Par Jean-Marie Elie Setbon:
Les souffrances de David furent nombreuses tout au long de sa vie, mais il resta toujours uni à Dieu. Il suffit de lire les psaumes pour voir comment il les a exprimées :«
Mon âme fond de chagrin » (Ps 119,28).
La tristesse m’arrache des larmes, je m’épuise à force de gémir, chaque nuit je pleure sur mon lit ; ma couche est trempée de mes larmes » (Ps 6,7). D’après un commentaire rabbinique, pas une année ne s’est passée sans calamité, pas un mois sans mauvaise nouvelle, pas un jour sans déboire, « malheur sur malheur ». David lui-même dit : « Combien de temps aurai-je l’âme en peine et le cœur attristé chaque jour » ? (Ps 13,3). D’après un midrash, il aurait demandé au Seigneur : « Montre-moi la porte qui mène au monde futur », et le Seigneur lui a répondu : « la douleur ».
Pour nous chrétiens c’est la Croix qui nous conduit à la vie éternelle. Au sein même de sa propre famille, David semble avoir souffert parce qu’il était le dernier d’une grande fratrie (il avait sept frères). On peut le voir quand Samuel, sur l’ordre de Dieu, vient choisir un successeur au Roi Saül parmi les fils de Jessé. David n’est pas là, il garde les troupeaux et on ne pense pas à l’appeler. Or c’est lui que Dieu à choisi car « l’homme regarde l’apparence, mais Dieu regarde le cœur » (I S 16, 1-13).
N’est-ce pas la réflexion que feront certains pharisiens à Jésus : « N’es tu pas le fils du charpentier ! » Quand David entre au service de Saül , celui-ci « se prit d’une grande affection pour lui » ( I S 16, 22). Mais ensuite il devient jaloux de lui et cherche à le tuer : « Saül brandit sa lance et dit : Je vais clouer David au mur. David l’évita par deux fois » (I S 18,11).
Combien de fois aussi, nous voyons dans la vie de Jésus que certains pharisiens voulaient le tuer ! « Comme le Seigneur était avec David et que toute la maison d’Israël l’aimait (…) Saül conçut contre lui une hostilité de tous les jours » (1S 18, 28-29). David doit prendre la fuite.
Il vivra comme un fugitif tant que Saül avec toute son armée le poursuivra pour le tuer. Aucune cachette sûre, aucune provision pour se nourrir le lendemain. La soif, la faim, le froid des nuits, la peur et l’angoisse de la mort qui peut jaillir à tout moment, voilà ce que va être la vie de David pendant des années,
voilà ce qu’il va devoir endurer. Et chaque chrétien de nos jours peut se retrouver dans cette épreuve : se cacher, avoir peur d’être tué par le dictateur et la population dans certains pays.Malgré cela, un jour où Dieu semble « avoir livré son ennemi en sa main », David, malgré les suggestions de ceux qui l’accompagnent refuse de « porter la main sur l’Oint de Yahvé » c’est-à-dire sur le Roi Saül qui a été consacré. (I S 26,8 et 23). Il compte sur Dieu pour le protéger, sûr que « sa vie comptera beaucoup au regard de Yahvé et qu’Il le délivrera de toute angoisse » (1S 26,24). Lorsque Saül et ses fils meurent au cours d’une bataille, David « pleura et se lamenta » sur eux. La mort de son ami très cher Jonathan, fils de Saül, qu’il aimait comme un frère lui est particulièrement douloureuse : « Jonathan, par ta mort, je suis navré ; j’ai le cœur serré à cause de toi, mon frère Jonathan. Tu m’étais délicieusement cher, ton amitié m’était plus merveilleuse que l’amour des femmes » (II S 1, 25-26).
Le comportement et la mort de Judas furent aussi très douloureux pour Jésus.David sera oint comme roi de Juda (II S 2,4) mais il sera d’abord rejeté par la plus grande partie du peuple d’Israël parce qu’il est le descendant d’une convertie, le petit-fils de Ruth la moabite. Sept ans il souffrira de cette situation avant la réunification du Royaume. Un jour David se laisse séduire par la beauté d’une femme, Bethsabée, et la fait appeler auprès de lui. Elle se trouve enceinte et avertit David qui donne des ordres pour que Ourie, son mari, qui était « en campagne avec l’armée, soit placé au plus fort de la mêlée afin qu’il soit frappé et qu’il meure » (II S 11). Quand le prophète Nathan est envoyé par Dieu pour lui révéler sa faute, David reconnaît aussitôt : « J’ai péché contre Yahvé ». Mais à cause de sa faute « l’enfant que la femme d’Ourie avait donné à David tomba gravement malade et malgré les supplications de David, mourut (II S 12). C’est une terrible souffrance pour lui.
David a encore à souffrir de la révolte de son fils Absalon qui veut devenir roi à sa place. David doit fuir devant son fils comme il avait fui devant le roi Saül (II S 15). Le psaume 3 exprime cette souffrance de devoir fuir à 75 ans, poursuivi par son propre fils : « Ils sont nombreux mes adversaires, nombreux à se lever contre moi ». Mais ce psaume exprime aussi combien David est toujours uni au Seigneur et ne compte que sur Lui : « A pleine voix je crie vers le Seigneur, il me répond de sa montagne sainte (…) Le Seigneur est mon soutien (…) je ne crains pas ce peuple nombreux ».
Jésus aussi vivra des événements extrêmement douloureux au sein de sa propre famille et en tant que Dieu au sein de son propre peuple. David est le personnage biblique qui incarne le plus le fait que « rien n’est acquis » quelle que soit notre position sociale. Avec tout ce qu’il a vécu, il nous montre que nous ne devons placer notre confiance qu’en Dieu, compter uniquement sur Lui.