L’Eglise et le pouvoir temporel : une mise au point
Avec les mots « liberté », « fraternité », « charité », ou encore « dignité humaine », la laïcité est un beau mot que chacun veut pour lui. La situation est telle qu’on entend parfois des militants aux idées parfaitement contradictoires en réclamer la paternité. Ainsi trouve-t-on des catholiques qui estiment que la laïcité est une idée parfaitement chrétienne, quand d’autres, plus répandus, affirment que la laïcité est une idée entièrement révolutionnaire et républicaine, sans rapport avec le christianisme. Les premiers [1] rapportent une histoire dans laquelle l’Église aurait depuis toujours cherché à s’affranchir du temporel pour devenir ce qu’elle est devenue aujourd’hui, c’est-à-dire une institution sans pouvoir et sans prétention politique. Les seconds [2] affirment tout de go que ce sont les Lumières et l’Assemblée Constituante qui ont les premiers pensé et réalisé l’idée même de laïcité, remède à la toute-puissance obscurantiste de l’Église.
Nous nous proposons de faire une mise au point sur les rapports entre Église et pouvoir temporel, en commençant d’abord par l’étude des Écritures et de son exégèse, avant d’aborder la question historique et magistérielle. Ce que nous y découvrons est la juste mesure du catholicisme : ni théocratie, ni laïcité. Il s’agira de débouter deux idées fausses : d’une part, que si on laisse trop de pouvoir à l’Église dans le domaine public, elle devient naturellement une théocratie impérieuse ; et d’autre part, l’extrême inverse, que la laïcité contemporaine serait une pure émanation du christianisme, une volonté même de l’Église ; or, historiquement, il n’y a rien de plus faux.
Que dit l’Évangile ?
Le Nouveau Testament parle très peu de politique : aucune juridiction, aucune loi n’y prend place. Rien de comparable en tout cas au Deutéronome ou à la Charia. Le Christ n’était pas un législateur. Il n’est pas non plus, comme pouvait l’entendre un Maurras, un révolutionnaire qui aurait appelé à la révolte et demandé l’abrogation de toute loi. En réalité, et c’est à la fois la beauté et le mystère qui entoure l’Écriture sainte, il faut écouter ce que le Christ ne dit pas. Nous sommes loin des traités, des raisonnements, des discursivités qui ne veulent rien dire : le Christ ordonne, explique peu, il édifie, s’exprime en paroles brèves et voilées. On veut trouver du sens là où le Christ veut le donner clairement : or la Bible est un livre de mystères, et on trouve la vérité dans ses silences.
Tout au long de sa prédication, le Christ appelle les hommes à consacrer la moindre de leurs actions et le plus petit aspect de leur vie à Dieu. Une parole seulement a suffi à jeter le trouble parmi les chrétiens parce qu’ils ont cru y voir une « séparation des pouvoirs », bien anachronique [3], du spirituel et du temporel - voire une soumission au politique ! Cette parole se retrouve dans trois des Évangiles (Matthieu, XXII, 17-21 ; Marc, XII, 13-17 ; Luc, XX, 25).
Dites-nous donc ce qu’il vous semble : « Est-il permis, ou non, de payer le tribut à César ? » Jésus, connaissant leur malice, leur dit : « Hypocrites, pourquoi me tentez-vous ? Montrez-moi la monnaie du tribut. » Ils lui présentèrent un denier. Et Jésus leur dit : « De qui est cette image et cette inscription ? - De César, » lui dirent-ils. Alors Jésus leur répondit : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »
Il faut d’abord comprendre que les pharisiens ont tenté de perdre le Christ en lui posant une telle question : ils espéraient qu’il se condamne en demandant de payer le tribut à César [4]. Mais sa réponse les confondit. Les Pères de l’Église l’ont comprise d’une façon unanime :
Lorsqu’il exige de « rendre à Dieu ce qui est à Dieu », le Christ affirme qu’aucun César, aucun pouvoir temporel ne saurait être le maître absolu des hommes, car à Dieu seul l’homme se donne tout entier. Le Christ s’oppose ainsi à toute adoration de César, et ramène le politique à ce qu’il est : une activité terrestre que le spirituel pénètre comme toute réalité. Distinction ne signifie pas séparation : c’est là toute la différence. Distingués, ces deux pouvoirs n’en restent pas moins soumis à une hiérarchie qui oblige ces deux pouvoirs à collaborer et à se compléter. Cette hiérarchie est bien entendu celle de l’âme sur le corps, car comme le Christ est la tête de l’Église, l’Église est la tête du pouvoir civil ou plutôt son guide.
