Emmanuel a écrit:Bonjour,
Mais se priver de quelque chose, en carême, n’a de sens que si cette chose nous éloignait de Dieu. Le chocolat vous éloigne-t-il de Dieu? Pas forcément. Se priver de quelque chose qu’on aime par dolorisme – comme si on s’infligeait des souffrances au nom d’un Dieu sadique qui aimerait ça – c’est totalement insensé, autant le dire tout de suite.
Le mot "dolorisme" est utilisé aujourd'hui par beaucoup dans la tentative de rejeter l'enseignement bimillénaire de l'Église sur le sens de la pénitence et de la mortification.
La mortification des sens, quelle qu'elle soit, est un moyen d'arriver à vaincre en nous la chair et ses tendances égoïstes pour faire triompher l'âme, afin que ce soit elle qui devienne reine en nous, que ce soit Dieu qui anime chacune de nos pensées, de nos paroles et de nos actes.
Comment est-ce possible?
Trois ennemis cherchent inlassablement à nous empêcher de suivre cette voie qui mène à Dieu et à l'union complète de notre âme avec Lui: le monde, le démon et la chair.
Le
monde représente la société qui a rejeté et qui rejette toujours Dieu, et qui veut que nous adhérions à ses valeurs individualistes et hédonistes.
Le
démon est bien connu, il s'agit de Satan, qui veut freiner en nous toute avancée vers Dieu et qui désire ultimement la perte de notre âme pour l'éternité.
La
chair est le troisième ennemi. Depuis la faute, notre "corps de mort", est naturellement porté vers l'égoïsme, la sensualité, la colère et toutes les mauvaises tendances qui conduisent au péché.
Notre chair est si lourde, et si facilement, elle nous éloigne de Dieu!
C'est pour cela que les saints de toutes les générations ont pratiqué la
mortification de la chair, que ce soit par le jeûne de nourriture, en portant parfois des vêtements moins confortables, et même, parfois, en portant des cilices ou en pratiquant d'autres mortifications qui rappellent les souffrances de la Passion du Christ. Ces dernières mortifications devaient habituellement être approuvées par un directeur spirituel.
Dans tous les cas, l'objectif de la mortification de la chair est de faire vaincre l'esprit en nous.
Un estomac rassasié à volonté alourdit l'âme, qui s'assoupit et devient plus facilement soumise aux tentations.
Tandis qu'inversement, s'habituer à priver notre chair des satisfactions des sens permet à l'âme de dominer de plus en plus le corps, de remonter progressivement vers l'état dans lequel se trouvaient nos premiers parents alors que l'esprit dominait entièrement la chair.
C'est une lutte continuelle entre la chair et l'esprit, comme on peut le lire, entre autres, en Galates 6, et à tant d'autre endroits dans la Bible:
Je dis donc : Marchez selon l’Esprit, et n’accomplissez point les désirs de la chair. Car la chair a des désirs contraires à l’Esprit, et l’Esprit en a de contraires à la chair, et ces deux choses sont opposées l’une à l’autre ; de telle sorte que vous ne faites point les choses que vous voudriez. (Ga 6:16-17)
La pénitence est enseignée par les Docteurs mystiques de l'Église, comme Sainte Thérèse, Saint Jean de la Croix, ainsi que par tous les saints à travers l'histoire.
Elle fait partie de l'Enseignement de l'Église catholique. Ne rejetons pas sa nécessité et sa puissance pour l'avancement de notre âme sous des termes péjoratifs et faux comme le "dolorisme", etc.
Sachons redécouvrir la grandeur et la beauté des enseignements ascétiques et mystiques de l'Église. Tout particulièrement en cette période de Carême.
Fraternellement,
Emmanuel
Merci pour ce petit rappel, Emmanuel
J'avais lu ton post en début de semaine, déjà, mais je n'ai pas eu vraiment l'occasion d'y répondre. J'espère que ma réponse ne sera pas trop décousue, elle a été écrite un peu sur le moment, sans structure précise.
Personnellement, je n'ai vraiment découvert la "profondeur" de la souffrance, des sacrifices, de la pénitence que grâce à Maria Valtorta.
J'ai appris que, même si on devait vivre la douleur, on pouvait l'élever en quelque chose de spirituel, en un encens agréable à Dieu si, avec douceur et humilité, avec joie et patience, on la donne à Dieu dans un divin abandon.
Ce n'est pas facile, encore moins quand beaucoup de choses semblent se liguer contre nous. Mais d'autre part, c'est un réconfort de se dire : "Ma souffrance n'est pas inutile. Je peux l'offrir à Dieu pour obtenir une grâce, pour aider une âme qui est ma soeur, pour me faire un trésor spirituel dans les Cieux, là où m'attendent les Anges et les caresses de Marie. Je peux l'offrir à Dieu pour lui demander pardon pour toutes mes fautes et mes péchés. Je peux la donner à Dieu pour alléger la souffrance des âmes du Purgatoire. Je peux la donner pour les mourants, qui sont dans l'agonie ; pour les désespérés, afin de leur rendre l'espérance ; pour les malades, afin de leur rendre la santé du corps et de l'âme. Je peux tout faire avec la souffrance et avec tous mes gestes dans la vie, pour autant que j'aie l'Amour."
