l'âme est dans cet oubli, quand cette connaissance ne s'applique et ne se communique qu'à l'entendement, c'est-à-dire quand parfois l'âme ne la voit pas. Quand, en effet, elle se communique en même temps à la volonté, ce qui arrive presque toujours, l'âme ne manque pas de comprendre plus ou moins, si elle veut y faire attention, qu'elle est occupée de cette connaissance et s'en entretient.

Elle le reconnaît à cette suavité pleine d'amour qui en découle, sans qu'elle sache ni comprenne d'une manière particulière ce qu'elle aime.

C'est pour ce motif qu'elle appelle générale cette connaissance pleine d'amour. Car, de même qu'elle l'est dans l'entendement en se communiquant à lui d'une manière obscure, de même aussi elle l'est dans la volonté en lui communiquant l'amour et la suavité d'une façon confuse, sans qu'elle sache distinctement ce qu'elle aime.

Cela suffit maintenant pour comprendre comment il convient à l'âme d'être occupée dans cette connaissance avant d'abandonner l'oraison discursive. Elle doit donc s'assurer que, tout en ne paraissant rien faire, elle est occupée utilement, dès lors qu'elle découvre en elle les signes dont nous avons parlé.

Cela suffit, en outre, pour comprendre comment, par la comparaison dont nous nous sommes servi, ce n'est point parce que cette lumière se représente à l'entendement plus compréhensible et plus palpable qu'elle doit être plus claire, plus élevée, plus pure; elle ressemble au rayon de soleil, que est d'autant plus sensible à l'oeil, qu'il est plus rempli d'atomes.

Il est donc clair, comme l'expriment Aristote et les théologiens, que plus la lumière divine est élevée et excellente, et plus elle est obscure pour notre entendement.

Il y aurait beaucoup à dire sur cette divine connaissance considérée en elle-même ou dans les effets qu'elle produit chez les contemplatifs. Mais nous renvoyons ce sujet à la place qui lui convient. Il n'y avait même pas lieu d'en parler si longuement que nous venons de le faire, mais il était à craindre que cette doctrine demeurât encore plus confuse qu'elle ne l'est maintenant, car, il faut l'avouer, elle l'est encore beaucoup.

Rien d'étonnant. C'est, en effet, une matière dont on traite bien rarement d'une façon explicite soit de vive voix soit écrit; de plus, elle est par elle-même si extraordinaire et si obscure! A ces difficultés s'ajoutent encore celles de la pauvreté de mon style et de mon peu de savoir.

Aussi, je ne me flatte pas de savoir me faire comprendre. Bien des fois je constate que je m'étends trop longuement et que je sors des limites voulues pour l'endroit où je suis ou le point de doctrine en question. (Le reste du chapitre ne se trouve pas dans les mss. A et B. Il peut se faire qu'il ait été ajouté au texte.) Néanmoins j'avoue que je le fais parfois à dessein; car ce qui n'est pas compris quand on le présente avec certaines raisons, l'est peut-être mieux quand on l'expose avec d'autres arguments.

Il me semble, en outre, qu'en agissant ainsi j'ai donné un peu de lumière sur le sujet que je dois traiter.

Aussi il me semble bon, pour terminer cette question, de ne pas manquer de répondre à une difficulté qui peut surgir au sujet de la durée de cette connaissance générale; c'est ce que je vais faire rapidement dans le chapitre suivant.


Méditons …..

à suivre … Chapitre  13



 Eucharistie    Colombe


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* "J'ai compris que " Marie " veillait sur moi  , que j'étais Son enfant  .
Aussi , je ne pouvais que lui donner le nom de " Maman " , car il me semblait  encore plus tendre que celui de "  Mère "
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Message par Maud Mer 26 Avr - 7:43

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La Montée du Carmel – Livre deuxième – Chapitre 13


Où l’on montre à ceux qui progressent et commencent à entrer dans cette connaissance générale de la Contemplation, comment il leur convient parfois de se servir de la méditation discursive et de leurs facultés naturelles


Il peut surgir une difficulté au sujet de ce que nous avons dit. La voici. Est-ce que ceux qui progressent, je veux dire ceux que Dieu commence à placer dans cette connaissance surnaturelle de contemplation dont nous nous sommes occupés, ne doivent plus, par le fait même qu'il commencent à l'avoir, se servir jamais de la méditation ordinaire, des raisonnements et des représentations naturelles?

A cela on répond comme il suit. On ne prétend pas que ceux qui commencent à avoir cette connaissance amoureuse et simple n'aient plus en général à recourir jamais à la méditation ni à la rechercher.

Dans les débuts, en effet, ils ne possèdent pas cette connaissance à un degré assez parfait pour pouvoir en user dès qu'ils le veulent; de même ils ne sont pas encore si éloignés de la voie de la méditation, qu'ils ne puissent pas méditer et discourir quelquefois comme auparavant, en se servant des images et des représentations et y trouver quelque nouveau profit.

