Bonjour,
Les questions doctrinales sur Marie ont jalonné l'Histoire de l'Église, et toujours, encore comme aujourd'hui, il y eut inquiétude de "trop élever" Marie et de lui accorder des honneurs ou des prérogatives qui ne lui appartiennent pas.
On peut penser, par exemple, à la définition de "Marie, Mère de Dieu" du Concile d'Éphèse, ou encore aux dogmes de l'Immaculée Conception et à celui de son Assomption.
"Marie, Mère de Dieu", peut sembler, en apparence, donner à Marie une condition supérieure à celle de sa nature humaine, car, qui peut se dire Mère de Dieu?
L'affirmation que Marie fut conçue sans péché fut l'objet d'un grand débat qui dura des siècles et qui opposa longuement, entre autres, l'ordre des Dominicains, qui était opposé à une telle proposition doctrinale, à celui des Franciscains, qui y était en faveur.
Les Dominicains craignaient que la définition d'un tel Dogme place Marie à l'extérieur de l'Oeuvre de la Rédemption du Christ. En effet, celle-ci ayant été préservée du Péché originel, n'aurait alors plus eu besoin d'être sauvée par le Christ.
Le Dogme de l'Assomption continua d'inquiéter pour des raisons similaires, celui-ci pouvant sembler placer de nouveau Marie hors de sa place de créature pour en faire quelqu'un d'autre.
Nous retrouvons, avec les débats actuels sur "Marie, co-rédemptrice", des échos de ces débats théologiques passés.
Comment furent résolus les débats théologiques du passé? D'abord, sans me souvenir de la référence, on peut dire qu'habituellement, les dogmes sur Marie ne nous en disent pas tant sur elle, que sur Jésus ainsi que sur notre propre nature humaine.
Nous portons parfois grandement l'attention sur Marie, mais oublions la grande leçon doctrinale enseignée par chacun des dogmes mariaux.
Ce fut au premier chef le cas pour le dogme de "Marie, Mère de Dieu", qui ne visait pas à résoudre une question "mariale", à proprement parler, mais une question fondamentale sur la véritable nature de Jésus-Christ.
En effet, à l'époque, la doctrine d'Arius menaçait l'Église et séduisait une grande quantité d'évêques, de prêtres et de fidèles. Cette doctrine stipulait que Jésus était inférieur à son Père, qu'il n'était devenu Dieu qu'à sa Résurrection et que quoiqu'il en soit, sa nature était fondamentalement inférieure à celle du Père.
C'est ici qu'entra en jeu la définition de "Marie, Mère de Dieu", qui visait à affirmer, au contraire, que Jésus possédait deux natures, la nature humaine et la nature divine, et qu'il possédait ces deux natures pleinement.
Ainsi, lorsque Marie enfanta son Fils, Celui-ci était déjà Dieu, il était déjà, dès sa naissance, "pleinement Dieu" tout en étant pleinement Homme.
C'est pour cette raison que l'on pouvait dire de Marie qu'elle était la "Mère de Dieu", et non pas la mère d'une créature qui deviendrait éventuellement Dieu, beaucoup plus tard.
Puis, quand vint le temps de promulguer le Dogme de l'Immaculée Conception, on ne rejeta pas du revers de la main les inquiétudes de l'ordre Dominicain, qui s'inquiétait que l'on place Marie "hors de la Rédemption du Christ".
Au contraire, ce Dogme expliqua que Marie avait été préservée "par avance" de la Faute originelle en vue de l'Incarnation, et cela, par les mérites de la Passion du Seigneur.
Elle aussi, ainsi, avait été sauvée par Jésus, "par avance".
Ce Dogme, tout comme le dogme de l'Assomption de Marie qui vint ensuite, nous enseigne quelque chose de fondamental sur notre propre nature: nous avons été conçus, à l'origine, sans la faute originelle. Celle-ci n'est venue qu'après le péché de nos premiers parents.
Nous aurions pu vivre sans jamais pécher, sans jamais vivre avec l'héritage du péché originel. Marie, Chef-d'Oeuvre de Dieu, nous dévoile de quelle manière Dieu nous a pensés et voulus, à l'origine, à quoi ressemblait notre nature avant que celle-ci ne soit ternie par la Faute.