Choisir de faire des sacrifices volontairement est une épreuve, car il y a toujours ce combat entre l'esprit et la chair. Mais ce n'est pas dolorisme si, humblement, on veut offrir ces petites perles à Dieu, pour sa joie et son amour.
Amour pour Dieu, car on se plie nous-mêmes, on se fait olive sous le pressoir, pour en extraire le doux jus de l'amour. Et par ce suc issu de nos souffrances, on lui dit : "Tiens, pour ta joie et celle de mes frères. Apaise la Haine, l'injustice, les pleurs. Réconforte ceux qui ont faim. Rayonne dans le coeur d'une âme. Brille telle une étoile au milieu des orages. Guide-moi pour que je sois plus saint. Et aide-nous à grandir dans l'Amour, pour que, de pierres brutes, nous devons des joyaux, des saphirs, des rubis, des émeraudes sertis pour le Ciel".
Qu'est-ce que le renoncement, la douleur, la souffrance de nos petits sacrifices ? L'Amour, rien que l'Amour. Un Amour qui mendie des grâces, un Amour saint, car il sait voler dans les sphères de l'esprit, un Amour libre, car le monde, la chair et le démon ne savent plus entraver l'âme par ses tentations.
Renoncer à des petits plaisirs, veiller à garder son coeur loin de toutes pensées plus mauvaises et aller contre nos inclinations, n'est pas un dolorisme, si ce sacrifice a pour but de nous plonger davantage dans l'Amour et dans la sainteté. C'est plutôt lumière, intelligence, sagesse, et bonté.
Quand un jardinier coupe les branches d'un arbre qui lui tient à coeur, est-il méchant de le faire ? Non, si cela contribue à une meilleure formation du corps végétal et si cela lui permet de faire de meilleurs bourgeons, de plus belles fleurs, et enfin des meilleurs fruits. L'arbre s'en trouvera plus beau, plus fort, plus enrichi.
Il en va de même pour nous. L'âme oblige le corps a se plier à ses volontés, mais se faisant, le corps devient plus saint, plus fort, plus résistant. L'esprit vole, et avec lui vient la paix, la joie intérieure, et une liberté qui n'est pas de ce monde, si je puis dire ça ainsi.
Nos résolutions du Carême devraient être centrés sur ce que nous avons le plus de mal à accomplir... Sourire face à une personne que nous ne supportons pas et être agréable. Renoncer à ce que nous mangeons peut-être abusivement, comme les chips ou le chocolat. Ne pas se plaindre si nous avons souvent tendance à agir ainsi avec autrui.
C'est souffrir, c'est vrai ! Spirituellement, physiquement, moralement. Mais là-haut, la douleur se change en bien éternel.
Mieux encore, si on offre tout de suite nos petits "cadeaux" à Dieu, cet or céleste peut bénir et soutenir une âme. N'est-il pas doux d'aider un frère et une soeur ? Alors pourquoi ne pas le faire si par la prière et l'abandon, par l'Amour et la confiance en Dieu, on peut obtenir toutes ces choses ?
La souffrance, on doit la rencontrer toute notre vie durant... Autant s'en faire une amie, douloureuse, il est vrai, accablante, il est vrai aussi, fidèle car elle ne nous abandonne jamais complètement. Mais après ! La souffrance s'arrête au seuil du Paradis. C'est comme la Sagesse décrite dans la Bible. Elle est pesante, lourde, exigeante. Mais ensuite, elle se change en douceur, en miel, en réconfort paradisiaque. Après le combat... Après la lutte... Mais nous avons Dieu avec nous et pour nous ; nous avons notre Ange gardien et toute la cour céleste avec nous.
Peut-on craindre quelque chose en pareille compagnie ?
Thérèse de Lisieux disait qu'on n'avait qu'un instant pour souffrir, et Jésus, dans Maria Valtorta, a dit un jour : "La douleur passe, toujours elle passe". Encourageons-nous ainsi, par nos
petits sacrifices, selon
ce qu'on rencontre dans notre vie. Chacun doit voir ce qu'il est capable, chacun doit voir ce que tel petit sacrifice pourrait être bon pour lui, en son corps, pour son prochain ou pour son âme.
Et la seule chose qui compte, en notre vie, c'est l'amour et uniquement l'amour. Rappelons-nous-en, et faisons ce à quoi Dieu nous a disposé dans notre vie, selon nos moyens, nos capacités et notre amour ^^
Petit mot pour la fin :
"Ma vie n'est qu'un instant, une heure passagère,
Ma vie n'est qu'un seul jour qui m'échappe et qui fuit,
Tu le sais, ô mon Dieu, pour t'aimer sur la Terre,
Je n'ai rien qu'aujourd'hui.