Le père Felice Palamara, prêtre à Cessaniti en Calabre, a retrouvé de l'eau de javel dans les burettes au cours de la messe du samedi 24 février. Il s'agirait, selon le diocèse de Tropea-Mileto-Nicotera, d'une énième tentative d'intimidation de la mafia calabraise.
Alors qu’il célébrait la messe samedi 24 février à Cessaniti, en Calabre, le père Felice Palamara a été victime d’une tentative d’empoisonnement. Le prêtre a remarqué une odeur étrange dans le calice, s’apparentant à un liquide toxique, et a dû interrompre la messe pour signaler l’incident aux autorités. Les analyses menées par les laboratoires ont par la suite confirmé la présence d’eau de javel dans les burettes, mélangée à de l’eau.
Si l’enquête est toujours en cours, la mafia calabraise nommée ‘Ndrangheta et considérée comme l’une des plus puissantes au monde, est fortement soupçonnée, si bien que le père Felice a été placé sous surveillance policière 24 heures sur 24. Le prêtre écarte toute probabilité que ce geste malveillant provienne de ses fidèles. « Je suis sûr que cette dernière intimidation ne vient pas de mes paroissiens », assure-t-il au Corriere della Sera. « Je vis à Pannaconi depuis dix ans et j’ai toujours eu une relation d’affection mutuelle avec la population locale. »
L’évêque de Tropea-Mileto-Nicotera, Mgr Attilio Nostro, a quant à lui exprimé sa proximité avec son prêtre et dénoncé avec force les tentatives d’intimidation répétées de la mafia calabraise à son encontre. « Le diocèse traverse un moment de souffrance en raison d’actes d’intimidation (…). C’est pour cette raison que j’appelle à nouveau les communautés chrétiennes à ne pas se laisser décourager par ce langage de violence », a ainsi déclaré l’évêque. Outre cette tentative d’empoisonnement, la voiture du père Felice avait été incendiée à proximité de l’église un mois auparavant. Issu du même diocèse, le père Francesco Pontoriero a lui aussi fait l’objet de plusieurs menaces par lettres, et un chat mort a été placé sous le capot de sa voiture. Les deux prêtres ont pris à plusieurs reprises la parole pour appeler au respect du droit sur l’île.
La position de l’Église face au crime organisé
Le pape François a prononcé en 2014 l’excommunication des criminels liés aux trafics mafieux après avoir justement visité la région calabraise et dénoncé les actions de la Ndrangheta. « Ceux qui dans leur vie suivent cette voie du mal, comme le sont les mafieux, ne sont pas en communion avec Dieu : ils sont excommuniés ! », avait-il ainsi déclaré avant de citer explicitement l’organisation criminelle : « La Ndrangheta est ceci : adoration du mal et mépris du bien commun ». Moins d’un an plus tard, en mars 2015, il s’était livré à un discours d’une grande sévérité lors de sa visite dans un des quartiers les plus populaires de Naples ou sévit la Camorra : « Comme un animal mort pue, la corruption pue et une société qui est corrompue empeste », s’était-il indigné dans une allusion claire à la mafia locale. Un groupe de travail avait par ailleurs été créé en 2021 au Vatican sur le crime organisé, mais ses travaux sont demeurés en suspens et n’ont pour le moment jamais abouti, a révélé le journal La Croix en juillet 2023.
François n’est pas le seul Pape à avoir condamné les méfaits des réseaux criminels dans le monde. En 1991, saint Jean Paul II avait qualifié la mafia de « plaie sociale » alors qu’il visitait les évêques de Sicile, avant d’adresser un vibrant appel à lutter contre « la culture de la mort de la mafia », deux ans plus tard. Un appel repris en 2010 par son successeur, Benoît XVI : « Ne cédez pas aux suggestions de la Mafia, qui est une route à la mort, incompatible avec l’Évangile ».