Face à Pilate, le Christ a cette sublime parole : « Mon Royaume n’est pas de ce monde » (Jean 18, 36). Beaucoup pensent trouver ici la preuve que le Christ est venu apporter une « philosophie » laïque, étrangère à toute idée de pouvoir. Saint Jean Chrysostome n’est pas de cet avis :
Notre Seigneur veut dire [par ces paroles] que sa royauté n’a pas la même origine que la royauté des princes de la terre, et qu’il tient d’en haut un pouvoir qui n’a rien d’humain, et qui est beaucoup plus grand et plus éclatant. C’est pour cela qu’il ajoute : « Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs combattraient pour que je ne fusse pas livré aux Juifs. » Il fait voir ici la faiblesse des royautés de la terre qui tirent leur force de leurs ministres et de leurs serviteurs ; mais le royaume dont l’origine est toute céleste se suffit à lui-même, et n’a besoin d’aucun appui. Si telle est donc la puissance de ce royaume, c’est de sa pleine volonté qu’il s’est lui-même livré à ses ennemis [6].
Saint Augustin, sur le même verset, a une analyse encore plus fine : le Père de l’Église insiste sur la préposition « de » et fait ainsi la distinction entre l’affirmation qui consiste à dire « Mon royaume n’est pas ici », et « Mon royaume n’est pas d’ici ». De même il dit « Mon royaume n’est pas de ce monde », et non pas « Mon royaume n’est pas dans ce monde » [7].
Après avoir prouvé que son royaume n’était pas de ce monde, Jésus ajoute : « Mais mon royaume n’est pas d’ici. » Il ne dit pas : Mon royaume n’est pas ici, car il est vraiment sur la terre jusqu’à la fin du monde ; l’ivraie s’y trouve mêlée avec le bon grain jusqu’à la moisson, et cependant il n’est pas de ce monde, parce qu’il est dans ce monde comme dans un lieu d’exil [8].
Certains chrétiens prennent prétexte d’une mauvaise interprétation de cette parole pour affirmer que la royauté du Christ n’existe pas, ou qu’elle n’a aucune incidence ni pouvoir sur la terre. Cette idée est condamnée avec insistance par Jean Chrysostome :
Les hérétiques prennent de là occasion de dire que le Sauveur est étranger à la direction du monde. Mais de ce qu’il déclare que son royaume n’est pas d’ici, il ne s’ensuit nullement que le monde ne soit point gouverné par sa providence ; ces paroles signifient donc simplement que son royaume n’est soumis ni aux lois du temps, ni aux imperfections de notre humanité [9].
Le Christ vient de démontrer que l’origine de sa royauté était surnaturelle et non naturelle, qu’elle était d’origine divine, et non d’origine humaine : « Alors Pilate lui dit : Vous êtes donc roi ? Jésus répondit : Tu le dis, je suis roi. » (Jn 18, 37) » Le Royaume de Dieu que le Christ promet et annonce n’est pas en effet une réalité lointaine, séparée du monde, étranger aux hommes ; il le dit même « tout proche » (Mc 1, 15 ; Mt 10, 7). Aux pharisiens qui lui demandent quand viendra le Royaume de Dieu, Jésus répond : « Le Royaume de Dieu ne doit pas venir de façon à être épié, et on ne dira pas : le voilà ici ! ou là. Car voilà que le Royaume de Dieu est parmi vous » (Luc 17, 20). Le Credo ne dit-il pas que « son règne n’aura pas de fin » ? L’oraison dominicale, la prière la plus parfaite puisque donnée par le Seigneur, ne dit-elle pas : « que votre règne arrive, que votre volonté soit faite sur la Terre comme au Ciel ? [10] » Il n’y a visiblement pas un domaine, fut-il la politique, qui ne devrait s’abstraire de l’obéissance qu’on doit à l’Amour de Dieu. Partout Dieu doit prévaloir ; sinon, il ne serait pas dieu.