Tout comme nous serions nés sans la Faute, nous aurions été préservés de la Mort si nous n'avions point péché. La Bienheureuse Assomption de Marie nous montre de quelle façon nous serions passés de cette vie à la Vie bienheureuse du Ciel, sans l'agonie, la mort et la séparation provisoire de l'âme et du corps.
Ainsi, ces différents dogmes mariaux longuement débattus et même combattus sont riches en enseignements spirituels et nous aident à mieux connaître non seulement notre Mère du Ciel, mais également Notre-Seigneur Jésus-Christ et notre propre nature d'enfants de Dieu.
L'Esprit-Saint, au fil des siècles, a continué de faire progresser l'Église vers une connaissance toujours plus entière des trésors cachés dans la Révélation dont Elle est la protectrice et la dispensatrice.
Aujourd'hui, la réalité de "Marie, co-rédemptrice" semble être plus que jamais éclairée pour nous par le Ciel.
De nombreuses révélations privées de notre temps en font la mention, dont celles données à Maria Valtorta, que nous connaissons bien sur le forum.
Il est juste, encore une fois, de chercher la prudence afin de ne pas attribuer à Marie des attributs qui ne lui appartiennent pas. À la fois, il ne faut pas s'enfermer dans la peur et "éteindre l'Esprit", mais plutôt porter une très grande attention à ce que dit le Saint-Esprit à l'Église en notre temps.
Je crois que fondamentalement, la réalité de Marie co-rédemptrice est aussi, comme ce fut le cas pour les dogmes passés, un grand enseignement sur notre propre nature de créatures.
Marie est co-rédemptrice, mais
nous sommes nous aussi, à notre mesure, appelés à l'être.
Je me réjouis maintenant dans mes souffrances pour vous; et ce qui manque aux souffrances de Christ, je l'achève en ma chair, pour son corps, qui est l'Eglise. (Col 1:24)
Cette réalité, le fait que nous sommes appelés à "compléter dans notre chair les souffrances du Christ" pour le salut des âmes, pour l'Église, le Seigneur semble vouloir la mettre à l'avant-plan dans ces temps que nous vivons.
Plus que jamais, les "âmes victimes", comme Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, Marthe Robin, Padre Pio, Luisa Piccarreta, Maria Valtorta et tant d'autres sont mises en évidence par le Seigneur comme exemples à suivre.
Dans tant de révélations privées données par le Seigneur en notre temps, nous apprenons combien sont puissantes les grâces achetées par nos souffrances offertes avec amour au Seigneur, combien elles soutiennent le monde, sauvent les âmes, etc.
Dans une époque hédoniste où la souffrance est plus que jamais rejetée au profit des plaisirs, le Seigneur nous montre plus que jamais la voie merveilleuse de la Croix qui sauve.
Non seulement, par Sa Passion, Jésus nous sauve-t-Il pour l'éternité, mais, mystère merveilleux, nous, simples petites créatures, sommes aussi appelées à coopérer à cette grande Oeuvre du salut,
à notre mesure de créatures, par les mérites infinis de Jésus-Christ.
Si c'est à cela que nous sommes appelés, si nous sommes nous-mêmes appelés à être de petits "co-rédempteurs" en union avec Jésus, alors il en est de même pour Marie, mais à une échelle encore plus grande, si grande!
Marie fut la première à vivre pleinement cette mission de "co-rédemption", cette union de la créature aux mérites infinis de Jésus pour le salut des âmes. Étant parfaite dans ses vertus poussées jusqu'aux limites de sa nature humaine, elle a aussi été parfaite dans sa participation à la Croix, participation poussée jusqu'aux limites de ce qu'il est possible de porter pour une créature.
Marie est la première co-rédemptrice, celle qui nous a acheté d'innombrables grâces par les mérites infinis de son Fils, celle qui nous montre l'exemple et nous entraîne à sa suite dans cette grande mission de co-rédemption.
Ce titre ne change pas la nature de Marie, tout comme les autres titres qu'on lui a donnés ne l'ont pas changée, mais au contraire, ce titre nous enseigne à tous la grandeur, la beauté et la noblesse de notre propre nature et à quel point nous pouvons, avec l'aide de Dieu, élever celle-ci à des sommets insoupçonnés.
Amicalement,
Emmanuel