17 novembre 2019
Le regard d’un prêtre sur la pornographie. Marié, veuf puis prêtre, le père Michel Martin-Prével apporte un éclairage intéressant sur ce tsunami que représente la pornographie aujourd’hui.
Le père Michel Martin-Prével a d’abord été marié pendant 32 ans, il est père de trois enfants et grand-père de sept petits-enfants. Veuf, il a été ordonné prêtre il y a dix ans, au sein de la Communauté des Béatitudes. Le sujet de la pornographie l’inquiète et le concerne, en tant que grand-père et prêtre, car il reçoit de nombreuses confidences de jeunes, et détient pour eux un véritable trésor : le message de l’Église sur la sexualité. Entretien.
Aleteia : Percevez-vous une augmentation de la consommation de pornographie chez les jeunes ?
Père Michel Martin-Prével : Oui, en l’espace de quelques années, la pornographie est devenue quasi omniprésente. Les adolescents présentent de vraies faiblesses et sont des proies faciles. Désormais, dans huit confessions sur dix, je constate qu’il est question de pornographie, chez les garçons.
C’est énorme. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
D’abord la pornographie est devenue très facile d’accès, avec les outils numériques actuels. Elle est souvent prise comme un jeu, par les adolescents. Les jeunes me disent : « Mais c’était pour rigoler ! ». Et puis on veut faire comme tout le monde, montrer qu’on est dans le coup, pour ne pas être mis à l’écart, alors on regarde. Et il y a parfois ce besoin chez certains de « contaminer » les autres : ils entraînent des petits camarades pour s’auto justifier, pour vérifier que leur intérêt pour la pornographie n’est pas unique mais rejoint tout le monde. Si les autres les accompagnent, cela atténue leur sentiment de honte voire de péché. Ensuite, une fois que le jeune a regardé et ressenti une certaine excitation, peut naître une accoutumance voire une addiction par rapport à ce plaisir-là, exacerbé par la puberté. Un cercle vicieux qui entraîne beaucoup de jeunes dans son passage.
Quelles sont les répercussions ?
Le corps est considéré uniquement comme un objet. Il y a une impudicité totale chez certains adolescents. Et pour preuve cette pratique de faire des selfies de ses parties intimes et de les poster sur les réseaux sociaux. (ndlr : pratique définie par le psychiatre Serge Tisseron par « extimité »).
Outre les effets psychiques, liés au traumatisme des images violentes et dégradantes, je remarque des déséquilibres et des répercussions profondes lorsque je prépare des jeunes au mariage. La pornographie véhicule une image dégradée de la femme, qui est abaissé à un objet de jouissance. Il y a un « effet retard » sur la vie sexuelle adulte.
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Père Michel Martin-Prével