D’une manière générale, les Écritures contiennent de nombreuses références à la royauté du Christ : dès l’annonce de sa naissance, le message de l’archange apprenant à la Vierge qu’elle engendrera un fils, qu’à ce fils le Seigneur Dieu donnera le trône de David, son père, qu’il régnera éternellement sur la maison de Jacob et que son règne n’aura point de fin (Luc 1, 32-33). Le fait que le Christ soit roi est une vérité professée aussi bien par l’Ecriture que par la Tradition [11] : la bulle Quas Primas [12] du pape Pie XI est une véritable apologie en faveur du règne social du Christ ; il y instaure une fête du Christ-Roi. Le pape y précise bien que le titre de « roi » n’est pas attribué au Christ au sens métaphorique : Roi, il L’est certainement et entièrement . La bulle est riche et elle mérite une lecture complète ; un long passage nous renseigne avec détails sur les Écritures :
A suivre !
Avec les mots « liberté », « fraternité », « charité », ou encore « dignité humaine », la laïcité est un beau mot que chacun veut pour lui. La situation est telle qu’on entend parfois des militants aux idées parfaitement contradictoires en réclamer la paternité. Ainsi trouve-t-on des catholiques qui estiment que la laïcité est une idée parfaitement chrétienne, quand d’autres, plus répandus, affirment que la laïcité est une idée entièrement révolutionnaire et républicaine, sans rapport avec le christianisme. Les premiers [1] rapportent une histoire dans laquelle l’Église aurait depuis toujours cherché à s’affranchir du temporel pour devenir ce qu’elle est devenue aujourd’hui, c’est-à-dire une institution sans pouvoir et sans prétention politique. Les seconds [2] affirment tout de go que ce sont les Lumières et l’Assemblée Constituante qui ont les premiers pensé et réalisé l’idée même de laïcité, remède à la toute-puissance obscurantiste de l’Église.
Nous nous proposons de faire une mise au point sur les rapports entre Église et pouvoir temporel, en commençant d’abord par l’étude des Écritures et de son exégèse, avant d’aborder la question historique et magistérielle. Ce que nous y découvrons est la juste mesure du catholicisme : ni théocratie, ni laïcité. Il s’agira de débouter deux idées fausses : d’une part, que si on laisse trop de pouvoir à l’Église dans le domaine public, elle devient naturellement une théocratie impérieuse ; et d’autre part, l’extrême inverse, que la laïcité contemporaine serait une pure émanation du christianisme, une volonté même de l’Église ; or, historiquement, il n’y a rien de plus faux.
Que dit l’Évangile ?
Le Nouveau Testament parle très peu de politique : aucune juridiction, aucune loi n’y prend place. Rien de comparable en tout cas au Deutéronome ou à la Charia. Le Christ n’était pas un législateur. Il n’est pas non plus, comme pouvait l’entendre un Maurras, un révolutionnaire qui aurait appelé à la révolte et demandé l’abrogation de toute loi. En réalité, et c’est à la fois la beauté et le mystère qui entoure l’Écriture sainte, il faut écouter ce que le Christ ne dit pas. Nous sommes loin des traités, des raisonnements, des discursivités qui ne veulent rien dire : le Christ ordonne, explique peu, il édifie, s’exprime en paroles brèves et voilées. On veut trouver du sens là où le Christ veut le donner clairement : or la Bible est un livre de mystères, et on trouve la vérité dans ses silences.
Rendez à César…
Tout au long de sa prédication, le Christ appelle les hommes à consacrer la moindre de leurs actions et le plus petit aspect de leur vie à Dieu. Une parole seulement a suffi à jeter le trouble parmi les chrétiens parce qu’ils ont cru y voir une « séparation des pouvoirs », bien anachronique [3], du spirituel et du temporel - voire une soumission au politique ! Cette parole se retrouve dans trois des Évangiles (Matthieu, XXII, 17-21 ; Marc, XII, 13-17 ; Luc, XX, 25).
Dites-nous donc ce qu’il vous semble : « Est-il permis, ou non, de payer le tribut à César ? » Jésus, connaissant leur malice, leur dit : « Hypocrites, pourquoi me tentez-vous ? Montrez-moi la monnaie du tribut. » Ils lui présentèrent un denier. Et Jésus leur dit : « De qui est cette image et cette inscription ? - De César, » lui dirent-ils. Alors Jésus leur répondit : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. »
Il faut d’abord comprendre que les pharisiens ont tenté de perdre le Christ en lui posant une telle question : ils espéraient qu’il se condamne en demandant de payer le tribut à César [4]. Mais sa réponse les confondit. Les Pères de l’Église l’ont comprise d’une façon unanime :
Saint Hilaire (can. 23.) : Il faut rendre à Dieu ce qui vient de Dieu, c’est-à-dire le corps, l’âme et la volonté. La monnaie de César c’est la pièce d’or sur laquelle son image est gravée ; la monnaie de Dieu c’est l’homme sur lequel Dieu a empreint son image. Donnez donc vos richesses à César, mais réservez pour Dieu seul la conscience que vous avez de votre innocence.
