Les Béatitudes, une lumière sur les saints.
Dans le voyage que je vous invite à faire avec les Béatitudes à travers toute la Bible nous pouvons non seulement laisser venir cette lumière nouvelle sur l’Ancien Testament, et découvrir le visage de Jésus décrit par lui-même à travers cet autoportrait, mais encore laisser cette lumière venir sur tous ceux qui font corps avec lui : ses amis, ses proches, les apôtres, puis toute l’Église. Les Béatitudes sont un phare extraordinaire pour comprendre les Actes des Apôtres. Prenez Pierre. Un doux ? Pas vraiment. Cherchez une Béatitude qui lui corresponde Il a renié Jésus, mais il s’est vite rendu compte de l’horreur de son péché, et il a pleuré amèrement ce péché : c’est vraiment un cœur pur.
Parcourez donc les Actes des Apôtres avec les Béatitudes. Mais ne vous arrêtez pas à ce livre, voyagez dans toute l'histoire de l'Église. Il y a sûrement des saints que vous aimez, et dont la vie nous offre une illustration limpide de telle Béatitude.
Avec certains, c’est très facile, par exemple, saint François d'Assise ! Il arrive devant son père, un riche commerçant, qui voudrait que son fils continue cette activité lucrative. Il déchire tous ses vêtements sur la place publique, devant son père, son évêque et toute la foule assemblée. Il se retrouve nu, et proclame : « Je n’ai plus de père sur la terre ; désormais, je n’appellerai plus personne père que mon Père du ciel. » Et il part comme un pauvre, sans rien, devenant l’époux de Dame-Pauvreté ! Peut-être ne faut-il pas trop s’approcher de la première Béatitude… Elle est pour les très grands saints, comme la dernière. Nous reviendrons sur ce point.
Regardez aussi Mère Teresa. Trois ou quatre siècles après saint Vincent de Paul, elle nous aide à comprendre le sens de la 5ème Béatitude : « Heureux les miséricordieux. » Elle se penche sur ceux qui sont en train de mourir sur les trottoirs de Calcutta. Elle n’est pas Dieu, elle ne peut les empêcher de mourir, mais elle peut faire en sorte qu’ils meurent comme des hommes, et non comme des bêtes. Elle leur donne des vêtements, de la nourriture, de l’affection, et ils mourront dans leur dignité, dans leur beauté. En fait, personne ne sait si Mère Teresa a conduit au baptême cinq, dix ou dix mille personnes. Et nul ne se pose même la question. Ce qui lui était demandé, c'était d'être la miséricorde de Dieu venue jusqu’à ces grandes souffrances. On peut dire qu'elle l’a fait, et sa vie « parle » à tous et chacun, dans tous les continents, toutes les religions et les cultures.
Saint François de Sales, une merveille de douceur : « Heureux les doux » ! Seule une force extraordinaire permet de vivre une pareille douceur. Faites ce voyage avec tous les saints. Par exemple, une des saintes les plus aimées, c’est sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus. Elle était un peu « folle » ! Elle écrit qu’elle aurait voulu être martyr, et pas seulement subir un seul martyre, mais tous les martyres de tous les siècles ! Elle voulait aussi être prêtre, missionnaire et pourquoi pas pape (c’est moi qui le rajoute) ! Elle voulait être « tout » ! Mais c'est difficile lorsque l’on est une seule personne. Et pourtant Jésus, un jour, lui a donné raison. En lisant le passage où saint Paul compare la communauté de l’Eglise à un corps (1 Cor 12), Thérèse comprend que dans ce corps, il y a un cœur qui permet aux bras de bouger, aux pieds de marcher, et à tous les membres d’accomplir leur mission. D’une certaine manière, ce cœur est tout. Alors, s’écrie-t-elle, dans l’excès de sa joie : « Dans le cœur de l'Église, ma mère, je serai l’Amour ; alors, je serai tout. » En voilà une dont on peut dire qu'elle fut affamée, assoiffée de la justice et de la sainteté de Dieu pour le monde entier !
Sur chacun des saints que vous connaissez et que vous aimez, viendra spontanément « se poser » l’une des Béatitudes. Quelle béatitude pour le cher curé d'Ars, par exemple, en cette année sacerdotale déclarée par le Pape Benoît XVI ? Je me rappelle avoir entendu le pape Jean-Paul II, lors de son passage à Ars, en 1986, alors que j’étais jeune prêtre, nous donner en exemple saint Jean-Marie Vianney qui confessait entre quatorze et seize heures par jour ! J’avais envie de répondre au pape que nous aimerions bien en faire autant, mais encore faudrait-il que des gens viennent se confesser ! Le Curé d’Ars était totalement donné à ce ministère de la miséricorde.
Quand j’entends « Bienheureux les cœurs purs », je pense immédiatement à Don Bosco ou à saint Dominique Savio ; si c’est « Bienheureux les artisans de paix » à saint Louis… Mais chacun d’entre vous pense peut-être à d’autres et n’a pas la même manière de percevoir la figure de tel ou tel saint. En béatifiant le jeune Pier Giorgio Frassati, le pape Jean-Paul II a dit : « Il était l’homme des huit Béatitudes. »
Ne vous arrêtez pas, cependant, à Jésus, aux apôtres ou aux saints. Regardez autour de vous : ils sont nombreux, ceux qui vivent les Béatitudes. Ne vous est-il jamais arrivé de dire à propos de quelqu'un : « Celui-là, c'est vraiment un cœur pur » ? Jésus s’était ainsi exclamé en voyant Nathanaël venir à lui : « Voici un véritable fils d’Israël, un homme qui ne sait pas mentir » (Jean 1, 47). Certaines personnes nous donnent par leur attitude et leurs paroles une joie incroyable. Parce qu'elles défont les nœuds et que, dans une situation inextricable, elles débloquent tout ! Ce sont des artisans de paix ! En un instant, tout s'arrange, on ne sait pas pourquoi ni comment. Une grâce se dégage de ces personnes. Plusieurs fois, écoutant un ou une jeune en inviter d’autres à une activité missionnaire, je me disais : « Voilà des affamés et des assoiffés de justice ! » Quelle chance de voir la sainteté de Dieu à l'œuvre, dans l'Église aujourd'hui ! Chacune des Béatitudes se donne à voir et à comprendre dans la vie de nos frères et sœurs. Jésus est vraiment vivant au milieu de nous comme il l’a promis.
Voilà pourquoi il faut travailler les Béatitudes et s’en servir comme d’un projecteur, d’un phare qui éclaire l'Ancien Testament, l'Évangile, le Nouveau Testament et toute l'histoire de l’Église depuis vingt siècles.
C'est la seconde idée que je souhaitais développer devant vous, après avoir parlé d’abord du visage de Jésus.