Au contraire, quand, dans ces débuts, ils verront, d'après les signes dont nous avons parlé, que l'âme n'est pas occupée paisiblement dans cette connaissance, on devra profiter de la méditation discursive, jusqu'à ce que l'on ait acquis l'habitude de contempler d'une façon quelque peu parfaite; ce sera quand, toutes les fois que l'on voudrait méditer, on se trouvera tout de suite favorisé de cette paisible connaissance, sans pouvoir méditer ni en avoir la moindre envie, ainsi que nous l'avons dit; car tant que l'on ne sera pas arrivé à cet état, qui est celui des âmes déjà avancées, il y a un mélange de l'une et l'autre voie.

Aussi, arrivera-t-il souvent que l'âme se trouvera dans cette contemplation paisible et amoureuse, sans y avoir travaillé à l'aide de ses puissances; mais souvent aussi elle devra s'aider doucement et modérément du discours pour y entrer: et une fois qu'elle y est parvenue, comme nous l'avons dit, elle ne doit plus se servir de ses puissances. Alors, en effet, il est plutôt vrai de dire que l'on agit en elle, et que la lumière et la suavité de l'amour s'y trouvent, sans qu'elle y concoure autrement que par une attention amoureuse pour Dieu, et sans qu'elle veuille éprouver ou voir quoi que ce soit sinon se laisser conduire par Dieu.

Ainsi donc, c'est passivement que Dieu se communique alors, comme celui qui a les yeux ouverts reçoit passivement la lumière [et n'a pas autre chose à faire que de tenir les yeux ouverts pour la recevoir. Quand on dit qu'elle reçoit la lumière qui lui est communiquée surnaturellement, on veut dire qu'elle comprend passivement; quand on dit qu'elle n'agit pas, ce n'est pas qu'elle ne comprenne pas, mais parce qu'elle comprend ce qui ne lui a coûté aucun effort de son industrie personnelle; elle ne fait que recevoir ce qu'on lui donne, comme cela arrive dans les illuminations, révélations ou inspirations divines.

Bien que la volonté reçoive librement cette connaissance générale et confuse de Dieu] (ce passage entre crochets ne se trouve dans aucun manuscrit. Il est donné seulement par le P. André de l'Incarnation, qui en affirme l'authenticité, sans indiquer cependant à quel manuscrit il l'emprunte. Cf. P. Gerardo..., t. III, ap. III.), il est nécessaire seulement pour recevoir plus simplement et plus abondamment cette divine lumière, que l'âme ne se mêle pas d'interposer d'autres lumières plus palpables provenant d'autres connaissances, formes ou images d'un raisonnement quelconque, car rien de cela ne ressemble à cette lumière délicate et subtile de Dieu.

Voilà pourquoi si l'âme voulait alors se livrer à l'intelligence et à la méditation d'objets particuliers, quelque spirituels qu'ils fussent d'ailleurs, elle serait un obstacle à cette lumière générale de l'esprit divin qui est si délicate et si subtile; ce serait comme des nuages qu'elle lui opposerait; elle ressemblerait à celui à qui on aurait posé un objet devant les yeux et qui  ne pourrait voir la lumière qui est au-delà de cet objet.

Il est donc clair que si l'âme se purifie entièrement et se dégage de toutes les représentations ou images, elle s'établira dans cette lumière pure et simple et s'y transformera en s'élevant à l'état de perfection. En effet, cette lumière ne manque jamais à l'âme; et si elle ne l'investit pas, c'est que l'âme est couverte et enveloppée par les images et le voile des créatures.

Qu'elle enlève ces obstacles, complètement comme nous le dirons plus tard, et elle se trouvera dans le dénûment complet et la pauvreté d'esprit; devenue simple et pure, elle se transformera aussitôt dans la simple et pure Sagesse divine, qui n'est autre que le Fils de Dieu.

Car le naturel disparaissant dans l'âme embrasée d'amour, le divin lui est aussitôt infusé, d'une manière naturelle et surnaturellement, pour qu'il n'y ait pas de vide dans la nature.

L'homme adonné à la vie spirituelle doit donc se tenir dans une attention amoureuse pour Dieu et conserver dans la paix son entendement, lorsqu'il en peut méditer, alors même qu'il lui semblerait ne rien faire. C'est ainsi que peu à peu et promptement il goûtera le repos et la paix de Dieu, recevra des connaissances de Dieu admirable et élevées, qui seront accompagnées d'amour.

Mais qu'il veille à ne pas interposer des considérations, des images,  des méditations, ou quelques raisonnements, pour ne pas troubler l'âme et la priver du contentement et de la paix dont elle jouit; ce serait la jeter dans l'agitation et la gêne.

Et si, comme nous l'avons dit, il a du scrupule à la pensée qu'il ne fait rien, il doit savoir que ce n'est pas peu de chose que de pacifier son âme, de l'établir dans son repos et dans une paix exempte de tout travail et de toute préoccupation.

C'est là ce que le Seigneur nous demande par cette parole de David. « Vacate, et didete quoniam ego sum Deus: Apprenez à être dégagés de tout (intérieurement et extérieurement), et vous verrez que je suis votre Dieu (Ps. XLV, 11). »

Méditons .…

à suivre ….  Chapitre 14



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