Saint Jean Chrysostome (hom. 70.) : Vous aussi, lorsque vous entendez le Seigneur déclarer qu’il faut rendre à César ce qui est à César, comprenez qu’il n’a voulu parler que de ce qui ne peut nuire en rien à la religion, car, s’il en était autrement, ce ne serait plus le tribut de César, mais le tribut du démon [5].
Lorsqu’il exige de « rendre à Dieu ce qui est à Dieu », le Christ affirme qu’aucun César, aucun pouvoir temporel ne saurait être le maître absolu des hommes, car à Dieu seul l’homme se donne tout entier. Le Christ s’oppose ainsi à toute adoration de César, et ramène le politique à ce qu’il est : une activité terrestre que le spirituel pénètre comme toute réalité. Distinction ne signifie pas séparation : c’est là toute la différence. Distingués, ces deux pouvoirs n’en restent pas moins soumis à une hiérarchie qui oblige ces deux pouvoirs à collaborer et à se compléter. Cette hiérarchie est bien entendu celle de l’âme sur le corps, car comme le Christ est la tête de l’Église, l’Église est la tête du pouvoir civil ou plutôt son guide.
Je suis Roi.
Face à Pilate, le Christ a cette sublime parole : « Mon Royaume n’est pas de ce monde » (Jean 18, 36). Beaucoup pensent trouver ici la preuve que le Christ est venu apporter une « philosophie » laïque, étrangère à toute idée de pouvoir. Saint Jean Chrysostome n’est pas de cet avis :
Notre Seigneur veut dire [par ces paroles] que sa royauté n’a pas la même origine que la royauté des princes de la terre, et qu’il tient d’en haut un pouvoir qui n’a rien d’humain, et qui est beaucoup plus grand et plus éclatant. C’est pour cela qu’il ajoute : « Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs combattraient pour que je ne fusse pas livré aux Juifs. » Il fait voir ici la faiblesse des royautés de la terre qui tirent leur force de leurs ministres et de leurs serviteurs ; mais le royaume dont l’origine est toute céleste se suffit à lui-même, et n’a besoin d’aucun appui. Si telle est donc la puissance de ce royaume, c’est de sa pleine volonté qu’il s’est lui-même livré à ses ennemis [6].
Saint Augustin, sur le même verset, a une analyse encore plus fine : le Père de l’Église insiste sur la préposition « de » et fait ainsi la distinction entre l’affirmation qui consiste à dire « Mon royaume n’est pas ici », et « Mon royaume n’est pas d’ici ». De même il dit « Mon royaume n’est pas de ce monde », et non pas « Mon royaume n’est pas dans ce monde » [7].
Après avoir prouvé que son royaume n’était pas de ce monde, Jésus ajoute : « Mais mon royaume n’est pas d’ici. » Il ne dit pas : Mon royaume n’est pas ici, car il est vraiment sur la terre jusqu’à la fin du monde ; l’ivraie s’y trouve mêlée avec le bon grain jusqu’à la moisson, et cependant il n’est pas de ce monde, parce qu’il est dans ce monde comme dans un lieu d’exil [8].
Certains chrétiens prennent prétexte d’une mauvaise interprétation de cette parole pour affirmer que la royauté du Christ n’existe pas, ou qu’elle n’a aucune incidence ni pouvoir sur la terre. Cette idée est condamnée avec insistance par Jean Chrysostome :
Les hérétiques prennent de là occasion de dire que le Sauveur est étranger à la direction du monde. Mais de ce qu’il déclare que son royaume n’est pas d’ici, il ne s’ensuit nullement que le monde ne soit point gouverné par sa providence ; ces paroles signifient donc simplement que son royaume n’est soumis ni aux lois du temps, ni aux imperfections de notre humanité [9].
