Voici une lettre, rédigée en 1808, du souverain pontife Pie VII à destination des Cardinaux dans laquelle on y apprend que Napoléon 1er, qui ouvrit une brèche mortifère dont nous voyons aujourd’hui le résultat, fut un grand persécuteur de la sainte Église de Jésus-Christ. Ses actions politiques et stratégiques préparaient la voie de l’apostasie massive dans laquelle se trouve actuellement la France de 2016.
Nous ne pouvons qu’être meurtris par de tels faits historiques qui restent cachés aux yeux du grand public. D’autant plus que l’on peut ressentir la terrible souffrance du saint pontife à travers cette lettre magnifiquement rédigée. Ce pape aimait Jésus-Christ de tout son cœur. Une âme sensible est forcément émue par ce noble courrier. Pour que la vérité triomphe !
PIÈCES OFFICIELLES
TOUCHANT L’INVASION DE ROME PAR LES FRANÇAIS, EN 1808,
Pour servir de suite à la correspondance
Pie VII aux Cardinaux.
Il n’est ni de nos soins particuliers, ni de notre sollicitude apostolique, ni de notre devoir, ni de notre conscience, ni de notre honorable et inviolable souveraineté et autorité de rappeler le souvenir des longues vicissitudes, des persécutions, des exils et des guerres sanglantes qui ont eu lieu de tant de manières contre la religion de J. C., contre ceux qui l’ont professée et contre les successeurs de Saint-Pierre, de la part des nations barbares, des ministres de l’hérésie et de la gentilité ; les historiens en ont assez dit, et les reliques des glorieux martyrs qui ont péri a la défense de la religion, que nous honorons sur nos autels et qui sont nos médiateurs dans le ciel, nous en fournissent des preuves continuelles et certaines. Il suffit à notre ministère apostolique de protester, comme nous protestons en effet, en présence de Dieu et à la face du monde catholique et non catholique, et de vous, éminentissimes frères et fils en J. C., contre tout attentat et occupation militaire faite par les Français, des états qui nous ont été confiés et que nous avons reçus, dans toute leur étendue, de nos prédécesseurs, quoique nous reconnaissions et nous confessions que notre souveraineté temporelle n’est ni absolue ni héréditaire, mais simplement élective et de confiance : c’est pourquoi nous avons refusé et nous refuserons constamment tout ce qu’on pourra prétendre de contraire à cette autorité, et à l’autorité spirituelle qui nous vient des apôtres, promettant à Dieu de verser tout notre sang, si cela est nécessaire, pour la défense et le soutien de l’une et de l’autre : voilà ce que nous déclarons vouloir librement, comme nous le voulons réellement en J. C. N. S.
Le gouvernement français, employant les prétextes les plus injustes et les plus frivoles, porte atteinte à notre pouvoir spirituel et temporel, mais nous avons Dieu pour témoin, et toutes les nations pour garant de notre conduite, et c’est pourquoi nous avons jugé à propos de vous faire connaître en particulier, notre éminentissime frère, quelles sont les bases des susdits prétextes, et quelle a toujours été notre immuable et constante détermination.
Et d’abord, quelles preuves le gouvernement français n’a-t-il pas de notre zèle constant à nous réconcilier avec cette foule de ses habitants qui s’étaient éloignés de l’Église catholique, apostolique et romaine ? Quels moyens n’avons-nous pas essayés pour y consolider l’autorité publique et particulière ? Avant même d’être élus a la chaire du successeur de Saint-Pierre, notre cœur était si vivement affecté que nous ne pûmes nous défendre du désir de nous sacrifier tout entiers pour rendre la paix, l’union et la tranquillité à une nation qui, les mains fumantes encore du sang de ses frères sacrifiés dans tout état, dans toute condition, avait attiré l’indignation, et sur elle-même et sur ses enfants, en versant le sang de son légitime souverain.
Attaché à l’administration de l’église d’Imola par le saint-siège, et depuis comme évêque, nous cherchâmes à faire connaître notre penchant et notre affection pour cette nation, lorsque nous eûmes une entrevue avec le chef de l’armée française en Italie, lequel nous menaçait de ruine et de carnage, et de près et dans le lointain.
Les écrits pleins de zèle et de vérité que nous adressâmes à notre peuple démontrent et garantissent suffisamment la tendresse et la sincérité de nos sentiments a cette époque, et au milieu des craintes et des angoisses nous eûmes la satisfaction d’obtenir de ce même chef le pardon et la vie pour ceux de nos enfants qui, à main armée, avaient assassiné les anciens commissaires de notre cité.
