Préparez le chemin du Seigneur !
L’évangéliste Luc est un écrivain soigneux et son but est de souligner ainsi l’importance de la mission de
Jean le Baptiste. Pour ce qui est de l’espace géographique, il s’agit, nous l’avons vu, de la Palestine et, plus précisément, de la
région du Jourdain. C’est là que
Jean le solitaire crie et dénonce.A ce propos, il ne faut pas que nous oublions, nous, hommes et femmes du XXI siècle, qu’aujourd’hui encore, cette
région-là est meurtrie par des injustices criantes (bien qu’étouffées) et par la violation des droits humains les plus élémentaires.
Aujourd’hui encore !
Que pouvons-nous faire pour ne pas être complices de l’injustice ? Vraiment rien ? Les injustices méconnues, ignorées, ce sont les pires des injustices ; elles se caractérisent par le fait qu’on n’a même pas le droit d’en signaler l’existence : personne ne doit rien savoir et ceux qui les dénoncent seront blâmés comme s’ils étaient des fous ou des imposteurs. Bienheureux ceux qui ont le courage d’aller contre-courant et de les nommer !
C’est dans ce contexte précis que Jean,
crie pour se faire entendre. Il crie : «
Préparez les chemins du Seigneur ! ». Le Seigneur vient à nous sur des chemins et il nous faut les préparer. Jean ne murmure pas, non,
il lève la voix, il crie. Il le fait, remarquons-le, au risque de sa vie… car, nous connaissons la suite de son histoire: il va payer cher ses dénonciations.
Pourquoi cette voix retentissante, envers et contre tout ?D’abord, ce cri est étrangement solitaire : il se lève
dans le désert ». Nous pouvons en effet remarquer que, tout en étant lié à Jésus par la parenté et par d’autres raisons encore, Jean non seulement est privé de la consolation d’être
avec le Christ, mais il manque aussi d’un autre soutien important :
Il a un doute
« est-ce vraiment lui, Jésus, le Christ qu’on attend ? » Doute redoutable. Il n’en est pas sûr.
Nous ne sommes jamais sûrs à l’avance de la réussite de nos projets. On dirait que sa seule tâche, sa mission est
d’anticiper celui qui doit venir: il précède
, il est, littéralement,
le précurseur de quelqu’un. C’est ainsi qu’il remplit cette étrange tâche de crier
dans le désert. Ascète solitaire, il assume jusqu’au bout ce rôle d’être en retrait pour
conduire les autres au Christ, pour les orienter vers lui. «
Il faut –dira-t-il – qu’il (le Christ) augmente et que moi je diminue ». Son style et son message non plus, ne sont pas tout-à-fait les mêmes que ceux de Jésus. Jésus choisit
d’aller vers les autres,
d’être avec les autres. Ce n’est pas le cas de Jean, qui a toutefois conscience que c’est
le Christ qui doit être annoncé,
glorifié.C’est
pour ce Christ (
qui doit arriver) que
les sentiers doivent être rendu droits, les collines abaissées,
les ravins comblés et non pas pour lui-même. Voilà la grandeur de cet homme, de ce prophète. Bel exemple de gratuité, de liberté, de service. Jean-Baptiste ne nous dit pas : «
les amis, c’est moi qui vais résoudre vos problèmes, venez à moi, laissez-moi faire !».
Non, il nous invite à la conversion, à la prise de conscience, à être responsables.
Histoire de Jean-Baptiste, histoire de Jésus… Et la nôtre ?
Nous, qui sommes ici ce matin, comment pourrions-nous «
préparer les chemins du Seigneur » ? Cette invitation peut être très concrète. Il me semble que, d’abord, cela demande de se compromettre, de s’exposer et de résister face aux injustices de tout genre ; de se dresser contre les opinions toutes faites, les promesses faciles, face aux messages de peur qui voudraient nous manipuler, nous intimider.
Nous pouvons y arriver !Car si nous sommes timides, si nous évitons d’exprimer notre avis, nous voilà alors rangés à côté de ceux qui profitent de leur force pour imposer leur vouloir, leur loi sur nous et sur ceux qui n’ont aucun droit, aucune possibilité de se faire entendre.
Préparer le chemin du Seigneur autour de nous et en nous,
Aujourd’hui, dimanche 4 décembre 2016.
Cela suppose la volonté de réfléchir et de se questionner sérieusement avant de choisir ; afin de
se convertir, pour employer le mot mêmes de Jean le Baptiste ; c’est-à-dire pour pouvoir, dans la foi, changer nos regards, nos habitudes, en vue de changer de cap.
C’est le plus important. Faire résistance face aux injustices autour de nous et savoir payer le prix de nos choix,
comme le font ceux qui dénoncent corruption et imposture, qui s’opposent à l’intolérance répandue autour d’eux ; même lorsque l’injustice semble faire l’unanimité et passer comme la procédure normale.À chacun d’entre nous de trouver –
concrètement – sa manière à lui d’aplanir les ravins du parcours, de déblayer les sols rocailleux sur les chemins de nos vies, aujourd’hui.
source: http://www.abbaye-tamie.com/communaute-tamie/homelies-2016/avent_2