Le Christ vient de démontrer que l’origine de sa royauté était surnaturelle et non naturelle, qu’elle était d’origine divine, et non d’origine humaine : « Alors Pilate lui dit : Vous êtes donc roi ? Jésus répondit : Tu le dis, je suis roi. » (Jn 18, 37) » Le Royaume de Dieu que le Christ promet et annonce n’est pas en effet une réalité lointaine, séparée du monde, étranger aux hommes ; il le dit même « tout proche » (Mc 1, 15 ; Mt 10, 7). Aux pharisiens qui lui demandent quand viendra le Royaume de Dieu, Jésus répond : « Le Royaume de Dieu ne doit pas venir de façon à être épié, et on ne dira pas : le voilà ici ! ou là. Car voilà que le Royaume de Dieu est parmi vous » (Luc 17, 20). Le Credo ne dit-il pas que « son règne n’aura pas de fin » ? L’oraison dominicale, la prière la plus parfaite puisque donnée par le Seigneur, ne dit-elle pas : « que votre règne arrive, que votre volonté soit faite sur la Terre comme au Ciel ? [10] » Il n’y a visiblement pas un domaine, fut-il la politique, qui ne devrait s’abstraire de l’obéissance qu’on doit à l’Amour de Dieu. Partout Dieu doit prévaloir ; sinon, il ne serait pas dieu.
D’une manière générale, les Écritures contiennent de nombreuses références à la royauté du Christ : dès l’annonce de sa naissance, le message de l’archange apprenant à la Vierge qu’elle engendrera un fils, qu’à ce fils le Seigneur Dieu donnera le trône de David, son père, qu’il régnera éternellement sur la maison de Jacob et que son règne n’aura point de fin (Luc 1, 32-33). Le fait que le Christ soit roi est une vérité professée aussi bien par l’Ecriture que par la Tradition [11] : la bulle Quas Primas [12] du pape Pie XI est une véritable apologie en faveur du règne social du Christ ; il y instaure une fête du Christ-Roi. Le pape y précise bien que le titre de « roi » n’est pas attribué au Christ au sens métaphorique : Roi, il L’est certainement et entièrement . La bulle est riche et elle mérite une lecture complète ; un long passage nous renseigne avec détails sur les Écritures :
https://www.lerougeetlenoir.org/contemplation/les-contemplatives/l-eglise-et-le-pouvoir-temporel-une-mise-au-point
6. Que le Christ soit Roi, ne le lisons-nous pas dans maints passages des Écritures ! C’est lui le Dominateur issu de Jacob (Nombres 34, 19), le Roi établi par le Père sur Sion, sa montagne sainte, pour recevoir en héritage les nations et étendre son domaine jusqu’aux confins de la terre (Ps. 2), le véritable Roi futur d’Israël, figuré, dans le cantique nuptial, sous les traits d’un roi très riche et très puissant, auquel s’adressent ces paroles : Votre trône, ô Dieu, est dressé pour l’éternité ; le sceptre de votre royauté est un sceptre de droiture (Ps 44, 7). […]
7. Écoutons maintenant les témoignages du Christ lui-même sur sa souveraineté. Dès que l’occasion se présente - dans son dernier discours au peuple sur les récompenses ou les châtiments réservés dans la vie éternelle aux justes ou aux coupables ; dans sa réponse au gouverneur romain, lui demandant publiquement s’il était roi ; après sa résurrection, quand il confie aux Apôtres la charge d’enseigner et de baptiser toutes les nations - il revendique le titre de roi (Mat 25, 31-40), il proclame publiquement qu’il est roi (Jn 18, 37), il déclare solennellement que toute puissance lui a été donnée au ciel et sur la terre (Mat 28, 18). Qu’entend-il par-là, sinon affirmer l’étendue de sa puissance et l’immensité de son royaume ? Dès lors, faut-il s’étonner qu’il soit appelé par saint Jean le Prince des rois de la terre (Apocalypse 1, 15) ou que, apparaissant à l’Apôtre dans des visions prophétiques, il porte écrit sur son vêtement et sur sa cuisse : Roi des rois et Seigneur des seigneurs (Apocalypse 19, 16). Le Père a, en effet, constitué le Christ héritier de toutes choses (He 1, 1) ; il faut qu’il règne jusqu’à la fin des temps, quand il mettra tous ses ennemis sous les pieds de Dieu et du Père (ICo 15, 25). De cette doctrine, commune à tous les Livres Saints, dérive naturellement cette conséquence : étant le royaume du Christ sur la terre, qui doit s’étendre à tous les hommes et tous les pays de l’univers.
A suivre !