Élevés par la divine Providence a la dignité de Pontife suprême, après la mort glorieuse du grand, de l’immortel Pie VI, notre prédécesseur d’heureuse mémoire, et investis de la plénitude de l’autorité de Saint-Pierre et du saint-siège, que n’avons-nous pas fait ? Quels moyens, quelles preuves, quels sacrifices de notre part, pour convaincre le gouvernement français de notre sollicitude et de nos soins paternels ?
L’univers en est témoin, et Dieu connaît l’objet de nos vœux ; et comment ce même gouvernement peut-il sans crime aujourd’hui vouloir nous opprimer, nous humilier, nous exiler ? Mais non, Pie VII est sans crainte, il ne résiste pas, il ne s’avilit pas. Notre force, notre consolation, notre espoir, sont en J. C. et en sa religion ; les persécutions seront notre gloire, et la mort notre triomphe. Les moyens que nous avons mis en usage pour gagner une nation si éloignée du bon chemin, se sont manifestés lors du congrès de Lyon, que nous avons modifié, approuvé, confirmé, toutefois sans compromettre le dogme ni la discipline la plus essentielle ; et quand nous nous sommes crus à l’abri de toute attaque, on a préparé de nouveaux attentats contre nous. Le gouvernement français, qui venait de déclarer et proclamer Bonaparte pour son chef et son empereur, nous fit proposer si nous voulions abandonner notre siège et nous transporter à Paris, pour sacrer et couronner le nouvel empereur. Dans la vue d’obvier au plus grand des inconvénients, et d’arrêter des maux qui pouvaient se reproduire, nous avons de bon gré quitté notre siège, et nous nous sommes exposés à un voyage pénible et désagréable. Nous nous rendîmes à Paris, pour cette cérémonie, et ayant placé sur la tête de Napoléon le diadème impérial, nous pensâmes que dès-lors la paix, la sûreté et la bonne union étaient loyalement établies entre ce souverain et nous, entre la religion catholique et ses peuples, qui avaient déjà donné toutes les marques de respect, de vénération et de dévouement pour elle. Nous crûmes que l’on essayerait en vain de s’élever contre elle, et que nous ne devions concevoir aucune inquiétude.
Depuis peu, nous avons reçu de ce gouvernement une lettre basée sur les prétextes inadmissibles et injustes dont nous vous avons déjà donné connaissance dans le consistoire secret tenu à cet effet, et que nous jugeons à propos de rappeler à votre mémoire, afin qu’en applaudissant à nos immuables résolutions, vous souteniez notre courage et notre disposition a tout souffrir avec constance pour le soutien de la sainte religion catholique, apostolique et romaine, et pour la conservation des droits du saint-siège. Il est vrai que, dans tous les temps, l’Église de France a joui de privilèges reconnus par nos prédécesseurs, et bien loin que nous ayons voulu les détruire ou les diminuer, nous lui en avons accordé de nouveaux qui ne se sont point trouvés en opposition avec notre conscience, ainsi que tout le monde catholique en est instruit. Que pouvait-on faire de plus et vouloir encore de nous ? Il fut décidé de mettre notre constance a l’épreuve, et d’anéantir notre autorité. Ô gouvernement ! Ô peuple ! En te mettant contre nous, tu te mets contre toi-même.
- Le gouvernement français demande aujourd’hui un patriarche indépendant de nous ; il le nomme, le reconnaît, nous le propose revêtu de notre autorité, et nous somme de vouloir le reconnaître. Nous avons protesté et nous protestons non-seulement que nous ne le reconnaissons pas à ces conditions, mais nous le déclarons intrus et rejeté a jamais du sein de l’Église catholique, apostolique et romaine.
- On veut que le code soit publié et mis dorénavant en activité dans nos états. Mais ce code étant contraire a notre autorité souveraine, opposé aux saints canons et aux saints conciles, nous avons manifesté notre refus.
- On entend que tous les cultes soient libres et publiquement exercés. Mais nous avons rejeté cet article, comme contraire aux canons et aux conciles, à la religion catholique, à la tranquillité de la vie et au bonheur de l’état, par les funestes conséquences qui en dériveraient.
