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La théologie de la substitution. Une note du père Sesboüé s.j.  Bannie11Bienvenue sur le Forum catholique
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La théologie de la substitution. Une note du père Sesboüé s.j.

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Message par Pilgrim Mer 8 Avr - 2:08

Les Temps modernes : de la sustitution à la satisfaction vicaire

A la fin du Moyen Âge, au XVIe siècle et au cours des temps modernes la doctrine de la satisfaction s'est progressivement dégradée, pour faire une place de plus en plus grande à l'idée de justice commutative et même vindicative. La satisfaction a été comprise comme une compensation aussi exacte que possible du péché commis, par un châtiment expiatoire. Ce schème, souvent sous-jacent au fonctionnement de la justice humaine, a été spontanément projeté dans les relations de l'homme avec Dieu, La compensation pénale comporte donc l'idée que Dieu doit être vengé en infligeant une peine qui soit à la mesure de l'offense reçue. Alors que l'idée biblique d'expiation exprimait avant tout l'intercession en acte du Christ priant de tout son être pour ses frères, certaines théologies ont voulu fonder dans l'Écriture l'idée d'une vengeance divine. 

La théologie du salut s'aventure alors sur le terrain du juridique. 

La rédemption s'accomplit selon l'idée d'un pacte "sacrificiel" ou la prestation souffrante de Jésus est exigée de manière immédiate par le Père, afin de compenser la gravité infinie du péché de l'homme. La critique contemporaine de René Girard tombe juste à l'égard de ces théologies : l'homme y accuse Dieu d'être vindicatif et violent, parce qu'il lui attribue ce que son inconscient pécheur estime nécessaire. 

Un phénomène curieux de "déconversion" historique des catégories de la rédemption se produit ainsi. Oubliant que la mort de Jésus en croix est le fait des hommes pécheurs, qui n'ont pu accueillir la sainteté du juste et l'ont exterminé avec violence, ce qui est une manière de s'en débarrasser sur lui, quitte à faire des bourreaux de Jésus le bras séculier de la justice divine. 

Déjà les Réformateurs du XVIe siècle ont fortement insisté sur la colère de Dieu qui s'abat sur le Christ substitué à la personne des pécheurs. Luther décrit avec lyrisme Jésus comme le plus grand pécheur du monde. [...] Calvin va dans le même sens, mais avec plus de sobriété dans la forme. Une catégorie nouvelle se fait jour désormais, qui est appelé à un développement considérable celle de la substitution. 

Luther, on vient de le voir, est le témoin de la substitution dans la culpabilité : le Christ devient coupable de tous les péchés du monde et meurt en coupable. Le péché est ainsi détruit en sa mort. [...] Calvin considère surtout que le Christ s'est substitué à nous dans la condamnation : il est devant le Père le grand accusé en notre nom. De nos jours, Karl Barth a développé avec puissance le thème du "juge jugé à notre place". Mais la thèse la plus courante est celle de la substitution pénale proprement dite, c'est à dire de la substitution dans le châtiment. 

Cet enseignement [Pilgrim : d'inspiration protestante, précisons-le] deviendra courant au XIXe siècle. Il véhicule l'idée, absente chez les Pères comme chez les théologiens de la grande scholastique, que la justice doit précéder la miséricorde. La satisfaction est donc un préalable au pardon. Autrement dit, l'essentiel de la rédemption ne se joue pas entre l'initiative de pardon de Dieu et la nécessaire conversion de l'homme; il se joue entre Dieu et Dieu, entre le Fils qui offre sa prestation satisfactoire et le Père qui à cause d'elle change d'attitude et passe de la colère à la bienveillance. 

Cette théologie de la substitution mérite donc plus que des réserves : elle doit être considérée comme une excroissance morbide de la théologie et non comme un élément du dogme. 

La Commission théologie internationale a prononcé à son sujet un jugement net :

"Il ne s'agit pas de penser que Dieu a puni ou condamné le Christ à notre place. C'est là une théologie erronément mise en avant par plusieurs auteurs, notamment dans la théologie réformée." 

La substitution a été souvent projetée dans les textes scripturaires au nom d'une précompréhension culturelle présente à l'esprit des exégètes et théologiens. Or les récits de la Passion ne lui font aucune place. 

Quant aux deux versets qui de Luther à nos jours seront presque constamment interprétés au sens d'une justice vindicative, ils s'inscrivent dans la perspective de l'admirable échange salutaire. Ga 3,13 joue sur le mot de malédiction. Paul raisonne à la manière des Juifs : Jésus est maudit au regard de la Loi, puisqu'il a été suspendu au gibet. Il n'est pas maudit au regard de Paul ni de Dieu. Son amour l'a poussé jusque là, jusqu'à se faire solidaire de la malédiction qui pesait sur nous, afin de nous communiquer la bénédiction d'Abraham (3, 14). De même, 2 Co 5,21 ne dit pas que Jésus est rendu pécheur à titre personnel : il est celui qui n'a pas connu le péché. L'échange qui se produit en lui est celui de notre péché et de sa justice. Ce que nous communiquons au Christ, c'est le poids de tous les effets du péché dont il nous renvoie sur la croix la vivante image. Il est "fait péché", au sens ou la métonymie exprime l'acte pour l'effet. Mais il porte ainsi le péché du monde pour l'enlever et nous communiquer sa justice. 

La substitution comporte cependant un élément de vérité. Le Christ a accompli, à travers une mort qui ne lui était pas due, une rédemption dont nous étions incapables. En ce sens, il a agit à notre place. Mais ce n'était pas pour accomplir une peine. Il vient se placer à l'endroit ou nous sommes, afin de réaliser, au nom du lien de solidarité qu'il a établi avec nous, ce que notre situation de pécheurs nous empêchait de faire.

Bernard de Sesboüé s.j., Le Dieu du salut. Histoire des dogmes, tome 1, Paris, Desclée, 1994, p. 500
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Message par Pilgrim Mer 8 Avr - 2:37

Bonjour,

Je tenais à vous partager cette page lumineuse du père de Sesboüé, au sujet de l'interprétation catholique à donner à la mort de Jésus sur la croix. Ce que le père de Sesboüé condamne (ainsi que la Commission théologique internationale), mais c'est justement la théologie d'Alfred Kuen ou celle véhiculée par le site Topchrétien. 

C'est pourquoi dans un autre fil, je disais qu'il fallait faire attention pour ne pas s'alimenter dans n'importe quoi (site sur Internet, etc.) et au seul motif que l'on s"y présenterait là-bas comme "chrétiens". 

Parce que selon le schéma d'interprétation que l'on adopte pour la mort de Jésus sur la croix, l'on n'arrive pas à présenter un Dieu opérant d'une même façon intelligible . Ce qui découle du modèle explicatif judiciaire de la théologie protestante (la théorie de la substitution : Jésus subit à ma place ce que j'aurais dû subir) en est la suppression du purgatoire, l'élimination de la nécessité des bonnes oeuvres comme moyen de sanctification personnelle (... puisque Jésus a tout fait à notre place sur la croix), la caducité de la messe en tant que sacrifice actualisé pour aujourd'hui, etc. Ce n'est pas rien. 

Le terme justice ne prendra pas la même coloration selon que l'on adopte l'idée d'un Alfred Kuen ou Karl Barth au lieu de l'idée qui sera celle de l'Église catholique.
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