Si Dieu a replanté pour nous un jardin en Eden, il n’est pas rare que pour complaire à ses saints, Il multiplie les grâces horticoles les plus improbables et les plus contraires aux lois ordinaires de la nature. Petit florilège des miracles du Dieu jardinier.
Au commencement, il y a un jardin, celui que Dieu plante en Eden afin d’y installer Adam et Ève pour qu’ils y vivent longtemps heureux, au sein d’une nature généreuse donnant ses fruits à l’humanité sans qu’elle ait à travailler la terre. Dans ce jardin, il y a un arbre, d’une espèce indéterminée. La Tradition en fera, à la suite des moines irlandais, un pommier, parce que dans la tradition celtique l’Autre Monde bienheureux se nomme Avallon, « l’île des Pommes ». Mais aussi parce que le pommier, en latin, s’appelle « malus », comme le mal, de sorte que le jeu de mots est décidément trop tentant.
Ce jardin, le premier couple en est chassé, coupable d’avoir cueilli et goûté le fruit défendu qui, en donnant la connaissance du Bien et du Mal, fait perdre l’innocence primordiale ; coupable, surtout, d’avoir douté de la bonté du Créateur et de sa bienveillance envers ses créatures. « Adam, où es-Tu ? », demande Dieu venu, comme chaque soir, partager l’intimité de ses enfants et ne les trouvant pas, cri d’un Père aimant, inquiet, non d’un maître irrité. Ne pas l’avoir compris est le véritable péché qui brise le divin cœur et rompt l’alliance entre l’humanité et Dieu.
Jésus replante le premier jardin
Pour rétablir cette alliance, il faudra que s’incarne la deuxième personne de la Trinité, homme et Dieu, nouvel Adam dont la lance ouvrira le cœur révélant l’immensité de l’Amour méconnu. À l’arbre d’Eden, verdoyant et fructifère devenu dispensateur d’un poison mortel, le Christ substitue la croix, arbre mort devenu instrument du pire supplice jamais imaginé par l’intelligence humaine pervertie mais par lequel Il rend la Vie.
En dépit des apparences contraires, sur ce Golgotha réputé cacher le crâne d’Adam, Jésus a replanté le premier jardin qui s’épanouira dans sa plénitude à la fin des temps, dans cette terre rachetée et recréée que prophétise le livre de l’Apocalypse, où la végétation fleurit et fructifie douze fois l’an, possédant le pouvoir de guérir.
Le parc qui abrite le tombeau de Joseph d’Arimathie, où le Sauveur a été enseveli au soir du Vendredi Saint, à l’heure où jadis le Père venait en Eden à la rencontre de sa création, en est l’image encore imparfaite. Le Ressuscité, au matin de Pâques, peut s’y promener comme chez lui, de sorte que Marie-Madeleine, éperdue, le prend justement pour le jardinier et pose la question qui répond au cri angoissé du Père, « Adam, où es-tu ? », « Où l’as-tu mis ? », réclamant le corps du Bien-Aimé disparu. Le chemin qui ramène au Paradis perdu est désormais rouvert et le Séraphin vengeur n’en ferme plus l’accès de son épée de feu.
La profusion des grâces horticoles
Dans les visions qu’elle relate dans son journal de captivité, sainte Perpétue se voit avec ses compagnons de martyre, au seuil du jardin magnifique où les attend le Bon Pasteur parmi ses brebis. C’est également à l’entrée d’un jardin fleuri que saint Cyprien et d’autres martyrs apparaissent, en 253, à ceux qui vont comme eux mourir pour le Christ, les confortant dans la foi. Et, lorsque Dominique Savio récemment décédé se montre à Jean Bosco, c’est encore à l’orée de ce jardin sublime dont il explique qu’il n’est qu’une piètre métaphore de la véritable splendeur du Ciel.
Oui, définitivement, Dieu a planté et replanté pour nous un jardin en Eden et il n’est pas surprenant que, de temps en temps, pour complaire à ses saints, Il redevienne jardinier et multiplie les grâces horticoles les plus improbables et les plus contraires aux lois ordinaires de la nature. Si certains de ces miracles relèvent de la légende pieuse, d’autres, en revanche, parfois relativement récents, sont attestés et ne sauraient être mis en doute.
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