- On désire la réforme des évêchés, et que les évêques soient indépendants de nous. Mais cela étant opposé aux intentions de notre législateur et Seigneur J. C., qui a ordonné qu’il existât entre Saint-Pierre et les apôtres une union représentée aujourd’hui par celle des évêques avec nous, lors qu’il lui dit qu’il était Pierre, et qu’il serait comme la pierre fondamentale sur laquelle il bâtirait son Église, ajoutant de plus au même Pierre qu’il devait maintenir l’union de ses frères avec lui et les confirmer dans la foi, et tu conversus confirma fratres tuos ; en conséquence, nous protestons vouloir conserver, par nous et par nos successeurs, la plénitude de notre primauté, et la dépendance des évêques envers notre siège, ainsi que la chose est ordonnée par les bulles pontificales, les sacrés canons et les conciles.
- On demande que les bulles pontificales qui regardent la collation des évêchés et des paroisses de notre juridiction soient et demeurent abolies. Comme cet article serait un sujet de désordre et d’indépendance, ainsi qu’une déclaration puissante contre notre autorité et le saint-siège, nous le rejetons avec une égale fermeté.
- On insiste pour que nous décrétions l’abolition général des ordres ecclésiastiques de l’un et de l’autre sexes. Mais nous n’avons aucun motif pour l’effectuer ; au contraire, nous croyons qu’il est de notre devoir de les conserver et de les encourager.
- On demande l’abolition du célibat à l’avenir, et que les personnes consacrées au culte de la religion, même celles engagées par un vœu solennel, puissent se marier. Ce n’est qu’un article opposé à la sainteté et à la pureté de cette même religion, et contradictoire avec les promesses que les personnes religieuses ont faites à Dieu en faisant, pour un plus grand bien, le sacrifice volontaire de leur liberté.
- Enfin, le gouvernement français nous signifie de couronner et sacrer roi de Naples, Joseph Bonaparte. Mais comment pourrions-nous le faire sans délit ? Ferdinand Bourbon, souverain légitime de ce pays, est plein de vie : nous n’avons pas connaissance qu’il ait fait cession de ses états, et même nous sommes pleinement assurés des prétentions qu’il y a. Comment pourrions-nous lui substituer un autre souverain sans être injustes et inconsidérés ?
Voila, éminentissime frère, les prétentions du gouvernement français, avec la décision dont nous les avons accompagnées. Elles nous préparent un travail bien épineux, et malgré les menaces que l’on nous fait, nous désirons et nous déclarons avec une égale constance que nous ferons tous les sacrifices qui pourraient tourner a l’avantage de la religion et du saint-siège.
On est sur le point de s’emparer militairement des États de l’Église, et nous allons être environnés des individus d’une nation qui naguère nous a donné tant de preuves de dévouement, de respect et d’attachement à la religion et à notre personne. On nous dit, d’un ton menaçant, que nous devons nous attendre à voir un nouveau souverain dans ces états, et on laisse à notre volonté le choix du lieu où il nous plaira nous transférer, pourvu que ce soit hors de nos provinces chéries, et tout cela pour punir notre opposition à d’aussi injustes prétentions.
Dieu éternel, vous qui connaissez le cœur des hommes, et en découvrez les secrets les plus cachés, de grâce ayez pitié de nous, mais encore plus d’une nation plongée dans les ténèbres, et aveuglée par les erreurs qui entraînent son cœur. Nous nous offrons nous-mêmes en sacrifice, et si, pour expier sa faute, notre sang était nécessaire, nous ne refusons pas de le répandre. Nous nous prosternons à vos pieds sacrés, nous implorons de force vos saintes bénédictions sur nous, afin d’être remplis de force et de persister dans la sainte résolution plutôt tout souffrir que de perdre une si grande portion de notre troupeau dispersé et abandonné de vous. Nous remettons entre vos mains la défense de la religion catholique. Frappez, oui, frappez le pasteur ; mais pardonnez aux brebis que nous plaçons sous votre sauve-garde, et- maintenez-les réunies à vous. Que vos divines plaies, ô grand Dieu, soient notre asile et notre sûreté ; votre sang, notre tranquillité ; votre mort, notre exemple.
Et vous, notre cher fils et éminentissime frère, recevez cette circulaire qui vous est adressée, comme un témoignage de notre sollicitude paternelle et de la considération que nous avons pour vous, pendant que nous songeons à soulager nos maux, en vous en faisant connaître la source. Nous vous prions de vous unir à nous dans vos prières, afin que par sa grâce Dieu nous accorde une constance inébranlable à soutenir la religion, la justice et la vérité ; rappelons-nous toujours que les Français n’ont pas été les premiers persécuteurs de la religion de Jésus-Christ et de son vicaire sur la terre, et que nous ne serons pas les premiers martyrs, si Dieu nous fait la grâce de verser notre sang pour elle. Nous vous donnons notre bénédiction apostolique.
Le 5 février 1808.
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