Contre les Cathares
La première en date de ces victoires est une victoire contre les cathares. Elle eut lieu le 12 septembre 1213 à Muret. Elle fut livrée par 800 chevaliers français appelés par le pape Innocent III et menés par Simon de Montfort. Ils affrontèrent une armée de 34 000 hommes : des cathares renforcés par des espagnols conduits par Pierre II d'Aragon. Pendant toute la bataille, saint Dominique fit prier le rosaire dans l'église de Muret. La victoire fut fulgurante : 8 tués côté français et 10 000 côté espagnol et cathare, dont Pierre II. Elle permit le retour de la paix.
Contre l'Islam
Il y eut trois grandes batailles contre les musulmans. La première fut une bataille navale qui eut lieu à Lépante le 7 octobre 1571. Le début XVIe siècle avait vu une formidable expansion de l’Islam. Commencée par Soliman II le Magnifique, elle fut poursuivie par son successeur, Selim II. Le danger devint tel que le pape Pie V intervint et réussit à monter une ligue avec Philippe II d'Espagne et la République de Venise. 200 galères, 100 vaisseaux, 50 000 hommes (Italiens, Espagnols et Allemands) et 4 500 cavaliers furent réunis. Don Juan d'Autriche (24 ans), fils de Charles-Quint et frère de Philippe II, fut désigné comme chef de l’expédition. Il reçut du légat du pape le drapeau de la ligue qui portait d’un côté le Christ en croix, de l'autre les armes du pape, de l’Espagne et de Venise. Le pape fit distribuer un chapelet à chaque soldat, et durant les trois jours précédant l’appareillage, tous se confessèrent et communièrent. Le 14 août 1571, Chypre tomba aux mains des musulmans. Le pape demanda d'attaquer le plus vite possible et garantit la victoire. La flotte appareilla le 16 septembre suivant. Et le dimanche 7 octobre, premier dimanche d’octobre, jour consacré au Saint Rosaire dans toutes les confréries, elle rencontra près de Corfou la flotte turque composée de 300 vaisseaux et 120 000 hommes de troupe.
Vers 13h, à un signal, tous les chrétiens avec Don Juan tombèrent à genoux et à haute voix, suivant les demandes du pape, invoquèrent le Dieu tout Puissant et saluèrent la Très Sainte Vierge Marie. Puis ce fut la bataille. La ligue commença par perdre huit galères. Bientôt les 500 bateaux furent bord à bord et les hommes de troupe entrèrent en jeu. Deux fois le bateau de Don Juan fut repoussé. Mais Don Juan attaqua une troisième fois et emporta la victoire en tuant le chef Ali Pacha et les 500 janissaires qui le protégeaient.
Pendant ce temps, à Rome, le pape faisait prier le rosaire dans tous les couvents et collèges de Rome. Lui-même jeûna et fit une nuit de prière du 6 au 7, puis récita le rosaire toute la journée. Dans l'après-midi, il fut interrompu par son trésorier pour quelques affaires. Tout à coup, il se leva, ouvrit la fenêtre, leva les yeux vers le ciel, resta quelques instants ainsi, puis revint tout pensif vers son trésorier et lui dit : « Maintenant ce n'est plus le temps de s'occuper d'affaires, allez rendre grâce à Dieu, car notre flotte vient de se rencontrer avec la flotte turque et à cette heure, elle a remporté la victoire. » Lui-même se rendit à son petit autel pour rendre grâce. Pourtant, la nouvelle ne parvint officiellement à Rome que quinze jours plus tard, le 21 octobre, au moyen d’un courrier envoyé par Don Juan par voie terrestre.
Un tiers de la flotte turque fut coulée et la moitié fut capturée, le reste (40 navires sur 300) prit la fuite. Il y eut 40 000 tués, 8 000 prisonniers ; et 12 000 esclaves furent délivrés. Côté chrétien, il n’y eut que 15 galères coulées ; et il y eut moins de 8 00 tués et autant de blessés. Ce fut la plus grande bataille de temps modernes. Il faut remonter vingt siècles en arrière pour trouver l'équivalent : la bataille de Salamine en 480 av JC, encore que les pertes y furent moindres chez les ennemis.
En remerciement, Pie V institua le 7 octobre la fête de Notre Dame de la Victoire dans toute l'Église catholique et ajouta l’invocation "Secours de chrétiens" aux litanies de la Très Sainte Vierge. Son successeur, Grégoire XIII, institua le premier dimanche d'octobre la fête du Saint Rosaire.
Mais la puissance ottomane continuait à menacer la chrétienté. Un siècle plus tard, en 1683, 250 000 Turcs assiégèrent Vienne défendue seulement par 24 000 hommes. Des secours furent demandés. Le bienheureux Innocent XI mit toute son influence pour lever une coalition afin de venir en aide aux Autrichiens. Il ordonna des jeûnes et des prières. En de nombreux endroits, le rosaire fut récité devant le Très Saint Sacrement. Une coalition autour du roi de Pologne, Jean Sobieski, de Charles de Lorraine et des électeurs de Saxe et de Bavière, réussit à réunir 84 000 hommes, dont 25 0000 Polonais. Le 11 septembre, veille du dimanche dans l'octave de la Nativité, ils arrivèrent en vue de Vienne. La ville était près de tomber. Le 12 matin, un capucin, le père Marc d'Aviano, confesseur de l'empereur d'Autriche, célébra la messe servie par le roi de Pologne qui communia ainsi que les trente trois princes qui l'entouraient. Le religieux donna ensuite la bénédiction du pape en disant « Au nom du Saint Père, je vous déclare que la victoire est à vous si vous vous confiez à Dieu. » Tous les assistants invoquèrent alors plusieurs fois les noms de Jésus et Marie.
Peu après, Jean Sobieski donna l'ordre d'attaquer en disant : « Dieu est notre secours. » À un contre trois, la bataille fut rude. Toute la journée, le roi de Pologne tint son chapelet à la main. À la fin de la journée, la victoire fut totale. En remerciement, le pape institua la fête du Saint Nom de Marie pour toute l'Église le jour même de la bataille, fête déjà en vigueur en Espagne depuis 170 ans.
Une trentaine d’années plus tard, les Turcs firent peser de nouvelles menaces. Le prince Eugène de Savoie qui avait participé à la bataille de Vienne, réunit 64 000 hommes et le 1er juillet 1716 quitta Vienne. Le 26, il rencontra les Turcs à Peterwardein. Il se trouvait face à une armée de 200 000 hommes. Il attaqua le 5 août, jour de la fête de Notre-Dame des Neiges. Vers midi, la victoire fut totale. Le 3 octobre suivant, en remerciement, le pape Clément étendit la fête du Saint Rosaire à toute l’Église.